(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1850-1851)
(Présidence de M. Verhaegen.)
(page 1235) M. A. Vandenpeereboom procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
La séance est ouverte.
M. T’Kint de Naeyer lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.
M. A. Vandenpeereboom présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la chambre.
« Le conseil communal de Mariembourg demande que le gouvernement soit autorisé à venir en aide à la compagnie concessionnaire du chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse, pour l'achèvement de cette voie de communication. »
M. de Baillet-Latour. - Je proposerai le renvoi de cette requête à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport, et je ferai, dès à présent, la même proposition pour une pétition qui arrivera ces jours-ci, accompagnée d'un mémoire sur l'urgence du chemin de fer dont il s'agit.
- La proposition de M. de Baillet-Latour est adoptée.
M. Deliége fait le rapport suivant. - Messieurs, dans votre séance du 29 avril dernier, M. le ministre des finances a présenté des amendements aux articles 4, 21 et 39 du projet de loi portant institution d'une caisse de crédit foncier.
Nous allons successivement examiner ces amendements et les observations qui en ont nécessité le renvoi à la section centrale.
M. le ministre a proposé d'ajouter à l'article 4 ces mois :
« Le conseil d'administration peut, avec l'autorisation du gouvernement, augmenter ou diminuer cette dernière partie de l'annuité, selon les besoins auxquels elle est destinée à pourvoir, sans que l'annuité puisse être portée au-delà de 5 1/2 p. c. »
On a demandé si la mesure qui, en exécution de cette disposition, augmenterait la contribution pour frais d'administration, aurait un effet rétroactif. M. le ministre a répondu que, dans sa pensée, elle n'aurait d'effet que pour l'avenir.,
On a insisté en disant que, si l'amendement n'était pas plus explicite, l'administration de la caisse aurait le droit de rédiger ses contrats de telle manière que l'emprunteur fût obligé, quand elle le voudrait, à supporter une aggravation de charge. En conséquence, non content de la réponse de M. le ministre, on a demandé que le doute fût levé par la loi même.
Mais ne convient-il pas d'admettre au lieu de repousser l'effet rétroactif ?
La réponse doit être négative.
Indépendamment d'une contribution de 1 p. c. pour le fonds de réserve, chaque emprunteur est éventuellement tenu de payer trois annuités supplémentaires. On ne peut songer à créer une nouvelle éventualité, d'après laquelle l'annuité pourrait être augmentée de 1/4 p. c. pour une période de 42, et même de 45 ans, à charge des emprunteurs qui auraient contracté immédiatement avant l'arrêté d'augmentation.
Comme la caisse ne s'adresse pas seulement aux propriétaires gênés, qui sont prêts à subir les conditions les plus défavorables ; comme il s'agit d'organiser le crédit dans des conditions qui permettent aux propriétaires d'emprunter des capitaux pour les employer productivement, pour augmenter leur avoir et, avec lui, la richesse nationale, il importe de ne pas les éloigner en augmentant l'incertitude de leur position au-delà de ce qui est strictement nécessaire.
Il y aurait entre l'éventualité relative aux annuités supplémentaires et celle qui obligerait de payer 3/8 au lieu de 1/3 p. c. pour frais d'administration, cette différence que les bases du projet de loi permettent de considérer la première comme irréalisable ; tandis que, en l'absence de tout élément d'appréciation en ce qui concerne les frais de gestion, la seconde éventualité serait considérée à peu près comme réalisée, dans les calculs des propriétaires emprunteurs.
Il ne suffirait pas, du reste, d’introduire dans la disposition proposée par M. le ministre les mois : « à l'avenir » ou « sans effet rétroactif ». En effet, si, au lieu de devoir être augmentée, la contribution pour frais d'administration était un jour susceptible d'être diminuée, à cause que la recette du chef des emprunts déjà contractés excéderait la dépense, ne serait-il pas juste de faire participer au bénéfice de la diminution les débiteurs non libérés ? Dans l'affirmative, l'effet rétroactif ne doit être écarté par le texte de la disposition qu'à raison de l'augmentation du 1/8 p. c. La rédaction proposée par M. le ministre permettrait d'appliquer la disposition dans le sens qui vient d'être indiqué.
Cependant pour qu'elle soit plus explicite et afin que le changement que l'annuité pourrait subir en plus ou en moins ne soit pas décrété sans de graves motifs, la section centrale vous propose de rédiger ainsi la disposition à ajouter à l'article 4.
» Cette dernière partie de l'annuité pourra être augmentée ou diminuée par arrêté royal, selon les besoins auxquels elle est destinée à pourvoir sans que l'annuité puisse être portée au-delà de 5 1/2 p. c.
« Toutefois l'arrêté autorisant une augmentation ne sera applicable qu'aux emprunts contractés après sa publication. »
Art. 21. M. le ministre a proposé d'ajouter ces mots :
« Les deux derniers paragraphes sont également applicables au cas où les offres ont été faites au domicile stipulé pour le payement. »
On s'est demandé si, dans ses rapports avec les autres paragraphes de l'article 21 et avec l'article 20, l'amendement ne laisse pas des doutes sur le point de savoir si l'assignation en validité doit être portée devant le tribunal dans l'arrondissement duquel se trouve le domicile stipulé pour le payement qui a été offert et refusé à ce domicile, ou bien devant le tribunal dans le ressort duquel est établi le bureau des hypothèques où l'opération a commencé et où est prise l'inscription au profit de la caisse ?
Si l'on considère que les offres réelles ne peuvent être faites que par un officier public résidant dans l'arrondissement où se trouve le domicile stipulé pour le payement (abstraction faite des attributions plus étendues des officiers résidant aux chefs-lieux où siègent les cours d'appel) ; et que, dans l'intention des parties qui ont contracté, la stipulation du domicile implique la compétence du tribunal du même arrondissement pour connaître des contestations relatives au payement, la disposition devrait être appliquée dans le sens que M. le ministre lui a assigné. Telle est aussi la marche qui doit être préférée au point de vue pratique. En effet, c'est le conservateur des hypothèques dans le ressort duquel se trouvent le domicile et l'officier public chargé de faire les offres réelles, qui devra se mettre en rapport avec cet officier, et, en cas de refus des offres, faire la recette comme receveur des consignations.
D'un autre côté, nous croyons que c'est à tort, que l'honorable M. Lelièvre a considéré la contestation comme se rattachant à l'inscription, ce qui impliquerait la compétence du tribunal delà situation des immeubles hypothéqués.
Le droit d’hypothèque du créancier n'est pas contesté et l'inscription est tenue pour valable, puisque le débiteur offre de se libérer : la contestation n'est donc relative qu'au payement, et elle exclut l'idée d'une action réelle ; d'où il résulte que celui qui a offert et assigné en validité étant demandeur, doit suivre le créancier défendeur, et que le domicile stipulé pour le payement détermine encore sous ce rapport la compétence du tribunal de ce domicile.
Enfin, pour lever les doutes, la disposition pourrait être rédigée comme suit :
« Les deux derniers paragraphes sont également applicables au cas où les offres ont été faites au domicile stipulé pour le payement. Toutefois, dans ce cas, l'assignation sera portée devant le tribunal du domicile où des offres ont été faites. »
Art. 39. Cet article, tel qu'il a été adoplé au premier vote, déclare exempts de la formalité de l'enregistrement les actes faits en vertu des articles 16, 17, 18, 19 et 20. Or. l'article 16 est relatif aux actes d'emprunt ; le changement de rédaction proposé par M. le ministre ne contient donc rien de nouveau à l'égard de ces actes.
Reste l'objection d'après laquelle ce serait introduire dans notre législation une très grave anomalie, et très inutilement, que d'admettre que des actes authentiques ne seront pas soumis à la formalité de l’enregistrement.
La loi civile attache un effet important à l'enregistrement des actes sous seing privé, qui acquièrent ainsi date certaine à l'égard des tiers ; mais sous ce rapport l'enregistrement n'est pas nécessaire pour les actes authentiques. D'un autre côté, la perte d'un acte ne peut être suppléée par sa transcription sur les registres publics ; cette transcription ne peut servir que de commencement de preuve par écrit, et encore faut-il pour cela la réunion des circonstances prévues par l'article 1336 du Code civil. Or, comme il s'agit d'actes d'emprunt dont la substance doit être constatée immédiatement après leur passation sur les registres hypothécaires, la formalité de l'enregistrement est complètement inutile quant à leurs effets civils.
Dans un autre ordre d'idées, l'enregistrement obligatoire des actes authentiques présente certaines garanties : coordonné avec l'obligation par des notaires et autres officiers publics de tenir des répertoires, il concourt à assurer la conservation des actes, à prévenir les fausses dates et en général à faire découvrir les contraventions aux lois organiques des offices ministériels.
Eh bien, dans cet ordre d'idées encore, on peut sans inconvénient exempter de la formalité de l'enregistrement des actes pour lesquels non seulement l'impôt ne doit pas se percevoir au moment de l'enregistrement, mais qui ne sont faits que pour être aussitôt reproduits dans les registres des conservateurs des hypothèques.
En présence des considérations qui précèdent, l'enregistrement ne s'offre plus que comme entraînant une multiplication d'écritures, un circuit et des retards, sans aucune espèce d'avantages, alors qu'il s'agît d'une opération qu'il est utile de terminer promptement.
(page 1236) Tels sont les motifs que l’on peut invoquer en faveur de la dispense de la formalité de l'enregistrement.
Il y a d'ailleurs d'autres actes authentiques qui sont affranchis de la formalité de l'enregistrement.
La loi du 22 frimaire an VII a consacré un paragraphe composé de 16 numéros, aux actes exempts de la formalité, et plusieurs des actes exemptés peuvent être reçus par les notaires. Quant aux exceptions postérieurement introduites, il y a dans la loi de budget du 11 février 1816, une disposition qui est encore en vigueur, portant que « l'acte d'emprunt sur fonds publics, marchandises et autres biens meubles, pourvu qu'il ne soit fait ou continué que pour six mois au plus, ne sera point assujetti aux formalités ni aux droits d'enregistrement. »
Si la chambre voulait maintenir la formalité de l'enregistrement pour les actes d'emprunt, on pourrait modifier le premier paragraphe du nouvel article comme suit :
« Les actes, documents et registres qui seront faits et tenus en exécution de la présente loi, sont affranchis de la formalité du timbre et des droits d'enregistrement, sauf... » (le reste comme au projet).
Art. 28. On a aussi renvoyé à la section centrale le paragraphe 7 de l'article 28, ainsi conçu :
« L'adjudication est indiquée par des affiches ; ces affiches sont apposées 20 jours au moins avant celui de l'adjudication à la principale porte des bâtiments dont la vente est poursuivie, à la principale porte des communes de la situation des lieux... »
On a dit que cette disposition serait inexécutable ; que la plupart des communes n'avaient aucune porte.
L'expression employée est, comme l'a très bien fait remarquer l'honorable M. Lelièvre, celle dont les rédacteurs du Code de procédure se sont servis.
Il est évident qu'il est ici question de la principale porte de la maison communale de la situation des biens.
Pour éviter tout doute, la section centrale vous propose de rédiger ainsi le paragraphe 7 de l'article 28 :
« L'adjudication est indiquée par des affiches ; ces affiches sont apposées, vingt jours au moins avant celui de l'adjudication, à la principale porte des bâtiments dont la vente est poursuivie, à la principale porte des maisons communales des lieux où les biens sont situés et à celle du notaire commis. »
M. le président. - Avant tout, il conviendrait de statuer sur l'article 13, qui est maintenant l'article 12.
M. Malou avait proposé de revenir sur cet article, de retrancher du paragraphe premier les mots : « le choix des experts appartient à la caisse », et de rédiger le paragraphe 5 de la manière suivante : « Dans tous les cas, le choix des experts appartient à la caisse, et les frais de l'expertise sont à la charge du propriétaire. »
M. le ministre des finances s'est rallié à cette proposition.
- La proposition de M. Malou est adoptée.
M. le président. - L'article 4 avait été réservé. La section centrale propose une nouvelle rédaction de la disposition qui avait été ajoutée à cet article. Voici cette nouvelle rédaction :
« Cette dernière partie de l'annuité pourra être augmentée ou diminuée par arrêté royal, selon les besoins auxquels elle est destinée à pourvoir, sans que l'annuité puisse être portée au-delà de 3 1/2 p. c.
« Toutefois l'arrêté autorisant une augmentation, ne sera applicable qu'aux emprunts contractés après sa publication. »
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Sur le premier point, M. le président, je préfère la rédaction du projet : « Le conseil d'administration peut, avec l'autorisation du gouvernement... » La section centrale propose de dire : « Cette dernière partie de l'annuité pourra être augmentée ou diminuée par arrêté royal... » Il me paraît qu'il est plus convenable, plus conforme à l'esprit général de la loi, plus conforme aussi aux intentions manifestées dans cette chambre, de laisser au conseil d'administration le soin de décider ce point, sous l'approbation du gouvernement ; cela donne plus à la caisse le caractère de société que nous avons entendu lui attribuer.
Pour le reste, je me rallie à la proposition de la section centrale.
M. Osy. - J'ai à faire observer que le paragraphe qu'on propose d'amender a été admis au premier vote sans changements ; ainsi on pourrait demander la question préalable. Mais, comme je l'ai dit lors du premier vote : quoique contraire au principe de la loi, je me soumettais à la majorité et voulais faire tout ce qui dépendait de moi pour rendre la loi la moins mauvaise possible. Je veux donc bien discuter la proposition du gouvernement, mais c'est un antécédent dont je tiendrai note dans d'autres occasions, pour faire des propositions qui puissent améliorer les lois, quoique les articles n'aient pas subi de changements au premier vote.
A cette occasion, je demanderai plus tard la parole sur l'article 42 qu'on n'a pas mis avant-hier en discussion, quoique ce fût un amendement de la section centrale et que nos délibérations portassent sur la rédaction primitive du gouvernement.
Lors de la discussion de l'article 4, je fis observer que, d'après mes calculs et en prenant pour base les traitements alloués et les frais prévus pour la banque nationale et la caisse de retraite, il faudrait une somme de 80,000 à 100,000 fr. par an pour cette caisse et qu'à raison de 1/8 p. c. par an, il faudrait que la caisse eût avancé 80 millions sur hypothèque pour satisfaire aux frais d'administration, pour que cette charge n'en devînt pas une pour le trésor.
A cette occasion et pour d'autres observations faites par l'opposition et entre autres par moi, on nous a dit que nous faisions tout ce que nous pouvions pour entraver l'exécution de la loi et on a dirigé contre nous des insinuations peu obligeantes ; et cependant la demande que vous fait aujourd'hui M. le ministre des finances prouve que nous avions raison de nous occuper des détails de la loi et de dire que votre loi était mal étudiée et que nous voulions faire tout ce qui dépend de nous, pour éviter une charge pour le trésor, soit dans le début, soit par la suite, maintenant qu'à force d'instance nous avons trouvé un débiteur en disant qu'après 3 annuités, la perte serait pour les créanciers.
Comme il est vraisemblable qu'aussi longtemps que vos 4 p. c. sont à 84, le public ne voudra pas vos lettres de gage à 4 p. c. au pair, vous serez obligés de faire prendre des capitaux dans les caisses publiques existantes, d'après l'article 42, et dans celles que vous créerez plus tard comme caisses d'épargne, etc., etc. Vous voyez donc, messieurs, que, finalement, le créancier de la caisse du crédit foncier sera le gouvernement et les caisses dont il a la haute surveillance.
Je crois donc pouvoir dire que, finalement, les pertes retomberont sur l'Etat, nonobstant les précautions prises par l'article 6.
Dès le début de la discussion, le gouvernement nous a dit que l'on nous proposait d'établir la caisse du crédit foncier parce que chez le particulier et aux caisses hypothécaires l'argent revenait trop cher aux emprunteurs, et cependant nous avons prouvé que de très fortes sommes étaient levées à 4 p. c. et que la moyenne des emprunts était 4 1/2 p. c. Et voilà que, par un amendement, vous détruisez tous vos raisonnements et donnez raison à l'opposition qui ne veut pas de votre caisse et vous demande seulement une bonne loi hypothécaire. Alors, nous en étions persuadés, le public trouverait, tant pour de fortes sommes que pour des sommes minimes, tout l'argent qu'il faut chez les particuliers et aux caisses hypothécaires qui existent dans le pays et qui seraient créées par la suite sans le concours du gouvernement.
Pour moi, je suis persuadé qu'une fois votre caisse organisée, les frais annuels se monteront largement à 80,000 fr. Mais je veux être généreux et je réduis tout de suite la dépense à 50,000 fr. Or, pour pouvoir satisfaire à cette dépense à raison de la nouvelle proposition de 3/8 p. c. par an, au lieu de 1 /8, il faudra que la caisse ait prêté une somme de 14 millions pour pouvoir faire ses frais, ainsi, il est vraisemblable que dès le début vous devrez fixer le taux de l'annuité à 5 1/2 au lieu de 5 1/4.
Ainsi l'emprunteur doit savoir, qu'outre l'amortissement de 1 p. c, il aura à payer tous les ans un intérêt de 4 1/2 p. c. par an, qui est augmenté de sa quote-part du 1 p. c. pour la formation du fonds de réserve ; mais comme avec les intérêts composés de 1 p. c. d'amortissement on est libéré dans 41 ans et qu'il doit en tout cas payer 42 annuités, et qu'il peut être appelé à suppléer 3 annuités, ces 4 annuités à 5 1/2 p. c. font 22 p. c, qui, répartis sur les 42 ans, font 1/2 p. c. par an qu'il pourra être appelé à payer ; ainsi, et je ne puis assez le répéter, l'emprunteur doit savoir qu'en s'adressant à votre caisse, dans les meilleures chances il aura 4 1/2 p. c. à payer et dans les mauvaises, son intérêt peut aller à 5 p. c. Mais ce n'est pas tout, ceux qui croiront être libérés dans 41 ans, doivent savoir qu'en tout cas, lors de la liquidation et libération il y aura un petit décompte avec la caisse, qui ne peut pas être moins du 20ème du capital, mais qui dépassera le 5ème, soit 22 p. c.
Nous ne devons induire personne en erreur, et celui qui voudra se ruiner en s'adressant à votre caisse doit savoir, que chez un particulier, pour la libération, il ne doit payer que 100 p. c., plus les menus frais d'environ 1 1/2 p. c. pour l'acte d'hypothèque, tandis qu'avec votre caisse, il aura peut-être à payer 122 p. c. pour sa libération, mais il est vrai qu'il économisera 1 1/2 p. c. pour les premiers frais et la confection de la grosse.
Maintenant je suis généreux en disant que l'emprunteur n'aura pas d'autres charges à supporter pour la négociation de ses lettres de gage, mais s'il ne pouvait les négocier qu'à 85, il perd 15 p. c., soit sur 42 ans, un intérêt annuel de 3/8 p. c.
S'il négocie à 90 p. c., ces 10 p. c. répartis sur 42 ans, font 1/4 p. c. Ainsi il doit encore savoir que l'argent qu'il lève peut même lui revenir à 5 1/4 et même 5 3/8 p. c. par an, s'il devait perdre sur ses lettres de gage.
Vous voyez, messieurs, que la proposition de M. le ministre est la condamnation de son projet de loi, et plus on l'examine, plus on trouvera que nous avions raison de la combattre.
Cette caisse sera donc très onéreuse pour l'Etat ou pour les caisses qui sont ou seront appelées à absorber vos lettres de gage, et les populations qui, séduites par vos beaux prospectus, se feront prendre en s'y adressant doivent savoir que cet appât de pouvoir se libérer en 42 ans par un versement d'un p. c. par an, peut un jour leur coûter très cher, et sans avantages réels puisque, en tous cas, maintenant par la proposition du gouvernement, qu'il a été obligé de faire par suite de nos observations, on doit savoir que l'on aura au moins un intérêt de 4 1/2 à payer, tandis qu'avec une bonne loi d'expropriation, que nous aurions dû faire pour tout le monde, mais non comme privilège de la caisse, le public aurait facilement trouvé, chez les rentiers, de l'argent à 4 p. c, tant pour des sommes fortes que pour des minimes.
Par tous ces raisonnements, et pour éviter des pertes au trésor et surtout aux caisses appelées à prendre vos lettres de gage, je donnerai mon assentiment à la proposition du gouvernement, tout en votant contre l'ensemble de la loi. Mais, je le répète, c'est la condamnation de votre malheureux projet ; et je dirai, comme en 1845, quand on engageait les caisses publiques à prendre des actions de la colonie de Santo-Tomas.
(page 1237) J'espère que les administrateurs des diverses caisses mentionnées à l'article 42 qu'ils seront plus sages que le gouvernement, et prendront d'autres emplois que vos lettres de gage ; et je fais des vœux pour que le public emprunteur sache bien à quoi il s'expose en s'adressant à votre caisse.
Elle ne sera pas faite pour les petits cultivateurs, mais pour aider à la ruine des grands, dans un siècle de dépenses et de luxe qui obligent tant de personnes à avoir recours au crédit, pour pouvoir payer à la fin de l'année toutes les folles dépenses, et qui doivent à la longue laisser aux héritiers des fortunes très obérées si la ruine ne se trouve pas à la suite de toutes vos belles conceptions.
En 1821, le gouvernement hollandais avait consulté les états provinciaux sur l'établissement de caisses foncières et agricoles, et je crois que tous, sans exception, les ont repoussées. A Anvers, les rapports des états sont très curieux, et M. le ministre aurait bien fait de les consulter.
On m'assure que l'Empereur, en 1805 ou 1807, avait aussi fait étudier le système allemand et polonais, que les rapports qu'il a reçus de ses agents n'ont nullement été favorables, et qu'on a eu la preuve que les seigneurs polonais, qui s'étaient adressés à la caisse instituée après la guerre de sept ans, pour augmenter et faciliter leurs dépenses, ont presque tous été expropriés et que les grandes terres appartenant à des Polonais sont venues dans les mains des Prussiens. C'était peut-être un but politique d'alors, n'y aurait-il rien de politique dans votre loi ? On aurait bien fait de prendre à ce sujet des renseignements exacts et avant la discussion devant le sénat.
Je vous cite donc les autorités des états provinciaux de 1821, et les renseignements pris par l'Empereur ; voilà des autorités qu'il ne fallait pas négliger.
Mais vous avez aujourd'hui, et c'est très honorable, l'approbation des journaux rouges de Paris, qui seuls applaudissent à votre loi ; car, comme chez nous, la commission agricole de France ne demande pas de caisse de crédit par le gouvernement, mais sous la surveillance du gouvernement et une bonne loi d'expropriation et d'hypothèques. Nous ne demandons pas autre chose.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, nous pourrions convenir d'une chose avec l'opposition, afin d'arrêter cette discussion : c'est que la loi est détestable. La loi, c'est l'honorable M. Osy qui vient de le dire, est destinée à ruiner les propriétaires, les prêteurs, l'Etat...
M. Osy. - Les caisses dépendant de l'Etat.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il y aura ruine pour tout le monde. Les propriétaires qui emprunteront à la caisse feront une opération déplorable et seront ruinées ; les personnes qui prendront des lettres de gage seront ruinés ; et comme, par l'article 44 de la loi, on autorise éventuellement les provinces, les communes, les établissements publics et la caisse des dépôts de consignation à placer leurs capitaux en lettres de gage, il en résulte, selon l'honorable membre, que les pertes que les provinces, les communes, les établissements publics et la caisse des dépôts et consignations devront subir, finiront par réagir contre l'Etat qui, à son tour, sera ruiné avec tout le monde !
Au milieu de ce désastre universel, quelqu'un gagnera probablement ; mais ce quelqu'un n'a pas été indiqué ; c'eût été pourtant une consolation. L'honorable M. Osy, qui n'aime pas les insinuations, a fait entendre qu'il pourrait y avoir une pensée politique dans le projet, et, d'après les sinistres prophéties de l'honorable membre, on doit croire que cette pensée politique n'est autre que de préparer un bouleversement général. L'honorable membre est très modéré, il faut en convenir.
Seulement nous ferons une petite observation : puisqu'on est convaincu que l'institution prépare tant de ruines et qu'on se hâte d'avertir les emprunteurs et les prêteurs, les dangers que l'on fait entrevoir, n'arriveront pas. Le public sera bien éclairé, grâce à l'honorable M. Osy.
Il ne faut pas que l'honorable M. Osy se persuade pourtant qu'il ait fait de grandes découvertes ; car, en définitive, il n'a fait que ce que tout le monde a pu faire depuis que le projet de loi est publié, c'est-à-dire calculer ce qu'il en coûterait pour s'engager dans les opérations de la caisse.
Cela est extrêmement simple. Tout le monde a fait cette opération ; mais le public en a fait une seconde qui a été omise par l'honorable membre, celle de savoir à quel taux on emprunte quand on s'adresse aux établissements qui font des opérations analogues à celles que fera la caisse de crédit foncier.
Que l'honorable membre se demande si celui qui emprunte à ces établissements est mieux traité qu'il ne le serait s'il s'adressait à la caisse, si ces établissements offrent plus de garanties que n'en auront les porteurs de lettres de gage ; el s'il reconnaît qu'on fait beaucoup mieux que ce que l'on se propose de faire, qu'on ne court pas les risques qu'on courra à la caisse, il aura démontré l'inutilité de la caisse.
Mais si en s'adressant à cette caisse, toutes rigoureuses que M. Osy trouve ses conditions, on est mieux traité qu'on ne l'est par les établissements privés ; bien mieux, si les conditions générales des emprunts se trouveront notablement améliorées, il est évident que ce que nous proposons vaudra mieux que ce qui existe ; par conséquent on usera de l'institution.
L'honorable membre dit qu'en 1821 le gouvernement des Pays-Bas avait proposé l’établissement de caisses de crédit foncier et agricole, et que l'institution a été repoussée par la plupart des étals provinciaux qui ont été consultés. Il a demandé si je n'aurais pas bien fait d'étudier ce projet et le rapport dont il a été l'objet. Je me permettrai de demander à l'honorable membre s'il a étudié les projets el les rapports qui ont été faits à cette époque. Si vous aviez étudié le projet et le rapport fait par les états provinciaux d'Anvers, vous n'énonceriez pas les opinions que vous venez d'exprimer.
Quel était le projet qui fut soumis aux états provinciaux ? Avait-il la moindre analogie avec celui que nous voulons fonder ? On proposait la création d'une caisse de crédit foncier et agricole ; mais l’auteur du projet avait fort mal compris les institutions de l'Allemagne et les dénaturait. Le projet ne contenait pas la prescription formelle de l'amortissement. C'est-à-dire que sans cette condition je n'accepterais pas le projet ; je le repousserais si la clause de l'amortissement n'y était pas insérée.
Par une bizarrerie inexplicable, on faisait une retenue au propriétaire qui empruntait pour la faire servir à l'établissement du crédit agricole ! Je demande comment avec une pareille combinaison il était possible d'espérer de faire fonctionner l'institution ? D'autres vices tout aussi manifestes, tout aussi radicaux infectaient le projet de loi ; mais on reconnaissait, par le projet même, qu'il y avait quelque chose à faire. On établissait les vices que le projet renfermait, mais on ne niait pas les avantages que devait présenter la réforme du crédit foncier.
L'honorable M. Osy ne méconnaîtra pas ce que je viens d'indiquer.
Le taux auquel on propose de fixer éventuellement les frais d'administration constitue une mesure de prudence pour le cas où, les opérations de la caisse se trouvant trop limitées, il serait impossible de couvrir avec le huitième pour cent toutes les dépenses de l'administration ; mais l'honorable membre a parfaitement tort quand il énonce que c'est lui qui a révélé que les frais d'administration pourraient bien ne pas être couverts par le huitième pour cent.
Il a pu lire dans l'exposé des motifs du projet, avant toute espèce d'observations de sa part, que l'on calculait que les frais d'administration seraient couverts avec le tantième de 1-8 p. c, seulement lorsque les opérations auraient atteint un certain degré d'importance ; et dans la discussion j'ai dit qu'il y avait nécessairement là quelque chose d'éventuel, que ce 1/8 p. c. pouvait être ou trop élevé ou trop bas ; trop élevé si les opérations dépassaient un certain chiffre, car une fois arrivé, je suppose, à 40 millions, ainsi que je l'ai établi dans l'exposé des motifs, après quelques années il y aurait une ressource beaucoup trop considérable pour couvrir les frais d'administration, après quelques années il y aurait une ressource permanente de plus de 500,000 fr. pour faire face à une dépense évaluée par l'honorable M. Osy lui-même à une somme de 100,000 fr.
Le développement de la caisse étant arrivé à ce point, il faudrait réduire le 1/8 p.c. pour frais de l'administration. Faut-il supposer au contraire que les opérations seront plus limitées, qu'elles ne s'élèveront qu'à 8 ou 10 millions ? Dans cette hypothèse le 1/8 p. c. devrait être augmenté.
Mais ce qu'il faut avoir soin de dire aux personnes que vous voulez éclairer, c'est que s'il y a possibilité d'augmentation, il y aura aussi possibilité de diminution. Ce que vous pouvez ajouter, c'est qu'en aucun cas les personnes qui auront traité avec la caisse ne verront leurs charges s'élever, les stipulations qui ont été faites seront respectées ; ce que vous pouvez ajouter, c'est que, jusqu'à l'époque où la caisse sera en pleine activité, jusqu'à l'époque où on aura pu juger de l'importance de ces opérations, les frais d'administration ne se composeront pas des dépenses que vous avez indiquées, que la caisse pourra être mise en mouvement au moyen d'agents dont le gouvernement disposera sans peine, sans frais pour l'Etat ; que, par conséquent, l'épouvantail que vous agitez pour montrer les risques que la caisse pourra faire courir aux personnes qui y auront recours, n'est qu'un mauvais moyen imaginé par un adversaire de la loi qui ne cherché qu'à la détruire en déclarant qu'il a surtout en vue de l'améliorer.
M. Osy. - M. le ministre trouve très extraordinaire que j'aie trouvé trois catégories de personnes qui perdront à l'institution de la caisse du crédit foncier. Rien n'est cependant plus simple : ainsi l'emprunteur se ruinera, lorsqu'il devra payer une annuité de 5 et 1 /4, alors qu'il ne tire de sa terre que 2 1/2. Evidemment il sera ruiné avant la 45ème année.
M. le ministre demande comment, quand l'emprunteur perd, le créancier perdrait également. Voici comment :le gouvernement fera prendre des lettres de gage par toutes les caisses publiques. S'il survient des événements politiques qui produisent une baisse des fonds publics, comme cela est arrivé malheureusement en 1848 et à d'autres époques, les caisses publiques, ayant besoin de leurs fonds, ne seront-elles pas obligées de vendre leurs lettres de gage, quel qu'en soit le cours. Je veux admettre que cela n'arrivera pas aux bureaux de bienfaisance, parce que leurs placements ont un caractère de permanence. Mais la caisse d'épargne, qui aura des remboursements à faire, devra vendre à perte.
Vous voyez que j'ai eu raison de dire que les caisses publiques, les emprunteurs et les créanciers pourront perdre.
M. le ministre me répond en supposant que j'ai dit : « Il peut y avoir perte, si les rouges viennent. » Ce n'est pas ainsi que je l’ai entendu. J'ai seulement dit que, depuis quinze jours, les journaux rouges étrangers approuvent tous votre loi ; je n'ai trouvé que dans les journaux rouges l'approbation de votre loi.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Vous avez très mal lu.
M. Osy. - J'ai vu beaucoup de monde dans les quinze jours de notre séparation ; c'étaient des gens sensés, des gens froids, se connaissant parfaitement en finances, et je n'en ai pas trouvé un seul qui approuvât votre projet.
(page 1238) Messieurs, je ne crains pas que l'on enlève les propriétés qui seront données en gage à la caisse ; je n'ai pas parlé des rouges dans ce sens.
Il me reste une observation à faire quant aux frais d'administration.
M. le ministre des finances avait dit primitivement, dans son exposé des motifs, que cess frais pourraient se monter à 80,000 francs et qu'il demanderait peut-être un crédit à la législature pour couvrir ces 80,000 francs. Alors nous avons fait l'observation qu'il faudrait 80 millions d'hypothèques pour couvrir ces frais.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - C'est une erreur ; je n'ai pas parlé de 80,000 francs de frais d'administration.
M. Osy. - Vous avez dit dans l'exposé des motifs que vous pourriez demander 80,000 francs à la législature.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Comme avance pour frais d'établissement et non pour frais d'administration.
M. Osy. - Eh bien ! j'ai fait le calcul que, pour couvrir ces 80,000 fr. de dépenses, il faudrait 80 millions d'hypothèque, et M. le ministre alors nous a combattu.
Mais, depuis lors, M. le ministre a vu que si les opérations de la caisse, ne prenaient pas, dès le début, une grande extension, la perte pourrait être considérable, et c'est pour cela qu'il nous a demandé l'augmentation d'un quart p. c. pour frais d'administration. Je répète que, pour les institutions qui seront autorisées à prendre des lettres de gage, c'est là une amélioration. Mais ce sera un motif de plus pour les propriétaires qui voudront lever de l'argent, de se garder de s'adresser à votre caisse. Car, lorsque l'on aura une bonne loi d'expropriation, on trouvera de l'argent à 4 p. c. sans devoir s'obliger à payer des annuités qui ruineront les propriétaires, puisqu'ils devront, comme je l'ai dit, payer 5 1/2 p. c. lorsqu'ils n'auront qu'un revenu de 2 1/2.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je répondrai un seul mot à l'honorable M. Osy. L'honorable membre raconte à la chambre qu'ayant passé la quinzaine de Pâques à lire les journaux rouges, il y a trouvé approbation du projet du gouvernement. C'est assez pour que l'honorable membre le condamne. Il est fâcheux que l'honorable membre n'ait passé son temps qu'à lire les journaux rouges ; car il aurait pu en lire d'autres qui auraient peut-être dissipé son erreur.
Il aurait pu lire l'Ordre ; c'est un journal peu rouge ; on le regarde même comme passablement réactionnaire.
Il aurait pu lire le Constitutionnel, qui est encore un peu moins rouge. Il aurait trouvé dans ces journaux une analyse complète, et une approbation non équivoque du projet que vous venez de discuter et d'adopter.
Si l'approbation des journaux rouges, blancs ou noirs est nécessaire à l'honorable M. Osy, pour qu'il puisse se former une opinion sur les projets de loi, il est à regretter qu'il ne consulte que ceux qui doivent l'effrayer.
L'honorable M. Osy dit que j'ai annoncé dans l'exposé des motifs qu'il faudrait 80,000 fr. par an pour frais d'administration. Je porte le défi à l'honorable M. Osy de trouver cela dans l'exposé des motifs. Je ne l'ai dit nulle part.
M. Osy. - Vous avez dit que vous demanderiez peut-être un crédit de 80,000 fr.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Mais lisez donc l'exposé des motifs tel qu'il est. J'ai dit que, pour les premiers frais d'établissement de la caisse, je serais obligé de faire, à titre d'avance, la demande d'un crédit de 70,000 à 80,000 fr. à la législature. Ne comprenez-vous pas qu'il faut fournir un matériel à l'administration, qu'il faut créer les registres, les titres, avant que la caisse puisse faire une seule opération, et par conséquent, qu'il est indispensable qu'un crédit de 60,000 à 80,000 fr., enfin de la somme nécessaire pour faire marcher l'établissement, soit mis à la disposition de la caisse ? Mais ne confondez pas cela avec les frais annuels d'administration, dont on ne connaîtra le chiffre que lorsque la caisse aura fonctionné pendant un certain temps, et veuillez bien vous convaincre qu'elle fonctionnera à peu près gratuitement pendant les premiers temps.
M. Mercier. — Je n'ai pas demandé la parole pour m'occuper du fond du débat ; j'ai eu l'occasion d'exprimer mon opinion à cet égard ; mais je viens exprimer quelque étonnement de ce que M. le ministre des finances, ayant accepté la seconde partie de l'amendement de la section centrale, en repousse la première partie. La deuxième partie est ainsi conçue :
« Toutefois l'arrêté autorisant une augmentation ne sera applicable qu'aux emprunts contractés après sa publication. »
Or, dans l'amendement proposé par M. le ministre des finances, il n'est pas question d'arrêté royal ; il y est dit seulement que le conseil d'administration de la caisse pourra, avec l'autorisation du gouvernement, augmenter ou diminuer la partie de l'annuité consacrée aux frais d'administration.
Il paraît évident que, d'après ces termes, l'autorisation du gouvernement doit précéder la décision du conseil d'administration.
Cette autorisation peut se donner par une simple lettre ou par une décision ministérielle. Si M. le ministre des finances entend qu'un arrêté royal sera pris pour cet objet, il ne s'agit plus que d'une question de rédaction. S'il en est ainsi, et que M. le ministre en fasse la déclaration, je n'insisterai pas sur mes observations, quoique je préfère la rédaction de l'amendement de la section centrale qui se combine mieux avec la seconde partie de la disposition.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'observation de l'honorable M. Mercier ne me paraît pas fondée.
L'article porte : « Le conseil d'administration peut, avec l'autorisation du gouvernement, etc. » Il faut donc un arrêté du gouvernement. (Interruption.) Un arrêté royal sans doute. La disposition est donc en parfaite concordance avec le deuxième paragraphe.
M. Mercier. - D'après cette déclaration, je n'insiste pas sur mon observation.
- La proposition de M. le ministre des finances est mise aux voix et adoptée.
Le second paragraphe, proposé par la section centrale, est également adopté.
M. le président. - A l'article 21, M. le ministre des finances a proposé l'addition suivante :
« Les deux derniers paragraphes sont également applicables au cas où les offres ont été faites au domicile stipulé pour le payement. »
La section centrale adopte cette proposition ; mais elle ajoute :
« Toutefois, dans ce cas, l'assignation en validité, de la consignation sera portée devant le tribunal du domicile où les offres ont été faites. »
M. le ministre se rallie-t-il à la proposition de la section centrale ?
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Oui, M. le président.
M. Lelièvre. - Je regrette que l'on n'ait pas maintenu la disposition primitive, qui, pour tous les cas quelconques, permettait d'assigner en validité de la consignation devant le tribunal de l'arrondissement où le bureau des hypothèques était établi. Il y avait alors une règle qui simplifiait singulièrement la procédure, ce qui était d'autant plus nécessaire qu'il peut exister plusieurs créanciers qui devront ainsi être attraits en validité devant des tribunaux différents.
Il est un autre point sur lequel je dois appeler l'attention de la chambre.
D'après l'amendement proposé par M. le ministre et adopté par la section centrale, les deux derniers paragraphes de l'article 21 sont déclarés applicables au cas où les offres ont été faites au domicile stipulé pour le payement. Mais, messieurs, il est à remarquer qu'une partie du premier paragraphe est également applicable à cette hypothèse, c'est-à-dire celle qui prescrit le dépôt des sommes dues à la caisse des dépôts et consignations. Je pense qu'il conviendrait qu'on s'expliquât à cet égard, car sans cela on se demandera s'il y a lieu à consignation lorsque les sommes sont offertes à un domicile élu.
Je pense, messieurs, que, pour que la disposition fût complète, il faudrait énoncer : « les deux derniers paragraphes ainsi que la consignation énoncée au premier paragraphe sont également applicables au cas où les offres ont été faites au domicile stipulé pour le payement ».
Enfin je dois signaler une erreur de la section centrale. De ce que la créance est payable en certain lieu, il ne suit nullement qu'en matière civile, le tribunal du lieu du paiement suit compétent. C'est seulement lorsqu'un domicile est élu pour l'exécution de l'acte, que ce domicile est attributif de juridiction. Sons ce rapport, je pense que la section centrale a proposé des observations qui ne sont pas conformes aux principes du droit.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - On pourrait dire :
« Les créanciers qui ne se présentent pas dans le délai fixé pour le payement sont censés refuser les offres.
« Les sommes refusées sont déposées dans la caisse des consignations.
« Dans la huitaine, le débiteur fait assigner les créanciers devant le tribunal de l'arrondissement où le bureau des hypothèques est établi. »
Viendrait ensuite le paragraphe proposé par la section centrale qui se trouvera alors être applicable aux trois derniers paragraphes.
M. Lelièvre. - Je pense, messieurs, que la rédaction proposée par M. le ministre remplit parfaitement l'objet de mon amendement. Le second paragraphe de l'article qui sera ainsi conçu : « Les sommes refusées sont déposées à la caisse des dépôts et consignations », sera général, il s'appliquera à tous les cas quelconques où, il y aura refus, ainsi également au cas où les offres seront faites à un domicile élu. Mais alors, messieurs, je pense qu'on pourrait supprimer le dernier paragraphe proposé par M. le ministre, parce que, d'après l'article tel qu'il est conçu, il est évident qu'il est applicable en son entier, quel que soit le lieu où les offres soient faites. Si le second paragraphe a cette portée, il en est évidemment de même des paragraphes suivants. Je considère donc comme inutile toute proposition à cet égard.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Le dernier paragraphe est nécessaire pour lever le doute sur le point de savoir si, lorsque les offres de payement ont été faites au domicile indiqué par le contrat et que, par conséquent, il n'y a pas lieu de faire sommation aux créanciers de se présenter au bureau des hypothèques, il faut assigner en validité de consignation devant le tribunal de ce domicile ou devant le tribunal dans le ressort duquel se trouve le bureau des hypothèses où l'emprunt a été contracté.
M. le président. - Voici donc comment l'article serait conçu, d'après la proposition de M. le ministre des finances :
« Les créanciers qui ne se présentent pas dans le délai fixé pour le payement sont censés refuser les offres.
« Les sommes refusées sont déposées dans la caisse des consignations.
« Dans la huitaine, le débiteur fait assigner les créanciers devant le tribunal de l'arrondissement où le bureau des hypothèques est établi. »
« Les trois derniers paragraphes sont également applicables au cas où les offres ont été faites au domicile stipule pour le payement. Toutefois, dans ce cas, l'assignation en validité de la consignation sera portée devant le tribunal du domicile où des offres ont été faites. »
(page 1269) M. Lelièvre. - Messieurs, d'après la nouvelle rédaction, il faut nécessairement énoncer : « dans la huitaine, le débiteur fait assigner les créanciers en validité, etc. »
C'est la conséquence nécessaire du changement que nous venons d'effectuer.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Soit !
- La rédaction, ainsi modifiée, est mise aux voix et définitivement adoptée.
M. Cools (pour une motion d’ordre). - Messieurs, j'ai fait observer tout à l'heure qu'il y avait une lacune dans le rapport de la section centrale. Mon observation s'applique à l'article 28 ; l'amendement qui a été introduit dans cet article est rédigé de la manière suivante :
« En attendant la réforme des lois sur les saisies immobilières, les dispositions suivantes seront appliquées. »
Ce ne sont pas évidemment les dispositions contenues dans les 15 articles qui suivent ; cela doit s'arrêter quelque part. Dans tous les cas, il y aurait un changement de rédaction à faire.
Ce qui me paraissait préférable, c'était de renvoyer les articles dont il s'agit à la fin de la loi en forme de dispositions transitoires.
En effet, ce ne sont que des dispositions d'une durée temporaire. Il y a quelque chose d'insolite d'introduire dans le corps d'une loi d'une certaine importance trois articles qui n'auront plus aucun sens dans quelque temps. Du moment que les lois sur les saisies immobilières auront été changées, ceux qui voudront étudier la loi du crédit foncier devront, quand ils auront lu l'article 27, passer trois articles. Or, cela me paraît devoir être évité. Je croyais donc qu'il valait mieux renvoyer les trois articles à la fin de la loi. J'aurais pu moi-même en faire la proposition ; mais il avait été décidé que la section centrale s'occuperait de ce travail.
En voici la raison : c'est que si on faisait de ces trois articles des dispositions transitoires, il y aurait lieu de mettre l'article 39 en corrélation avec ces dispositions transitoires : voilà pourquoi, sur ma proposition, la chambre avait bien voulu décider que la section centrale se chargerait de ce travail. J'ignore pourquoi la section centrale ne s'est pas occupée de cette question dans son rapport.
M. Delfosse. - Messieurs, la section centrale s'est occupée de cette question ; mais M. le ministre des finances a exprimé le désir qu'il n'y eût pas de changement dans la classification des articles : et comme cela n'avait pas d'importance, la section centrale avait cru devoir déférer au vœu de M. le ministre.
Du reste, si la chambre jugeait utile de faire droit à l'observation de l'honorable M. Cools, elle pourrait charger le bureau de faire ce changement matériel et purement de forme.
M. Cools. - Messieurs, cela n'a pas d'importance, il est vrai ; mais en tout cas il y aurait un changement quelconque à introduire dans la loi. On a dit à l'article 28 : en attendant la réforme des lois sur les saisies immobilières, les dispositions suivantes seront appliqué s ; il faudrait modifier cette rédaction de la manière suivante : « (…) Les dispositions suivantes, jusqu'à l'article 31 inclusivement, seront appliquées. »
Je persiste à croire que la chambre ferait mieux de mettre ces trois articles à la fin de la loi en forme de disposions transitoires ; la chambre décidera.
M. Delfosse. - Il est certain que par les mots : « les dispositions suivantes », on entend les dispositions qui concernent les saisies immobilières.
M. le président. - Nous venons à l'article 39. M. le ministre des finances a proposé de rédiger cet article comme suit :
« Les actes, documents et registres qui seront faits et tenus en exécution de la présente loi, sont affranchis des formalités de timbre et d'enregistrement, sauf les restrictions suivantes :
« Les actes d'obligation prévus par l'article sont assujettis au timbre.
« Les actes faits en vertu de l'article 20 sont vises pour timbre et enregistrés en débet, les droits sont recouvrés sur le créancier succombant.
« Tous actes faits au nom de la caisse, en vertu des articles 27, 28, 29, 30, 31 et 32, sont aussi visés pour timbre et enregistres en débet. »
La section centrale propose, d'accord avec M. le ministre des finances, de rédiger le premier paragraphe comme suit ;
« Les actes, documents et registres qui seront faits et tenus en exécution de la présente loi sont affranchis de la formalité du timbre et des droits d'enregistrement, sauf... (le reste comme au projet ). »
- L'article 39, ainsi rédige, est mis aux voix et définitivement adopté.
M. le président. - La chambre avait aussi renvoyé à la section centrale le paragraphe 7 de l'article 28. La section centrale propose de rédiger ce paragraphe comme suit :
« L'adjudication est indiquée par des affiches. Ces affiches sont apposées 20 jours au moins avant celui de l'adjudication, à la principale porte des bâtiments dont la vente est poursuivie, à la principale porte des maisons communales des lieux où les biens sont situés et à celle du notaire commis, »
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je me rallie à cette rédaction.
- Le paragraphe 7 de l'article 28, ainsi rédigé, est mis aux voix et définitivement adopté.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.
Voici le résultat de cette opération :
79 membres répondent à l'appel nominal.
54 membres répondent oui.
19 membres répondent non.
6 membres s'abstiennent.
En conséquence, le projet de loi est adopté. Il sera transmis au sénat.
Ont répondu oui : MM. d'Hoffschmidt, d'Hont, Frère-Orban, Jouret, Landeloos, Lange, Lebeau, le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Manilius, Mascart, Moreau, Moxhon, Orts, Prévinaire, Rogier, Rolin, Rousselle (Charles), Tesch, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Van Cleemputte, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Hoorebeke, Van Iseghem, Veydt, Allard, Ansiau, Anspach, Bruneau, Cans, Cools. Cumont, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, de Decker, Delehaye, Delescluse, Delfosse, Deliége, de Perceval, de Pitteurs, Dequesne, de Renesse, de Royer, Destriveaux et Verhaegen.
Ont répondu non : MM. de Theux, de T'Serclaes, Dumortier, Jacques, Julliot, Malou, Mercier, Osy, Pirmez, Rodenbach, Roussel (Adolphe), Thibaut, Vermeire, Coomans, de Baillet (Hyacinthe), de Meester, de Mérode-Westerloo, De Pouhon, de Steenhault.
M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités à énoncer les motifs de leur abstention.
M. Sinave. - J'ai donné mes motifs dans la discussion générale.
M. Vanden Branden de Reeth. - Je ne puis pas voter en faveur du projet de loi, parce qu'il consacre l'intervention du gouvernement sur une si vaste échelle que, dans certaines circonstances, il peut en résulter pour lui de graves embarras et un grand discrédit ; mais je ne veux pas non plus émettre un vote négatif, parce que dans la loi que la chambre vient d'adopter il y a certaines combinaisons assez favorables au développement du crédit foncier et qui auraient eu mon approbation si elles faisaient partie des statuts d'une société ou d'une association créée en dehors du gouvernement.
M. Van Renynghe. - Je n'ai pas voté contre la loi parce que, partisan de toute idée qui peut contribuer à l'amélioration des classes agricoles et industrielles, j'y trouve plusieurs dispositions qui tendent vers ce but.
D'autre part, je n'ai pas voté pour la loi, parce qu'elle tend à renforcer l'action centrale du gouvernement qui, à mon avis, n'est déjà que beaucoup trop forte en raison de nos libertés constitutionnelles.
M. Boulez. -Je n'ai pas voté contre le projet de loi, parce que je ne suis pas contraire à l'institution du crédit foncier, el je n'ai pas voté pour, parce que je ne puis admettre toutes les dispositions de la loi, notamment celle qui consacre l'intervention du gouvernement.
M. de Bocarmé. - Je n'ai pas voulu voter contre la loi, dont j'approuve le principe et plusieurs bonnes dispositions, bien que j'eusse désiré qu'elle favorisât plus spécialement lies progrès agricoles et fût moins accessible aux intrigues de l'agiotage.
D'une autre part, selon moi, la combinaison nouvelle, espèce de labyrinthe d'un accès attrayant, mais d'où il sera très difficile de sortir, engagera l'inexpérience dans des entreprises souvent téméraires, sources de déceptions, de perturbations, de ruines, dont la prévision ne m'a pas permis de lui donner mon assentiment.
M. de Haerne. - Je me suis abstenu par les motifs exprimés par M. Van den Branden de Reeth et, en partie, par M. de Bocarmé.
M. Delfosse (pour une motion d’ordre). - Messieurs, vous avez, sur la proposition de M. de Perceval, introduit dans la loi qui vient d'être définitivement votée une disposition par suite de laquelle aucun membre de la chambre ou du sénat ne pourra être nomme membre du conseil d'administration de la caisse de crédit foncier, qu'une année après l'expiration de son mandat parlementaire.
Vous avez par là donné une extension considérable à l'inéligibilité, dont les membres des chambres se sont volontairement frappés par l'article 2 de la loi du 26 mai 1848.
Aux termes de l'article 2 de cette loi, l'inéligibilité ne s'appliquait qu'aux fonctions salariées par l'Etat ; vous l'avez étendue à des fonctions salariées par une caisse particulière, bien qu'elles doivent être conférées par le gouvernement. Je trouve la mesure bonne ; j'y ai adhéré de tout cœur. Mais là elle est incomplète, elle ne peut pas rester isolée. Il y a d'autres fonctions salariées par des caisses particulières, que le gouvernement peut conférer aux membres des deux chambres ; je citerai les fonctions de commissaire du gouvernement, près des sociétés anonymes. (Interruption.)
Je parle d'inéligibilité, non d'incompatibilité ; vous devez, sous peine d'être inconséquents, étendre à ces sortes de fonctions l'inéligibilité des membres des chambres. En le faisant, vous établirez l'harmonie dans la législation, vous donnerez au pas un bon exemple, vous compléterez, vous consoliderez l'œuvre de désintéressement commencée en 1848.
J'ai l'honneur de proposer à la chambre de nommer ou de faire nommer par le bureau une commission qui rechercherait quelles sont les (page 1240) fonctions salariées par des caisses particulières auxquelles il convient que les membres des deux chambres ne puissent être nommés par le gouvernement qu'un an après l'expiration de leur mandat, et qui présenterait à la chambre un projet de résolution.
M. Dumortier. - Je crois que la proposition qui nous est faite par l'honorable M. Delfosse n'est pas recevable, et cela par deux raisons. La première c'est que, sous la forme d'une apparente justice, elle laisse de côté des fonctions très importantes que le gouvernement peut décerner à des membres des chambres, comme celles de bourgmestres et de notaires, qui sont de la même catégorie. Si vous voulez une loi positive contre la corruption, soyez conséquents avec vos principes, étendez la mesure.
Il me semble que toute nomination émanant du gouvernement rentre dans la même sphère d'idées, qu'elle peut donner lieu à corruption. Ainsi la proposition est incomplète.
En second lieu, je lis dans le règlement que chaque membre qui voudra faire une proposition la signera et la déposera entre les mains du président, pour être communiquée aux sections afin de savoir si elles en autorisent la lecture. Je trouve la marche suivie par l'honorable membre complètement insolite.
Voilà la chambre qui inviterait le bureau à nommer une commission pour faire un projet de loi. Les choses ne se font pas ainsi. Chacun de nous a droit d'initiative. Que M. Delfosse dépose une proposition, nous l'examinerons ; nous verrons ce qu'il y a à faire ; mais nous ne pouvons pas suivre la marche indiquée par la proposition de M. Delfosse que je ne crois pas recevable.
La Constitution porte : « Art. 46. Chaque chambre détermine par son règlement, le mode suivant lequel elle exerce ses attributions. » Or il n'y a dans le règlement aucun article où soit posé un principe qui rentre dans le système que soutient l'honorable M. Delfosse.
Je pense donc que la proposition n'est pas recevable.
Je ne veux ni examiner, ni combattre, ni appuyer la proposition en elle-même. Je dis seulement qu'elle n'est pas dans les termes du règlement.
Je propose donc la question préalable.
M. Delfosse. - Les propositions qui doivent être déposées sur le bureau et passer par la filière des sections pour qu'elles en autorisent la lecture, sont les propositions de loi. Mais on peut, sous forme de motion d'ordre, demander la nomination d'une commission pour l'examen d'une question spéciale, surtout lorsqu'elle est soulevée à l'occasion d'un vote de la chambre.
L'article 61 du règlement est formel ; il porte :
« Art. 61. Indépendamment des commissions permanentes et de la commission des finances, il peut en être formé pour l'examen d'une ou de plusieurs propositions, soit par élection au scrutin et à la majorité absolue ou relative, soit par la voie du sort, soit à la demande de la chambre, par le président. »
Pourquoi ai-je demandé que la chambre nomme une commission ? Parce que, en adoptant l'amendement de l'honorable M. de Perceval, la chambre a admis le principe de l'inéligibilité des membres de la chambre à des fonctions conférées par le gouvernement et rétribuées par une caisse particulière. La chambre ayant admis le principe, il faut en déduire les conséquences.
Ce travail sera mieux fait par une commission que par un membre isolé. Il y aura des renseignements à demander au gouvernement.
L'honorable M. Dumortier a signalé des lacunes ; si cette observation est fondée, si ma proposition n'est pas complète, la commission pourra la compléter. C'est précisément pour cela qu'il est utile dénommer une commission.
Pour que la proposition de l’honorable M. de Perceval porte tous ses fruits, il est bon qu'une commission soit chargée de présenter un rapport à la chambre. Je crois être dans les termes du règlement en faisant cette proposition. La disposition du règlement invoquée par M. Dumortier n'a jamais, je le répète, été appliquée qu'aux propositions de lois. Dernièrement encore, la chambre a décidé qu'elle n'est applicable que dans ce cas-là.
Je comprendrais les objections qui seraient soulevées contre ma proposition, si l'on n'avait pas laissé passer sans opposition l'amendement de l'honorable M. de Perceval. Mais une fois qu'on a adopté cet amendement, il y aurait inconséquence à laisser au gouvernement le droit d'appeler des membres de l'une ou de l'autre chambre aux fonctions de commissaires du gouvernement près des sociétés anonymes ou à des fonctions analogues. C'est une contradiction que nous ne pouvons laisser subsister.
Je persiste à croire que la chambre doit adopter ma proposition. Si elle n'était pas admise, je n'hésiterais pas à user de mon droit d'initiative. Mais à l'initiative personnelle d'un membre, je préfère l'intervention d'une commission qui se mettra en rapport avec le gouvernement pour en obtenir tous les renseignements désirables et qui pourra ainsi formuler un projet de loi complet.
M. Malou. - J'ai eu l'honneur de faire le rapport relatif aux incompatibilités. On avait cru, dans la rédaction de l'article 2, comprendre toutes les incompatibilités qui devraient être établies. Depuis lors, dans deux circonstances, lors du vote de la loi relative à la banque nationale et du vote auquel l'honorable M. Delfosse vient de faire allusion, en a reconnu qu'il y avait quelque chose à ajouter à la loi relative aux incompatibilités parlementaires. Je crois que dès qu'une question de cette nature est soulevée dans la chambre, il ne faut pas subordonner l'examen de la question du fond à des questions de forme. Je viens pour ma part appuyer la proposition de M. Delfosse afin que l'on examine quelle est l'extension qui pourrait être donnée à l'article 2 de la loi relative aux incompatibilités parlementaires. L'objection de forme qu'on y fait me paraît préjuger la question du fond. Il est possible que la commission ne conclue pas à l'adoption d'un projet et dès lors il est évident que l'un des motifs que mon honorable ami M. Dumortier fait valoir ne pourra pas être invoqué.
La commission peut dire : Je reconnais qu'il n'y a rien à ajouter ; il est dès lors logique que la chambre nomme une commission qui examine ce qu'il faut faire et, en premier lieu, s'il y a quelque chose à faire.
Je ne veux pas entrer, pour le moment, dans la discussion du fond ; elle serait évidemment prématurée ; mais, je le répète, il me semble qu'une question de cette nature touchant la dignité parlementaire, doit être examinée avec la plus grande attention.
M. Dumortier. - Je retire ma proposition. On votera pour ou contre.
- La chambre consultée admet le principe de la proposition de M. Delfosse et, à la demande de M. Roussel, décide que la commission indiquée dans cette proposition sera nommée par le bureau et composée de neuf membres.
La chambre adopte successivement, par assis et levé, les divers projets de loi suivants :
« Léopold, Roi des Belges, A tous présents et à venir, salut.
« Vu la demande du sieur Nicolas-Henri-Romain Noël, sergent-major au régiment du génie, né à Sissonne (France), le 31 juillet 1813, tendant à obtenir la naturalisation ordinaire ;
« Attendu que les formalités prescrites par les articles 7 et 8 de la loi du 27 septembre 1835 ont été observées ;
« Attendu que le pétitionnaire a justifié des conditions d'âge et de résidence exigées par l'article 5 de ladite loi ;
« Les chambres ont adopté et Nous sanctionnons ce qui suit :
« Article unique. La naturalisation ordinaire est accordée audit sieur Nicolas-Henri-Romain Noël. »
La formule qui précède est applicable à chacune des demandes des sieurs :
Théodore-Charles-Antoine Catteau, éclusier du canal de Charleroy, né à Tourcoing (France), le 18 octobre 1792, domicilié à Arquennes (Hainaut).
Michel Stein, professeur de musique, né à Weisenau (duché de Hesse), le 12 juin 1811, domicilié à Malines.
Pierre-Joseph Libert, ouvrier, né à Ans et Glain (Liège), le 1er avril 1816, domicilié à Molenbeek-St-Jean-lez-Bruxelles.
François-Joseph Saigne, éclusier du canal de Charleroy, né à Paris, le 5 janvier 1811, domicilié à Ittre (Brabant).
Pierre-Jean Francken, débitant de liqueurs, né à Venloo (Pays-Bas), le 9 avril 1811, domicilié à Bruxelles.
Pierre-Victrice Desmonds, éclusier au canal de Charleroy, né à Saint-Aubin-de-Scellon (France), le 7 août 1782, domicilié à Feluy (Hainaut).
Louis-Marie Delahaye, lieutenant au 5ème régiment de chasseurs à pied, né à Clèves (Prusse), le 8 mai 1810.
Nicolas Havermans, infirmier-major à l'hôpital militaire, né à Oosterhout (Pays-Bas), le 12 janvier 1792, domicilié à Anvers.
Jean-Aloïs Imfeld, infirmier à l'hôpital militaire, décoré de la médaille de bronze, né à Longeren (Suisse), le 19 juin 1792, domicilié à Anvers.
François-Victor Lahu, garde-convoi à l'administration des chemins de fer de l'Etat, né à Epernon (France), le 25 novembre 1798, domicilié à Bruxelles.
Louis-Charles-Julien Tencé, capitaine adjudant de place de première classe, chevalier de l'ordre de Léopold, né à Lille (France), le 13 mars 1796, domicilié à Louvain.
Ambroise-Pierre-Hélène Vallantin, capitaine au 10ème régiment de ligne, né à Paris, le 10 mars 1793.
Jean-Thomas Braun, professeur de pédagogie et de méthodologie à l'école normale de Nivelles, né à Commern (Prusse), le 12 novembre 1814, domicilié à Nivelles.
Pierre-Joseph-Hubert Knaden, curé et aumônier militaire à Huy, né à Aix-la-Chapelle (Prusse), le 10 juin 1808.
Frédéric-Moïse Chambaz, peintre en bâtiments à Namur, né à Breda (Pays-Bas), le 4 septembre 1822, domicilié à Namur.
Victor-Ernest Sudot, sténographe adjoint du sénat, né à Paris, le 27 novembre 1825, domicilié à Bruxelles.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble de ces projets de loi.
En voici le résultat :
65 membres ont répondu.
59 ont voté l'adoption.
6 ont voté le rejet.
En conséquence, les projets de lois sont adoptés.
Ont voté l'adoption : MM. de T'Serclaes, d'Hont, Faignart, Lange, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Manilius, Mascart, Mercier, Moreau, Moxhon, Orts, Pirmez, Prévinaire, Rogier, Roussel (Adolphe), Rousselle (Charles), Sinave, Tesch, Thibaut, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Van Cleemputte, Van den Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Allard, Ansiau, Anspach, Bruneau, Cans, Cools, Cumont, Dautrebande, Baillet (Hyacinthe), de Breyne, de Haerne, Delehaye, Delescluse, Delfosse, Deliége, de Perceval, de Pitteurs, Dequesne, de Steenhault, Destriveaux et Verhaegen.
Ont voté le rejet : MM. Dumortier, Jacques, Landeloos, David, de Renesse et de Royer.
- La séance est levée à 4 heures et un quart.