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Chambres des représentants de Belgique
Séance du lundi 18 janvier 1847

(Annales parlementaires de Belgique, session 1846-1847)

(Présidence de M. Liedts.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 515) M. Huveners fait l’appel nominal à 2 heures.

M. de Man d’Attenrode lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Huveners présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.

« L'administration communale de Moircy prie la chambre de rejeter le projet de loi sur le défrichement des bruyères. »

- Renvoi à la section centrale qui est chargée d'examiner le projet de loi.


« Le sieur Bortels réclame l'intervention de la chambre pour obtenir la restitution de droits perçus par le gouvernement sur des vins écoulés dans son entrepôt particulier par suite d'un événement extraordinaire. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« M. le vicomte Dutoict fait hommage à la chambre de quelques exemplaires de son mémoire sur le mode de défrichement des bruyères et l'élève des troupeaux et du bétail en Ardenne. »

- Dépôt à la bibliothèque.


« La commission israélite de Belgique présente des observations sur la réponse donnée par M. le ministre de la justice à l'occasion de sa lettre dont il a été donné lecture à la chambre. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget de la justice.


M. Le Hon, admis dans une séance précédente, prête serment.

Projet de loi portant le budget du ministère de la justice de l'exercice 1847

Discussion générale

M. le président. - Dans la séance de samedi, on avait demandé la clôture de la discussion générale ; persiste-t-on dans cette demande ? (Oui ! oui !)

M. de Brouckere (sur la clôture). - Messieurs, je n'avais pas l'intention de prendre part à la discussion du budget du ministère de la justice, ou, pour m'exprimer mieux, j'avais pris la résolution formelle de ne pas me mêler à cette discussion. Je n'ai demandé la parole (car je suis inscrit le premier) que lorsque mon nom avait été prononcé par un honorable orateur qui a parlé dans la séance de samedi, et lorsque mon tour est venu, je l'ai cédé deux fois à d'honorables orateurs inscrits après moi. J'aurais donc bien le droit de parler ; cependant j'y renonce et j'y renonce d'autant plus volontiers que, tout résolu que j'étais de ne présenter que des considérations générales sur la marche des affaires au département de la justice, j'avais crainte moi-même, en critiquant certaines nominations, à moi particulièrement connues, de retomber dans des discussions que je préfère éviter. Mais, messieurs, mon silence sera une protestation contre l'insinuation, faite par M. le ministre de la justice, que les membres de l'opposition se seraient concertés, entendus, pour réunir toutes leurs forces contre lui, pour l'accabler, pour en faire une victime, selon l'expression de M. Dumortier. Un concert de cette nature a pu avoir lieu, il y a quelque temps, comme l'a rappelé M. d'Anethan, contre M. Nothomb, qui était un homme d'un talent éminent, talent que ses adversaires reconnaissaient eux-mêmes... (Interruption.) Pardon, c'est sur la clôture que je parle... Contre M. Nothomb qui était le chef du ministère, qui était l'âme du cabinet ; oui un concert a pu avoir lieu de la part de l'opposition contre un pareil homme ; mais l'honorable M. d'Anethan peut se rassurer, jamais semblable concert ne se fera contre lui.

M. Veydt (sur la clôture). - Messieurs, je suis prêt à fournir de nouveaux renseignements sur le condamné détenu à la maison d'arrêt de Turnhout. Il m'a paru que samedi dernier M. le ministre de la justice, répondant à l'honorable M. Pirson, m'avait, en quelque sorte, remis en cause, pour me demander mon appréciation sur les déclarations faites par lui relativement à cette détention. J'ai pris le parti d'aller voir et je dirai ce que j'ai vu, si la chambre le désire. Pour moi, je n'insiste pas.

- La clôture de la discussion générale est mise aux voix et prononcée.

On passe aux articles.

Discussion du tableau des crédits

Chapitre premier. Administration centrale

Article premier

« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »

- Adopté.

Article 2

« Art. 2. Traitement des fonctionnaires et employés : fr. 166,000. »

M. le président. - La section centrale propose de transférer une somme de 4,000 fr. de l'article 9 du chapitre X à l'article 2 du chapitre premier, ce qui porterait le chiffre de cet article à 170,000.

M. Dubus (aîné). - Messieurs, je viens compléter la proposition de la section centrale. La section centrale a adopté celle que lui a faite M. le ministre, de transférer 4,000 fr. de l'article 9 du chapitre 10 à l'article 2 du chapitre premier, afin que les imputations pour le personnel soient désormais régulières. Comme, dans le dessein d'assurer cette régularité à l'avenir, la chambre a fait insérer dans les autres budgets un libellé qui défend toute imputation pour le personnel sur d'autres articles que l'article 2 du chapitre premier, je proposerai d'insérer la même explication dans le libellé de l'article 2 que nous discutons dans ce moment. Voici en quels termes cela a été formulé dans le dernier budget adopté par la chambre, celui du département de l'intérieur :

« Traitement des fonctionnaires employés et gens de service, sans que le personnel de l'administration centrale puisse être rétribué sur d'autres fonds alloués au budget. »

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - Je me rallie à cette proposition.

- L'article 2 ainsi libellé avec le chiffre de 170,000 fr. est mis aux voix et adopté.

Articles 3 à 5

« Art. 3. Matériel : fr. 23,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Frais d'impression de recueils statistiques : fr. 3,500. »

- Adopté.


« Art. 5. Frais de route et de séjour : fr. 6,000. »

- Adopté.

Chapitre II. Ordre judiciaire

Articles 1 à 6

« Art. 1er. Cour de cassation, personnel : fr. 238,500. »

- Adopté.


« Art. 2. Matériel : fr. 5,250 ordinaire, 1,500 extraordinaire. »

- Adopté.


« Art. 3. Cours d'appel, personnel : fr. 621,800. »

- Adopté.


« Art. 4. Matériel : fr. 18,000. »

- Adopté.


Art. 5. Tribunaux de première instance et de commerce : fr. 1,051,265 ordinaire, 20,000 extraordinaire.

M. le président. - La section centrale propose de réduire ces deux chiffres réunis à la somme de 1,067,265 fr.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) se rallie à cet amendement.

- L'article ainsi amendé est adopté.


« Art. 6. Justices de paix et tribunaux de police : fr. 556,200. »

- Adopté.

Chapitre III. Justice militaire

Article premier

« Art. 1er. Justice militaire. Haute cour militaire, personnel : fr. 65,800. »

M. Lys. - La législature a discuté des lois d'organisation de l'armée, mais jusqu'à présent nous n'avons pas pourvu à la révision du Code pénal militaire ; et c'est cependant l'une des matières les plus importantes que la Constitution, dans son article 139, n°10, a recommandées à l'attention de la législature. Ce n'est pas assez, messieurs, que d'avoir pourvu à l'organisation de l'armée, par la classification des grades, par la détermination des conditions d'aptitude à obtenir ces grades, par la consécration des règles qui garantissent l'officier contre la perte arbitraire de son grade ; il faut, pour que l'organisation de l'armée soit complète, que le Code pénal militaire soit mis en rapport avec les besoins et les lumières de l'époque. L'armée est régie par un code étranger à notre pays et à nos mœurs. Les règlements arrêtés en Hollande le 26 juin 1799, constituent encore aujourd'hui le Code pénal militaire en vigueur en Belgique. Les dispositions incohérentes et incomplètes de ce code, les peines qu'il commine et qu'il a fallu déjà réformer d'urgence, témoignent assez qu'il y a nécessité de rédiger une ordonnance criminelle sur les délits militaires, appropriée aux besoins et aux exigences actuelles. N'oublions pas, messieurs, que l'armée n'est plus aujourd'hui composée de mercenaires, d'étrangers ! L'armée est nationale ; ce sont les enfants du pays qui sont appelés à la composer, et ils sont appelés sous les armes, à titre de citoyens, payant une dette sacrée envers la patrie. Le pays a donc le droit légitime de demander à la législature que ses enfants ne soient pas soumis à un code qui jure, par ses dispositions et par ses pénalités, avec nos besoins, et qui dans la procédure n'offre aucune espèce de garantie aux prévenus. Ainsi, messieurs, pour ne vous citer qu'un seul exemple, l'auditeur militaire provincial remplit en même temps les fonctions de ministère public, de greffier et même de juge d'instruction. Une aussi monstrueuse accumulation de fonctions n'est-elle pas contraire à tous les principes ?

Sans doute, la loyauté et la haute probité des fonctionnaires chargés de ce service, empêchent que des abus n'aient lieu ; mais la probité et la loyauté ne se rencontrent malheureusement pas toujours ; l'homme se laisse souvent entraîner par la faiblesse inhérente à sa nature ; il cède à des préoccupations, à des influences, dont il ne soupçonne pas même l'existence. La loi doit pourvoir à ces éventualités ; elle doit mettre autant que possible le fonctionnaire à l'abri d'une faiblesse et à l’abri de l'erreur ; elle doit garantir celui que la société accuse d'un délit, contre la possibilité d'une injustice et contre l'accident d'une erreur. Les tribunaux (page 516) militaires doivent donc présenter toutes les garanties légales, indispensables, pour une bonne distribution de la justice. Les attributions des fonctionnaires appelés à concourir à rendre cette justice, doivent être essentiellement distinctes et nettement séparées ; c'est une chose monstrueuse que celui qui interroge le prévenu, soit en même temps chargé de constater ses réponses ; quelle garantie sérieuse y a-t-il pour le prévenu, lorsqu'il se trouve face à face d'un fonctionnaire chargé à la fois de soutenir l'accusation, de constater les réponses, de recueillir les dires des témoins et de constater la décision rendue ? Il n'y a là évidemment aucune espèce de garantie légale ; il n'y a, pour protéger le délinquant militaire, que la responsabilité morale qui pèse sur un fonctionnaire investi d'un pouvoir aussi étendu et aussi arbitraire ; mais, je le répète, messieurs, rien n'est plus anormal qu'un pareil état de choses.

Les enfants du pays, appelés sous les drapeaux, doivent-ils être moins protégés par les lois, parce qu'ils sont revêtus d'un uniforme ? Mais l'arbitraire, inséparable de l'exercice du commandement militaire, est une raison de plus qui doit rendre la législature attentive à l'absence totale des garanties que présente le code militaire, pour la classe la plus nombreuse, pour les soldats.

La loi a multiplié les précautions pour garantir aux officiers la possession de leurs grades, et la loi a bien fait ; pourquoi a-t-on négligé jusqu'aujourd'hui de prendre quelque mesure en faveur de ce qu'où peut appeler la classe des prolétaires de l'armée ?

Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas présenté jusqu'à ce jour aux chambres législatives un Code pénal et un Code d'instruction criminelle pour l'armée ? Quelles si grandes et si impérieuses occupations empêchent le gouvernement de s'occuper d'un objet aussi intéressant ? Ne l'oublions pas, messieurs, la force d'une armée repose dans l'attachement du soldat à son drapeau ; or, rien n'est plus propre, rien n'est plus efficace, pour attacher les soldais à leur drapeau, que de leur donner des garanties raisonnables contre les abus d'autorité, que de leur donner, dans les cas de poursuites criminelles, toutes les garanties légales qu'un prévenu est en droit d'exiger de la société, et ces garanties sont d'autant plus nécessaires, que les tribunaux militaires sont une juridiction d'exception, composée d'hommes qui, habitués au commandement et à l'obéissance, contractent souvent, sans le savoir, des habitudes de sévérité.

Il est d'autant plus urgent, messieurs, de réviser les lois pénales militaires, que les décisions de la haute cour ne peuvent être déférées à la censure de la cour de cassation que dans l'intérêt de la loi. C'est, à mon avis, une anomalie qu'il faut faire disparaître ; le recours en cassation doit être ouvert au prévenu, qui, lui, a un intérêt d'actualité à obtenir la réformation de la sentence qui le frappe. La révision des Codes militaires donnera l'occasion d'examiner s'il y a lieu de conserver l'institution des auditeurs militaires, sorte de fonctionnaires mixtes, et s'il ne conviendrait pas mieux de conférer l'exercice de ces fonctions à un officier de l'armée.

Je m'arrête ici, car je n'ai eu d'autre but que de mettre en avant quelques idées pour appeler l'attention de la chambre et du gouvernement sur un objet d'une aussi haute importance pour l'avenir de l'armée.

M. de Garcia. - A chaque session, à l'occasion du chapitre en discussion, j'ai insisté sur les observations que vient de présenter l'honorable M. Lys. J'insiste de nouveau ; je crois que cette partie de nos lois laisse beaucoup à désirer. La haute cour militaire (je l'ai dit dans les autres sessions, je le répète aujourd'hui), telle qu'elle existe, ne répond pas à nos institutions constitutionnelles. Pour éviter toute discussion de mots, je m'explique nettement et préviens d'avance une objection. Je sais, et je conviens, que la haute cour existe en vertu d'une disposition de la Constitution ; mais elle n'existe que comme institution provisoire et de nécessité, et à côté de cette disposition s'en trouve une autre qui impose l'obligation de réviser les lois relatives à la justice militaire.

Je désire donc que M. le ministre de la justice nous dise s'il entre dans ses intentions de présenter une loi pour mettre cette partie de notre législation en rapport et en harmonie avec la Constitution.

Il y a quinze ans que nous sollicitons cette loi ; chaque année depuis que j'ai l'honneur de siéger ici, j'ai attiré l'attention de tous les ministres de la justice sur cette nécessité urgente et impérieuse.

La matière n'est sans doute pas sans difficulté, mais pourtant, je ne puis la considérer comme aussi ardue qu'on semble se l'imaginer ; en effet, pourquoi les militaires, qui ne cessent jamais d'être citoyens, ne seraient-ils pas rendus à la juridiction ordinaire, lorsqu'ils ont commis un délit contre l'état social ? Si, abordant franchement la question, on avait une division nette entre les faits qui constituent réellement les délits militaires et les délits ordinaires, la matière se simplifierait et s'éclairerait singulièrement. Je le répète, messieurs, selon moi, si on veut aborder franchement cette grave question, je pense que grand nombre des difficultés qui effrayent s'évanouiront. Je convie donc instamment M. le ministre à s'occuper de cet objet.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - Je reconnais avec les honorables préopinants que cette question est de la plus haute importance. Mais je ne puis admettre avec l'honorable M. de Garcia qu'elle ne présente pas de graves difficultés. Je crois au contraire qu'elle en présente de très sérieuses. Veuillez remarquer qu'elle concerne les départements de la justice et de la guerre. Il faut donc que deux ministres se mettent d'accord à ce sujet.

Jusqu'à présent, les études ne sont pas assez avancées pour que je puisse annoncer la présentation d'un projet de loi.

L'honorable M. de Garcia pense qu'on pourrait simplifier beaucoup la question en divisant les délits en délits militaires et en délits communs, et en attribuant la connaissance de ces derniers aux tribunaux ordinaires. Je crois que c'est justement une des questions les plus difficiles et les plus ardues que celle de savoir dans quelle circonstance les militaires peuvent être justiciables des tribunaux ordinaires. Cette question intéresse fortement la discipline de l'armée.

Vous en avez eu la preuve dans une circonstance récente. Dans la discussion de la loi sur la chasse, la disposition qui déclare de la compétence des tribunaux ordinaires les délits de chasse commis par des militaires, a été critiquée par un membre dont on ne peut contester la compétence en cette matière.

L'honorable M. Pirson a trouvé cette disposition mauvaise. On peut, d'après cela, préjuger l'opposition que pourrait rencontrer le système indiqué par l'honorable M. de Garcia.

Les départements de la guerre et de la justice se sont occupés de la réforme la plus urgente que réclame la législation militaire ; je veux parler de la réforme des pénalités, afin de diminuer la population des prisons en ôtant la chance de se soustraire au service militaire, par une condamnation à quelques années de prison.

Mon collègue de la guerre examine avec moi les dispositions proposées par son prédécesseur et sur lesquelles la section centrale a fait de nombreuses observations. Je puis donner à la chambre l'assurance que cette question ne sera pas perdue de vue. Mais accablé de nombreux travaux, occupé de lois qui me paraissaient plus urgentes encore, je n'ai pu arrêter complétement mes idées sur cette matière que je considère comme très grave et très difficile.

M. de Garcia. - Je n'ai pas soutenu que la matière fût sans quelque difficulté ; loin de là, je pense qu'elle peut offrir quelques points assez ardus ; mais j'ai cru pouvoir indiquer une grande division qui me paraît devoir simplifier beaucoup la révision de la justice militaire. Pour combattre mon opinion, M. le ministre de la justice invoque la discussion de la loi sur la chasse, où un membre de la chambre, qui doit être compétent, selon M. le ministre, a combattu la disposition de cette loi qui soumet à la juridiction ordinaire les militaires prévenus de délits de chasse.

Quant à moi, messieurs, je n'ai pas à examiner la compétence de l'honorable membre qui a combattu cette proposition ; mais je dirai qu'il a été le seul membre de cette assemblée qui ait soutenu cette opinion. A cette occasion, je me bornerai à une simple observation, c'est qu'il est naturel que les personnes qui appartiennent à un corps aiment à avoir et à conserver la juridiction spéciale dont ils jouissent. Mais devant les principes constitutionnels qui nous régissent et devant lesquels tous les citoyens doivent appartenir autant que possible à la justice ordinaire, une prétention semblable doit disparaître.

Ce n'est pas, messieurs, le premier pas que nous ferions vers ce changement. Lorsque nous nous sommes occupés de l'examen de la loi sur le duel, nous avons encore, dans certains cas, rattaché à la justice ordinaire les militaires qui commettaient un délit de celle nature, quoique antérieurement ils fussent justiciables de la haute cour militaire.

Vous voyez donc, messieurs, que l'esprit de la législature est de se rapprocher autant que possible du principe constitutionnel qui veut que tous les citoyens jouissent des mêmes avantages sans privilège pour aucun, c'est-à-dire qu'il n'y ait de tribunaux spéciaux que pour les matières essentiellement spéciales.

Je ne conçois d'exception à ce principe que lorsqu'il s'agit de délits spéciaux ; c'est ainsi que j'admets que les affaires qui concernent le commerce soient soumises à un tribunal spécial de commerce ; que j'admets que les faits qui concernent la discipline, la subordination soient soumis à un tribunal militaire. Mais je ne conçois pas qu'on soumette un fait d'assassinat, par exemple, à un tribunal militaire. Un militaire tue un citoyen ; pourquoi ne le rendriez-vous pas justiciable de la justice ordinaire ? Pourquoi le priveriez-vous du jury ? Pourquoi, enfin, avez-vous en fait deux cours de cassation ? Dans l'ordre des choses actuel, ces anomalies constitutionnelles existent, et c'est un devoir pour nous de les faire disparaître. Sauf les exceptions tracées nettement par la Constitution, tous les citoyens sont justiciables de la justice ordinaire ; les garanties et les droits de chacun doivent être les mêmes sans privilèges ni privation de moyens de défense pour aucun : c'est le seul et le vrai but des observations que je viens d'avoir l'honneur de vous soumettre.

- L'article est mis aux voix et adopté.

Article 2

« Art. 2. Matériel : fr. 5,000. »

- Adopté.

Article 3

« Art. 3. Auditeurs militaires et prévôts, fr. 41,253. »

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - Messieurs, jusqu'en 1844, il avait été porté, pour les auditeurs adjoints, une somme de 6,000 francs.

En 1844, j'ai consenti à la réduction de cette somme, et j'ai demandé qu'elle fût seulement portée à 3,000 francs. Un auditeur adjoint venait de mourir, et il y avait donc possibilité d'opérer une réduction de 3,000 francs.

Je comptais, messieurs, à la première occasion qui se présenterait, appeler le seul auditeur adjoint qui restât, à des fonctions permanentes dans un auditorat et consentir ainsi à la suppression de la somme de 3,000 francs restée au budget. Mais d'après les observations qui m'ont été faites par l'auditeur général, j'ai pensé qu'il m'était impossible de consentir à cette suppression.

(page 517) Je crois qu'il faut nécessairement maintenir un auditeur adjoint, qui puisse aller remplacer l'auditeur militaire qui serait empêché par maladie ou autrement. Dans tous les tribunaux, les procureurs du roi ont leurs substituts qui peuvent les remplacer ; il y a en outre des juges suppléants qui peuvent remplacer les magistrats qui se trouvent empêchés. De même il me paraît indispensable de conserver un auditeur adjoint pour remplacer les auditeurs militaires qui ne pourraient momentanément remplir leurs fonctions.

C'est ainsi que la loi de 1834 a été appliquée en 1839 lorsque l'armée a été mise sur le pied de paix et lorsque les auditeurs en campagne ont été supprimés. M. le ministre de la justice d'alors a cru qu'en vertu de la loi de 1834, il pouvait nommer des auditeurs adjoints, et il a demandé à cette fin un crédit au budget. J'ai pensé pouvoir suivre la même marche que mon honorable prédécesseur et continuer à nommer en vertu de la loi de 1834 un auditeur adjoint pour l'envoyer dans les différentes provinces, lorsque les besoins du service l'exigeront. C'est pourquoi j'ai pensé devoir maintenir la demande de crédit de 3,000 fr.

M. Lebeau. - Je demanderai si la section centrale a eu connaissance de ce fait et si elle a pu en délibérer. C'est réellement d'une augmentation de 3,000 francs qu'il s'agit. La somme de 3,000 francs dont il s'agit et que la fin de l'état de mise en campagne avait rendue disponible, cette somme avait été conservée comme une sorte de traitement d'attente pour un auditeur adjoint. Cet auditeur adjoint est maintenant placé, et je demande si ce fait a été connu de la section centrale assez à temps pour qu'elle pût en délibérer. Je le répète, il s'agit réellement d'une augmentation de 3,000 francs, augmentation tout improvisée.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - La section centrale n'a pas pu avoir connaissance de ce fait qui est d'une date très récente. Du reste, si la chambre pensait ne pas pouvoir maintenir le chiffre, si elle pensait que la loi de 1834 ne peut plus recevoir l'application qu'elle a continuellement reçue, même depuis que l'armée est sur le pied de paix, je serais forcé de présenter un nouveau projet de loi, dans le sens de la loi de 1834 ; car le service de la justice militaire souffrirait considérablement si les auditeurs n'avaient pas des auditeurs adjoints pour les remplacer lorsqu'ils sont empêchés par une cause quelconque.

M. Dubus (aîné), rapporteur. - Je dois répondre à l'interpellation de l'honorable M. Lebeau, que le chiffre de 41,253 fr. a été admis sans discussion par toutes les sections et par la section centrale. Quant au fait qui a été signalé tout à l'heure, il n'existait pas encore à l'époque des délibérations de la section centrale, qui remontent, je pense, au mois de juin dernier.

M. Lebeau. - Il est fâcheux qu'on ne produise pas au moins le rapport de l'auditeur général. En différentes circonstances on rogne les appointements de petits employés ; on discute longuement sur des augmentations de 4 ou 500 fr., et voilà qu'on veut maintenir au budget, sans le moindre examen, une somme de 3,000 fr. qui n'a plus de cause, puisque celui qui la recevait, à titre de traitement d'attente, est maintenant placé. Du reste si la chambre veut adopter le chiffre demandé, je n'insisterai pas. Ce n'est pas moi qui d'ordinaire pousse le système des économies en dehors des limites raisonnables.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - Il ne me semble pas du tout que le traitement de 3,000 fr., porté au budget, soif un traitement improvisé, attendu qu'il y figure depuis 1839. Il résulte suffisamment des discussions qui ont eu lieu, notamment lorsque ce traitement a été porté la première fois au budget, que le ministre de la justice a dit alors qu'il trouvait dans la loi de 1834 l'autorisation nécessaire pour maintenir ce chiffre au budget et pour faire les nominations qui devaient entraîner cette dépense. J'ai donc suivi ce qui s'est toujours fait. J'ai présenté cette observation à la chambre uniquement parce que je voulais lui rendre un compte exact des faits, et obtenir, par la loi budgétaire, les moyens d'exécuter la loi de 1834.

L'honorable M. Lebeau dit que j'aurais au moins dû communiquer à la chambre le rapport de l'auditeur général. Je suis prêt à le communiquer, mais cela me paraît inutile, attendu que si l'on conteste la nécessité du chiffre demandé, je suis prêt à la démontrer sans même devoir lire ce rapport de M. l'auditeur général.

- Le chiffre proposé par le gouvernement est mis aux voix et adopté.

Chapitre IV. Frais de justice

Articles 1 et 2

« Art. 1er. Frais d'instruction et d'exécution : fr. 679,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Indemnité pour le greffier de la cour de cassation, à charge de délivrer gratis toutes les expéditions ou écritures réclamées par le procureur général et les administrations publiques : fr. 1,000. »

- Adopté.

Chapitre V. Palais de justice

Article unique

« Article unique. Constructions, réparations et loyer de locaux : fr. 75,000. »

- Adopté

Chapitre VI. Publications officielles

Article premier

« Art. 1er. Impression du Recueil des Lois, an Moniteur et des Annales Parlementaires : fr. 93,500. »

M. Delfosse. - Je prie M. le ministre de la justice de faire en sorte que les tables des matières du Moniteur soient publiées plus tôt. Nous venons seulement de recevoir les tables du deuxième semestre de 1845. En l'absence des tables des matières, les recherches sont extrêmement difficiles.

Je prie aussi M. le ministre de la justice de veiller à ce que la politique ne pénètre pas jusque dans les tables des matières ; j'y ai trouvé un article dans lequel on fait ressortir un dissentiment d'opinion entre l'honorable M. Rogier et moi, sur une question importante. Cela est d'autant plus étrange que l'on avait donné dans une séance suivante des explications dont il est résulté que le dissentiment était plus apparent que réel. Je me suis dit en voyant cet article, tout à fait exceptionnel : Où la politique va-t-elle se nicher ?

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - Messieurs, les observations de l'honorable M. Delfosse sont parfaitement fondées, relativement aux tables. Mais j'espère qu'à l'avenir ces retards n'auront plus lieu. D'après, l'assurance que m'a donnée M. le directeur du Moniteur, et d'après le mode qu'il emploie maintenant pour rédiger les tables, je pense que toujours dans le premier mois du semestre qui suit celui dont il faut faire les tables, on pourra distribuer les tables, la table chronologique d'abord, et la table alphabétique ensuite. En France, les tables du Moniteur ne sont, je pense, publiées qu'un an après ; mais je reconnais que le retard ett beaucoup trop long.

Quant à l'autre objection de l'honorable M. Delfosse, je n'ai pas fait la table, je ne l'ai pas même lue ; ce travail est confié à M. le directeur Bourson ; je lui recommanderai de s'abstenir d'insérer dans les tableaux tout ce qui pourrait indiquer une couleur politique.

M. de Brouckere. - Messieurs, il y a quelque temps, MM. les questeurs de la chambre avaient présenté un règlement sur la manière dont nos séances devaient être sténographiées. Dans ce règlement, se trouvait un article qui interdisait aux sténographes de rien ajouter aux discours ; ainsi l'on ne pouvait plus mettre après telle ou telle phrase : « on rit », « assentiment général », « approbation générale », comme nous voyons que cela se fait quelquefois ; dans ces divers cas, l'on devait se borner à mettre le mot « interruption ». Le règlement a été rejeté par une fin de non-recevoir ; mais si j'ai bonne mémoire, il avait été entendu que cet article serait exécuté, et l'exécution en avait été confiée à MM. les questeurs.

Messieurs, vous vous rappellerez que dans cette séance j'ai raconté à la chambre, sur un de MM. les ministres, une ; élite anecdote qui a paru l'amuser assez ; eh bien, depuis ce temps-là, j'ai vu dans le Moniteur les mêmes ajoutes ; et, entre autres, dans un discours prononcé par M. de Theux, j'ai vu, après deux phrases, les mots : « on rit ».

Vous savez, messieurs, que les ministres ne font jamais rire qu'aux dépens de la gauche ; et nous qui ne mettons jamais d'ajouté, nous avons l'air d'être impuissants à faire rire la gauche au détriment de MM. les ministres. Il n'y a pas de justice dans ce procédé-là.

Je pourrais produire un autre discours, prononce par un membre de la droite, où après une phrase, se trouvent, entre deux parenthèses, les mots « assentiment général », et, comme l'a dit M. le questeur, on s'appuie sur ces discours deux ou trois ans après, et l'on tire argument de l'assentiment général qu'on a mis de sa propre main.

Je demande donc qu'il soit décidé que l'article qui avait été facilement accepté, soit observé à l'avenir ; et qu'aux discours qui seront prononcés, par MM. les membres de la droite comme par les membres de la gauche, l'on ne puisse plus faire aucune ajoute autre que celle du mot interruption.

Cette ajoute est parfois nécessaire, parce que souvent l’orateur se reprend. Il faut bien que le lecteur sache pourquoi l'orateur se reprend, mais le mot « interruption » suffit, et j'insiste pour que MM. les questeurs veuillent bien prendre des mesures, afin qu'à l'avenir il n'y ait d'autre ajoute que celle du mot « interruption ».

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, j'approuve entièrement les observations de l'honorable préopinant ; je désire que le bureau établisse la règle qui a été signalée, et qu'à l’avenir personne ne s'en écarte. Je puis d'autant plus insister sur ce point que jamais, dans aucun de mes discours, je n'ai ajouté rien dans le sens que vient d'indiquer l'honorable préopinant ; et si les mots « on rit » se sont trouvés dans l'un d'eux, je puis vous assurer que ce n'est pas moi qui les y ai mis.

M. de Brouckere. - Messieurs, je voulais dire seulement qu'il m'est arrivé à moi qu'après une phrase d'un de mes discours, on avait mis les mots « on rit », et que je les ai effacés.

M. Lebeau. - C'est ce que j'ai fait aussi.

M. de Corswarem, questeur. - Messieurs, je tiens à déclarer que l'honorable M. de Brouckere verse dans une erreur, lorsqu'il dit que l'exécution d'un article du règlement projeté a été confiée à MM. les questeurs, et que cet article avait été facilement adopté. La chambre se souvient qu'aucun article du règlement n'a été mis en discussion, et que dans la discussion générale qui a eu lieu à ce sujet, il a été décidé que le bureau arrêterait tels articles de règlement qu'il jugerait nécessaires. L'expérience a prouvé que ce n'est pas le seul article auquel l'honorable M. de Brouckere fait allusion, qu'il faille introduire dans ie règlement.

L'honorable M. de Brouckere est également dans l'erreur, lorsqu'il dit que les membres de la gauche n'ajoutent jamais à leurs phrases les mots « On rit » ni autres. Je suis très ponctuellement l'impression du Moniteur, et je puis dire que sur dix « on rit » ou autres mots ajoutés, il y en a au moins huit qui viennent des membres de la gauche.

(page 518) Je ne désire rien tant que de voir adopter un règlement, et je déclare que de jour en jour je suis plus intimement convaincu qu'un règlement quelconque est nécessaire.

M. le président. - Messieurs, depuis la reprise des travaux de la chambre, il a été impossible de réunir tous les membres du bureau ; la semaine prochaine, le bureau sera convoqué pour arrêter un règlement provisoire.

- Personne ne demandant plus la parole, l'article 1er est mis aux voix et adopté.

Articles 2 et 3

« Art. 2. Abonnement au Bulletin des arrêts de la cour de cassation : fr 3,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Publication d'un recueil des anciennes lois des Pays-Bas autrichiens, de la principauté de Liège et autres pays dont le territoire est compris dans le royaume de Belgique ; publication d'un recueil d'instructions-circulaires émanées du département de la justice depuis la réunion de la Belgique à la France en 1795 jusqu'en 1830 ; impression d'avant-projets de lois à envoyer à l'avis des cours et tribunaux et des facultés de droit des universités du royaume : fr. 5,000. »

- Adopté.

Chapitre VII. Pensions et secours

Article premier

« Art. 1er. Pensions civiles : fr. 180,000. »

M. de Garcia. - Messieurs, à l'occasion de ce chapitre, je dois demander quelques explications à M. le ministre de la justice.

Lorsque la loi sur les pensions a été faite, on présumait qu'une retenue d'un et demi pour cent sur le traitement des magistrats serait plus que suffisante pour couvrir les pensions des veuves et des orphelins. Depuis cette loi une circonstance imprévue (l'augmentation du traitement dès membres de l'ordre judiciaire) a donné une ressource extraordinaire à la caisse des pensions, puisque deux mois de cette augmentation lui ont été attribués.

Néanmoins la retenue faite sur les traitements de l'ordre judiciaire qui sont extrêmement modestes est de 3 p.c. Cette position, inexplicable à mes yeux, m'oblige à rompre le silence.

Je demanderai que M. le ministre veuille nous expliquer comment une retenue aussi élevée est nécessaire pour le service des pensions aux veuves et aux orphelins. D'après les explications que je trouve dans le rapport, elle ne me paraît pas justifiée. Je crois au contraire qu'avec une retenue d'un et demi ou deux pour cent au plus, il y aurait de quoi satisfaire à toutes les pensions.

Voici les explications qui se trouvent dans le rapport :

« Ces pensions sont maintenant, pour les veuves de magistrats, comme, pour celles de tous les autres fonctionnaires, fixées à 15 et 16 p. c. du traitement moyen du défunt pendant les cinq dernières années, avec augmentation d'un pour cent à raison de chaque année de contribution au-delà de dix. La pension serait dorénavant portée à 20 p. c, avec augmentation a partir de la sixième année au lieu de la onzième année de contribution à la caisse, en réduisant d'ailleurs de moitié, c'est-à-dire en fixant à un demi pour cent l'augmentation à raison de chaque année de contribution. »

Vous voyez que l'intention du gouvernement serait d'augmenter la pension des veuves de magistrat, de la porter à 20 p. c. au lieu de 15, ce qui ferait une augmentation assez considérable. Je ne vois pas le motif de cette augmentation, d'autant plus que nous établirions par là une différence entre la position des veuves de magistrats et celle des veuves des autres fonctionnaires. Je crois que toutes les veuves et tous les orphelins des fonctionnaires de l'Etat doivent être mis sur la même ligne.

Je prie donc aussi M. le ministre de nous dire les motifs qui le portent à créer cette augmentation qui sera d'un quart plus forte que celle établie par les dispositions primitives.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - L'exemple de ce qui s'est passé en France et en Belgique relativement à la caisse de 1822 doit nous engager à être bien prudents. Vous vous rappelez les sommes énormes que le gouvernement a dû ajouter tous les ans, pour combler le déficit que présentait la caisse des veuves des fonctionnaires qui avaient fait des versements depuis 1822. Il est indispensable d'empêcher que pareille chose se renouvelle ; la loi nous y oblige, puisqu'elle défend formellement au gouvernement de contribuer en aucune façon pour soutenir la caisse ; il faut donc empêcher que la caisse s'obère, et il faut faire en sorte qu'elle puisse satisfaire à tous les besoins.

Pour répondre à l'interpellation de l'honorable M. de Garcia et prouver l'impossibilité dans laquelle je me trouve de diminuer les retenues qu'on opère, je devrais entrer dans des considérations un peu longues et peut-être un peu ardues.

Il y a, messieurs, 900 contribuants à la caisse de retraite des veuves et orphelins de la magistrature ; de ces 900 membres, 300 sont célibataires, 600 sont mariés. D'après les statistiques qui ont été faites, on peut adopter cette base, que sur 900 membres de l'ordre judiciaire, un tiers est célibataire et deux tiers sont mariés. D'après les statistiques, il est constaté aussi que l'âge moyen de l'entrée dans la magistrature est 31 ans. A cet âge, la durée de la vie est, d'après les probabilités, encore de 30 ans.

Le nombre de veuves sera annuellement de dix ; ces données se trouvent confirmées déjà par les faits, attendu que depuis la loi qui a deux années d'existence, nous avons déjà dix-huit veuves à pensionner. Je me borne à indiquer le résultat des calculs dont je ne puis ici faire connaître les bases, et je continue : L'âge moyen de la femme du magistrat au moment d'être pensionnée est de 57 ans, en supposant que l'âge moyen des femmes est de 4 ans inférieur à celui du mari ; maintenant, d'après les tables de mortalité, à l'âge de 57 ans, les probabilités de vie sont encore de 15 ans. Sur les 600 magistrats mariés, on peut calculer que la moitié survivra à leurs femmes. Ainsi, au bout de 30 ans, nous aurons 300 veuves ayant joui chacune pendant quinze années, terme moyen, d'une pension, ce qui fera un total de 4,500 pensions annuelles qui auront été payées.

Voyons maintenant quelle est la contribution moyenne versée à la caisse des veuves et orphelins par les fonctionnaires publics ; et voyons si par cette contribution et les ressources actuelles de la caisse il est possible d'opérer la moindre diminution sur la retenue.

Nous avons vu qu'on arrivait à la magistrature à l'âge de 31 ans et qu'à cet âge les probabilités de vie étaient encore de 30 ans, pendant lesquels on contribuait à la caisse.

La pension des veuves est de 10 p. c, plus 1 p. c. pour chaque année après la dixième.

La pension moyenne de la veuve sera donc de 36 p. c. du traitement du mari ; le traitement moyen des fonctionnaires de l'ordre judiciaire est de 3,046 francs. Le taux moyen de la pension de la veuve sera donc de 1,100 fr., chiffre rond. Il résulte de ces données qu'en arrivant à la trentième année, 4,500 pensions à 1,100 fr. auront absorbé 4,950,000 fr. Voilà la somme que nous devons obtenir au bout de 30 ans, pour qu'il n'y ait pas de déficit dans la caisse, en maintenant les pensions au taux actuel.

Voyons maintenant quels sont les revenus annuels ; ils montent à 82,000 fr. maintenant, mais on peut les évaluer à 85,000 fr., attendu que le nombre des nominations et des mutations peut augmenter. Pour ne pas me tromper, je porterai même le revenu à 95,000 fr., 95,000 fr. donnent, au bout de 30 ans, une somme de 2,850,000 fr. Il y aura donc un déficit de 2,100,000 ou annuellement un déficit de 70,000 fr.

Que faut-il faire pour combler ce déficit éventuel ? Il faut faire des économies dans le principe. Ce n'est qu'au moment de la création de la caisse que les économies sont possibles. Voyons donc quelles économies on peut faire.

Au bout de 15 ans, les 150 veuves probables qu'il y aura absorberont à peu près les 95,000 francs de revenu ordinaire, en ne calculant la pension qu'à 600 francs. Ainsi, à dater de cette époque, la pension des veuves dépassant le nombre de 150, devra être payée sur les économies faites antérieurement.

Nous avons vu que les économies devront être assez considérables pour arriver au chiffre que j'ai indiqué tout à l'heure.

Pour juger les économies à faire, examinons quel avoir il y a dans la caisse, et voyons de combien il sera accru après 30 ans.

Je vous ai déjà dit, messieurs, qu'à dater de la quinzième année, il ne serait plus possible de faire aucune économie sur les revenus annuels. Il faut donc que les économies soient faites antérieurement. N'oublions pas que nous devons arriver à un chiffre tel que la caisse puisse, sans le secours du gouvernement, servir aux veuves des magistrats les pensions qui leur sont accordées par la loi

L'avoir actuel est de 261,218 francs.

En supposant cette somme doublée au bout de 15 ans, l'avoir sera alors de 522,436 francs.

Mais, en outre, avant les 15 ans révolus, il y aura eu des économies faites sur la somme de 95,000 francs. Il faut également en tenir compte. Supposons une économie annuelle de 45,000 fr.et je pense que c'est aller très loin, puisque nous avons vu qu'après quinze ans la somme serait absorbée par le service des pensions.

Nous arriverons alors à une somme de 675,000 fr., à ajouter à celle de 522,456 fr. Total, 1,197,436 fr., somme inférieure à celle dont je vous ai parlé tout à l'heure et qui est nécessaire pour parer au déficit de la caisse, après 30 ans ; mais on peut forcer le chiffre en tenant compte des intérêts.

J'admets même qu'on puisse faire encore quelques économies jusqu'à la vingtième année et qu'on parvienne ainsi à obtenir la somme de 2,850,000 francs nécessaire pour qu'il n'y ait pas de déficit et qu'il ne soit pas nécessaire d'augmenter les retenues et de diminuer le taux des pensions.

Vous voyez, d'après ces calculs, basés sur des statistiques officielles, qu'il paraît impossible de diminuer les retenues sans compromettre l'avenir de la caisse et par suite l'avenir des veuves de magistrats.

Le conseil d'administration de la caisse de l'ordre judiciaire m'a fait diverses observations relatives aux retenues. S'appuyant sur la discussion qui a eu lieu dans la chambre, sur des données qu'il croyait exactes, le conseil d'administration de la caisse avait cru pouvoir demander une réduction telle de la retenue qu'il en serait résulté une diminution dans l'avoir de la caisse de 14 à 15 mille francs par an (ce qui compromettrait gravement l'avenir de la caisse). Ce conseil demandait en même temps pour les veuves que la pension fût portée de 36 à 46 p. c.

Je ne pense pas que ces propositions puissent être admises. Si je les avais adoptées j'aurais, je le répète, compromis le sort de la caisse et entravé pour l'avenir l'exécution de la loi.

Le conseil s'est préoccupé de ce qui existe aujourd'hui : il a vu un encaisse considérable et cinq veuves seulement dans la première année. Il en a conclu que jamais il n'y en aurait plus annuellement et qu'on pourrait (page 519) facilement leur donner une pension assez élevée, à l'aide des ressources ordinaires. Mais ces calculs sont déjà en partie détruits par l'expérience de cette année, puisqu'il y a maintenant 18 veuves. Je puis donc invoquer l'exactitude des calculs basés sur les statistiques et sur les tables de mortalité, exactitude démontrée par les faits récemment constatés.

Néanmoins comme je tiens à marcher d'accord avec le conseil de la caisse de la magistrature, je lui ai soumis les observations que je viens de présenter. Le conseil de la caisse m'a répondu par la délibération suivante.

« Délibérant instantanément sur cette communication ministérielle (sur le point a), le conseil se réserve d'examiner ultérieurement les objections contenues dans la première partie de cette pièce, qui roule sur un grand nombre de faits inconnus au conseil. »

Ainsi, messieurs, le conseil de la caisse, loin de rejeter les observations que j'avais faites, loin de les déclarer non fondées, s'est réservé de les examiner, et je pense que le conseil a agi sagement ; j'imite sa réserve. Il est évident, en effet, que si le conseil de la magistrature me démontre que j'ai tort, que les raisonnements sur lesquels je me suis appuyé sont erronés, je ne demanderai pas mieux que de revenir sur la décision prise, et de diminuer la retenue, si tant est que cela soit possible. Mais je crois jusqu'à présent avoir agi avec prudence en n'accédant pas à la demande que m'avait faite la première année le conseil de la caisse, en lui soumettant les calculs que je viens de vous présenter, et en attendant un avis ultérieur. Le conseil de la caisse représente la magistrature ; il en défend consciencieusement les intérêts, et je pense que la magistrature peut avoir pleine confiance dans la discussion loyale qui s'engagera entre ce conseil et moi.

Messieurs, le conseil de la caisse avait exprimé le désir, comme je vous le disais, de voir élever le taux de la pension de 36 à 46 p. c. J'ai répondu que cela était complétement impossible, que ce serait évidemment ruiner la caisse. Néanmoins, messieurs, dans l'intérêt des veuves qui, dans l'état actuel, auraient eu une pension bien minime, et auraient eu une position bien peu en rapport avec celle qu'elles occupaient pendant la vie de leurs maris, j'ai tâché d'arriver à une combinaison qui pût permettre, sans obérer la caisse, de donner un peu plus tôt aux veuves une position meilleure.

Voici, messieurs, ce que j'ai fait.

J'ai proposé de donner 20 p. c. au lieu de 16 p. c.

Ainsi la pension est augmentée dès le principe de 4 p. c.

Maintenant, d'après les statuts actuels, la pension augmente de 1 p. c. pour chaque année après les dix premières pendant lesquelles le versement a été opéré. Or nous avons vu que, d'après la durée probable des fonctions, le versement aura lieu pendant 30 ans, d'où il résulte que la pension moyenne est maintenant de 16 p. c. d'abord, plus de 20 p. c. pour les années qui suivent les dix premières, par conséquent de 36 p. c.

J'ai proposé, comme je le disais, de porter la pension d'abord à 20 p.c. et de faire commencer l'augmentation à dater de la cinquième année ; mais de réduire cette augmentation, de 1 p. c. qu'elle est aujourd'hui, à un demi pour cent.

Il en résulte, messieurs, que dans le début, la pension sera un peu plus considérable ; mais que, d'un autre côté, la pension n'atteindra en définitive en moyenne que 32 1/2 p. c ; savoir, 20 p. c. après 5 ans, plus 12 1/2 p. c. après 25 nouvelles années, soit 32 1/2 p. c. après 30 ans. Il y aura donc en définitive avantage pour la caisse, mais il y aura aussi un avantage réel et immédiat pour les veuves qui ne devront pas attendre aussi longtemps pour obtenir une pension plus en rapport avec la position qu'elles ont occupée dans la société.

Ainsi le système auquel je me suis arrêté, ne peut en aucune façon obérer la caisse. Ce système est, au contraire, avantageux à la caisse, et je pense qu'il est également très avantageux aux veuves des magistrats.

Cette proposition, messieurs, que j'ai également soumise au conseil de la magistrature, a été accueillie par lui dans les termes suivants :

« Quant à la proposition de porter la pension normale à 20 p. c. en réduisant de moitié la pension accroissante qui commencerait à la cinquième année, le conseil y donne son entière adhésion. »

Ainsi, messieurs, le conseil de la magistrature a trouvé bonne la combinaison que je lui ai présentée ; et au point de vue des intérêts de la caisse, cette combinaison me paraît également convenable.

Je crois donc, messieurs, à l'aide des considérations que je viens de présenter, avoir établi qu'il est impossible de diminuer, quant à présent, la retenue, et qu'il est impossible aussi d'augmenter les pensions des veuves, comme l'avait demandé primitivement le conseil de la caisse, mais qu'il est convenable de les porter au taux que j'ai proposé, sans crainte pour l'avenir de la caisse.

M. de Garcia. - Messieurs, j'ai écouté avec la plus grande attention les détails statistiques que vient de nous donner M. le ministre ; mais on conçoit qu'il est fort difficile de saisir à l'audition des détails semblables. Cependant je puis les résumer dans deux faits culminants.

Il reste constant et bien établi que, dans l'état actuel, la caisse de pensions des veuves et des orphelins se trouve plus que suffisante pour satisfaire aux besoins de ce service. Elle est tellement bien fournie, que d'après les observations de M. le ministre, au moyen des intérêts de cet encaisse, et des économies qu'on pourra réaliser pendant les quinze ans qui vont suivre, on aura à sa disposition plus d'un million pour assurer dans l'avenir et a toujours les pensions des veuves et des orphelins.

Or, messieurs, est-il juste que la génération actuelle des magistrats supporte la charge et la garantie de ces pensions pour un temps indéfini ?

Je ne puis admettre cette manière de voir ; et, à mon sens, avoir posé la question, c'est l'avoir résolue en faveur de mon opinion.

Je voudrais donc que les retenues fussent proportionnées aux besoins actuels avec le seul excédant que comportent la nature des choses et les chances imprévues.

Mais ce à quoi je m'oppose de toutes mes forces, c'est à la retenue exorbitante qu'on fait peser sur les magistrats actuels pour assurer l'avenir des veuves et des orphelins des magistrats futurs. Il faut de la justice en tout, et je ne puis trouver juste que les retenues qui sont faites sur le traitement des magistrats dépassent le seul but qui doit être atteint, celui d'assurer à leurs veuves et à leurs orphelins une position convenable.

M. le ministre, par des détails statistiques encore, nous démontre ou cherche à nous démontrer qu'en portant la pension de 16 à 20 p. c, en diminuant l'augmentation qui ne sera plus que d'un 1/2 p. c. au lieu d'être d'un p. c, et en avançant le temps où cette augmentation aura lieu, la dépense ne sera pas plus forte Si cette assertion est exacte, je n'ai pas à m'en plaindre ; c'est ce que l'avenir et l'expérience nous démontreront, et ce dont je n'ai pu me rendre compte devant les détails statistiques produits par M. le ministre.

Je terminerai, messieurs, en invitant instamment M. le ministre à voir s'il n'est pas possible de réduire la retenue actuelle qui me paraît encore n'être pas réclamée par les besoins du service. On le sait, messieurs, les traitements des magistrats de l'ordre judiciaire ont été augmentés ; mais ils sont encore excessivement modiques, et ceux d'entre eux qui sont mariés et pères de famille doivent user de la plus grande économie pour conserver une position digne et honorable, ici, je ne parle pas pour moi ; je ne suis ni marié ni père de famille, mais c'est une raison de plus pour défendre les droits de ceux qui se trouvent dans une autre position.

M. Donny. - M. le ministre de la justice vous a dit que le conseil d'administration avait demandé à la fois et une diminution des retenues et une augmentation des pensions. Il vous a dit que, pour faire cette double demande, ce conseil s'était fondé sur l'encaisse actuel, qui est considérable, parce qu'il a eu pour première mise les retenues extraordinaires exercées sur les augmentations des traitements de l'ordre judiciaire.

M. le ministre me permettra d'ajouter aux explications qu'il a données, d'autres explications encore, qui compléteront ses renseignements.

L'existence d'un avoir extraordinaire dans la caisse de la magistrature a été effectivement un des motifs sur lesquels le conseil d'administration de la caisse s'est basé. Mais il s'est basé de plus sur des calculs très développés et sur d'autres éléments encore : et par exemple il a comparé la caisse de l'ordre judiciaire à la caisse des finances et à celle des travaux publics, et il a été frappé de ce que, d'après le Moniteur, la caisse des finances et celle des travaux publics payent des pensions liquidées à raison de toutes les années de service des fonctionnaires décédés, en y comprenant les années de service antérieures à l'établissement de la caisse. Et, en effet, l'on accorde tous les jours à des veuves d'employés des finances, de fonctionnaires des travaux publics, des pensions calculées sur 30, 38, 40 ans de service ; or le conseil d'administration de la caisse de la magistrature a fait remarquer que si la caisse des veuves et orphelins du département des finances et celle du département des travaux public peuvent faire face à des charges extraordinaires aussi considérables, la caisse de l'ordre judiciaire, qui n'a pas de charges semblables à supporter, peut bien retenir quelque chose de moins aux fonctionnaires et donner quelque chose de plus aux veuves. Toutes les caisses sont établies à peu près sur les mêmes éléments ; ces éléments ont été calculés par des employés des finances et par des employés des travaux publics qui sans doute s'entendent au calcul ; ils ont trouvé qu'on pouvait, au moyen des ressources attribuées aux caisses des finances et des travaux publics, payer non seulement des pensions de 16 p. c., mais encore de telles pensions majorées de 1 p. c. à raison de chaque année de service antérieure à l'établissement de la caisse. Mais si cela est vrai pour ces deux caisses, cela doit être vrai aussi pour celle de la magistrature ; si les caisses des finances et des travaux publics peuvent faire face à des obligations aussi lourdes, sans que l'on ait à craindre pour leur avenir, pourquoi craindrait-on pour l'avenir de la caisse des pensions de la magistrature, bien moins maltraitée par une légère diminution des retenues et une légère majoration des pensions ?

Je pourrais vous présenter à mon tour des chiffres statistiques ; mars je ne crois pas devoir me transporter sur ce terrain. M. le ministre vous a cité des chiffres ; mais très certainement, il n'est personne, dans cette enceinte, qui puisse à l'instant se faire la moindre idée sur leur mérite.

Si, de mon côté, je vous citais les chiffres sur lesquels le conseil d'administration de la caisse de l'ordre judiciaire a basé sa délibération, vous seriez dans la même impossibilité de les apprécier ; j'aime mieux n’en rien faire.

Je me permettrai seulement de dire que les chiffres cités par M. le ministre fournissent matière à ample contestation et que je suis personnellement persuadé qu'on pourra facilement lui prouver que les résultats auxquels il est parvenu au moyen de ces chiffres ne sont rien moins qu'exacts.

J'ai entendu avec beaucoup de plaisir M. le ministre déclarer qu'il augmentera les pensions des veuves de l'ordre judiciaire. De cette manière, si la magistrature actuelle paye un peu plus qu'elle ne devrait payer, au moins les veuves de cette magistrature retireront quelque fruit de ce sacrifice, tandis que si le système primitivement adopté avait été maintenu, la magistrature actuelle aurait été forcée à (page 520) faire des sacrifices pour procurer aux magistrats futurs des réductions de retenue, et à leurs veuves de grosses pensions. Ce qui ne serait pas juste. Il faut que la magistrature actuelle paye sa part, et que la magistrature future supporte également la sienne des charges de l'institution ; comme il faut que les veuves reçoivent dans tous les temps des pensions convenables.

J'espère donc que M. le ministre voudra bien, au premier jour, prendre des mesures pour mettre en pratique la déclaration qu'il vient de faire dans cette enceinte.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - L'honorable M. Donny vient de confirmer ce que j'ai dit tout à l'heure. Les observations que j'ai faites ont été communiquées au conseil de la caisse, qui s'en occupera prochainement, rencontrera mes chiffres s'il croit devoir les combattre, ou reconnaîtra son erreur, s'il trouve mes calculs fondés.

Je suis convaincu que la discussion entre mon administration et celle de la caisse amènera un résultat désiré par tous.

Je dois répondre un mot à l'honorable M. de Garcia, qui semble considérer comme une injustice la retenue qui se fait maintenant. L'honorable membre a dit qu'il ne lui paraissait pas juste que la magistrature actuelle dût payer pour améliorer le sort de la magistrature future. Mais il est, tout à fait dans l'erreur. La magistrature future devra subir les mêmes retenues que celles qui se font aujourd'hui.

Les observations de l'honorable membre seraient parfaitement justes, si, au moyen des retenues actuelles, on cherchait à obtenir un avoir tel que les retenues dussent plus tard être diminuées. Mais d'après les calculs que j'ai eu l'honneur de vous soumettre, la magistrature future devra subir les mêmes retenues, si l'on veut maintenir l'avoir de la caisse dans un état tel qu'elle puisse faire face à tous les besoins. Ainsi, il n'y a pas d'injustice à l'égard de la magistrature actuelle.

Mais il y a quelque chose de plus : si la magistrature actuelle subit une retenue considérable, les veuves des magistrats peuvent jouir d'une pension après peu de mois de versement à la caisse.

Je pourrais citer un magistrat qui avait fait un seul versement à la caisse et dont la veuve a obtenu une pension de 6 à 700 fr. On n'a pas considéré cela comme une injustice ! Il y a donc ample compensation.

Je crois que les chiffres que j'ai présentés à la chambre, et sur lesquels il serait bien difficile d'élever un débat, sont de nature à convaincre le conseil de la caisse qu'il est impossible de réduire les retenues comme il le désire.

Ayant contribué, autant qu'il était en moi, à améliorer la position financière de la magistrature, j'aurais bien vivement désiré ne pas devoir lui retirer en quelque sorte d'une main ce qu'on lui a donné de l'autre. Mais j'ai dû me préoccuper de la situation de la caisse et du sort des veuves.

Depuis que je suis au département de la justice, j'ai eu des exemples si douloureux de veuves de magistrats qui, d'une position brillante, sont tombées dans un état voisin de la misère, que j'ai dû prendre à cœur leurs intérêts, en considération même de la dignité de la magistrature.

M. de Garcia. - Je demande la parole pour un fait personnel.

M. le président. - Il n'y a rien de personnel dans ce que vient de dire M. le ministre de la justice.

M. de Garcia. - Permettez, M. le président ; je désire me justifier, au sujet d'un mot qui a été mal compris, et d'où l'on infère, d'une manière absolue, que j'ai qualifié d'injuste la retenue de 3 p. c. sur les traitements des magistrats.

Je n'ai pas dit que la retenue de 5 p. c. constitue une injustice ; du moins je ne l'ai pas dit d'une manière isolée. Ce que j'ai avancé à cet égard, c'est que si pour assurer le service des pensions dont s'agit dans l'avenir et pour un temps indéfini, on faisait peser une retenue de 5 p. c. sur la magistrature actuelle sans que les besoins actuels se fassent sentir, une mesure semblable constituait un acte d'injustice ; et cela me semble évident ; il faut prendre ma pensée dans son ensemble pour en saisir la portée et la justesse ; or, je le demande, quelqu'un peut-il méconnaître qu'il y a injustice à faire subir aujourd'hui à la magistrature une retenue qui doit avoir pour objet d'assurer les pensions des veuves et des orphelins de la génération future des magistrats ? Je ne le pense pas, et c'est pourtant dans ce sens seulement que j'ai qualifié la mesure d'injuste.

M. Dubus (aîné), rapporteur. - Messieurs, comme les honorables préopinants, je ne puis apprécier le mérite des calculs compliqués que M. le ministre de la justice vient de faire ; si M. le ministre avait voulu qu'on pût se former une opinion à cet égard, il aurait communiqué ces calculs à la section centrale, en réponse à la demande de renseignements que la section centrale lui avait adressée ; mais il n'en a rien fait, et ces calculs, jetés brusquement dans la discussion, ne peuvent pas déterminer ma conviction ; il est impossible que nous les appréciions convenablement.

Je ferai seulement remarquer que jusqu'ici on a calculé de deux ou trois manières différentes. Ainsi, lorsque la loi des pensions a été discutée, M. le rapporteur de la section centrale, qui s'entend en calculs, disait qu'une retenue de 1 1/2 ou 2 p. c. au plus suffirait pour la caisse de la magistrature.

Il y a deux ans, lorsque le règlement du 29 décembre est intervenu, on a fixé la retenue à 3 ou à 2 ½ p. c. selon la hauteur du traitement. On avait donc fait un autre calcul d'où résultait la nécessité de porter la retenue à un taux aussi considérable ; mais on n'avait cependant pas tenu compte de la ressource extraordinaire de la caisse, ressource qui s'est produite depuis : c'est la retenue de deux mois qui a été opérée, au 1er juillet 1845, sur toutes les augmentations de traitement votées pour l'ordre judiciaire. Cette ressource extraordinaire est considérable ; elle a contribué principalement à former le capital actuel de la caisse ; elle n’entrait pas, de l'aveu de M. le ministre, dans les calculs faits au 29 décembre 1844 ; donc, en tenant compte de cette ressource extraordinaire, on devrait trouver les retenues de 2 1/2 et 3 p. c. trop élevées.

En troisième lieu, en réponse aux propositions du conseil de la caisse, qu'a proposé M. le ministre ? Si je l'ai bien compris, il a proposé d'augmenter les charges de la caisse. Il admettait donc jusqu'à un certain point cette vérité que la retenue était établie à un taux plus élevé qu'il n'était nécessaire pour les charges de la caisse ; mais au lieu de diminuer la retenue, on augmente les charges. Or, c'est là, messieurs, ce que je ne trouve pas juste. Toutes les pensions, par les divers arrêtés qui sont intervenus, ont été établies au même taux ; et d'après ce qui avait été formellement annoncé dans la discussion, c'était principalement la retenue qui devait varier, puisque là où les ressources étaient plus grandes, on aurait établi une retenue moindre ; mais ici lorsque l'on s'aperçoit qu'un actif considérable s'accumule, au lieu de diminuer la retenue, on augmente les charges, c'est-à-dire on augmente les pensions.

La caisse, indépendamment du montant de la retenue annuelle, a maintenant un avoir de 260 et quelques mille francs ; à la fin de l'année courante, elle aura un avoir d'environ 350,000 fr. ; et à la fin de l'année. 1848, un avoir de près de 450,000 fr., et toujours indépendamment de la retenue annuelle. Il me paraît dès lors impossible de concevoir qu'il faille maintenir une retenue aussi élevée.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - Messieurs, j'ai eu l'honneur de prendre part à la discussion des statuts des diverses caisses des veuves et orphelins. L'honorable préopinant est dans l'erreur, lorsqu'il pense que pour tous les fonctionnaires l'on a admis le même taux de retenue et les mêmes ressources. Il y a des différences essentielles. Ainsi, par exemple, pour l'administration financière, si je ne me trompe, la retenue a été portée à 1 p. c. de plus que pour d'autres caisses ; et cependant la caisse des finances a des ressources spéciales que ne possède aucune autre. Mais là comme tous les fonctionnaires de l'administration avaient déjà participé à une institution de ce genre, l'on a substitué la caisse nouvelle à l'ancienne, c'est-à-dire qu'on a permis de faire entrer en ligne de compte, pour la liquidation des pensions des veuves, les années de services rendus sous le régime de l'existence de l'ancienne caisse de retraite.

Pour l'ordre judiciaire, au contraire, la retenue a été réduite au-dessous du chiffre fixé pour les finances ; mais cette caisse n'a pas d'autres ressources aussi considérables, et c'est un danger très grave, d'après le système qui a prévalu, de réduire prématurément les retenues ou d'augmenter prématurément les pensions. Il est sensible que les caisses, au moment où elles ont été fondées, sont entrées dans la plénitude de leurs ressources, alors que les dépenses, ne faisant que de naître, doivent s'aggraver successivement, jusqu'à ce que les extinctions des pensions accordées viennent se balancer avec les pensions nouvelles.

Si l'on admet, d'après les calculs qui ont été faits, en France, sur un très grand nombre d'années, que la durée moyenne de la jouissance des pensions soit de 11 ans, il est évident que cette situation normale ne sera atteinte qu'après 22 années. Si l'on admet, au contraire, que la durée moyenne de la jouissance des pensions doive être de 15 ans, ce n'est qu'après 30 ans qu'on pourra connaître quelles sont les charges normales, quels doivent être les revenus normaux des caisses de pensions.

En présence de cette incertitude, l'on doit se garder, si l'on ne veut pas compromettre l'intérêt des magistrats, d'augmenter prématurément les pensions. Je me rappelle parfaitement que, lors de la discussion générale de la loi sur les pensions, on craignait de voir imposer à tous les ordres de fonctionnaires une retenue de 5 p. c. J'ai été peut-être au-dessous de la réalité, en indiquant alors comme nécessaire une retenue de 1 1/2 p. c. Lorsqu'on a recherché pour chaque ordre de fonctionnaires la proportion des participants à la caisse des mariés et des célibataires ; lorsqu'on a constaté, d'après les tables de mortalité, d'après les mutations, quelles devraient être les charges futures des caisses, on a été convaincu que si une retenue de 1 1/2 p. c. seulement avait été établie, l'institution n'eût pu se suffire à elle-même selon le vœu de la loi.

Le système indiqué par mon honorable collègue, M. le ministre de la justice, s'il était adopté, n'aurait pas pour résultat, comme le pense mon honorable ami, M. Dubus, d'augmenter les dépenses de la caisse, mais de donner aux veuves, dont les droits s'ouvriraient maintenant ou bientôt, une pension proportionnellement plus forte ; et quant à celles dont le droit viendrait à s'ouvrir beaucoup plus tard, de ne pas leur donner une augmentation aussi considérable.

Ainsi, d'une part, l'on augmente le taux normal ; mais d'autre part, on diminue l'accroissement à raison des années de contribution ; on conçoit qu'en agissant sur ces deux termes dans un sens inverse, on peut améliorer la position des veuves dans le présent, sans grever l'avenir de la caisse de charges plus considérables.

Messieurs, je crois aussi que cette discussion sur des chiffres, sur des faits, en quelque sorte abstraits, ne peut pas amener de résultat immédiat ; mais je tenais à faire ces observations, parce que le gouvernement étant chargé de régler les retenues, après avoir entendu les conseils des intéressés, a une grande responsabilité. Il doit faire en sorte de ne pas grever le présent dans l'intérêt de l'avenir ; mais il doit prendre aussi garde à ce qu'on n'arrive pas, au bout de quelques années, à une situation analogue à celle où la caisse de retraite des fonctionnaires des finances s'est trouvée quelques années après sa création.

M. Donny. - M. le ministre des finances vient de dire qu'il y a des différences entre les statuts de la caisse des veuves et orphelins des finances et celle de la magistrature. Cela, est vrai ; il y a quelque différence (page 521) non quant au chiffre, mais quant à l'application des retenues ; il y a quelque différence aussi quant à certaines autres ressources ; mais dans un travail très approfondi que j'ai eu occasion de faire, pour comparer les deux caisses, je suis arrivé à ce résultat qu'en définitive, la caisse des finances n'est pas plus favorisée par ses statuts que la caisse de la magistrature ne l'est par les siens.

Voyons maintenant comment les veuves sont traitées de part et d'autre. Mainte veuve d'employé des finances, dont le mari n'a contribué à la caisse actuelle que pendant six mois, un an, ou deux ans tout au plus, jouit d'une pension que n'obtiendra la veuve d'un magistrat que quand son mari aura contribué à la caisse de la magistrature pendant 30 ans. Il y a là quelque chose d'anormal, qu'on ne peut laisser subsister plus longtemps. La mesure que le ministre de la justice nous a déclaré vouloir prendre, de l'assentiment du conseil d'administration, diminuera, jusqu'à un certain point, la différence anormale qui existe maintenant entre les deux caisses.

Je présenterai une autre observation pour faire voir combien peu sont à craindre les résultats fâcheux dont on nous menace, en se basant sur des calculs qui ne peuvent être fondés.

L'ancienne caisse de retraite du département des finances ne faisait payer dans le principe aux participants qu'une retenue de 2 p. c. ; plus tard la retenue fut élevée à 2 1/2 p. c. Pendant toute la durée du royaume des Pays- Bas, elle n'est pas allée au-delà. Cette caisse a fini par présenter un déficit considérable. Pourquoi ? D'abord elle devait faire face non seulement aux pensions des veuves et des orphelins, mais encore aux pensions des employés qui sont, d'après notre nouveau régime, mises à la charge du trésor. Ensuite, d'après les règlements, l'ancienne caisse de retraite des finances accordait des pensions à raison de services rendus antérieurement à sa création et dans d'autres administrations, services pour lesquels pas un centime ne lui avait été versé. J'ai été chargé avec mon honorable collègue, M. de Brouckere, de la révision de cette ancienne caisse. Nous avons cherché quelles avaient été les causes du déficit, et nous avons trouvé que c'étaient celles que je viens de signaler. Ici rien de semblable, la caisse de la magistrature ne paye pas un centime pour les pensions des magistrats ; elle ne paye rien, absolument rien pour services antérieurs à sa création ou étrangers à l'ordre judiciaire, et néanmoins la caisse nouvelle fait, à son profit, des retenues ordinaires de 2 1/2 et de 3 p. c. et, de plus, un assez grand nombre de retenues extraordinaires.

J'ai voulu me rendre compte de ce que serait devenue l'ancienne caisse de retraite, si elle n'avait eu à pensionner que des veuves et des orphelins, sans avoir égard aux services étrangers aux finances et je suis arrivé à ce résultat que si la caisse n'avait payé ni les pensions des employés, ni des pensions à raison de services étrangers à l'administration des finances, non seulement elle n'aurait pas eu de déficit, mais elle aurait présenté une balance très favorable.

Je suis donc persuadé qu'on pourrait sans danger diminuer quelque chose de la retenue et, dans tous les cas, qu'on peut sans danger augmenter dès aujourd'hui la pension des veuves, dans la proportion indiquée par le ministre.

- L'article premier est mis aux voix et adopté.

Articles 2 et 3

« Art. 2. Secours à des magistrats ou à des veuves et enfants mineurs de magistrats, qui, sans avoir droit à une pension, ont des titres à un secours, par suite d'une position malheureuse : fr. 12,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Secours à des employés ou veuves et enfants mineurs d'employés dépendant du ministère de la justice, se trouvant dans le même cas, que ci-dessus : fr. 3,000. »

- Adopté.

Chapitre VIII. Cultes

Discussion générale

M. Lys. - Messieurs, l'allocation demandée pour les cultes ne serait pas susceptible de contestations très grandes si M. le ministre avait produit à l'appui de ses demandes toutes les pièces que la loi exige. Il n'en a rien fait. Dès lors les abus se sont glissés dans cette branche importante du service public. Au gouvernement appartient le droit de surveiller pour ainsi dire comme tuteur tous les établissements religieux. J'ai déjà appelé votre attention sur ce point. Je désire y revenir parce qu'il y a de nombreux abus et que le gouvernement n'a rien fait pour les corriger.

D'abord, nous voyons figurer cette année, dans le détail du budget du clergé, de nouveaux traitements. Nous voyons figurer des prêtres auxiliaires au traitement de 210 fr. Je ferai d'abord observer que nous ne connaissions jusqu'à présent que des curés et des desservants pour le service paroissial ; nous voyons ensuite des vicaires, des coadjuteurs, des chapelains qui servaient de prêtres auxiliaires aux curés desservants ; mais cette année, nous voyons surgir une troisième classe qu'on appelle simplement prêtre assistant. C'est là, on en conviendra, une innovation.

Ce n'est pas par un budget qu'une innovation semblable s'introduit. Pour cela, on devait, comme on l'exige d'ordinaire, présenter une loi spéciale. Nous avons la loi du 18 germinal an X pour les traitements des curés, les décrets impériaux pour les traitements des desservants, des vicaires et des chapelains. C'est dans cet état des choses que la Constitution, dans son article 117, a repris les traitements du clergé. L'innovation dont il s'agit n'est pas grand-chose, dira-t-on ; mais elle peut s'étendre, et je considère cela comme une chose qui peut devenir très dangereuse.

On nous demande, dans le tableau relatif au Hainaut, 650 fr. d'indemnité pour des prêtres français, sans nous donner la moindre explication ni sur ce point, ni sur le précédent. Je demanderai d'abord quels sont les services que ces prêtres français ont rendus, et à la réquisition de qui ils sont venus dans le pays, quel clergé paroissial ces prêtres français sont venus assister. Je demanderai enfin si c'est avec l'autorisation préalable du gouvernement que ces prêtres français sont arrivés chez nous.

Voilà des choses qui auraient dû être expliquées à la section centrale ; nous n'en voyons rien dans le rapport.

Aujourd'hui, vous assistez des prêtres français. Qui me dit qu'on n'assistera pas plus tard des prêtres espagnols, italiens, polonais ? Ce sont là des nécessités religieuses qui restent pour moi fort problématiques.

Je crois que cela ne doit pas se trouver au budget concernant le culte catholique.

L'Etat est devenu étranger au régime intérieur de l'Eglise ; la nomination des ministres du culte a lieu sans l'intervention de l'Etat. Cette position nous fait un devoir d'insister près du gouvernement, pour qu'il maintienne intactes les prérogatives qui lui appartiennent comme tuteur de tous les établissements religieux, même de ceux qui ne jouissent pas actuellement de subsides de l'Etat, mais qui peuvent un jour en avoir besoin.

Ainsi, messieurs, pour citer un exemple : le gouvernement devrait exiger la production des budgets diocésains. L'Etat est appelé à subvenir éventuellement aux besoins de la métropole et des cathédrales. L'Etat a donc incontestablement le droit de surveiller la gestion des biens de ces établissements ; il a le droit d'empêcher que les fonds de ces établissements ne soient dilapidés et détournés de leur destination.

Le gouvernement a un devoir d'autant plus impérieux à remplir à cet égard, et un droit d'autant plus incontestable d'exercer une surveillance active et sévère, que les biens qui forment la dotation de ces grands établissements, sont dus à la générosité du pays, et que, dans un sens élevé, ces biens ayant reçu, des lois, une affectation d'utilité publique, font sous ce rapport partie des biens du domaine national.

Les séminaires coûtent des sommes considérables à l'Etat, tant pour le personnel des professeurs, que pour le payement des bourses et des demi-bourses. L'Etat a donc un intérêt actuel à surveiller la gestion du temporel de ces établissements. L'article 62 du décret du 6 novembre 1813, organique de l'administration des séminaires, cet article dispose : que le trésorier est nommé par le gouvernement.

Le gouvernement n'a pas encore usé de la disposition de l'article 62 du décret de 1815. Cependant, c'est un devoir pour lui de le faire : cet article 62 n'a rien de contraire à la Constitution ; car il ne s'agit ici que des biens temporels du séminaire ; il ne s'agit pas des croyances ou des choses de la foi. Le gouvernement n'a pas le droit de se soustraire à l'exécution de la loi. Investi du pouvoir exécutif, il doit au contraire assurer l'exécution des lois dans toutes leurs dispositions. Or, le décret du 6 novembre 1815 a été inséré au Bulletin des lois, il n'a pas été attaqué comme inconstitutionnel dans les dix jours, le décret de 1815 a donc réellement force de loi.

L'article 78 exige que les bordereaux de versement, par les économes des séminaires et les mandais des sommes payées, seront transmis au gouvernement, au commencement de chaque semestre ; l'article 79 dispose que l'économe et le trésorier rendront leurs comptes dans le mois de janvier de chaque année, et l'article 80 exige que les comptes soient soumis à l'approbation du gouvernement.

Ces prescriptions sont-elles observées ? Si elles ne sont pas observées, et elles ne le sont pas, pourquoi néglige-t-on de faire accomplir leurs prescriptions salutaires tant dans l'intérêt de l'Etat que des établissements eux-mêmes ?

Viendra-t-on nous dire peut-être, que l'approbation des comptes n'a plus lieu, parce que le gouvernement ne peut juger de la nécessité des dépenses relatives aux besoins des séminaires et à l'exercice du culte dans ces établissements ?

Cette objection n'est pas sérieuse, car si elle était vraie, le pouvoir civil qui est appelé à subsidier les établissements religieux, et à pourvoir à leurs besoins, quand leurs revenus sont insuffisants, serait livré taillable à merci au gré du clergé supérieur. Or, c'est ce qui ne peut pas être.

Surveiller l'emploi des deniers accordés par l'Etat, examiner si les revenus de l'établissement ne reçoivent pas une destination autre que celle qu'ils doivent avoir ; empêcher des dépenses de luxe, et des dilapidations ; n'admettre au budget que des dépenses utiles ou nécessaires, ce n'est certes pas là toucher aux dogmes, aux croyances, ce n'est pas entrer dans la nomination des ministres du culte ; il y a une différence énorme entre l'obligation de ne pas concourir à la nomination d'un fonctionnaire et le droit de surveiller et de diriger la gestion de ce fonctionnaire.

L'Etat reste étranger à tout ce qui est spirituel, à tout ce qui est affaire de conscience ; mais l'Etat n'est pas et ne peut pas être étranger, quand, au lieu d'intérêts spirituels, il s'agit, au contraire, d'intérêts purement matériels, quand en un mot, il s'agit de biens temporels, destinés à faire face à cette branche de service public.

Il n'y a donc aucun motif pour ne pas se conformer strictement à la loi. Quelle que soit la position que l'on occupe, quelque élevé que l'on s'imagine être placé, il faut toujours que l'on se courbe devant la loi à moins d'encourir un grave reproche, et une responsabilité encore plus grave.

(page 522) Je disais l’année dernière :

« Les comptes des séminaires ne sont pas soumis à l'approbation du ministre. Quel est le motif pour lequel la loi n'est pas obéie, dans les dispositions qui forment la garantie de l'Etat contre des dilapidations possibles ?

« Dans un Etat bien administré, le gouvernement doit avoir le contrôle de tout établissement public et de sa gestion ; cette règle doit être observée d'autant plus rigoureusement, qu'il s'agit d'établissements subsidiés par l'Etat et dotés par lui. Que l'on y prenne garde, un défaut d'active surveillance peut amener la ruine de ces établissements, et donner lieu à des demandes de subsides onéreux pour le trésor public ; nous devons donc insister, pour que toutes les dispositions sur la matière soient ponctuellement observées.

« M. le ministre reconnaît qu'il doit exiger, des congrégations autorisées en Belgique, la remise de leurs comptes, et en même temps il fait l'aveu que quelques-unes de ces congrégations ne lui ont pas encore transmis ces comptes.

« C'est là une négligence grave ; tout un exercice s'écoule, à la suite des précédents, et M. le ministre ne justifie d'aucune diligence, il se contente de nous nourrir de l'espoir que tous les comptes finiront par lui être adressés.

« Quant aux grands séminaires, il a répondu, dit-il, l'année dernière, et il persiste à penser que le gouvernement ne peut pas exécuter d'une manière littérale l'article 80 du décret du 6 novembre 1813. Veuillez remarquer qu'aux termes de cet article, il ne s'agit pas seulement d'envoyer le compte au ministre, mais de le soumettre à son examen et à son approbation. L'on ne peut pas prétendre que dans l'état actuel de nos lois, en présence de la liberté illimitée dont jouit le clergé, de la liberté des cultes proclamée par la Constitution, le gouvernement aurait le droit d'examiner les comptes des grands séminaires, de voir si les dépenses sont utiles ou inutiles, si tel professeur est trop ou trop peu payé, de faire des observations à cet égard et de pouvoir même empêcher l'évêque d'approuver les comptes.

« M. le ministre reconnaît, vous le voyez, qu'il n'a pas le droit d'approuver les comptes ou de les improuver et, partant de là, il néglige même de les demander.

« Et c'est dans cet état de choses, que M. le ministre se plaint qu'on lui fasse un grief de sa soumission aveugle au haut clergé ! Il le traite de reproche banal, qu'il ne suffit pas d'articuler, mais qu'il faut établir par des faits !

« Mais les faits sont patents, ils résident ici dans l'inexécution des lois. On vous l'a dit plus d'une fois, M. le ministre, les séminaires diocésains ne jouissent exceptionnellement de la personnification civile, qu'à la condition de présenter annuellement leurs comptes au gouvernement, el, chose extraordinaire, le gouvernement répudie cette prérogative écrite dans la loi, et qui lui est indispensable pour parer aux abus incessants que la personnification entraîne. Je cite textuellement les paroles de mon honorable ami, M. Verhaegen.

« Que porte l'article 16 de la Constitution ?

« L'Etat n'intervient ni dans la nomination ni dans l'installation des ministres d'un culte quelconque.

« Un trésorier d'une commission administrative d'un établissement public religieux exerce-t-il un ministère du culte ?

« S'il est un ministre du culte, un trésorier de fabrique est à ce compte aussi un ministre du culte. Cependant tous les jours l'autorité civile nomme les membres des fabriques paroissiales ; tous les jours le ministre, le gouvernement, statuent sur la composition de ces corps. Un trésorier de séminaire pas plus qu'un trésorier de fabrique n'est un ministre du culte. Un trésorier, comme trésorier, n'est pas chargé de l'administration des sacrements, il n'est donc pas ministre du culte. Pourquoi le ministre ne pourrait-il pas nommer le trésorier du séminaire ? (Nomination qui lui appartient ensuite de l'article 62 du décret du 6 novembre 1813.) Il s'agit d'un administrateur, et apparemment la liberté des cultes, la séparation de l'Eglise spirituelle d'avec l'Etat, ne va pas jusqu'à détruire l'organisation des établissements publics. Un établissement public ne vit et ne se meut que d'après les lois civiles. Ces lois n'ont rien de contraire à la Constitution, donc elles doivent être respectées. Un ministre du culte appelé trésorier est une invention canonique de M. le ministre des cultes. On connaît dans la hiérarchie catholique des évêques, des vicaires généraux, des chanoines, des curés, des desservants, des vicaires, mais on ne connaît pas encore des trésoriers ; le mandat de ces fonctionnaires sent tellement la matière, que je ne comprends pas qu'on puisse le confondre avec la mission spirituelle des prêtres.

« Quant à l'article 80 de ce décret, pourquoi ne pourrait-il pas s'exécuter à cause de la liberté des cultes ? L'Etat fixe le traitement des évêques, des vicaires généraux, des curés, des desservants et des vicaires, pourquoi ne pourrait-il pas fixer le traitement des professeurs des séminaires ? Celui qui donne est sans doute le maître de fixer l'emploi et la destination de la donation. Qui oserait contester à l'Etat le droit et le pouvoir d'affecter telle somme déterminée pour tel objet, pour tel usage religieux ? Pour fixer le chiffre global de 8,000 fr., n'a-t-il pas fallu et ne faut-il pas encore, discuter et reconnaître l'étendue des besoins de l'établissement ? L'argumentation est un véritable non-sens, une absurdité.

« Mais, dit M. le ministre de la justice, je ne pourrais critiquer telle ou telle dépense. Et pourquoi, s'il vous plaît ? La liberté des cultes, la liberté de nomination et d'installation des ministres des cultes, entraîne-t-elle pour conséquence la liberté de dépenser à volonté les deniers et les revenus d'un établissement public ? La liberté des cultes et l'indépendance de l'Eglise n'a pas pour conséquence d'abandonner à l'Eglise l'administration arbitraire des biens d'établissements qui vivent de par la volonté de la loi civile, qui a tracé les règles de leur administration. Soutenir, sous ce prétexte, l'abrogation du décret du 6 novembre 1813, c'est confondre des choses et des principes tout à fait distincts. Ce n'est pas faire du dogme, ce n'est pas faire des nominations, que de dire : Telle dépense est trop forte ; que de dire : On n'aurait dû dépenser qu'une telle somme pour tel objet.

« Est-ce que par hasard M. le ministre de la justice soutiendra que l'article 93 du décret du 30 décembre 1809 est abrogé ?

« Cet article est évidemment abrogé, si l'article 80 du décret de 1813 ne doit plus être observé. »

Le gouvernement doit exécuter et faire exécuter rigoureusement la loi. Les observations que nous venons de présenter s'appliquent également aux congrégations d'hospitaliers, qui, aux termes de l'article 15 du décret du 18 février 1809, doivent rendre leurs comptes tous les ans au ministre des cultes. M. le ministre avait reconnu l’année dernière la justesse de mes observations, il avait promis de faire fournir ces comptes, il n'en parle plus ; je crains bien que jusqu'à présent cet engagement n'ait reçu aucune exécution.

Quand on veut que la loi soit respectée, il faut, messieurs, que l'exemple de l'obéissance à la loi parte des régions du pouvoir. A quel titre le gouvernement pourrait-il se plaindre des résistances et des entraves qu'il éprouve, si, à ses yeux, l'habit religieux est au-dessus de la loi ?

Enfin, messieurs, le budget ne constate pas de changement, en ce qui qui concerne les revenus des biens de cures. Il est, à mes yeux, incontestable que les revenus de ces sortes de biens doivent être beaucoup plus considérables. Pourquoi le gouvernement ne fait-il pas constater la consistance réelle de ces biens ? Pourquoi ne pas prendre toutes les mesures nécessaires, pour arriver à alléger le budget de l'Etat et à empêcher que des cures ne soient très grassement rétribuées, par le cumul de traitement et de revenus de biens curiaux, tandis que d'autres curés sont réduits à la seule jouissance de leur traitement ?

Veuillez remarquer, messieurs, que tous les biens des cures de la Belgique entière n'atteignent pas la somme de 6 mille francs.

Vous vous rappellerez, messieurs, que dans une séance précédente, M. le ministre est venu nous dire : Le séminaire de Liège a un revenu de 141,138 fr. 14 c ; il a des charges pour 93,075 fr. 83 c ; dans le revenu sont compris 11,000 fr. pour l'arriéré ; donc le boni réel est de 37,062 fr. 26 c.

Vous avez dû croire, comme mon honorable collègue et ami M. Delfosse, que le ministre était porteur des comptes du séminaire de Liège et de là, la demande faite par mon honorable ami, d'avoir communication de ces comptes. Vous avez dû le croire avec d'autant plus de raison que cette déclaration avait lieu, pour amoindrir les avancés de mon honorable ami M. Verhaegen, sur les revenus du séminaire et de la cathédrale de Liège.

Vous vous rappellerez la réponse de l'honorable baron d'Anethan, qu'il n'avait pas ces comptes, qu'il trouvait ce résultat dans sa correspondance avec l'évêque, correspondance qu'il ne trouvait pas convenable de vous communiquer.

Mettez cette déclaration en regard de ce que ce ministre avait dit précédemment, et convenez que ce n'est pas là la conduite d'un homme grave et réfléchi ; ce n'est pas là une réponse à faire par un ministre de la justice à un membre d'une chambre législative, dans une séance où on discute un budget de 4,400,000 francs !

Comment, M. le ministre, vous avez dit :

« L'honorable M. Verhaegen reconnaîtra sans doute avec moi que l'honorable M. Rogier, contre-signataire de l'arrêté royal d'allocation des 8,000 fr., s'était assuré qu'à cette époque les séminaires avaient besoin de cette somme. J'aime à croire qu'à cette époque l'honorable M. Rogier s'est fait produire les comptes ; quant à moi je puis déclarer que je n'allouerais jamais une somme annuelle de 8,000 fr. à un établissement quelconque, sans qu'il eût préalablement justifié de l'insuffisance de ses ressources. »

Et vous n'avez aujourd'hui par-devers vous qu'une correspondance avec l'évêque de Liège que vous n'osez pas produire ! Je trouve là, messieurs, la légèreté la plus inconcevable dans la conduite d'un ministre de la justice envers la chambre. Ce ministre vient vous dire : C'est M. Rogier qui a donné les 8,000 fr., en 1834. Il se sera, sans doute, assuré des besoins du séminaire par la production des comptes.

Quant à moi, dit-il, je puis déclarer que je n'allouerais jamais une somme annuelle de 8,000 fr. à un établissement quelconque, sans qu'il eût préalablement justifié de l'insuffisance de ses ressources.

Cette insuffisance ne peut résulter que des comptes, et vous venez nous demander pour 1847 la même dépense qu'en 1846 ; et comment vous a-t-on justifié l'insuffisance ? Mgr l'évêque vous l'a écrit, et vous vous refusez à communiquer la correspondance !

La chambre devra donc voter, contrairement aux lois, sans aucune justification quelconque ?

Le ministre s'en rapporte à l'évêque et ne veut pas fournir la correspondance à la chambre.

Ce n'est pas le gouvernement qui vérifie les comptes des séminaires, c'est l'évêque.

L'évêque communique confidentiellement le résultat au ministre ; celui-ci est satisfait de cette communication, et vient vous demander les fonds que l'évêque trouve nécessaires.

(page 523) Il vous reste, messieurs, à voter les fonds demandés, et pour cela on vous refuse même la communication de cette correspondance.

Et après cela pourrait-on se récrier encore contre la déclaration que faisait mon honorable ami M. Verhaegen, que le ministre de la justice était le très humble serviteur des évêques ? Moi je dirai que nous imiterions sa conduite, si nous adoptions un budget dans lequel des demandes de subsides ne sont nullement justifiées.

Que M. d'Anethan, comme particulier, ait la plus grande confiance dans les évêques ; rien ne s'y oppose, et personne n'a le droit de lui en faire un reproche ; mais que M. d'Anethan, comme ministre, propose des subsides pour un séminaire sur une simple déclaration d'un évêque, le ministre viole la loi ; et vous, représentants, si vous les accordez sans exiger la production des pièces que la loi exige, vous la violez à votre tour.

Si l'Etat s'était fait fournir annuellement le budget de l’établissement, s'il avait soigné que toutes les dépenses fussent nécessaires, vous n'auriez pas vu de déficit dans le budget des finances de Liége. Mais si l'Etat ne surveille point la dépense de cet établissement, si l'Etat ne se fait fournir les comptes qu'accidentellement et par intervalles, alors vous pouvez être certains que le déficit ne sera jamais comblé. Deux ou trois années avant de constater au gouvernement les besoins du séminaire ou de la cathédrale, l'établissement fera une forte dépense, soit de luxe, soit d'utilité, si vous voulez, mais nullement nécessaire ; trois années après il viendra solliciter le subside de l'Etat, et il le fournira.

Voilà où vous mènent directement la marche admise et le système suivi par M. le ministre de la justice.

On pourrait, messieurs, multiplier les critiques, mais nous croyons qu'il est inutile d'aller plus loin. Nous pourrions ici vous entretenir de l'importante question que soulève la position des desservants, et nous pensons qu'il est facile de démontrer que la disposition de l'article 6 de la Constitution ne fait pas obstacle à ce que le gouvernement examine si la révocation d'un desservant est ou n'est pas valable.

En effet, messieurs, est-ce intervenir dans les actes relatifs à la nomination des fonctionnaires ecclésiastiques, que d'examiner si la nomination émane d'une personne possédant le pouvoir de faire de semblables nominations ? Est-ce intervenir dans les actes relatifs à l'installation des ministres du culte, que de rechercher si la révocation était dans les pouvoirs de celui qui a prononcé la révocation ? Les tribunaux appelés à recevoir le serment des notaires, des juges et d'autres fonctionnaires, ne doivent-ils pas, avant de recevoir le serment voir si la nomination émane du chef de l'Etat ? Recevront-ils au serment un notaire nommé par une décision ministérielle ? Il en est de même en matière des cultes. Le gouvernement doit voir si la nomination ou la révocation qu'on lui présente, émane d'un fonctionnaire ecclésiastique compétent pour ces actes.

Or, il est à mes yeux évident que, depuis que le culte catholique a recouvré toute son indépendance, les règles de discipline ecclésiastique, organiques de ce culte, ont repris tout leur empire, et que ce sont ces règles et non la loi du 18 germinal an X, qui doivent être consultées pour savoir si l'évêque concentre en sa personne le pouvoir absolu sur son clergé et si l'évêque est, en résumé, un absorbant de toute la hiérarchie du clergé catholique.

M. le ministre doit bien se persuader que ce n'est pas dans la loi de 1801 que je trouve l'inamovibilité des desservants des succursales ; mais je la trouve dans les droits qu'exerce aujourd'hui l'Eglise belge et dans l'exécution donnée à cette loi, par l'autorité ecclésiastique elle-même. Et, en effet, que se passe-t-il en Belgique ?

Les curés reçoivent une nomination, et en outre, l'institution canonique, dit M. le ministre.

Eh bien, je dis à mon tour que les desservants reçoivent aussi une nomination, et qu'ils sont ensuite institués canoniquement.

Peu m'importe que je ne trouve pas cette institution canonique dans la loi de 1801, si elle existe ; car la loi de 1801 n'existe plus pour la Belgique que selon le bon plaisir des évêques.

M. le ministre a cru trancher la question d'une manière à ne laisser lieu à aucune contradiction, et il a fait précisément le contraire. La loi organique, dit-il, ne parle d'institution canonique que pour les curés.

L'article 19 dit : « Les évêques nommeront et institueront les curés, » et ne parle nullement d'institution pour les desservants.

Convenons d'abord d'un fait qui est bien établi, et c'est celui-ci : Aux yeux de la cour de Rome, les lois organiques n'ont jamais eu aucune valeur. L'honorable M. Lebeau l'a démontré l'année dernière.

Les desservants sont d'abord porteurs d'un acte de nomination dans lequel on lit qu'elle est faite jusqu'à révocation ; mais cet acte dit que le doyen du canton peut mettre en possession de sa succursale le desservant.

Et comme une succursale est un bénéfice qui a charge d'âmes, le doyen chargé de donner l'institution canonique par l'évêque, muni des pouvoirs du chef du diocèse, dresse un nouvel acte par lequel il met le desservant non en une possession à titre précaire, mais en possession pour toute sa vie, de la succursale.

Voilà l'acte qui, conformément aux lois canoniques, fait que la première nomination de l'évêque, qui était révocable, perd cette qualité, et devient définitive et irrévocable, parce qu'ainsi le veulent les lois canoniques, parce qu'il y a bénéfice et charge d'âmes, et que là où ces choses existent, la nomination ne peut être momentanée.

On nous reporte toujours vers la France, pour examiner quelle exécution l'on doit donner aux lois organiques. Mais on perd de vue l'immense différence qui existe aujourd'hui entre les droits du clergé belge et du clergé français.

On perd de vue que c'était le gouvernement français qui ne voulait pas de desservants à vie, parce qu'il craignait cette masse de fonctionnaires, qu'il ne pourrait déplacer.

Et si je suis bien informé, en France, les évêques n'accordent plus l'institution canonique aux desservants, qu'on continue à accorder en Belgique.

Quelle que soit l'opinion que l'on adopte sur cette question, il est déplorable de voir de pareils débats dans le sein d'une Eglise de paix et de charité.

M. Delfosse. - Je dépose les amendements suivants au chapitre en discussion :

« Art. 1er. Ajouter dans la colonne d'observations : « La partie de cette allocation destinée aux séminaires ne sera payée que dans le cas d'insuffisance de leurs ressources dûment constatée. »

Art. 2. Ajouter dans la même colonne : « Il ne sera plus créé de place dotée avant que les chambres aient alloué des fonds. »

Art. 3. Rédiger le libellé dans les termes suivants : « Subsides aux provinces, aux communes et aux fabriques d'églises, pour les édifices servant aux cultes. »

M. le président. - Ces amendements seront imprimés et distribués ce soir.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - Dans la discussion générale, les honorables MM. Verhaegen et de Bonne ont parlé de la collation des bourses d'études. Différentes critiques ont été faites à ce sujet par l'honorable M. Verhaegen. Je ne sais (je n'ai du reste pas le droit de le lui demander) s'il n'en a pas d'autres à faire. Dans tous les cas, je désire répondre aux critiques déjà faites, soit au chapitre Cultes, soit au chapitre Etablissements de bienfaisance.

M. Verhaegen. - A l'un ou à l'autre.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan). - C'est entendu.

- La séance est levée à 4 heures 3/4.