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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 30 avril 1856

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1855-1856)

(Présidence de M. de Naeyer, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1272) M. Ansiau procède à l'appel nominal à 1 heure et un quart.

M. Maertens donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la Chambre

M. Ansiau présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Le conseil communal de Moll prie la Chambre d'autoriser la concession d'un chemin de fer d'Herenthals, par Maeseyck ou Venloo vers Dusseldorff. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à la concession de plusieurs lignes de chemin de fer.


« Les membres de l'administration communale, des industriels, cultivateurs et autres habitants d'Anderlues demandent que le projet de loi relatif au chemin de fer de Luttre à Denderleeuw contienne une disposition qui autorise le gouvernement à concéder une ligne directe de Marcienne à Baume, reliant les bassins houillers de Charleroi et du Centre et se prolongeant éventuellement par le Rœulx et Jurbise. »

- Même décision.


« Le sieur Borré demande une récompense pour services rendus en 1830. »

- Renvoi à la commission des pétitions.

Ordre des travaux de la Chambre

M. Lelièvre (pour une motion d’ordre). - Je demande que la Chambre veuille bien mettre à la suite de l'ordre du jour la discussion du projet de loi sur le payement des traitements d'attente, le rapport ayant été déposé depuis longtemps.

M. Rodenbach. - Je m'oppose formellement à ce qu'on mette à l'ordre du jour le projet de loi relatif aux traitements d'attente, ce d'autant plus qu'il y a des membres qui ont fait un travail important, qui ont consacré un mois ou deux à combattre les prétentions dont il s'agit, et qui sont absents en ce moment.

On ne peut ainsi enlever d'assaut des sommes considérables et porter préjudice au trésor public, sans avoir mûrement et consciencieusement étudié cette grave question.

M. Vander Donckt. - J'appuie les observations de l'honorable M. Rodenbach. Il n'y a réellement pas lieu de mettre à l'ordre du jour un projet de loi qui est ajourné depuis des années. L'honorable M. Dumortier, qui a fait un travail « ex-professo » sur cet objet, est absent. En l'absence de cet honorable membre qui est capable de nous éclairer beaucoup sur un projet qui, comme je l'ai dit, n'exige aucune urgence, je demande qu'on remette cette discussion à la session prochaine.

M. Lelièvre. - e projet de loi dont nous nous occupons a un caractère incontestable d'urgence ; il s'agit en effet de l'exécution de condamnations prononcées depuis longtemps par les tribunaux ; les intéressés attendent leur payement et bien certainement il y a urgence à ce qu'on statue snr semblables réclamations. Ne perdons pas de vue que des particuliers perdent chaque jour les intérêts de créances reconnues légitimes.

L'absence de l'honorable M. Dumortier ne saurait suspendre les travaux de la Chambre ; nous avons attendu son retour depuis un mois, mais comme son absence peut encore se prolonger, il est impossible de laisser ajourner jusqu'à la prochaine session l'examen d'un projet urgent.

Du reste, je me borne à demander que la discussion soit mise à la suite de l'ordre du jour, et certes cette proposition n'a rien d'exorbitant. Au surplus j'ai exposé les motifs qui ne permettent pas de retarder plus longtemps une discussion réclamée par des intérêts importants, j'ai fait mon devoir, la Chambre fera le sien.

M. Rousselle. - J'entends dire à mes côtés que rien ne presse de décider cette question. Quant à moi, je déclare que c'est très urgent.

Les créanciers qui ont des jugements passés en face de chose jugée et qui ont consenti à des transactions en abandonnant tous les intérêts courus, pourraient venir plus tard nous réclamer la totalité de leur créance et des intérêts, si l'on persiste dans l'espèce de déni de justice qui les frappe.

Il faut que l'on décide d'une manière ou d'une autre. J'appuie donc la proposition de l'honorable M. Lelièvre.

M. Vander Donckt. - Je persiste à croire que le moment est mal choisi pour insister sur la discussion d'un projet de loi qui exige toute notre attention et le plus sérieux examen. Ce n'est pas à la veille de notre séparation qu'il faut venir grossir notre ordre du jour. Nous n'épuiserons peut-être pas les objets qui s'y trouvent déjà portés et plusieurs objets importants seront renvoyés à la session prochaine.

Un des premiers qui peuvent être le plus facilement remis c'est celui sur les toelagen et les wachtgelden ajourné depuis nombre d'années et qui exige, comme je l'ai dit, des études toutes spéciales.

M. Rodenbach. - Les créanciers dont il s'agit ont reçu ce que la législature a accordé tous les ans pour les toelagen ; ce sont des suppléments qu'ils réclament. Puisqu'ils ont reçu ce que la législature a voté, il me paraît qu'ils doivent pouvoir attendre qu'on ait examiné cette question qui est de la plus haute importance.

D'ailleurs c'est une discussion qui durera bien huit jours.

Nous avons à discuter d'autres projets d'une plus grande importance, les sept concessions de chemins de fer qui sont déjà à l'ordre du jour et dont il faut s'occuper avant la fin de la session. Les chemins de fer donnent de l'ouvrage à de nombreux ouvriers ; la vie animale est chère et les bras demandent à être occupés promptemenl. Je le répète, il y a urgence de s'occuper des nouvelles voies ferrées projetées.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, il serait extrêmement désirable que la Chambre pût s'occuper de l'objet dont il vient d'être question. Un ajournement trop prolongé pourrait être considéré comme un déni de justice. Il est vrai qu'il se trouve maintenant à l'ordre du jour des projets d'une très haute importance et qui paraissent devoir obtenir la priorité ; cependant si la Chambre avait encore quelques moments dont elle pût disposer après le vote de ces projets, elle ferait acte de justice en s'occupant alors de celui dont les honorables membres viennent de parler.

Je demanderai donc que cet objet soit mis à la suite de l'ordre du jour.

M. Lelièvre. - La proposition que j'ai faite est entièrement la même que celle de M. le ministre des finances. Elle est fondée sur les motifs les plus sérieux. Les intéressés ont obtenu des décisions judiciaires ; ces décisions sont paralysées. Eh bien, ce serait consacrer un véritable déni de justice que de retarder une discussion qui doit mettre fin aux entraves qu'éprouve l'exécution des arrêts de la justice. Lors que des arrêts de la cour de cassation ont reconnu irrévocablement la légitimité des créances dont il s'agit, n'y a-t-il pas urgence à ce que le sort des créanciers soit fixé dans le plus bref délai ? Pour moi, je connais peu de projets aussi urgents que celui dont il s'agit, puisque tout retard porte atteinte à des intérêts que la Chambre doit être la première à faire respecter. En conséquence je demande qu'on fasse droit à ma proposition appuyée par le gouvernement.

Les opposants n'ont rien dit de sérieux pour suspendre un débat qui par la nature même réclame une prompte solution.

(M. Delehaye remplace M. de Naeyer au fauteuil.)

- La proposition de M. Lelièvre est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.

Projet de loi relatif à la concession du chemin de fer de Luttre à Denderleeuw

Motion d'ordre

M. le président. - Voici un amendement relatif au chemin de fer de Luttre à Denderleeuw :

« A partir du premier juillet 1856, les péages sur le canal de Charleroi seront perçus, dans la proportion des distances parcourues.

« (Signé) baron Osy, baron de Steenhault, Ansiau, Faignart, Manilius, Matthieu, Van Cromphaut. »

M. Osy (pour une motion d'ordre). - Comme la session est déjà très avancée, nous avons cru devoir rattacher notre proposition au projet de chemin de fer de Luttre à Denderleeuw ; je demande, en conséquence, le renvoi de la proposition à la section centrale qui a examiné ce projet.

Il y a des précédents.

M. Rousselle. - Messieurs, je crois que nous ne pouvons pas renvoyer l'amendement proposé à la section centrale, avant que la loi qu'il s'agit d'amender soit mise en discussion ; je ne conteste pas que ce sera le parti qu'il faudra prendre ; mais je ne pense pas que la Chambre doive s'occuper de cet objet quant à présent.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, la proposition qui a été déposée sur le bureau n'est pas un amendement au projet de chemin de fer de Luttre à Denderleeuw, c'est une proposition émanant de l'initiative parlementaire ; il avait été convenu hier que ces messieurs déposeraient une proposition de loi qui serait renvoyée dans les sections pour en autoriser la lecture. Toute autre marché ferait naître de très graves inconvénients. Par un moyen plus ou moins subtil, on parviendrait à entraver la prérogative du gouvernement ; vous le forceriez, pour obtenir une loi qu'il croirait utile, d'accepter une disposition étrangère à son objet et qu'il n'approuve pas.

Je le répète, la proposition ne peut pas être considérée comme un amendement ; c'est en réalité un projet qui doit être considéré comme émanant de l'initiative parlementaire.

M. Manilius. - Messieurs, je répondrai à l'honorable M. Rousselle que pour le moment il s'agit uniquement de savoir si l'amendement sera renvoyé à la section centrale.

Le droit de déposer cet amendement ne peut pas nous être contesté.

Il y a un projet de loi ; ce projet de loi doit donner naissance à une route ; sur cette route seront établis des péages ; or nous apportons une modification à d'autres péages qui sont en corrélation avec ceux qu'il s'agit d'établir. Notre droit est donc évident. Pour user de ce droit, nous nous sommes conformés au règlement ; nous ayons déposé sur le bureau un amendement à un projet de loi présenté par le gouvernement ; jusque-là la marche que nous avons suivie est irréprochable, quoi qu'en dise M. le ministre des finances.

(page 1273) Maintenant, la Chambre jugera s’il lui convient ou non de renvoyer notre amendement à la section centrale ; l'honorable M. Osy a proposé ce renvoi ; eh bien, que la Chambre se prononce ; si le renvoi est ordonné, la section centrale examinera et fera un rapport. Quant à présent, nous ne préjugeons absolument rien.

Je le répète, nous nous sommes conformés, pour les préliminaires de notre proposition, au droit que nous tenons de la Constitution ; nous avons suivi la marche prescrite par le règlement ; ce qu'il s'agit uniquement de décider aujourd'hui sur la proposition de M. Osy, c'est de savoir si l'amendement, conforme aux us de la chambre, conforme à la Constitution, sera renvoyé à la section centrale. Pour moi, je crois que ce renvoi peut présenter de l'utilité, parce qu'il ne préjuge rien ; la section centrale examinera ; si cela est contraire à ses bonnes intentions, elle en proposera le rejet.

Si hors de la discussion nous avons à développer notre proposition et que nous ne donnions pas de bonnes raisons pour la justifier, vous ne l'adopterez pas. La question est de savoir si notre proposition doit rester déposée sur le bureau ou être renvoyée à la section centrale ; moi, je demande que le renvoi soit ordonné.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, l'article 34 de notre règlement porte que chaque membre a le droit de faire des propositions et de présenter des amendements. Il y a donc une différence à faire entre une proposition et un amendement. Un amendement implique une modification à un projet présenté et s'y rapportant directement ; il ne peut pas consister dans un projet ayant un objet tout autre.

Ici à propos d'un projet de chemin de fer dont il s'agit d'autoriser la construction, on propose une mesure dont l'effet serait de diminuer de 400 mille francs environ le produit du canal de Charleroi.

C'est là une proposition de loi nouvelle et non un amendement au projet de chemin de fer présenté par le gouvernement ; il serait contraire au règlement de l'y rattacher. On comprend parfaitement pourquoi le règlement a fait une distinction entre la proposition de loi et l'amendement ; il a voulu laisser chaque pouvoir libre dans son action, et empêcher que par un moyen subtil on ne vînt entraver la marche régulière des affaires, en introduisant dans un projet une proposition ayant un objet tout différent.

Je prie la Chambre de méditer sur les graves conséquences qui pourraient résulter dans beaucoup de circonstances de l'accueil qui serait fait à la forme dans laquelle la proposition des honorables membres a été produite.

M. Osy. - J'ai demandé la parole pour répondre à l'honoraole M. Rousselle qui disait qu'on ne pouvait pas présenter d'amendement à un projet de loi avant qu'il fût mis en discussion. Je rappellerai que M. Julliot a proposé un amendement au projet de loi relatif à la récusation des magistrats, bien que ce projet ne fût pas en discussion, et que son amendement a été renvoyé à la section centrale.

On prétend que notre proposition n'a aucun rapport avec le projet auquel nous le rattachons ; je répondrai que le chemin de fer de Luttre à Denderleeuw donne un avantage à Charleroi et que nous voulons en faire un au Centre. Voilà la connexité qui existe entre les deux objets, et ce qui nous fait demander le renvoi à la section centrale. Si la section centrale ne partage pas notre opinion, elle écartera notre proposition, qui alors suivra la filière ordinaire.

M. Julliot. - La comparaison que M. Osy a voulu faire entre la proposition qu'il a signée et l'amendement que j'ai proposé au projet de loi concernant la récusation des magistrats n'est pas exacte. D'abord mon amendement se rapportait directement au projet auquel je le rattachais et ensuite ce projet était alors soumis à l'examen de la section centrale.

Tout le monde veut emporter les questions de haute lutte, tantôt c'était l'honorable M. Lelièvre qui voulait à toute force faire discuter son affaire, maintenant c'est M. Osy qui veut faire discuter une proposition nouvelle à propos d'un projet avec lequel elle n'a aucun rapport et qui n'est pas en discussion.

M. Rousselle. - Il ne me reste pas autre chose à dire, sinon que la proposition des honorables membres n'a pas d'autre but que de soustraire aux sections de la Chambre l'examen d'une question très grave. Nous ne voulons pas leur enlever leur droit d’initiative, mais qu'ils déposent une proposition de loi qui suivra les formes prescrites par notre règlement.

M. de Steenhault. - On prétend que notre proposition n'a aucune connexité avec le projet auquel nous le rattachons, nous répondons qu'en adoptant ce projet on romprait l'équilibre entre les deux centres de production et que beaucoup de membres ne pourraient consentir à la construction du chemin de fer dont il s'agit qu'à la condition d'une compensation en faveur du Centre.

Du reste, on vous l'a déjà rappelé, la Chambre a admis des propositions dans des cas identiques lorsqu'elle s'est occupée de la grande loi de 1851.

- Le renvoi à la section centrale est mis aux voix. Il n'est pas adopté.

Projet de loi accordant des crédits supplémentaires et extraordinaires au budget du ministère de l’intérieur

Rapport de la section centrale

M. Jacques. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi tendant à allouer des crédits supplémentaires et extraordinaires au département de l'intérieur.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport et le met à la suite des objets à l'ordre du jour.

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l’exercice 1856

Discussion des articles

Chapitre II. Ponts et chaussées. Bâtiments publics

Discussion générale

M. le président. - La discussion continue sur l'ensemble du chapitre II « Ponts et chaussées, Bâtiments civils. »

M. Rousselle. - Messieurs, j'applaudis à la résolution qu'a prise l'honorable ministre des travaux publics de soumettre aux conseils provinciaux, dans leur prochaine session, un projet de classification des routes, toujours retardé, malgré les prescriptions d'une loi de 1835 et une disposition très formelle de la loi organique de 1836 sur les provinces. L'honorable ministre nous a dit hier qu'il n'était pas certain que cette classification satisfît tout le monde, que c'était un travail très difficile. Je le crois aussi, et ce travail deviendra d'autant plus difficile qu'on le prolongera davantage.

L'honorable M. Dechamps, alors ministre des travaux publics, avait déjà, en 1845, soumis aux conseils provinciaux un projet de classification. Cette classification n'a pas été adoptée par la généralité des provinces, et depuis lors il n'a plus rien été fait sur cet objet important.

Messieurs, le département des travaux publics, au moins dans mon opinion, suit depuis longtemps, relativement à la construction des routes nouvelles, un système qui va à l'encontre des véritables intérêts de l'Etat.

Déjà, en 1841, lorsqu'on a discuté la loi sur les chemins vicinaux, dans laquelle l'honorable ministre de l'intérieur avait introduit une disposition pour les chemins vicinaux de grande communication, le ministre disait qu'il restait très peu de routes générales à faire. Depuis lors, on en a fait une immensité, et nous arrivons à ce résultat que l'on ne fait plus, depuis longtemps, au compte de l'Etat, que des routes provinciales et même des routes communales qui auraient dû être construites directement par les provinces avec des subsides de l'Etat. Je suis persuadé que l'honorable ministre, lorsqu'il s'occupera de son projet de classification, éprouvera de très grands embarras à faire classer dans les routes provinciales les routes qui ont été faites depuis 1841, et qui, pour, la plupart, étant d'un intérêt fort restreint, ne peuvent continuer de rester à la charge de l'Etat.

Voilà, messieurs, ce que j'avais à dire relativement à la classification.

J'ai peu de chose à ajouter pour appuyer la proposition de la section centrale, relativement à la réduction de 400,000 francs sur le chiffre demandé par le gouvernement pour construction de routes nouvelles, après ce qu'ont dit hier les honorables membres qui ont parlé dans le même sens.

La section centrale s'est trouvée dans cette position.

Le projet primitif de 1856 qu'avait présenté M. le ministre des travaux publics, ne portait, pour cette construction que la somme de 090,000 francs, somme qui était la même que celle qui a été allouée les années précédentes. Le projet de budget rectifié, présenté au mois de février dernier, comportait en plus une somme de 400,000 fr.

L'honorable ministre, en proposant cette augmentation, a manifesté la crainte que l'année 1856 ne se passât dans les mêmes circonstances calamiteuses que l'année 1855. Je crois que cette crainte ne peut plus exister.

Nous sommes en présence d'espérances qui doivent nous tranquilliser.

Maintenant, messieurs, depuis que j'ai l'honneur de siéger à la Chambre, c'est la première fois que l'on propose un budget en déficit. La situation financière change certainement pendant le cours d'un exercice, mais la Chambre, depuis de longues années, n'a pas voté de budgets annuels de dépenses qui ne se balançassent par les recettes ordinaires.

Or, si l'on ne cherche pas à faire toutes les économies praticables sur le budget des travaux publics de cette année, si l'on ne fait pas des réductions, la Chambre votera un budget en déficit de plus de 2 millions. (Interruption.) L'honorable M. Delfosse me fait observer avec raison que ce n'est pas une économie que nous demandons, que c'est le maintien du statu quo.

Je pense, messieurs, que la situation actuelle n'est pas une situation régulière.

Une autre considération, c'est qu'il ne reste pour achever toutes les routes qui sont décrétées ou en cours d'exécution, et il y en a, comme vous l'avez vu par le projet de budget, une très grande quantité, il ne faut plus que 2,200,000 fr. Avec 900,000 fr. chaque année, en deux ans et demi l'on aura terminé toutes ces routes. Quand je dis en deux années, c'est y compris l'année 1856.

Ainsi, au commencement de 1858, il ne restera plus à dépenser que 400,000 ou 500,000 fr. pour terminer toutes les routes décrétées jusqu'ici. Je ne vois pas qu'il faille gagner cette demi-année et ce serait la gagner que de voter la somme de 1,300,000 fr.

D'autre part, messieuis, toutes les routes qui pourront s'exécuter pendant la campagne de 1856 n'ont pas besoin d'une si forte somme. Je crois qu'il faut achever toutes les routes qui sont commencées. Mais il y en a beaucoup dont l'exécution n'est pas encore entreprise. Il y a des sections de routes pour lesquelles les indemnités de terrains ne sont pas même réglées. Ces routes ne pourraient donc se faire cette année, alors même que vous augmenteriez le crédit de 400,000 fr.

(page 1274) M. David. - Je me suis opposé à l'augmentation d'allocation demandée, par les raisons que vient d'indiquer l'honorable M. Rousselle. Il ne me reste que quelques considérations à ajouter.

Au paragraphe « a » on nous a demandé 269,928 fr. d'augmentation pour l'entretien ordinaire des routes.

La section centrale à demandé au ministre une note des adjudications de ces travaux. D'après cette note je trouve que les baux annuellement consentis ne montent qu'à une somme de 1,522,286 fr. 65 c, tandis qu'on nous demande 1,717,438 fr. Il y a donc déjà là une différence très forte entre le chiffre de la section centrale, que j'admets, et le chiffre qui vous est demandé. Il me paraît complètement inutile d'accorder ces 269,928 fr. d'augmentation.

Quant à l'augmentation de 400,000 fr. au paragraphe « d », pour construction de routes, que le gouvernement procède comme il l'a toujours fait jusqu'ici ; qu'il choisisse parmi les routes en exécution les plus indispensables, les plus utiles, qu'il les achève, et comme l'honorable M. Rousselle vient de vous le dire, en deux ans et demi, au moyen des 920,000 fr. accordés chaque année, et que nous consentons également à accorder chaque année ; toutes les routes décrétées seront achevées. Que le gouvernement construise et achève les routes pavées ou empierrées qui aboutissent aux stations du chemin de fer, qui en forment des affluents, ce sont les plus utiles ; qu'on achève toutes les routes communales, et que, plus tard, on vienne avec des projets spéciaux demander des crédits spéciaux pour de nouvelles routes et qu'on nous en démontre la nécessité, et je serai le premier à donner le concours de mon vote à toutes celles dont l'utilité sera démontrée.

M. Dubus. - J'ai demandé la parole pour dire quelques mots à l'appui du chiffre proposé par le gouvernement pour la construction de routes. Quelques membres de cette assemblée paraissent croire que depuis la création des chemins de fer dans notre pays, la construction de nouvelles routes devient inutile. C'est, à mon avis, une erreur grave.

A la vérité, l'industrie, le commerce ne font plus autant usage des routes pavées, mais l'agriculture ne peut s'en passer.

Les nouvelles routes qu'on construit aujourd'hui sont agricoles ; et sous ce rapport, il en reste beaucoup à faire dans le pays et particulièrement dans le Luxembourg, dans le Limbourg et dans toute la Campine.

En examinant attentivement la carte routière du pays on peut se convaincre que jusqu'en 1815 les routes ont été faites principalement dans un intérêt Stratégique, c'est-à-dire dans l'intérêt des gouvernants plutôt que dans l'intérêt des populations. Depuis 1815 jusqu'en 1835 les nouvelles routes relient les grandes villes entre elles, elles sont commerciales et industrielles, plutôt qu'agricoles.

Ce n'est que depuis 1830 et surtout depuis la création des chemins de fer que les routes sont faites particulièrement dans les intérêts de l'agriculture. Depuis cette époque, l'Etat, les communes et les provinces ont construit un très grand nombre de chaussées. Voici des chiffres dont je puis certifier l'exactitude : avant 1795, il y avait en Belgique 483 lieues de routes pavées : lieues de 50,00 mètres. De 1795 à 1815 sous la domination étrangère, on n'a construit que 38 lieues de routes. De 1815 à 1831, sous le gouvernement des Pays-Bas, on a construit dans la Belgique 160 lieues de routes, et enfin de 1831 à 1846 on en a construit 422. Je n'ai pas le relevé exact du nombre de celles faites depuis 1846, mais je pense qu'il doit être considérable.

Il me paraît donc évident que les chemins de fer donnent lieu à la construction d'un très grand nombre de routes destinées à leur servir d'affluents. Je voterai le chiffre du gouvernement.

M. Wasseige. - Messieurs, j'ai relu avec attention les discours prononcés hier par l'honorable ministre des travaux publics et par les partisans de l'augmentation demandée par lui, et je n'ai rien trouvé ni aans ces discours, ni dans l'exposé des motifs du budget qui puisse, à mes yeux, justifier le moins du monde cette augmentation.

Je me trompe, dans le tableau d'où il résulte qu'il faut encore 2,200,000 francs, je vois une seule chose, c'est que l'arrondissement de Huy, à lui seul, devrait profiter de ce crédit jusqu'à concurrence de 600,000 francs ; cela expliquerait au moins l'un des discours que nous avons entendus hier.

On se base sur un seul argument, sur les vives réclamations des provinces et des gouverneurs. Mais si les vives réclamations des provinces et des gouverneurs suffisaient pour faire majorer les crédits normaux, ces vives réclamations n'ont pas manqué pour beaucoup d'autres travaux dont l'urgence est au moins aussi constatée.

J'ai cité hier la Meuse pour laquelle il vous a été demandé l'an dernier une majoration de crédit que vous avez refusée, et je pourrais citer encore bien d'autres voies de communication pour lesquelles vous avez entendu d'honorables membres réclamer un prompt achèvement. Cependant il leur a été répondu et avec justice, ce me semble, que, malgré l'utilité incontestable de ces travaux, il fallait, dans l'intérêt de la justice distributive, répartir les subsides également et ne pas accorder aux uns une préférence sur les autres.

Or, cette justice distributive serait rompue si l'on augmentait le crédit pour la construction des routes, à moins qu'on n'en fît autant pour tous les travaux du même genre et d'une importance au moins égale. Mais alors ce ne seraient pas des centaines de mille francs qu'il faudrait voter, ce seraient des millions.

Mais, messieurs, si nous accordons l'augmentation de 400,000 fr., le but que l'on vous indique sera-t-il au moins atteint, les routes seront-elles faites dans un plus bref délai ? Nullement, messieurs, car examinez l'exposé des motifs et vous verrez que c'est un simple transfert que l'on vous proposé. On vous demande de voter actuellement 1,300,000 francs au lieu de 900,000 francs et on vous annonce que l'année prochaine on reviendra au chiffre de 900,000 francs et qu'en 1858 il ne faudra plus voler que 400,000 ou 500,000 francs. Ainsi c'est tout bonnement 400,000 francs qu'on retranchera du crédit de 1858 et qu'on vous demande d'ajouter au crédit de 1856.

L'on ajoute enfin que quelques années après, vous aurez un magnifique réseau de routes qui couvrira la Belgique.

Eh bien, messieurs, ce transfert, il faudrait des circonstances toutes particulières pour le justifier ; or ces circonstances n'existent nullement ; au contraire, les circonstances sont très peu favorables à un pareil mode d'opérer. Je l'ai déjà dit, la masse des travaux publics entrepris dans toutes les parties de la Belgique, chemins de fer de l'Etat, chemins de fer concédés, canaux, tous ces travaux ont fait hausser nécessairement le prix de la main-d'œuvre à tel point que dans nos localités on a beaucoup de peine à trouver des ouvriers pour l'agriculture. Les circonstances sont donc bien plutôt de nature à faire diminuer le crédit qu'à le faire augmenter, car les largesses de l'Etat devraient être réservées pour un temps où la main d'œuvre ne serait pas aussi chère ou au moins pour des moments où il serait nécessaire de venir au secours de la classe ouvrière, si elle manquait d'ouvrage.

Voudrait-on arriver à construire de nouvelles routes ? Je dis, messieurs, que là il y aurait un danger : le réseau des chemins de fer tend à s'accroître tous les jours ; de nouvelles concessions sont incessamment demandées, et certes nous ne sommes pas encore arrivés à la fin de ce mouvement qui doit procurer des voies ferrées aux populations qui n'en jouissent pas encore. C'est seulement quand ces travaux seront sinon terminés, au moins très avancés, que nous pourrons juger en connaissance de cause de l'utilité des nouvelles routes, car celles qu'on décréterait aujourd'hui pourraient peut-être ne pas servir d'affluents aux chemins de fer.

Ce qu'il faut aux populations, ce ne sont pas tant des routes à long parcours que des routes servant d'affluents aux stations des chemins de fer. Nous voyons aujourd'hui les magnifiques routes de Namur à Liège, de Namur à Bruxelles, de Charleroi à Louvain, qui sont ombragées des plantations superbes dont M. le ministre des travaux publics parlait hier, mais qui ne présentent plus que de magnifiques solitudes. On n'y voit plus circuler personne. Or c'est là un luxe qui, à mon avis, coûte trop cher à la Belgique pour que par mon vote je contribue à l'étendre.

Ensuite, messieurs, ces routes seraient à peine achevées qu'on verrait surgir des sollicitations pour en obtenir de nouvelles, et je crois qu'il serait difficile de résister à ces sollicitations, puisque toutes les routes qui seraient demandées auraient toujours une certaine utilité relative.

En résumé, messieurs, on ne nous donne aucune raison plausible pour nous faire augmenter le crédit de 900,000 fr. qui été voté jusqu'à présent ; je crois en avoir donné, au contraire, de très plausibles pour ne pas voter l'augmentation, en faisant voir le danger qu'il y aurait à donner en ce moment-ci plus d'extension aux travaux des routes.

Le crédit de 900,000 francs à été proposé par l'honorable M. Van Hoorebeke qui n'a pas vu, lui, la nécessité de l'augmenter.

Cette augmentation ne vous semble-t-elle pas, messieurs, comme à moi, une espèce de protestation in extremis du corps des ponts et chaussées qui, croyant son importance, sinon son existence, menacée par l'extension que l'on donne aux chemins de fer, veut prouver qu'il est encore plein de vie ? Je pense, messieurs, que vous n'entrerez pas dans cette voie. Quant à moi, je suis décidé à m'y opposer de tous mes moyens.

M. Loos. - Messieurs, j'avais l'honneur de faire partie de la section centrale et j'ai voté la réduction dont il est fait mention dans le rapport. Ce n'est pas, messieurs, que je veuille arrêter la construction de routes nouvelles, ce n'est pas que je veuille arrêter l'achèvement des routes déjà commencées ; mais voici la situation qui s'est présentée devant nous. Le premier projet de budget ne portait pour les routes que 900,000 francs comme les années précédentes ; le second projet demandait 1,300,000 fr. Dans l'exposé des motifs présenté par l'honorable ministre actuel des travaux publics, vous pouvez lire les motifs qui l'ont porté à proposer l'augmentation de 400,000 francs.

Ne croyez pas que cette augmentation soit demandée parce que M. le ministre considère le premier crédit comme insuffisant pour procéder régulièrement à l'achèvement des routes commencées et à l'exécution de routes nouvelles ; pas le moins du monde ; si vous voulez lire l'exposé des motifs à la page 11, vous verrez que c'est uniquement par un sentiment d'humanité que M. le ministre est venu proposer l'augmentation de 400,000 francs. Voici du reste comment s'exprimait l'honorable ministre des travaux publics :

« Il n'est pas probable qu'il entre dans les intentions de la Législature d'exiger cette réduction, surtout dans un moment où les provinces, les communes et les particuliers concentrent tous leurs efforts pour soulager, autant que possible, la position pénible dans laquelle se trouve la classe ouvrière, par suite de la crise alimentaire. »

C'est le seul motif, messieurs, que l’on donne à l'appui du chiffre (page 1275) nouveau demandé à la législature. Eh bien, la section centrale s'est demandé si ce motif existait encore à un assez haut degré pour nous engager à voter une augmentation de 400,000 francs et nous nous sommes dit qu'en présence des nombreux chemins de fer en voie d'exécution et d’autres pour lesquels des concessions sont demandées, qu'en présence des grands travaux de toute nature qui s'exécutent dans tout le pays, il n'y avait pas de raison pour venir encore augmenter extraordinairement le crédit destiné à la construction de routes nouvelles, surtout que nous avons l'espoir, par suite de la paix rétablie en Europe, de voir diminuer le prix des denrées alimentaires.

Messieurs, la section centrale ne propose aucune réduction sur le chiffre de 900,000 francs qui a été accordé les années précédentes, elle propose seulement de ne pas augmenter ce chiffre. Or, les années précédentes les circonstances étaient bien plus défavorables aux populations et alors il n'est pas venu à l'idée du gouvernement de proposer un chiffre plus élevé pour la construction des routes.

Le chiffre de 900,000 francs permettra, en définitive, d'achever le plus grand nombre de routes commencées, si le département des travaux publics veut y appliquer cette année, tout le crédit de 900,000 fr. et ne pas prendre sur ce crédit pour construire des routes nouvelles ; nous resterons ainsi dans des conditions parfaites, et tous les honorables membres qui ont réclamé l'achèvement des routes en construction dans leurs localités, verront ces routes se poursuivre ; il n'y aura pas de retard.

Messieurs, il y avait sur ce chapitre deux augmentations.

L'une concernait l'entretien. Lorsque la section centrale s'est occupée du crédit, l'entretien des routes était adjugé dans toutes les provinces, excepté dans le Hainaut ; mais avant l'impression du rapport, M. le ministre des travaux publics nous a fait connaître le résultat de l'adjudication qui a eu lieu dans cette dernière province ; nous avons pu dès lors établir un chiffre réel qui est la conséquence même des adjudications. L'augmentation n'est donc plus de 250,000 francs, mais seulement de 54,840 francs.

Quant au second point, la construction des routes, je viens de dire par quelles considérations la section centrale n'a pas adopté l'augmentation. De sorte que rien ne justifie en ce moment une dépense plus considérable que celle qui a été faite depuis quelques années en faveur des routes. Je ne partage pas cependant l'opinion de l'honorable M. Wasseige qui trouve qu'il ne faut plus construire de nouvelles routes : je crois que nous devons doter de routes les localités qui en manquent encore ; je suis disposé à voter chaque année pour cet objet un certain crédit ; mais nous ne devons pas non plus tomber dans l'exagération ; or, ce serait une exagération que de voter cette année une augmentation de 400,000 francs. Il y a plus ; vu l'époque de l'année à laquelle nous sommes arrivés, je prétends qu'il est impossible d'employer utilement ce crédit. Il y a donc lieu de s'en tenir au chiffre proposé par la section centrale.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, je désire exposer à la Chambre les motifs qui onl déterminé le gouvernement à proposer l'augmentation de 400,000 francs ; mais je vais d'abord rencontrer un autre point qui a été soulevé par les honorables MM. David et Loos, en ce qui concerne le chiffre porté au littera A « entretien des routes existantes ». A l'époque où le budget a été rédigé, en présence de l'augmentation croissante du prix de la main-d'œuvre et des matériaux nécessaires à la construction des routes, il a paru utile de porter une augmentation dans les devis relatifs à la nouvelle adjudication de l'entretien des routes ; heureusement, lorsque les adjudications ont eu lieu, les circonstances alimentaires se sont trouvées plus favorables, les apparences de paix se sont réalisées et l'adjudication a donné des résultats plus avantageux qu'on ne devait s'y attendre. Le montant des adjudications est inférieur de près de 200,000 francs à celui qu'on prévoyait ; de ce côté donc, je suis d'accord avec la section centrale et les honorables MM. David et Loos ; il y a lieu à une réduction ; cette réduction ne peut pas être fixée, comme le pense l'honorable M. de Man, et le crédit ne peut pas être fixé au chiffre qu'on a indiqué parce que ce chiffre ne représente que l'entretien des routes existantes au moment de la rédaction du budget ; dans le courant de cette année, de nouvelles routes devront être mises à l'état d'entretien ordinaire et les travaux devront en être adjugés ; de ce chef, il y aura une légère augmentation. L'administration croit avoir besoin, pour faire face à cette nouvelle dépense, d'une somme de 9,000 francs. Ainsi, sur le premier point, sauf cette légère somme que la section tcntrale pourra bien me concéder sans doute, nous sommes d'accord.

En ce qui concerne la création de routes nouvelles, l'honorable M. Rousselle a critiqué la marche suivie par le département des travaux publics ; l'honorable membre prétend que beaucoup de ces routes, loin d'être des routes d'intérêt général, sont à peine des routes provinciales, ne sont peut-être même que des chemins de grande communication ; il s'en réfère pour cela à la classification nouvelle à laquelle devront procéder pendant l'été, les conseils provinciaux et qui devra être sanctionnée par le pouvoir législatif ; je me réfère, comme l'honorable membre, à cette espèce d'appréciation des actes du département des travaux publics, et je suis convaincu que les conseils provinciaux et la Chambre reconnaîtront que le conseil des ponts et chaussées et le département des travaux publics ont suivi à cet égard les règles d'une saine logique ; que la classification qu'on a adoptée sera alors maintenue dans la plupart de ses parties.

Du reste, si l'honorable membre trouve de l'inconvénient à ce qui a été fait jusqu'à présent, puisqu'il fait appel à la nouvelle classification qui doit avoir lieu, il peut très bien se joindre à nous pour continuer provisoirement ce système, puisque le remède à l'abus qui existe, selon lui, doit être très prochain.

L'honorable M. Wasseige pense qu'il ne faut pas pousser à la construction de routes nouvelles ; il prétend que la plupart de celles qui ont été faites jusqu'à présent sont stériles ; qu'elles ne sont que de vastes solitudes et que les nouvelles routes auront le même sort.

L'honorable membre est dans l'erreur ; la plupart des routes qu’il s'agit de construire seront des affluents des chemins de fer actuels où de ceux dont la création est projetée, bien plus que des lignes parallèles.

L'honorable membre a dit qu'un arrondissement entre pour une somme considérable dans la répartition de l'allocation ; son appréciation est complètement erronée ; il a vu plusieurs fois le nom du chef-lieu de cet arrondissement dans le tableau ; c'est vrai, mais le nom n'y figure que comme point de repère ; les routes dont il est question traversent les provinces de Brabant, de Namur et de Liège. Ainsi la somme qu'il s'agit de répartir sera distribuée selon les règles de la justice, et l'arrondissement auquel l'honorable membre a fait allusion n'aura dans la répartition du crédit que la part qui lui revient légitimement.

Le motif pour lequel j'insiste particulièrement pour obtenir l'augmentation des 400,000 fr., c'est le grand nombre de travaux qui sont entrepris dans le pays ; les routes sont faites par très petites sections, vu la modicité du crédit ; il en résulte que le capital employé par portions successives à la construction de ces routes, ne devient fructueux pour le pays qu'après un certain nombre d'années. C'est une considération sur laquelle j'appelle l'attention particulière de la Chambre. La nécessité d'une juste répartition, non seulement entre les provinces, mais entre les arrondissements, réduit à très peu de chose la part afférente à chacun. C'est pour sortir de cette situttion, que je déclare déplorable, que je vous prie de suivre le gouvernement dans la voie qu'il vous indique.

L'honorable M. Wasseige trouve un argument contre la proposition du gouvernement, dans la crainte de voir renchérir la main-d'œuvre et les matériaux.

Dans les communes qu'il a eu occasion de visiter, il a pu constater que les matériaux et la main-d'œuvre avaient considérablement augmenté de valeur et que si on admettait l'augmentation de 400,000 fr. demandée pour construction de routes, on aggraverait considérablement cet état de choses. Je répondrais que si l'état fâcheux que signale l'honorable membre doit se produire, il ne sera pas dû à cette légère augmentation de 400,000 fr.

Ce n'est pas quand des rapports sur des projets de loi autorisant des travaux pour une somme de 60 millions sont sur le point d'être discutés et probablement adoptés par la Chambre, que l'on peut craindre qu'une augmentation de subsides de 400 mille francs, pour construction de routes vienne faire augmenter d'une manière considérable les prix de la main-d'œuvre et des matériaux.

La même considération peut s'appliquer à l'observation de l'honorable député de Namur qui suppose que le corps des ponts et chaussées ne doit avoir plus rien à faire, pour qu'on veuille pousser à ce point les constructions de routes, et qu'on ne peut avoir d'autre raison pour justifier l'augmentation de 400,000 francs. L'honorable membre oublie les nombreux travaux hydrauliques qui restent à faire, les études que nécessitent les nombreux projets de chemins de fer dont la concession est demandée ; je crois que ce serait abuser du temps de la Chambre que de m'attacher plus longtemps à répondre à une observation que je ne crois pas sérieuse.

Ces raisons et celles qui ont été présentées par plusieurs honorables membres détermineront, je pense, la Chambre à adopter la proposition du gouvernement.

M. Vandenpeereboom. - Plusieurs honorables membres ont combattu l'augmentation de crédit pétitionnée par le gouvernement pour la construction de routes. Je demanderai la permission de venir la défendre et de combattre les objections soulevées.

Parmi les arguments qu'on a fait valoir contre l'augmentation proposée, il n'en est pas qui m'aient touché.

En effet, messieurs, qu'a-t-on dit ? L'honorable M. Rousselle a invoqué la situation financière du pays. Cet argument, la Chambre se le rappellera, n'est pas neuf.

Il est invoqué dans toutes les circonstances où l'on veut combattre un projet entraînant des dépenses, il disparaît pour ceux-là mêmes qui le formulent dès qu'ils ont le désir d'obtenir l'exécution de travaux quelle que soit leur importance.

Quant à la question d'équilibre entre les recettes et les dépenses de l'Etat, l'honorable membre peut se tranquilliser, je pense. Le Moniteur nous a fait connaître naguère le montant des recettes des premiers mois de l'année, le résultat est assez favorable pour que nous puissions compter sur une balance parfaite de l'exercice, au moins en ce qui concerne les dépenses ordinaires ; l'augmentation de crédit demandée ne détruira pas l'équilibre ; d'ailleurs M. le ministre confirme mes prévisions.

On a invoqué en second lieu la nécessité de faire des économies.

(page 1276) Pourquoi, dit-on, pousser à outrance et toujours à des dépenses nouvelles ?

Dépenser peu ou ne rien dépenser peut être une économie quand il s'agit d'économie domestique. Mais quand il s'agit des affaires publiques, ce ne sont pas les principes d'économie privée ou domestique, mais ceux d'économie politique qu'il faut consulter. Or, d'après la science, il ne faut faire que des dépenses nécessaires, utiles et reproductives, là est la véritable économie pour nous.

Des routes inachevées sont-elles utiles ? et n'y a-t-il pas dommage à laisser inachevés des travaux qui ne peuvent être productifs qu'après leur achèvement ?

Beaucoup de routes de l'Etat sont commencées ; il s'agit de les achever et de donner ainsi un effet utile aux dépenses faites jusqu'ici, d'obtenir par des péages la rémunération du service rendu par l'Etat ; il s'agit enfin de construire des routes nouvelles, mais nécessaires, comme je le démontrerai, dans quelques parties du pays.

J'ai un autre motif pour demander que le crédit sollicité par le gouvernement, soit augmenté. Je voudrais voir changer le système suivi en matière de construction.

Que se passe-t-il ?

Depuis quelque temps, le gouvernement voulant sans doute satisfaire simultanément à tous les vœux, à toutes les demandes qui lui sont adressées de différentes parties du pays, fait adjuger non des routes entières, mais des sections partielles dans les différents arrondissements ; ce mode de procéder et conforme à la stricte justice distributive, si l'on veut, est extrêmement onéreux pour l'Etat. L'entrepreneur qui n'a qu'une section à faire, exige un prix plus élevé qne s'il avait à construire une route entière, car les frais généraux sont les mêmes et le bénéfice éventuel est moindre.

Si on met à la disposition du gouvernement une somme plus forte, il pourra adjuger des sections de route plus grandes, il obtiendra des adjudications plus avantageuses ei pourra exécuter relativement plus de travaux.

L'argument qui consiste à dire qu'il y a assez de grandes routes de l'Etat dans le pays n'a pas plus de valeur ; il est possible que dans la province de Hainaut ou de Namur, il y ait de ces voies de communication en nombre suffisant ; mais les représentants de ces provinces ne doivent pas être égoïstes ; si dans leur arrondissement tout est fait, si le système est complet, ils ne doivent pas perdre de vue qu'il reste quelque chose et même beaucoup à faire ailleurs. Si sous le rapport de la grande voirie quelques provinces n'ont plus rien à désirer, ne peut-on pas dire que c'est parce que la construction de ces voies coûte là beaucoup moins que dans d'autres parties du pays et parce que dans ces régions privilégiées le développement du commerce et de l'industrie a rendu facile l'exécution de ces travaux ?

Mais ne peut-on pas se demander d'autre part si cè ne sont pas les voies de communication qui ont développé dans ces contrées le mouvement industriel et commercial ei conclure qu'il est juste de doter à leur tour de ce bienfait les provinces moins favorisées par l'industrie afin de leur procurer ainsi la même prospérité ?

Les honorables membres qui pensent qu'il n'y a plus rien à faire se trompent donc étrangement ; je puis affirmer qu'il existe des localités qui ont un besoin urgent de routes et de grandes routes pavées.

Il est des circonstances particulières et locales qui en ont privé pendant longtemps quelques districts du pays.

C'est ainsi que les principes de stratégie et de tactique militaires ont empêché, pendant des siècles, la création de routes dans le rayon des frontières, à proximité des forteresses.

Entre Adinkerke et Courtrai, sur une frontière de plus de 20 lieues, il n'existait naguère encore que trois routes reliant les deux pays ; le génie militaire ne voulait pas en construire d'autres, parce que ces routes facilitaient le transport du matériel de guerre et le mouvement des troupes. C'est ainsi que la construction de routes a été entravée longtemps sur la frontière.

Depuis lors, il est vrai, les rigueurs des principes de stratégie ont été tempérées.

On a compris que, pour le transport des engins et du matériel de guerre, on n'avait plus absolument besoin de chaussées et que l'artillerie volante par exemple pouvait se passer de routes pavées.

Mais en attendant les villes qui se trouvaient dans cette position topographique ont été privées de voies pavées.

Je pourrais citer dans l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter plus spécialement en cette enceinte deux routes vers la frontière française qui sont indispensables pour relier d'importantes localités des deux pays et même pour unir des stations des chemins de fer français et des chemins de fer belges.

Ainsi, par exemple, les routes, depuis trop longtemps attendues, de Poperinghe par Reniugbelst et Locre à Bailleul, et d'Ypres par Messines et Ploegsteert à la frontière, sont dans ce cas, et je saisis cette occasion pour recommander vivement ces voies de communication à l'attention de M. le ministre des travaux publics, qui n'hésitera pas, je l'espère, à les faire construire à l'aide des fonds que la Chambre mettra à sa disposition ainsi qu'aux frais et par les soins de son département.

L'argument que l'honorable M. David a produit dans la discussion et qui consiste à dire que la construction de chemins vicinaux en grand nombre rend inutile l'établissement de nouvelles routes de l'Etat n'est pas fondé d'après moi ; cet argument ne me touche point et j'espère qu'il n'exercera aucune influence sur la Chambre.

En effet l'honorable ministre des travaux publics a prouvé déjà qu'il y avait entre la grande et la petite voirie des différences essentielles. Qu'est-ce donc que la petite voirie ? Des chemins extrêmement tortueux parce qu'on veut suivre la voie existante et relier jusqu'aux simples exploitations rurales. On a même soutenu, à ce point de vue, que plus ces chemins sont développés, mieux ils valent. Le plus souvent ces chemins ne sont pas carrossables pour les grands véhicules ; ils ont des pentes effrayantes, leurs profils le prouvent, et ne peuvent être utilisés pour le transport des matières pondéreuses.

Ils ont de plus l'inconvénient d'avoir peu de largeur.

Les grandes routes sont construites dans d'autres conditions. Il est inutile de le démontrer.

D'après moi, la voirie est au pays en général ce que le drainage est à l'agriculture. Pour que le drainage soit utile, il faut qu'il soit établi dans de bonnes conditions : il faut des drains qui se relient à un collecteur, ce collecteur reporte les eaux au ruisseau ou à la rivière, la rivière les reporte à la mer. Car vous le savez, l'eau va toujours à la mer.

En matière de voirie, l'intérêt public exige aussi qu'il en soit ainsi : les drains, c'est la voirie vicinale ; le collecteur, c'est la grande route ; le chemin de fer, c'est la rivière ; la mer, ce sont les grands centres de consommation où aboutit toujours aussi le mouvement des hommes et des choses.

Si vous n'avez qu'une partie du système, si vous n'avez que les drains sans collecteur, vous aurez un mauvais système de drainage, comme vous aurez un mauvais système de voirie, si vous n'avez que des chemins vicinaux, sans grandes routes pour diriger le mouvement vers les voies ferrées et de là vers les grands centres de consommation.

Un dernier argument qui n'a pas plus de valeur pour moi que les autres et qui est au moins prématuré, a été produit par l'honorable M. Wasseige. Cet honorable collègue nous a dit : « Vous voulez faire des dépenses à la voirie et cependant il y a d'autres travaux immenses à exécuter. Il y a notamment la Meuse à améliorer ! »

J'ai toujours professé la plus grande sympathie pour ce fleuve. Je suis un des grands coupables qui ont voté le crédit pour la dérivation ; je le confesse, et j'espère que la Chambre m'absoudra. Je na suis donc pas suspect. Mais si l'honorable M. Wasseige parle de la Meuse, ne puis-je parler à mon tour de l'Yser et du canal de Plasschendaele ? MM. de Portemont et de Ruddere parleront de la Dendre, M. Van Overloop du Moervaert, M. de Haerne de la Lys, M. Thiéfry de la Senne, M. F. de Mérode de la Nèthe, M. de La Coste du Demer. La discussion, si nous l'embarquons sur ces voies navigables, flottera à l'aventure, elle ira bientôt à la dérive et échouera enfin.

Je crois donc que nous devons nous en tenir à l'objet en discussion, c'est le moyen de rester dans la bonne voie. D'ailleurs, chaque chose viendra à son temps, le chapitre « canaux et rivières » sera examiné encore en cette séance, n'anticipons pas. En somme, je dis qu'il y a encore beaucoup à faire en Belgique, et qu'il est d'une bonne économie d'achever le plus tôt possible les routes qui sont en construction.

J'appuie donc très énergiquement l'augmentation demandée par le gouvernement.

- Plusieurs membres. - La clôture !

M. Lelièvre. - Je demande à dire quelques mois pour énoncer mon vote qui sera favorable au projet du gouvernement. Je n'abuserai pas des moments de la Chambre.

- La clôture est mise aux voix et prononcée.

Section I. Ponts et chaussées
Article 7

M. le président. - Je vais mettre aux voix le chiffre de 3,222,438 fr. proposé par le gouvernement pour l'article 7.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - D'après la déclaration que j'ai faite sur les adjudications qui ont été approuvées, le chiffre de cet article peut être réduit à 3,041,286 fr. 65.

M. Loos. - Si l'on procède ainsi, la Chambre ne sera pas libre dans son vote.

La section centrale a proposé une réduction de 400,000 fr. Je voudrais qu'elle fût mise aux voix.

M. le président. - D'après le règlement, je dois mettre aux voix le chiffre le plus élevé.

M. Delfosse. - Si l'on doit commencer par mettre aux voix les chiffres les plus élevés, je demande que l'on procède par division. Autrement des membres de la Chambre pourraient être amenés à voter contre une allocation qu'ils seraient disposés à adopter si elle était mise aux voix séparément.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - On pourrait mettre aux voix non pas un chiffre, mais cette question : La réduction proposée par la section centrale est-elle adoptée ? Le chiffre serait déterminé d'après le vote de la Chambre.

M. Loos. - La section centrale a proposé deux réductions : l'une porte sur l'entretien des routes ; M. le ministre vient de nous dire qu'il se ralliait à cette réduction. L'autre est la réduction de 400,000 francs sur le chiffre pour la construction des routes. On pourrait poser la question en ces termes : La réduction de 400,000 francs proposée par la section centrale est-elle approuvée ?

(page 1277) M. Vandenpeereboom. - La question me paraît extrêmement simple. On est d'accord sur le littera A, B. C. On pourrait voter sur ce liltéra par assis et levé et voter par appel nominal sur le littéra D.

M. le président. - S'il n'y a pas d'opposition, nous procéderons ainsi.

« A. Entretien ordinaire d'après les beaux existants : fr. 1,531,286 65. »

- Adopté.

« B. Travaux en dehors des baux, payement des terrains cédés à la grande voirie : 200,000 fr. »

- Adopté.

« C. Etudes de projets, achats d'instruments, cartes, livres : fr. 5,000. »

- Adopté.

« D. Travaux d'amélioration et construction de routes : fr. 1,300,000. »

- Ce dernier chiffre est mis aux voix par appel nominal.

80 membres répondent à l'appel nominal.

53 votent l'adoption,

25 votent le rejet.

2 s'abstiennent.

En conséquence, le chiffre est adopté.

Ont voté l'adoption : MM. de Moor, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Steenhault, de Theux, de T'Serclaes, Dubus, Dumon, Faignart, Jouret, Lambin, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Maertens, Magherman, Malou, Manilius, Mercier, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Sinave, Tack, Thienpont, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Van Cromphaut, Vandenpeereboom, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Visart, Ansiau, Brixhe, Coomans, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, de Baillet-Latour, de Breyne, de Bronckart, Dechamps, de Decker, de Haerne, de la Coste, de Liedekerke, Della Faille et Delehaye.

Ont voté le rejet : MM. de Naeyer, de Perceval, de Portemont, Goblet, Jacques, Landeloos, Loos, Matthieu, Moncheur, Orts, Osy, Rousselle, Thiéfry, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Wasseige, Allard, Boulez, Closset, David, de Brouwer de Hogendorp, Delfosse, Deliége, de Man d'Attenrode et F. de Mérode.

Se sont abstenus : MM. Julliot et de Mérode-Westerloo.

M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. Julliot. - Je n'ai pas voté contre ce crédit parce qu'une partie en est destinée à achever des routes commencées même depuis quatre ans. Il vaut mieux les achever maintenant que plus tard.

Je n'ai pas voté pour le crédit, parce qu'une partie de cette somme est destinée à faire faire de nouvelles explorations, à examiner s'il n'y a pas quelque coin du pays où l'on pourrait faire de nouvelles routes, occuper un peu le personnel. Et comme je pense que le temps de faire des routes par l'Etat est passé, que le gouvernement ne doit procéder que par subsides, que tout le mouvement se porte sur les chemins de fer et sur leurs affluents qui sont des routes communales et de grande vicinalilé, je n'ai pu voter ni pour ni centre ce chiffre.

M. de Mérode-Westerloo. - Je me suis abstenu parce que d'un côté je reconnais l'utilité de la dépense pour laquelle le crédit est demandé, mais que d'un autre côté je ne veux pas voir tous les travaux publics s'effectuer en même temps.

Article 8

« Art. 8. Plantations de routes : fr. 41,000. »

M. Visart. - Je vois avec plaisir, au rapport de la section centrale, que M. le ministre des travaux publics a donné des instructions pour qu'il soit procédé de suite à l'élagage des plantations des routes conformément aux principes de l'ancien système, le seul bon, à mon avis, lorsqu'il est bien pratiqué.

Je félicite donc l'honorable ministre de cette résolution, à laquelle il donnera, je l'espère, une application immédiate. Je félicite aussi son honorable prédécesseur à l'occasion des consultations et des documents qu'il a provoquées et réunis concernant cette question, qui sera ainsi enfin terminée.

Il y a sur l'arboriculture, au département des travaux publics, des mémoires très clairs et très concluants, émanant d'hommes pratiques. Il en est un entre autres, signalé par la commission, que je recommande à l'attention de M. le ministre, lequel a pour auteur l'un de nos collègues, l'honorable M. Matthieu, qui a été consulté sur cette question, il y a quelques années. Ce travail lumineux peut servir de guide aux agents chargés de diriger et de former les ébrancheurs.

Je crois, messieurs, qu'hier il s'est glissé quelque confusion dans les réponses faites à MM. Lelièvre et Vander Donckt par l'honorable ministre des travaux publics. M. Lelièvre, notamment, n'a point parlé d'une emprise de terrain, mais seulement du dommage occasionné par les arbres plantés plus près des propriétés riveraines que ne le permet la loi. Ce mal, assurément, en plusieurs localités existe en effet ; la distance légale est de deux mètres. On comprend que plus on diminue cette mesure, plus on augmente le dommage que font les racines par leur invasion parasite, et les branches par l'ombrage qu'elle projettent. Cela amaigrit et étiole nécessairement les céréales ; les racines des essences voraces franchissent facilement les fossés d'accotement.

Ce fait a été signalé par la commission qui a engagé le gouvernement à amoindrir et à faire disparaître ce dommage le plus tôt qu'il sera possible. On le conçoit facilement, messieurs ; moins qu'à tout autre, il appartient au pouvoir, qui a la mission de maintenir et de faire exécuter les lois, de donner l'exemple de leur infraction. Je me permets donc encore de recommander cette observance à l'attention et au bon vouloir de M. le ministre des travaux publics.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - L'honorable préopinant vient d'appeler l'attention du gouvernement sur le système d'élagage. Pendant longtemps messieurs, cette question a défrayé devant nous la discussion du budget des travaux publics, et a pris, dans les deux assemblées législatives, une importance telle, que le gouvernement a cru devoir soumettre la question à une commission aussi nombreuse que bien composée ; les lumières sorties de l'examen de cette commission ont permis au gouvernement de juger la question à fond et de prendre un parti définitif. Le système d'élagage dit à crochets a été condamné, et depuis le 1er janvier dernier, une circulaire a prescrit aux ingénieurs de l'abandonner à tout jamais. Ainsi, messieurs, l'ancien système d'élagage dit forestier, système suivi depuis si longtemps par les propriétaires intelligents du pays et qui a donné chez eux de si bons résultats, ce système sera, à l'avenir, le seul suivi pour les plantations de l'Etat ressortissant au département des travaux publics.

Quelques honorables membres ont manifesté le désir qu'un élagage général fût prescrit pour faire disparaître le plus tôt possible les traces de l'ancien système abandonné. Je crois, messieurs, qu'à cet égard il ne faut pas trop se hâter et qu'il y a lieu de s'en rapporter aux ingénieurs en chef, qui sont chargés de veiller plus spécialement à cet objet.

On a encore traité la question sur laquelle les honorables MM. Vander Donckt et Lelièvre ont appelé hier l'attention du gouvernement ; on a pensé que les plantations se font à une distance moindre des propriétés riveraines, que celle qui est prescrite par les lois ; je ne m'attendais pas à ce que cette question fût traitée devant la Chambre, mais il me semble difficile qu'en Belgique les propriétaires aient toléré un empiétement systématique ; les tribunaux condamnent le gouvernement comme les simples particuliers et il n'y a pas de doute que, si un abus semblable était porté devant la justice, il y serait remédié immédiatement.

Il y a un autre moyen d'obtenir le redressement d'un abus de cette nature, c'est de s'adresser au département des travaux publics ; or, jusqu'à présent aucune plainte à cet égard ne m'est parvenue ; je n'ai pas eu à instruire une seule affaire de l'espèce ; si un fait analogue m'était dénoncé, je m'empresserais de donner des ordres pour qu'il y fût porté remède

L'honorable comte Visart a dit que, non seulement cet abus existe, mais qu'il est encore augmenté par le choix des essences désignées par le gouvernement pour faire partie des plantations, que souvent on choisit les espèces d'arbres qui, par la longueur des racines et par l'ombre qu'ils projettent, font le plus grand tort aux riverains.

A cet égard l'administration publique esi aussi jalouse qu'elle peut de sauvegarder les intérêts des particuliers, et par les dernières instructions, les espèces d'arbres les plus nuisibles aux propriétés ont été proscrites. Ainsi le peuplier du Canada, qui a été signalé comme le plus dangereux, ne se plante que dans les terrains les plus mauvais où il n'est pas à craindre que les racines, traversant les fossés, viennent nuire aux propriétés voisines.

A l'occasion du crédit en discussion, la section centrale fait une objection qu'elle ne traduit pas en proposition. Elle dit que ce crédit est exclusivement destiné au matériel, et que cependant, l'administration en distrait une certaine portion pour payer les frais de surveillance des plantations. Depuis, la section centrale, le corps des ponts et chaussées dont les attributions sont déjà si nombreuses, si variées, dont les membres sont astreints à des études si diverses, le corps des ponts et chaussées devrait encore être chargé de choisir les espèces d'arbres convenables à chaque terrain et d'en surveiller la plantation.

C'est un point sur lequel j'appelle l'attention delà Chambre parce qu'elle n'ignore pas à quel capital considérable s'élèvent aujourd'hui les plantations le long des canaux, des chemins de fer et des routes. Ces plantations exigent de la part du département des travaux publics les soins les plus intelligents pour ne pas compromettre une portion si importante de la fortune publique.

Ainsi, messieurs, je pense que le service des plantations confié au département des travaux publics mériterait un personnel spécial chargé d'éclairer l'administration sur la meilleure marche à suivre. Cependant je veux bien admettre que pour une dépense de cette nature il faudrait une allocation spéciale ou au moins que la dépense devrait être prélevée sur le crédit du personnel.

Quant à la proposition de la section centrale, elle n'a pas d'objet, puisqu'elle consiste à rayer les mots : « Frais de surveillance » qui n'existent pas dans l'article. Mais je veux bien consentir à demander au besoin ou un crédit spécial ou l'autorisation de prélever les fonds nécessaires sur l'article relatif au personnel.

M. de Man d'Attenrode, rapporteur. - Messieurs, la seclion centrale remarque dans le libellé de l'article 8 quelque chose qui n'était pas conforme aux termes de l'arrêté royal du 19 février 1848 d'après lequel tout ce qui concerne le personnel doit être séparé de ce qui concerne le matériel dans la formation des budgets.

Il me semble que M. le ministre des travaux publics a reconnu la (page 1278) justesse de ce principe, puisqu'il vient de déclarer qu'il ne voit pas de difficulté à faire un article séparé pour le personnel. La section centrale trouve cependant extraordinaire que quand le personnel préposé à l'entretien des routes et de ses accessoires est doté d'un crédit d'un million, ce crédit ne soit pas suffisant pour subventionner le personnel nécessaire à la surveillance des plantations ? Or, ce crédit est assez considérable pour faire face à tous les besoins.

M. le ministre des travaux publics semble vouloir en revenir sur ce qu'a fait son prédécesseur. Il y avait jadis trois inspecteurs ; ces trois inspecteurs ont été supprimés il n'y a pas longtemps. M. le ministre paraît avoir l'intention de les rétablir. Car enfin s'il faut un service spécial pour les plantations, il faut rétablir au moins les trois inspecteurs qui ont fait, les années précédentes, l'objet de très vives critiques dans cette Chambre. Si on veut établir un service spécial il faut l'établir au moyen d'une allocation spéciale. Ce n'est pas en défalquant 2.673 fr. 80 c. du crédit de l'article 8 qu'on aura le moyen de surveiller toutes les plantations du royaume.

J'insiste donc, au nom de la section centrale, pour la suppression des mots : « frais de surveillance ».

M. de Steenhault. - Messieurs, je viens appuyer les observations faites par la section centrale, et je demande aussi la suppression des mots : « frais de surveillance ». Je propose cette suppression, parce que ces mots s'ils étaient conservés, sont pour l'administration un moyen d'éluder, je ne dirai pas les décisions, mais du moins les intentions formelles de la Chambre ; un exposé historique, qui ne pourra, je pense, être contesté par M. le ministre lui-même, prouvera la vérité de mon assertion.

En 1847, et plus tard en 1848, lors de la discussion du budget des finances, des observations surgirent et la proposition de supprimer l'inspection des plantations fut même formellement faite ; le gouvernement, se ralliant à cette observation, supprima l'inspection par arrêté royal du 22 janvier 1848. Les choses en restèrent là jusqu'en l'année 1855 ; en 1855, lors de la discussion du budget des travaux publics pour cet exercice, de nouvelles observations furent présentées par la section centrale ; la section centrale demanda des renseignements au gouvernement ; voici la réponse que fit M. le ministre des travaux publics. Le ministre répondait :

1° Que depuis la suppression des trois inspecteurs des plantations qui recevaient chacun un traitement de 5,000 francs, il n'existait plus au département des travaux publics de fonctionnaire ayant cette mission :

2° Qu'on se bornait à faire inspecter de temps à autre là où cela était jugé nécessaire les plantations par des personnes étrangères à l'administration.

Or, il résulte de cette réponse qu'il n'y avait plus d'inspecteurs proprement dits, mais qu'il y avait des agents qui inspectaient, c'est-à-dire des inspecteurs déguisés qui recevaient des appointements sous forme de frais de route.

Après l'insistance que la Chambre a mise à ne conserver d'autre inspection que celle des agents de l'administration des ponts et chaussées, je crois qu'il y a lieu de supprimer ces mots : « frais de surveillance ».

On peut très bien, puisque la Chambre le veut, faire l'essai de cette inspection des agents du corps des ponis et chaussées. Je suis loin de prétendre que cette inspection sera suffisamment efficace, mais en tout cas, s'il était reconnu qu'elle était insuffisante, ce serait à un système d'inspection bien autrement organisé que celui qui existe aujourd'hui que l'on devrait avoir recours.

Puisque j'ai la parole, je ferai une observation sur les plantations. On ne tient nul compte de l'appropriation des essences aux terrains. Je connais notamment une route où dans un sol riche, profond, à bases argileuses, l'on a planté alternativement des chênes, des ormes, des mélèzes, des acacias ; je demande si les plus simples notions en arboriculture ne doivent pas faire condamner un pareil système de plantation !

Je demanderai donc à M. le ministre de bien vouloir porter son attention sur cet important objet.

M. Vander Donckt. - Messieurs, je ne puis pas laisser passer sans réponse une observation de M. le ministre des travaux publics, qui n'est pas exacte, je n'hésite pas à le dire, parce que j'ai les preuves en main ; le long de la route d'Audenarde à Grammont se trouve une plantation faite par le gouvernement en essence de Canada ; or, cette route est située dans les meilleures terres de la Flandre orientale ; je ne critiquerai pas les plantations qui ont été faites, puisque M. le ministre pourrait dire qu'on a reconnu un peu tardivement qu'il y avait lieu de bannir le Canada des plantations ; mais ce que M. le ministre ignore peut-être, c'est qu'il y a, par l'ordre des ingénieurs, des pépinières de Canada établies aux côtés de la route et dont on extrait journellement de jeunes arbres. Cela ne prouve donc pas l'intention du gouvernement de renoncer à ces plantations dans les meilleures terres.

Voilà une observation que je signale à toute l'attention de M. le ministre des travaux publics.

M. le ministre dit que s'il était vrai que l'on empiétât sur le terrain des propriétaires avoisinant la route, on verrait dresser immédiatement des procès-verbaux. Je prie M. le ministre d'être persuadé que des plaintes très amères se font jour dans les communes, le long de cette route, et que les cultivateurs-propriétaires avoisinant la route se bornent à ces plaintes, sans vouloir aller jusqu'à intenter un procès au gouvernement. Le petit cultivateur chez nous a cette conviction que, du moment qu'il entame une affaire contre le gouvernement, il se ruine ; il a une aversion profonde pour tout ce qui est procès, voilà pourquoi il préfère supporter cette injustice. Il faut bien le dire, MM. les ingénieurs se donnent une autorité qui sort des limites de leurs attributions ; c'est peut-être de leur part un excès de zèle ; mais cet excès de zèle, le gouvernement doit savoir le réprimer quand il dépasse les bornes de la justice.

M. Visart. - Messieurs, je crois qu'une inspection, de temps à autre, est nécessaire pour la bonne direction et l'aménagement convenable des plantations le long des routes, des canaux et des chemins de fer ; il y a peu de temps, trois personnes étaient chargées de ce service dont on avait, dans cette enceinte, blâmé la dépense ; le gouvernement s'est récemment rallié à cette opinion ; il a fait des réformes qui ont permis que la surveillance se fît par un seul inspecteur en mission temporaire et la dépense a été amoindrie dans les mêmes proportions ; je crois, quant à moi, que les mois « frais de surveillance » doivent rester dans la rédaction de cet article 8 ; il faut bien que cette spécialité importante du revenu public ne soit pas négligée ; il faut qu'un agent, ayant des connaissances complètes en sylviculture, soit chargé de parcourir la longue étendue des réseaux en question, afin que par ses rapports au gouvernement on ait la certitude que l'intelligence et les connaissances nécessaires, qui sont nombreuses, accompagnent partout la direction et le travail.

M. David. - Messieurs, aussi longtemps que nous n'avons eu que des grandes routes et des canaux au bord desquels il y avait des plantations, l'administration des ponts et chaussées a suffi à la surveillance ; c'est seulement depuis qu'on a fait des emprises trop larges pour le chemin de fer, qu'on a fait des plantations à quelques endroits de ce chemin, à partir de cette époque, on a reclamé un personnel spécial pour le soin à donner aux plantations. M. le ministre des travaux publics a dit tout à l'heure que ces espèces de forêts constituent aujourd'hui une partie importante de la fortune publique, et il nous demande, en conséquence, une allocation de 2,673 francs pour la surveillance.

Messieurs, puisque les plantations des bords des chemins de fer forment une partie importante de la fortune publique, comme nous avons une administration spéciale, ne pourrait-on pas lui remettre la surveillance et l'administration de cette partie du domaine public ? Je trouve que la section centrale n'est pas allée assez loin en demandant la suppression des mots « frais de surveillance ». Moi, je demande la suppression des 2,673 francs.

En remettant à l'administration des eaux et forêts la surveillance des plantations qui bordent les chemins de fer, ces plantations seront mieux administrées qu'elles ne peuvent l'être par des fonctionnaires du département des travaux publics, et vous n'aurez pas d'augmentation de dépense ; les agents de police que vous avez, le long de la voie, suffiront pour empêcher les vols, et pour ce qui est de la coupe, du remplacement et de la désignation des essences, les fonctionnaires de l'administration des eaux et forêts s'en acquitteront avec plus de connaissance de cause que ceux qui sont maintenant chargés de ce service.

M. Lelièvre. - Il n'est pas possible d'admettre la proposition de M. David et de conférer à l'administraiion forestière la surveillance des plantations sur les routes qui est du ressort de l'administraiion des ponts et chaussées L'administration forestière a des attributions clairement définies par des lois spéciales qu'il faudrait modifier avant de les étendre aux plantations sur les routes. Or, évidemment nous ne pouvons abroger des lois de cette nature incidemment et sans mûr examen.

D'un autre côté, jamais on n'a étendu les attributions de l'administration des eaux et forêts aux routes, etc., et il y aurait des inconvénients à établir à cet égard une confusion dont il n'existe pas de traces dans notre législation.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, je dois répéter ce que j'ai eu l'honneur de dire. Je n'ai pas été compris par l'honorable M. David ; son amendement n'aurait pas pris naissance s'il avait donné à mes paroles le sens que j'ai voulu leur donner. J'ai dit que les mots : « frais de surveillance », n'étaient pas dans le projet de budget, et que je ne voulais pas les y introduire, qu'aucune dépense pour le personnel ne serait prélevée sur les 40,000 fr., que cette somme serait employée à l'acquisition de plants d'arbres et à des plantations le long des routes de l'Etat.

L'honorable membre a confondu les plantations le long des canaux et le long des chemins de fer avec celles qui existent le long des routes ; il a pensé que quand j'ai dit que les plantations de l'Etat formaient une portion importante de la fortune publique, je voulais parler des plantations faites le long des chemins de fer et sur le restant des emprises de terrain. Les plantations des chemins de fer n'entrent que pour très peu de chose dans ce revenu. Je regarde comme de la plus grande importance les plantations le long des routes.

L'honorable M. de Steenhault se plaint de l'inintelligence qui préside à la direction de ces plantations et il vient se joindre à l'honorable M. David pour demander la suppression de toute surveillance. Il y avait autrefois pour exercer cette surveillance trois agents qu'on a réduits à un, qui n'est pas un agent permanent, mais un arboriculteur, dont on utilise les connaissances spéciales, quand on le croit utile.

(page 1279) L'honorable membre devrait regretter qu'on n'eût pas maintenu une surveillance plus grande, puisqu'il signale un manque d'intelligence dans le mode de plantation et la répartition des essences.

Les critiques de l'honorable membre vont à rencontre du but qu'il se propose ; si elles prouvent quelque chose, c'est que l'administration des ponts et chaussées n'est pas apte à diriger des plantations, à les aménager et à déterminer la succession des essences à mettre dans un même terrain ; elles prouvent que les talents d'un arboriculteur spécial ne peuvent être qu'utilement employés dans la circonstance.

Je maintiens ce que j'ai dit ; ce besoin n'est pas immédiat ; je veux bien maintenir la suppression de ce service pour l'exercice actuel, mats je ne prends aucun engagement pour 1857. Si le besoin d'une inspection efficace se faisait sentir, je ne l'établirais pas d'une manière détournée, je demanderais ouvertement l'autorisation de rétablir ce service.

M. de Man a vu dans nos paroles une intention de revenir au système des trois inspecteurs dont l'institution a été critiquée antérieurement et qui ont été supprimés. Il se trompe.

Je répète, en terminant, que je consens à la suppression des mots : « frais de surveillance » proposée par la section centrale ; mais je n'irai pas au-delà.

M. Faignart. - Plusieurs honorables membres ont combattu la création d'un régime de surveillance pour les plantations que l'Etat possède le long des routes, des canaux et des chemins de fer ; je ne puis partager cet avis. L'importance de ers plantations est tellement grande, elles exigent tant de soin et de connaissances spéciales, qu'il est indispensabled e les faire administrer par des hommes très compétents pour désigner les essences qui conviennent aux terrains où l'on veut des plantations. Il serait dangereux de ne pas suivre une méthode à laquelle j'ai vu avec bonheur qu’on était revenu, car je m’étais élevé contre le système qui a été suivi pendant quelques années et qui a été victorieusement combattu. Maintenant qu’on est revenu à de saines idées, je demande qu’on établisse une surveillance sérieuse et qu’on donne la direction du service à des hommes compétentes.

M. de Steenhault. - Il paraît, en vérité, que je n'ai pas le bonheur de me faire comprendre par M. le ministre des travaux publics.

M. le ministre trouve que ce que je disais à propos des plantations va à rencontre de mes observations relatives à l'inspection, puisque j'avais implicitement reconnu la nécessité d'une inspection ; mais je pense que l'honorable ministre se trompe, car ce que j'ai dit prouve précisément qu'il est très urgent d'en venir à un mode d'inspection autrement organisé que celui que nous avons actuellement.

M. David. - Je relire mon amendement.

M. le président. - Je mets aux voix l'article.

M. de Man d'Attenrode, rapporteur. - Il faut mettre aux voix l'amendement de la section centrale, la suppression des mots « frais de surveillance ».

M. le président. - Ils ne sont pas dans le budget, ils ne se trouvent que dans les développements.

M. de Man d'Attenrode, rapporteur. - Il n'en est pas moins vrai que si ces mots restent dans les développements du budget, la cour des comptes se croira obligée d'accorder son visa à des imputations faites en faveur du personnel sur des allocations qui concernent le matériel.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - La cour des comptes n'aura pas la peine de me refuser, puisque je ne lui proposerai rien.

M. le président. - Il n'y a rien.

- L'article 8 est adopté.

Section II. Bâtiments civils
Articles 9 et 10

« Art 9. Entretien et réparation des palais, hôtels, édifices et monuments appartenant à l'Etat : fr. 100,000. »

- Adopté.


« Art. 10. Travaux à exécuter pour la distribution d'eau, d'après le nouveau mode, aux bâtiments civils, situés à Bruxelles : fr. 10,000. »

- Adopté.

Section III. Service des canaux et rivières, bacs et bateaux de passage et des polders
Discussion générale

M. le président. - La Chambre passe à la discussion sur l'ensemble, de la section III.

M. Lelièvre. - Je dois engager le gouvernement à réviser la législation en vigueur relativement aux chemins de halage le long des rivières navigables et flottables.

Nous sommes encore régis à cet égard par l'ordonnance de 1669 que nous avons réformée en ce qui concerne les délits forestiers. Il serait aussi urgent d'introduire des modifications en ce qui concerne le halage, modifications devenues nécessaires par suite du nouvel ordre de choses.

D'un autre côté, il serait aussi nécessaire d'avoir des règles plus précises relativement aux limites du domaine public, en ce qui touche les fleuves et les rivières navigables. C'est une matière qui doit être étudiée ; ainsi, messieurs, il s'est élevé récemment une contestation entre l'Etat et la ville de Namur qui, en possession depuis un temps immémorial d'un rivage longeant la Meuse, se voit contester sa jouissance de la part du gouvernement qui prétend que le fleuve coulant à plein bord couvre le terrain dont il s'agit. Ce sont là des difficultés que l'on pourrait prévenir en précisant des règles qui doivent servir à fixer les limites entre le domaine public et les propriétés riveraines. Je recommande cet objet à l'examen sérieux du gouvernement.

Enfin j'appelle l’attention du gouvernement sur les travaux nécessaires pour l'amélioration de la Meuse.

Sous ce rapport, je me joins à l'honorable M. Wasseige. Nous avons, par un vote récent, admis l'allocation pour la construction de routes. J'espère que le gouvernement ne perdra pas de vue les travaux à la Meuse, comme le réclament d'importants intérêts.

Articles 11 à 13

« Art. 11. Canal de Gand au Sas-de-Gand. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 35,695. »

- Adopté.


« Art. 12. Canal de Maastricht à Bois-le-Duc. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 163,341. »

- Adopté.


« Art. 13. Canal de Pommeroeul à Antoing. Entretien et travaux d’amélioration : fr. 81,800. »

- Adopté.

Article 14

« Art. 14. Sambre canalisée dans les provinces de Hainaut et de Namur. Entretien et travaux de dragage : fr. 107,000. »

M. Brixhe. - Messieurs, j'ai quelques observations assez importantes à soumettre à M. le ministre des travaux publics. Il ne connaît peut-être pas encore suffisamment les inconvénients qui gênent la navigation sur la Sambre canalisée, et c'est avec les plus vives instances que j'appelle toute la sollicitude sur des embarras qui deviennent menaçants pour l'industrie charbonnière et le commerce du bassin de Charleroi.

D'abord, nos expéditions à l'intérieur, qui semblent devoir être si faciles, se font dans les conditions que voici : on navigue sur le canal de Charleroi vers Bruxelles au tirant d'eau de 1 m 80, mais en aval de Charleroi, sur la Sambre, le tirant n'est que de 1 m 50 ; de sorte que les bateaux en destination pour le canal ne peuvent prendre charge complète sur la Sambre et qu'on est forcé de recourir à cette ressource pitoyable de les faire suivre par des alléges dont le chargement doit êlre transborde dès l’entrée au premier bief du canal de Charleroi à Bruxelles.

Mais c'est incroyable, dirai on ! Il faut pourtant bien y croire, car après tout, eela est ainsi et voilà pour le commerce intérieur la condition de la navigation de la Sambre.

Vers l'extérieur de Charleroi, à Paris et à Rouen, c'est bien autrement grave et compromettant pour le bassin de Charleroi, dans un avenir très prochain. En effet, les bateaux partant de Mons pour Paris ou Rouen, prennent en charge réelle 300 tonneaux. D'un autre côte les droits de navigation de Charleroi à Rouen sont de 4 fr. 75 c. par tonneau, tandis que ceux de Mons à Rouen ne s'élèvent qu'à 3 fr. 40 c., laissant un écart de 1 fr. 35 c. qui explique trop aisément l'énorme différence existant entre le cours des frets à Mons et à Charleroi, variant de 2 fr. à 5 fr. par tonne.

Il est évident que des expéditions faites dans ces conditions deviennent d'autaut plus défavorables pour Charleroi que la situation générale du commerce peut être moins prospère.

Le remède au mal, c'est la régularisation de la navigation de la Sambre belge, au tirant d'eau de 1 m 80, afin que nos bateaux puissent alors, comme Mons le fait, opérer des chargements de 300 tonneaux avec une réduction considérable sur le fret. Ce n'est pas aujourd'hui, messieurs, que les réclamations se font entendre pour la première fois. Elles datent de loin. En effet, lorsque le gouvernement des Pays-Bas concéda la canalisation de la Sambre, l'étiage avait été fixé à deux mètres, afin de permettre une navigation régulière avec un tirant d'eau de 1 m 80. Mais cette condition ne fut point remplie, par suite d'un vice existant dans le cahier des charges, et il en résulta un procès que les concessionnaires intentèrent au gouvernement, et sur lequel il fut transigé par convention du 15 avril 1835. Mais cette transaction n'améliora nullement (page 1280) l'état des choses, et nous ne pouvons encore naviguer aujourd'hui forcément qu'à 1 m 50 d’enfoncement sur la Sambre belge, tandis que sur la Sambre française on peut naviguer à présent et en tout temps à l'enfoncement de 1 m 80.

Maintenant, il faut aussi considérer que le chemin de fer de Mons à Haumont va bientôt amener les charbons du couchant aux rivages qui seront établis au-delà de la frontière sur la Sambre française. Il en résultera que les charbons de Mous pourront être transportés par des bateaux de 300 tonneaux, à partir de Haumont, tandis que les charbons de Charleroi continueront à naviguer par des bateaux de 200 tonneaux.

Est-il besoin de démontrer que de pareils faits se réalisant, ils entraîneront la ruine du bassin de Charleroi ? Et si l'on ajoute à cela la baisse qui se manifeste sur le fret anglais, tombé déjà à 13 francs pour, Rouen, il est facile de prévoir que, sans une reprise des affaires des charbonnages qui sont maintenant assez, languissantes, le bassin de Charleroi ne peut manquer de retomber dans les conditions désastreuses qu'il n'a cessé de subir pendant une si longue série d'années jusqù'en 1853-54.

En attendant qu'on puisse mieux faire, messieurs, il est pourtant une amélioration réalisable immédiatement, car suivant les dires des bateliers, il suffirait d'un ordre donné aux éclusiers pour qu'on pût dès aujourd'hui naviguer sur la Sambre belge à 1 m 60 d'enfoncement. Des renseignements pris en deçà et au-delà de la frontière, par des hommes compétents et notables, confirment ces dires des bateliers, ils ajoutent de plus qu'on pourrait aussi dès aujourd'hui naviguer sur la Sambre française à 1 m 80 et que si la navigation à cet enfoncement ne peut avoir lieu en tout temps sur le canal de jonction de la Sambre à l'Oise qu'à la condition d une alimentation régulière par les machines qui y sont affectées, on peut du moins naviguer actuellement à 1 m 65 sur le bief de partage.

J'insiste donc auprès de vous, messieurs, et si je fais appel à toute la sollicitude de M. le. ministre, c'est que pour le bassin de Charleroi, la navigation de la Sambie vers l'intérieur subit les embarras les plus préjudiciables ; que vers extérieur les expéditions deviendront bientôt précaires et sont déjà dès à présent compromises aux yeux les moins clairvoyants.

Je prie donc M. le ministre, et je le fais avec les plus vives instances, de vouloir bien porter ses sérieuses études sur les observations que je viens d'exposer. Je ne doute nullement de son bon vouloir et s'il est vrai que le service des écluses, fait d'une certaine façon, puisse améliorer la situation dans le sens que j'ai indiqué, je suis persuadé qu'il saura donner les ordres nécessaires en conséquence.

Pour l’abaissement du lit de la rivière en aval de Charleroi, et en amont vers Thuin, aucune prévision n'est portée au budget que nous examinons. Mais j'espère qu'après des études convenables, M. le ministre se fera un devoir de réparer cette omission au prochain budget de son département.

Je termine en recommandant de toutes mes forces cette affaire importante au gouvernement, car l'industrie du bassin de Charleroi, qui s'émeut beaucoup, prendra un vif intérêt aux intentions que M. le ministre voudra sans doute exprimer en réponse aux observations sur lesquels je viens d'appeler son attention et son zèle.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je suis d'accord avec l’honorable membre que ce qu'il y aurait de plus désirable, ce serait d'obtenir l'unité de largeur et de tirant d'eau pour les voies navigables qui sont en relations directes. Il est clair que lorsqu'il y a des différends notables dans le tirant d'eau de ces voies navigables, le tirant d'eau le plus faible régit tout le reste, ce qui est un dommage pour la fortune privée et pour la fortune publique.

Aussi jusqu'à présent les efforts du gouvernement ont-ils eu pour but d'arriver à une unité aussi complète que possible. Vous comprendrez cependant qu'en raison des différences dans les conditions naturelles et dans les opérations relatives à la construction des canaux et à la canalisation des rivières, il ne soit pas facile d'arriver a priori au but désiré. Nous avons toute espèce de largeur d'écluse et de tirant d'eau. Mais de jour en jour, nons approchons de l'unité.

Autant que possible les grandes voies navigables étant prises pour type, tous les tirants d’eau tendent à cette unité. Cependant l'honorable membre voudra bien reconnaître que ce ne sera pas sans de grands efforts que l’on pourra atteindre le but qui a été désigné.

Pour créer un lit à une rivière, ou pour exhausser par des digues le niveau d'eau de manière à rendre la rivière navigable, ainsi que pour l'entretien de ces travaux, il faut faire des dépenses considérables.

L’honorable membre signale cependant des résultats qui pourraient être obtenus au moyen de certaines précautions.

On pourrait, d'après ce qu'il a dit, obtenir au moins un tirant d'eau d'un mètre 60 icmimètics, et remédier en partie aux obstacles qui ont été signâtes.

Je le remercie d'avoir appelé l'attention du gouvernement sur ce point ; car ces faits m'étaient complètement inconnus. Je n'hésite pas à prendre l'engagement de m'occuper sérieusement de ses observations et de donner les ordres nécessaires pour qu'il y soit fait droit si cela est possible.

L'honorable membre se plaint d'inégalités dans le montant des péages entre le bassin de Charleroi et le bassin de Mons pour le transport des houilles à Rouen. Il doit comprendre que, sur une distance aussi grande on a affaire à un grand nombre d'entreprises de diverses natures, rivières, canaux de l'Etat, canaux concédés, de sorte qu'il est impossible d'arriver à l'égalité des péages.

L'honorable membre peut être persuadé que le concours du gouvernement ne fera pas défaut à l'industrie privée et que le gouvernement fera tout ce qui dépendra de lui pour obtenir l'unité du tirant d'eau à 1 m 80, ou au moins à 1 m 60, et pour égaliser les péages dans la limite de ce qu'il sera possible de faire.

Il m'est impossible de répondre à l'honorable M. Lelièvre ; il a le privilège de signaler les abus de la législation ; il en trouve dans un grand nombre de lois. Le gouvernement et les Chambres auraient bien de la peine à le suivre dans l'immense travail de révision qu'il indique. La législation qu'il critique présente peut-être certains inconvénients ; mais elle a au moins le mérite de l'ancienneté ; les populations y sont habituées, il est probable qu'elles la préféreraient aux avantages résultant de la nouvelle législation proposée par l'honorable membre, et peut-être-même considéreraient-elles comme des mesures vexatoires les améliorations qu'il voudrait leur imposer.

M. Lelièvre. - Je dois faire observer à M. le ministre que les observations que j'ai présentées relativement à la nécessité d'établir d'une manière plus précise les limites du domaine public sont précisément les mêmes que lui avait soumises l'année dernière l'honorable M. Wasseige.

A cette époque, M. le ministre les avait accueillies avec bienveillance J'ai cru pouvoir les renouveler aujourd'hui et émettre des réflexions que je crois fondées.

Je n'ai pas, du reste la prétention de les imposer à M. le ministre, et s'il les croit indignes de son attention, il lui est libre de ne pas même en examiner le mérite.

- L'article 14 est adopté.

Article 15

« Art. 15. Canal de Charleroi à Bruxelles. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 85,000.

« Charge extraordinaire : fr. 16,000. »

- Adopté.

Article 16

« Art. 16. Escaut. Entretien et travaux d'amélioration :

« Charge ordinaire : fr. 29,218.

« Charge extraordinaire : fr. 1,850. »

M. Van Cromphaut. - Messieurs, les canaux et rivières en général donnent annuellement lieu à des dépenses considérables pour leur entretien et leur amélioration. Je n'en contesterai ni l'utilité ni la nécessité ; mais, je demanderai à l'honorable ministre des travaux publics, s'il ne juge pas également d'une utilité réelle, et qu'il me soit permis de le dire, d'une ncécessité absolue, de consacrer annuellement quelques sommes à l'amélioration de la navigation de l'Escaut, cette rivière si utile où le trafic est très actif, quoique souvent entravé par l'état défectueux des chemins de halage, ce qui se remarque surtout entre les villes de Gand et de Termonde, où la traction des bateaux se pratique par des hommes. Dans toutes les hautes eaux, lors du débordement de la rivière, le halage est difficile, pour ne pas dire impraticable. Les bateliers sont obligés alors de payer des salaires élevés et souvent exorbitants.

Les haleurs marchent dans l'eau jusqu'au ceinturon pendant la saison la plus rigoureuse de l'hiver, souvent à un mètre de profondeur. Non seulement ils y contractent des maladies mortelles, mais il arrive fréquemment que le débordement pratique des ravins si profonds, que les hommes de peine qui ne perçoivent pas toujours le danger, y tombent et se noient. D'autres fois ils ont le malheur de s'écarter des ponceaux et des planches posées pour le passage sur les cours d'eau qui affluent dans l'Escaut, et s'ils ne sont pas habiles nageurs, ils sont entraînés par le courant et ils périssent dans les flots. Pour se faire une idée de la grande nécessite et de la haute utilité d'obvier aux dangers et aux inconvénients que je viens de signaler à la Chambre, du chef du mauvais état du chemin de halage sur la rive de l'Escaut, il suffit, messieurs, de se rendre sur les lieux à la fonte des neiges, ou après une forte pluie.

Vous seriez frappés d'un sentiment pénible en voyant ainsi braver le danger par des hommes qui sont nos semblables et qui ont droil à ce que nous fassions disparaître un obstacle aussi dangereux pour la santé et une entrave aussi désastreuse pour la navigation. Il y a dans ces faits un grand intérêt moral et matériel à prendre en considération. Que de sacrifices n'a-t-on pas faits dans l'intérêt de l'hygiène publique ? Combien de routes n'a-t-on pas pavées pour les rendre praticables aux chevaux ? Pourquoi ne ferait-on pas pour les hommes ce que l'on fait journellement pour les animaux ? Avec un peu de réflexion, chacun comprendra la haute nécessite de remédier au mal sur lequel j'appelle l'attention du gouvernement.

J'espère que M. le ministre des travaux publics, si attentif à toutes les questions qui offrent quelque intérêt voudra bien fixer son attention toute spéciale sur l'objet que je traite, et qu'il voudra bien faire examiner s'il ne serait pas possible d'établir un chemin de halage dans des conditions suffisamment bonnes pour obvier aux graves inconvénients et au danger que je me suis permis de développer devant cette Chambre.

(page 1281) Il est un autre point sur lequel je désire encore appeler l’attention de M. le ministre des travaux publics.

Il s'agit d'une ancienne ordonnance qui date de 1669. Rendue obligatoire en Belgique par décret impérial du 22 janvier 1808.

L'article 7 du titre XXVIII de cette ordonnance dit que l'on doit laisser du côté du chemin de halage 24 pieds, et que les plantations d'arbres ou baies et bâtisses doivent être à une distance de 30 pieds du bord franc de la rivière.

Cette ordonnance, qui était tombée en désuétude, a été remise en vigueur par arrêté royal du 2 août 1847. Depuis, lors l'administration des ponts et chaussées applique cette ordonnance dans toute sa rigueur sur les deux rives de l'Escaut.

Dans certains cas il en résulte des dommages considérables pour les propriétaires riverains qui désirent apporter quelques changements à leurs propriétés bâties, sans aucun avantage réel pour le service de la navigation.

La prescription de 30 pieds, ou 9 mètres 60 centimètres environ, est une distance énorme, nullement nécessaire pour le service de la rivière qui se fait, d'ailleurs, sur une seule et même rive, celle du nord.

De temps immémorial on avait toléré les constructions sur la rive du midi jusqu'au bord même de la rivière, et il n'y avait nul inconvénient à ce que cela se pratiquât ainsi.

Je pense que cette même faculté, avec une légère modification, pourrait être tolérée à l'avenir, puisque rien ne peut gêner le service de la navigation et que, jamais, dans aucun temps, le chemin de halage ne s'établira et ne peut s'établir de ce côté-là. De, nombreux obstacles et des dépenses beaucoup trop considérables s'y opposeront toujours. On pourrait aussi, dans certains cas, accorder l'autorisalioa de planter et de bâtir sur la rive du nord, où se trouve le chemin de halage, à une distance plus rapprochée, en limitant par exemple cette tolérance à 6 mètres au lieu de 9 mètres 60 que l'on exige aujourd'hui. Cette tolérance devrait surtout être accordée dans les endroits habités où il se trouve des usines qui ont un grand intérêt à ne pas trop s'écarter de la rivière, ainsi que cela a été toléré longtemps avant la remise en vigueur de l'ancienne ordonnance dont il s'agit.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - L’honorable préopinant a peint devant vous sous des couleurs très sombres les inconvénients et les dangers auxquels sont exposés les ouvriers employés au halage.

Selon l'honorable représentant, cet état de choses est dû en grande partie au mauvais état du chemin de halage. Je suis d'accord avec lui que les soins qui sont apportés à l'entretien des routes pavées et des autres voies de communication destinées aux animaux doivent être appliqués aux chemins que parcourent les hommes. Aussi je pense que les ingénieurs veillent à l'entretien dans un bon état de viabilité des chemins de halage.

L'honorable membre nous a parlé en second lieu des dangers que présente le halage lorsqu'on est obligé de le pratiquer dans les hautes eaux et lorsque les débordements du fleuve cachent aux personnes employées à ce travail les chemins qu'ils doivent suivre, l'entrée des ponts et ponceaux qui doivent leur donner passage au-dessus des cours d'eau.

L'honorable membre se trompe s'il croit qu'il est au pouvoir de l'administration de remédier à un pareil état de choses. Toutes les fois qu'il s'agira de remorquer des navires pendant des débordements alors que les chemins de halage sont couverts de plusieurs pieds d'eau, il sera impossible de remédier à l'état des choses. Mettre le chemin de halage sur une digue ou sur une jetée un peu élevée aurait cet inconvénient d'une dépense considérable et d'une modification complète dans le lit de la rivière, qui serait probablement nuisible pour les riverains et pour le régime du fleuve lui-même. Il serait à craindre que cette digue encaissant le lit de la rivière, n'amenât d'un côté des atterrissements et de l'autre des affouillements et que les inconvénients et les dangers contre lesquels il s'est élevé ne fussent augmentés.

Aussi je suis d'accord avec l'honorable membre quant à la nécessité d'améliorer le chemin de halage ; mais quant à le rendre utile à l'époque des débordements, je crois que cela n'est pas au pouvoir du gouvernement.

L'honorable membre appelle l'attention du gouvernement sur la possibilité de se relâcher de la sévérité des ordonnances en matière de servitude de chemins de halage, Il pense qu'il y a inutilité pour l'administration à maintenir sur les deux rives la servitude du halage ; que dans tous les cas pour la rive où est établie le marchepied, on pourrait supprimer complètement la servitude des plantations et des bâtisses, et que pour le chemin de halage proprement dit, on pourrait le réduire à une largeur beaucoup moindre. Il ne doit pas perdre de vue la nécessité qu'il peut y avoir dans certains cas pour l'administration de transporter le halage d'une rive à l'autre ; si on la désarmait de la servitude sur les deux rives, elle pourrait être obligée de racheter plus tard à chers deniers le droit qu'elle aurait abandonné bénévolement.

Quant à la largeur de la servitude des plantations sur le chemin de halage proprement dit, l'honorable membre voudra bien remarquer que le cours des rivières est très capricieux, que si, sur certains points les atterrissements forment des emprises sur la rivière, d'autre part le contraire se présente et le chemin de halage est en partie enlevé par une crue subite.

Il est donc nécessaire de maintenir l'administratioa dans tous ses droits.

Du reste, les objections que je présente ne sont pas le résultat d'une étude approfondie.

Je veux bien m'engager à faire examiner de nouveau les questions qu'a soulevées l'honorable membre et à faire connaître à la Chambre le résultat de cet examen.

- L'article est adopté.

Article 17

« Art. 17. Lys dans les deux Flandres. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 19,500.

« Charge extraordinaire : fr. 59,460. »

- Adopté.

Article 18

« Art. 18. Meuse dans les provinces de Liége et de Namur. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 23,100.

« Charge extraordinaire : fr. 220,000. »

M. Moncheur. - Messieurs, vous avez tout à l'heure augmenté de 400,000 fr. la dotation destinée au prompt achèvement des routes. Je n'ai pu m’associer à ce vote parce qu'il m'a semblé peu logique d'augmenter de 400,000 fr. une allocation ordinaire de 900,000 francs, au moyen de laquelle on est certain de pouvoir exécuter tous les travaux projetés dans l'espace de deux ans, tandis que lorsqu'on demande au gouvernement de faire des dépenses réellement urgentes, indispensables et dont l'ajournement compromet même la sûreté publique, le gouvernement répond toui simplement qu'il ne peut pas faire ces dépenses parce qu'il n'a pas de fonds à sa disposition.

S’il est un objet à l'égard duquel les propositions du gouvernement manquent surtout de logique, c'est celui dont il est question à l'article 18 du budget, c'est-à-dire la somme destinée aux travaux à exécuter à la Meuse. En effet, s'il est un travail dont l'achèvement soit urgent, c'est celui qui doit amener, comme vient de le dire M. le ministre des travaux publics lui-même, l'unité de tirant d'eau dans ce fleuve. Mais, messieurs, ce qui était urgent même avant l'existence du chemin de fer de Sambre et Meuse, l'est devenu beaucoup plus encore depuis l'ouverture de ce chemin de fer et la Chambré ainsi que M. le ministre des travaux publics le comprendront facilement, car depuis que ce chemin de fer est exploité de Charleroi à Vireux, une grande partie des transports de charbons qui se faisaient par le batelage de la Meuse, de Namur vers la frontière, se fait aujourd'hui par le chemin de fer dont il s'agit.

Le batelage de la Meuse se trouve dans l'impossibilité de lutter avantageusement avec ce nouveau moyen de transport, qui, outre qu'il est infiniment plus prompt, ne parcourt qu'une distance beaucoup plus courte, et par conséquent tend à enlèver à l'ancien mode de transport tout ce qui en faisait l'aliment.

Or, si l'on n'affecte à l'amélioration de la Meuse pour les deux provinces de Liége et de Namur que la somme normale de 243,000 francs, ce n'est pas dans deux ans, comme pour les routes, que le travail sera achevé, mais il faudra huit ans et peut-être dix ans pour arriver à ce résultat.

Et vous sentez, messieurs, qu'avant ce terme, le batelage aura eu le temps d'être presque anéanti, n'ayant pu se maintenir contre la concurrence dont je viens de parler ; car il suffit qu'une des passes de la Meuse ne soit pas achevée pour qu'il y ait impossibilité matérielle de naviguer avec des bateaux exigeant un certain tirant d'eau ; c'est donc pour un travail de ce genre bien plutôt que pour tout autre qu'il serait juste, nécessaire et logique de faire immédiatement les dépenses nécessaires pour son parachèvement.

Je crois que l'honorable ministre des travaux publics sentira la justesse de cette observation, et que s'il a cru devoir, au moyen d'une allocation extraordinaire de 400,000 fr. qui vient d'être adoptée par la Chambre, pourvoir à l'achèvement le plus prompt des routes qui sont commencées, il jugera plus nécessaire encore de proposer au budget prochain une augmentation du chiffre destiné à l'amélioration de la Meuse.

Il est évident en effet, messieurs, que non seulement ait point de vue de l'industrie et du commerce, mais encore au point de vue des revenus du trésor, ce travail doit être achevé dans un bref délai ; car lorsque le batelage pourra s'établir d'une manière avantageuse pour le commerce et l'industrie, il sera également fructueux pour le trésor, par les péages.

Je prierai donc l'honorable ministre des travaux publics de vouloir bien fixer son attention toute spéciale sur cet objet, et d'examiner si, pour être conséquent avec lui-même et pour faire, du reste, une chose des plus utiles et même des plus nécessaires aux intérêts les plus graves, (page 1282) il ne serait pas nécessaire qu'il prît des mesures pour terminer le plus tôt possible les travaux dont il s'agit. Ces travaux pourraient, si on y mettait quelque bonne volonté, être achevés en trois ou quatre années tout au plus.

Je m'autorise de ce qui a été fait aujourd'hui relativement aux routes pour demander au gouvernement de faire la même chose pour la Meuse, attendu qu'il y a en faveur de celle-ci non seulement les mêmes raisons, mais des raisons beaucoup plus fortes et des motifs beaucoup plus palpables.

M. Dautrebande. - Messieurs, l'année dernière, lors de la discussion dans cette Chambre du budget des travaux publics, j'ai cru devoir appeler l'attention de M. le ministre sur des réparations et des améliorations à faire à la Meuse, non seulement dans l'intérêt de la navigation, mais aussi dans celui des bateliers conduisant les bateaux de Namur à Liège, tant pour la conservation de leur fortune que de la vie.

Le passage du pont construit sur la Meuse à Huy est extrêmement difficile et dangereux pour les bateaux et bateliers qui doivent le traverser ; aussi arrive-t-il souvent pendant les crues des eaux, qui ont lieu plusieurs fois chaque année, que l'on a, comme j'ai déjà eu l'honneur de le dire à la Chambre, des malheurs à déplorer, soit par la perte des bateaux, qui ne pouvant être bien dirigés, vont se briser contre les piles du ditpont, soit aussi par la mort de leurs conducteurs qui parfois périssent dans les eaux.

Il est difficile de croire que cet état de choses existe depuis longtemps ; cependant, messieurs, rien n'est plus exact, il est vrai de dire que si jusqu'à ce jour, l'on n'y a pas porté remède, c'est que l'on a cru devoir temporiser, trouvant la dépense qu'il fallait faire trop élevée.

Plusieurs projets ont été étudiés par MM. les ingénieurs du gouvernement, celui auquel la préférence a été donnée a toujours été ajourné, par le motif qu'il eût été, comme je viens de le dire, trop coûteux, et qu'il eût aussi déprécié la beauté de la construction du pont.

Aujourd hui des études nouvelles ont été faites récemment, et d'après les renseignements qui m'ont été donnés, le projet qui en est résulté est bon, d'une exécution facile et peu coûteuse ; il s'agit seulement de supprimer le passage de l'eau, par l'une des arches, jusqu'à la hauteur du quai de halage, et de le prolonger en remblayant ladite arche ; par cette réparation on obtiendra le moyen de pouvoir guider convenablement les bateaux, et d'éviter ainsi des accidents nouveaux,

En faisant cette grande amélioration, il y aura obligation de rétablir le quai de halage qui existe en aval du pont, et qui est resté jusqu'à ce jour dans un état de délabrement complet. Je dois dire que cette incurie provient de ce que toujours on a postposé d'y faire des réparations, parce qu'ellles devaient être faites simultanément avec celles que l'on avait le projet d'établir au pont.

Les changements dont je viens de parler étant exécutés, il en résultera une amélioration notable, en ce qu'elle supprimera un inconvénient fort incommode, et qui aussi a occasionné des accidents.

Les bateliers pour faire monter à leurs bateaux le courant de la rivière, soin pour y parvenir dans l'obligalion d'employer des cordages et des chevaux ; ils ne peuvent faire cette besogne qu'en traversant, et barrant au milieu de la ville, la route de première classe allant de Namur à Liège, de sorte que les voitures, cavaliers et piétons doivent s'arrêter pendant tout le temps que dure le passage, qui est de 10 à 15 minutes ; un tel empêchement de circulation est plus que jamais intolérable, puisqu'il cause non seulement du préjudice au commerce, mais aussi aux habitants de la ville, et aux voyageurs qui n'ont d'autre pas passage que par cet endroit ; ceux venant de la station du chemin de fer, ou devant s'y rendre, doivent subir le même désagrément.

Je me plais à penser que M. le ministre, reconnaissant l'exactitude de ce que je viens d'exposer, s'empressera de donner des ordres pour que prochainement l'on commence à construire les améliorations et réparations que je viens d'avoir l'honneur de solliciter.

M. Wasseige. - Je viens appuyer, messieurs, par quelques paroles les considérations fort justes qui ont été développées tout à l'heure par mon honorable collègue et ami M. Moncheur.

La nécessité de terminer le plus tôt possible les travaux d’amélioration à la Meuse est évidente, car ces travaux n'auront réellement d'utilité que quand ils serottt complètement achevés.

Je voudrais indiquer à M. le ministre un moyen qui pourrait être très utilement employé, sans cependant grever le budget des travaux publics.

Par la loi des travaux publics votée en 1851, une somme de 600,000 francs, je pense, a été atribué à l'amélioration du cours de la Sambre, depuis Charleroi jusqu'à Namur, afin de prévenir les inondaiious ; une partie assez considérable de cette somme est encore disponible et je pense que tous les travaux nécessaires pour empêcher les inondations sont terminés.

Le restant de cette somme pourrait donc être employée beaucoup plus utilement, dans l'intérêt de la province de Namur, aux travaux de la Meuse qu'à de nouveaux travaux à la Sambre, dont les riverains, je le repète, sont à peu prè sà l'abri des inondations.

L'année dernière, messieurs, j'avais aussi appelé l'attention de M. le ministre des travaux publics sur l'incertitude qui existe sur l'étiage, c'est-à-dire sur la limite entre la propriété du domaine et la propriété des riverains.

Je pense qu'on pourrait faire pour la Meuse à peu près ce qu'on fait pour la voirie vicinale afin de fixer d'une manière définitive la séparation entre le domaine public et le domaine particulier. Je désirerais savoir si à cet égard on a fait quelques recherches.

On tracasse souvent pour bien peu de chose, et il me semble que le gouvernement devrait éviter cela avec soin.

Cette année on a fait une chose qui n'avait jamais eu lieu jusqu'à présent sur les rives de la Meuse ; les riverains ont, en beaucoup d'endroits, planté des saules qui bordent leur héritage et qui maintiennent la rive du fleuve ; jusqu'à présent on avait laissé l'usage de ces saules aux riverains, mais cette année le domaine public les a réclamés et le département des travaux publics, de commun accord avec le département des finances, a fait procéder à la vente des osiers.

Cette innovation a produit, si je suis bien informé, un très mince résultat pour le trésor public et elle a vexé considérablement les riverains qui n'avaient jamais cessé de disposer librement de ces osiers. Si la limite était tracée d'une manière définitive et de telle sorte qu'elle pût être facilement aperçue par tout le monde, de pareils inconvénients ne se représenteraient pas. J'appelle l'attention de M. le ministre des travaux publics sur cette question.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, les honorables députés de Namur ont signalé l'inconvénient qu'il y a à ne pas imprimer plus d'activité pour donner un tirant d'eau plus considérable aux différentes passes qui forment la partie navigable de la Meuse en amont de Namur ; ils ont comparé cet inconvénient à ce qui a été signalé tout à l'heure à l'occasion des routes dont le gouvernement a demandé l'achèvement et ils pensent que les raisons qui ont milité en faveur de l'augmentation du crédit des routes militent également en faveur d'une augmentation des crédits destinés à la Meuse. Il y a, à cet égard, différentes observations à faire.

C'est à tort, messieurs, qu'on représenterait la Meuse comme étant dans une position d'infériorité sous le rapport des crédits alloués. Je ne crois pas qu'il soit besoin de rappeler à la Chambre les nombreux millions que la navigation de ce fleuve a déjà absorbés.

Je ne parlerai pas de la navigation en aval de Liège, du canal de Maestricht, des travaux dans l'intérieur de la ville de Liège, des travaux considérables exécutés entre Liège et Seraing, de tous les travaux exécutés au moyen de crédits spéciaux ni de tous ceux dont la dépense est couverte annuellement au moyen des crédits ordinaires et qui ont pour objet d'améliorer les passes navigables ; je crois qu'il suffit de dire que s’il y a privilège ce n'est certainement pas au détriment de la Meuse, que si l'équilibre qui doit exister entre les dépenses faites dans les différentes parties du pays, est violé, ce n'est certes pas dans le sens indiqué par les honorables membres.

Une autre circonstance doit être remarquée par la Chambre. Il n'y a pas identité entre les routes et les travaux de la Meuse ; pour les routes, il s'agit de créer des communications et par conséquent de permettre aux populations d'arriver soit aux centres de production soit aux centres de consommation ; pour la Meuse, la communication existe, il ne s'agit que de l'améliorer.

Si la Meuse est en possession d'une navigation qui a suffi jusqu'ici, les réclamations ne sauraient donc être fondées.

D'autre part, les intérêts défendus par les députes de Namur n'intéressent qu'un seul bassin houiller, tandis que les 400,000 fr. que je demandais en plus pour la construction de routes nouvelles, devaient être distribués entre les différentes parties du royaume. Ainsi la comparaison qu'on a faite manque de justesse en plus d'un point.

Il serait certainement désirable que les passes navigables fussent toutes élargies et qu'on pût étendre à tout le lit la navigation à grand tirant d'eau ; mais je dois faire remarquer que la somme de 200,000 fr. portée chaque année au budget n'est pas si minime et que par cette allocation l'Etat paye sa dette envers le batelage de la Meuse.

L'honorable M. Wasseige a indiqué un moyen d'augmenter les ressources de la Meuse sans imposer une charge nouvelle au trésor. Ce moyen est très commode : c'est de prendre à la Sambre les fonds qui lui avaient été alloués par une loi spéciale, et de dire qu'on viendra en aide à la Meuse au détriment de la Sambre.

L'honorable M. Wasseige croit à tort qu'on n'a encore rien dépensé du crédit spécial qui a été alloué à la Sambre. Une partie de ce crédit est déjà absorbée ; d'autres travaux sont en cours d'exécution. Je crois que les riverains de la Sambre sont loin de reconnaître cette situation bienheureuse à laquelle fait allusion l'honorable M. Wasseige, et qu'ils ne trouvent pas qu'on ait déjà atteint le double but qu'on avait eu vue, c'est-à-dire faire disparaître les difficultés de navigation et prévenir les inondations.

Un autre point a été soulevé par l'honorable M. Dautrebande, relativement à la Meuse ; l'inconvénient que l'honorable membre signale au pont sur la Meuse à Huy a déjà attiré l'attention de l'administration ; à plusieurs reprises la question a fait l'objet d'études sérieuses ; différents projets ont été rédigés.

L'honorable membre convient, du reste, que c'est l'insuffisance des crédits qui a seule empêché que les intentions bienveillantes de l'administration ne se traduisissent plus tôt en faits accomplis.

En présence des réclamations pressantes qui nous arrivent des différentes parties du pays, la Chambre comprendra combien il serait difficile de satisfaire à tous les besoins qui sont signalés ; dans cet état de choses, la besogne principale de l'administration est de rechercher quelles (page 1285) sont les besoins les plus urgents, pour appliquer les ressources partielles dont elle dispose.

Dans cette appréciation, elle n'a cessé de se conformer aux règles de l'équité la plus complète ; je puis donner l'assurance aux honorables membres qu'elle continuera d'agir de même pour l'avenir et que son attention sera spécialement portée sur les travaux qui exigent la solution la plus prompte.

L'honorable M. Wasseige aurait désiré que la limité entré le domaine privé et le domaine public, le long des fleuves et des rivières, fût tracée d'une manière plus apparente. Je crois qu'il sera très difficile d'arriver à une constatation officielle et légale, faite au moyen de bornage, de procès-verbaux ou d'atlas. Du reste, la limite naturelle n'est jamais inconnue des riverains ; dans toutes les communes, situées sur le fleuve, la notoriété publique établit d'une manière précise où finit le lit de la rivière et où commence la propriété des riverains. Les difficultés ne gisent pas tant dans le fait d'ignorance que dans le fait d'empiétement.

La question dont l'honorable M. Wasseige a entretenu la Chambre a préoccupé l'administration depuis l'interpellation qu'il a adressée au gouvernement.

Les études à cet égard ont démontré que le domaine public devait rentrer en possession de bien des terrains que le domaine particulier s'était indûment appropriés. La motion de l'honorable M. Wasseige a amené ce résultat, que plusieurs actions en revendication ont eu lieu. Je dois donc remercier l'honorable membre d'avoir mis le domaine en état de rentrer en possession de ce qui lui a été enlevé ; de ce chef, de nouvelles ressources seront assurées au trésor public, et elles seront dues à l'honorable membre.

Quant aux plantations des saules et aux récoltes des osiers, le long des rivières, cette matière est réglée par les mêmes principes.

M. Moncheur. - Messieurs, l'honorable ministre des travaux publics a fait un grand étalage des dépenses faites pour la Meuse ; je ne conteste pas que les sommes qui ont été affectées à la Meuse ne soient considérables ; mais il est évident que plus on a dépensé d'argent pour améliorer le lit de la Meuse, plus il est urgent de terminer ce travail pour en recueillir les fruits : car aussi longtemps que vous n'aurez pas achevé les travaux, vous n'aurez rien fait, puisqu'un seul point non terminé empêche la navigation sur tout le reste du fleuve. Il y a une urgence extrême à terminer ce qui est déjà très avancé, mais ce qui reste sans résultats réels.

M. le ministre des travaux publics a prétendu aussi qu'il ne s'agissait ici que d'un intérêt local, tandis que pour les routes, il s'agissait d'un intérêt général.

Certes,messieurs, personne plus que moi ne considère les routes et toutes voies de communication comme d'un grand intérêt général, mais qui oserait dire que l'intérêt de la navigabilité de la Meuse n'est qu'un intérêt local ? Qui ne voit au contraire qu'il s'agit là d'un grave intérêt général et même d'un intérêt international ?

En effet, messieurs, vous savez que la Meuse, aidée du canal latéral, est parfaitement navigable depuis son embouchure jusqu'à deux lieues au-delà de Liège, et que sur le territoire français la Meuse est également canalisée depuis la frontière vers Givet.

Nous seuls avons encore quelques lacunes sur les territoires des provinces de Liège et de Namur.

Il faut combler ces lacunes, et l'intérêt qui l'exige n'est pas, je le répète, un intérêt local, mais un intérêt national, et international ; c'est un intérêt commun à la Hollande, à la Belgique et à la France.

Cet objet est donc digne d'attirer toute l'attention de M. le ministre des travaux publics, et je maintiens qu'il serait d'une bonne administration, sous tous les rapports, de faire immédiatement et dans le plus bref délai possible toute la dépense qui reste encore à faire pour arriver à l'achèvement complet des travaux de la Meuse.

M. Lelièvre. - Je dois appuyer les observations de MM. Moncheur et Wasseige.

J'ajouterai que la loi de décembre 1851 alloue à l'arrondissement de Namur une somme destinée à l'amélioration du canal de la Sambre. Eh bien,si d'après un plan adopté récemment, on n'exécute pas les travaux de dérivation de la Sambre qui avaient d'abord été projetés, il est juste d'employer la somme allouée par la loi en d'autres travaux utiles pour la ville de Namur et son arrondissement.

Evidemment, on est loin d'avoir dépensé une somme aussi importante que l'exigeaient les travaux de la dérivation de la Sambre. Il est donc juste qu'une somme égale pour des travaux également utiles nous soit accordée. Sans cela, c'est nous enlever le bénéfice légal qui nous était irrévocablement acquis. Nous ne pouvons évidemment en être dépouillés sans une juste compensation.

- L'article 18. est mis aux voix et adopté.

Article 19

« Art. 19. Meuse dans la province de Limbourg. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 32,000.

« Charge extraordinaire : fr. 70,000. »

- Adopté.

Article 20

« Art. 20. Dendre. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 12,466 56.

« Charge extraordinaire : fr. 106,800. »

M. de Ruddere de Te Lokeren, rapporteur. - Messieurs, la discussion du budget des travaux publics pour 1856 me force de revenir de nouveau sur les plainte que j'ai faites les années précédentes de la non-exécution des travaux à faire pour améliorer le cours de la Dendre et remédier aux inondations périodiques que subit cette riche vallée. De tous les travaux à exécuter ou en voie d'exécution, je n'en connais pas de plus urgents ; un millier d'hectares est inondé, les terres de première classe sont devenues de troisième, c'est un préjudice immense porté à l'agriculture dans un moment où les denrées alimentaires sont d'un prix aussi élevé et la perte des cultivateurs est incalculable. Je ne puis comprendre, messieurs, que le gouvernement qui connaît cet état de choses ne propose pas à la législature les moyens de remédier à ces inondations. Le rapport de M. Wolters, ingénieur en chef de la province de Flandre orientale, a fixé le chiffre de la dépense à fr. 2,500,000. Les Chambres ont accordé, en 1851, un premier crédit de 500,000 francs ; il ne reste donc que fr. 2,000,000 pour achever les travaux jugés nécessaires pour remédier aux inondations et rendre la navigation plus facile. La province de Hainaut y trouverait un grand avantage pour l'écoulement de ses produits vers les Flandres et l'agriculture verrait accroître sa prospérité. Ainsi, ces fr. 2,000,000 ne seraient point une dépense stérile, ils rapporteraient largement leur intérêt par le produit qu'ils donneraient.

Messieurs, ces travaux ne peuvent être exécutés que par un crédit spécial, car avec les 100,000 francs proposés par le budget de 1856 et autant une autre année, il se passera au moins une vingtaine d'années avant qu'ils soient achevés ; ces travaux pour être bien faits doivent s'exécuter en même temps et non par partie, si on veut que les ouvrages ne soient détruits par les eaux, ce qui augmenterait la dépense ; de plus, il paraît avéré qu'on ne pourra rien faire d'essentiel avec les 100,000 francs proposés.

Si M. le ministre des travaux publics voulait en faire l'objet d'une proposition, le moment actuel est opportun pour donner de l'ouvrage aux nombreux ouvriers ; j'engage vivement M. le ministre à vouloir entrer dans cette voie, qui est la seule pour terminer les travaux de l'amélioration du cours de la Dendre.

M. Jouret. - Messieurs, je viens appuyer le crédit demandé à l'article 20 ; j'en aurais sollicité l'augmentation, sans la promesse faite par le gouvernement, et dont je prends acte, de proposer au budget de 1857 une somme plus élevée pour le même objet.

La dépense dont il s'agit commence un grand acte de justice et assure l'exécution trop longtemps attendue d'une résolution de la législature. J'ajouterai qu'elle est propre à justifier un autre vote qu'on nous demandera bientôt.

Ce crédit, j'aime à le croire, ne rencontrera pas dans cette enceinte plus d'opposition que dans l'examen sectionnaire. Un seul article de la dépense projetée a provoqué une explication, et la réponse du gouvernement ne laisse rien à désirer.

Il a démontré parfaitement que la voie navigable destinée à mettre à Ath la station des chemins de fer en communication avec la Dendre n'exige nullement le creusement dispendieux d'un canal nouveau, mais se borne à l'appropriation fort simple des anciens fossés de la forteresse qui touchent d'un côté à la station et de l'autre à la rivière, au point où elle est navigable.

Un projet de loi dont la Chambre a été saisie récemment fait ressortir encore la nécessité de ce raccordement. Je veux parler de la construction du chemin de fer de St-Ghislain à Ath.

Cette voie ferrée n'atteindra son but que d'une manière fort incomplète et d'ailleurs peu profitable à l'Etat, si elle n'a d'autres débouchés que les chemins de fer existants, et si elle ne peut verser au lieu même de l'embarquement la houille qu'elle amènera des charbonnages du Couchant de Mons.

Or, rien de plus facile que cette opération au moyen de la canalisation des fossés de la place.

Le chemin de fer à créer et la navigation à ouvrir remplaceront ensemble le canal de Jemmapes à la Dendre, dont il a été souvent question, dont l'utilité était généralement reconnue et auquel on n'a renoncé qu'à raison de la dépense considérable de l'exécution.

Le petit canal qui doit en partie suppléer à celui-là est un ouvrage de peu d'importance, la nécessité en est incontestable, et l'article 20 n'étant susceptible de contradiction d'aucun autre chef, j'attends son approbation avec confiance de l'équité de la Chambre.

M. de Portemont. - Messieurs, si j'ai demandé la parole, ce n'est pas pour vous démontrer la nécessité d'améliorer le cours de la Dendre et de faire cesser ainsi les inondations périodiques qui ravagent annuellement notre belle vallée. Les discussions qui ont eu lieu dans cette enceinte ont déjà convaincu la Chambre et le gouvernement de la réalité du fâcheux état de choses dont nous nous plaignons. Je me bornerai à me joindre à mon honorable collègue M. de Ruddere pour engager M. le ministre des travaux publics à examiner s'il n'y aurait pas moyen d'augmenter le crédit extraordinaire qu'il propose pour l'amélioraiion du régime de la Dendre. Il est évident que si on continue à n'allouer que 100,000 fr. par an, cette amélioration sera longtemps encore bien peu sensible et les riverains de la rivière devront se resigner à voir détruire par les eaux leurs belles récoltes et détériorer leurs propriétés si fertiles.

Je me permettrai en outre de prier M. le ministre des travaux (page 1284) publics de vouloir comprendre parmi les travaux à exécuter immédiatement la reconstruction du deuxième pont de Grammont. Maintenant que celui situé en amont n'entrave plus le cours de la rivière, l'insuffisance des ouvertures de ce pont est devenue encore plus grande et la ville doit s'attendre à des inondations

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - J'aurai égard aux recommandations présentées par les honorables membres. Je crois n'avoir rien à ajouter à ce que j'ai eu l'honneur de dire au sein de la section centrale. La répartition des fonds affectés au service dont il s'agit n'a pas permis de faire plus en faveur de la rivière qu'ils recommandent ; mais dans la répartition future, les intérêts que les honorables membres représentent ne seront pas perdus de vue.

- L’article 20 est mis aux voix et adopté.

Article 21

« Art. 21. Rupel. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 16,500.

« Charge extraordinaire : fr. 100,000. »

- Adopté.

Proposition de loi

Dépôt

M. le président. - Une proposition due à l'initiative de plusieurs membres a été déposée sur le bureau ; les sections seront appelées à prendre communication de cette proposition vendredi.

- La séance est levée à 4 heures 3/4.