(Moniteur belge n°54, du 23 février 1833)
(Présidence de M. Raikem.)
M. Jacques fait l’appel nominal à une heure.
M. de Renesse donne lecture du procès-verbal ; la rédaction en est adoptée.
Les pièces adressées à la chambre sont renvoyées à la commission des pétitions.
Un message annonce que le sénat a adopté dans sa dernière séance le projet de loi relatif aux bons du trésor.
MM. Desmaisières et Osy écrivent pour demander un congé ; le congé leur est accordé.
M. d’Hoffschmidt, rapporteur de la commission de comptabilité de la chambre, est appelé à la tribune. (Le rapport de l’honorable membre ne nous est pas parvenu.)
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) prend la parole. - Messieurs, dit-il, d’après les articles 630 et 631 du code d’instruction criminelle, la réhabilitation des condamnés à une peine afflictive ou infamante doit être prononcée par le chef de l’Etat dans un conseil privé, formés aux termes de l’article 86 de l’acte des constitution de l’empire du 16 thermidor an X.
Ce conseil devait se composer du grand-juge, deux ministres, deux sénateurs, deux conseillers d’Etat, et deux juges de la cour de cassation.
Nos institutions ne permettant point la composition d’un semblable conseil, il ne peut plus être donné suite à des demandes en réhabilitation.
Il devient donc nécessaire de modifier les dispositions des articles 630 et 631 du code d’instruction criminelle.
C’est dans ce but que j’ai l’honneur de vous présenter un projet de loi.
Cette loi supprime, ainsi qu’on l’a déjà fait en France, l’intervention du conseil dont parle l’article 630, conseil de pure solennité sans utilité réelle, les dispositions des articles 619 à 629 garantissent suffisamment que la réhabilitation ne sera accordée qu’à ceux qui en seront dignes.
La modification de l’article 631 se justifie par elle-même ; elle est la conséquence nécessaire du changement apporté à l’article 630.
« Léopold, Roi des Belges,
« A tous présents et à venir, salut.
« Notre ministre de la justice est chargé de présenter aux chambres, en notre nom, le projet de loi dont la teneur suit :
« Article unique. Les dispositions des articles 630 et 631 du code d’instruction criminelle sont abrogées et remplacées comme suit :
« Art. 630. Il en sera fait rapport au Roi par le ministre de la justice.
« Art. 631. Si le Roi accorde la réhabilitation, il en sera dressé un arrêté dans la forme ordinaire et qui tiendra lieu de lettres de réhabilitation. L’avis de la cour sera inséré dans cet arrêté.
« Donné à Bruxelles, le 20 février 1833.
« Léopold,
« Par le Roi : le ministre de la justice, Lebeau. »
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Messieurs, l’arrêté du 1er avril 1814 (Journal officiel, n°105) a changé le mode établi par le paragraphe 9 de l’article 69 du code de procédure civile, pour les assignations à signifier aux personnes établies à l’étranger. »
Cet arrêté prescrit, entre autres dispositions, que « l’huissier adressera le double de son exploit sous enveloppe par la poste ordinaire qu’il en chargera, à la résidence de celui que l’exploit concerne. »
L’état d’hostilité entre la Belgique et la Hollande rend impossible l’observation de cette formalité, lorsqu’il s’agit d’assigner par-devant les tribunaux belges une personne domiciliée en Hollande. Toute communication régulière entre les postes des deux pays est interrompue ; cette interruption est naturellement commandée de part et d’autre par l’intérêt de l’Etat. La poste ne peut admettre non plus en chargement des lettres ou paquets pour la Hollande, puisqu’en les admettant elle deviendrait responsable de la remise de ces lettres ou paquets à leur adresse, lorsqu’il lui est impossible d’assurer cette remise.
L’impossibilité d’exécuter l’arrêté précité a fait naître de nombreuses réclamations motivées sur les entraves qui en résultent dans la marche des procédures ; il convient donc de le rapporter et de rétablir la marche, d’ailleurs plus simple et plus facile, du paragraphe 9 de l’article 69 du code de procédure civile. Le ministre des affaires étrangères, lorsqu’il s’agira d’assignations à des personnes domiciliées en Hollande, trouvera sans doute un intermédiaire pour faire parvenir ces assignations à leur adresse ; mais, en tout cas, les procédures suivies devant les tribunaux belges ne seront plus exposées à des retards préjudiciables aux parties.
En conséquence, j’ai l’honneur de vous présenter un projet de loi dont la teneur suit :
« Léopold, Roi des Belges,
« A tous présents et à venir, salut.
« Notre ministre de la justice est chargé de présenter aux chambres, en notre nom, le projet de loi dont la teneur suit :
« Vu l’arrêté du 1er avril 1814 (Journal officiel, n°105) porté en altération de la disposition de l’article 69, paragraphe 9 du code de procédure civile ;
« Considérant que les circonstances qui ont motivé cet arrêté n’existent plus, et que d’ailleurs son exécution présente, dans certains cas, des difficultés qui entravent la marche des procédures ;
« Art. 1er. L’arrêté précité du 1er avril 1814 est rapporté.
« Art. 2. La disposition de l’article 69, § 9, du code de procédure civile, est remise en vigueur.
« Bruxelles, le 20 février 1833.
« Léopold,
« Par le Roi : le ministre de la justice, Lebeau. »
M. Jacques a la parole pour exposer les développements de la proposition qu’il a déposée sur le bureau et dont les sections ont autorisé la lecture. Il s’exprime ainsi. - Messieurs, la proposition que j’ai l’honneur de vous soumettre soulève de si hautes questions de politique intérieure, touche à tant d’existences plus ou moins honorables, et semble heurter des habitudes si fortement établies, que je craindrais de la voir condamner sans examen, si je ne comptais beaucoup plus sur votre bienveillance que sur mes faibles moyens, si je ne m’appuyais surtout sur l’intérêt que vous apportez à tout ce qui peut réduire les dépenses de l’Etat.
Depuis longtemps, messieurs, des doléances se font entendre ici et ailleurs sur la complication des rouages administratifs, sur la multiplicité des écritures, sur l’immense développement de la bureaucratie. A chaque budget, l’on réclame des réductions de traitements, des suppressions d’emplois, et l’on se débat longuement avec les ministres pour obtenir quelques milliers de francs d’économie. L’on jette ainsi tous les ans les fonctionnaires et employés de l’Etat dans de pénibles inquiétudes, et si l’on prend en considération le relâchement qui en résulte nécessairement dans l’administration, l’on peut admettre comme vrai que le pays y perd plus qu’il n’y gagne. En fixant mon attention sur les budgets de 1833, dont la discussion va probablement reproduire les mêmes mesquineries qu’en 1832 j’ai été frappé de la profusion qui règne dans quelques services administratifs, et de l’inefficacité des moyens employés jusqu’ici pour les réduire à des proportions convenables.
Vous l’avouerai-je, messieurs ? J’ai cru d’abord voir disparaître à jamais l’une des promesses de la révolution qui avaient rencontré le plus de sympathie, et peu s’en est fallu que le gouvernement à bon marché ne m’apparût comme une utopie à l’usage des ambitieux et des mécontents pour abuser les peuples.
Je n’ai pas tardé cependant à revenir à des idées plus saines, plus consolantes pour les amis de la révolution, et je ne parais à cette tribune que pour vous démontrer qu’avec un peu de fermeté il ne sera pas difficile de faire un grand pas vers l’économie, en remaniant nos cadres administratifs pour les reformer sur des bases plus simples et mieux appropriées aux vrais besoins de l’Etat belge.
Il serait trop long, messieurs, de vous retracer les diverses combinaisons qui ont fait successivement l’objet de mes recherches ; qu’il me suffise donc de vous exposer avec ordre et clarté, pour autant que j’en sois capable, le système qui m’a paru répondre le mieux aux vues que je viens d’énoncer.
Ce système, ainsi que l’auront remarqué ceux de mes honorables collègues qui ont pris la peine de lire ma proposition, ne repose que sur deux bases principales, aussi simples à formuler que fécondes en résultats. La première, c’est la division du territoire en autant de provinces que d’arrondissements judiciaires ; la seconde, c’est l’institution de quatre fonctionnaires supérieurs dans chaque arrondissement-province, pour y représenter le gouvernement, sous les ordres des ministres dans les diverses branches du pouvoir exécutif.
Je ne me dissimule pas toutes les répugnances que va soulever l’idée de fractionner nos province actuelles ; je pense même que si je ne veux pas voir périr ma proposition dans vos esprits par les questions préalables qui viendraient l’y étouffer, je dois m’attacher d’abord à détruire les objections qui m’ont le plus frappé moi-même. J’essayerai ensuite de vous faire apprécier les principaux avantages du système que je défends, et je terminerai par quelques explications sur les articles du projet.
La création de vingt-neuf provinces en Belgique ne viole-t-elle pas la constitution ? N’entrave-t-elle pas l’exécution des lois existantes ? N’apporte-t-elle pas trop de perturbations dans les services publics ? Telles sont les trois objections qui m’ont paru contenir des questions préalables, et que je vais aborder franchement, si vous voulez bien m’accorder quelque attention.
Il n’y a dans la constitution que 17 articles qui renferment des dispositions relatives aux provinces, et l’on pourrait se borner à les relire pour constater que ma proposition n’a rien de contraire à leur texte ni à leur esprit. (Articles 1, 2, 3, 31, 32, 48, 53, 56, 99, 107, 108, 110, 113, 129, 133, 137 et 139.)
Dans tous ces articles, messieurs, je n’aperçois que deux arguments tant soit peu plausibles contre la création de 29 provinces en Belgique : c’est d’abord le sens que comporte la dénomination même de province ; c’est ensuite la nomenclature des provinces actuelles insérée à l’article premier.
Il paraîtrait en effet peu convenable de donner le nom de province à une faible portion de territoire si l’on pouvait oublier que la grandeur des fractions dépend de la grandeur de l’unité, et que, dans un petit royaume, les petites provinces n’ont rien de dérisoire, tandis que les grandes seraient à peu près des contre-sens.
Mais la province, me dira-t-on, n’est-elle donc qu’une fraction de l’Etat ? N’a-t-elle pas des intérêts communs que la constitution reconnaît, et qui en forment une unité politique de second ordre ? Non, messieurs, depuis que la législature est seule investie du vote des impôts pour l’Etat, et des autres droits et franchises qui dans les derniers siècles donnaient à nos provinces le caractère d’individualités politiques formant un Etat fédératif ; depuis surtout que l’on a rendu à l’élection directe la nomination des membres de la législature, qui, avant la révolution, donnait encore aux états-provinciaux un caractère politique, la province n’est plus et ne peut plus être qu’une simple fraction du royaume, qu’une subdivision de territoire propre à faciliter l’organisation administrative.
Il est à remarquer en effet que dans l’ordre actuel des choses la communauté des intérêts provinciaux repose moins sur la réalité des faits, tels que la nature nous les présente, que sur les dispositions de nos lois qui font supporter certaines dépenses publiques par la fraction de territoire nommée province. Cette communauté d’intérêts n’est donc à vrai dire qu’une fiction légale ; et si l’on décompose les intérêts provinciaux d’après les détails des budgets que l’on établit pour les régler, l’on reconnaîtra que cette fiction se rapproche d’autant plus de la vérité que la province devient moins étendue. Que l’on examine, par exemple, abstraction faite des intérêts qui naissent exclusivement des faits posés par la loi, si l’arrondissement de Huy a plus d’intérêts communs avec celui de Liége, qu’avec celui de Namur ? Si l’arrondissement de Malines se lie plus naturellement à celui d’Anvers qu’à celui de Bruxelles ? Si l’arrondissement de Courtray, province de Flandre occidentale, se trouve mieux associé à celui de Bruges qu’à celui d’Audenarde, province de Flandre orientale, ou qu’à celui de Tournay, province de Hainaut ? Je vous le demande, messieurs, ne sont-ce pas là des questions qu’il suffit de poser pour les résoudre ?
Quant à la nomenclature de neuf provinces, qui se trouve à l’article premier de la constitution, l’état actuel de nos relations extérieures ne peut pas lui laisser grande importance si l’on fait attention que le congrès n’a décrété cette nomenclature que pour reproduire, d’une manière convenable, la disposition de l’ancienne loi fondamentale des Pays-Bas, relative au Luxembourg.
Du reste, messieurs, les deux arguments que je viens de rencontrer, pas plus que tout autre qui se présenterait encore, ne peuvent conserver la moindre force en présence de la disposition claire et précise qui termine l’article premier de la constitution, portant qu’il appartient à la loi de diviser le territoire en un plus grand nombre de provinces. Ce ne serait que par un étrange abus des inductions et des interprétations que l’on pourrait arriver à prétendre que la division du territoire belge, en 29 provinces, est inconstitutionnelle.
Voyons maintenant si cette division ne viendrait pas entraver l’exécution des lois existantes. Il serait bien difficile sans doute de rechercher dans l’immense collection des lois de France, de Néerlande et de Belgique qui régissent aujourd’hui notre patrie, toutes les dispositions qui étaient calquées sur les anciens départements et arrondissements ou sur les provinces et districts actuels, et qui exigeraient quelques modifications pour s’appliquer littéralement aux arrondissements devenus provinces.
Toutefois il existe des antécédents qui permettent de résoudre la question a posteriori et de lever toute incertitude sans avoir à se livrer à de trop longues recherches. Je veux parler de ce qui a eu lieu lors de l’introduction des règlements provinciaux et locaux en vertu de la loi fondamentale des Pays-Bas : chacun peut se rappeler qu’à cette époque les autorités d’arrondissements ont été supprimées, du moins quant aux villes, et que leurs attributions se sont portées, partie sur les autorités provinciales, partie sur les autorités locales, sans que l’on ait rencontré des difficultés de quelque importance.
Et certes il ne pourrait pas s’en élever davantage pour l’introduction du système que je défends ; car quoiqu’il apporte des réductions notables dans la dépense, dans la bureaucratie et dans l’étendue des provinces, ce système ne fait que supprimer les commissaires de district, les inspecteurs d’arrondissement, et autres agents intermédiaires entre la province et les localités ; mais il conserve ou établit dans chaque province nouvelles les diverses autorités qui existent aujourd’hui sous d’autres noms dans nos grandes provinces. Or, du moment que ces autorités subsistent, il leur sera d’autant plus facile de remplir les attributions que les lois leur confient, qu’elles n’auront plus à s’occuper d’une aussi grande portion de territoire, et qu’elles pourront en quelque sorte vérifier par elles-mêmes les faits sur lesquels elles doivent prononcer.
Il y a cependant quelques dispositions législatives qui sont basées sur l’étendue actuelle des provinces, et qui devraient subir des changements à l’introduction de mon système. Il faudrait d’abord rectifier le tableau annexé à la loi électorale pour la répartition des sénateurs et des représentants ; il faudrait en outre subdiviser les présentations successives attribuées aux conseils provinciaux pour les cours d’appel ; mais ce ne sont là que des rectifications si faciles qu’il est permis de ne pas en tenir compte. Il n’y aurait pas plus de difficultés pour les appels correctionnels, pour les cours d’assises, ni pour la liste des jurés ; il ne faudrait qu’un tout petit article transitoire pour maintenir sur le pied actuel cette importante partie de l’administration de la justice. J’ajoute le mot de transitoire, messieurs, parce qu’il m’a suffi d’un coup d’œil rapide sur les faits qui occupent habituellement nos cours d’assises pour entrevoir la possibilité, l’utilité même d’en correctionnaliser encore plusieurs catégories, et de ne plus établir ensuite des cours d’assises que dans les trois villes où siègent les cours d’appel. Mais ce n’est pas le moment de m’étendre davantage sur ce point, et je me hâte de passe à la troisième objection.
La création des 29 provinces exige nécessairement, dans mon projet, la réorganisation des agents du pouvoir exécutif. Mais si une telle mesure peut d’abord éveiller dans les esprits trop craintifs, trop stationnaires, les idées sinistres de bouleversement, de commotion sociale, de nouvelle révolution de places et d’emplois, il sera facile à tout homme sensé de se convaincre que rien de pareil n’est à craindre. En effet, cette réorganisation ne concerne plus le département de la justice ; elle touche bien peu le département de la guerre ; elle ne demande aucun changement dans le personnel inférieur des administrations fiscales, et l’on peut dire que tout ce qu’elle exige se réduit à faire dans les administrations civiles et financières de provinces et d’arrondissements ce qui s’est accompli l’année dernière dans l’ordre judiciaire. L’on n’a pas même à craindre le renouvellement de l’agitation qui s’est manifestée alors ; car, loin de stimuler de nouvelles exigences par la création de nouvelles places, comme dans l’organisation judiciaire, mon projet ne fait qu’en supprimer beaucoup d’anciennes ; et, comme il n’y aura pas de corps supérieurs à composer, ni d’emplois éminents à conférer, l’on ne verra pas organiser des charivaris par les ambitions désappointées.
L’article 7 du projet prévient d’ailleurs tout mécontentement de la part des personnes qui seraient atteintes par les suppressions et réductions ; et comme l’on est autorisé à juger des sentiments d’autrui par les siens propres, je suis porté à croire que le gouvernement n’aurait d’embarras pour les mises en disponibilité avec demi-traitement qu’à raison du trop grand nombre des demandes qui lui en seraient faites.
L’on pourrait craindre encore que la réorganisation n’entravât pour quelque temps la marche régulière des services publics ; il convient donc de jeter un coup d’œil rapide sur ce qu’elle exigera pour chaque ministère. Le département de l’intérieur n’aura qu’à choisir les 20 commissaires du Roi, qui doivent être ajoutés aux gouverneurs actuels, par les 9 greffiers des états, les 56 députés provinciaux, et les 45 commissaires de districts qui existent maintenant : il serait absurde de supposer que parmi ces 110 fonctionnaires, l’on eût quelque peine à en trouver 20 capables de bien remplir les fonctions de gouverneur dans une petite province, et d’organiser immédiatement l’action et le travail régulier des nouvelles administrations provinciales.
Le département de la justice n’aura pas même ces difficultés de personnel à vaincre ; il n’aura qu’à correspondre directement avec les procureurs du Roi, en dégageant les parquets des cours d’appel des détails de l’administration territoriale, ainsi que l’est déjà maintenant le parquet de la cour de cassation.
Le département de la guerre n’aura pas de peine non plus à trouver de bons commandants militaires pour les 20 nouvelles provinces, parmi les capitaines et officiers supérieurs de gendarmerie et parmi les officiers en disponibilité. Ces fonctions peuvent d’ailleurs se cumuler avec celles de commandant de place dans les villes telles qu’Audenaerde, Dinant, Huy, etc.
Ce n’est donc qu’au département des finances que la réorganisation pourrait présenter quelque difficulté ; il aura cependant sous la main 9 administrateurs du trésor, 50 directeurs, vérificateurs et inspecteurs des contributions directes, 29 directeurs et inspecteurs de l’enregistrement, et 11 inspecteurs du cadastre, et je ne puis croire que parmi ces 99 fonctionnaires, quelques spécialisés qu’ils soient, l’on n’en trouve pas facilement 29 qui puissent diriger convenablement tous les services financiers dans un arrondissement-province.
Les intendants des finances pourront d’ailleurs, pour organiser le travail de leurs bureaux, recourir à l’assistance momentanée des contrôleurs des contributions, des vérificateurs de l’enregistrement, des directeurs des postes et des contrôleurs du cadastre, qu’ils trouveront en abondance aux chefs-lieux des provinces, tant anciennes que nouvelles. Ce ne sera du reste qu’une dernière fusion dans un ministère qui en a déjà subi trois, sans grandes difficultés, depuis 1817, savoir : la réunion des accises et douanes aux contributions directes, et la réunion des domaines et forêts à l’enregistrement. Il y a même cette différence à remarquer que la fusion actuelle n’atteindra que les cadres supérieurs, et que les agents subalternes, les agents d’exécution, restant tous à leur poste, il ne pourra pas en résulter d’embarras sérieux dans la marche du service.
Je me repose sur votre intelligence, messieurs, pour suppléer à ce qu’il y a d’incomplet, de trop analytique dans mon travail. Je crois donc en avoir assez dit pour établir que ma proposition n’a rien d’inconstitutionnel, qu’elle n’apporte aucune entrave à l’exécution des lois et qu’elle ne dérange nullement la marche régulière des services publics.
Permettez-moi maintenant de vous exposer aussi brièvement que possible les principaux avantages qu’elle présente.
La création de 29 provinces, en Belgique, permettra d’admettre franchement dans nos institutions provinciales cet esprit de liberté et d’indépendance qu’exigent nos mœurs et notre constitution : le peu d’étendue des provinces retiendra naturellement les conseils dans la sphère des intérêts qui leur sont confiés, écartera de leur marche tout tendance trop politique, et suffira pour les préserver de l’esprit d’envahissement. Avec de grandes provinces, au contraire, il ne sera guère possible au Roi ni à la législature de maintenir constamment le pouvoir provincial dans des limites convenables ; je ne crains même pas de me tromper, en ajoutant que, si vous ne voulez pas voir périr la constitution et l’union nationale pour faire place au fédéralisme de l’ancien régime, il faudra nécessairement vous résigner, ou à comprimer le pouvoir provincial par la loi organique, dans des liens très étroits, sans égard à l’article 31 de la constitution, ou bien à faire ce que vous faites depuis deux ans, à différer indéfiniment la recomposition des conseils provinciaux.
Quand on fait attention que, parmi nos provinces actuelles, il y en a quatre qui comprennent chacune un cinquième ou un sixième de la population du royaume, il faudrait pousser l’imprévoyance jusqu’à l’aveuglement pour ne pas sentir qu’en y organisant des assemblées représentatives, l’on convie en quelque sorte les volontés provinciales à tout envahir, à dominer jusque dans la législature, et que l’on prépare ainsi le retour au fédéralisme et à la dissolution de l’Etat.
Que serait devenu, par exemple, le pouvoir royal dans la Flandre orientale, si MM. Niellon et Lambert avaient été (je ne dirai pas soutenus, car je suis loin de supposer à ces messieurs la moindre volonté de se mettre au-dessus du gouvernement), mais poussés, excités, entraînés même par un corps provincial nombreux et puissant, qui aurait prétendu ne résister qu’à des intrigues de cour et à des inepties ministérielles ?
Tout en écartant de pareils dangers, mon système présente à un haut degré les avantages d’une administration plus rapide, plus simple et moins coûteuse. Elle serait plus rapide par deux raisons : la première, c’est que les autorités provinciales seraient plus rapprochées des localités soumises à leur action, qu’elles les connaîtraient mieux, et qu’elles pourraient prendre presque instantanément les résolutions convenables.
La seconde, c’est que les ministères correspondraient directement avec les chefs-lieux des arrondissements actuels, et que l’on gagnerait tout le temps qui se perd maintenant par le passage et l’examen des écritures aux chefs-lieux des provinces. Ainsi l’on ne verrait plus les affaires les plus simples d’administration locale demander quinze jours pour aller prendre l’attaché de l’autorité provinciale, en passant et repassant au commissariat de district ; l’on ne verrait plus les actes du gouvernement n’arriver officiellement dans les lieux où ils doivent s’exécuter qu’avec plusieurs jours de retard sur les feuilles publiques ; et, pour citer un exemple, on ne les ferait plus voyager de Bruxelles à Arlon pour revenir à Marche en rétrogradant de seize lieues sur la même route.
L’administration deviendrait aussi beaucoup plus simple. D’abord l’érection de l’arrondissement en province réduirait les quatre degrés à trois, et supprimerait d’un seul trait cette masse énorme d’écritures que s’adressent mutuellement les autorités de province et celles d’arrondissement, et qui sont ensuite copiées ou amplifiées pour passer aux localités ou aux ministères.
De plus, les autorités provinciales étant moins éloignées des localités, et les quatre fonctionnaires provinciaux devant se réunir souvent, l’on verrait encore disparaître une grande masse d’écritures que les audiences, les instructions, les conférences verbales viendraient remplacer avec avantage.
Et que l’on ne craigne pas de perdre dans les ministères ce que l’on aura gagné dans les provinces et dans les arrondissements. Les affaires locales qui viennent occuper les ministères n’y donneront pas plus de travail en les traitant avec les chefs-lieux d’arrondissement qu’avec les chefs-lieux des provinces actuelles : l’examen en sera même plus simple, en ce qu’elles auront passé dans une administration intermédiaire de moins. Quant aux affaires générales, ce sont des instructions qui partent des ministères ou des rapports qui y parviennent : pour les instructions, toute la différence c’est qu’il en faudra 20 exemplaires de plus, ce qui pourrait exiger le travail de deux copistes par ministère ; pour les rapports, s’ils traitent des questions générales, l’on aura l’avantage d’avoir 29 opinions au lieu de 9 ; et s’ils contiennent des détails à centraliser, il ne sera pas beaucoup plus difficile d’en faire le dépouillement sur 29 pièces que sur 9.
Voyons maintenant l’économie qui résulterait de l’introduction de mon système. La diminution des rouages et des écritures laisse déjà pressentir la diminution de la dépense ; mais il importe d’en constater le montant par le calcul des détails.
Les fonctionnaires, agents et employés du système actuel qui seraient supprimés, changés, diminués ou augmentés, coûtent maintenant à l’Etat la somme de 2,199,255 fr. par an, savoir : (suit le tableau détaille, non repris dans la présente version numérisée).
D’après mon système, ces divers services ne coûteraient plus que 1,377,000 francs.
Voici les calculs qui m’ont fourni cette somme, en suivant la classification de l’article 3 du projet pour le rang des provinces : (suit le tableau détaille, non repris dans la présente version numérisée). Total, 1,377,500 fr.
L’économie à obtenir par le changement de système s’élèverait ainsi à plus de 800,000 francs par an, et si l’on ne voulait pas se renfermer dans ce qui concerne le trésor public, l’on devrait encore y ajouter une somme considérable pour tenir compte de ce que dépenseraient au moins les particuliers que leurs affaires appellent près des autorités provinciales.
Ce serait se faire illusion, cependant, que de croire que la simple adoption du projet réaliserait sur-le-champ l’économie de 800,000 fr. ; car il faut remarquer que les traitements de disponibilité et les suppléments stipulés par l’article 7 du projet l’absorberaient presque toute entière pendant les premières années. Du reste, il y aurait, dès l’introduction du système, une économie de quelque importance, et elle s’augmenterait assez rapidement jusqu’aux 800,00 francs, sans avoir violenté le moins du monde les intérêts particuliers, ce qui n’est pas non plus un avantage à négliger.
Il me reste maintenant quelques explications sur les articles.
L’article premier établit pour le pouvoir exécutif et pour le pouvoir provincial les mêmes circonscriptions et subdivisions de territoire que pour le pouvoir judiciaire. L’on sentira d’autant mieux l’avantage d’une telle disposition, qu’il n’est pas rare maintenant de voir les juridictions se croiser dans tous les sens : c’est ainsi, par exemple, que la commune de Vielsalm, dans le Luxembourg, appartient à l’arrondissement de Neufchâteau pour l’administration judiciaire, à celui de Bastogne pour l’administration civile, à celui de Diekirch pour les contributions directes, à celui de Marche pour la milice nationale, et à celui de St-Hubert pour l’inspection forestière. C’est ainsi, encore, que le village de Melreux appartient au canton d’Erezée pour la justice de paix, à celui de Barvaux pour la milice, et à celui de Marche pour la garde civique.
Cet article ne s’oppose pas du reste, ainsi qu’ont paru le croire quelques-uns de mes collègues, à ce que la loi modifie les arrondissements et les cantons judiciaires ; tout ce qu’il prescrit à cet égard, c’est que si des changements de cette nature ont lieu, ils s’appliqueraient aux ressorts des administrations publiques et provinciales. J’ajouterai même, en passant, que dans mon système il conviendrait de transférer le tribunal de St-Hubert à Philippeville, pour y rattacher les territoires des provinces de Hainaut et de Namur, qui s’avancent entre Maubeuge et Givet.
Les articles 2, 3 et 4 donnent au pouvoir exécutif dans les provinces l’unité et l’ensemble dont il a besoin pour maintenir les lois, l’ordre public et la vraie liberté ; et que l’on ne craigne pas de donner aussi trop de force au gouvernement ; avec l’inamovibilité de notre pouvoir judiciaire, et avec l’article 24 de notre constitution, qui permet de poursuivre les fonctionnaires publics sans autorisation, il n’y a plus d’abus gouvernemental qui puisse comprimer la liberté ni les droits de ceux qui ne manquent ni à la loi ni à l’honneur.
Les réunions prescrites par le dernier paragraphe de l’article 3 offrent encore l’avantage de détruire l’esprit trop exclusif des spécialités, et de prévenir les conflits et les jalousies qui n’excitent que trop souvent les fonctionnaires d’une administration à embarrasser la marche d’une autre. Les chefs provinciaux parviendront d’ailleurs à donner une meilleure direction aux services qui leur sont confiés, lorsqu’ils se seront entendus dans des entretiens fréquents sur les améliorations désirables et sur les moyens qui peuvent y conduire.
Vous dirai-je enfin que ces réunions seraient peut-être le meilleur moyen de se préparer pour l’avenir des ministres habiles, expérimentés et bons administrateurs ? Il est permis de croire du moins qu’après avoir administré quelque temps avec distinction les provinces d’Anvers, de Gand, de Liége et de Bruxelles, l’on arriverait au ministère avec beaucoup plus d’avantages que si l’on y entrait sans expérience de l’administration, même avec les antécédents parlementaires les plus brillants.
L’article 5 fixe le nombre des membres du conseil provincial de 15 à 25. Il a paru qu’un nombre plus faible ne laisserait pas une représentation convenable aux intérêts des diverses localités, tandis qu’un nombre plus considérable pourrait amener une tendance trop politique.
Les articles 6, 7 et 8 ne sont que transitoires. Le deuxième paragraphe de l’article 7 dégage l’introduction du nouveau système de tout froissement d’intérêts particuliers, et garantit aux fonctionnaires et employés le maintien de ce qu’à tort ou à raison l’on nomme leurs droits acquis.
J’attendrai maintenant, avec la conscience d’avoir rempli un devoir, le sort que vous réservez à ma proposition : le patriotisme l’a dictée ; que le patriotisme en dirige l’examen.
- La proposition de M. Jacques et appuyée.
M. le président. - J’ai à consulter la chambre pour savoir quand elle discutera la prise en considération de la proposition de M. Jacques.
M. Jullien. - Je ne veux pas nier quant à présent l’avantage de la proposition : il y aurait d’abord 29 provinces au lieu de 9 ; c’est une conquête facile à faire. Je n’examine pas non plus l’avantage qu’il peut y avoir à obtenir, par suite de ce système, 29 petits gouverneurs à la place de 9 qui existent aujourd’hui. Mais la proposition renverse de fond en comble la loi provinciale qui va bientôt être soumise à votre discussion, et il me semble que la place naturelle à donner à la discussion de la proposition est de la joindre à la discussion de la loi provinciale ; c’est là que vous déciderez si vous voulez avoir 29 provinces. L’honorable auteur de la proposition vous a dit qu’il ne suffisait pas d’augmenter le nombre des gouverneurs ; qu’il fallait, pour parvenir à son but, porter atteinte à la constitution : cette atteinte emporterait révision de la constitution, et par conséquent, dissolution de la chambre. Pour éviter les inconvénients d’une marche semblable, je propose le renvoi de la proposition à la section centrale, qui examine déjà un projet de loi sur l’organisation provinciale.
M. Jacques. - Si l’on devait entrer, dès aujourd’hui, dans la discussion de la prise en considération, j’aurais à répondre aux assertions de M. Jullien, que la proposition n’a rien de contraire à la constitution.
Je ne suis pas assez irréfléchi pour lancer dans cette enceinte quelque chose de contraire à la constitution ; je me suis même attaché, dans les développements que j’ai donnés, à relever les objections que l’on pourrait faire relativement à cet objet. Si l’assemblée, pour gagner du temps, ne veut pas entamer la discussion de la prise en considération, et veut se borner au renvoi de la proposition à la section centrale qui examine le projet de loi sur l’organisation provinciale, je ne puis m’opposer à ce dessein ; mais si on demande un ajournement indéfini, je demanderai que la discussion de la prise en considération ait lieu dans quinze jours.
M. Gendebien. - Je ne pense pas que la constitution s’oppose à ce que le territoire soit divisé en un plus grand nombre de provinces qu’il ne l’est aujourd’hui ; elle dit, au contraire, qu’il appartient à la loi de diviser, s’il y a lieu, le territoire en un plus grand nombre de provinces. Cette augmentation du nombre de nos provinces sera peut-être une compensation pour la perte des provinces que nous perdons par suite du traité du 15 novembre.
M. d’Elhoungne. - La proposition de M. Jacques n’a rien d’inconstitutionnel ; mais la manière dont elle est présentée mérite toute notre attention. Cette proposition se rattache à la loi dont la chambre est saisie ; sous ce rapport, j’appuie la proposition de M. Jullien qui renvoie le projet de M. Jacques à la section centrale chargée de l’examen d’un projet sur la même matière. Cependant, il s’agit non seulement de changer la circonscription territoriale sous le point de vue administratif, mais encore sous le point de vue judiciaire ; on ne crée pas seulement 29 provinces au lieu de 9, on veut encore créer 29 cours d’assises. Sur ce point, je ne partage pas l’opinion de l’auteur de la proposition ; cette multiplicité de cours d’assises serait, selon moi, extrêmement dangereuse. Je demanderai l’impression du développement que vous venez d’entendre, et le renvoi de la proposition à la section centrale qui examine la loi provinciale.
- Quelques voix. - On peut discuter aujourd’hui la prise en considération.
M. Jacques. - Je ferai remarquer à l’assemblée qu’il ne peut s’engager aujourd’hui de discussion sur la prise en considération de ma proposition, parce que, d’après la lecture rapide que j’ai faite, on n’a pas pu en saisir les bases ; la preuve, c’est que l’honorable M. d'Elhoungne vient de dire que je demandais la multiplicité des cours d’assises, tandis que je ne demande rien de semblable. Je ne demande pas de changement dans les circonscriptions judiciaires ; mais j’ai fait observer que si l’on voulait en faire, ils seraient faciles. Si la chambre veut entamer une discussion sur la prise en considération, fixez un jour à huitaine, à quinzaine, ou bien renvoyez le projet à la section centrale.
M. Gendebien. - Bien que les discussions relatives aux prises en considération soient des superfétations, et que je sois très disposé à prendre en considération toute proposition qui n’est pas contraire à la constitution, je crois cependant qu’il serait convenable de renvoyer toute discussion sur la prise en considération après l’impression du développement que vous venez d’entendre. La discussion sur la prise en considération ne sera pas sans utilité ; elle révélera la pensée de la chambre sur l’organisation provinciale, en montrant comment la proposition de l’honorable M. Jacques a été accueillie. La section centrale pourra alors hâter son travail sur une loi qu’on nous a déjà fait attendre depuis trop longtemps.
M. de Robiano de Borsbeek - Il me semble que l’impression du développement dans le Moniteur suffirait et éviterait des frais.
M. Gendebien. - On ne m’a pas bien compris, ou je me suis mal exprimé. J’ai dit que la discussion de la prise en considération donnerait un aperçu de l’esprit de la chambre, ce qui faciliterait le travail de la section centrale. Cette discussion éviterait à la section centrale de faire un rapport diamétralement opposé au vœu de la majorité de la chambre, et l’inconvénient de nommer une seconde, peut-être une troisième commission.
M. de Robiano de Borsbeek - Messieurs, le temps est précieux ; nous avons beaucoup de choses à faire, et je ne crois pas que nous devions perdre une séance à discuter la prise en considération.
M. d’Elhoungne. - Un projet sur l’organisation provinciale a été présenté ; il a passé par les sections, et là il a été apprécié. Quant au projet de M. Jacques, le renvoyer directement à la section centrale, sans discussion, ce serait prendre une marche dangereuse. Il est important qu’il y ait discussion préalable sur la prise en considération, parce qu’alors la section centrale pourra saisir la pensée de la chambre.
M. de Brouckere. - L’embarras dans lequel l’assemblée se trouve provient d’une irrégularité qu’il faut attribuer à l’auteur de la proposition ; c’est que M. Jacques a fait usage de son initiative après que le gouvernement a fait usage de la sienne. La discussion du projet ministériel est terminée en sections. Pour éviter l’embarras dans lequel on se trouve, il faudrait que M. Jacques retirât son projet et l’envoyât lui-même à la section centrale, laquelle en ferait l’usage qu’elle jugerait convenable. Si nous discutons la prise en considération, nous perdrons une journée ou deux, et nous n’avons pas de temps à perdre.
M. Jacques. - L’embarras de la chambre vient, dit-on, d’une irrégularité dans la manière de présenter mon projet. Mais on se trompe quand on croit qu’il est opposé à celui qu’examine la section centrale.
La base de la proposition que je viens de faire est exclusivement relative au pouvoir provincial ; c’est l’organisation du pouvoir exécutif que j’ai en vue dans mon projet. On dira que le pouvoir exécutif peut s’organiser lui-même ; mais je m’empare d’un article de la constitution, de l’article 66, pour prouver que le pouvoir exécutif se trouve jusqu’à un certain point dans le domaine de la législation. D’après cette considération, il me serait facile d’établir que ma proposition, loin de toucher à l’initiative du gouvernement, relativement à l’organisation provinciale, touche à un tout autre objet.
Je demande que l’on fixe à quinze jours la discussion de la prise en considération.
M. Jullien. - Il est vrai qu’il y a de tout dans le projet de M. Jacques ; c’est, à mon avis, une espèce de petite constitution administrative. Quoi qu’il en soit, je viens appuyer les observations faites par M. de Brouckere. Je demande que la proposition soit renvoyée à la section centrale. Toute la chambre a travaillé sur le projet qui divise le royaume en 9 provinces. Vous ne pouvez travailler sur le second projet que sous forme d’amendement. Quand vous aurez discuté sur la prise en considération, il faudra encore discuter sur le fond de la question : c’est une complication que la chambre doit éviter pour ne pas perdre son temps.
M. Legrelle. - Puisqu’il faut que nous discutions la prise en considération, discutons-la d’abord, et renvoyons la proposition à la section centrale ; ou bien engageons M. Jacques à faire lui-même ce renvoi.
M. d’Elhoungne. - La proposition de M. de Brouckere est contraire au règlement : lisez l’article 36. Il faut discuter la prise en considération, ou prononcer l’ajournement.
M. A. Rodenbach. - Que M. Jacques convertisse sa proposition en pétition, et la chambre pourra alors la renvoyer à la section centrale. (On rit.)
M. de Muelenaere. - Il me semble que la proposition de M. de Brouckere n’est pas contraire au règlement. On a fait sentir les inconvénients qui résulteraient de la discussion de la prise en considération, laquelle prendrait beaucoup de temps, et l’on a invité M. Jacques a renvoyé lui-même sa proposition à la section centrale ; je crois que c’est la marche à suivre. Dans l’opinion de M. Jacques, son projet simplifie la machine administrative ; d’autres pourraient au contraire ne pas y voir de simplifications ; c’est une chose à examiner.
M. Jullien. - Il y a un moyen de mettre tout le monde d’accord. L’article 37 du règlement autorise l’ajournement ; je viens proposer l’ajournement de la proposition de M. Jacques jusqu’à ce que la discussion sur l’organisation provinciale soit terminée. (On rit.) De cette manière nous resterons dans les termes du règlement, et la discussion qui aura lieu sur la loi provinciale nous mettra mieux à même d’apprécier le système de M. Jacques.
M. Dubus. - Il me paraît que la proposition de l’honorable préopinant ne peut être mise aux voix. L’ajournement ne peut se voter sans discussion ; une discussion doit s’ouvrir. De toutes les propositions faites, j’aurais préféré celle du renvoi à la section centrale, afin d’éviter une double discussion sur le même objet. Lors de la discussion sur la loi provinciale, on ne manquera pas de renouveler, par des amendements, la discussion à laquelle nous pourrions nous livrer sur la prise en considération. Je crois que la chambre peut renvoyer le projet de M. Jacques à la section centrale. En effet, si M. Jacques avait présenté son projet dans une section, cette section en aurait fait mention dans son rapport, et l’aurait, par ce moyen, envoyé à la section centrale ; ce qu’une section aurait pu faire, pourquoi la chambre ne le ferait-elle pas ?
Ecarter la proposition par l’ajournement, ce serait agir sans but ; car le projet se renouvellerait lors de la discussion de la loi provinciale.
M. Jacques. - En renvoyant à la section centrale, ce serait résoudre affirmativement la question relative à la prise en considération.
M. de Brouckere. - Cela ne se peut pas !
M. de Muelenaere. - La chambre peut, aux termes du règlement, décider qu’il n’y a pas lieu à délibérer. Il faut mettre aux voix l’ajournement indéfini.
M. Gendebien. - Sans admettre l’ajournement indéfini, je crois pourtant que nous devons ajourner, afin que M. Jacques puisse remettre officiellement sa proposition, son travail à la section centrale.
M. le président. - L’ajournement sera-t-il après la discussion sur la loi provinciale ?
M. Dubus. - C’est renvoyer la discussion de la prise en considération à une époque où elle ne sera plus possible, parce que la loi sur l’organisation provinciale sera votée. Il faut observer les convenances.
M. Jullien. - Je prie de remarquer que je n’ai pas fait de proposition dérisoire. Il est possible, après avoir discuté la loi provinciale, sans la voter, de passer à la discussion sur le projet de M. Jacques ; il est possible encore que M. Jacques, par forme d’amendement, reproduise sa proposition ; ainsi je persiste à demander que la discussion sur la proposition de M. Jacques ait lieu après la discussion sur la loi provinciale, mais avant le vote de cette loi. De cette manière l’honorable auteur du projet n’aura pas à se plaindre.
- La chambre consultée n’ordonne par l’impression du développement de la proposition de M. Jacques, et ajourne la discussion sans fixer aucun terme.
M. le président. - L’ordre du jour est la discussion de la prise en considération de la proposition développée par M. C. Rodenbach, relative à la patente des avocats.
M. C. Rodenbach. - Messieurs, pour ne pas troubler l’ordre de vos délibérations, pour ne pas scinder vos discussions, ne serait-il pas convenable de continuer les rapports sur les pétitions ?
- Plusieurs voix. - Non ! non !
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - - Messieurs, lorsque j’eus l’honneur de demander, au nom du gouvernement, l’ouverture d’un crédit provisoire pour le service du département de la guerre, je proposai de l’accorder pour les trois premiers mois de l’année 1833.
La commission à qui fut renvoyé l’examen de ce projet de loi pensa que le budget de la guerre pouvait être discuté et arrêté avait la fin du mois de février, et proposa, en conséquence, de n’accorder ce crédit provisoire que pour deux mois seulement.
La commission du budget n’étant pas en mesure de présenter son travail, et la discussion ne pouvant être terminée dans les deux chambres que dans le courant du mois prochain, le gouvernement vous demande, messieurs, pour le mois de mars, l’ouverture d’un nouveau crédit réglé à 6 millions, comme il l’a été pour les deux mois précédents.
Les crédits ayant été accordés aux autres départements pour les trois premiers mois de l’année, il ne peut y avoir d’empêchement à ce qu’il en soit de même pour le département de la guerre.
J’ai l’honneur, en conséquence, de vous proposer le projet de loi suivant :
« Léopold Roi des Belges
« A tous présents et à venir, salut.
« Sur le rapport du ministre-directeur de la guerre, et de l’avis du conseil des ministres,
« Nous avons arrêté et arrêtons :
« Notre ministre-directeur de la guerre est chargé de présenter, en notre nom, à la chambre des représentants, le projet de loi suivant :
« Article unique. Il est ouvert au ministre-directeur de la guerre un crédit provisoire de la somme de six millions de francs, pour faire face aux dépenses du mois de mars 1833.
« Bruxelles, le 20 février 1833.
« Léopold.
« Par le Roi :
« Le ministre-directeur de la guerre,
« Baron Evain. »
- Le projet présenté par M. le ministre de la guerre est renvoyé à la section centrale chargée de l’examen du budget de la guerre.
M. le président. - La discussion sur la prise en considération de la proposition de M. C. Rodenbach est ouverte.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Il me semble qu’on pourrait appliquer à la proposition de M. Rodenbach la même décision qui a été prise à l’égard de la proposition de M. Jacques. Le ministre a annoncé qu’il proposerait des modifications à la loi sur les patentes ; c’est l’intention du ministre des finances. La proposition de M. Rodenbach ne pourra-t-elle pas prendre la forme d’amendement dans la discussion de cette loi ?
Que feriez-vous d’ailleurs aujourd’hui ? Une déclaration de principes et rien de plus. Pour déterminer les patentes, il faut une échelle ; où la prendrez-vous si vous discutez la proposition à l’ordre du jour ? Vous perdrez beaucoup de temps sans profit pour les idées de l’honorable membre. Cette idée ne pourra recevoir les développements convenables que lors de la discussion du projet de loi sur les patentes. Je demande que la discussion de la proposition soit ajournée jusqu’à la discussion de ce projet de loi.
M. C. Rodenbach. - Je sais, messieurs, que la législation sur les patentes est des plus vicieuses, et qu’elle doit être révisée entièrement. Mais en attendant qu’un nouveau projet de loi sur cette matière soit présenté à la chambre, projet qui devra attendre son tour de rôle après une foule d’autres lois plus ou moins importantes, pourquoi les avocats seraient-ils dispensés de concourir aux charges de l’Etat, dans un moment, surtout, où l’état de nos finances, comme chacun sait, est peu prospère ?
L’honorable M. Lebeau cherche à opposer à la proposition que j’ai eu l’honneur de vous soumettre, une espèce de fin de non-recevoir. En effet, messieurs, l’ajournement qu’il propose est un envoi aux calendes grecques. Je ne consentirais à cet ajournement que dans le cas où M. Duvivier prendrait l’engagement formel de présenter, dans la session actuelle, une nouvelle législation sur les patentes, dans l’espoir où je suis que M. le ministre comprendra la nécessité de s’associer officiellement au principe de justice que je réclame, et qu’il placera les avocats dans les catégories des citoyens qui paient toutes les taxes.
Je prie M. Duvivier de vouloir bien communiquer à la chambre son intention. C’est d’après la nature de ses explications que je réglerai la conduite que j’aurai à tenir ; je me soumets du reste à la décision de la chambre.
M. le ministre des finances (M. Duvivier). - Je ne peux pas dire actuellement quand le projet sera présenté. Une commission s’occupe de la révision de la loi sur les patentes : on aura égard aux réclamations qui ont été faites, soit par les bateliers, soit par d’autres ; mais je ne puis assigner précisément le jour où le travail sera prêt.
M. Seron. - Il y a longtemps qu’on nous promet des lois sur les impôts ; elles ne paraissent pas. Il en sera de la loi sur les patentes comme de la loi sur les droits concernant les ventes mobilières, loi qui devrait être portée depuis deux ans et qui n’a pas encore paru.
M. C. Rodenbach. - C’est une fin de non-recevoir que vient de proposer M. le ministre de la justice ; c’est le renvoi aux calendes grecques. Si j’étais assuré que M. le ministre des finances présentât la loi sur les patentes dans le courant de la session, je pourrais ne pas m’opposer à l’ajournement.
M. le ministre des finances (M. Duvivier). - C’est dans le cours de la session que la loi sur les patentes sera présentée ; je ne crois pas que nous soyons prêts à nous séparer.
M. C. Rodenbach. - D’après cette promesse, je retire ma proposition, en me réservant de la renouveler avant la fin de la session, si M. le ministre des finances ne tenait pas sa promesse.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Je serais fâché que l’honorable M. Rodenbach crût que j’ai voulu élever une fin de non-recevoir relativement à la proposition qu’il a faite et qui est susceptible de controverse : j’ai dit que le ministre avait le projet de soumettre des modifications à la loi sur les patentes, et que M. Rodenbach devait, non retirer sa proposition, mais l’ajourner, afin d’attendre le projet relatif à ces modifications. La discussion de la proposition me semble prématurée aujourd’hui.
M. Seron. - Il y a urgence à présenter le projet sur les patentes. Vous avez besoin d’argent, et la preuve, c’est qu’on vient de vous en demander encore. Le ministre des finances sait bien qu’on a besoin d’argent
M. d’Elhoungne. - Si le ministre se propose de trouver une grande ressource pour le trésor dans la proposition de M. Rodenbach, je crois qu’il se trompe : c’est un de ces petits moyens qui ne peuvent conduire à aucun résultat.
Cependant je crois que les motifs allégués en faveur de l’ajournement sont inadmissibles. Il faut revoir la législation sur les patentes ; il ne faut pas enter sur une des plus mauvaises lois que nous devons au gouvernement précédent. Excepté la loi sur l’impôt, je n’en connais pas de plus détestable. Il faut pourtant en venir à élever l’édifice financier sur ses véritables bases. Persister dans la voie que nous suivons, c’est préparer une nouvelle révolution, Certainement notre révolution a eu des causes morales ; mais les désordres dans les finances, les lois fiscales les plus pesantes pour les contribuables sont les causes qui remuent particulièrement les masses. Si l’on ne veut que nous proposer des modifications à la loi sur les patentes, je m’opposerai à l’ajournement ; si l’on veut proposer un système nouveau, complet, j’appuie la proposition de M. le ministre de la justice.
M. Jullien. - C’est ainsi qu’on l’entend. Il est donc vrai de dire que la discussion de la proposition de M. Rodenbach prendra sa place dans la discussion de la loi sur les patentes. Actuellement on ne déclarerait qu’un principe ; mais il faut enchâsser ce principe dans la loi. S’il ne s’agissait que de nous occuper de modifications je m’opposerais à l’ajournement ; je l’appuie parce que je crois qu’on nous présentera une loi entière.
M. Gendebien. - Les ministres se taisent sur les interpellations qui viennent de leur être adressées relativement à la question de savoir si c’est un système nouveau ou une modification des tarifs concernant les patentes qu’ils présenteront. Dans une des précédentes séances du sénat, le ministre n’a annoncé qu’une révision du tarif, et pas autre chose.
La chambre se rappellera qu’en 1832 j’avais proposé de renouveler la loi sur les patentes, en prenant pour base la loi de l’an VII ; le ministre a pris l’engagement de présenter un projet de loi conforme à cette législation de l’an VII ; il n’a pas tenu sa promesse.
Il ne nous faut pas de simples modifications, c’est un changement complet, ce sont des bases toutes nouvelles qui sont nécessaires : pour poser ces bases, il ne faut pas grande peine ; tous nos faiseurs d’aujourd’hui, ou tous nos faiseurs de demain, les trouveront dans la législation de l’an VII.
Etant en apparence intéressé sur le fond de la question soulevée par M. Constantin Rodenbach, je m’abstiendrai d’en parler. Mais voter aujourd’hui une patente pour les avocats, ce sera ajouter un article aux tarifs, et pas autre chose. Pour agir dans l’intérêt général, et pour forcer le ministre à présenter une bonne loi sur les patentes, il ne faut rien ajouter aux tarifs.
M. le ministre des finances (M. Duvivier). - Je puis réitérer l’assurance que l’on s’occupe de la révision de la loi sur les patentes : je connais la pensée de la chambre, et quand le travail sera terminé, je verrai bien s’il est conforme à cette pensée ; d’ailleurs la chambre en sera juge elle-même. (Bien ! bien !)
- La chambre, consultée par le président, ajourne toute discussion sur la proposition de M. Rodenbach jusqu’à la discussion sur la loi concernant les patentes.
La suite de l’ordre du jour appelle le rapport des pétitions.
M. d’Huart présente le rapport des pétitions suivantes. - « La direction des polders de Lillo demande le paiement des dépenses nécessitées par l’inondation, et qu’une somme soit allouée cet effet au budget de l’intérieur. »
La commission propose le renvoi au ministre de l’intérieur, afin qu’il fasse connaître à la chambre, lors de la discussion du budget de son département, s’il y a lieu d’admettre la réclamation en tout ou en partie, et, dans l’un ou l’autre de ces deux cas, afin de proposer une allocation de fonds.
Ces conclusions sont adoptées.
M. d’Huart, rapporteur. - « Le sieur Léonard à Celles, adresse des observations relatives au projet de loi sur la garde civique. »
La commission propose le renvoi au ministre de l’intérieur et le dépôt au bureau des renseignements, par le motif que la pétition renferme quelques notions à utiliser lors de la révision des lois sur la garde civique.
- Le double renvoi est ordonné.
M. d’Huart, rapporteur. - « Le sieur Collin, chevalier de la légion d’honneur, à Floreffe demande que la chambre ordonne que les arriérés de sa pension, pour les années de 1830 à 1832, lui soient payés. »
L’objet de cette pétition se trouvant en quelque sorte rempli par la nomination de la commission que vous avez chargée d’examiner les droits des légionnaires, la commission propose l’ordre du jour.
M. de Brouckere. - Il me semble qu’il faudrait renvoyer la pétition à la commission des légionnaires.
- L’ordre du jour est écarté, et le renvoi à la commission est ordonné.
M. d’Huart, rapporteur. - « 32 avocats du barreau de Mons réclament contre la proposition de M. C. Rodenbach, relative à la patente des avocats. »
La commission propose le dépôt au bureau des renseignements, par le motif que la pétition est relative à un objet qui sera prochainement discuté par la chambre.
- Le dépôt au bureau des renseignements est ordonné.
M. d’Huart, rapporteur. - « Le sieur H.-J. Boutry, ex-voltigeur au 12ème régiment d’infanterie, à Bruxelles, demande à être réintégré dans sa pension de retraire de 100 fr. l’an, obtenue par décret du 20 septembre 1809. »
Il résulte d’une lettre de M. le ministre de la guerre actuel, jointe à la demande, que le pétitionnaire a laissé périmer en 1818 le délai fatal qui avait été légalement fixé pour recevoir les réclamations des Belges pensionnés par la France.
La commission vous propose, en conséquence, l’ordre du jour sur cette pétition.
- La chambre passe à l’ordre du jour.
M. d’Huart, rapporteur. - « Le sieur Deput, inventeur d’un nouvel engrais chimique, réclame l’intervention de la chambre, afin d’obtenir des moyens pécuniaires pour seconder son projet de défrichement des colonies. »
Le pétitionnaire s’est adressé, pour le même objet, le 15 décembre dernier, à M. le ministre de l’intérieur. Il a semblé à votre commission que le pétitionnaire devait attendre réponse du chef de ce département auquel il appartenait, d’ailleurs, exclusivement d’apprécier le mérite de la réclamation.
Par suite, la commission vous propose de passer à l’ordre du jour sur cette pétition.
- L’ordre du jour est adopté.
M. Milcamps, autre rapporteur de la commission des pétitions, présente le rapport de celles qui suivent. - « Le sieur P. Walravens, cabaretier à Bruxelles, demande : 1° un à-compte sur l’indemnité qui lui revient du chef des pertes qu’il essuyées dans les journées de septembre, et 2° que la chambre fasse cesser les poursuites dirigées contre lui par son receveur. »
Attendu qu’il a déjà été statué par un ordre du jour sur une semblable pétition, émanée de la même personne, la commission propose la même disposition.
- L’ordre du jour est adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « La régence de La Roche renouvelle sa demande que la régie des bois communaux soit rendue aux administrations locales. »
Quoiqu’il ait déjà été statué par la chambre le 6 juillet, sur une semblable pétition de la régence de La Roche, laquelle a été renvoyée à M. le ministre des finances et déposée au bureau des renseignements, votre commission m’a chargé de vous proposer le dépôt de cette nouvelle pétition au bureau des renseignements.
Ces conclusions sont adoptées.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur A. de Trebit, à Liége, adresse des observations sur le projet de loi d’organisation provinciale. »
Ces observations portent en général sur la marche actuelle donnée aux affaires administratives que le pétitionnaire trouve vicieuse ; sur la nécessité de dispositions propres à assurer les droits de la justice. Il trouve le nombre des fonctionnaires trop élevé. Il est difficile, quand les affaires doivent passer par tant de mains, qu’elles reçoivent une décision libre de toute influence ; il fait quelques applications. Il exprime le vœu que les administrations provinciales actuelles soient remplacées par une administration composée, pour chaque province, de trois administrateurs ; ils auraient des réunions pour les affaires d’un intérêt général. Hors de là, chaque administrateur aurait ses attributions distinctes. Il correspondrait, à ce sujet, avec les administrations locales, et il déciderait sous sa responsabilité. Ses décisions seraient sujettes à l’appel devant les tribunaux ordinaires.
Bien que cette pétition ne présente, sur presque tous les points, que des généralités de la nature de celles que je viens de rappeler, la chambre se trouvant saisie du projet de loi d’organisation provinciale, votre commission m’a chargé de vous proposer le dépôt de cette pétition au bureau des renseignements.
- Le dépôt au bureau des renseignements est adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur Feyens, à Bruxelles, artiste sculpteur, demande que la chambre lui confie l’exécution du buste en marbre de S. M. »
A ce sujet, le pétitionnaire rappelle qu’il a exposé dans une des salles de ce local le buste du Roi, et vous prie de voir ce buste. Dans le cas où vous jugiez convenable de faire exécuter en marbre, soit la statue, soit le buste de S. M., il demande que vous lui en confiiez l’exécution.
La nature de cette demande a porté votre commission à charger son rapporteur de vous proposer l’ordre du jour.
M. de Nef. - Messieurs, il me semble que dans un pays constitutionnel les chambres doivent concourir avec le gouvernement à l’encouragement des artistes. Je sais bien que la chambre n’a pas de fonds disponibles pour confier au pétitionnaire l’exécution du buste en marbre de S. M. Mais comme le public a paru satisfait du travail de cet artiste, ce serait le cas de renvoyer sa pétition au ministre de l’intérieur ; il y aurait là pour lui un motif d’encouragement.
M. Milcamps, rapporteur. - Si la chambre ne veut pas admettre les conclusions de la commission, ne serait-ce pas plutôt le cas de renvoyer la pétition à MM. les questeurs, puisque le sieur Feyens s’adresse à la chambre ? MM. les questeurs feraient un rapport à ce sujet s’ils le jugeaient convenable. (Non ! Non !)
- L’ordre du jour est mis aux voix et écarté.
Le renvoi au ministre de l’intérieur est ordonné.
M. Milcamps, rapporteur. - « Sept receveurs des douanes, à Ypres, adressent des observations relatives au système des douanes. »
Je dois faire remarquer à cet égard que cette pétition tend à établir que la circonscription des bureaux de recette et le mode de remises proportionnelles ne donnent point aux receveurs des campagnes un salaire proportionné à leur travail. Un receveur à la campagne ne jouit que d’un traitement présumé de 558 fl. Le but des pétitionnaires est que le sort des receveurs des douanes soit amélioré.
Votre commission propose le dépôt de cette pétition au bureau des renseignements.
M. Jullien. - Il y a une erreur datas le feuilleton. Il porte : Sept receveurs de douanes à Ypres. Je ne connais qu’un seul receveur en cette ville.
M. Milcamps, rapporteur. - Il est probable que ces sept receveurs sont pour tout l’arrondissement.
- Le dépôt au bureau des renseignements est ordonné.
M. Milcamps, rapporteur. - « Vingt-deux habitants de Gheel réclament l’intervention de la chambre pour obtenir de la régence de cette ville le paiement de livrances de toute nature et voiturages faits par eux. »
Dans cette réclamation, les pétitionnaires se plaignent qu’on refuse de payer leurs livraisons, malgré que l’autorité locale ait reçu les fonds destinés à ce paiement ; mais attendu qu’à cet égard il ne paraît pas que les pétitionnaires se soient adressés aux autorités supérieures, votre commission propose l’ordre du jour.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Les directeurs des wateringues du Capitalen-Dam et d’Isabelle demandent que la chambre ordonne le rapport sur la dernière pétition, qui réclamait une indemnité pour les pertes essuyées en suite de la rupture de l’armistice.
La commission conclut à l’ordre du jour.
A cette occasion, je crois devoir faire observer que la chambre, dans la séance du 7 décembre dernier, a statué sur la pétition, rappelée par les pétitionnaires, en la renvoyant à MM. les ministres des affaires étrangères et de l’intérieur, avec demande d’explications. Ces explications n’ayant pas encore été données, n’y aurait-il pas trop de sévérité à passer à l’ordre du jour sur un objet qui est encore en instruction ?
- L’ordre du jour est adopté.
M. Tiecken de Terhove. - Une pétition datée du 8 janvier signée par plusieurs propriétaires et cultivateurs des Flandres et demandant le rapport de l’arrêté du gouvernement provisoire qui défend l’exportation des céréales, a été renvoyée, il y a à peu près 15 jours, à M. le ministre de l’intérieur avec demande d’explications.
Je crois qu’il est temps de venir au secours de l’industrie, qui contribue pour une si grande part à la richesse publique. La récolte des grains a été très abondante cette année, et ses produits dépasseront de beaucoup la consommation. Il me semble qu’il est nécessaire d’ouvrir un débouché à nos céréales, et je demanderai à M. le ministre s’il a l’intention de nous présenter un projet à cet égard, parce que, dans le cas négatif, plusieurs membres se proposent d’user de leur droit d’initiative.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Le gouvernement a cru utile de consulter sur ce point la commission supérieure d’industrie et d’agriculture. Aussitôt que le rapport de cette commission lui sera parvenu, il prendra une résolution.
M. de Muelenaere. - J’appuie l’observation de M. de Tiecken. La mesure qu’il réclame est extrêmement urgente et mérite toute la sollicitude du gouvernement.
M. A. Rodenbach. - Le gouvernement doit s’occuper sur-le-champ de cet objet, d’autant plus que le froment ne vaut plus que 16 fr. 50 c. l’hectolitre et le seigle 11 fr. S’il ne s’en occupait pas, plusieurs membres de la chambre se proposent de prendre l’initiative. Je sais que l’honorable M. Coghen prépare un projet de loi tendant à établir une échelle proportionnelle comme en France.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Le ministre s’occupe d’un projet de loi ; mais il a voulu vous présenter un travail un peu mûri, et c’est pour cela qu’il s’est adressé à la commission d’industrie et d’agriculture. Du reste, il n’entend pas empêcher d’honorables membres de prendre l’initiative. Si M. Coghen et M. A. Rodenbach ont préparé des projets, ils peuvent les présenter. La chambre choisira.
M. le président. - Il y a encore à l’ordre du jour la discussion du projet de loi sur les distilleries, et le renouvellement des sections. Vu l’heure avancée, la chambre voudra probablement renvoyer cette discussion à demain. (Oui ! oui !)
- Le bureau procède au renouvellement des sections.
La séance est levée à 3 heures et demie.