(Annales parlementaires de Belgique, session 1845-1846)
(Présidence de M. Vilain XIIII.)
(page 1179) M. Huveners procède à l'appel nominal à une heure et un quart.
M. A. Dubus donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La rédaction en est adoptée.
M. Huveners communique l'analyse des pétitions adressées à la chambre.
« Le sieur Vermeire, fabricant de cordages à Hamme, demande qu'il soit pris des mesures pour interdire aux éclusiers des canaux de Mons à Condé et de Condé à Pommerœul, de faire le commerce d'objets concernant la navigation. »
M. Dedecker. - Cette pétition se rapporte au budget des travaux publics et je demanderai en conséquence qu'elle soit déposée sur le bureau pendant cette discussion.
- Cette proposition est adoptée.
« Les sieurs d'Huart et de Mathelin, membres du conseil supérieur d'agriculture, demandent que le plâtre destiné exclusivement à l'agriculture soit exempté du droit de barrière, qu'il soit ou non indigène. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Plusieurs maîtres forgerons et maîtres poulieurs à Anvers réclament l'intervention de la chambre pour obtenir une modification au règlement de police de cette ville qui interdit à tous boutiquiers, détaillants ou industriels d'exposer à leurs portes des marchandises ou des objets de leur industrie. »
- Même renvoi.
« Le conseil communal de Meulebeke demande l'adoption de la convention de commerce conclue avec la France. »
« Même demande de l'administration communale d'Eeghem. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif à cette convention et insertion au Moniteur.
« La chambre de commerce et des fabriques de Liège demande que les droits supplémentaires sur les draps, casimirs, tissus et fils de laine français, établis par les arrêtés-lois des 7 avril 1838 et 14 juillet 1843, soient réduits successivement d'un tiers pendant trois années et que la durée de la convention de commerce avec la France soit réduite à ce terme.
- Même décision.
« Le conseil communal de Dinant demande que le chemin de fer de Luxembourg soit dirigé par la vallée des fonds de Leffe, faubourg de Dinant, dans le prolongement d'Yvoir vers Ciney. »
M. Pirson. - La pétition dont on vient de faire l'analyse et que j'ai déposée sur le bureau à l'ouverture de la séance, renferme, à propos du chemin de fer du Luxembourg, beaucoup de renseignements, statistiques et autres, qui ne se trouvent pas dans le projet de loi qui nous a été présenté.
La section centrale du chemin de fer du Luxembourg étant constituée et devant s'occuper sous peu de l'examen du projet de loi, je propose le renvoi à cette section de la pétition de l'administration communale de la ville de Dinant.
- Cette proposition est adoptée.
« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »
M. Delehaye. - Je prie la chambre de vouloir bien remarquer que la discussion générale a été close sous un ministère autre que celui qui se trouve maintenant aux affaires. Les budgets, messieurs, dans tout pays constitutionnel, impliquent toujours une question de confiance. Je ne veux pas dire que je n'ai pas confiance en M. le ministre actuel des travaux publics ; je me suis expliqué hier avec mes honorables amis sur la confiance que nous refusons à M. le ministre considéré comme homme politique, mais je puis dire que j'ai confiance en lui, comme administrateur ; et c'est précisément parce que j'ai confiance en lui que je vais répéter ce que j'ai dit précédemment...
M. le président. - Je ne puis pas vous laisser continuer, à moins que la chambre ne juge convenable de rouvrir la discussion générale.
M. Delehaye. - Je ne veux pas rentrer dans la discussion générale ; l'objet dont j'ai à parler concerne les travaux du chemin de fer.
M. le président. - Il y aura une discussion générale sur le chapitre du chemin de fer.
M. Delehaye. - Eh bien ! je différerai mes observations jusqu'à ce que nous en soyons arrivés à cette discussion. Mais je dois dire que, dans tout pays constitutionnel, chaque fois qu'un ministre demande des fonds, on est en droit du lui faire des observations et de lui poser des questions ; c'est uniquement par déférence pour M. le président etl pour la chambre que je renonce en ce moment à la parole.
M. Rodenbach. - Messieurs, dans la discussion générale j'ai fait plusieurs observations dont le ministre précédent a promis de prendre bonne note ; je me plais à croire que M. le ministre actuel aura égard à ces observations. Je ne les reproduirai pas en ce moment, mais, quoique la discussion générale ait été close sous le ministère précédent, il me semble qu'il doit nous être permis d’entamer une discussion générale sur chaque chapitre du budget.
M. le président. - C'est entendu ainsi.
M. Rodenbach. - Alors j'ajournerai mes observations ; mais je le répète, le prédécesseur de M. le ministre a promis d'avoir égard aux réclamations que j'ai faites et j'espère que ces promesses recevront leur exécution. Il s'agit de travaux tout à fait nécessaires à ma province.
- L'article premier est mis aux voix et adopté.
« Art.2.Traitement des fonctionnaires, employés et gens de service : fr. 179,170. »
- Adopté.
« Art. 3. Fournitures de bureau, impressions, achats et réparations de meubles, chauffage, éclairage, menues dépenses : fr. 22,000. »
- Adopté.
« Art. 4. Annales des travaux publics : fr. 9,000. »
- Adopté.
« Art. 5. Frais de route et de séjour du ministre, des fonctionnaires et employés de l'administration centrale : fr. 8,000. »
- Adopté.
« Art. 1er. A. Entretien ordinaire des routes, d'après les baux existants et ceux à intervenir en 1846 : fr. 1,346,236.
« B. Travaux en dehors des baux d'entretien, reconnus indispensables ou rendus nécessaires par des causes de force majeure, payement des terrains cédés à la grande voirie par suite de l'adoption de nouveaux plans d'alignement ; salaire des cantonniers et chefs terrassiers employés à la surveillance journalière et continue des travaux : fr. 300,000.
« C. Salaire des préposés aux ponts à bascule : fr. 29,820.
« D. Etudes de projets, frais de levée de plans, achats et réparations d'instruments, matériel et impressions : fr. 20,000.
« E. Travaux d'amélioration et de construction de routes : fr. 1,401,344. »
M. le président. - La discussion générale est ouverte sur ce chapitre.
M. Dubus (Albéric). - La discussion du budget des travaux publics me fournit l'occasion d'inviter M. le ministre de ce département à nous faire connaître les intentions du gouvernement à l'égard de plusieurs projets de routes pavées à construire dans la Campine et particulièrement dans l'arrondissement de Turnhout.
Ces projets sont assez nombreux. Ils doivent en grande partie leur existence aux besoins réels des localités et surtout à la conviction intime qu'ont tous ceux qui connaissent cette partie de nos provinces septentrionales, que, dans la répartition des bienfaits, ayant pour but la création de routes, elle a été trop longtemps et bien injustement oubliée. Et pourtant, messieurs, la nature semble avoir disposé le sol de la Campine pour la création facile et peu coûteuse des voies de communication. Les terrains y sont généralement très peu accidentés, leur valeur est médiocre et souvent presque nulle. Mais cette valeur augmente chaque jour dans une proportion réellement étonnante ; elle augmente surtout dans le voisinage du petit nombre de voies de communication déjà construites et qui ont eu quelquefois pour résultat de porter au quintuple le prix de certaines propriétés foncière Il est permis d'en conclure qu'il ne manque à la Campine que des communications faciles entre ses principales localités et les foyers d'activité industrielle et commerciale les plus voisins, pour lui faire atteindre un haut degré de prospérité.
Plusieurs projets de routes datent de fort longtemps et leur exécution, quoique facile et d'une utilité incontestable, a été paralysée le plus souvent par des considérations financières et surtout politiques dont la Campine anversoise a été trop souvent la victime.
Parmi ces projets, celui qui concerne la chaussée de Turnhout à Tilbourg est un des plus importants. Réclamée avec instance, depuis 20 ans, cette voie de communication rapprocherait la ville de Turnhout d'une autre ville avec laquelle elle a beaucoup de relations, dont l'industrie est très florissante, et qui n'en est séparée que par une distance de 5 lieues. L'exécution de cette roule peut être considérée comme un des principaux moyens de prospérité pour la Campine anversoise et surtout pour le chef-lieu de l'arrondissement, dont l'industrie jadis florissante a éprouvé, depuis quelques années, de si rudes atteintes. Le conseil provincial s'est, à plusieurs reprises, occupé de cette importante question, et le gouvernement a ordonné les études nécessaires à l'avant-projet de cette route qui n'a sur le territoire belge que 3 lieues de longueur, mais que le gouvernement des Pays-Bas se hâterait bien certainement de continuer jusqu'à Tilbourg même.
(page 1180) M. le ministre me répondra sans doute en invoquant les exigences de la défense militaire du pays. Messieurs, sur ce point il est permis de ne pas partager les craintes du gouvernement. Cependant je n'ai pas l'intention d'insister maintenant sur cette question. Un débat récent doit nous faire espérer que bientôt elle pourra être traitée à fond et définitivement résolue.
Mais si, à tort ou à raison, le ministère a fait opposition à la chaussée de Tilbourg, je ne pense pas qu'il puisse invoquer les mêmes motifs contre d'autres communications également utiles. Je citerai celle de Turnhout à Moll et vers le Limbourg. Les études de ce projet sont complètes, et la province ainsi que les communes ont consacré une somme de 180,000 francs à l'exécution de cette route qui serait la communication la plus directe entre la province de Limbourg et celle d'Anvers et relierait à la ville de Turnhout, chef-lieu d'arrondissement judiciaire, les importantes communes d'Arendonck, Réthy, Desschel, Moll et Baelen. Ces communes où l'industrie languit aujourd'hui, après avoir été prospère pendant longtemps, sont échelonnées sur une étendue de 5 lieues que la route doit parcourir et elles ont ensemble une population de 25,000 âmes dont 4,000 ouvriers de fabriques de drap et de bas de laine.
Relier ces localités entre elles et en même temps au chef-lieu de l'arrondissement d'une part, et d'autre part à une province avec laquelle la Campine anversoise entretient des relations importantes, tels seraient les bienfaits de ce travail, dont les frais d'exécution ne seraient pas considérables aujourd'hui que, par suite de la construction du canal de la Campine, le prix des grès est bien inférieur à ce qu'il était auparavant.
Cette question, messieurs, mérite toute la sollicitude du gouvernement. Le canal de la Campine est la source principale où toute la contrée doit puiser son bien-être matériel ; mais ce grand travail serait incomplet, il manquerait son but, si un système de routes pavées sagement combiné ne venait y rattacher et faire jouir de ses bienfaits les principales localités de la Campine.
Je demande donc à M. le ministre des travaux publics s'il est d'intention de faire exécuter la route de Moll. Je pense que jamais de plus brillantes offres de subsides, et cela sans aucune restriction, n'ont été faites par des communes pour l'obtention d'une chaussée. En présence de pareils sacrifices, il est à espérer que le gouvernement comprendra l'importance de ces belles communes, inconnues à cause de leur complet isolement. Le génie militaire ne fera certainement pas opposition à l'exécution de cette route par la raison que le tracé projeté ne facilite en aucune manière les communications entre la Belgique et la Hollande, la route étant absolument parallèle à la frontière. D'après ces considérations, je prie M. le ministre de bien vouloir faire connaître son opinion à ce sujet.
M. de Breyne. - Messieurs, j'ai eu l'honneur de faire connaître, à l'occasion de la discussion des budgets que nous avons votés, que je suis grand partisan des économies, et j'ai ajouté que je me serais opposé à toute augmentation d'allocation qui ne me paraîtrait pas suffisamment justifiée par des besoins pressants, commandés par les intérêts moraux et matériels du pays. Je crois avoir été conséquent avec mes principes, dans les différents votes que j'ai émis ; et j'espère être assez heureux pour ne jamais dévier de la règle de conduite que je me suis tracée à cet égard.
Aujourd'hui, messieurs, nous nous trouvons en face d'uue demande d'augmentation de crédit considérable. Il s'agit de majorer, d'une somme de quatre cent mille francs, le chiffre destiné à des améliorations et à des constructions de routes, pour faire procéder immédiatement à l'exécution de plusieurs nouvelles voies de communication sur différents points du royaume, afin de procurer du travail à la classe pauvre, et de rendre l'état de la partie la plus nombreuse de nos concitoyens moins douloureux, dans les circonstances pénibles que le manque de l'un des principaux aliments devait nous amener.
J'applaudis, messieurs, aux mesures prises par le gouvernement, et je volerai non seulement l'allocation demandée par motif d'humanité ; mais je déclare en outre que je suis prêt à appuyer toutes celles de même nature, qui, en rapport avec nos moyens, auront pour but d'augmenter le développement de l'agriculture, de l'industrie et du commerce. Construire de nouvelles voies de communication pour faciliter nos relations ; ouvrir de nouveaux moyens d'écoulement aux eaux qui viennent périodiquement ravager nos champs, et améliorer nos canaux de navigation, Voilà ce qui doit captiver constamment notre attention, comme les moyens les plus efficaces pour augmenter la prospérité du pays.
Nous voyons, messieurs, dans les développements du budget des travaux publics, que des mesures ont été prises pour la prompte mise en adjudication de plusieurs routes « dont l'étude et l'instruction se trouvaient complétées », et que d'autres adjudications suivront les premières.
Parmi les routes que le gouvernement nous annonce et qu'il vient de faire décréter en partie, se trouve celle de Rousbrugge à Hoogstade ; route importante sous le rapport de l'intérêt local, et dont la construction était depuis longtemps réclamée, au nom de la justice distributive, en faveur d'un canton populeux, qui se trouve dépourvu de toute voie de communication praticable avec son chef-lieu d'arrondissement judiciaire. Je remercie l'honorable membre, qui siège devant moi, du service éminent que, pendant son court passage au pouvoir, il a rendu a une partie notable de la Flandre occidentale, en présentant à la section royale le décret qui dote cette contrée d'une nouvelle voie de communication facile et assurée.
Mais, messieurs, cette route, que l'on ne peut dans l'état actuel envisager que sous le rapport de l'intérêt plus ou moins local, doit former la première section d’une route de grande communication et d'intérêt général, par suite de la construction d'une seconde section, qui déjà a reçu l’approbation du conseil provincial et « dont l'étude et l'instruction se trouvent complétées ». Je veux parler de la route qui, de la petite ville de Loo, conduira, à la chaussée de Pervyse à Dixmude.
En effet, messieurs, cette route, en traversant une des contrées les plus fertiles de la Flandre occidentale, contrée où les voies de communication sont clairsemées, et où la nature du sol rend les chemins ordinaires impraticables pendant huit mois de l'année ; cette route, dis-je, est destinée à relier entre elles trois grandes routes de l'Etat, à faciliter nos échanges et à ouvrir un nouveau débouché aux nombreux produits du pays, vers un point important de la France.
Messieurs, depuis plusieurs années, le tracé présenté par le conseil des ponts et chaussées a reçu l'approbation unanime de la commission d'enquête et l'appui du conseil provincial. Les communes offrent des subsides considérables, la province s'est engagée à y intervenir pour un tiers de la dépense, et nous attendons avec impatience que le gouvernement vienne, dans l'intérêt de la généralité, contribuer pour la part qui lui incombe dans une construction aussi importante.
Je prierai, par conséquent, M. le ministre des travaux publics de nous faire connaître l'opinion du gouvernement relativement à ce projet, et de vouloir nous dire, en même temps, si la route de Loo à la chaussée de Pervyse, se trouve comprise au nombre de celles dont l'adjudication est annoncée dans les développements présentés à l'appui des allocations demandées au budget des travaux publics.
M. de Garcia. - Je crois devoir adresser aussi à M. le ministre des travaux publics une demande relativement à une route décrétée depuis longtemps, mais dont l'exécution a toujours été différée. Cette route, messieurs, concerne les intérêts de trois grandes provinces. Je veux parler de la route qui relierait Namur à St-Trond et Hasselt.
Messieurs, déjà dans la discussion générale on a présenté des considérations à cet égard et ce n'est pas la première fois. Dans la discussion de trois budgets successifs on a demandé avec instance l'exécution de cette route à laquelle se rattachent les plus grands intérêts.
Les contrées qu'elle doit traverser, ont des produits essentiellement différents que l'on pourrait transporter de l'une à l'autre. Namur transporterait sa chaux, ses pierres, etc., vers les localités agricoles qui, à leur tour, transporteraient à Namur les produits de l'agriculture.
Les considérations, messieurs, qui ont fait, différer jusqu'à présent l'exécution de cette route, il m'est impossible de les admettre. On a toujours dit que le gouvernement étudiait la question, et qu'il n'était pas encore fixé sur la direction, mais il me semble qu'il ne faut pas trois ans pour arrêter définitivement des questions de cette nature, des questions aussi simples ; il ne faut que du bon vouloir.
Je demande donc à M. le ministre des travaux publics s'il est sur la direction de la route dont il s'agit, et s'il est décidé à la mettre en adjudication et à la faire exécuter.
M. Lesoinne. - Messieurs, l'administration des ponts et chaussées fait quelquefois faire des études par les élèves de l'école du génie établie à Gand. Ces études obligent les élèves à des déplacements souvent très coûteux ; et sur l'interpellation de M. d'Elhoungne, l'honorable M. Dechamps, alors ministre des travaux publics, avait promis qu'il serait alloué des fonds pour indemniser les élèves de ces déplacements. Je demanderai à M. le ministre actuel s'il se propose d'exécuter cette promesse.
M. Fleussu. - Ce qu'a dit tout à l'heure l'honorable M. de Garcia de la route décrétée entre Namur et Hasselt, s'applique tout à fait à une autre route, celle de Huy à Waremme. Cette route est également décrétée et décrétée depuis longtemps. Cinq tracés ont été étudiés et ce sont peut-être ces nombreuses études qui font que cette route n'a pas encore reçu un commencement d'exécution.
Si je suis bien informé, un sixième tracé est même à l'étude en ce moment. C'est là une chose extrêmement regrettable, car il s'agit d'une route fort utile, qui servirait de communication entre un pays entièrement agricole et un pays qui produit, comme le disait l'honorable M. de Garcia, de la chaux, des pierres et d'autres objets dont ces populations agricoles sont tout à fait dépourvues. Il est regrettable, je le répète, que cette route n'ait pas encore reçu un commencement d'exécution. Nous avons traversé une fort mauvaise saison pour les classes laborieuses, et le gouvernement aurait dû arrêter une direction, afin de pouvoir mettre la main à l'œuvre et soulager ainsi les malheurs de cette partie de la Hesbaye. Je prie M. le ministre de bien vouloir nous dire à laquelle de ces directions il donnera la préférence et si la route ne restera pas au milieu de tous ces tracés.
Il est évident que la route serait de la plus grande utilité ; elle relierait d'abord Huy et une partie du Condroz au chemin de fer. Toute cette partie de la province de Liège, pour arriver au chemin de fer, doit faire un très grand circuit qui serait évité au moyen de la route dont il s'agit.
Je prierai M. le ministre des travaux publics de nous donner quelques renseignements a cet égard.
M. de Tornaco. - Messieurs, l'honorable membre qui a pris la parole avant moi s'est plaint de la lenteur qu'on apporte à l'exécution des travaux décrètes. Je puis citer à cet égard un exemple encore plus remarquable que ceux qui ont été cités. Il est une route dans la province de Liège, qui a été décrétée en 1822. Cette route était d'une assez grande étendue, puisqu'elle devait partir de Tirlemont pour aller jusqu'à Stavelot, et mettre ainsi l'Allemagne en communication avec le centre de la Belgique.
En 1837 les travaux de cette route ont été repris, grâce à l’impulsion donnée par le conseil provincial de Liège ; diverses parties de la route sont aujourd'hui exécutées, mais la partie qui est restée en suspens jusqu'à (page 1181) présent a rencontré le môme obstacle qui vient d'être signalé par l'honorable M. Fleussu, c'est-à-dire la multiplicité des tracés : chaque intérêt de la province s'attachait à un tracé ; un ingénieur succédait à un ingénieur et renversait le travail de son devancier. Il en est résulté un inconvénient extrêmement grave, c'est que la route de Huy à Stavelot n'a pu s'exécuter jusqu'à présent, bien qu'elle soit d'une utilité incontestable et même d'une véritable nécessité.
Vous savez, messieurs, que le canton de Stavelot fait partie de l'arrondissement de Huy ; eh bien, les habitants de Stavelot, lorsqu'ils doivent se transporter au chef-lieu, soit pour les affaires administratives, soit pour les élections, sont obligés, quand le temps est mauvais, de prendre la route de Liége, c'est-à-dire de faire 6 ou 7 lieues de détour. Un semblable état de choses aurait dû attirer depuis longtemps l'attention du gouvernement, et cependant le gouvernement ne paraît, jusqu'à présent, incliner pour aucun des tracés qui se trouvent en présence. Je viens insister pour qu'il se prononce enfin en faveur de l'un ou de l'autre de ces tracés.
Il y a une grande raison pour le gouvernement de se décider, parce que ces tracés différents tiennent en suspens tous les travaux de la voirie vicinale ; les diverses communes, espérant chacune d'obtenir le tracé auquel elle donne la préférence, n'entreprennent aucun ouvrage de voirie vicinale dans des chemins qui deviendraient inutiles par suite de l'adoption du tracé qu'elles désirent.
Je ne demande pas que M. le ministre des travaux publics me dise immédiatement quelles sont ses intentions : il est depuis trop peu de temps à la tête de son département, mais je désire qu'il fixe son attention sérieuse sur les observations que je viens d'avoir l'honneur de lui soumettre.
M. Osy. - Messieurs, je suis loin de contester l'utilité des routes réclamées par les honorables préopinants ; mais je demanderai au gouvernement si l'on n'a pas accordé une concession provisoire pour un chemin de fer qui doit aller de Hannut à Huy, à Namur et à Manage ; et si la chambre sera saisie d'un projet de loi à cet égard ; dans l'affirmative, la direction des diverses routes dont on a parlé devra peut-être être changée.
J'aurais beaucoup d'observations à faire sur le chemin de fer dont je viens de parler ; je me réserve de les présenter, lorsque nous serons arrivés à l'article du chemin de fer.
M. Simons. - Messieurs, toutes les sections, sans en excepter aucune, ont fait un accueil favorable à la majoration de 400,000 francs qui est pétitionnée pour travaux d'amélioration et de construction de routes. La section centrale a été également unanime à cet égard. Je ne pense donc pas que dans cette assemblée cette majoration souffrira quelque difficulté : au moins, tous les orateurs qui ont été entendus sur ce point jusqu'à présent l'ont appuyée.
Si je prends la parole, messieurs, c'est uniquement pour vous présenter quelques observations sur la place qu'occupe le chiffre de cette majoration dans le budget.
Je remarque que les 400,000 francs sont portés dans la colonne des charges extraordinaires et temporaires ; je crois qu'il y a des motifs, et des motifs très plausibles, pour que cette majoration se reproduise tous les ans ; et conséquemment je pense qu'elle doit avoir sa place dans la colonne qui contient les charges ordinaires. Voici ces motifs :
Messieurs, vous savez que le produit des barrières forme un fonds spécial qui a une destination fixe, c'est-à-dire, l'amélioration de la grande voirie. Or, il est constant que par l’établissement de nos chemins de fer, ce fonds qui en principe est destiné à améliorer la grande voirie dans tout le pays, a subi une diminution considérable. J'ai sous les yeux le tableau de ce produit pendant les années 1835 à 1843, et il en résulte que le fonds, destiné exclusivement à construire des routes ordinaires, formait en moyenne une somme de plus de 2,300,000 francs. C'est donc cette dernière somme qui annuellement était destinée à la construction de nouvelles routes et à l'amélioration des routes subsistantes.
Le budget des voies et moyens constate que ces 2,300,000 fr. qui étaient le produit normal de ce fonds spécial, se trouvent maintenant réduits à 2 millions. Vous savez par tous, messieurs, que nous ne pouvons attribuer cette diminution qu'à l'existence des chemins de fer.
Je suis loin de contester l'utilité de nos chemins de fer ; au contraire, j'ai toujours appuyé par mon vote les allocations qui ont été demandées pour le système admirable des voies ferrées qui fait la gloire du pays ; aussi je suis bien éloigné de l'idée de combattre les chiffres qui sont pétitionnes de ce chef. Mais il est une considération, c'est que la grande voirie ordinaire n'intéresse pas moins l'industrie agricole et toutes les industries qui s'y rattachent.
Eh bien, messieurs, lorsqu'il s'agit d'exproprier un héritage quelconque, quelque minime qu'il soit, ou ne le fait qu'au prix d'une juste indemnité. Ici, je réclame également cette indemnité pour le fonds spécial dont il est question. Le budget prouve que ce produit a subi une diminution de 300,000 fr., et il n'est pas moins constant qu'on doit attribuer cette diminution à l'existence des chemins de fer. Il est donc de toute justice, dans l'intérêt des autres localités qui sont privées de cette admirable voie de communication, que ce fonds soit également indemnisé. Je crois donc que les 400,000 fr. qui forment réellement, à peu de chose près, la différence entre ce que produisaient les barrières avant l'existence des chemins de fer, et ce qu'elles ont produit depuis ; que ces 400,000 fr., dis-je, doivent être portés, non dans la colonne des charges extraordinaires et temporaires, mais dans celle des charges ordinaires et permanentes.
Je ne ferai pas néanmoins à cet égard une proposition formelle. Si j'ai pris la parole, messieurs, pour vous mettre sous les yeux ces considérations, c'est pour engager M. le ministre des travaux publics à porter dans les budgets subséquents la somme dont il s’agit, et à majorer conséquemment de 400,000 fr. l'allocation demandée pour les charges ordinaires et permanentes.
Messieurs, il est certain que toutes les localités qui sont maintenant privées des avantages du chemin de fer, n'ont pas seulement contribué pour leur part, dans les dépenses d'établissement du chemin de fer, mais qu'elles doivent encore contribuer annuellement, pour leur part, dans les intérêts du capital énorme que nous avons dû négocier pour faire face à cette dépense.
Eh bien, je vous le demande, faut-il que ces localités privées de cet avantage, puisqu'elles n'en jouissent jusqu'ici que d'une manière bien indirecte ; faut-il qu'elles soient encore privées d'une somme que ce même chemin de fer nous a enlevée sur un fonds spécial dont nous étions appelés à profiter ? Je ne le pense pas ; la justice exige que ce fonds reste intact, et que ce qui nous a été enlevé, par suite de la création du chemin de fer, soit restitué à ce fonds d'une manière permanente.
J'invite donc M. le ministre des travaux publics à vouloir bien, à l'avenir, porter dans le budget la majoration dont il s'agit, non comme charge extraordinaire, mais comme charge ordinaire.
En effet, il y a une foule de besoins qui se révèlent tous les jours. Vous avez déjà entendu quelques honorables membres qui ont parlé de localités, lesquelles, faute d'allocations suffisantes, ont été privées jusqu'à ce moment des communications les plus utiles. Je pourrais citer, pour ma part, une quantité de routes qui sont demandées avec beaucoup d'instance dans mon arrondissement ; il en est, parmi ces routes, qui ont été, en quelque sorte, décrétées avant notre existence politique actuelle. Je citerai, entre autres, la route de Hasselt par Bilsen vers Vellwezelt ; cette route est de la plus grande utilité ; elle a été décrétée sous le gouvernement hollandais, et sans les circonstances qui sont survenues, cette route serait construite depuis longtemps.
A l'appui de ce que j'ai l'honneur de dire, sous le rapport de l'utilité, je me permettrai, messieurs, de vous donner lecture d'un rapport fait au sein du conseil provincial relativement à cette route, ainsi qu'à une autre route, celle de Riempst sur Glons :
« 2° Route de Hasselt par Bilsen. Cette route a paru à votre commission une des plus utiles de celles qu'il reste encore à décréter. Elle reliera trois cantons au chef-lieu de la province et se verra bientôt dans le cas de servir d'affluent à deux chemins de fer à Hasselt et à Maestricht. Le principal obstacle que paraît toujours avoir rencontré la construction de cette route est la stratégie militaire du pays. Construite, elle paraît considérée, à tort ou à raison, comme exposant un peu légèrement le chef-lieu de la province à une agression du côté de la forteresse de Maestricht. C'est vers la disparition de cet obstacle que devraient surtout tendre les efforts de votre députation. Ces précautions expresses de défense ne sont plus de notre siècle, qui est essentiellement un siècle de paix. D'ailleurs depuis la nouvelle loi sur l'organisation de l'armée, qui paraît lui réserver un assez bel avenir, la Belgique doit s'habituer à compter sur le patriotisme de ses enfants. Elle doit répudier de plus en plus ce système suranné et inintelligent de laisser croupir les habitants des contrées frontières dans de mauvais chemins, et ce en vue de dangers qui ne se présenteront peut-être jamais. L'obstacle en question levé, votre commission croit que cette route plaiderait elle-même efficacement sa cause à l'égard des autres.
« 3° Route de Riempst à Glons. Cette route faciliterait les relations du canton de Maestricht sud avec Visé en la province de Liège, et remplacerait ainsi les anciennes relations de ce pays, devenues impossibles, avec son ci-devant chef-lieu, la ville de Maestricht. Elle y rendrait, plus spécialement que dans les pays sablonneux, un grand service à l'agriculture, à cause du mauvais état presque habituel des chemins vicinaux des pays à terres fortes. »
Toutes ces routes méritaient d'autant plus la bienveillante sollicitude du gouvernement que cet arrondissement, par l'ordre actuel des choses, se trouve privé de ses principales communications. Il est constant que la route de Maestricht sur Tongres, qui était une des routes les plus fréquentées du pays, se trouve maintenant tout à fait déserte, à cause que nous avons dû abandonner la ville de Maestricht. Toutes ces localités avaient ci-devant leurs débouchés vers Maestricht ; maintenant, eu égard à la ligne de douane, il est impossible qu'elles envoient leurs denrées vers cette ville importante.
Comme j'ai la parole, je prendrai la liberté de rappeler également à M. le ministre des travaux publics une promesse qui a été formellement faite à l'occasion d'une demande de crédit pour les chemins de fer. A ce sujet, on nous promettait formellement que le gouvernement n'abandonnerait pas les routes ordinaires ; qu'il se proposait de faire construire immédiatement, dans l'intérêt du trésor, des chemins qui devaient servir d'affluents au chemin de fer. Voilà maintenant six ans que cette promesse a été faite, et, jusqu'à présent, nous n’en voyons pas la réalisation. On jette à pleines mains l'argent lorsqu'il s'agit de construire des stations de peu d'utilité, mais il paraît qu'on abandonne tout à fait les localités qui sont privées de cette voie de communication. C'est ainsi que M. le ministre des travaux publics d'alors avait signalé nominativement une route de Tongres vers Waremme, qu'on appelle la Chaussée romaine ; cette route existe ; elle n'exige que quelques améliorations ; cependant, bien qu'elle doive exercer une influence notable sur les recettes du chemin de fer (cette route servira d'affluent), jusqu'à présent cette promesse est restée sans effet, et nous en attendons encore la réalisation.
Je prierai donc M. le ministre des travaux publics de vouloir bien nous donner quelques explications, d'abord sur les routes qui ont été signalées par le département des travaux publics lui-même, comme devant servir (page 1182) d'affluents au chemin de fer ; et en second lieu, sur les autres routes que j'ai eu l'honneur de signaler à son attention.
Je sais bien qu'on m'objectera, comme on le fait ordinairement, que le génie militaire s'oppose à la construction de la route de Hasselt par Bilsen à Vellwezelt. C'est ainsi que nous restons toujours dans une position telle que, tandis que partout la prospérité se développe, nous nous trouvons dans une situation déplorable. Je crois que la raison qu'on objecte n'en est pas une ; en tout cas, s'il y avait absolument impossibilité de consentir à l'exécution de cette route pour le moment, dans tous son développement, on pourrait au moins faire la première section de Hasselt à Bilsen ; là la stratégie militaire ne peut présenter aucun obstacle, car cette portion de la route ne peut exercer aucune influence nuisible sur la défense du pays.
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - L'honorable préopinant a fait observer que les 400 mille francs portés au budget, comme charge extraordinaire, pour le service des routes, devraient être compris parmi les charges ordinaires. L'honorable membre a basé cette observation principalement sur cette considération que le fonds des routes est un fonds spécial, dont tous les produits doivent être consacrés à l'établissement de routes nouvelles.
Cette observation aurait eu une valeur très grande, quand le produit de la taxe des barrières était de beaucoup supérieur à ce qu’il est aujourd’hui. Mais depuis plusieurs années, nous sommes sortis du système de fonds spécial pour les routes Depuis plusieurs années, nous avons des allocations pour les routes supérieures au produit des barrières. C'est ainsi qu'en 1845 nous avions une allocation de 2,747,000 fr. pour le service des routes, alors que les barrières donnaient au plus un produit de deux millions.
Le système du fonds spécial pour les routes doit être considéré comme abandonné. C’est dans l’intérêt des routes qu’on a agi ainsi, puisqu’on a augmenté la somme affectée à l’extension de ces communications.
Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de se prononcer sur la question de transfert des charges extraordinaires aux charges ordinaires soulevée par l'honorable préopinant.
Le gouvernement, dans les développements à l'appui du budget, a fait observer que, eu égard à la grande impulsion donnée aux travaux des routes, il serait nécessaire d'augmenter temporairement les ressources dont il dispose, que ces charges extraordinaires et temporaires devraient s'élever à un million et être réparties sur les exercices de 1846 et 1847, dans les proportions suivantes : 400 mille francs sur l'exercice 1846 et 600 mille fr. sur l'exercice 1847. Je crois qu'il n'y aurait aucune utilité, quant à présent, à sortir de ces données ; c'est surtout au budget de 1848 que la question soulevée par l'honorable membre, trouvera sa place. C'est alors seulement qu'il y aura à examiner si, pour les routes, il faut revenir au chiffre de 1845 ou adopter un chiffre plus élevé.
Cet honorable membre et plusieurs autres ont appelé l'attention du gouvernement sur différentes routes qui intéressent les localités qui les ont appelés dans cette chambre. La plupart de ces routes sont d'une incontestable utilité. Si l'exécution n'en a pas eu lieu jusqu'à présent, cela a tenu à la difficulté d'entreprendre simultanément une masse considérable de travaux. Néanmoins on doit reconnaître que depuis six ou huit mois on a fait beaucoup pour les routes, et que tout ce qui concerne l'exécution des routes a reçu une notable impulsion qui trouvera sa sanction dans la majoration que le gouvernement demande, et qui probablement sera accordée par la chambre.
L'honorable M. Dubus vous a entretenus de la route de Turnhout à Moll. cette route est d'une très grande utilité ; les tracés sont dressés, mais avant de les décréter, il faut consulter le département de la guerre qui vraisemblablement ne fera pas d'objection sérieuse à cette construction. Cependant comme elle intéresse la défense du pays, il esl indispensable que le département des travaux publics s'entende avec le département de la guerre avant de mettre la main à l'œuvre.
L'honorable M. de Breyne vous a parlé de la roule de Loo à la route de Pervyse à Dixmude. Cette route est encore d'une utilité non contestée. Je crois que les tracés sont terminés, mais je crois aussi qu'il serait difficile d'en entreprendre l'exécution avant d'avoir pourvu à celle de la route de Rousbrugge à Hoogstade, dont la route réclamée par l'honorable membre formera le prolongement.
L'honorable M. de Garcia a demandé quelles étaient les intentions du gouvernement relativement à la route de Hannut vers Saint-Trond.
Comme l'honorable membre l'a fait remorquer, le tracé a été tenu en suspens pendant longtemps ; on est enfin arrivé à une combinaison qui donnera satisfaction à tous les intérêts. Il s'agit de construire une route qui partant de Hannut se bifurque pour se diriger, d'un côté, sur Landen et de l'autre sur Saint-Trond. Les études sont achevées ; et je crois que l'exécution pourra être commencée à une époque peu éloignée.
L'honorable M. de Tornaco a appelé l'attention du gouvernement sur une lacune que présente la route de Huy à Stavelot. Comme l'a dit l'honorable membre, plusieurs traces ont été étudies. Je crois que ces études sont terminées et qu'on pourra prochainement soumettre ce travail à une enquête dans laquelle tous les intérêts pourront être entendus.
Pour la route de Huy à Waremme, réclamée par M. Fleussu, plusieurs traces ont également été faits, mais les détails ne sont pas en ce moment présents à ma mémoire ; j'examinerai cette affaire et je ferai part de mes observations à cet honorable membre quand l'occasion s'en présentera.
M. Eloy de Burdinne. - J'avais demandé la parole pour appuyer les observations de l'honorable M. Fleussu et de l’honorable M. de Garcia. Vous savez que jusqu'à présent on a donné pour excuse de ce qu'on ne faisait rien dans nos localités, qu'il était nécessaire de faire des études avant de pouvoir mettre la main à l’œuvre. Je ferai observer que parmi les chemins dont il s’agissait, il en est dont les études sont terminées depuis quatre ans ; qu’il en est même qui ont été décrétées depuis longtemps et qui ne sont pas encore commencées.
J’aime à croire que ce moyen d'éluder la construction de communications dans la Hesbaye ne sera pas continué. Cependant, si j'ai bien compris un honorable préopinant, il est venu présenter un autre moyen d'ajournement, car il vous a dit : Il s'agit de construire un chemin de fer de Landen à Namur ; c'est à dire attendez, patientez, embourbez-vous en attendant qu'une société vienne faire un chemin de fer qui remplace vos chemins empierrés.
D'abord, je ne m'étendrai pas sur la différence entre un chemin de fer et un chemin empierré, au point de vue de l'intérêt de l'agriculture.
Mais je demanderai : Comment un chemin de fer de Namur à Landen pourra-t-il satisfaire l'industrie agricole ? En aucune manière. Pour les engrais, par exemple, ou tous autres objets qui seront amenés dans nos localités ou en partiront pour aller soit à Landen soit à Anvers, il seront chargés sur un chemin de fer d'une société pour faire deux ou trois lieues, il faudra payer un chargement, un déchargement à Landen, et les recharger sur le chemin de fer de l’Etat. Vous voyez que cela ne peut être d’aucune utilité pour l’industrie agricole.
Croyez-vous, d’ailleurs, que celle construction d’un chemin de fer de Namur à Landen s’exécute ? Si vous le croyez, détrompez-vous ; les capitalistes ne sont pas assez maladroits pour donner tête baissée dans une pareille entreprise. Sans doute on a été examiner les localités, on a fait beaucoup de démarches, on a annoncé qu'on allait demander une concession, mais c'est qu'on cherchait si on ne trouverait pas de bonnes gens qui voulussent prendre des actions.
Or, vous savez où ces sociétés veulent arriver quand elles demandent des concessions. Les sociétés qui en ont obtenu en sont en ce moment fort embarrassées. C'est ainsi que nous en avons vu, il y a quelques jours, dont les actions perdaient à Londres 50 p. c. Si on perd 50 p. c. sur un chemin qui a de l'avenir, combien perdrait-on sur un chemin de Huy à Landen et de Landen à Namur ?
Ces projets ne doivent pas arrêter la construction de chemins empierrés dans nos localités. J'engage donc M. le ministre des travaux publics à ne pas prêter l'oreille à de semblables conseils. Il est temps qu'on fasse quelque chose pour un pays pour lequel on n'a rien fait encore.
Depuis sept ou huit mois, vous a dit M. le ministre des travaux publics, on a fait beaucoup de dépenses pour les routes empierrées ; mais pour nos localités, qu'a-t-on fait ? Rien ! Nos populations cependant sont dans la misère tout autant que les populations des Flandres. Dans ce moment elles sont sans travail ; il est urgent qu'on ouvre des travaux publics pour donner du travail à des gens qui en demandent pour se procurer du pain.
Il est un projet qui, d'après ce qu'a dit M. le ministre, paraît sur le point d'être mis à exécution, je veux parler du chemin de Hannut à St-Trond et à Landen.
Je fais mon compliment au ministère des travaux publics qui enfin a terminé cette grande étude qui dure depuis cinq ans. Mais je ne lui en saurai gré que quand je verrai mettre la main à l'œuvre aux travaux ; car on nous donne beaucoup d'espérances ; mais des réalités, nous n'en voyons guère.
J'espère que M. le ministre des travaux publics débutera par donner quelque chose à une partie du pays qui en est aussi digne qu'aucune autre partie du royaume.
Je ferai remarquer que la province de Liège a fait d'immenses dépenses pour la chaussée Romaine, qui, moyennant un subside qui a été voté aux différentes communes, pourra être restaurée et être, au commencement de l'été, rendue praticable de la frontière de Limbourg à la frontière de Namur. Mais la province et les communes ont fait un sacrifice de 80,000 fr. pour restaurer cet ancien monument.
J'applaudis beaucoup à cette dépense. Cette route est de première nécessité et d'une grande importance, comme aboutissant à plusieurs routes de l'Etat, et, comme l'a dit l'honorable M. Simons, au chemin de fer.
Je bornerai là mes observations, dans l'espoir que M. le ministre des travaux publics nous donnera autre chose que des espérances, qu'il nous donnera des réalités.
M. Mast de Vries, rapporteur. - Les explications que je voulais donner sur le crédit de 400,000 fr. l'ont été par M. le ministre des travaux publics. Je renonce donc à la parole.
M. de Man d’Attenrode. - Messieurs, j'ai demandé la parole afin d'appeler l'attention du gouvernement sur une voie navigable qui intéresse à un haut point une contrée dont je suis à même de connaître les besoins, sur le projet du canal de Diest à Trois-Fontaines. Ce projet a fait l'objet d'études depuis 25 ans.
Le gouvernement se disposait à le mettre en adjudication par concession de péages, quand les événements de 1830 en ont empêché la réalisation. Depuis lors, les événements qui se sont succédé ont encore mis obstacle à ce que le gouvernement s'occupât sérieusement de cet important intérêt.
Il y a deux ans, j’en ai entretenu M. le ministre des travaux publics, alors l'honorable M. Dechamps ; il m'a répondu qu'il y avait encore des études à achever, qu'il les hâterait, que dès qu'elles seraient terminées, il ferait mettre ce canal en adjudication.
Depuis, l'honorable M. de La Coste, dans la discussion générale qui a eu lieu il y a quelques semaines, a rappelé cette affaire au souvenir de l'administration.
Je demanderai à M. le ministre des travaux publics si enfin ces études sont terminées, si son projet est de mettre cette entreprise en adjudication, par concession de péages.
(page 1183) Ce que je demande n'engage en rien le trésor, il n'en coûtera quoi que ce soit au gouvernement ; nous demandons qu'il fasse une tentative qui me semble avoir des chances de succès ; si elle ne réussit pas, nous verrons alors ce qui nous restera à faire.
Je rappellerai de plus au gouvernement qu'il a fait une promesse formelle de réaliser ce projet à des députations qui sont venues l'en entretenir de la part d'une ville importante.
Je demande donc que M. le ministre des travaux publics fasse terminer ces études, si elles ne le sont déjà, ce qui m'étonnerait ; car, il y a deux ans, elles étaient à peu près achevées.
Enfin, j'insiste pour que M. le ministre des travaux publics mette le plus tôt possible ces travaux en adjudication par concession de péage.
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Les études du canal de Trois-Fontaines à Diest, sur lesquelles l'honorable M. de Man d'Attenrode vient d'appeler l'attention de la chambre, sont terminées. Nous avons même sur ce projet un travail d'ingénieur qui ne laisse absolument rien à désirer. Sous ce rapport, rien ne s'oppose donc à ce qu'on mette cette entreprise en adjudication. Mais je pense qu'elle aurait peu de chances de succès dans les circonstances présentes. Plusieurs honorables membres ont déjà fait l'observation que la plupart des actions de concessions belges sont en baisse. Evidemment un moment pareil n'est pas convenable pour l'adjudication d'une telle entreprise.
Mais il est une observation à faire, c'est que, quand on s'est livré aux études du canal de Trois-Fontaines à Diest, on n'avait pas encore accordé la concession du chemin de fer de Louvain à la Sambre, qui a un embranchement de Louvain à Diest. Il est évident que les matières pondéreuses de la Sambre arrivent par cette voie jusqu'à Diest, à des conditions très favorables, et que ce chemin de fer sera en position de faire une concurrence très sérieuse au canal dont l'honorable membre a entretenu la chambre. Dès lors le canal aura encore moins de chances de trouver des amateurs dans les circonstances présentes.
M. de La Coste. - Je ne me dissimule pas que les observations que viens de présenter M.de ministre des travaux publics méritent beaucoup d'attention dans les circonstances présentes. Cependant, je ferai observer que dans les concessions de chemin de fer, notamment dans la concession du chemin de fer de Louvain à la Sambre, il a été stipulé que cette concession n'empêcherait pas l'exécution d'une ligne concurrente. Ainsi, elle ne peut mettre obstacle à l'exécution du canal dont il s'agit.
Il est vrai qu'en ce moment le marché étranger, la bourse de Londres est surchargée d'actions de chemins de fer. Mais nous ne demandons pas qu'on nous fourrasse un concessionnaire. Nous demandons seulement qu'on cherche à en trouver un, qu'on fasse un appel, une adjudication. Rien ne s'oppose sans doute à ce qu'on fasse un essai.
Il s'agit d'un projet sanctionné depuis bien longtemps. Il y a eu une concession par adjudication, sous le gouvernement précédent. Ceci constitue des droits tout spéciaux. Comme je l'ai dit dans une occasion précédente, il y a véritablement droit acquis en faveur de la ville de Diest.
Dans une localité de la Flandre orientale, l'exécution d'un canal rencontrait de très grandes difficultés ; on est cependant parvenu à en lier l'exécution à la concession d'une ligne du chemin de fer. Dans cette partie du pays, on verra côte à côte, un canal et un chemin de fer, tous deux exécutés par concession.
Je demande qu'ici aussi le gouvernement réunisse tous ses efforts pour réaliser une promesse qu'il nous a faite solennellement.
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Evidemment la concession du chemin de fer de Louvain à la Sambre ne constitue aucun obstacle en droit à la concession du canal dont il s'agit. Les concessionnaires n'auraient à former de ce chef aucune réclamation, mais la difficulté résulte de ce que les produits seraient partagés entre les deux voies ; d'où résulteraient pour le canal des chances d'exécution moindres que précédemment. Je pense donc que les circonstances sont défavorables à la concession d'entreprises de ce genre et spécialement lorsqu'il s'agit de canaux dont les actions constituent un placement peu apprécié à l'étranger.
Ce serait un acte fâcheux pour le projet même, de l'offrir en adjudication dans un moment où il y a peu de chances de trouver des preneurs.
Quoi qu'il en soit, si une proposition sérieuse était faite au gouvernement, ce serait le meilleur indice. Il faudrait alors aviser à ce qu'il conviendrait de faire. Jusqu'à présent une proposition semblable n'a pas été faite.
M. de Renesse. - L'honorable ministre des travaux publics, n'ayant pas répondu à l'interpellation de mon honorable collègue et ami M. Simons, quant à l'exécution de la route de Hasselt vers la Meuse par Bilsen, je crois devoir lui adresser quelques observations. Cette route devait s'exécuter avant 1830 ; elle avait été décrétée par le gouvernement précédent ; les circonstances politiques ont été cause qu'elle n'a pas été exécutée depuis, le génie militaire s'était toujours opposé à son exécution. Si l'on avait suivi l'avis de ce génie, aucune route n'aurait été décrétée dans la province de Limbourg ; car ce génie militaire s'était non seulement opposé aux routes qui ont été décrétées depuis 1830 dans la Campine limbourgeoise, mais encore à la route de Tongres à Bilsen, exécutée depuis quelques années.
La contrée entre Hasselt et la Meuse vers Maestricht, a besoin d'une bonne communication, elle en manque absolument ; elle demande avec instance, depuis plusieurs années, l'exécution d'une route qui puisse améliorer ses communications, actuellement impraticables pendant une grande partie de l'année. Il me semble que le gouvernement doit prendre en considération, avant tout, les intérêts des localités qui réclament des communications. Le génie militaire ne doit pas, toujours, pouvoir s'opposer à l'exécution des routes, dont la grande utilité est reconnue et est incontestable.
Si le génie militaire s'oppose à l'exécution de la route de Hasselt vers la la Meuse, c'est parce qu'il veut empêcher toute communication facile entre la ville de Hasselt et Maestricht ; à cet égard j'aurai l'honneur d'observer que cette communication, en cas d'invasion, pourrait toujours avoir lieu par la Campine. C'est ainsi, qu'au mois de novembre 1830, lorsque le général de Saxe-Weimar a ravitaillé la ville de Maestricht, il s'est rendu directement de Bois-le-Duc, par la Campine, à Maestricht ; aussi, lorsque la route vicinale entre Hasselt et la Meuse est impraticable pendant une partie de l'année, les cultivateurs qui vont chercher de la houille, de la chaux aux dépôts établis à Smeermaes, commune de Lanaken, sont aujourd'hui obligés de faire un détour, par cette Campine, pour arriver au rivage de la Meuse.
Je prierai M. le ministre des travaux publics de vouloir me donner quelques renseignements sur la possibilité d'exécuter cette route dans un bref délai.
Je crois aussi devoir appuyer auprès de M. le ministre la pétition des conseils communaux du canton de Maestricht sud. Ce canton se trouve dans une position toute particulière ; avant 1830, les communes de ce canton pouvaient jouir de la route de Tongres à Maestricht, qui était leur plus grand débouché ; depuis l'établissement de la ligne de douanes entre la Belgique et la partie cédée du Limbourg, cette route vers Maestricht ne leur est utile que pour communiquer avec la ville de Tongres ; les habitants de ce canton réclament donc depuis plusieurs années la construction d'une route qui partirait de l'embranchement de la route de Tongres à Maestricht et se dirigerait vers la nouvelle route en construction de Tongres à Visé ; par l'établissement de cette route, les communes du canton de Maestricht sud obtiendraient une communication facile et utile à tous leurs intérêts, vers la province de Liège, d'où elles retirent la houille, la chaux, les pierres, etc. Cette route a été appuyée par le conseil provincial du Limbourg, et son exécution a été recommandée au gouvernement.
M. de Garcia. - Messieurs, si j'ai bien compris M. le ministre des travaux publics, le gouvernement serait définitivement arrêté sur la direction de la route, à raison de laquelle j'ai demandé des explications. Il ne s'agirait donc plus que de la mettre en adjudication, et j'espère que le gouvernement n'hésitera pas à le faire, puisque l'obstacle opposé jusqu'à ce jour est levé.
Messieurs, un honorable collègue, M. Lesoinne, a fait une interpellation, à M. le ministre, relativement à un subside de 6,000 fr. qui figure au budget dans le chapitre actuel, et qui est destiné aux élèves qui sortent de l'école du génie civil. Ces élèves sont envoyés sur les lieux pour apprendre l'application des principes qu'ils reçoivent à l'école. Cette application est indispensable pour obtenir de bons ingénieurs. Mais aussi ceux qui les font rendent de grands services aux ingénieurs ; car ils font en quelque sorte leur besogne pratique sous leur direction.
Messieurs, le subside alloué n'est pas considérable et c'est une raison pour qu'il reçoive une juste application. Comme l'honorable M. Lesoinne, je désire savoir si toujours il a été distribué aux jeunes gens qui, ayant fait des sacrifices considérables pour assister aux cours du génie civil, se trouvent obligés encore de supporter les frais d'application.
M. le ministre des travaux publics n'a pas répondu à l'interpellation de l'honorable M. Lesoinne, que je regarde comme parfaitement utile. Je crains que jusqu'à ce jour le subside alloué n'ait pas reçu son application, et je demande à M. le ministre le tableau des jeunes gens qui à ce titre ont reçu des frais de déplacement. Si M. le ministre ne peut le donner aujourd'hui, il pourra le produire demain. Personnellement je connais plusieurs jeunes gens sortis de l'école qui ont beaucoup travaillé, qui ont été souvent employés, et qui, quoique ne se trouvant pas dans l'aisance, n'ont jamais rien reçu.
Je voudrais, si le subside a été distribué, qu'il y eût de la justice dans la distribution.
M. d’Hoffschmidt. - Il a été distribué.
M. de Garcia. - L'honorable M. d'Hoffschmidt annonce que ce fonds a été distribué ; dans ce cas, je demande que M. le ministre nous fournisse le tableau de cette distribution, afin de l'apprécier.
L'honorable M. Simons voudrait que le subside extraordinaire de 400 mille francs qui figure au budget pour construction de routes, fût porté aux dépenses ordinaires.
Quant à moi, je ne partage pas cette opinion ; je crois, avec le gouvernement, qu'il doit figurer comme dépense extraordinaire. D'ailleurs, qu'il figure dans les dépenses ordinaires ou dans les dépenses extraordinaires, peu importe ; la chambre en reconnaîtra toujours l'utilité lorsqu'elle sera établie. Mais on ne peut faire figurer dans des dépenses normales un subside qui, dans certaines circonstances, pourrait n'être pas aussi nécessaire qu'aujourd'hui.
Voilà, messieurs, les seules considérations qui j'avais à présenter. Je voulais surtout appeler l'attention de M. le ministre sur l'emploi du subside destiné aux élèves de l'école du génie civil qui font des études d'application sur les lieux.
M. Vanden Eynde. - Messieurs, j'ai à ajouter quelques observations à celles qu'ont faites l'honorable M. de La Coste et l'honorable M. de Man sur la construction du canal de Vilvorde à Diest.
M. le ministre des travaux publics pense que le moment n’est pas favorable pour mettre en adjudication ce canal parce que les actions des chemins de fer qui ont été concédés en Belgique ne sont pas en faveur sur le marché de Londres. Dans mon opinion, cette considération ne peut pas (page 1184) entraver cette mise en adjudication du canal. Car, il pourrait se présenter pour cette construction une société belge qui émettrait ses actions sur le marché belge. Il est probable et il est même à désirer que pour un pareil travail, si la société qui doit l'exécuter est nationale, le gouvernement ne défende pas l'émission des actions sur le marché belge.
La circonstance de la défaveur dont sont frappées les concessions de chemins de fer accordées à des sociétés anglaises n'est donc pas suffisante pour empêcher la mise en adjudication que nous réclamons.
Mais il est un autre motif qui devrait déterminer le département des travaux publics à mettre ce canal en adjudication. au moins par section. Ainsi une section est indispensable alors même qu'un chemin de fer serait construit de Louvain par la vallée du Demer et de.....vers Diest.
C'est l'embranchement de Campenhout à Wechter. Lors même que la construction de la section de Wechter à Diest serait ajournée, cela n'empêcherait pas de mettre l'embranchement de Campenhout à Wechter en adjudication. Au moyen de cet embranchement, messieurs, le Demer serait relié au canal de Louvain, au canal de Bruxelles et correspondrait facilement avec le canal de Charleroy par lequel les charbons sont transportés dans toute la vallée du Demer.
J'espère donc que le gouvernement voudra bien mettre en adjudication le canal de Vilvorde à Diest, et spécialement la section indispensable, qui devra être construite en toutes circonstances, celle de Campenhout à Wechter.
Comme j'ai la parole, je demanderai à M. le ministre des travaux publics, puisqu'on a parlé d'une route pavée de Hannut vers Landen, quelles sont les dispositions et les intentions du gouvernement relativement à la route qui conduit par Léau vers Haelen.
Cette route, messieurs, doit traverser un pays auquel il est nécessaire que le gouvernement se montre favorable en fait de construction de routes. C'est un pays qui souffre, aussi bien que toute la vallée du Demer, des inondations de cette dernière rivière ; car les eaux de cette contrée doivent se décharger vers la vallée du Demer, et chaque année, à cause de la difficulté de l'écoulement de ces eaux, une grande partie du canton de Leau est submergée, ce qui rend les routes impraticables et met les cultivateurs dans l'impossibilité de transporter leurs grains vers le marché de Diest, vers celui de Hasselt qui est très important pour les céréales, et même vers les marchés de St-Trond et de Tirlemont.
Les trois communes principales que cette chaussée doit traverser en partant de Leau et se dirigeant vers Haelen, sont d'abord la ville de Leau et Geets-Betz. Ces trois communes ont fait des fonds assez considérables pour arriver à la construction de la route.
Ainsi la ville de Leau a voté 8 centimes additionnels pendant dix ans à partir de 1846, sur la contribution foncière et la contribution personnelle. La commune de.... a voté 7 centimes additionnels pendant douze ans sur le foncier. Celle de Geets-Betz a voté 10 centimes additionnels pendant dix ans sur le foncier et 5 centimes additionnels sur le personnel.
Je crois que de pareils sacrifices faits par des communes qui se trouvent dans un état vraiment pitoyable, sous le rapport des communications, devraient déterminer le gouvernement et la province à leur prêter leur appui.
Je désire donc que M. le ministre des travaux publics veuille bien me dire quelles sont les intentions du gouvernement relativement à la construction de cette route de Leau vers Haelen.
Je demanderai, par la même occasion, que M. le ministre des travaux publics veuille bien s'expliquer quant à la construction de la route d'Aerschot vers Westerloo, et nous dire si le ministère des travaux publics est disposé à exécuter l’arrêté royal qui a décrété cette route, nonobstant l’opposition du département de la guerre. Je désire que M. le ministre actuel veuille bien nous dire si telles sont aussi ses intentions.
M. Lejeune. - Messieurs, dans une séance précédente je me suis plaint de la lenteur déplorable avec laquelle s'exécutait la loi du 26 juin 1842, décrétant la construction du canal de Zelzaete. En effet, messieurs, on n'a qu'à rapprocher les dates pour se convaincre de cette lenteur. La loi a été portée le 26 juin 1842 : il y a donc bientôt quatre ans. On aurait pu soutenir que deux années suffisaient pour achever les travaux. En prenant la première année pour les travaux préparatoires, à la fin de 1844 tout le canal aurait pu être achevé. On a donc perdu deux ans et pendant ces deux ans les dégâts, les ruines causés par les inondations ont été considérables.
Je n'insisterai plus sur ce point ; les honorables députés de Bruges pourraient d'ailleurs donner à cet égard des renseignements plus complets.
J'ai pris la parole pour rappeler à M. le ministre actuel que l'honorable M. d'Hoffschmidt, son prédécesseur, avait, sinon pris l'engagement, au moins fait la promesse, de faire achever complétement dans le courant de l'année tous les travaux de la première section, y compris l'écluse de mer et le chenal, et de commencer les travaux de la seconde section.
Je dois faire remarquer de nouveau que cette seconde section est tout aussi indispensable que la première pour remplacer le Zwyn qui de jour en jour devient plus insuffisant, plus inefficace. Il faut, pour remplacer complétement le Zwyn, que le canal soit achevé jusqu'à St-Laurent.
D'après les explications qui nous ont été données par l'honorable M. d'Hoffschmidt dans la discussion générale, en outre des travaux achevés, la première section devait coûter encore 1,117,700 fr., savoir :
Travaux à effectuer de la mer en avant de l'écluse 539.700 fr., creusement à la profondeur définitive, de la première section, 570,000 fr.
Je pense que les travaux du chenal, les travaux à exécuter à la mer, en avant de l'écluse, ont déjà été adjugés. Je ne sais pas si l'adjudication a été approuvée, je n'en connais pas le chiffre, mais il est probable qu'il y a eu diminution sur le chiffre qu'on nous a indiqué dans la séance du 24 mars.
J'appelle l'attention de M. le ministre des travaux publics sur la nécessité d'avoir de nouveaux fonds pour pouvoir continuer les travaux. Tous les fonds accordés jusqu'à ce jour, ont été absorbés ; le gouvernement ne dispose pas des sommes nécessaires pour commencer les travaux déjà adjugés. Il faut donc que M. le ministre demande un crédit à la chambre, et je l'engage de nouveau à comprendre dans cette demande de crédit, non seulement toutes les sommes nécessaires pour l'achèvement des travaux de la première section, mais encore une certaine somme pour commencer les travaux de la deuxième section pendant l'année courante. Si les travaux ne pouvaient être entièrement achevés cette année, ce serait une véritable calamité. Si depuis deux ans la première section du canal avait pu être achevée, elle aurait prévenu des dégâts très considérables.
Je voudrais que M. le ministre nous donnât quelques explications sur cette affaire et qu'il nous dît si depuis plus d'un mois qu'il en a été question,, elle n'a pas acquis un certain degré d'avancement.
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Messieurs, pour la section du canal de Zelzaete actuellement en cours d'exécution, il reste trois choses à faire : d'abord, le chenal à la mer, en avant de l'écluse ; en second lieu, l'achèvement de l'écluse, et enfin le creusement du canal à sa profondeur normale.
Les travaux du chenal à la mer ont été adjugés récemment. L'adjudication s'élève à 299.000 francs ; il y a donc sur cette partie du travail une économie d'environ 200,000 francs. L'adjudication a été approuvée et je pense qu'en ce moment les travaux sont en cours d'exécution. Les recommandations les plus pressantes ont été faites pour la rapide exécution du travail et j'ai tout lieu de croire qu'il sera terminé vers l'hiver.
L'écluse approche également de son achèvement ; l'achèvement de l'écluse précédera même l'achèvement du chenal.
Aussitôt que le chenal et l'écluse seront terminés, le canal pourra servir à l'évacuation des eaux sans même attendre le creusement du canal à sa profondeur définitive.
On peut donc regarder comme entièrement probable que vers la fin de cette année le canal de Zelzaete commencera à satisfaire à sa destination.
L'honorable membre qui vient de se rasseoir a appelé l'attention du gouvernement et de la chambre sur la deuxième section du canal, sur la section de Dam à St-Laurent. Cette partie du canal est actuellement à l'étude et je pense que le travail de l'ingénieur en chef de la Flandre orientale doit être très avancé. Toutefois il serait assez difficile de demander un crédit pour cette deuxième section du canal dans la session actuelle ; mais toutes les dispositions sont prises pour que les crédits nécessaires aux travaux du chenal soient votés encore avant la clôture de cette session.
Je répondrai maintenant à quelques autres honorables préopinants.
L'honorable M.de Renesse a demandé quelle était la cause des obstacles que rencontre la route de Hasselt à Maestricht par Bilsen. Les obstacles se trouvent dans l'opposition du génie militaire qui subsiste encore dans toute sa force et en présence desquelles le département des travaux publics ne peut pas passer outre. Peut-être les vues du département de la guerre se modifieront-elles d'ici à un certain temps.
Les honorables MM. de Garcia et Lesoinne ont demandé des explications sur les subsides accordés aux élèves de l'école de Gand lorsqu'ils sont chargés d'aller faire des études sur le terrain. Ces subsides s’accordent, ainsi que l'a annoncé mon honorable prédécesseur ; mais il est possible que par suite de l’insuffisance des fonds, un ou deux de ces élèves n'aient pas pu recevoir l'indemnité à laquelle ils pouvaient former quelque prétention. Toujours est-il que le principe de ces indemnités n'est pas abandonné. Je pourrai, du reste, communiquer aux honorables membres le tableau des subsides tels qu'ils ont été accordés.
L'honorable M. Vanden Eynde a demandé quelle était l'intention du gouvernement relativement au prolongement de la route de Dormael à Leau vers Haelen. Cette affaire a été examinée et les ingénieurs des ponts et chaussées ont trouvé que le prolongement dont il s'agit a presque exclusivement le caractère d'une communication locale, et que dès lors la dépense devrait être imputée sur les fonds alloués au département de l'intérieur pour la voirie vicinale, plutôt que sur les fonds du département des travaux publics.
L'honorable M. Vanden Eynde a encore demandé des explications au sujet de l'établissement de la route d'Aerschot vers Westerloo. Cette affaire est encore en instance, et je ne désespère pas d'arriver à un résultat qui réponde à l'attente de l'honorable membre.
M. d’Hoffschmidt. - J'ai demandé la parole lorsque l'honorable M. de Garcia a appelé l'attention de la chambre sur le crédit de 6,000 fr. porté au budget pour les élèves de l'école du génie civil et pour les frais du jury d'examen. M. le ministre des travaux publics a déjà répondu à l'interpellation de l'honorable M. de Garcia. Il a dit à la chambre que ce crédit était distribué. Cette somme se répartit, messieurs, d'après le rapport des ingénieurs en chef et par conséquent je dois croire qu'ils sont accordés aux plus dignes. Comme l'a fort bien fait observer M. le ministre des travaux publics, on ne peut pas les accorder à tous les élèves, attendu que la somme est insuffisante.
Elle n'est, en effet, que de 6,000 fr., dont une partie est déjà absorbée par les frais du jury d'examen ; dès lors, ce qui reste pour les élèves est fort peu de chose, et s'il entrait dans l'intention de la chambre que tous les (page 1185) élèves reçussent une rétribution de cette nature, et que cette rétribution fût plus élevée, il n'y a qu'un moyen d'arriver à ce résultat, c'est d'augmenter l'allocation.
Messieurs, il y a eu fort peu d'observations relativement au crédit extraordinaire de 400,000 fr., porté au budget pour les routes. Ce crédit n'a été combattu par personne. Un honorable député du Limbourg demande même qu'il soit porté dans la colonne des crédits ordinaires.
Je crois, messieurs, que la chose n'est pas nécessaire ; au budget de l'année prochaine il y aura encore, ainsi que le portent les développements du budget, une somme de 600,000 fr. portée dans les crédits extraordinaires ; ce sera donc an budget de 1848 seulement, que la chambre aura à examiner si elle veut accorder encore la même somme pour l'exécution de routes nouvelles.
On a souvent réclamé la majoration de ce crédit parce que l'on demande partout l'exécution de routes extrêmement utiles ; mais, messieurs, je ferai observer qu'il y a eu aussi cette année une diminution très importante dans les frais d'entretien des routes. Cette diminution est de plus de 400,000 fr. et elle a permis au moyen des 400,000 fr. demandes pour cette année, et des 600,000 fr. qui seront portés au budget de l'année prochaine, de décréter l'exécution de routes nouvelles pour une somme de 1,800,000 fr.
Du reste, messieurs, je suis aussi d'avis que nos efforts ne doivent point se ralentir en ce qui concerne l'exécution des voies de communication. Si l’on veut encore faire quelques sacrifices, d'ici à un petit nombre d'années, le pays sera doté d'un réseau de routes qui laissera peu de chose à désirer, et si ces routes sont ensuite reliées entre elle par de bons chemins vicinaux, la Belgique ne pourra que se féliciter de son magnifique système de communications.
En France, messieurs, on fait aussi de grands sacrifices pour l'exécution des routes royales. Il y a chaque année au budget de l'Etat une somme de 26 à 27 millions, destinée à cet objet, indépendamment d'un crédit extraordinaire de 84 millions voté en 1837 ou 1838 et qui a été spécialement affecté à la construction de routes royales.
Ainsi, messieurs, je crois que le pays ne doit pas regretter les sacrifices qui lui sont demandés pour l'établissement de routes ; en persévérant dans la voie où nous sommes entrés à cet égard, nous parviendrons, comme je le disais tout à l'heure, à doter le pays d'un système de communications qui ne laissera rien à désirer.
M. de Corswarem. - Messieurs, je crois qu'il aurait mieux valu, pour l'ordre de la discussion, parler séparément des routes et des canaux. Mais puisque la chambre s'est engagée dans cette voie, je m'occuperai également des deux objets.
Mes honorables amis, M. le comte de Renesse et M. Simons, ont parlé d'une route projetée depuis longtemps et qui était même sur le point d'être mise en exécution au moment de la révolution, c'est-à-dire la route de Hasselt dans la direction de Maestricht. Les événements politiques sont d'abord venus mettre obstacle à la construction de cette route, et plus tard elle a été empêchée par l’opposition du génie militaire.
Si, messieurs, on voulait la construire, comme elle avait été primitivement projetée, de Hasselt à Maestricht, je comprendrais alors l'opposition du génie militaire ; mais il suffirait pour le moment que la route fût construite de Hasselt jusqu'à Bilsen ; alors elle traverserait déjà une localité très importante, celle de Diepenbeek, qui est une commune de 3,000 âmes, et où se fait un très grand commerce de bois et de bières. Un peu plus loin, ou rencontre une route qui est déjà construite depuis plusieurs années et qui va de Bilsen à Tongres. Cet embranchement de Bilsen à Tongres est aujourd'hui une impasse, la route de Hasselt à Bilsen la tirera de cette position et en fera une route qui en rencontre une autre allant plus loin.
Cette route acquiert aujourd'hui un plus haut degré d'utilité qu'elle n'en présentait antérieurement, parce qu'elle sera un affluent des plus considérables au chemin de fer en construction ; elle va mettre en communication avec le chemin de fer, non seulement l'importante commune de Diepenbeek et le canton de Bilsen tout entier, mais encore tous les environs de Maestricht. Au moyen de cette route, le chemin de fer sera rapproché, au moins, de deux lieues de Maestricht, et ce rapprochement de distance engagera beaucoup plus d'habitants de Maestricht, localité importante de 20,000 âmes, à prendre le chemin de fer.
Je crois donc que, malgré l'opposition du génie militaire, on pourrait sans inconvénient construire seulement la partie de la route qui est comprise entre Bilsen et Hasselt ; ce serait là, non une œuvre tronquée, mais une œuvre entière et parfaite qui aurait son prolongement jusqu'à Tongres, et de Tongres à Liège, ainsi que dans plusieurs autres directions.
Je me félicite avec mes honorables amis MM. de Garcia et Eloy de Burdinne de l'achèvement des études de la route de Hannut vers Saint-Trond. Je me félicite également de ce que M. le ministre des travaux publics a adopté le tracé de Gingelom par Wezeren, se dirigeant de Louvain vers Saint-Trond. Je me borne pour le moment à inviter M. le ministre des travaux publics à faire tout ce qui dépendra de lui, pour que l'on puisse procéder prochainement à la construction de cette route.
Les honorables députés de l’arrondissement de Louvain ont tous entretenu la chambre d'un canal, devant partir de Vilvorde pour aboutir au Donner ; mais ils en ont tous parlé comme si ce canal ne devait pas dépasser les limites de leur district. Cependant, d'après le projet primitif, le canal ne devait pas s'arrêter là. M. Teichmann en a fait le plan en 1827 ; d’après ce plan, la première section devait contenir deux embranchements, l'un parlant de Werchter, l'autre parlant de Vilvorde : « Tous les deux, disait M. Teichmann, pour mettre le Demer en communication avec le Rupel par le canal de Willebroeck et celui de Louvain.» La deuxième section devait comprendre la partie entre les deux embranchements et la ville de Diest ; la troisième section devait comprendre la partie entre la ville de Diest et celle de Hasselt.
Je dirai que la construction de cette troisième section est devenue aujourd'hui la plus urgente : non seulement elle a un intérêt commercial et agricole, mais elle est devenue indispensable pour l'écoulement des eaux de la vallée du Demer. D'après l'expérience acquise jusqu'à présent, il est constant que l'élargissement ou l'approfondissement de l'ancien lit du Demer ne suffit plus à l'écoulement des eaux de la vallée, en amont de Diest. On a défriché, tant dans la Campine que dans le Hageland, et ces défrichements amènent dans le Demer une telle masse d'eaux, que le lit actuel de cette rivière, eût-il une dimension double, ne suffirait plus à l'écoulement de ces eaux. Il y a d'autres obstacles encore qui s'opposent à cet écoulement ; ce sont l'ancienne écluse de Diest, les nouvelles écluses de cette ville, les fortifications érigées autour de la même place.
Je prie donc M. le ministre des travaux publics, de vouloir bien ne pas perdre de vue que le canal projeté ne s'arrêtait pas à Diest, mais qu'il devait aller au-delà ; et que c'est la partie de ce canal, en amont de Diest, qui est devenue la plus urgente. Du reste, je me joins à mes honorables collègues pour demander qu'on commence les travaux en aval ; il faut nécessairement commencer par les sections par où les eaux doivent s'écouler, avant d'exécuter celles par où les eaux doivent arriver.
M. de Garcia. - Messieurs, je remercie M. le ministre des travaux publics et l'honorable M. d Hoffschmidt des explications qu'ils ont bien voulu me donner relativement à la distribution du subside qui figure, au budget, pour indemniser les élèves de l'école du génie civil qui vont faire des études sur le terrain. Cependant je tiens toujours à voir l'état de répartition de ce subside, état que du reste M. le ministre m'a promis. Je désirerais également que M. le ministre me communiquât le tableau des élèves qui sont envoyés annuellement sur les travaux de l'Etat, pour y faire des études pratiques.
D'après l'honorable M. d'Hoffschmidt, le crédit serait insuffisant, pour indemniser convenablement les élèves des dépenses que ce déplacement leur occasionne ; s'il en est ainsi, je n'hésiterai pas à proposer une majoration, quand nous serons arrivés à cet article. Que cela n'effraye pas la chambre, il ne résultera de mon amendement aucune augmentation de dépense.
Nous voyons dans le budget des travaux publics un tableau qui indique le chiffre total des indemnités accordées, indépendamment des traitements, aux ingénieurs des ponts et chaussées et à ceux du chemin de fer ; ce chiffre est de 134,500 francs. Quand on indemnise aussi largement des ingénieurs qui ont des traitements plus ou moins élevés, on ne doit pas se montrer si parcimonieux à l'égard des jeunes gens qui font des études sérieuses et ardues, pour devenir plus tard l'honneur du pays.
Vous ne l'ignorez pas, messieurs, notre corps des ponts et chaussées jouit de tant de réputation, que tous les Etats de l'Europe demandent à la Belgique des ingénieurs ; nous devons donc faire tout ce qui dépend de nous pour favoriser des études qui amènent des résultats si honorables pour le pays.
Quand l'article du budget, concernant les élèves de l'école du génie civil sera mis en discussion, je proposerai d'augmenter ce crédit de 6 à 10,000 fr., à prélever sur les sommes destinées à être distribuées à titre d'indemnités aux ingénieurs de l'Etat ; une mesure semblable me paraît justifiée autant par les principes de justice et d'équité, que par le désir de protéger des études sérieuses et essentiellement utiles ; car, je le répète, les fonctionnaires qui touchent déjà de gros traitements, peuvent sans inconvénient avoir des indemnités moins fortes ; il sera plus juste et plus utile de les répartir en partie sur une jeunesse studieuse, qui absorbe souvent tout son patrimoine en frais d'études théoriques et pratiques.
M. Veydt. - Messieurs, l'honorable M. d'Hoffschmidt a fait remarquer qu'il y avait sur l'entretien des routes une économie de plus de 400,000 francs. L'honorable rapporteur de la section centrale a également signalé cette économie avec éloge. Il résulte, en outre, d'une des explicitions produites à l'appui du budget que l'économie peut même être portée à 438,000, fr., puisqu'il est pourvu en même temps à l'entretien de six routes nouvelles.
Cette économie est attribuée d'abord à ce que les routes sont moins fréquentées ; par conséquent elles se détériorent moins. Une autre cause d'économie, c'est que l'administration contracte elle-même des marchés pour la fourniture des matériaux, et qu'elle emploie des ouvriers à la journée pour les mettre en œuvre. Je demanderai si ces marchés ont lieu avec publicité et concurrence. La libre concurrence, au moyen de cahiers des charges bien rédigés, au moyen d'une surveillance sévère, rigoureuse dans les réceptions, me paraît être, en matière de travaux publics, le mode qui offre à la fois le plus de garantie et le plus d'avantages. Pour ma part, je verrais avec regret que l'on s'en écartât. L'économie, qui pourrait en résulter, ne serait que temporaire, et quand elle ne se réaliserait plus, faute de concurrence, nous n'aurions en partage que les inconvénients nombreux d'un système tout à fait vicieux, dans une grande administration. Je désire en conséquence savoir quelle est la marche que le département des travaux publics se propose de suivre.
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Messieurs, l'observation de l'honorable préopinant mérite évidemment une attention sérieuse de la part de l’administration. Je pense, comme l'honorable membre, que les marchés de matériaux destinés à l’entretien des routes devraient en général, et lorsqu'ils ont quelque importance, faire l'objet d'adjudications. Avec publicité et concurrence. Ce mode de contrat ne présente aucune (page 1186) difficulté, lorsqu'il s'applique à des matériaux, du genre de ceux qu'on emploie à l'entretien des routes ; il est, en outre, le plus favorable aux intérêts du trésor, et il est en même temps le moins compromettant pour l'administration.
Beaucoup de considérations se réunissent donc pour vouloir que cette marche soit constamment suivie.
La loi de comptabilité générale que la chambre a déjà votée, trace à cet égard des règles qui me paraissent dès aujourd'hui être considérées comme types, bien que les dispositions de cette loi n'aient pas encore force obligatoire. C'est donc dans cet ordre d'idées que je compte conduire l'entretien en régie des routes.
Les travaux exécutés jusqu'à présent se sont appliqués assez souvent à des quantités de matériaux assez minimes, disséminées sur de grandes étendues de route, et qui, par cela même, n'étaient pas toujours susceptibles de faire l'objet de marchés par adjudication. Quoi qu'il en soit, c'est un point sur lequel je porterai particulièrement mon attention, afin d'amener autant que possible toutes les entreprises dans des termes non seulement réguliers, mais complétement inattaquables quant à la forme.
M. Lys. - Messieurs, je viens vous dire quelques mots relativement à l'achèvement du redressement de la route de Liège à Stavelot, dans la traverse de la ville de Spa. Ce redressement a été ordonné sous le gouvernement précédent, et la moitié en est achevée depuis longtemps ; la partie restante n'a été suspendue que par suite de la révolution.
Ce redressement tend à prévenir de grands malheurs. Il y a dans l'intérieur de la ville de Spa une descente très forte où les voituriers ne peuvent rester maîtres de leurs chevaux, lorsqu'ils transportent de lourdes charges.
Il y a deux ans, un malheureux voiturier, victime de son dévouement, a eu les deux jambes écrasées, en sauvant un enfant qui, sans lui, aurait été infailliblement broyé sous le chariot. (Interruption). Je le répète, le redressement dont je parle a été ordonné sous le roi Guillaume, la moitié en est faite ; il ne s'agit aujourd'hui que de parachever ce travail.
Je recommanderai donc à M. le ministre des travaux publics de porter son attention sur ces réclamations. Je viens aussi appuyer l'observation présentée par MM. Lesoinne et de Garcia. J'ajouterai, à ce qu'ils ont dit de l'école du génie civil de Gand, que je connais un jeune homme qui, après y avoir commencé ses études, a dû renoncer à cette carrière, parce qu'il n'avait pas le moyen de les continuer.
M. Vanden Eynde. - J'ai demandé la parole pour répondre quelques mots à l'honorable M. de Corswarem. Il a semblé nous reprocher de nous être bornés à demander la construction du canal de Vilvorde à Diest. Vous le savez, il n'a été question, dans la discussion du budget des travaux publics, que du canal de Vilvorde à Diest. C’est à une époque bien antérieure que remonte le projet de M... ; il date, si je ne me trompe, d'avant la révolution, et je le croyais abandonné. Mais nous ne demandons pas mieux que de voir exécuter les trois sections de ce projet, car nos communications sont assez importantes avec les localités que cette troisième section doit desservir, pour que nous désirions la voir exécuter. Je me réunis donc à l'honorable membre pour engager le gouvernement a ne pas perdre de vue la construction de ce complément du canal dont nous avons réclamé l'exécution.
J'ai une autre observation à faire sur ce qu'a dit l'honorable M. de Corswarem. Cet honorable membre pense que le canal de Vilvorde à Diest et a Hasselt doit servir à plusieurs usages : d’abord à la navigation, et en second lieu à l'évacuation des eaux. L'honorable membre se trompe. Un canal de navigation ne peut pas servir à l'évacuation des eaux. C’est un principe admis par tous les ingénieurs et établi par le rapport du corps des ponts et chaussées au département des travaux publics sur l'envasement du canal de Terneuzen, au moment où il a été remis au gouvernement belge.
Il est naturel que quand on laisse écouler de grandes eaux par un canal, il s'envase. Si nous faisons servir le canal de Vilvorde à Diest et à Hasselt à l'évacuation des eaux, avant le mois de mai il sera tellement envasé que la navigation sera interrompue au commencement de la bonne saison. Cela se trouve démontré dans le rapport du corps des ponts et chaussées ou des ingénieurs sur l'envasement du canal de Terneuzen.
Voilà les observations que j'avais à présenter.
M. de Corswarem. - L'objection que l'honorable préopinant a faite à ce que j'ai dit, ne peut provenir que de ce que je me serai mal exprimé.
Il vous dit qu'on ne peut pas laisser écouler les eaux par un canal de navigation. Je ne conteste pas cela ; mais quand on construira le canal, la rivière ne servant plus à la navigation, pourra être employée à l'écoulement des eaux. Car il y a, en ce moment, dans la rivière, des écluses et barrages qui empêchent cet écoulement ; il y a même des écluses civiles et des écluses militaires. L'autorité militaire tient les unes fermées quand l'autorité civile veut faire ouvrir les autres, et vice versa, de telle sorte que le service ne se fait pas.
Les barrages placés dans la rivière pour la rendre navigable sont encore un obstacle à l'écoulement des eaux. Que les eaux s'écoulent par le Demer ou par le canal, peu importe, pourvu que nous en soyons déchargés. Nous sommes d'accord sur le fond, ce n'est que sur l'expression de la pensée que nous avons pu différer.
M. Rodenbach. - Dans la discussion générale, j'ai dit qu'il y avait fort peu d'ouvriers employés aux travaux publics. M. le ministre m'a répondu qu'il y avait vingt-cinq mille personnes employées par le chemin de fer, et qu'on donnait de l'ouvrage à la classe pauvre. Je dois dire que dans la Flandre occidentale on ne s'en aperçoit pas. J'avais demandé l'élargissement d'un pavé de mon arrondissement, qui rapporte 9 p. c. de ce qu'il a coûté tant il est fréquenté. Ce pavé n'a que trois mètres de largeur, c'est la route la plus fréquence de la province, et par suite de cette étroitesse et du nombre considérable de voitures et de voyageurs qui la fréquentent, on y est exposé à des malheurs constamment. C'est pour éviter ces malheurs que j'en ai demandé l'élargissement, et je n'ai pas encore pu l'obtenir.
Dans les Flandres, on ne voit que quelques centaines d'ouvriers employés par des Anglais ; il n'y en a pas d'occupés par le département des travaux publics. On se plaint de voir le gouvernement n'exécuter aucune espèce de travaux. Je prie M. le ministre de se rappeler les observations qui ont été faites sur les canaux agricoles qu'on a négligés jusqu'à présent, notamment dans la Flandre occidentale. Je crois inutile de rappeler ce qui a été dit à cet égard, j'engagerai M. le ministre à le relire dans le Moniteur. C'est pour qu'on ne l'oublie pas, que je me suis permis de remémorer la chose à M. le ministre des travaux publics.
M. de Muelenaere. - Je me permettrai de recommander à l'attention de M. le ministre des travaux publics la réclamation de l'honorable député de Roulers. La route dont il a parlé n'a qu'une largeur de trois mètres ; c'est, comme l'a dit l'honorable membre, la plus fréquentée de toute la province. C'est par cette voie que se font une grande quantité de transports de matières pondéreuses, et la sécurité publique exige qu'elle soit élargie. Cette route, qui a été faite au moyen des subsides accordés par la commune et par la province, a été cédée au gouvernement, et je crois qu'elle lui rapporte 8 ou 9 p. c. des frais de construction ; il serait équitable que le gouvernement fît quelques dépenses pour lui donner une largeur convenable et qui assure la sécurité publique.
M. Rodenbach. - J'ajouterai qu'il y a urgence de s'occuper de l'élargissement de cette route, d'autant plus que les ouvriers n'ont pas d'ouvrage et que la misère est grande. Si on pouvait disposer d'une petite somme sur les 400 mille francs de dépense extraordinaire pour les routes, on pourrait procurer de l'ouvrage à ces malheureux et faire l'élargissement que je demande. Dans la construction de cette route, le gouvernement n'a contribué que jusqu'à concurrence du quart de la dépense.
Il en est même de presque toutes les routes de la Flandre occidentale ; elles ont été construites par les communes et la province ; c'étaient des routes provinciales qu'on a ensuite cédées au gouvernement. Le gouvernement fait sur ces routes un bénéfice net d'au moins 4 ou 5 p. c. Il est de toute justice, quand nous avons fait les fais de la plus grande partie de nos pavés, quand nous fournissons les subsides les plus considérables, qu'on nous mette nos routes en bon état.
M. d’Hoffschmidt. - Je viens appuyer la réclamation de l'honorable M. Rodenbach. L'honorable membre m'a parlé de la roule dont il demande l'élargissement, pendant que j'étais au département des travaux publics. J'avais reconnu qu'il y avait lieu d'appeler l'attention de l'administration sur cette route qui rapporte 8 ou 9 p. c. à l'E(at. Il y a plusieurs motifs pour faire exécuter les travaux réclamés par l'honorable préopinant, Ce qu'il a dit de la classe ouvrière mérite de sérieuses considérations, car c'est dans les Flandres que nous avons le plus de malheureux en ce moment et que nous avons fait exécuter le moins de travaux de route sur les subsides extraordinaires demandés aux chambres. Cela provient, non de ce que le gouvernement n'aurait pas eu pour cette partie du pays autant de sollicitude que pour les autres, mais parce qu'il y avait moins d'études faites et de routes à exécuter que dans les autres provinces.
Je me joins donc à l'honorable membre pour recommander l'élargissement de cette route à M. le ministre des travaux publics.
- La discussion générale sur ce chapitre est close.
« Art. 1er. Entretien et construction de routes : fr. 3,097,400. »
M. le président. - La section centrale propose de réduire ce chiffre à 5,093,800 fr. Déduction, 5,000 fr.
M. le ministre se rallie-t-il à cette réduction ?
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Je m'y rallie.
M. Mast de Vries. - Je demande la parole. J'ai appelé l'attention de la chambre et du gouvernement sur les pont à bascule que comprend cet article. Le gouvernement a compris la portée de mon observation, j'ai demandé une réduction de 3,600 francs portant sur cet objet.
Aujourd’hui, je vais plus loin, je dis que les ponts à bascule manquent leur but ; je dirai même qu'ils détruisent les chaussées au lieu de les conserver. Cela vous paraît un paradoxe ; je vais en démontrer l'exactitude :
Les ponts à bascule sont placés sur les grandes routes, mais on a fait tant de petites routes que les voitures surchargées qui ne peuvent pas passer devant un pont à bascule quittent les grandes routes pour n'être pas mises en contravention et passent sur les petites chaussées ; ces petites chaussées n'étant pas aussi fortes que celles de l’Etat, il en résulte que les chaussées des provinces et des communes sont détruites en peu de temps. Je vais citer un exemple : de Malines à Anvers, il y a une route d'une grande importance. Il y a un pont à bascule à un quart de lieue de Malines. La voiture dont la charge est trop forte pour se présenter à ce pont à bascule prend la route de Malines à Lierre et ensuite la route de Lierre à Anvers ; elle échappe ainsi au pont, mais la route de Malines à Lierre et celle de Lierre à Anvers en souffrent un grand dommage. Il y a deux ans elle s'est trouvée tellement délabrée, que pendant plusieurs mois, on n'a pas pu y passer.
Je dis donc que les ponts à bascule sont inutiles pour la bonne conservation des routes et que même ils y sont souvent contraires.
(page 1187) Je ferai une autre observation. Les ponts à bascule et les employés ont une certaine importance quand on ferme les barrières, dans l'intérêt de la viabilité et de la conservation des routes.
Mais qu'arrive-t-il aujourd'hui ? Le chemin de fer qui n'a pas de barrière à craindre, transporte toutes espèces de marchandises pour les localités qui avoisinent le chemin de fer ; ces marchandises sont déchargées aux stations où les voitures les prennent par chargement aussi considérable qu'elles peuvent, pour les transporter à leur destination, au grand détriment des routes aboutissant au chemin de fer, les stations n'ayant pas de pont à bascule à leur abord.
Voilà ce qui est arrivé deux années de suite. (Cette année il n'en a pas été de même parce qu'heureusement il n'y a pas eu de gelée.) C'est ainsi que la route est complétement détruite.
Je pourrais signaler aussi la délibération du conseil provincial d'Anvers. L'honorable M. Veydt pourra dire si je me trompe. Il y a été question des routes détruites par les transports en hiver. On a supprimé comme inutiles trois ponts à bascule.
Je vais plus loin ; je dis que les ponts à bascule ne servent à rien, parce qu'on les évite, en passant par les petites routes.
M. Desmet. - Je ne puis partager l'opinion de l'honorable préopinant. Il me semble que, loin de diminuer le nombre des ponts à bascule, on devrait l'augmenter ; car si on les évite, en prenant des petites routes que l'on détruit par de trop grands poids, c'est parce qu'ils sont en trop petit nombre. Mais si les cantonniers, les conducteurs faisaient leur devoir, il n'en serait pas ainsi parce que lorsqu'ils voient une voiture qui leur paraît trop chargée, ils la conduiraient jusqu'au pont à bascule le plus rapproché. Si l'on supprime les ponts à bascule, on ne pourra plus vérifier le poids des voitures. Or, ce sont les grands poids qui détruisent les chemins.
J'ai insisté, il y a deux ans, pour que l'on établît un pont à bascule sur la route de Bruxelles à Alost et de Bruxelles à Termonde. Cette route est en mauvais état, parce que, faute d'un pont à bascule, on ne peut vérifier le poids des voitures.
Le gouvernement doit établir des ponts à bascule et faire exercer une surveillance active par ses agents.
- L'article premier est mis aux voix et adopté avec le chiffre de 3,093,800 fr.
« Art. 2. Frais d'entretien des plantations existantes et établissements de plantations nouvelles sur les routes de l'Etat : fr. 50,000. »
- Adopté.
« Art. 3. Canal de Gand au Sas-de-Gand.
« Travaux d'entretien ordinaire : fr. 8,400.
« Travaux de dévasement pour entretenir le canal à sa profondeur normale, : fr. 12,000.
« Travaux de renforcement et de restauration des bords : fr. 10,000.
« Renouvellement des portes d'aval de l'écluse de Roodenhuysen : fr. 3,500
« Total : fr. 33,900. »
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Messieurs, j'aurai à demander, pour les services des canaux et travaux hydrauliques, plusieurs majorations motivées généralement par des faits qui se sont produits depuis la présentation du budget de 1846 et spécialement par les grandes eaux du dernier hiver.
Ces majorations sont les suivantes :
« Chap. Il Art. 3. Service du canal de Gand au Sas-de-Gand : fr. 22 000
« Art. 4. Service du canal de Maestricht à Bois-le-Duc : fr. 20,000
« Art. 6. Service de la Sambre canalisée : fr. 10,000
« Art. 10. Service de l'Escaut : fr. 15.000
« Art. 23. Travaux à faire pour obvier aux inondations du Demer : fr. 20,000
« Art. 25. Service des canaux de Gand à Ostende : fr. 10,000
« Art. 33. Service des bacs et bateaux de passage : fr. 22,000
« Art. 35. Service du port d'Ostende : fr. 25,000
« Total : fr. 114,000. »
En ajoutant à ces majorations le crédit de 59,932 fr. 75 c. qui devrait être alloué, dans l'hypothèse de la reprise de la Nèthe canalisée par l'Etat, on trouve un chiffre total de 203,932 fr. 75.
Je dois faire remarquer que ces majorations n'auront point pour conséquence de déranger l'équilibre entre les voies et moyens et les dépenses, attendu que les prévisions des produits des canaux et rivières ne figurent au budget des voies et moyens de l'exercice 1846 que pour une somme évidemment trop faible.
Ces produits n'ont été évalués pour 1846 qu'à 3,110,000 fr., tandis que les recettes effectuées en 1845 se sont élevées au chiffre de 3,394,877 fr. 9 centimes.
En faisant abstraction de toute augmentation ultérieure, en ne comptant, pour 1846, que sur une recette égale à celle effectuée en 1845, l'on trouve que les prévisions du budget des voies et moyens ne peuvent manquer d'être dépassées d'une somme de fr. 284,877 09.
Les majorations de crédits demandées s'élevant ensemble, ainsi que nous l'avons dit, à fr. 203,932 75, il résulterait encore, en faveur du trésor de l'Etat, un boni de fr. 80,944 34.
- L'article 3 est adopté avec le chiffre de 55,900 fr., proposé par M. le ministre.
« Art. 4. Canal de Maestricht à Bois-le-Duc.
« Travaux d'entretien ordinaire : fr. 27,000
« Renouvellement d'anciennes palées : fr. 5,000
« Première moitié du crédit nécessaire au renouvellement, en maçonnerie, des bajoyers de l'écluse de Hocht, : fr. 38,000
« Restauration de la partie de la rive droite comprise entre l'écluse n° 19 à Hocht et le pont de Neerhaeren, qui a cédé à l'action des infiltrations des hautes eaux de la Meuse pendant l'hiver de 1844-1845 : fr. 10,000
« Reconstruction en maçonnerie des barrages en charpente construits en 1839, aux abords de l'écluse de Hocht : fr. 44,785
« Plantations à effectuer sur les rives du canal et les terrains en dépendants : fr. 3,000
« Total : fr. 127,785. »
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Les infiltrations des eaux de la Meuse qui ont atteint, pendant l'hiver dernier, une hauteur inaccoutumée et dont le niveau a dépassé de 6 m 40 celui des eaux du canal et de 8 m 50 le plafond, ont augmenté considérablement les dégradations survenues à la partie de la rive droite du canal de Maestricht à Bois-le-Duc, comprise entre l'écluse de Hocht et le pont de Neerhaeren.
Il en est résulté que les travaux de réparation de ces dégradations offerts en adjudication publique le 27 mars 1846, ont été entrepris moyennant une somme de 30,000 fr. ; ces travaux n'avaient été prévus au budget que pour 10,000 fr. Il en résulte la nécessité de demander, par amendement, une majoration de 20,000 francs.
- L'article 4 est adopté avec le chiffre de 147,785 fr. proposé par M. le ministre.
« Art. 5. Canal de Pommerœul à Antoing.
« Travaux d'entretien ordinaire : fr. 24,000
« Travaux d'entretien extraordinaire et d'amélioration, alimentation par machine à vapeur : fr. 72,489
« Total : fr. 96,489. »
M. Desmet. - A cette occasion, j'appellerai l'attention de M. le ministre des travaux publics sur la malheureuse commune de la Plaigne. cette commune n'est pas de mon district ; elle est inondée presque tous les ans. Dans ce moment, je suis sûr que l'église et le village et une grande partie des terres ensemencées sont sous les eaux.
Il y a plus : c'est à cause de la digue du canal de Pommerœul à Antoing que ces inondations ont eu lieu. C'est depuis l'exécution de ce canal que cette commune ne peut plus évacuer ses eaux. Elle reçoit les eaux de la France, de l'Escaut, de la Scarpe et de deux grands canaux de dérivation, le Jard et le Decours ; toutes ces eaux sont retenues par la digue du canal d'Antoing ; et les siphons qui se trouvent en dessous de ce canal, et qui servent à faire écouler les eaux qui arrivent dans la Plaigne, sont mal construits ; c'est ce qui empêche en grande partie l'évacuation des eaux.
J'appelle l'attention de M. le ministre des travaux publics sur la nécessité de donner un moyen d'écoulement aux eaux qui font périodiquement tant de dégâts dans cette malheureuse commune.
Je crois qu'il faudrait agrandir le siphon, et rétablir en bon état la digue des bords de l'Escaut et prendre les précautions que les Français ont prises de leur côté pour se prémunir contre les débordements, hors de saison, des eaux de cette rivière.
Ce serait le moyen de faire cesser les inondations dont cette malheureuse commune est victime.
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Une des augmentations que je viens d'indiquer a précisément pour objet de porter remède à la situation calamiteuse de la commune de la Plaigne, signalée par l'honorable membre ; cette augmentation est demandée à l'article Escaut, attendu qu'il s'agit d'établir une digue le long de l'Escaut.
M. Desmet. - Très bien !
- L'article 5 est mis aux voix et adopté.
« Art. 6. Sambre canalisée.
« Travaux d'entretien ordinaire et de dragage : fr. 112,812. »
- Adopté.
« Art. 7. Personnel des services désignés aux articles 3, 4, 5 et 6 : fr. 72,767 50. »
M. Dedecker. - C'est à cet article que se rattache la pétition analysée au commencement de cette séance. Elle émane d'une maison de commerce qui réclame contre l'autorisation accordée aux éclusiers de se livrer au commerce. Ce négociant se plaint de ce que l'on n'observe pas ici le principe de l'interdiction du commerce observé dans toutes les administrations, depuis le grade le plus élevé jusqu'à l'emploi de garde champêtre. Les éclusiers qui font le commerce sont dans des conditions insoutenables pour le commerce libre dans les mêmes localités. En France, depuis deux ans, il est interdit aux éclusiers de se livrer au commerce quel qu'il soit. En Belgique, on leur avait, par tolérance, permis de vendre des denrées alimentaires et des boissons, mais cette tolérance a pris une telle extension que ces agents tiennent de véritables bazars où ils vendent toute espèce de marchandises. C'est dégénéré en véritable abus.
Déjà, il y a deux ans, toute espèce de commerce a été interdite aux éclusiers (page 1188) sur le canal de Charleroy. Je voudrais que cette mesure dont les avantages n'ont pas besoin d'être signalés fût appliquée aux éclusiers sur les autres canaux de Belgique.
Je désire donc savoir si, dans l'opinion de M. le ministre des travaux publics, il y a des inconvénients à ce que cette mesure soit généralisée.
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Je suis d'accord avec l'honorable préopinant qu'il n'est pas convenable que des agents de l'Etat se livrent à des opérations commerciales. Mais jamais les éclusiers n'ont été autorisés à se livrer à des opérations de ce genre.
Il y a eu dans ce cas une simple tolérance motivée uniquement sur cette circonstance que ces agents sont généralement assez peu rétribués et que dans beaucoup de cas, le salaire qui leur est alloué est véritablement insuffisant pour assurer leur existence et celle de leur famille.
Quoi qu'il en soit, j'aurai soin de tenir une note particulière des observations de l'honorable membre et de prescrire cette interdiction partout où la chose sera reconnue possible, sans léser d'une manière trop sensible les intérêts des éclusiers et sans les mettre dans l'impossibilité de pourvoir à leur existence.
M. Dedecker. - Messieurs, il n'est certainement pas dans mes intentions d'aggraver la situation de ces petits fonctionnaires que l'on appelle éclusiers. Cependant je crois qu'au point de vue de l'administration le fait que j'ai signalé est un véritable abus.
Je ne veux pas dire que jusqu'à présent il y ait eu abus. Mais il est certainement à craindre que ces éclusiers n'abusent de leur position pour forcer les bateliers à s'approvisionner de préférence chez eux.
Si je suis bien informé, messieurs, les éclusiers, outre leur traitement, ont un logement. Ils ont donc, sur le commerce de détail qui se trouve à proximité, l'avantage d'avoir un magasin qu'ils ne doivent pas payer et qu'il est souvent difficile de trouver. De plus, ils s'accordent à eux-mêmes la faculté d'étaler sur les bords du canal, faculté qu'ils ont soin d'interdire à leurs concurrents. Les bateliers, étant forcés de prendre un billet de passage chez eux, entrent dans la maison et le plus souvent s'y approvisionnent, de sorte que la concurrence devient impossible pour le commerce libre.
Messieurs, nous avons récemment montré l'intérêt que nous portons au commerce de détail par le vote de la loi sur les ventes à l'encan. Vous avez encore ici l'occasion d'être utile au commerce de détail, tout en réprimant un abus qu'on a eu soin de réprimer dans toutes les autres branches de l'administration.
Il me semble que la conclusion rigoureuse des observations de M. le ministre serait de demander une augmentation de traitement pour les éclusiers. La position doit être la même pour tous, et lorsqu'on interdit le commerce aux éclusiers du canal de Charleroy, je ne vois pas pourquoi on le permet aux éclusiers qui se trouvent sur d'autres canaux.
M. Osy. - Messieurs, on vient de soulever la question de savoir si des employés qui ont un modique traitement peuvent se livrer au commerce. Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur si les principes professés à cet égard par M. le ministre des travaux publics sont partagés par le cabinet tout entier. Lorsque nous en viendrons à la discussion du budget de l'intérieur, nous aurons à soulever à cet égard une question beaucoup plus grave. Nous signalerons des fonctionnaires bien autrement rétribués que de malheureux éclusiers, et qui non seulement se livrent à des commerces, mais qui sont directeurs de sociétés et même entrepreneurs de travaux publics.
M. de Muelenaere. - Messieurs, je n'ai pas demandé la parole pour répondre à l'interpellation de l'honorable M. Osy. Mais je ferai remarquer qu'il me semble impossible de généraliser la mesure à laquelle vient de faire allusion l'honorable M. Dedecker.
Vous savez, messieurs, que le nombre des éclusiers est très considérable dans le pays. Dans la province que j'ai l'honneur d'administrer, le traitement de ces éclusiers n'est guère que de 6 à 800 fr., il est de 900 fr. au maximum. On vous a parlé du local qui est affecté à leur habitation. En effet, sur certains canaux il existe des locaux affectés à l'habitation des éclusiers ; mais il y a aussi beaucoup de canaux où ces locaux n'existent pas, et quand ils existent on en tient compte dans la fixation du traitement.
Dès lors vous sentez qu'il est impossible que l'on défende aux éclusiers toute espèce de négoce, car avec un traitement de 600 fr. il est impossible qu'ils pourvoient à leur entretien et à celui de leur famille.
Tout ce que le gouvernement peut donc faire dans cette circonstance, c'est d'examiner les cas particuliers qui se présentent. Lorsqu'une place d'éclusier est rétribuée de manière que le traitement puisse suffire à l'entretien de celui qui occupe cette place et de sa famille, et que le commerce qu'il exerce donne lieu à des abus, c'est un devoir pour le gouvernement de faire cesser ces abus. Mais lorsque le traitement est insuffisant, ou lorsque le commerce qu'exerce l'éclusier ne donne lieu à aucune plainte, je ne vois pas pourquoi le gouvernement défendrait ce commerce.
On vous a dit qu’il suffirait d'augmenter légèrement le traitement des éclusiers. Mais il faudrait l'augmenter de manière qu'il devînt suffisant. Ensuite il ne faut pas perdre de vue qu'il y a dans le pays un nombre considérable d'éclusiers et que si le traitement de tous ces éclusiers devrait être augmenté, il en résulterait probablement une dépense assez forte pour le trésor.
Je le répète donc, c'est évidemment une question d'appréciation pour le gouvernement. Je ne connais pas les cas particuliers auxquels l'honorable M. Dedecker fait allusion. S'il y a des abus, je désire qu’on les fasse cesser. Mais je ne vois pas possibilité de prendre une décision qui s'applique à tous les éclusiers du pays.
M. Desmet. - Je crois qu'il faut voir dans quel intérêt sont établie ces petites boutiques que tiennent les éclusiers. Je crois que généralement c'est dans l'intérêt des bateliers. Il arrive souvent que les écluses se trouvent assez éloignées d'un village. Comment voulez-vous que dans ce cas les bateliers, s'ils ne peuvent plus s'adresser aux éclusiers, puissent se procurer ce dont ils ont besoin ?
L'honorable M. Dedecker vient de nous dire que les éclusiers vendent du goudron, mais il y a beaucoup de villages où l'on ne vend pas du goudron, et cependant cette matière est nécessaire aux bateliers.
Je crois donc que ces petites boutiques sont nécessaires dans l'intérêt des bateliers, et qu'au lieu de les supprimer, on fera bien de les conserver et même de chercher à en augmenter le nombre.
M. Brabant. - Je crois qu'il est difficile d'établir une règle générale en cette matière ; mais que ce que devrait faire l'administration, ce serait d'interdire le commerce dans les localités où les éclusiers se trouvent en concurrence avec ceux qui n'ont que leur industrie pour vivre.
On a dit que la plupart des employés dont il est ici question, avaient de modiques traitements.
Messieurs, nous regardons comme modique un traitement de 5 ou 600 fr. Mais il n'en est pas de même pour tout le monde. Il y a des gens qui sont fort heureux de trouver à gagner, dans le courant d'une année, 5 ou 600 fr., et s'ils ont pour concurrents des personnes qui ont déjà cette somme, vous sentez qu'il leur est très difficile de soutenir la concurrence.
L'honorable M. Dedecker nous a dit que l'on avait interdit le commerce aux éclusiers du canal de Charleroy à Bruxelles. Cependant ces éclusiers n'ont que 500 fr., tandis que sur d'autres canaux, où les traitements sont de 600 fr., les éclusiers continuent à faire le commerce.
Pour ma part, messieurs, je n'ai jamais voulu parler dans une discussion de ce genre ; on aurait cru que j'avais un intérêt personnel dans cette affaire. Mais je dirai que plusieurs fois j'ai entendu des plaintes de la part des bateliers qui disaient qu'il y avait une espèce de contrainte morale exercée à leur égard pour les faire se fournir dans la maison de l'éclusier plutôt que dans la maison voisine où ils avaient l'habitude d'aller avant la canalisation.
Je crois donc que la règle que devrait suivre l'administration, ce serait de ne pas permettre à ses employés d'exercer le commerce lorsqu'ils se trouvent en concurrence avec des gens qui sont tout aussi bien placés qu'eux pour exercer cette industrie.
Je ferai remarquer qu'il en est de même sur le chemin de fer. Je connais, dans la direction que je parcours habituellement, plusieurs gardes qui exercent le métier et cela côte à côte avec cinq ou six industriels du même genre.
- L'article 7 est mis aux voix et adopté.
« Art. 8. Canal de Bruxelles à Charleroy.
« Travaux d'entretien ordinaire : fr. 55,000
« Pavage de diverses parties de trottoirs pour le halage : fr. 20,000
« Primes pour le service de halage : fr. 15,000
« Total : fr. 90,000. »
- Adopté.
« Art. 9. Canal de Bruxelles à Charleroy (personnel) : fr. 42,839. »
- Adopté.
« Art. 10. Service de l’Escaut.
« Art. 10. Travaux ordinaires dans la Flandre orientale : fr. 7,530
« Travaux ordinaires dans la province de Hainaut, fr. 10,000
« Construction de trois ponts de halage sur des criques en communication avec le bas Escaut : fr. 1,800
« Travaux complémentaires de dévasement dans l'intérieur de la ville de Tournay : fr. 8,000.
« Total : fr. 27,350. »
M. le ministre des travaux publics propose d'augmenter ce chiffre de 15,000 fr.
M. Mast de Vries, rapporteur. - Messieurs, dans le rapport j'ai fait remarquer qu'au budget de 1845 on avait demandé une somme de 12 mille francs pour l'élargissement du plafond du fleuve entre le pont Madou et le pont aux Chaudrons à Gand. Je connais les localités ; je crois que ce travail devait servir à faciliter la décharge des eaux, de l'abondance desquelles on se plaint. Or, je n'ai pas trouvé cette dépense renseignée dans les développements du budget ; il paraît que la somme de 12 mille francs a été absorbée par une insuffisance du budget de 1844.
Puisque, lorsqu'on nous a demandé le crédit, ce travail paraissait si utile, je demande pourquoi il n'a pas été exécuté.
M. le ministre des travaux publics (M. de Bavay). - Les travaux auxquels l'honorable M. Mast de Vries vient de faire allusion comprenaient la restauration du radier de l'écluse du pont aux Chaudrons, travail qui aurait nécessité le barrage de la rivière et, par suite, une interruption de la navigation, tandis qu'il est à prévoir que prochainement lorsque la ville de Gand voudra mettre en état la partie des quais du nouveau palais de justice qui touche au pont aux Chaudrons, le même barrage et la même interruption de navigation devront avoir lieu.
L'emploi qui a été fait du crédit alloué pour le service de l'Escaut au budget de 1845, est indiqué à la page 28 des développements à l'appui au budget de 1846.
La nécessité de couvrir au moyen du crédit de 1845, une insuffisance du (page 1189) crédit de 1844, avait été annoncée. (Voir page 23 des développements à l'appui du budget de 1845.)
J'aurai maintenant, messieurs, à donner une explication sur l'augmentation proposée à l'article de l'Escaut. Cette augmentation est de 15,000 fr. Elle est destinée à la construction d'une digue qui aurait pour objet de garantir la commune de la Plaigne des inondations. Cette digue est estimée à une somme de 44,000 francs. Le gouvernement pense que, s'il était en mesure d'allouer pour cet objet une somme de 30,000 francs, il pourrait, avec le concours de la commune, parvenir à couvrir la dépense totale de 44,000 francs. Son intention serait donc de demander un crédit de 30,000 francs à répartir sur deux exercices. Les 15,000 francs demandés aujourd'hui formeraient la première moitié de ce crédit de 30,000 francs, qui se trouverait complété par une allocation de pareille somme au budget de 1847.
Cette dépense est évidemment indispensable. Il en a été notamment question dans le travail de la commission chargée d'examiner le projet relatif au canal de la Lys à Schipdonck et on a reconnu qu'il y a quelque chose à faire pour la commune de la Plaigne. C'est ce que l'honorable M. Desmet vient encore d'établir tout à l'heure.
- L'augmentation de 15,000 francs proposée par M. le ministre est mise aux voix et adoptée.
L'article 10 est ensuite adopté avec cette augmentation.
« Art. 11. Service de l’Escaut (personnel). - fr. 15,472 50. »
- Adopté.
« Art. 12. Service de la Lys.
« Travaux ordinaires dans la Flandre orientale : fr. 15,828
« Travaux ordinaires dans la Flandre occidentale : fr. 17,300
« Construction d'un chemin de halage dans la traverse de Deynze : fr. 2,500
« Renouvellement d'une paire de portes à l'écluse de la Pêcherie : fr. 4,000.
« Total : fr. 39,628. »
- Adopté.
« Art. 13. Service de la Lys (personnel) : fr. 6,574. »
- Adopté.
La séance est levée à 4 heures et quart.