(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 1)
(page 141) (Présidence de M. le baron Surlet de Chokier)
Longtemps avant l'ouverture de la séance, les députés s'entretiennent dans la salle ; leurs conversations sont très animées ; ils paraissent prendre connaissance des pièces déposées sur le bureau.
L'un des secrétaires, M. Nothomb, donne à plusieurs membres communication d'une pièce placée devant le président.
Une affluence considérable de curieux encombre les tribunes réservées et publiques.
A onze heures, M. le baron Surlet de Chokier prend place au fauteuil et déclare la séance ouverte.
M. Nothomb, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. (E., 17 nov.)
M. de Langhe demande une vérification. (E., 17 nov.)
- Cette vérification est faite immédiatement et le procès-verbal est ensuite adopté. (P. V.)
M. le comte Vilain XIIII demande un congé de deux jours. - Accordé. (P. V.)
M. Léopold Dewolf fait hommage à l'assemblée d'une brochure intitulée : « Faisceau patriotique » dédié aux Belges. - Dépôt à la bibliothèque. (J. B., 17 nov.)
MM. Kockaert et. Surmont de Volsberghe informent l'assemblée qu'ils ne peuvent assister à la séance à cause d'une indisposition. (P. V.)
M. le président annonce qu'il a reçu une lettre de M. de Potter et une autre de M. le baron Emmanuel Vander Linden d'Hooghvorst. (P. V.)
L'assemblée décide qu'il en sera donné lecture. (Profond silence.) (P. V.)
M. Nothomb, secrétaire, donne lecture des pièces suivantes :
« Au congrès national.
« Messieurs,
« Au bas de l'acte par lequel mes ci-devant collègues vous ont offert hier leur démission de membres du gouvernement provisoire de la Belgique, vous n'avez pas lu mon nom.
« Vous en verrez les motifs dans la lettre ci-jointe, que j'adresse à MM. Gendebien, Ch. Rogier, comte Félix de Mérode, Jolly, Jos. Van der Linden et baron de Coppin, ayant fait partie dudit gouvernement provisoire, et par laquelle je leur fais part de ma résolution de me retirer.
« J’ai cru également, messieurs, devoir vous en donner communication.
« Avant de terminer cette lettre d'envoi, je prendrai la liberté de vous témoigner combien m'a surpris votre prompte décision sur la démission donnée, au nom d'un corps, par quelques membres de ce corps, dont tous n'avaient pas signé cette même démission, et cela sans avoir provoqué une explication sur les raisons qui avaient déterminé tant la signature des uns que le refus ou l'absence de la signature des autres.
« Veuillez, messieurs, agréer, avec mes vœux sincères pour le prompt et entier succès de vos importants travaux, c'est-à-dire, pour le salut et la prospérité de notre patrie, l'assurance de mon plus profond respect.
« DE POTTER.
« Bruxelles, le 15 novembre 1830. » (U. B., 17 nov. et A.)
Voici la lettre que M. de Potter a écrite aux membres du gouvernement provisoire :
« Messieurs,
« Depuis plusieurs jours, nous discutions la question de la démission à donner au congrès national par le gouvernement provisoire.
« Sûrs, disiez-vous, d'être confirmés, vous vouliez, en offrant de vous retirer, prouver au congrès et au pays votre désintéressement.
« Outre les autres accusations graves, vous (page 142) m'accusiez d'ambition, parce que je paraissais, prétendiez-vous, vouloir rester au pouvoir, même malgré les représentants de la nation.
« Vous vous trompiez, messieurs, et je le prouve aujourd'hui à ma manière, c'est-à-dire, en me retirant réellement sans espoir aucun de confirmation.
« Mes motifs, à moi, sont que je crois le congrès national un corps purement constituant, exclusivement appelé par le gouvernement provisoire pour fonder notre nouvel ordre social et pour instituer le pouvoir définitif qui présidera aux destinées de la Belgique. Le gouvernement provisoire était, à mes yeux, un pouvoir antérieur au congrès, en dehors du congrès, et nécessairement neutre entre le peuple et la représentation nationale ; un pouvoir qui, en cette qualité, avait convoqué le congrès lui-même, d'après un mode qu'il avait déterminé et dont l'existence du congrès était le résultat ; un pouvoir enfin dont la tâche était d'exécuter les décisions de la majorité de cette assemblée, tout en se conservant néanmoins et avant tout entièrement indépendant d'elle. Il fallait que ce pouvoir demeurât entier, jusqu'à ce que le pouvoir définitif le remplaçât ; car alors, et alors seulement, ses fonctions venaient à cesser ; mais aussi elles cessaient de plein droit.
« Chaque fois qu'une assemblée souveraine se trouve seule en présence de la minorité, rien n'est plus facile à celle-ci, pour peu qu'elle veuille chercher un appui au-dehors et dans les masses, que de renverser cette majorité, et avec elle l'assemblée elle-même : dès ce moment, une révolution commence et une révolution terrible ; elle parcourt toutes les phases de l'anarchie ; elle traîne à sa suite le despotisme, et, ce qui est bien pis encore, la contre-révolution.
« C’est l'histoire de la convention nationale de France, de l'empire français et de la restauration des Bourbons.
« Je désirais que ce ne fût pas celle de la BelgIque.
« Comme membre du comité central, je me sentais la mission d'exercer un pouvoir modérateur du congrès, de défendre le congrès contre le congrès lui-même.
« Ce sont là, messieurs, vous le savez, les principaux arguments que j'ai fait valoir auprès de vous pour vous empêcher de commettre une faute qui me semblait irréparable, et que la patrie peut-être, et l'histoire, sans nul doute, nous reprocheraient un jour.
« Vous avez cru devoir passer outre. Je ne m'en plains pas et je vous laisse la responsabilité de votre décision. Voici la mienne : elle est irrévocable.
« Je ne tenais pas mon mandat du congrès national. Je ne devais donc ni ne pouvais le résigner entre ses mains. Ce mandat est devenu nul, selon moi, dès l'instant que vous avez investi le congrès, comme vous venez de le faire par votre démission, de tous les pouvoirs réunis et confondus.
« Agréez, je vous prie, la mienne, ainsi que l'assurance de ma considération très distinguée.
« DE POTTER.
« Bruxelles, le 13 novembre 1830. » (U. B., 17 nov. et A.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, lit ensuite la pièce suivante :
« Messieurs, lorsque nos braves combattaient pour empêcher l'entrée de la ville à nos ennemis, Bruxelles était sans aucune autorité, et sans aucun centre d'action ; quelques citoyens, parmi lesquels je me trouvais, s'offrirent pour former une administration provisoire. Nous fûmes accueillis par ces braves, ce fut là notre seul mandat que confirma bientôt presque toute la Belgique.
« Maintenant que la nation a des organes réguliers réunis, le gouvernement a dû leur remettre son pouvoir provisoire qu'il ne tenait que des circonstances. Le congrès national, rendant justice à nos intentions, a manifesté le désir de voir le gouvernement provisoire conserver le pouvoir exécutif ; nous sommes heureux et fiers de cette confiance. Une absence ne m'ayant pas permis d'apposer ma signature au bas des communications faites au congrès, le 12 de ce mois, par le gouvernement provisoire, je déclare, pour autant que de besoin, que j'avais acquiescé aux résolutions prises par mes collègues.
« Le général commandant la garde civique de Bruxelles, membre du gouvernement provisoire de la Belgique.
« M. le Baron VANDEN LINDEN D' HOOGHVORST.
« Bruxelles, le 13 novembre 1830. » (U. B., 17 nov. et A.)
- Pendant cette lecture, M. Rogier, membre du gouvernement provisoire, entre dans la salle.
M. le président – Tout étant consomme sur cette affaire par votre décision du 12, je propose à l'assemblée de passer à l'ordre du jour sur la lettre de M. de Potter, et de donner acte à M. Emmanuel Vander Linden d'Hooghvorst de sa déclaration. (U. B., 17 nov.)
- Adopté sans réclamation. (P. V.)
(page 143) Un des secrétaires fait connaître les noms des présidents, vice-présidents et secrétaires des dix sections.
Ce sont pour la :
Première section : Président, M. Trentesaux ; vice-président, M. le comte de Quarré ; secrétaire, M. Fleussu.
Deuxième section : Président, M. Coppieters ; vice-président, M. Théophile Fallon ; secrétaire, M. Wannaar.
Troisième section : Président, M. de Muelenaere ; vice-président, M. Raikem ; secrétaire, M. l'abbé Dehaerne.
Quatrième section : Président, M. Charles de Brouckere ; vice-président, M. Destouvelles ; scrétaire, M. Forgeur.
Cinquième section : Président, M. Barthélemy ; vice-président, M. de Langhe ; secrétaire, M. Nagelmackers.
Sixième section : Président, M. le baron de Sécus (père) ; vice-président, M. le comte de Baillet ; secrétaire, M. Constantin Rodenbach.
Septième section : Président, M. le comte d'Arschot ; vice-président, M. le marquis de Trazegnies ; secrétaire, M. Leclercq.
Huitième section : Président, M. Werbrouck-Pieters ; vice-président, M. le comte Vilail4 :47 12-04-20n XIIII ; secrétaire, M. Nothomb.
Neuvième section : Président, M. de Gerlache ; vice-président, M. Gendebien (père) ; secrétaire, M. Charles Le Hon.
Dixième section : Président, M. Thorn ; vice-président, M. Van Hoobrouck de Mooreghem ; secrétaire, M. de Robaulx.(P. V.)
M. le président : Y a-t-il quelque rapport sur les élections ? (V. P., 17 nov.)
M. Coppieters, rapporteur de la sixième commission de vérification des pouvoirs, propose l'admission de M. Lucien Jottrand, cinquième suppléant du district de Bruxelles, en remplacment d'un des quatre députés optant ou non acceptant, et de M. Van Meenen, troisième suppléant déjà député pour le district de Louvain. (P. V.)
- Ces conclusions sont adoptées.
M. de Muelenaere, rapporteur de la section centrale, fait un rapport sur l'article 12 du projet de règlement : La première section a proposé une nouvelle rédaction. Deux membres ont demandé que le congrès déclarât l'incompatibilité des fonctions de membre du gouvernement provisoire avec celles de député au congrès, cependant l'article a ensuite été adopté unanimement par cette section. La troisième n'a pas fait d'observation ; la quatrième voudrait le retranchement du premier alinéa, elle a adopté à l'unanimité le deuxième et propose quelques modifications pour le troisième. La cinquième section a proposé une autre rédaction pour le premier et le second paragraphe. Elle désire qu'il y ait dans la salle des places exclusivement réservées aux membres du gouvernement provisoire, et que le congrès puisse requérir la présence de ce gouvernement ; la sixième est d'avis que les membres du même gouvernement puissent être invités à se rendre dans l'assemblée ; la septième demande à substituer dans le premier paragraphe les mots : « sont entendus », à ceux-ci : « peuvent être entendus » ; la huitième et la neuvième n'ont pas fait d'observation ; la dixième pense que bien que les communications entré le congrès et le gouvernement provisoire aient lieu par messages, cependant les membres de ce gouvernement doivent pouvoir être entendus en personne et avoir des places réservées dans la salle.
La majorité de la section centrale propose l'adoption pure et simple de l'article qui est ainsi conçu :
« Art, 12. Les membres du gouvernement provisoire ont entrée au congrès ; ils ont le droit d'être entendus quand ils le demandent. Il y a dans la salle des places qui leur sont exclusivement réservées ».
« Le congrès peut requérir la présence des chefs de comités d'administration générale ».
« Les messages du gouvernement sont portés au congrès par le chef d'administration générale qu'ils concernent ; celui-ci peut se faire assister de commissaires ». (V. P., 17 nov., et A. C.)
M. le baron de Sécus (père), développe les motifs de la sixième section qui a été unanimement d'avis que les membres du gouvernement provisoire pouvaient être invités à se rendre au congrès national : s'il en était autrement, dit-il, le congrès devrait se transporter auprès du gouvernment (ce qui est impraticable), chaque fois qu'il (page 144) aurait besoin de renseignements sur une communication ; d'un autre côté, si les membres du gouvernement provisoire ont droit de venir nous écouter, nous devons avoir également le droit de les écouter à notre tour. Il faut qu'il y ait réciprocité. Une disposition expresse à cet égard est nécessaire. Les membres de l'ancien gouvernement ont contesté souvent à la deuxième chambre le droit de les appeler. (J. B., 17 nov.)
M. Van Snick – J'avais proposé la suppression des deux paragraphes ; je pense qu'ils doivent faire l'objet d'une loi spéciale. Au fond j'y donne mon approbation. Il est nécessaire que l'assemblée puisse requérir la présence des chefs d'administration générale. (Aux voix ! aux voix !) (U. B., 17 nov.)
M. de Robaulx – Dans la dixième section j'ai fait la proposition suivante que je reproduis comme amendement ; la voici : « Les communications entre le congrès national et le gouvernment provisoire ont lieu par messages ; cependant le gouvernement peut envoyer un ou plusieurs chefs d'administration générale au congrès pour y faire et soutenir des propositions.
« Le congrès peut requérir la présence des chefs d'administration générale ; ceux-ci ont la faculté de se faire assister de commissaires.
« Il y a dans la salle des places qui leur sont exclusivement réservées. » (U.B., 17 nov. et A.)
M. de Robaulx développant cet amendement – Le congrès, dans une précédente séance, a cru qu'il fallait séparer le pouvoir exécutif du pouvoir constituant et législatif ; il a donc délégué provisoirement le pouvoir exécutif aux hommes qui' ont exercé l'ancien gouvernement provisoire. Le but de mon amendement est de conserver intacte cette distinction de pouvoirs, et d'empêcher de mettre en présence le congrès et le pouvoir exécutif.
Si, comme l'article 12 du projet l'indique, les membres du gouvernement provisoire ont entrée au congrès et le droit d'être entendus quand ils le demandent, alors il faudra, pour la réciprocité, que le congrès puisse forcer le même pouvoir exécutif à venir donner au congrès telles explications qu'il croira nécessaires. Décider autrement, ce serait donner au gouvernement provisoire la faculté de venir, quand les circonstances seront favorables, produire des effets d'entraînement et provoquer des résolutions par acclamation, tandis que dans le cas contraire ils enverraient des commissaires.
Il me paraît, messieurs, que de pareilles communications ne peuvent exister entre les pouvoirs établis, sans détruire la division que vous avez eu soin de faire. Le pouvoir exécutif est un être moral qui, dans le cercle de ses attributions, doit jouir d'assez d'indépendance pour ne pas être appelé personnellement à la barre du congrès.
Il faut que les communications se fassent par messages. Il faut éviter tout contact immédiat. Il faut que les chefs d'administration seuls aient accès au congrès, soit qu'ils y viennent de leur propre mouvement, soit qu'ils y soient mandés.
Si vous admettez les membres du gouvernement provisoire à venir prendre part à vos travaux, il s'ensuivra la possibilité d'un désaccord entre lui et le congrès, et en ce cas jugez quel effet un pareil spectacle produirait. (E., 17 nov.)
M. Forgeur – La section dont je fais partie a proposé à l'unanimité la suppression du paragraphe premier de l'article 12 ; je propose un amendement dans ce sens ; on peut fractionner le pouvoir exécutif et permettre l'entrée au congrès d'un membre de ce pouvoir, qui est un. (U. B., 17 nov.)
- Il est donné lecture de l'amendement de M. Forgeur ; cet amendement est ainsi conçu :
« Les communications entre le congrès national et le pouvoir exécutif ont lieu par messages.
« Les messages du pouvoir exécutif sont portés au congrès, soit par un de ses membres, soit par un des chefs d'administration générale qu'ils concernent. Celui-ci peut se faire assister de commissaires.
« Le congrès peut requérir la présence des chefs d'administration générale. » (U. B., 17 nov.)
M. De Lehaye propose le retranchement du dernier paragraphe de cet amendement. (U. B., 17 nov.)
M. Delwarde a la parole pour un rappel au règlement ; il demande qu'on ne cumule pas les amendements et qu'on examine le premier. (U. B., 17 nov.)
M. le comte Duval de Beaulieu demande la priorité en faveur d'un amendement de la quatrième section. (U. B., 17 nov.)
M. Barthélemy – Toutes ces difficultés proviennent d'un vice de rédaction ; l'article a été fait à une époque où le gouvernement provisoire avait une autre nature qu'aujourd'hui ; il n'est actuellement que pouvoir exécutif. Il doit être permis aux membres du gouvernement en corps ou par un délégué, de faire des communications, par exemple relativement à un traité. J'approuve le paragraphe premier comme nécessaire. (U. B., 17 nov.)
M. Destouvelles – L'admission de l'article 12 peut faire naître de graves inconvénients ; la voie des messages et l'appel des chefs d'administration doivent suffire. Le paragraphe premier me paraît (page 145) indispensable ; il y avait une lacune dans l'ancienne loi fondamentale, les membres des états généraux ne croyaient pas avoir le droit de requérir la présence des chefs d'administration générale. (U. B., 17 nov.)
M. Van Snick (Aux voix ! aux voix !) – Je n'ai pas encore parlé deux fois. Je crois au fond que les dispositions sont nécessaires, mais qu'elles doivent faire l'objet d'une loi. (U. B., 17 nov.)
M. le baron de Stassart – Pourquoi ne pas consacrer dans le règlement même une disposition dont la sagesse est reconnue ? pourquoi vouloir une proposition particulière, qui nécessairement entraînerait des longueurs ? ce serait perdre de vue la nécessité de marcher, avec la célérité que les circonstances commandent, vers. les grands résultats politiques que le peuple belge et l'Europe attendent de nous. (U. B, 17 nov.)
M. le président met aux voix l'amendement de M. Forgeur. (U. B., 17 nov.)
M. de Robaulx propose comme sous-amendement le retranchement des mots : « soit par un de ses membres » (U. B., 17 nov.)
- Après trois épreuves, ce sous-amendement est déclaré adopté.
L'assemblée adopte ensuite l'amendement de M. Forgeur. (P. V.)
L’article 12 se trouve en conséquence ainsi rédigé :
« Les communications entre le congrès national et le pouvoir exécutif ont lieu par messages.
« Les messages du pouvoir exécutif sont portés au congrès par celui des chefs d'administration générale qu'ils concernent ; celui-ci peut se faire assister de commissaires.
« Le congrès peut requérir la présence des chefs d'administration générale. » (P. V.)
M. le comte de Bergeyck propose un article additionnel ainsi conçu :
« Les dispositions du présent règlement pourront être changées, modifiées ou augmentées par le congrès, toutes les fois qu'il jugera que les circonstances l'exigent ou que l'expérience fera connaître que des changements ou additions au règlment sont nécessaires. » (C., 17 nov.)
M. Liedts – Il me semble que cet article est inutile ; c'est de droit. (C., 17 nov.)
M. le comte de Bergeyck – Il se trouve dans tous les règlements. (C., 17 nov.)
M. Van Meenen – L'article proposé par M. de Bergeyck me semble complètement inutile ; le droit qu'il veut nous réserver est dans la nature même des choses : je sais bien que l'on a vu des articles semblables insérés dans d'autres règlments, et que même dans des lois fondamentales on a pris la peine de déclarer que ces lois seraient maintenues aussi longtemps qu'elles ne seraient pas changées ; mais ce n'est pas une raison pour adopter la proposition de l'honorable M. de Bergeyck, proposition qui me paraît une véritable superfluité. (U. B., 17 nov.)
- L'article additionnel de M. le comte de Bergeyck est rejeté. (U. B., 17 nov.)
M. le comte Duval de Beaulieu – Il résulte de ce rejet qu'on regarde la faculté de changer le règlement comme de droit. (D. B., 17 nov.)
M. le président – Sans doute. (U. B., 17 nov.)
- L'assemblée décide qu'il en sera fait mention au procès-verbal. (P. V.)
M. le président demande si, avant de voter sur l'ensemble du règlement, on juge à propos d'ouvrir la discussion sur cet ensemble. (J. B., 17 nov.)
M. le baron de Stassart – La discussion sur l'ensemble de notre règlement a dû précéder la discussion de chaque article, ou bien ce serait s'exposer à renverser l'édifice que nous venons de construire. (J. B., 17 nov.)
M. Van Snick – L'objet est assez important pour en faire un article du règlement. (J. B., 17 nov.)
M. de Labeville propose un article additionnel ayant pour but d'établir que sur toute loi la discussion générale précédera celle des articles. (D. n., 17 nov.)
- Plusieurs voix - C'est entendu. Aux voix ! (U. B., 17 nov.)
M. le comte de Quarré veut prendre la parole. (C., 17 nov.)
- De toutes parts – Non, non ; aux voix ! (C., 17 nov.)
M. le comte de Quarré adresse à M. le président quelques observations. (U. B., 17 nov.)
M. le président – Je vous ferai observer, monsieur, que ce n'est pas moi qui vous retire la parole, mais bien la volonté de l'assemblée. (U. B., 17 nov.)
- On décide qu'il sera inséré au procès-verbal qu'il est entendu que la discussion de tout projet commencera sur l'ensemble et que, après l'adoption du projet article par article, il sera voté sur l'ensemble. (P. V.)
M. le président – Maintenant nous allons voter sur l'ensemble du règlement. (U. B., 17 nov.)
- On demande l'appel nominal. (U. B., 17 nov.)
M. Henri de Brouckere fait observer que pour éviter la perte de temps il est plus convenable de voter par assis et levé ; si le vote est douteux, on procédera à l'appel nominal ; mais si (page 146) la majorité est évidente, il est inutile d'employer ce mode de voter. (U. B., 17 nov.)
M. Jottrand demande la lecture du règlement. (Non ! non !) (U. B., 17 nov.)
- On vote par assis et levé sur l'ensemble du règlement qui est adopté à l'unanimité. (P. V.)
M. de Muelenaere – Le règlement sera-t-il imprimé et distribué ? (Oui.) (J. F., 17 nov.)
M. le président – En quel format le veut-on ? (J. F., 17 nov.)
- Plusieurs voix – Dans le moindre possible, in-18. (J. F., 17 nov.)
- L'impression en aura lieu dans le format portatif du règlement de la chambre des députés de France. (J. F., 17 nov.)
La séance est suspendue ; elle est reprise au bout de vingt minutes. (U. B., 17 nov.)
M. le président – On va donner lecture de deux propositions déposées sur le bureau, l'une de M. Constantin Rodenbach, et l'autre de M. Pirson. (U. B., 17 nov.)
Il est donné lecture de ces propositions ; celle de M. Constantin Rodenbach est conçue en ces termes :
« J'ai l'honneur de soumettre au congrès la proposition suivante : Quelle sera la nature du gouvernement ? » (A.)
Celle de M. Pirson est ainsi conçue :
« Je demande le renvoi en sections de la question de la monarchie ou de la république, et je propose qu'on se réunisse jeudi pour la discussion publique sur cet objet. » (E., 17 nov.)
M. Constantin Rodenbach – Le congrès national, destiné à prononcer sur le sort de notre patrie, vient de se constituer. Les esprits en suspens attendent avec anxiété le résultat de nos prmières délibérations. Il est à désirer que ce résultat soit conforme au vœu du peuple et à la dignité du pays.
C'est pour atteindre ce but, c'est pour mettre plus de célérité et plus de méthode dans les débats, que j'ai cru devoir demander qu'une discussion générale s'ouvrît et que le peuple belge décidât, par l'organe de ses représentants, quelle sera la nature ou la forme du gouvernement. .
J'ai pensé aussi que les « volontés » des puissances ne doivent pas faire loi dans le règlement de notre organisation future ; que la position particulière du pays et les convenances devaient, avant tout, être prises en considération.
C'est après la solution de cette question vitale qu'on pourra, il me semble, s'occuper avec opportunité de la constitution et du choix des chefs ou du chef de l'État.
Je demande le renvoi de ma proposition aux sections. (C.. 17 nov.)
M. le président demande si ces propositions seront envoyées aux sections. (J. B.. 17 nov.)
M. Nagelmackers pense que la première proposition doit être préférée. (C., 17 nov.)
M. Seron trouve au contraire la deuxième préférable : la question est mieux posée ; elle ne laisse que l'alternative entre la république et la monarchie constitutionnelle ; il n'y a pas ici de partisans de l'aristocratie, du despotisme ou de la théocratie. (C.. 17 nov.)
M. l’abbé de Foere – La question de M. Rodenbach me paraît être mal posée ; chaque forme de gouvernement a sa nature : il aurait fallu demander quelle sera la « forme » du gouvernement. (J. B., 17 nov.)
M. Nagelmackers – J'ai dit que l'une des propositions est superflue, le renvoi des deux propositions est inutile ; je vois du reste qu'il n'y a pas ici de partisans de la théocratie, de l’aristocratie et du despotisme. (C., 17 nov.)
M. Constantin Rodenbach . Je consens à ce qu'on substitue le mot « forme » au mot « nature ». (C., 17 nov.)
M. Delwarde préfère la première proposition, elle laisse plus de latitude. D'ailleurs on n'est pas d'accord sur le sens du mot de « République » (Interruption.) (C., 17 nov.)
M. Pirson retire sa proposition. (U. B.. 17 nov.)
M. le président. Y a-t-il dix membres qui demandent le renvoi aux sections ?
- Un grand nombre de députés se lèvent. (C., 17 nov.)
La proposition de M. Rodenbach est renvoyée à l'examen des sections. (P. V.)
M. Charles Le Hon demande que la proposition soit présentée sous une autre forme ; celle de question ne lui paraît pas convenable. (U. B., 17 nov.)
- De toutes parts – C'est décidé. (C., 17 nov.)
M. Pirson répond que c'est bien une proposition qu'on a faite. (J. F., 17 nov.)
M. Constantin Rodenbach. Il me semble qu'en bonne logique, soumettre une question au congrès et demander le renvoi en sections, c'est faire une proposition complète. (U. B., 17 nov.)
(page 147) M. Werbrouck-Pieters. - Messieurs, tous tant que nous sommes ici, nous n'avons qu'un même désir, qu'un même but, celui de contribuer de tous nos efforts au bonheur, à la prospérité de notre chère patrie.
Pour atteindre ce but, nous sommes appelés à donner aujourd'hui à nos provinces affranchies une forme de gouvernement qui convienne le mieux à leurs intérêts bien entendus ; un gouvernement dont la stabilité et la force donneront la plus grande garantie à l'Europe, un gouvernement enfin qui pourra, en nous conciliant les suffrages des puissances étrangères, éloigner à jamais de notre sol les guerres dont il a été tant de fois le théâtre, et nous assurer une part dans le commerce général sans lequel la Belgique sera privée des débouchés et des avantages que réclament impérieusement l'existence et l'état actuel de son industrie et de son agriculture.
Messieurs, pour parvenir à cet heureux résultat, nous pourrons quelquefois différer d'opinions, de moyens, peut-être même pourrons-nous parfois dans le cours de nos discussions émettre des opinions qui ne seront pas partagées par plusieurs d'entre nous, et n'être pas tout à fait d'accord avec quelques sentiments manifestés au dhors de cette enceinte, et surtout avec des écrits anonymes, pseudonymes ou tous autres qu'on aurait pu ou qu'on pourrait encore faire circuler pour, ni plus ni moins, nous imposer des devoirs qui ne sont ni conformes à notre mandat, ni d'accord avec notre conviction. - Il faut donc, messieurs, que la plus grande liberté d'opinions puisse régner en cette enceinte. Chaque membre doit pouvoir exprimer la sienne avec franchise, avec la plus entière indépendance, sans crainte comme sans arrière-pensée ; personne de nous ne doit être exposé à se voir menacé ou poursuivi de la part de qui que ce puisse être, à l'occasion des opinions et votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions de membre au congrès.
J'ai, en conséquence, l'honneur de vous proposer, messieurs, de décréter l'inviolabilité de chaque député et de vous soumettre le projet que déjà j'ai déposé au bureau, et qui est de la teneur suivante :
« Le congrès national,
« Considérant qu'il importe que la plus grande liberté d'opinion soit assurée aux membres du congrès national,
« DÉCRÈTE :
« Art. 1er. La personne de chaque député est inviolable.
« Art. 2. Aucun député au congrès ne pourra être poursuivi ni recherché à l'occasion des opinions ou des votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions. »
Messieurs, ce que j'ai l'honneur de vous proposer ici est ce qu'a fait l'assemblée nationale de France dans des circonstances à peu près analogues à celles dans lesquelles nous nous trouvons placés aujourd'hui.
Les passions ne sont pas assez calmées, le noble enthousiasme qu'inspire la victoire remportée par le peuple belge, au nom de la liberté, sur l'entêtement et le despotisme, ne permet point encore d'écouter de sang-froid les opinions qui ne flattent ou ne répondent point de suite et entièrement à toutes les généreuses utopies inspirées par le plus ardent amour de la patrie et de son indépendance. Longtemps encore, la raison des Belges se révoltera au souvenir des événements et des malheurs récents qui ont désolé notre pays, malheurs qui menacent encore la malheureuse ville d'Anvers sur laquelle le glaive de Damoclès reste toujours suspendu, puisque rien n'annonce jusqu'ici l'évacuation de sa citadelle.
Messieurs, vous le savez ; il est difficile de réunir aussi promptement et à la fois ce qu'il y a de plus contradictoire chez les hommes : l'impassibilité de la sagesse à la puissance de l'enthousiasme. Il faut donc une garantie réelle pour nous tous, quelle que soit notre opinion ; la véritable liberté est là ; c'est elle que vous allez consacrer ; c'est elle que nous devons soutenir et par la force morale et par la force physique. Ce n'est qu'au milieu de l'ordre que cette liberté peut vivre et vivifier. Le désordre et les troubles la font mourir. Ma proposition tend à la conservation de cet ordre et de notre indépendance. Elle n'est d'ailleurs, quant à l'article 2, que la répétition littérale des dispositions de l'article 76 du projet de constitution que nous allons examiner. Si on l'a crue nécessaire pour les chambres à venir, je crois qu'elle convient à plus forte raison au congrès, où la lumière doit jaillir du choc des opinions.
Je demande le renvoi de ma proposition aux sections. (J. A., 18 nov.)
- La proposition de M. Werbrouck-Pieters est appuyée et renvoyée à l'examen des sections. (J. A. 18 nov.)
(page 148) M. Pirson fait la proposition suivante - Le serment a toujours été considéré, par le peuple, comme devant avoir un effet salutaire dans les grandes solennités qui se rattachent au pacte qui doit lier les gouvernants et les gouvernés. Je propose le serment suivant, à prêter par tous les membres de cette chambre :
« Je jure ou promets que lors de mon vote rlatif à l'organisation des pouvoirs constitutionnels de la Belgique et au choix du chef ou des chefs de l'Etat, je ne consulterai que les intérêts généraux de la patrie, sans distinction de provinces et sans considération du plus ou moins de chance qui me reviendrait pour des fonctions publiques.» (C., 17 nov.)
- Cette proposition n'est pas appuyée. (U. B., 17 nov.)
M. Pirson fait une seconde proposition tendant à ce qu'il soit nommé une commission chargée de revoir le projet de constitution ou d'en présenter un nouveau. (C., 17 nov.)
M. le comte Vilain XIIII pense que cette proposition est prématurée. Il faut d'abord que la question relative à la forme du gouvernement soit résolue. (C., 17 nov.)
M. le baron de Stassart – Nos dix sections sont, je crois, les comités naturels chargés de l'examen préliminaire du projet de loi fondamentale. La proposition de l'honorable M. Pirson tendrait à nous entraîner vers des lenteurs inutiles et peu compatibles avec les besoins impérieux de la patrie. (J.B., 17 nov.)
- La proposition de M. Pirson n'est pas appuyée. (U. B., 17 nov.)
L'ordre du jour est la proposition de M. le comte de Celles (C., 17 nov.)
M. le président invite M. le comte de Celles à développer sa proposition. (U. B.. 17 nov.)
M. le comte de Celles – M. le président, par des considérations étrangères au fond de ma proposition, mais importantes dans l'intérêt général du pays, j'ai été prié de remettre à jeudi le développement de ma proposition. (U. B., I7 nov.)
M. Constantin Rodenbach – Par les mêmes raisons, j'ajourne un amendement que j'ai fait à la proposition de M. de Celles. (U. B., 17 nov.)
M. Pirson – Et moi un sous-amendement, quoique je ne sois pas heureux en propositions. (Rire universel.)(U. B., 17 nov.)
M. Werbrouck-Pieters – Sur l'observation d'un membre, j'ajouterai le paragraphe suivant à ma proposition :
« Chaque membre du congrès national est placé sous la protection spéciale de la garde civique de Bruxelles. » (De toutes parts : Oh ! oh ! allons donc !) (U. B., 17 nov.)
M. le président – Nous sommes sous une protection plus large que celle que l'on nous propose, sous celle du peuple belge tout entier. (Bravos.) (U. B., 17 nov.)
- Cette motion n'a pas de suite. (C., 17 nov.)
M. de Labeville propose d'ajouter à la proposition de M. Werbrouck-Pieters, qu'aucun membre du congrès ne pourra être poursuivi pendant la durée de la session, pour quelque crime que ce soit, sans une autorisation de l'assemblée.
- De toutes parts. - C'est inutile. (C., 17 nov.)
- L'assemblée décide que les députés se réuniront en sections, demain à dix heures, et fixe la séance publique à une heure.
Il est trois heures et demie ; la séance est levée. (P. V.)