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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 17 avril 1832

(Moniteur belge n°110 et n°, des 19 et 20 avril 1832)

(Présidence de M. de Gerlache.)

La séance est ouverte à 10 heures.

Appel nominal et lecture du procès-verbal

Après l’appel nominal, M. Dellafaille donne lecture du procès-verbal qui est adopté.

Pièces adressées à la chambre

M. Liedts analyse ensuite quelques pétitions qui sont renvoyées à la commission.

Projet de loi portant le budget du ministère de l'intérieur de l'exercice 1832

L’ordre du jour est la suite de la discussion du budget de l’intérieur.

Discussion du tableau des crédits

Chapitre III. Travaux publics

Article 2

« Art. 2. Traitements des ingénieurs et conducteurs : fl. 105,800. »

La section centrale propose de n’allouer que 95,000 fl.

M. Dewitte. - Messieurs, j’ai demandé la parole non pour vous entretenir des réductions, mais d’autre chose. L’honorable M. Osy a dit en séance du 11 courant qu’il considère le moment de la discussion du budget de l’intérêt comme favorable pour faire entendre les plaintes des administrés, j’épouse son avis et vais le mettre en pratique.

L’Etat qui paie si largement que le nôtre, devrait être en tout et partout bien servi. Malheureusement il n’en est pas ainsi, l’expérience démontre à chaque instant le contraire.

J’ai déjà eu l’honneur de signaler à la chambre en séance du 13 janvier, à l’occasion d’une pétition présentée par la régence de la commune d’Hosslede, district d’Alost, un abus grave qui se reproduit tous les ans.

J’entends parler du mode que l’on suit pour l’écoulement des eaux du canal d’Alost à Termonde, creusé pour abréger la route à parcourir et faciliter les communications des riverains de la Dendre, et aussi des négociants et bateliers d’Alost, Ninove, Grammont, Ath et autres, avec l’Escaut et ses riverains, et de ceux-ci avec ceux de la Dendre.

Cet écoulement s’opère habituellement au mois d’août, qui est l’époque à laquelle la navigation est très active et offre le plus de ressources aux bateliers.

M. Destouvelles. - Mais l’orateur n’est pas dans la question.

M. Dewitte. - Pardon, je suis dans la question, je parle des travaux publics.

M. le président. - Je ferai remarquer qu’il est tout à fait insolite d’interrompre un orateur au commencement de son discours. Laissez-le s’expliquer, et s’il est hors de la question, je l’y rappellerai.

M. Dewitte continue ainsi. - Il se fait, sous prétexte d’exécuter des réparations et travaux que l’on prétend devoir être faits aux bords du canal ou aux écluses.

Je dis que l’on prétend ou présume devoir être faits, parce qu’il arrive assez souvent, ou que l’on ne fait rien, ou qu’il n’y a rien à faire.

Voici, messieurs, comme on s’y prend. On commence, sans visite préalable, par retirer les eaux et mettre le canal à sec.

Quinze jours et parfois trois semaines plus tard, l’ingénieur établi à Termonde se met en mouvement pour faire sa visite.

S’il s’est trouvé qu’il y a quelque chose à faire, l’entrepreneur, entre lequel et l’ingénieur paraît toujours régner une parfaite intelligence, fait conduire tout à son aise quelques matériaux aux endroits indiqués.

De là, à l’œuvre, il s’écoule ordinairement encore plusieurs jours, et ainsi on emploie quatre, cinq, et même quelquefois six semaines pour faire ce qui pourrait et devrait être entrepris et achevé en dix, douze ou, tout au plus, quinze jours.

Cette singulière façon d’agir produit les suites les plus funestes, elle blesse tous les intérêts.

Elle nuit à l’Etat en ce que les bord du canal, privés de leur soutien, s’affaissent et s’écroulent, et qu’ainsi, là où il n’existait aucun dégât lors de l’écoulement, il en survient par l’absence mal à propos prolongée des eaux, qui augmente en même temps les dégâts qui existaient, et double et triple ainsi la dépense des réparations.

Elle porte des coups fatals au commerce et à la navigation.

Elle réduit les négociants à une inactivité ruineuse pendant un temps considérable en empêchant la circulation des marchandises.

Elle place et tient les bateaux sous un embargo ruineux, et ôte aux bateliers leurs moyens de subsistance.

Ce n’est pas tout, messieurs, elle prive du pain quotidien une masse d’ouvriers qui subsistent avec leurs familles, ordinairement nombreuses, de ce qu’ils gagnent en chargeant et déchargeant les bateaux et en transportant les marchandises.

Elle réduit à la misère ce nombre considérable des pauvres campagnards qui n’ont d’autre ressource que ce qu’on leur paie pour trainer les bateaux le long de la Dendre, et ainsi pour un travail des plus pénibles.

En un mot, messieurs, c’est un véritable fléau pour les négociants, pour les bateliers et pour la classe souffrante, dont les intérêts, ainsi que ceux de la généralité, réclament incessamment que cet abus disparaisse, et qu’ils cessent d’être victimes de l’impéritie ou de l’insouciance.

Sous l’ancien régime, l'écoulement des eaux du canal n’avait lieu que tous les trois ou quatre ans, il ne se prolongeait jamais au-delà de quinze jours, tout était alors et toujours en bon état, tous les intérêts étaient conciliés, et la dépense presque imperceptible.

Pourquoi n’agit-on pas de même aujourd’hui ?

Il me reste à signaler à la chambre un autre objet également intéressant sous le rapport de la navigation.

Il existe, sur un bras du canal, une écluse de décharge, destinée à empêcher que l’eau ne déborde, et à la tenir constamment à la hauteur nécessaire pour la navigation.

Le service de cette écluse se fait aujourd’hui non au moyen des trappes comme primitivement, mais par la voie des poutres qu’on entasse les unes sur les autres.

Celles-ci ne se touchent pas assez hermétiquement pour empêcher que l’eau ne découle continuellement, et assez abondamment pour interrompre en été la navigation pendant plusieurs jours de la semaine, ce qui est infiniment nuisible aux bateliers.

Il est urgent, messieurs, de faire disparaître cet abus et cet état de choses, et j’ose me flatter qu’il suffira de les avoir signalés à a chambre et à M. le ministre de l'intérieur, pour que celui-ci s’empresse d’y porter remède et faire cesser ainsi les sujets des justes plaintes que des administrés vous adressent par mon organe. J’ai dit.

(Supplément au Moniteur, non daté et non numéroté)M. d’Elhoungne. - Messieurs, s’il s’agissait aujourd’hui de décider la question de savoir s’il faut supprimer ou conserver l’administration des ponts et chaussées, je n’hésiterais pas de suivre un honorable membre qui hier a porté la parole pour émettre une opinion contraire à la sienne.

Contraire à la sienne, messieurs, parce que je considère cette administration comme doublement funeste au pays, et sous le rapport pécuniaire et sous un autre infiniment plus important, par l’influence que toute administration excentrique ne manque jamais de s’arroger et la direction qu’elle donne aux travaux.

Des plaintes nombreuses n’ont cessé de retentir contre l’administration des ponts et chaussées, ici comme en France, contre l’autorité qu’elle s’attribue et la manière dont elle l’exerce. Quant à la direction qu’elle imprime aux travaux, il faut convenir que ce corps sert avec trop de tiédeur les conceptions de ses membres, qui, quoique très éclairés dans leur art, ne connaissent souvent que très superficiellement les besoins du commerce et de l’industrie. De là, ces communications nouvelles qui font double ou triple emploi ; de là, ces petites chaussées à trois mètres de largeur ; de là ces canaux sans utilité réelle ; heureux encore si, par leur mauvaise exécution, ils n’étaient pas devenus une source de dommage pour une foule de propriétés qu’ils détériorent.

Sous le rapport pécuniaire, un corps d’ingénieurs est également contraire aux intérêts du pays. Cette organisation ne tend qu’à salarier aussi largement le désœuvrement que le travail, l’oisiveté, que la fainéantise. Que l’Etat loue les services d’un ingénieur quand il en éprouve le besoin, rien de mieux. Mais de quelle utilité peut être pour lui d’avoir perpétuellement à sa solde des ingénieurs, même quand sa position ne lui permet pas de songer à de nouvelles constructions ?

Si maintenant nous consultons l’expérience, nous arrivons à la même solution.

Avant la révolution française, messieurs, trois pays jouissaient à juste titre d’une honorable célébrité pour le nombre et la facilité de leurs communications. La Hollande, à cause de ses nombreux canaux, la Belgique, en raison de ses belles chaussées, l’Angleterre, si richement dotée de tous les moyens de communication. Toutefois, dans aucun de ces pays, on n’avait vu l’ombre d’une administration des ponts et chaussées.

En France, au contraire, ce corps pèse depuis longues années sur le pays ; et cependant la France manque de communications intérieures : à l’exception de quelques routes fastueuses ,partant du centre et aboutissant à quelques grandes villes, la France n’a pas vu son état intérieur recevoir de grandes améliorations ; elle en est encore, à peu près à la position de nos pères, au XVème siècle.

Mais il s’agit aujourd’hui de toute autre chose que de cette question importante. Le seul objet en discussion est le crédit à ouvrir au ministère pour subvenir à la dépense de l’administration des ponts et chaussées, et ce n’est pas incidemment au budget que j’essaierai de soulever une question aussi grave, ni que je puis croire que la chambre voudra y suivre un orateur dont je suis bien éloigné d’adopter l’opinion.

J’aborde donc le budget, et je tâcherai de faire ressortir d’un petit nombre de faits, l’exagération du crédit qui vous est demandé.

D’abord, messieurs, il faut bien déterminer le chiffre que l’on a eu l’art de vous présenter en plusieurs parties distinctes.

Au chapitre III, il y a d’abord une somme probable de fl. 103,800.

Plus, aux articles 3 à 9, d’autres traitements pour celle de fl. 29,780.

Puis, article 10, pour levée de plans fl. 4,000.

Ensuite au chapitre IV fl. 9,375.

Au chapitre V, fl. 36,000.

Enfin, il résulte du rapport de la section centrale, que les provinces auront encore à pourvoir au traitement de plusieurs agents des ponts et chaussées, pour une somme de 47,600 florins.

Total, fl. 232,515.

Voilà, messieurs, la part effective que cette administration est destinée à prendre au budget.

Pour en démontrer l’exagération, il suffirait de comparer : 1° ce que cette administration a coûté sous le gouvernement précédent en 1831 ; 2° les travaux qu’elle aura à exécuter cette année et ceux qui ont eu lieu précédemment, et enfin le personnel à ces deux époques diverses.

Le gouvernement précédent avait compris le waterstaat au budget de 1830, pour une somme totale de 213,071 fl. 30 c., y compris les architectes de palais, et 70,000 fl. pour frais de route et de déplacement, et c’est pour 232,515 fl. que le corps figure au nôtre.

En 1831, M. Sauvage n’avait demandé pour le même objet que 170,000 fl. ; car, remarquez-le bien, les ingénieurs et les autres agents des ponts et chaussées, spécialement affectés au service des mines, n’ont pas obtenu une mention spéciale au budget de M. Sauvage, pas plus qu’au budget de 1830.

Le ministre avait amplement étendu le crédit à affecter aux agents des ponts et chaussées. En effet, messieurs, pour tout homme qui connaît la position géographique et physique de la Hollande et de nos provinces, il doit paraître de toute évidence que dans les 213,000 fl. affectés au waterstaat du royaume des Pays-Bas, les anciennes Provinces-Unies étaient comprises dans cette somme pour deux grands tiers au moins, de sorte qu’il ne pouvait en rester pour la Belgique que 70,000 fl. au plus. En 1831, le prédécesseur de M. le ministre a demandé 170,000 fl. pour le même service, et aujourd’hui c’est à 232,515 fl. qu’on estime ce service.

Je passe à un autre rapprochement.

Cette dernière somme est réclamée pour une administration qui aura à exécuter cette année pour 709,869 fl. de travaux. Vous voyez que la proportion des traitements à l’égard de cette dernière somme atteint le chiffre exorbitant de 32 3/4 p. c.

Sous l’ancien gouvernement, le crédit affecté aux travaux publics de 1830 s’élevait à 2,123,436 fl. 03 c., cette proportion est au-dessous de 10 p. c., c’est-à-dire que pour exécuter trois moins de travaux, il nous en coûtera trois fois plus en traitements. Vous voyez combien cet état de choses est désolant pour nous.

Sous ce rapport, le budget de M. Sauvage était bien plus favorable, il s’agissait de faire pour 2,239,000 fl. de travaux publics, et dès lors la proportion n’aurait pas été de 7 p. c.

Vous avez réglé le budget de 1831, en traitement, à 166,200 fl en travaux, à 2,134,404 florins ; c’est à peine 7 3/4 p. c., et en adoptant le budget, la proportion sera cette année de 32 3/4/

Il me reste à faire la comparaison du personnel actuel avec celui de l’ancien royaume : ce rapprochement ne fera que confirmer une seule et même vérité, la nécessité de réduire fortement le crédit qu’on réclame de la chambre. Voici l’état de ce personnel :

Inspecteurs-généraux : au budget de 1830, 1 à 6,000 fl. ; au budget de 1832, 1 à 5,000 fl.

Inspecteurs-divisionnaires : au budget de 1830, 2 à 4,000 fl. ; au budget de 1832, 1 à 6,000 fl.

Ingénieurs de première classe : au budget de 1830, 3 à 3,000 fl. ; au budget de 1832, 2 à 3,000 fl.

Ingénieurs de deuxième classe : au budget de 1830, 6 à 2,400 fl. ; au budget de 1832, 7 à 2,400 fl.

Ingénieurs ordinaires de première classe : au budget de 1830, 6 à 1,800 fl. ; au budget de 1832, 4 à 1,800 fl.

Ingénieurs ordinaires de deuxième classe : au budget de 1830, 13 à 1,500 fl. ; au budget de 1832, 12 à 1,500 fl.

Aspirants : au budget de 1830, 3 à 900 fl. ; au budget de 1832, aucun.

Sous-ingénieurs : au budget de 1830, aucun ; au budget de 1832, 12 à 900 fl.

Messieurs, l’examen de cet état en dit plus que je ne pourrais le faire. Je me bornerai à deux remarques.

D’abord, il n’y a de réduction opérée que sur le traitement d’un seul agent, encore est-il à observer que cette réduction se trouve amplement compensée par la différence qui existe entre le prix des denrées, et de tous les objets de consommation dans nos provinces et en Hollande. Tous les autres employés conservent le traitement qui leur fut alloué en considération de cette plus grande cherté qui n’existe pas pourtant chez nous.

Dans le nombre des agents, il n’y a pas non plus de réduction dans la proportion des deux tiers. Sur trois inspecteurs, on en conserve deux, un eût suffi à tous les besoins. La plus forte réduction est de un sur trois agents ; et il n’échappera à personne que dans plusieurs classes, la réduction est vraiment dérisoire, tandis que dans une autre classe, on a quadruplé le personnel, tout en accordant à ceux qui y appartiennent un titre plus relevé.

Il me reste à dire deux mots sur les conducteurs que M. le ministre dit avoir été omis dans le budget de 1830. Leur traitement se trouve compris avec celui des inspecteurs-généraux et divisionnaires, des ingénieurs en chef et ordinaires, des aspirants, pontonniers éclusiers et surveillants des canaux, dans les sommes globales de 54,000 et de 81,400 fl., qui se trouvent au budget décennal et au budget annal de 1830, à la quatrième division du département de l’intérieur, les agents subalternes s’y trouvent spécialement mentionnés ; c’est donc par erreur que M. le ministre vient de nous dire le contraire.

Ces agents, messieurs, étaient au nombre de 137 en 1830, coûtant 94,270 fl., ce qui revient à un traitement commun de 688 fl. par tête. Nous en avons 10 de première classe à 1,100 fl., 34 de deuxième classe à 900 fl., enfin 30 de la troisième classe à 700 fl., en tout 74, qui jouissent ensemble de 62,600 fl., ce qui donne pour terme moyen un traitement de 846 fl.

De quelque côté qu’on prenne cette partie du budget, l’exagération saute aux yeux. La section centrale vous propose d’allouer 95,000 fl. pour la première partie de ces diverses allocations. Je propose de n’accorder que 80,000 ; c’est encore 10,000 fl. de plus que toute l’administration des ponts et chaussées a pu coûter en 1830, lorsqu’il s’agissait d’exécuter pour plus du triple de travaux qu’on ne réclame de crédits pour ceux de la prochaine campagne.

M. Tiecken van Terhove. Messieurs, M. le ministre nous demande une somme de 105,800 fl. pour traitements des ingénieurs, des conducteurs et frais de bureaux et de déplacements ; il dit avoir conservé le personnel des ingénieurs, mais qu’il a réduit le personnel des conducteurs.

Ne voyant pas figurer le personnel de cette administration dans le budget de 1832, je me suis reporté au budget de 1831, et là je vois un ingénieur-général, un inspecteur-divisionnaire, dix ingénieurs en chef, vingt ingénieurs ordinaires et dix sous-ingénieurs, ensemble 42 ingénieurs sans les conducteurs, dont je n’ai trouvé le nombre ni dans le budget de 1831 ni dans celui de 1832. Le personnel de cette administration que je vois dans le rapport de la section centrale, ne cadre pas avec celui du budget de 1831, que M. le ministre dit cependant avoir conservé ; là, je ne trouve que 39 ingénieurs et 74 conducteurs de différentes classes. Quel est maintenant le personnel effectif de cette administration ? Je n’en sais rien ; M. le ministre voudra bien nous dire, j’espère, d’où provient cette différence.

Dans tous les cas, avec un tel personnel, nous pourrons canaliser la Belgique dans tous les sens, et construire des routes dans toutes les directions, et en attendant que nous ayons du luxe en routes et canaux, nous aurons du luxe en ingénieurs. Comment se fait-il que pour un petit Etat, qu’on peut parcourir en un jour, on ait créé une telle quantité de fonctionnaires qui coûtent si cher, non seulement par leurs traitements, mais encore par leurs indemnités de route, dont ils ont, jusqu’à présent, très bien su tirer parti ?

Nous avons neuf provinces dont deux petites, ainsi, si nous avons 42 ingénieurs, comme nous le dit M. le ministre, nous aurons à peu près cinq ingénieurs par province, tandis que sous le gouvernement hollandais, qui du reste n’était rien moins que parcimonieux, quand il s’agissait de créer des fonctionnaires, où les travaux hydrauliques et autres étaient bien plus considérables, il n’y avait que deux ingénieurs par province, et cependant on ne s’est pas aperçu, à cette époque, que le service ait manqué. Sous le gouvernement français, il n’y avait qu’un ingénieur ordinaire à Liége, et un à Namur, et un ingénieur en chef pour les deux départements ; à Maestricht, je n’en ai connu qu’un seul pour le département de la Meuse inférieure.

Vous voyez donc, messieurs, que le personnel de cette administration est extrêmement exagéré. Aussi me semble-t-il, et la troisième section dont j’ai eu l’honneur de faire partie était de cet avis, que deux ingénieurs par province, sauf peut-être les deux Flandres, où il pourrait au besoin y en avoir trois, pourront suffire à tous les travaux à exécuter et à entreprendre à l’avenir, tant pour l’Etat que pour les provinces, et je pense que ces messieurs pourront encore mener une vie de chanoine.

Nous ne sommes pas assez riches, pour donner dans les travers de la profusion, et créer ainsi des véritables sinécures, et cependant à voir de la manière qu’on veut monter nos administrations, il semblerait que nous sommes embarrassés de notre argent, tandis qu’un déficit effrayant nous attend au bout de l’année, et que nous ne saurons comment faire face à nos besoins les plus pressants ; et qu’on ne vienne pas soutenir, comme on l’a fait lors de la discussion du crédit provisoire, qu’on ne peut diminuer ce personnel dont cependant une partie, je l’observerai en passant, est de nouvelle création, sous prétexte que des hommes dont les talents et les connaissances spéciales seront utiles au pays, dans un temps où il sera à même d’entreprendre des graves travaux, et sans doute pour nous faire entrevoir ce moment comme très rapproché on nous entretient, on nous présente les plans d’une route en fer, qui doit relier l’Escaut au Rhin, projet dont l’exécution dépend d’une foule de circonstances indépendantes de la volonté du gouvernement, et qui si elles ne le rendent chimériques, doivent le faire envisager comme très problématique, et tout au moins comme très prématuré.

Je ne conçois pas même comment on a pu penser à s’occuper de pareils travaux, dans l’état où se trouve l’Europe, avec l’incertitude du sort qui nous attend, et quelles seront nos véritables limites. Je crois que ce serait ici l’occasion d’observer en passant à l’administration supérieure, que quand le temps sera venu, de s’occuper sérieusement de ce projet, il conviendrait que le gouvernement réfléchisse mûrement quelle construction serait la plus avantageuse à l’Etat, tant sous le rapport commercial, que militaire, ou d’une route en fer ou d’un canal, et beaucoup d’esprits sages donnent la préférence, sous ces rapports réunis à cette dernière.

Au reste, messieurs, quels que soient les travaux à entreprendre, et je pense que dès longtemps ils ne seront colossaux faite de moyens, la moitié du personnel des ingénieurs nous suffira. Prenons-y garde, messieurs, si nous n’avions de l’ordre et de l’économie, nous pourrions bien avoir des ingénieurs, mais nous n’aurions ni routes, ni canaux ; je pense donc que la somme de 20,000 fl. proposée par mon honorable collègue M. d'Elhoungne, sera suffisante pour cette administration et en conséquence, je voterai contre le crédit demande part M. le ministre et par la section centrale.

M. d’Huart. Messieurs, je suis de l’avis de M. d'Elhoungne ; je ne pense pas qu’il puisse être question, à propos d’une spécialité du budget, de discuter les questions soulevées par l’honorable M. Barthélemy pour la décentralisation des administrations et des pouvoirs ; de pareilles questions trouveront leurs places lors de la discussion des lois provinciales et communales, qui détermineront les droits et les attributions du gouvernement, des provinces et des communes.

Je ne m’attacherai donc pas à réfuter tout ce qui me paraît dangereux et impraticable dans les vues de l’honorable membre, en ce qui concerne particulièrement l’administration des ponts et chaussées ; je me bornerai à examiner les choses telles que je les trouve, et à voir si la réduction de 10,800 fl. proposée par la section centrale sur les traitements des ingénieurs et conducteurs peut s’opérer sans inconvénient.

A cet égard, je ne suis pas de l’avis des trois derniers orateurs que vous avez entendus hier ni des honorables préopinants. Je n’hésite pas à dire que cette réduction me paraît impraticable, à moins de blesser les lois de l’équité et de compromettre la marche du service, en détruisant le zèle et l’activité de ces agents.

Personne ne contestera, je pense, que pour parvenir au grade d’ingénieur, il faut avoir fait à grands frais de longues études, et vous n’ignorez pas, messieurs, que le corps des ponts et chaussées actuel se compose d’hommes sortis de l’école polytechnique de France, de celle du génie de Hollande, et d’anciens employés des ponts et chaussées qui par de longs services et des études multipliées ont obtenu le grade d’ingénieur. Eh bien, messieurs, si vous adoptiez la réduction proposée par la section centrale, vous rabaisseriez les fonctionnaires des ponts et chaussées infiniment au-dessous des agents d’autres administrations, où l’on en conviendra, il ne fait pas joindre à la pratique les vagues connaissances techniques indispensables chez les ingénieurs.

Et, par exemple, si l’on compare le traitement d’un ingénieur en chef de province, qui dans l’ordre hiérarchique passe devant un directeur des contributions, avec le traitement de celui-ci, on voit que son traitement tel qu’on le demande au budget, est de beaucoup inférieur, puisqu’il n’est pour l’ingénieur en chef de première clase que de 3,000 fl., et de 2,400 fl. pour l’ingénieur en chef de deuxième classe, tandis que le directeur des contributions reçoit au-delà de 3,600 fl. ; les comparaisons que j’établirais pour des grades inférieurs offriraient les mêmes disparités.

La section centrale fait remarquer que les traitements fixes des ingénieurs des ponts et chaussées n’ont subi aucune diminution depuis la révolution (je viens de vous démontrer qu’il y aurait eu injustice à le faire), mais elle passe sous silence la réduction considérable opérée sur les frais de bureau et de tournée qui s’élevaient aux deux tiers des traitements fixes ; tandis qu’aujourd’hui ils sont arrêtés à une somme fixe de 23,000 fl., ce qui produit une économie de plus de 15,000 fl.

La section centrale a cité l’arrêté du 19 janvier dernier, portant des modifications à l’arrêté organique des ponts et chaussées, en date du 30 décembre 1830, et elle a conclu des termes de cet arrêté postérieur à la présentation du budget, qu’il devait résulter une diminution sur le chiffre indiqué pour frais de bureau et de déplacements ; mais c’est une erreur, il faut remarquer que les diminutions indiquées dans l’arrêté du 19 janvier ne portent que sur les frais de missions extraordinaires, et non sur les frais alloués pour service ordinaire, c’est-à-dire que si, par exemple, le département de l’intérieur appelait à Bruxelles l’ingénieur en chef de Liége, pour une affaire extraordinaire, en dehors de son service, cet ingénieur, au lieu de recevoir comme il l’eût fait en vertu de l’arrêté organique précité, 2 fl., ne recevra plus que 1 fl. 25 cents en vertu du dernier arrêté. Cette observation de la section centrale est sans fondement.

D’honorables membres se sont récriés sur le nombreux personnel du corps des ingénieurs des ponts et chaussées, mais qu’ils veulent bien consulter ce qui existe depuis 25 ans, et ils verront que ce personnel est plutôt diminué qu’augmenté ; malgré l’énorme accroissement des travaux publics et le surcroît de surveillance que nécessitent les deux à trois cents lieues de routes et de canaux construits pendant les dernières années en 1811, 1812, 1813 : les quatre départements de l’Escaut, de Jemappes, de la Lys et des Deux Nèthes comptaient à eux seuls six ingénieurs en chef et vingt-deux ingénieurs et aspirants ingénieurs, dont je tiens ici les noms, tandis qu’aujourd’hui il y a quatre ingénieurs en chef et 28 ingénieurs ordinaires ; il est à remarquer que dans ces 28 ingénieurs, il y a 12 sous-ingénieurs, auxquels on a donné un titre tout en diminuant les traitements, car ils avaient généralement 1,000 fl., tandis qu’aujourd’hui ils n’ont que 900 fl.

Il résulte des travaux que je me suis procurés, que le personnel des ponts et chaussées, dans les 9 départements formant aujourd’hui la Belgique, coûtait avant 1814 374,900 fr. ou 177,140 fl. 25 c., que ce même personnel coûtait en 1830 216,320 fl., et qu’aujourd’hui il ne coûte plus que 146,200 fl., différence en moins de 30,940 fl. sur l’administration française, et de 70,120 fl. sur l’administration des Pays-Bas, y compris les employés payés par les provinces, et ceux soldés sur les produits des canaux.

L’honorable M. Brabant a comparé ce traitement des ingénieurs français avec celui des nôtres, mais il est à remarquer qu’en France, les ingénieurs et conducteurs perçoivent des gratifications équivalentes au 2/3 du traitement fixe, tandis qu’ici ils n’en ont point. On a parlé hier d’ancienneté de service, mais, messieurs, presque tous nos ingénieurs ont plus de 20 à 25 ans de service, et certes, il serait impossible de les renvoyer sans pension, puisqu’ils ont sacrifié leur fortune d’abord, et presque toutes leur existence ensuite au service du pays ; on perdrait donc des services utiles, de la surveillance, des talents, sans économie réelle.

L’honorable M. d'Elhoungne vous a dit que pour tout le royaume des Pays-Bas, il n’y avait que 9 ingénieurs en chef et une trentaine d’ingénieurs ordinaires, cela n’est pas exact ; il y avait un ingénieur en chef par provinces et le nombre des ingénieurs ordinaires était plus considérable qu’on ne l’avance. Il est probable que M. d'Elhoungne a puisé ses renseignements sur l’état comprenant le nombre des ingénieurs employés exclusivement pour l’Etat, et qu’il a omis d’y joindre ceux employés au service des provinces.

Je pense, messieurs, qu’il n’est point d’administration, où il ait été fait d’aussi fortes économies, que dans celle des ponts et chaussées, et d’après les explications que je viens de vous donner, j’espère que vous serez convaincus qu’il n’est plus possible d’en espérer de nouvelles sans commettre la plus criante injustice envers des hommes instruits et honorables qui ont déjà rendu d’éminents services au pays, et qui sont dans le cas de lui en fournir encore d’importants, pendant un grand nombre d'années.

M. Goblet. Messieurs, à entendre l’honorable M. Barthélemy, les ingénieurs des ponts et chaussées n’ont absolument à s’occuper que de l’entretien ordinaire des routes, mais pour le dissuader, ainsi que ceux qui partageraient sa manière de voir, je vais énumérer ce dont ces ingénieurs sont occupés dans la seule province du Hainaut, qui est la mienne. Vous verrez, messieurs, qui si l’on ne fait pas grand bruit de nos travaux publics en exécution et en projets, ils n’en sont pas moins nombreux et importants.

Il y aura dans cette province en exécution en 1832 :

Le canal de Charleroi, auquel on dépensera cette année 200,000 florins et plus.

Le canal d’embranchement d’Houday par concession sur les fonds des particuliers, il coûtera 380,000 florins.

L’écluse d’Antoing par concession, elle coûtera y compris le dévasement de l’Escaut 80,000 florins.

La route de Marimont à Anderlu, dont la dépense pourra s’élever à environ 100,000 florins.

La route de Tournay à Renaix.

La route de Lessines à Renaix.

La canalisation de l’Escaut et de la Lys, reliées par un canal entre les deux rivières

Le chemin de fer remplaçant le canal du Hène, qui avait été concédé à une compagnie par l’ancien gouvernement.

L’achèvement et la rectification de la Sambre, dont les défauts doivent être attribués à l’administration hollandaise.

Outre l’entretien des routes de première et de deuxième classe, les ingénieurs des ponts et chaussées dans le Hainaut surveillent encore l’entretien des routes provinciales, celui des canaux de Mons à Condé, de Pommeroeul à Antoing ; de l’Escaut et de la Dendre, qui s’élèvent ensemble à plus de 70,000 florins annuellement.

A cette surveillance, il faut joindre celle de l’entretien des bâtiments de l’Etat et des prisons, une autre assez active sur la navigation de la Sambre, celle du canal de Charleroi, et des routes appartenant à des particuliers qui les ont exécutées par concession.

Pour avoir une idée de l’étendue de la besogne des ingénieurs, il faut savoir que, plus de mille affaires s’expédient dans les bureaux de l’ingénieur en chef du Hainaut, pendant l’année après avoir été examinées et avisées ; et l’on n’en sera pas étonné en pensant qu’outre l’entretien des routes de première et deuxième classe, et de tous les travaux dont nous avons déjà fait mention, ce fonctionnaire entretient et surveille encore les divers cours d’eau, les usines, les prisons, les bâtiments de l’Etat, les églises, les écoles, enfin tous les travaux qui s’exécutent sous la haute main des états députés.

Enfin, il est aussi appelé par le gouvernement et les états députés à l’examen et à la discussion d’autres affaires considérables.

L’honorable M. Barthélemy, si grand admirateur du passé, a dit que tout était fait dans le pays, mais en cela il a perdu de vue qu’en fait de communications, regardées sous le point de vue le plus général, plus on en a fait, plus il y a en a à faire ; c’est pourquoi l’Angleterre, qui avait usé dans certaines localités le système des routes ordinaires et des canaux, cherche déjà à les remplacer : ces objets ne suffisent plus à son activité, il lui faut des chemins de fer, il en sera de même chez nous : nos nombreuses routes et canaux nous paraissent déjà des moyens bien lents de communication. Aller vite est en tout le besoin du siècle, il ne faut donc pas nous arrêter, comme paraît le désirer l’honorable M. Barthélemy ; encourageons nos ingénieurs, laissons-les pousser en avant, préparer de nouvelles voies à de nouvelles industries et suivre de plus près possible la marche progressive de nos voisins.

Le même orateur n’a pu faire qu’un faux calcul en énonçant ce que coûte le personne du corps des ponts et chaussées, en considérant seulement la somme portée au budget de l’Etat pour les travaux publics, puisqu’il en existe généralement un plus grand nombre appartenant aux provinces, aux villes ou aux particuliers qui ont obtenu les concessions. Tous ces travaux n’en sont pas moins sous la direction des ingénieurs, quoique ne s’exécutant pas aux frais de l’Etat.

Un honorable député de Namur a, hier, fondé ses calculs sur un principe qui ne me paraît pas exact. Il vous a dit que c’était l’étendue des provinces qui devait principalement servir de base au calcul du nombre des ingénieurs à répartir entre elles ; mais il me paraît que c’est bien plutôt l’intensité de la population et l’importance industrielle qui doivent être prises en considération ; la multitude des travaux publics est incontestablement en raison directe de l’une et de l’autre de ces circonstances, et certainement sous ce rapport, on ne peut comparer la France à la Belgique, car, enfin, quelle surface égale du sol français peut offrir la population, l’agriculture, les mines, les rivières, les canaux, les grandes villes, les ports, les polders, etc. de la Belgique ?

Cependant je consens à mettre les provinces du royaume sur un pied d’égalité avec les départements de la France, et dans cette supposition, il est facile de démontrer qu’il y a proportionnellement beaucoup plus d’ingénieurs en France que chez nous.

L’honorable député de Namur a admis qu’il y avait chez nos voisins 450 ingénieurs de toutes classes : en comparant ce nombre à celui des départements, il donne cinq ingénieurs pour chacun de ces derniers, c’est-à-dire que pour qu’en Belgique nous soyons dans le même rapport, il faudrait que le corps des ponts et chaussées fût composé de 45 ingénieurs, tandis qu’il n’en existe que 39, dont 5 sont encore détachés et ne font point de service dans ce corps. Il est donc évident que quant au nombre, nous sommes beaucoup plus modérés qu’en France, et qu’en tout, l’administration de nos travaux publics ne laisse rien à désirer en la comparant à celle de ce dernier pays.

(Moniteur belge n°110 et n°, des 19 et 20 avril 1832) M. Jullien. - La chambre sait que je ne suis pas partisan des économies qui tendent à diminuer le traitement des employés ; mais ici il s’agit de l’institution des ponts et chaussées elle-même. Messieurs, dans le sein de cette assemblée comme au-dehors, l’administration des ponts et chaussées a subi de vivres attaques que, selon moi, elle n’a pas méritée. On a oublié que les hommes qui la composent sont sortis d’écoles célèbres, de l’école polytechnique et de celle du génie de Hollande, des hommes de premier mérite, qui ne sont parvenus au poste qu’ils remplissent qu’après de longues études. Ce ne sont pas des marquis qui forment ce corps, ce sont des hommes studieux et capables. Quant à son utilité, je ferai remarquer que tout ce que fait le corps des ingénieurs est productif à l’Etat, car quand il construit des routes, le trésor perçoit sur ces routes encore un droit de péage, et quand il fait des canaux, le trésor perçoit encore un droit de péage ou de navigation ; si j’ai bonne mémoire, la somme portée cette année de ce chef au budget des voies et moyens s’élève à plus d’un million.

L’orateur s’attache ensuite à démontrer que la comparaison que l’on a fait de l’administration actuelle avec ce qui existait sous le gouvernement français et sous celui des Pays-Bas est erronée, parce que le chiffre des traitements sous le gouvernement français était de 177,160 fl., et sous l’ancien gouvernement de 216,320 fl. pour les provinces méridionales seulement, en y comprenant les frais d’inspection du Brabant septentrional, ce qui fait une énorme différence avec l’allocation demandée aujourd’hui. Il énumère les travaux qui se font depuis la révolution, pour démontrer qu’ils ne sont pas moins nombreux et moins importants que ceux de la Hollande.

Il ajoute : quant au septième ingénieur, que M. d'Elhoungne a regardé comme inutile, je ferai remarquer qu’il est chef de division au ministère de l’intérieur. Ainsi, il n’y en a, en réalité, que six.

Enfin, il est une dernière considération que l’on ne doit pas perdre de vue, c’est qu’on pourra s’occuper, lors de la loi provinciale, de la question de savoir si les provinces n’auront pas leurs ingénieurs ; en attendant, je voterai pour le chiffre du ministre.

M. Pirson. - Je suis bien fâché ; mais je suis obligé de le dire ; j’ai remarqué que dans ce pays, ici, il existe entre les ingénieurs des ponts et chaussées un esprit de corps et de camaraderie, qu’il est nécessaire de dissiper.

Je pense que jusqu’aujourd’hui, les inspecteurs n’ont point rempli le but que l’on s’est proposé en les instituant. Ils n’ont servi qu’à tromper le gouvernement et appuyer les ingénieurs des provinces, lorsqu’il s’élevait quelque différend entre eux et les autorités locales, il y a des particuliers comme intéressés particulièrement, qui donnent des projets meilleurs que les leurs.

Dans tous les cas où il y a dissidence, le gouvernement pourrait nommer un commissaire ad hoc, soit parmi les ingénieurs, soit parmi des hommes de l’art, et il connaîtrait beaucoup mieux la vérité, que peuvent des inspecteurs, avec lesquels les ingénieurs provinciaux s’entendent d’avance.

M. Barthélemy a dit hier qu’il connaissait des ingénieurs qui passaient 8 ou 10 mois de l’année à la campagne. J’ajouterai à cette assertion, qui est vraie, parce que j’en connais aussi dans ce cas, j’ajouterai, dis-je, que les voitures du ménage et les denrées de ces messieurs parcourent nos routes en s’exemptant de tous droits de barrières. C’est un abus que l’ingénieur personnellement voyage en exemption des droits de barrières, c’est hors son droit.

M. de Tiecken vous l’a dit, il n’y avait sous le gouvernement français qu’un ingénieur en chef pour Liége et pour Namur. Aujourd’hui, il y en a trois pour Namur, c’est précisément le double. Le nombre des conducteurs est quadruple. Il n’y avait point d’ingénieur des mines, il y en a maintenant deux.

Je ne sais ce qui se passait dans les départements que M. d’Huart vient de citer ; mais je sais bien ce qui se passait dans le département de Sambre-et-Meuse, que j’ai administré.

Je voterai pour la réduction proposée par la commission. Je serais bien tenté d’adopter celle demandée par M. Barthélemy.

Toujours on renvoie à l’organisation définitive, lorsqu’aujourd’hui on demande des réductions. Lorsqu’on en viendra à l’organisation, on parlera de droits acquis et de pensions, et alors on prouvera qu’autant vaudra conserver l’état actuel des choses. Voilà comment les abus et les sinécures se perpétuent, voilà pourquoi je suis presque un athée politique. Les révolutions finissent par n’être que des changements de personnes, plutôt que de système.

M. Barthélemy répond à M. Goblet, qu’il persiste dans sa première opinion sur les travaux qu’ont à faire les ponts et chaussées, et qu’il fait distinguer dans ces travaux ceux qui sont à la charge de l’Etat et ceux qui sont la charge des provinces. Or, tous ceux qu’a cités M. Goblet ne sont pas, selon lui, des travaux de l’Etat, mais bien des travaux provinciaux, à l’exception de l’écluse d’Antoing. En faisant cette distinction, l’orateur ne trouve pour les travaux de l’Etat qu’une somme de 500,000 fl., et le dixième de cette somme, pour les traitements de l’administration, lui paraît bien suffisant.

En supposant, ajoute-t-il, que l’on veuille faire des routes en fer, ce qui rendrait inutiles les routes pavées et les canaux, il ne faut pas que nous dépensions plus que l’Angleterre ; nous pourrions faire comme elle et louer des ingénieurs de mérite quand nous en aurions besoin, mais je ne vois pas la nécessité indispensable de conserver une administration permanente avec une aussi grande masse d’employés.

M. Gendebien. - Il me semble que la question est de savoir si l’on détruira, ou si l’on ne détruira pas le corps des ingénieurs. Or, je ne puis mieux faire que de citer la réponse de l’empereur sur l’école polytechnique d’où sont sortis les ingénieurs dans un moment de nécessité, lors de sa campagne de France en 1814. « Je me garderai bien, dit-il, de tuer ma poule aux œufs d’or. » Eh bien, ici on vous propose de tuer notre poule aux œufs d’or et de la sacrifier, non pas à la nécessité, mais à une mesquine parcimonie ! Si vous détruisez le corps des ingénieurs, vous détruisez le corps créateur de travaux féconds pour le pays. Les particuliers, messieurs, savent bien en effet ce qui convient à leurs intérêts, mais s’ils ne peuvent profiter de la capacité et de l’expérience d’hommes spéciaux, les entreprises qu’ils feront coûteront trois fois plus et n’atteindront pas le même but d’utilité.

Si vous supprimez le corps des ingénieurs, vous retournerez à ce bon temps de Marie-Thérèse où tout était livré aux efforts individuels. Si c’est vers cette époque qu’on veut rétrograder je serai bien forcé de me laisser entraîner par le torrent, mais ce sera malgré moi. Messieurs, le commerce et l’industrie ont pris un tel développement et ont fait des progrès tels qu’il est impossible d’en revenir là. Il s’agit, remarquez-le bien, de nous tenir au niveau des autres pays. Eh bien ! voyez l’Angleterre, le pays industriel par excellence ! Il y a peut-être 4,000 ingénieurs.

- Plusieurs membres. - Ils ne sont pas payés par le gouvernement.

M. Gendebien.- Messieurs, ils sont payés par les particuliers, mais attendez que vous ayez atteint une prospérité industrielle aussi grande que celle de l’Angleterre, et alors vos ingénieurs seront aussi payés par les particuliers.

Ce corps, comme on vous l’a dit, est sorti des premières écoles, ce sont des hommes d’élite. Il fallait, pour arriver à l’école polytechnique, plus de mérite qu’il n’en fait aujourd’hui pour remplir les premières fonctions. Les Belges qui sont entrés à cette école, je le dis avec un sentiment d’orgueil, se sont toujours distingués et y ont toujours été placés en première ligne ; et ce sont ces hommes que vous voulez supprimer ! J’espère que nous arriverons à un temps où l’Etat ne dépensera plus rien pour les travaux publics ; mais est-ce en détruisant aujourd’hui le corps des ingénieurs que vous parviendrez à ce but ? Non, messieurs ; au contraire, multipliez les travaux des ingénieurs, et tous les intérêts particuliers convergeront vers l’intérêt général.

L’orateur soutient aussi que la comparaison avec ce qui existait sous le gouvernement français, loin d’être défavorable à l’administration actuelle, est au contraire toute à son avantage ; il fait observer que le nombre des ingénieurs qui parviennent est encore moindre que ceux des avocats et il ajoute que sans ce corps indispensable, on va retomber dans les bévues qui ont si longtemps tenu dans l’enfance l’industrie belge. Il s’oppose de toutes ses forces à un pareil renversement, surtout lorsqu’on est déjà parvenu au quatrième mois de l’année, qu’on pourra s’occuper d’une nouvelle organisation lors de la loi provinciale, dans un moment où l’on peut faire la guerre et avoir besoin des ingénieurs pour un double service.

M. Jullien. - M. Pirson a dit que lors de la loi provinciale on parlerait de droit acquis pour les ponts et chaussées. Non, messieurs, personne ne peut invoquer un droit acquis quand il s’agit de places et d’emplois.

On a parlé de plaintes particulières, mais ces plaintes, dans le cas même où il y aurait des torts de la part de quelques ingénieurs, ne peuvent pas retomber sur l’administration tout entière.

M. Barthélemy a dit qu’il fallait distinguer les travaux des provinces des travaux de l’Etat, mais c’est justement cette distinction qu’il s’agit de faire, et c’est une question qui viendra lors de l’organisation provinciale.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je répondrai que les griefs signalés par un honorable membre regardent l’administration provinciale et non pas l’administration des ponts et chaussées.

Relativement au génie civil, l’arrêté qui a été pris en dernier lieu a tellement réduit leurs frais de route que les ingénieurs ont un traitement très peu élevé.

J’appuie ce qu’on a dit sur la comparaison avec l’administration française. Quant à celle avec la Hollande, on n’a pas fait attention qu’il est porté une somme de 141,000 fl. pour les ingénieurs seulement, car il y avait tout au plus 6,000 fl. pour les conducteurs qui étaient payés sur des fonds spéciaux affectés aux travaux auxquels ils étaient attachés. Ainsi on ne peut faire aucun rapprochement. J’ajouterai qu’en 1830 les routes de première classe et les canaux appartenaient au syndicat, tandis qu’aujourd’hui elles appartient aux ponts et chaussées.

- On demande la clôture.

M. d’Elhoungne. - Je demande la parole contre la clôture. Il me semble, messieurs, qu’il est de la dignité de la chambre et de l’intérêt de la nation de nous accorder la facilité de répondre aux observations qu’on vient de présenter.

M. Lebeau. - Vous dérogeriez à vos usages, messieurs, si vous n’accordiez pas la parole à votre rapporteur. (Oui ! oui !)

M. Dubus soutient que le personnel et les traitements ont été augmentés et que des promotions ont été faites. Je cite, par exemple, neuf conducteurs qui sont passés sous-ingénieurs, et il ajoute en terminant que toutes les sections ont été d’avis de réduire l’allocation.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - On a dit, messieurs, qu’il y avait eu des augmentations de personnel de traitements et de promotions ; c’est une erreur, on n’a nullement augmenté le personnel et les traitements, et quand aux neuf conducteurs qui sont passés sous-ingénieurs, ils n’ont obtenu qu’un titre honorifique, car ils ont un traitement moins fort que quand ils étaient conducteurs. (La clôture ! la clôture !)

M. d’Elhoungne. - Dans une chambre représentative, un membre a toujours le droit de parler après un ministre.

- La clôture est mise aux voix et rejetée. En conséquence la discussion continue.

(Supplément au Moniteur, non daté et non numéroté) M. H. Vilain XIIII. - Tout en profitant de la latitude que nous donne notre régénération politique de discuter avec toute liberté nos lois de finances, et d’y porter insensiblement l’économie nécessaire, il faut, messieurs, se garder de tomber d’un excès dans un autre, et qu’en haine des abus du gouvernement déchu, nous ne rencontrions d’autres abus, celui d’une parcimonie mesquine et dangereuse.

Ainsi, sous le régime hollandais on a été choqué des dépenses inutiles, et quelquefois du sinécurisme du waterstaat hollandais, on a souvent été frappé de l’énormité de leurs frais de route et du tantième de leurs travaux, et maintenant, reportant les griefs qu’on élevait alors contre l’ancienne institution, on veut en punir la nouvelle et par de brusques réductions, après des réductions déjà opérées, on prétend éloigner de ces places et dégoûter de leur emploi les fonctionnaires qui l’accomplissent avec zèle et habilité, car c’est les éloigner que de leur refuser les moyens de trouver l’existence dans l’accomplissement de leur fonction.

On prétend en outre que ce corps sous l’ancien régime autrichien n’existait pas et qu’il serait beaucoup plus avantageux au pays de le supprimer totalement. On avance que par les principes de liberté dont devront jouir les provinces et les communes, ces administrations seront libres d’entreprendre tels travaux qu’elles jugeront utiles, de les entreprendre seules et sans contrôle, de telle façon et avec tels architectes ou ingénieurs qu’elles désireront se choisir.

C’est là une grave erreur, messieurs, et l’exécution de cette mesure amènerait de grands abus. En effet, si on laissait à une commune, dont les conseillers municipaux sont loin de posséder les connaissances nécessaires, le choix de son directeur de travaux, et la direction des ouvrages, bientôt les fautes que commettraient des agents choisis de préférence parce qu’ils travailleraient à meilleur compte, amèneraient un excédant de dépenses tel qu’il dépasserait les frais que nous coûtent dans ce moment l’entretien du corps des ingénieurs.

Il en doit être ainsi des entreprises désirées par les provinces. Le gouvernement dans le propre intérêt de ces institutions, doit exercer une haute surveillance sur l’exécution, et y conserver le dernier contrôle.

A cet effet, le corps des ingénieurs lui devient indispensable, surtout jusqu’au moment où la Belgique reprenant son assiette naturelle, le ministère pourra juger dans quelle direction il doit pousser l’exécution de travaux publics. Il pourra alors mieux décider si la conservation entière de ce corps ou bien de quelques-uns de ses membres lui sera nécessaire ; jusque-là nous devons veiller à garder intacte sa conservation, c’est dans ce but que je voterai le subside demandé par le ministère, et ce ne sera pas par esprit de corps ou de camaraderie ; mais bien par esprit de prudence et de justice.

(Moniteur belge n°110 et n°, des 19 et 20 avril 1832) M. d’Elhoungne répond à M. d’Huart, que le personnel actuel est plus nombreux que sous le gouvernement français et sous le gouvernement des Pays-Bas, et au ministre de l’intérieur, que les conducteurs étaient compris au budget décennal dans l’allocation dont il a parlé. Quant à l’institution des ponts et chaussées en elle-même ; il renvoie M. Gendebien aux ouvrages de M. Ch. Dupin.

M. Serruys demande la parole et fait observer que M. d'Elhoungne, en consultant le budget annal et décennal, a oublié de lire la note du ministre, en réponse aux observations des sections. Il donne lecture de cette note, de laquelle il résulte que le nombre des ingénieurs était beaucoup plus grand que ne le ddit M. d'Elhoungne.

- La discussion est close.

L’amendement de M. d'Elhoungne, auquel se rallie M. Barthélemy, tendant à astreindre l’allocation à 80,000 fl. est mise aux voix et rejeté.

Le chiffre de 95,000 fl. proposé par la section centrale est adopté.

Article 3

« Art. 3. Canal de Charleroy à Bruxelles. Frais de surveillance et direction des travaux, salaires des piqueurs temporaires : fl. 4,600. »

M. Barthélemy fait observer qu’on a fait une réduction sur la navigation du canal d’Antoing de 35 cents par total de 5 lieues ; il demande si le ministre est disposé à faire la même réduction pour le canal de Charleroy, et dans le cas négatif, il annonce qu’il proposera un amendement dans ce sens.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je crois que cette question ne doit pas être traitée en ce moment dans cette assemblée. Si M. Barthélemy veut faire une proposition à cet égard, il peut la déposer ; mais elle devra suivre la filière ordinaire. Du reste j’ai consulté l’administration, et elle a trouvé la marche que j’ai suivie parfaitement juste.

M. Leclercq. - Nous avons déjà voté une somme considérable pour les traitements, les frais de bureau et de journée des employés des ponts et chaussées. Je m’étonne qu’on nous demande encore une allocation pour des frais de surveillance. Je demande une explication sur ce point, à M. le ministre.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Pareille demande m’a été faite par la section centrale, et je lui ai fourni des renseignements qui l’ont satisfaite, puisqu’elle ne propose aucune réduction. Il est des personnes exclusivement attachées à la surveillance du canal de Charleroy à Bruxelles parce qu’il est de l’intérêt de l’Etat de ne pas laisser détériorer des ouvrages qui lui seront restitués un jour.

M. Gendebien rappelle les nombreuses et très anciennes réclamations dont le canal de Charleroy a été l’objet et les vives instances avec lesquelles on en a a demandé l’exécution. On nous renvoie toujours, dit-il, aux calendes grecques au moment où nous nous croyons sur le point d’en jouir. Depuis la révolution où il était permis de croire qu’on se hâterait d’ouvrir cette voie de communication, attendue avec tant d’impatience, et si favorable aux charbonnages des environs de Charleroy ; mais on a vainement attendu jusqu’à ce jour. Je demande que le ministre nous dise d’où proviennent ces retards, et qu’il nous communique le cahier des charges, pour savoir s’il n’y a pas une clause en vertu de laquelle on puisse contraindre les entrepreneurs à livrer le canal au commerce.

Il me reste une observation à faire. La Sambre ne comporte qu’une navigation de 1 mètre 50 centimètres, tandis que le canal de Charleroy, profond de 2 mètres, comporte une navigation de 1 mètre 80 centimètres ; il y a donc entre la Sambre et le canal 30 centimètres de différence, et comme les neuf dixièmes des charbonnages de Charleroy doivent entrer dans la Sambre pour arriver jusqu’au canal, il y aura toujours un préjudice pour eux, qu’il faut de toute nécessité faire disparaître, en mettant en harmonie la navigation de la rivière avec celle du canal ; ou bien il faudra accorder une indemnité égale à la différence des chargements, à ceux qui viendraient de la Sambre, puisque les droits qu’ils paieraient seraient basés, non d’après ces chargements, mais d’après le jaugeage de leurs bateaux.

J’invite, je le répète, M. le ministre, à me communiquer le cahier des charges pour me mettre à même, s’il y a lieu, de faire une proposition, afin de forcer les entrepreneurs à ouvrir le canal à la circulation. Cette ouverture est de la plus grande urgence dans l’intérêt du commerce de Charleroy, et dans l’intérêt des consommateurs de la ville de Bruxelles.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je n’ai que peu de mots à dire pour répondre à l’honorable membre. L’ouverture du canal n’est nullement retardée, car ce ne sont pas les concessionnaires qui la retardent, mais les travaux qu’il est indispensable de faire, et qui seront, je crois, assez avancés à la fin du mois pour permettre la navigation.

Quant à la diminution des droits dont on a parlé, ceci est une question à part : le gouvernement provisoire jugera à propos de diminuer les droits sur les canal d’Antoing, je n’ai pas à critiquer cette mesure, mais elle a porté au trésor un préjudice de 172 mille fl. qui ont été perçus en moins. Quand il s’agit de sommes aussi considérables, je ne crois pas que l’on doive consentir à la légère à de pareilles diminutions, d’autant plus que la diminution des droits sur le canal d’Antoing ne donne pas à d’autres concessionnaires d’entreprises analogues de droits à une semblable diminution. Je me bornerai à ces simples explications pour le moment, me réservant d’en donner de plus amples, si on fait de la question l’objet d’une proposition à la chambre.

M. Gendebien. - M. le ministre n’a pas répondu à mes observations. Je lui ai demandé s’il n’y avait pas dans le cahier des charges une clause qui fixât un terme fatal aux entrepreneurs pour l’ouverture du canal, afin de les y contraindre. En attendant que justice fût faite, s’il s’élevait des difficultés, les commerçants de Charleroy auraient un canal tel quel. Il m’est revenu de ce pays que le retard provenait de difficultés existantes entre le ministre et l’entrepreneur, c’est là que je voudrais savoir. Si mes renseignements sont exacts, il en résulterait que ce dernier n’a pas fait ce qu’il devait faire, c’est sur cela que j’aurais voulu une réponse de M. le ministre, et qu’il me communiquât le cahier des charges.

M. Osy. - Je demande la parole.

M. le président. - Il y a encore beaucoup d’orateurs inscrits.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - J’ai déjà eu l’honneur de dire à la chambre que, dans le courant du mois, j’espérais que le canal serait ouvert. Jusqu’à présent, selon l’administration, il n’y a pas eu lieu d’insister pour l’ouverture de la navigation. Lorsque le terme accordé aux entrepreneurs sera expiré. Il y aura lieu de les contraindre.

M. Destouvelles fait observer que la section centrale n’a proposé aucune réduction, parce qu’elle a été d’avis que le personnel des ponts et chaussées ne devait pas être diminué. Ce serait sortir du cercle dans lequel s’est renfermée la section centrale que d’adopter une réduction, et ce serait en même temps faire un double emploi, puisque les 10,800 fl. qu’elle a retranchés ne l’ont été que parce qu’elle pensait que la chambre allouerait des fonds pour la surveillance du canal de Charleroy.

A la section centrale, on a demandé le contrat passé avec les concessionnaires, pour voir si ces frais de surveillance n’étaient pas à leur charge, et on s’est convaincu du contraire. Cela n’est pas étonnant, messieurs, parce que, la convention n’étant faite que pour 27 ou 28 ans, je crois, et après ce délai le canal devant être remis au gouvernement, celui-ci est intéressé à en surveiller avec soin l’entretien : tel est le motif qui a déterminé la section centrale à ne pas faire de réduction.

Quant à la nécessité d’établir au plus tôt la navigation, tout le monde en est pénétré ; mais je ne conçois pas que l’on puisse insister ici pour réduire les frais de péage : ce n’est pas en ce moment l’affaire de la chambre, car c’est une transaction à faire entre les concessionnaires et le gouvernement, puisque les premiers ont un contrat que vous n’avez pas le droit de modifier sans leur consentement. Tout ce qu’il serait possible de faire, ce serait d’engager le ministre de l’intérieur à s’aboucher avec les concessionnaires, pour voir s’il n’y a pas un moyen de s’entcnDestouvellesendre avec eux, afin d’abaisser les droits de péage au niveau de ceux du canal d’Antoing, ce qui me semble juste.

Si les concessionnaires demandaient une indemnité, le ministre pourrait ensuite venir demander à la chambre un crédit pour la payer. Agir autrement, c’est impossible, alors surtout que les concessionnaires ne peuvent défendre eux-mêmes leurs intérêts devant la chambre.

M. Barthélemy. - M. Destouvelles n’a pas bien saisi ma proposition, il n’est pas besoin de consulter les concessionnaires pour réduire les droits de 35 cents comme ils l’ont été pour le canal d’Antoing. Ce ne sont pas en effet les concessionnaires qui feront un sacrifice, ce sera le gouvernement (Rumeurs et agitation.) Oui, messieurs, ce sera le gouvernement. En effet, les concessionnaires se sont obligés à lui payer une somme annuelle de 288,000 florins. Eh bien, cette somme sera réduite à 85,000 fl., à quoi se portera le total des réductions de 35 cents par tonneau. (Aux voix ! aux voix !)

M. Dumont. - Messieurs, je n’ai pas l’intention de prolonger cette discussion, mais il m’est impossible de ne pas appuyer ce qu’a dit l’honorable M. Gendebien, sur l’état de souffrance des charbonnages de Charleroy ; il est de la plus grande urgence que le canal soit terminé au plus tôt ; et il doit rester peu de choses à y faire maintenant. Je crois que d’après le cahier des charges, les entrepreneurs s’étaient obligés à livrer le canal au commencement de 1832, sous des peines pécuniaires ; il faut les contraindre s’ils s’y refusent.

Je ne peut passer sous silence ce qu’a dit M. le ministre, que l’abaissement du droit pour le canal d’Antoing, ne donnait pas le droit à d’autres concessionnaires d’obtenir la même faveur. Messieurs, le canal de Charleroy a été établi sur les mêmes bases que le canal d’Antoing, on n’a pas entendu favoriser l’un aux dépens de l’autre, et ce serait évidemment préjudicier au canal de Charleroy que de ne pas lui accorder les avantages accordés à l’autre.

L’orateur termine en conseillant au gouvernement de racheter la concession et de mettre l’entreprise en adjudication, en faveur de celui qui établirait les péages les plus bas.

M. Osy. - Le canal de Charleroy devait être livré dans les cinq ans, et l’adjudication remonte à 1826, il y a donc un an que le canal devrait être livré au commerce. Il serait au reste fort facile de contraindre les adjudicataires, puisqu’aux termes du cahier des charges, ils ont dû fournir caution.

M. Leclercq ne trouve pas satisfaisante les explications données par le ministre ; il votera contre l’article.

M. Dubus justifie l’allocation et prouve qu’il n’y a pas de double emploi pour le personnel.

M. Gendebien. - Il ne s’agit pas de savoir s’il y a double emploi pour le personnel, mais s’il n’y a pas double emploi pour le traitement.

- Après quelques observations sans importance, faites par deux ou trois membres, l’article est mis aux voix et adopté.

La séance est levée à 2 heures, pour être reprise à 6 heures.

Noms des membres qui n’ont pas répondu à l’appel nominal : MM. Boucqueau de Villeraie, Bourgeois, Coppens, Corbisier, Dams, Ch. De Brouckere, de Foere, d’Elhoungne, F. de Mérode, W. de Mérode, de Nef, de Robaulx, Desmanet de Biesme, Devaux, Dewitte, de Woelmont, d’Hoffschmidt, Dubus, Dugniolle, Dumortier, Fallon, Fleussu, Gelders, Helias d’Huddeghem, Jacques, Jaminé, Lebeau, Lebègue, Leclercq, Legrelle, Mary, Nothomb, Pirmez, Polfvliet, Poschet, Rouppe, Seron, Serruys, Thienpont, Ullens, Van Meenen, Verdussen, Vergauwen, Ch. Vilain XIIII, H. Vilain XIIII, Watlet.

Noms des membres absents sans congé : MM. Boucqueau de Villeraie, Dams, Ch. de Brouckere, de Foere, W. de Mérode, F. de Mérode, de Nef, de Robaulx, Devaux, Gelders, Jacques, Jaminé, Lebègue, Legrelle, Poschet, Seron.


La séance est ouverte à six heures un quart.

Appel nominal et lecture du procès-verbal

Après l’appel nominal, le procès-verbal de la précédente séance est adopté.

Projet de loi portant le budget du ministère de l'intérieur de l'exercice 1832

L’ordre du jour est la suite de la discussion du budget de l’intérieur.

Discussion du tableau des crédits

Chapitre III. - Travaux publics

Article 4

« Art. 4. Canal de Pommereoul à Antoing. Frais d’entretien et frais de surveillance : fl. 38,900. »

La section centrale propose de n’allouer que 36,000 fl.

- Après un léger débat, cette réduction est adoptée.

Article 5

« Art. 5. Canalisation de l’Escaut. Construction d’une écluse à sas à Antoing, et terrassement en amont dans l’Escaut : fl. 58,000. »

La section centrale propose la suppression, quant à présent, de cet article.

- Cette suppression est mise aux voix et> adoptée.

Article 6 (devenu article 5)

« Art. 6. Canalisation de la Sambre. Frais de surveillance : fl. 4,400. »

M. Barthélemy dit que les travaux de canalisation de la Sambre ont été détestablement faits, et il en attribue la faute aux ingénieurs.

M. Desmanet de Biesme et M. Dumont font remarquer que c’est précisément parce que les travaux ont été mal faits que la surveillance du gouvernement, pour ce qui concerne cet objet, est très nécessaire. Du reste, ils justifient les ingénieurs du waterstaet, en disant que le vice des travaux provient surtout de ce que le gouvernement ne les a pas aidés.

- Le chiffre de 4,400 fl. est adopté.

Article 7 (devenu article 6)

« Art. 7. Canal de Bois-le-Duc à Maestricht. Entretien et réparation des digues, salaires des éclusiers, etc. : fl. 15,200. »

- Cette allocation, admise par la section centrale, est adoptée.

Article 8 (devenu article 7)

« Art. 8. Canal de Gand à Terneuzen. Même détail : fl. 30,050. »

- Ce chiffre est également adopté.

Article 9 (devenu article 8)

« Art. 9. Ports d’Ostende, de Nieuport et côté de Blankenberg : fl. 88,790. »

La section centrale propose une majoration de 48,000 fl. pour des travaux de creusement au port d’Ostende.

M. Serruys, comme habitant de la ville d’Ostende, donne des détails sur la manière dont se doit faire le curement du bassin de réserve ; il dit que depuis plusieurs années ce curement n’a pas eu lieu, de sorte que le bassin se trouve presque entièrement rempli de sable, et il pense que la chambre n’hésitera pas à accorder l’allocation qu’on lui demande pour un objet aussi utile.

M. Delehaye demande si, dans les 99,790 fl. primitivement demandé, le ministre n’avait pas entendu comprend les frais de creusement et d’approfondissement dont il s’agit.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Il suffit de lire la note qui accompagne le budget de l’intérieur pour voir que cet objet n’était pas compris dans l’allocation, et le rapport de la section centrale en est une nouvelle preuve.

M. le ministre, remontant ensuite à l’origine des travaux du port d’Ostende, qui furent faits par le gouvernement français, dit que le bassin n’a pas reçu toute la profondeur nécessaire, et qu’aujourd’hui que les circonstances ont donné une haute importance à ce port, il est d’une extrême urgence d’achever ce creusement. Il donne des explications sur les écluses de chasse, et dit qu’il serait aussi besoin à Ostende d’une jetée d’ouest, mais qu’on n’en parle pas en ce moment, parce qu’elle coûterait une somme assez considérable.

M. Barthélemy. - M. le ministre vient de nous parler des écluses de chasse, mais il me semble que ces écluses ne répondent pas à leur destination.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - M. Barthélemy vient de relever une de ces objections banales, qu’on a faites pendant longtemps contre les écluses de chasse ; mais quand j’étais gouverneur des Flandres, j’ai fait très souvent lever ces écluses, et je puis dire qu’elles procuraient tous les résultats et les avantages qu’on en attendait.

- La majoration de 48,000 fl. est mise aux voix et adoptée.

Le chiffre total, s’élevant à 147,790 fl. est également adopté.

Article nouveau

M. d’Huart. - Messieurs, votre commission des pétitions vous proposa, le 20 janvier dernier, le renvoi à M. le ministre de l'intérieur d’une pétition adressée à la chambre par le comité chargé de la direction des travaux de construction de la route de Virton à Arlon, et tendant à obtenir un subside de 5,000 fl. pour l’achèvement de cette route.

Vous vous rappellerez qu’à l’occasion de ce rapport, dont les conclusions furent adoptées, je pris la parole et que j’eus l’honneur de vous dire que je me réservais de vous soumettre, lors de la discussion publique du budget du département de l’intérieur, un amendement ayant pour objet d’ouvrir, au chapitre III de ce budget, un crédit de 5,000 fl. destiné à l’achèvement de la route en question.

Je viens aujourd’hui vous proposer l’adoption de cet amendement, qui, je l’espère, ne rencontrera pas d’opposition de la part du ministère, et à l’appui duquel j’ajouterai quelques considérations.

Une distance de plus de cinq lieues sépare Virton et Arlon, deux des villes les plus populeuses de la province du Luxembourg ; de nombreuses relations de commerce existent et doivent nécessairement exister entre ces villes, parce que d’une part, tout ce que la contrée de Virton consomme en denrées coloniales, le sel et généralement tout ce qu’elle tire de la Belgique, doit lui parvenir par Arlon qui se trouve sur la route directe des Pays-Bas ; de l’autre, parce que le pays qui avoisine Virton, et qui produit plus de céréales qu’il n’en consomme, est obligé, pour vendre ses grains, de les conduire au marché hebdomadaire d’Arlon où les Ardennais proprement dits, qui en manquant, viennent s’en approvisionner. Mais ces relations de commerce n’ont lieu qu’à grands frais en tout temps, et principalement pendant la mauvaise saison, à cause de la difficulté des communications.

Depuis longtemps les habitants et surtout les administrations locales des communes circonvoisines avaient senti le besoin d’une route. Disposés à faire de grands sacrifices pécuniaires pour l’obtenir, ils reconnaissent cependant l’impuissance de leurs efforts s’ils n’étaient secondés par le gouvernement.

En 1827, dix communes des districts de Virton et d’Arlon offrirent au gouvernement de se cotiser entre elles jusqu’à concurrence d’une somme de 30,000 fl. à affecter à la construction de cette route, sous la condition que le surplus des frais que pourrait nécessiter son entier achèvement seraient couverts par le trésor, ainsi que cela s’était pratiqué dans plusieurs cas tout à fait analogues.

Le gouvernement autorisa cette dépense, et les communes, au moyen de coupes extraordinaires de bois dont elle tirent leur unique revenu et en épuisant leurs ressources pour un grand nombre d’années, formèrent le fonds de 30,000 fl. qui se trouve aujourd’hui insuffisant pour compléter les travaux de la route de Virton à Arlon et pour l’achèvement desquels on demande un subside de 5,000 fl.

J’ose espérer, messieurs, que vous ne refuserez pas ce minime subside, si vous daignez considérer que sans cela la dépense de 30,000 fl., dont je viens de parler, tournerait à pure perte pour les communes qui, rigoureusement parlant, ne possèdent pas de moyens suffisants pour opérer le complément des travaux, évalué de 6 à 7 mille florins par les hommes de l’art ; que ces communes n’ont fait ladite dépense de 30,000 fl. que sur la foi des errements du gouvernement précédent, dont elles eussent infailliblement obtenu le secours qu’elles réclament aujourd’hui ; qu’enfin, en leur accordant une somme de 5,000 fl. vous améliorerez sensiblement le sort d’une population de 30 à 40 mille âmes, en même temps que vous ferez chose utile au commerce en général ; car Virton, qui se trouve sur la frontière, est avantageusement placée pour l’exportation des denrées coloniales en France. Dans l’état actuel des choses il s’en fait déjà une forte contrebande et, si les communications étaient plus faciles, elle s’augmenterait considérablement.

Messieurs, je ne terminerai pas sans vous faire remarquer, ainsi que l’a déjà fait dans une de vos précédentes séances, mon honorable collègue M. d’Hoffschmidt, que le Luxembourg perçoit une très minime part des libéralités du budget ; aucun de ces établissements qui amènent l’agrément et l’aisance ne s’y trouve fixé : je n’en accuse personne, parce que je sais que c’est à la position géographique et aux faibles ressources de cette province qu’il faut l’imputer. Mais si, dénuée des avantages dont la nature a largement doté les autres parties de la Belgique, elle est en outre par cela même privée des avantages immenses que procure le siège de grandes institutions publiques, la justice réclame qu’on apporte des compensations et des dédommagements à sa situation malheureuse.

C’est sous les auspices de ce principe d’équité que je recommande à votre bienveillance l’amendement dont je viens de vous entretenir, et dont l’adoption n’aurait pas le vice de favoriser exclusivement une fraction du pays, puisqu’il aurait aussi pour résultat d’accroître le développement du commerce et de l’industrie en général.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je crois que cet amendement ne peut rencontrer de difficultés dans la chambre, car il s’agit d’un engagement pris envers des communes par le gouvernement précédent. Il en est de même pour une route de la province de Namur.

M. Delehaye. - Je ne connais nullement la route dont il s’agit, et je pense que la plupart des membres se trouvent dans le même état que moi. Or, que dirait M. d’Huart, si j’allais proposer à mon tour de faire une route de tel à tel village ? Evidemment il voterait contre ma proposition, ou voudrait des éclaircissements. Eh bien ! de deux choses l’une : ou son amendement dont être écarté, ou bien il doit être renvoyé à une commission pour qu’elle nous fasse son rapport.

M. d’Elhoungne parle aussi contre l’amendement.

M. Nothomb. - Les honorables préopinants qui s’opposent à l’amendement n’ont pas saisi le véritable état de la question ; il ne s’agit pas de savoir si telle route est utile ou non, est provinciale ou communale : y a-t-il engagement, tacite ou formel, de la part du gouvernement ? Voilà la question, et l’affirmative est incontestable. M. le ministre de l'intérieur l’a reconnu et sa déclaration doit satisfaire chacun. Les archives sont à Luxembourg ou à La Haye ; à défaut des pièces authentiques, je puis invoqué la notoriété publique (l’orateur donne lecture d’un passage de l’exposé de la situation du grand-duché en 1828.) Les communes ont rempli leurs engagements, elles ont fait des coupes extraordinaires, leurs ressources sont épuisées, elles ont dépensé 30,000 fl. ; c’est au gouvernement à tenir aujourd’hui ses engagements. Le subside avait été évalué positivement à 15,000 fl. On ne réclame aujourd’hui que le tiers de la somme.

Après un léger débat, et sur la proposition de M. Lebeau, la proposition de M. d’Huart est renvoyée à la section centrale, pour en faire un rapport à la chambre.

Article nouveau

M. Fallon. - Messieurs, moyennant un subside de 36,000 fl. sur le trésor, que le gouvernement précédent l’obligea de verser dans la caisse de la province de Namur, et de centimes additionnels sur la contribution foncière que cette province s’imposé, elle entreprit et exécuta la route de deuxième classe de Charleroy vers Rocroy.

A l’époque de la révolution, ce subside n’avait pas encore été mis à sa disposition, quoique les travaux de la route se trouvassent entièrement achevés et payés sur les fonds provinciaux.

Le 11 février 1831, l’administration provinciale s’adressa au chef du comité de l’intérieur pour obtenir la restitution de cette avance.

Le 15 même mois, il fut répondu qu’il était impossible de donner suite à la demande pour le moment, attendu que la somme réclamée n’avait pas été portée au budget du premier semestre de l’année courante, mais qu’elle serait comprise dans le budget du deuxième semestre.

Le 6 mai, au moment où le congrès allait s’occuper de la formation du budget pour ce second semestre, l’administration provinciale rappela cet objet à l’attention du ministre de l’intérieur.

Ce budget n’ayant pas été adopté, cette administration s’adressa de nouveau, le 5 décembre, au ministère de l’intérieur ; mais, par une fatalité inconcevable, sa réclamation fut encore oubliée dans la rédaction du budget de 1832.

Cependant cette dette est liquidée ; elle est incontestablement due ; elle est formellement reconnue, et la province de Namur en a le plus urgent besoin pour pouvoir remplir les engagements qu’elle a contractés, sous la foi de ce recouvrement, pour les travaux qu’elle a entrepris sur deux routes provinciales qui restent en souffrance.

Je demande, messieurs, la rectification au budget de l’omission qui y a été faite au préjudice de la province de Namur, et je propose en conséquence l’amendement suivant :

« Chapitre III., article 10. Subside pour construction de route de deuxième classe. Subside à la province de Namur pour construction de la route de deuxième classe de Charleroy vers Rocroy : fl. 30,000. »

- Cette proposition est, après un très court débat, renvoyée comme celle de M. d’Huart à la section centrale.

Article 10 (devenu article 9)

« Art. 10. Somme éventuelle pour frais de levée des plans, nivellements, opérations diverses sur les terrains pour les divers projets de communications à ouvrir : fl. 4,000. »

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je demande que cette somme soit majorée de 2,000 fl., attendu que, depuis la confection du budget, de nouvelles dépenses ont été jugées nécessaires : telle est celle de la canalisation de la Sambre, pour laquelle il nous faudra une somme d’au moins 900 fl. Il y a quelques dépenses que je n’énumérerai pas, d’autant plus que ceci n’étant qu’éventuel, si la somme n’est pas nécessaire, elle ne sera pas dépensée.

M. Delehaye s’oppose à l’allocation supplémentaire. Il dit que la somme de 4,000 fl. suffit, et qu’une majoration a été réellement faite, puisque dans cette somme se trouvait comprise celle nécessaire à la canalisation de l’Escaut, à laquelle la chambre a renoncé.

M. de Theux. - C’est une erreur, la chambre n’a rien décidé quant à cette canalisation ; elle a seulement décidé que l’écluse ne serait point faite.

M. Mary appuie l’allocation supplémentaire, par le motif qu’il ne faut pas lésiner pour avoir les plans de certaines routes à ouvrir, puisque c’est par ce moyen que l’on peut procurer au commerce des débouchés plus faciles.

- La somme de 6,000 florins demandée par le ministre est allouée.

Chapitre IV. Palais et édifices de l’Etat

Article unique

« A. Entretien des palais à Bruxelles, à Laeken et à Anvers : fl. 44,196. »

- Cette dépense, étant à charge de la liste civile, est supprimée.


« B. Entretien des bâtiments et édifices de l’Etat, et location de bâtiments : fl. 12,508. »

- Cette allocation est votée sans discussion ni amendement.


« C. Traitement des architectes conducteurs : fl. 9,375. »

La section centrale a proposé de réduire l’allocation à 3,000.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux) demande que la somme soit portée à 4,000 fl.

M. Osy combat cette proposition ; il fait observer que les architectes sont tout à fait inutiles, et que d’ailleurs ils doivent être à charge de la liste civile.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - On n’a pas pu s’arranger avec la liste civile, pour la liquidation à faire du traitement de ces employés qui seront à sa charge ; mais, dans tous les cas, il faut leur payer les appointements des quatre premiers mois de l’année ; il y a d’ailleurs des bâtiments de l’Etat, en assez grand nombre, qui ne sont pas à charge de la liste civile.

M. Brabant. - Nous avons donné un effet rétroactif à la loi sur la liste civile ; les architectes doivent passer à sa charge dès le jour auquel remonte l’allocation faite en sa faveur. Quant aux bâtiments de l’Etat qui n’entrent pas dans la liste civile, ils peuvent être surveillés par les ingénieurs des ponts et chaussées.

M. H. de Brouckere appuie les observations de M. Brabant.

- Une assez longue discussion s’engage pour savoir si les ingénieurs des ponts et chaussées peuvent servir d’architectes ; plusieurs orateurs parlent pour ou contre cette opinion.

M. Osy propose de réduire l’allocation à 1,000 fl. L’honorable membre soutient que les ingénieurs sont aussi nécessairement architectes. Quand ils font creuser des canaux, dit-il, il font bien bâtir des maisons d’éclusier. (Hilarité générale.)

- L’amendement de M. Osy est mis aux voix et rejeté

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux) se rallie à celui de la section centrale, qui est adopté.

Chapitre V. Service des mines

Les trois premiers paragraphes sont adoptés sans discussion en ces termes :

« A. Traitements des ingénieurs : fl. 15,100. »

« B. Frais pour déplacement, de bureau : fl. 6,800. »

« C. Traitements des conducteurs : fl. 13,400. »


« D. Somme éventuelle pour levée des plans et dépenses imprévues : fl. 700. »

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux) demande que cette somme soit majorée de 2,000 fl. pour comblement des bures ouvertes en infraction aux lois dans les premiers temps de la révolution.

M. Gendebien. - Je ne conçois pas comment l’Etat pourrait être chargé de payer une telle dépense ; elle incombe tout entière aux propriétaires du sol ou aux exploitants.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Plusieurs exploitants sont insolvables et ne pourraient fournir aux frais. Il faut cependant bien que l’Etat puisse les faire combler, sauf à poursuivre les exploitants en remboursement si par la suite ils pouvaient payer.

- Cette proposition, soutenue par M. le ministre de la justice (M. Raikem), M. Jamme et M. Nothomb, et combattue par M. Gendebien, M. Fleussu et M. Lebeau, est rejetée.

- La séance est levée à neuf heures et demie.