(Annales parlementaires de Belgique, session 1844-1845)
(page 50) (Présidence de M. d’Hoffschmidt)
M. de Renesse procède à l’appel nominal à 11 heures et demie.
M. de Man d’Attenrode donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse présente l’analyse des pétitions adressées à la chambre.
« Le sieur Cabry, ingénieur en chef mécanicien du chemin de fer de l’Etat, chevalier de l’ordre de Léopold, demande la naturalisation. »
« Même demande du sieur Jean Doeren à Louvain. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« Le sieur Legat, ancien militaire, ex-douanier pensionné, demande que les services militaires des douaniers soient comptés pour fixer leur pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Jules Dubuisson prie la chambre de supprimer les vacances pour les cours et tribunaux, si elle augmente les traitements de l’ordre judiciaire. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à cet objet.
M. le président – Avant d’ouvrir la discussion sur l’objet de l’ordre du jour, je crois devoir consulter la chambre sur la fixation de la prochaine séance.
Je propose de la fixer à lundi à une heure.
Quelques membres – Oui ! oui !
D’autres membres – A lundi à deux heures ! Les convois du chemin de fer ne seront pas arrivés à une heure.
- La chambre, consultée, fixe la prochaine séance à lundi à deux heures.
M. Delehaye – La commission chargée d’examiner le projet de loi relatif à l’augmentation des traitements des membres de l’ordre judiciaire m’a chargé de vous faire rapport sur la pétition des membres du tribunal de Furnes, qui demandent la suppression de la quatrième classe des tribunaux de première instance.
Votre commission vous propose le dépôt de cette pétition sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
Elle vous fait la même proposition à l’égard des pétitions des greffiers des justices de paix de la province de Liége, des commis-greffiers du tribunal de première instance de Louvain, qui demandent une augmentation de traitement, et des greffiers des justices de paix de l’arrondissement de Verviers, qui présentent des observations sur le projet de loi sur les traitements des membres de l’ordre judiciaire.
- Le dépôt de ces pétitions sur le bureau pendant la discussion est ordonné.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) – Messieurs, le 28 novembre 1843, il vous a été présenté un projet de révision de la loi du 31 juillet 1834, sur les céréales. Ce projet a donné lieu à un grand nombre de réclamations. Plusieurs pétitions ont été par vous renvoyées au gouvernement ; une instruction nouvelle est commencée ; pour le moment, nous croyons devoir retirer le projet de loi.
Chaque année vous avez voté des mesures temporaires relativement à l’entrée de l’orge et du seigle, nous venons vous demander la continuation de ces mesures.
M. Rodenbach – Et pour les pommes de terre ?
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) – Quant aux pommes de terre, il n’est pas constaté qu’une mesure exceptionnelle soit, cette année, nécessaire ; il n’en a pas non plus été pris l’année dernière.
Le deuxième objet concerne le rétablissement de la loi du 6 juin 1840, qui permettrait, indépendamment de la quantité fixée par la loi du 6 juin 1839, l’entrée à un droit de faveur d’une nouvelle quantité de céréales du duché de Limbourg dans l’arrondissement de Verviers.
Une réclamation de la commune d’Aubel a été adressée au gouvernement qui constate que la quantité dont l’entrée est autorisée par la loi du 6 juin 1839, s’est déjà trouvée épuisée au commencement de septembre. Nous proposons d’autoriser, pour un temps indéfini, l’introduction à un droit de faveur de 500 mille kil. de céréales par mois, en sus de la quantité dont l’entrée est déjà permise par l’art. 8 de la loi du 6 juin 1839.
Le projet de loi est ainsi conçu :
« Sur la proposition de notre Ministre de l’intérieur,
« Nous avons arrêté et nous arrêtons :
« Article unique. Le projet de loi portant révision de la loi du 31 juillet 1834 sur les céréales, présenté à la chambre des représentants le 28 novembre 1843, est retiré.
« Notre ministre de l’intérieur présentera aux chambres, en notre nom, le projet de loi dont la teneur suit :
« Article premier. Les dispositions de la loi du 29 décembre 1843 (Bulletin officiel, n°928) concernant l’orge et le seigle, continueront d’être en vigueur jusqu’au 31 décembre 1846 inclusivement.
« Art. 2. la loi du 6 juin 1840 (Bulletin officiel n°33) est remise en vigueur pour un terme indéfini, aux droits d’entrée fixés par l’art 8 de la loi du 6 juin 1839 (Bulletin officiel, n°262).
« La présente loi sera obligatoire le troisième jour après celui de sa promulgation. »
L’exposé des motifs contient tous les textes de loi cités dans le nouveau projet, ainsi que des détails statistiques ; nous y joignons encore des tableaux et le texte de la pétition du conseil communal d’Aubel.
Ordinairement, ce projet de loi est renvoyé à une commission. Peut-être pourrait-on renvoyer celui que je viens d’avoir l’honneur de vous présenter à la section centrale qui a été chargée de l’examen de la loi des céréales en autorisant le bureau à remplacer les membres absents. Je crois qu’il y en a deux.
M. le président – Il est donné acte à M. le ministre de l'intérieur de la présentation du projet de loi dont il vient de donner lecture
- Ce projet sera imprimé et distribué.
M. le ministre propose le renvoi à la section centrale qui a été chargée de l’examen du projet de loi sur les céréales.
M. Lys - Messieurs, le projet qui vous est présenté est extrêmement urgent. Comme l’a dit M. le ministre de l'intérieur, dans le district de Verviers, où l’on a autorisé l’introduction de 500,000 kil. de céréales par mois, l’approvisionnement est épuisé, et dans tout le district le pain est plus cher que dans le reste de la province. Il y a donc urgence de s’occuper du projet de loi qui vient d’être présenté.
- Le renvoi proposé par M. le ministre de l'intérieur est prononcé.
M. le président – M. le ministre se rallie-t-il aux propositions de la section centrale ?
M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) – Non, M. le président.
M. le président – La discussion s’établira dès lors sur le projet du gouvernement. Les propositions de la section centrale seront considérées comme amendements.
M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) – Messieurs, il est généralement reconnu qu’il y a convenance et justice à augmenter les traitements actuels des membres de l’ordre judiciaire. L’importance des fonctions qu’ils remplissent, la position sociale qu’ils doivent occuper justifient suffisamment l’augmentation qui vous est proposée, autant et plus dans l’intérêt public que dans l’intérêt des magistrats eux-mêmes. Il faut, messieurs, que les magistrats fassent des études longues et difficiles, pour être dignes d’occuper des fonctions judiciaires ; quand ils sont nommés, il faut qu’ils s’occupent exclusivement de leurs fonctions, leurs traitements doivent leur suffire ; toute industrie, tout commerce leur est interdit. Il est indispensable de mettre les magistrats dans une position telle qu’elle soit, pour eux, une rémunération équitable de leurs travaux et de leurs sacrifices, et pour la société une garantie de leur indépendance.
Certes, messieurs, ce n’est pas moi qui élèverai des doutes sur l’indépendance de la magistrature ; cette indépendance à sa source dans les sentiments d’honneur qui animent les membres de l’ordre judiciaire ; mais il ne suffit pas que cette indépendance existe, il est nécessaire qu’elle ne puisse être mise en doute par personne ; la position que vous ferez à la magistrature contribuera ce résultat, dont il est facile d’apprécier l’utilité et l’importance.
Ces considérations me font espérer que le projet de loi ne rencontrera pas de contradicteurs dans cette chambre. On pourra discuter sur les chiffres ; on pourra combattre certaines augmentations, ne pas les adopter dans toute leur étendue. Mais quant au principe qui sert de base au projet, il ne sera contesté par personne ; car tout le monde reconnaît qu’il faut placer les magistrats dans une position de dignité et d’indépendance réelle.
Quand, en 1832, on a voté la loi qui a déterminé le traitement de l’ordre judiciaire, on se trouvait dans des circonstances particulières qui ont motivé la modicité des traitements fixés à cette époque. Malgré ces circonstances (page 51) et les besoins urgents qu’éprouvait le pays pour assurer sa sécurité et son avenir, le ministre de la justice, en 1831, n’hésita pas à demander pour ces traitements un chiffre plus élevé que celui voté plus tard en 1832 ; en 1831 la chambre avait même voté les premiers traitements demandés par M. Barthélemy. Ce ministre avait proposé pour les premiers présidents de cour d’appel 5 mille florins, pour les conseillers 3,000 fl., et pour les présidents des tribunaux de première instance et les procureurs du Roi 3 mille florins, pour les juge 2 mille.
Nous ne demandons pas à la chambre de faire plus qu’elle n’avait trouvé bon de faire en 1831. Le projet qu’elle avait adopté alors fut porté au sénat ; mais les circonstances qui se présentèrent firent qu’il ne fut pas sanctionné par cette assemblée. Nous ne vous demandons pas d’aller plus loin qu’alors, et pourtant les circonstances ne sont plus les mêmes ; bien plus, pour certains fonctionnaires, nous ne demandons pas d’aller plus loin qu’en 1806 ; car, dès cette année, un décret impérial avait porté le traitement du président et du procureur du Roi du tribunal de Bruxelles à 6,000 fr., et c’est le chiffre auquel nous nous arrêtons.
M. de Naeyer – Les juges n’avaient pas alors des traitements aussi forts qu’aujourd’hui.
M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) – J’entends, messieurs, qu’on me fait l’observation que les juges, à cette époque, étaient loin d’avoir des traitements aussi fort que ceux qu’ils ont maintenant. Je ne puis entrer pour le moment dans ces détails ; mais je répondrai à cette observation d’une manière péremptoire, lorsqu’il s’agira d’examiner les différents chiffres que je proposerai. Il ne me sera pas difficile d’établir que les positions ne sont plus les mêmes.
Le principe, en vertu duquel je soutiens la loi actuelle, a été reconnu à une époque bien voisine de la révolution ; il a été reconnu par un citoyen à qui on ne reprochera sans doute pas d’avoir prodigué les deniers publics pour des dépenses inutiles.
L’honorable M. Gendebien, qui était administrateur général de la justice, faisant un rapport au congrès le 8 décembre 1830, disait ce qui suit :
« Un obstacle que le comité a souvent regretté de rencontrer, est le manque de sujets capables, qui consentissent à accepter des fonctions dans l’ordre judiciaire. Soit les études et les connaissances qui forment les jurisconsultes ne soient pas assez généralement étudiées, soit que la modification des traitements attachés aux fonctions judiciaires en éloigne tous les avocats à qui leurs talents assurent une fortune plus indépendante, nous avons eu quelquefois à déplorer la nécessité où nous nous trouvions de composer quelques tribunaux moins bien que nous n’eussions désiré ; mais alors le gouvernement a pu se convaincre qu’il fallait en quelque sorte céder à la nécessité et à se borner à choisir les candidats du plus grand mérité relatif, faute de pouvoir obtenir le consentement de candidats plus dignes et plus capables. »
Messieurs, il me semble qu’il est impossible de rien ajouter à ces considérations. Elles établissent la nécessité d’augmenter les traitements de l’ordre judiciaire, non pas seulement dans l’intérêt des magistrats, mais surtout dans l’intérêt des justiciables de manière à engager le plus grand nombre possible de personnes capables et instruites à embrasser une carrière qui exige des connaissances aussi étendues.
Il me paraît, messieurs, que ce document est de la plus haute importance, à cause de motifs qu’il développe, à cause de l’époque où il a été rédigé, et à cause même de la personne de laquelle il émane.
Je vous disais, messieurs, qu’il y avait une opinion généralement admise qu’il fallait augmenter les traitements actuels de la magistrature, et je crois ne pas m’être trompé en avançant cette opinion. En effet, messieurs, je n’ai pas encore entendu soutenir qu’il ne fallait pas augmenter les traitements des juges de paix. Or, dès l’instant où l’on augmente les traitements des juges de paix, il devient indispensable d’augmenter les traitements des membres des tribunaux de première instance, et par suite indispensable également d’augmenter les traitements des membres des cours d’appel. Car, si l’on n’adoptait pas ce système, si l’on se bornait à augmenter les traitements des magistrats inférieurs, il n’y aurait plus de hiérarchie, il n’y aurait plus de gradation entre les différents fonctionnaires, ni, par suite, d’émulation, et le service public en souffrirait considérablement.
Je pense donc que, dès l’instant où l’on admet que les fonctionnaires d’un ordre inférieur, les juges de paix, dont les traitements sont maintenant en rapport avec ceux des membres des tribunaux de première instance, doivent être augmentés, comme conséquence nécessaire on doit admettre aussi la nécessité d’augmenter les autres magistrats de l’ordre judiciaire.
C’est en me basant sur cette nécessité généralement reconnue, mais peut-être pas assez approfondie, que j’ai soutenu qu’il y a une opinion générale qui reconnaît la nécessité d’augmenter tous les traitements quelconques des membres de la magistrature.
Je vais maintenant, messieurs, faire connaître à la chambre les chiffres auxquels je crois devoir m’arrêter. Je dois le faire, parce que le projet de loi qui vous a été présenté, l’a été par mon honorable prédécesseur, M. Van Volxem, a été amendé par la section centrale, et que je n’adopte ni tous les amendements ni toutes les dispositions du projet primitif.
Je demande à la chambre la permission de lui lire les chiffres ; et lorsque nous nous occuperons spécialement des articles, je donnerai les motifs qui m’ont engagé à demandé les augmentations dans telle ou telle proportion.
Cour de cassation
Premier président et procureur-général, fr. 15,000
Président de chambre, pas d’augmentation
Avocats généraux, fr. 10,500
Conseillers, pas d’augmentation
Greffier, pas d’augmentation
Commis-greffiers, fr. 3,500
Cours d’appel
Premier président et procureur-général, fr. 10,000
Présidents de chambre, fr. 7,500
Avocats-généraux, fr. 7,000
J’ajoute ceci : les deux avocats-généraux les moins anciens qui remplaceront les substituts actuels, chacun fr. 6,000
Conseillers, fr. 6,000
Greffiers, pas d’augmentation.
Commis-greffiers, fr. 3,000
Tribunaux de première instance, le classe
Présidents et procureurs du Roi, fr. 6,000
Vice-présidents, fr. 4,5000
Juges d’instruction, fr. 4,200
Juges et substituts, fr. 3,600
Greffiers, fr. 2,800
Commis-greffiers, fr. 2,000
Tribunaux de première instance, 2e classe
Présidents et procureurs du Roi, fr. 5,300
Vice-présidents, fr. 4,000
Juges d’instruction, fr. 3,700
Juges et substituts, fr. 3,200
Greffiers, fr. 2,500
Commis-greffiers, fr. 1,800
Tribunaux de première instance, 3e classe
Présidents et procureurs du Roi, fr. 4,600
Vice-présidents, fr. 3,500
Juges d’instruction, fr. 3,300
Juges et substituts, fr. 2,800
Greffiers, fr. 2,200
Commis-greffiers, fr. 1,600
Tribunaux de première instance, 4e classe
Présidents et procureurs du Roi, fr. 4,100
Vice-présidents, fr. 3,000
Juges d’instruction, fr. 2,900
Juges et substituts, fr. 2,500
Greffiers, fr. 2,200
Commis-greffiers, fr. 1,600
Justices de paix
Juges de paix, fr. 1,800
Greffiers, fr. 900
Ce sont les propositions de la section centrale.
Haute cour militaire
Président et auditeur-général, 10,000
Conseillers, pas de changement.
Substituts de l’auditeur-général, fr. 6,000
Greffier, fr. 6,000
Commis-greffier, fr. 6,000
Auditeurs, pas de changement.
Voilà, messieurs, les propositions que je fais ; comme je l’ai déjà dit, qu’il sera plus convenable de justifier ces différentes augmentations, lors de la discussion des articles et lorsque la chambre aura pu examiner les chiffres proposés ; je donnerai alors les explications nécessaires pour établir dans quelles proportions j’ai fixé les augmentations suivant les différentes catégories.
Messieurs, on a exprimé le désir que les traitements des greffiers des tribunaux de commerce fussent augmentés. Je pense qu’il conviendrait de s’occuper de ces fonctionnaires et d’augmenter leurs traitements, si l’on devait regarder comme définitive l’organisation des tribunaux de commerce ; car réellement les greffiers de ces tribunaux ont des fonctions importantes et font une grande partie de la besogne. Mais, comme un projet de loi relatif à l’organisation des tribunaux de commerce vous sera présenté dans le cours de cette session en même temps qu’un autre projet sur les sursis et les faillites, je pense qu’il faut ajourner à cette époque tout changement à apporter aux traitements des greffiers des tribunaux de commerce.
Voilà les motifs pour lesquels tout en reconnaissant qu’il y a, en effet, quelque chose à faire pour ces fonctionnaires, j’ai cru qu’il n’y avait pas lieu de s’en occuper pour le moment.
Je vais continuer, messieurs, à faire connaître à la chambre le système auquel je me suis arrêté et quels sont, soit les dispositions du projet primitif, soit les amendements de la section centrale que je rejette ou que j’adopte.
Mon honorable prédécesseur avait proposé, dans l’art. 1er, des traitements nommés traitements progressifs. Les augmentations de traitements ne devaient profiter aux différents titulaires qu’après un certain nombre d’années de fonctions remplies par eux. Je pense, messieurs, ne pas devoir adopter cette opinion, qui a également été repoussée par la section centrale et qui me paraît inadmissible dans l’état actuel des choses. Car ce serait remettre à un temps éloigné des augmentations reconnues maintenant nécessaires. Je concevrais, sans l’adopter cependant, ce système, si l’on reconnaissait que les magistrats sont convenablement rétribués. Alors on pourrait dire qu’après un certain nombre d’années de services, on donne au magistrat une augmentation de traitements en récompense des services qu’il a rendus. Mais ce qu’il s’agit de faire maintenant, c’est d’augmenter immédiatement, dans une juste proportion, des traitements reconnus insuffisants. Or, avec le système de l’honorable M. Van Volxem, on ne serait pas arrivé à ce résultat.
S’il s’agissait, au reste, de discuter ce système, j’établirais les anomalies qui en seraient la conséquence en créant des différences de position pour les membres égaux en rang des mêmes corps judiciaires.
Je me rallie donc à la suppression proposée par la section centrale.
Mais il n’en est pas de même de la proposition faite par la section centrale de supprimer la 4e classe des tribunaux. Je pense qu’il faut la maintenir. Les quatre classes existent encore maintenant en France et dans les Pays-Bas, et je ne vois aucun motif pour changer ce qui a été conservé en 1832.
En 1832, les classifications ont été réglées d’après des bases qui n’ont pas été contestées, ces bases peuvent n’avoir pas été appliquées d’une manière convenable à tous les tribunaux. Ce sont des questions de fait à examiner pour chaque cas particulier.
(page 52) Mais supprimer entièrement la quatrième classe, j’avoue que je n’en conçois pas le motif.
Je concevrais que l’on demandât la suppression de toutes les classes, comme on a décidé que toutes les cours d’appel seraient sur la même ligne et auraient les mêmes traitements. Mais je ne concevrais pas que l’on supprimât la quatrième classe, alors qu’on reconnaît le principe de la classification. En effet, décider que les tribunaux de la quatrième classe passeront dans la troisième, ce serait indirectement décider que ceux de la troisième passeront dans la deuxième, et ces derniers dans la première.
La suppression de la quatrième classe des tribunaux avait été demandée en 1837 par l’honorable M. Heptia, qui avait présenté un projet de loi. Sa proposition n’a pas eu de suite, et je ne vois pas pourquoi l’on voudrait changer maintenant un état de choses dont les inconvénients ne sont nullement signalés.
Par la suppression de la quatrième classe, les membres des ces tribunaux seraient augmentés dans une proportion plus forte que les membres des autres tribunaux. Cette nécessité n’est nullement justifiée, et, dès lors, je dois combattre la proposition.
Le principe de la classification me paraît juste et salutaire ; juste, en ce qu’il proportionne les traitements aux besoins ; salutaire, en ce qu’il entretient l’émulation entre les différents magistrats.
Diverses bases ont été prises pour classer les tribunaux comme ils le sont maintenant. Ces bases, je le répète, n’ont été contestées par personne. On a pu soutenir qu’elles avaient été, en fait, mal appliquées ; mais personne n’a soutenu qu’elles devaient être renversées. Ainsi, l’idée n’est pas venue de prétendre que le tribunal de Marche devait être mis sur la même ligne que le tribunal de Bruxelles. Cependant le tribunal de Marche peut avoir à juger des affaires aussi importantes que celui de Bruxelles.Mais on a considéré à combien plus de dépenses obligeait le séjour à Bruxelles, et en élevant le traitement des magistrats de cette dernière ville, on a réellement établi l’égalité. On est arrivé ainsi, au moyen de l’application de ces bases, non à quelque chose d’injuste, mais au contraire à quelque chose de très-juste, la différence des traitements ayant réellement donné à chaque magistrat une position relative équivalente.
La classification étant établie, il ne faut pas, dans une loi sur les traitements de l’ordre judiciaire, changer cette classification ; des lois spéciales pourront décréter les changements reconnus nécessaires, comme cela a été fait jusqu’ici.
Toutes les questions relatives à la classification doivent être réservées ; les réclamations qui seront faites pour passer d’une classe à l’autre seront examinées, et si elles se trouvent fondées, elles donneront lieu à des propositions. Mais si l’on admettait d’une manière générale la suppression de la quatrième classe, ce serait reconnaître indirectement que la plupart des tribunaux de la troisième classe doivent passer dans la deuxième, et ceux-ci dans la première. Ce serait un bouleversement général, et une augmentation considérable de dépense qui n’est pas, je le présume, dans les intentions de la législature.
Pour soutenir que la demande de suppression de la 4e classe des tribunaux est intempestive, je m’appuierai sur l’opinion de la section centrale elle-même.
En effet, je lis dans son rapport (page 12) :
« Dans l’opinion de la section centrale, cette suppression doit assimiler, quant au traitement, aux tribunaux de 3e classe, tous ceux qui sont aujourd’hui compris dans la 4e classe, jusqu’à l’adoption d’un projet de loi sur la classification : elle exprime le désir de voir le gouvernement saisir promptement la chambre d’un pareil projet de loi. »
Ainsi, d’après la section centrale, la 4e classe ne serait supprimée que provisoirement, puisque cette section désire que le gouvernement présente un projet de loi de classification.
M. Delehaye, rapporteur – En ne maintenant que trois classes.
M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) – Je ne vois pas que la section centrale l’indique dans son rapport.
Dans tous les cas, je demanderai à l’honorable rapporteur pourquoi il s’arrêté plutôt à 3 qu’à 4 classes.
Ce dernier nombre est adopté maintenant. Il l’est depuis l’an VIII, et sans avoir fait naître d’inconvénients. Je ne vois donc pas pourquoi l’on veut l’abandonner et en introduire un autre.
Du reste, je répète que la section centrale ne demande pas un changement définitif, puisqu’elle demande un projet de classification. Dès qu’il faut un projet de loi pour régler définitivement la classification, il est absolument inutile de trancher une question qui devra faire l’objet d’une discussion ultérieure, lorsque le projet de classification sera présenté.
Le chap. Il du projet de loi traite des droits au traitement. Je suis d’accord avec la section centrale pour faire courir le traitement à dater du 1er du mois qui suit la prestation de serment.
Mais je maintiens ce qui avait été proposé par le gouvernement relativement aux droits des magistrats, de partager la moitié du traitement resté vacant par la démission ou le décès d’un de leurs collègues.
Je ne vois pas pourquoi l’on priverait les magistrats qui ont un surcroît de travail, par la démission ou le décès d’un collègue, du droit de jouir de la moitié du traitement du magistrat démissionnaire ou décédé. Dans les tribunaux de première instance, où il y a des juges suppléants, ces suppléants touchent cette partie du traitement. Pourquoi n’en serait-il pas de même dans les cours d’appel où il n’existe pas de conseillers-suppléants ?
Il est surtout convenable de maintenir la disposition présentée par le gouvernement, dans l’état actuel de la législation, ce qui souvent rend impossible ou du moins difficile le remplacement immédiat d’un magistrat démissionnaire ou décédé ; en effet, si la place devient vacante peu de temps après la séparation du conseil provincial, l’interim durera pendant près d’une année.
Le gouvernement et la section centrale sont d’accord sur la nécessité de donner les moyens de mettre à la retraite les membres des cours et tribunaux qui seraient dans l’impossibilité de remplir leurs fonctions. Le principe d’inamovibilité consacré par la constitution n’est pas un obstacle à la mise à la retraite, lorsqu’il est constant que le magistrat est dans l’impossibilité de remplir ses fonctions. Il est impossible d’entendre l’inamovibilité en ce sens, par exemple, qu’un magistrat frappé d’aliénation mentale serait autorisé de rester sur son siège.
Les magistrats qui n’ont plus les qualités voulues pour occuper une charge de magistrature, qui sont dans un état tel qu’ils ne peuvent plus rendre les services qu’ils étaient, par leurs fonctions, appelés à rendre, ne sont pas en droit d’invoquer, pour reste en fonctions, le principe de l’inamovibilité, principe créé dans un intérêt public et que l’on ferait tourner contre l’intérêt public même, si on lui donnait une extension aussi peu conforme à l’esprit qui l’a dicté. Je pense donc, messieurs, qu’aucun scrupule constitutionnel ne peut nous arrêter et ne doit empêcher la mise à la retraite des membres des cours et tribunaux qui seraient atteints par des infirmités graves et permanentes. La seule chose que la constitution interdit, c’est de laisser juger et prononcer la mise à la retraite par le gouvernement. Il faut que les corps judiciaires, les magistrats indépendants la prononcent eux-mêmes lorsqu’un de leurs collègues ou un magistrat d’un corps inférieur se trouve dans l’impossibilité de remplir convenablement ses fonctions
Je ne maintiens pas ce que proposait le projet primitif en disant qu’à l’âge de 70 ans accomplis les magistrats seraient de plein droit mis à la retraite. Je crois qu’il n’est pas nécessaire de fixer cette limite d’une manière invariable. Dès l’instant qu’il sera reconnu qu’un magistrat, âgé même de moins de 70 ans, est incapable de remplir ses fonctions, il doit être mis à la retraite ; si, au contraire, un magistrat ayant plus de 70 ans, est encore en état de remplir ses fonctions, je ne vois pas pourquoi l’on priverait le corps judiciaire auquel il appartient de ses talents et de son expérience.
D’après le dernier paragraphe de l’art. 7 du projet de la section centrale, les magistrats seraient admis à demander leur retraite lorsqu’ils auront accompli leur 75e année, et dans ce cas, d’après l’art. 14 du même projet, ce magistrat jouirait, à titre de pension, de l’intégrité de son traitement. Je n’adopte pas, messieurs, cette dernière disposition. Nous venons de voter une loi sur les pensions, et je ne pense qu’il faille revenir sur ce qui a été fixé par cette loi. Je pense même qu’il me sera facile de démontrer, lorsque nous en serons à cet article, qu’il en résulterait des conséquences fâcheuses ; une semblable disposition pourrait engager les cours et tribunaux à maintenir en fonctions, jusqu’à l’âge de 75 ans, un magistrat qui se trouverait dans un état d’incapacité notoire, afin de lui assurer une pension équivalente à l’intégrité de son traitement.
Le gouvernement ne peut pas prononcer la mise à la retraite des magistrats ; il faut, comme je l’ai déjà dit, que cette mise à la retraite soit prononcée par les cours et tribunaux eux-mêmes. Il faut donc déterminer les formalités à remplir pour arriver à la mise à retraite, et ces formalités doivent être telles qu’elles donnent des garanties complètes au magistrat qui doit être l’objet de cette mesure et qu’elles soient en même temps le moins blessantes que possible pour lui. J’adopte à peu près, à cet égard, ce qu’a proposé la section centrale ; mais il me semble néanmoins que ses propositions ne sont pas tout à fait complètes ; différentes formalités laissent à désirer, d’autres offrent des lacunes. Voici la rédaction que je propose.
(Le ministre lit une série de nouveaux articles.)
Conformément aux observations que j’ai eu l’honneur de faire, je ne puis me rallier à l’art. 14 du projet de loi de la section centrale qui viendrait modifier ce que nous avons récemment voté dans la loi générale sur les pensions. D’après l’art. 15 du projet de la section centrale, il serait interdit, sous les peines disciplinaires, à tout membre de l’ordre judiciaire d’exercer, soit par lui-même, soit sous le nom de son épouse, ou par toute autre personne interposée, aucune espèce de commerce, d’être agent d’affaires et de participer à la direction ou à l’administration de toute société ou établissement industriel. J’adopte pleinement cette disposition en ce qui regarde les magistrats proprement dits, de l’ordre judiciaire ; mais il doit être bien entendu que l’article ne peut s’appliquer aux membres de la cour des comptes ; un projet de loi relatif à cette cour est présenté et sera, je l’espère, discuté prochainement ; je m’expliquerai alors sur cette interdiction, que certaines personnes voudraient appliquer aux membres de la cour des comptes, ce que nous n’admettons pas et ce que nous combattrons.
Je disais tout à l’heure que je me rallie à la proposition de la section centrale, en tant qu’elle s’applique aux magistrats de l’ordre judiciaire seulement. En effet, ce que la section centrale propose existe déjà d’après des arrêtés d’octobre 1814 et de septembre 1815, et ces arrêtés eux-mêmes n’ont fait que consacrer ce qui avait été établi dans notre pays bien avant les lois françaises et qui existait en France en vertu d’une ordonnance de 1701. L’art. 15 ne contient donc rien de nouveau ; il sanctionne ce qui était établi par des dispositions font la légalité était peut-être contestable, mais dont l’utilité n’est pas douteuse.
Je propose en outre, messieurs, comme article final, une disposition ainsi conçue :
« Les traitements fixés par la présente loi prendront cours le 1er juillet 1845. »
Messieurs, j’ai fait connaître mon opinion sur les différentes dispositions de la loi qui nous est soumise et sur les divers amendements proposés par (page 53) la section centrale ; je fais des vœux pour que les différentes augmentations que je demande soient votées par le chambre. Si elle les refusait, elle fermerait en quelque sorte la carrière judiciaire aux capacités dépourvues de fortune ; elle justifierait les craintes qu’exprimait déjà en 1830 le chef du département de la justice ; elle consacrerait, en un mot, un principe entièrement contraire à l’esprit de nos institutions politiques.
M. Lange – Messieurs, au nombre des voix éloquentes qui pourraient s’élever, dans cette enceinte, à l’occasion du projet de loi soumis à notre discussion, la délicatesse en frappera plusieurs de mutisme. Moi qui ne suis point magistrat, je n’hésite pas à prendre la parole. Que beaucoup de traitements, dans l’ordre de la magistrature doivent atteindre un chiffre plus élevé, c’est une vérité qui n’est plus révoquée en doute par personne ; elle a même acquis un caractère, j’oserai dire, en quelque sorte officiel. Rappelons-nous, en effet, les paroles royales prononcées dans cette enceinte, le 9 novembre 1841 : « Dans l’ordre judiciaire, beaucoup de traitements ne sont plus en rapport avec l’importance des attributions, ni avec les nécessités sociales. »
Rappelons-nous, qu’à différentes reprises, les, organes du pouvoir ont reconnu que les traitements des membres de l’ordre judiciaire n’avaient qu’un caractère éminemment provisoire, et que, du moment que l’état de guerre cesserait de peser sur le pays, il deviendrait possible de déférer aux justes réclamations en faveur de la magistrature.
Pour appuyer, s’il en était besoin, cette nécessité généralement reconnue, qu’il me soit permis de jeter un regard rétrospectif d’abord sur le régime existant en Belgique avant sa conquête par la France.
Les fonctions de conseiller au grand conseil de Malines, au conseil de Brabant, des Flandres ou du Hainaut, étaient ambitionnées par nos familles patriciennes, et aucun avocat distingué de l’époque ne les eût dédaignées ; la raison, c’est qu’à la haut position qu’occupaient dans l’Etat les corps de magistrature se trouvait jointe la condition du bien-être.
En effet, je ne parlerai ici que de la localité la mieux connue, la cour souveraine à Mons, était divisée en trois chambres : la première se composait de huit conseillers et d’un président ; les deux autres de huit conseillers chacune : deux nobles et deux ecclésiastiques étaient de ce nombre.
Les conseillers, outre le traitement modique, étaient de ce nombre, touchaient du gouvernement, et qui tous fréquentaient tous les jours, les trois à six heures de l’après-dinée, étaient payés à raison de 36 patars (soit 3 fr. 25 c.) par heure sur les sommes que les parties plaindantes étaient obligées de nantir entre les mains des greffiers de la cour ; ce qui, réuni, leur assurait à chacun un traitement fixe de plus de 6,000 francs.
Et, n’oublions pas que certains conseillers étaient appelés comme commissaires ou aux biens saisis, ou à la caisse de la dépositairerie générale, ou à l’audition des comptes des receveurs et huissiers, etc. ; que deux conseillers touchaient dix-huit cents livres, comme commissaires à la députation des états du pays et comté du Hainaut ; que d’autres, dans les causes ordinaires, nommés commissaires aux enquêtes, entendaient, hors les heures d’audience, les témoins produits par les deux parties ; qu’enfin, dans chaque cause, un conseiller-rapporteur était nommé par le président, et que l’emploi de son temps était payé en double. C’est ainsi que le produit du travail d’un magistrat laborieux pouvait atteindre le chiffre de 12,000 fr. Je citerai, pour exemple, car il est permis de citer des noms propres quand c’est pour applaudir au mérite, je citerai feu M. Abrassart, conseiller à la cour souveraine de Hainaut ; et certes, ce n’est pas trop dire, que les sommes de six à douze mille francs étaient alors plus que dix à vingt mille francs de nos jours.
Réunis à la France, nous fûmes soumis à son système d’organisation judiciaire : la loi du 27 ventôse an VIII n’accordait au conseiller en cour d’appel qu’un traitement de 3,600 fr ; au juge d’instance que 1,200 fr. dans certaines villes, 1,500 dans d’autres ; par exemple, Bruges ; et 1,800 fr. dans les villes d’Anvers, Bruxelles, Gand et Liége ; toujours est-il que, quelque modiques qu’étaient ces traitements, ils étaient, comparativement, à cette époque, plus élevés que ceux d’aujourd’hui.
Mais surtout ne perdons pas de vue qu’aux termes des art. 12 et 28 de la loi précitée, les traitements des membres de l’ordre judiciaire n’étaient que provisoires et jusqu’à la paix. Il est vrai de dire que, sous l’empire, ce provisoire devint définitif ; mais ce nonobstant, le principe est resté sauf.
En 1814, le prince souverain des Provinces-Unies des Pays-Bas comprit que les fonctions de la magistrature étaient trop importantes pour qu’on pût la laisser dans l’oubli : le préambule de l’arrêté qu’il porta est digne de remarque : « Voulant donner à l’ordre judiciaire une marque de notre bienveillance et le faire jouir, pour autant que possible, dans l’état provisoire de la Belgique, de toute la considération qui doit y être attachée, en accordant à ses membres le traitement convenable, et qui les mette à même de ne pas devoir s’occuper d’autres affaires incompatibles avec la dignité de leurs fonctions, auxquelles d’ailleurs ils se doivent entièrement et exclusivement :
« Arrête, etc. »
Par cet arrêté-loi, le traitement de conseiller d’appel fut porté à 5,000 fr. ; mais à titre du service qu’il faisait en cour de cassation, le conseiller recevait une augmentation annuelle de 500 florins ; et, de plus, une indemnité de 900 francs était allouée pour la présidence des cours d’assises dans les villes où ne siégeait pas la cour d’appel.
Le juge d’instance, dans le ressort, jouissait d’un traitement de 2,000 francs.
Et quand ces traitements furent-ils ainsi fixés ? Répétons-le, avec le prince souverain d’alors : dans l’état provisoire de la Belgique : quand le pays était écrasé de logements miliaires, surchargés d’impôts.
Lors de notre régénération politique de 1830, on maintint au conseiller d’appel le traitement seulement de 5,000 fr., mais en lui conservant l’indemnité de 900 fr. à titre de la présidence des assises ; au juge d’instance, son ancien traitement de 2,900 fr.
Survint, en 1832, la loi d’organisation judiciaire : un nouveau sacrifice est imposé au conseiller d’appel : on lui conserve le traitement de 5,000 fr., mais on réduit de 900 à 500 fr. l’indemnité pour la présidence des assises.
Les juges d’instance, je dois le dire, virent alors quelque peu améliorer leur position, puisque, divisés en quatre classes, le traitement fut fixé à 3,200 fr. pour la première ; 2,800 fr. pour la deuxième ; 2,400 fr. pour la troisième, et 2,100 fr. pour la quatrième.
Mais, en 1832, il y avait des raisons qui n’existent plus en 1844. Je ne les examinerai pas toutes, je me permettrai seulement, me faisant ici l’écho du pouvoir, de répéter que depuis lors, promesse fut faite, à différentes reprises, de déférer aux justes réclamations en faveur de la magistrature, du moment que l’état de guerre cesserait de peser sur le pays.
Je ne finirai pas, messieurs, sans vous parler d’une autre classe de magistrats qui, quoiqu’inférieurs en rang, n’en méritent pas moins toute notre sympathie, toute notre sollicitude ; je veux parler des juges de paix, de ces magistrats dont l’institution est la plus belle peut-être de l’ordre judiciaire ; de ces magistrats qui, à une juridiction contentieuse joignent une autre mission (leur titre l’indique assez), celle de prévenir et d’aplanir les contestations qui s’élèvent entre les divers intérêts, et qui, par cela seul, doivent posséder de profondes connaissances en droits et inspirer une juste confiance.
Depuis leur institution par l’assemblée constituante, les divers gouvernements qui se sont succédé, tout en reconnaissant l’efficacité des services que rendaient au pays ces tribunaux inférieurs, ne se sont guère occupés que d’apporter quelques modifications à cette institution, sans trop s’inquiéter de la position de gêne, pour ainsi dire, qu’on avait faite à ces magistrats.
Par la loi du 4 août 1832, les traitements des juges de paix à Bruxelles, Anvers, Gand et Liége furent portés à 1,440 francs ; ceux des chefs-lieux d’arrondissements judiciaires de 2e et de 3e classe à 1,200 francs, et partout ailleurs à 960 francs.
Depuis lors, il n’y eut qu’une voix pour se récrier contre la modicité de ces traitements, notamment contre celle des juges de paix de campagne dans le casuel : appositions de scellés, inventaires, licitations, etc., très-inférieur à celui de leurs collègues de ville, ne rapporte que très-peu de chose dans la plupart des cantons.
Et toutes les raisons qu’on a fait valoir à divers reprises dans cette enceinte pour démontrer l’urgente nécessité d’améliorer la position des juges de paix, n’ont-elles pas acquis un degré de force de plus pour la promulgation de la loi du 23 mars 1841 qui a étendu leur compétence et multiplié leurs travaux ?
Le cadre que je me suis tracé ne me permet pas de parler pour le moment des greffiers, commis-greffiers ; je me réserve sur ce point et sur d’autres de la loi, de prendre la parole, le cas échéant, lors de la discussion des articles.
Avant de terminer, je sens cependant le besoin d’ajouter encore quelques mots :
N’oublions pas qu’aux termes de l’article 30 de notre pacte fondamental, la magistrature est un des trois grands pouvoirs de l’Etat, qu’elle marche l’égale du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif ; que ce pouvoir, tout aussi indépendant que les deux autres, a de plus l’honneur d’être le gardien-né de nos libertés constitutionnelles.
N’oublions pas que l’inamovibilité, ce palladium de la magistrature, réclamée à grands cris en sa faveur, mais que l’on fait aujourd’hui sonner bien haut, devient un vain mot et n’est rien, si cette inamovibilité n’est entourée de la position de bien-être.
Pour moi, messieurs, quoique partisan comme vous tous des économies, je saurai néanmoins, quand des dépenses seront exigées par la justice, en imposer la charge au pays. C’est vous dire assez, messieurs, que j’accueillerai d’une manière favorable toutes les dispositions de la loi, soumise à notre discussion, tendantes à l’amélioration du sort de la magistrature.
M. Pirson – Messieurs, en prenant la parole dans la discussion générale, mon intention n’est pas de vous soumettre de bien longues observations. Je n’ai pas l’honneur de faire partie du barreau ou d’appartenir à l’ordre judiciaire. Je suis peu compétent pour traiter la matière qui se trouve à l’ordre du jour. J’abandonne à des collègues plus habiles, et ayant une autorité que je n’ai pas, le soin d’éclaircir les questions soumises à votre décision. Je me bornerai vous présenter quelques courtes observations sur les modestes traitements des juges de paix et des magistrats des tribunaux de première instance.
En ce qui concerne les juges de paix, M. le ministre de la justice, appréciant la valeur des réclamations que l’exiguïté de leurs traitements a généralement soulevées, s’est rallié à la proposition de la section centrale. Je l’en félicite ; je suis convaincu que pas une voix dans cette enceinte ne viendra contester l’importance des fonctions de ces magistrats ; la justice, autant que la convenance, exigent qu’on leur assure un traitement d’au moins 1,800 francs. Je n’abuserai pas non plus de vos moments pour vous (page 54) soumettre des considérations appréciées par tous, et d’ailleurs parfaitement exposées dans le rapport de la section centrale.
Mais, messieurs, si je suis heureux de pouvoir adresser des félicitations à M. le ministre de la justice, pour son association à l’acte de réparation qui nous est proposé en faveur des juges de paix, je vois, d’un autre côté, avec regret, que sa bienveillance est bien limitée, en ce qui concerne les tribunaux de première instance dont les magistrats sont aussi trop peu rétribués.
Je viens combattre la proposition du maintien du statu quo, faite par M. le ministre de la justice, et appuyer de toutes mes forces celle de la section centrale, relative à la suppression des tribunaux de quatrième classe.
Messieurs, pour l’ordre public et dans l’intérêt des contribuables, il est tout aussi important de bien composer un tribunal d’arrondissement qu’une cour d’appel ou une cour de cassation. Les tribunaux d’arrondissement disposent de l’état des personnes, de la propriété, de la liberté, de l’honneur des citoyens ; leur bonne composition est donc d’un intérêt majeur pour la société, et vous devez vouloir assurer aux magistrats de ces tribunaux, je ne dis pas de quoi satisfaire à toutes les exigences d’une existence luxueuse, mais au moins le nécessaire pour leur donner une honnête aisance et la position que commande la dignité de la magistrature.
Si vous faites cette position trop inférieure, comment se recrutera la magistrature ? Evidemment parmi ceux qu’éloigne du barreau leur peu de capacité ou la faiblesse de leurs études ; l’avocat qui a des moyens, qui a embrassé une carrière de plus honorables, fertile en succès éclatants, ne renoncera pas au bénéfice que lui promettent, et ses talents et ses travaux pour des fonctions de magistrat, très-honorables sans doute, mais qui, mal rétribuées, l’assujettiraient à s’imposer des privations et des sacrifices pénibles. Ceux qui se porteront vers la magistrature, seront en général de jeunes avocats n’ayant pas donné des preuves suffisantes de capacité, et quels que soient le zèle et le dévouement qu’ils apportent à remplir leurs fonctions, les inculpés et les justiciables éprouveront des craintes et des inquiétudes bien naturelles sur leur aptitude à bien appliquer la loi.
Pour obvier à l’inconvénient de voir des jeune gens sans précédents tout à coup chargés d’une grande responsabilité et d’un grand pouvoir ; pour échapper au danger d’être obligé de recourir à des avocats sans causes et sans mérite qui espéreraient peut-être trouver dans un titre de juge un peu de la considération que le talent ne leur a pas donnée, il faut nécessairement assurer à la magistrature, dès son début, une position convenable et telle que le comporte la dignité de ses fonctions.
Eh bien, à une époque surtout où l’esprit d’amélioration et d’enrichissement a envahi toutes les classes de la société, je ne pense pas qu’un traitement de 3,000 fr. soit trop élevé pour un magistrat, quelle que soit la juridiction à laquelle il appartient. Je ne crois pas qu’il s’élèvera beaucoup de voix dans cette enceinte pour me combattre, si ce n’est peut-être celle de M. le ministre de la justice ou de son prédécesseur, qui, lui, était allé plus loin encore et en était venu à vous proposer un traitement de 2,000 fr.
La confiance que j’ai dans la sagesse et dans l’équité de M. le ministre de la justice m’avait fait espérer qu’il saisirait avec empressement l’occasion que lui présentait le rapport de la section centrale, de donner immédiatement aux magistrats de tous les tribunaux une position convenable. Mais, je le répète, je vois avec regret que lui, pas plus que ses devanciers, n’a jugé équitable de donner enfin à ces magistrats la position que réclame la dignité de leurs fonctions.
Rien n’empêche qu’on ne prononce dès maintenant la suppression des tribunaux de quatrième classe. Ce que les magistrats de ces tribunaux attendent avec résignation de votre justice, c’est une position meilleure et non une promesse d’amélioration, dont l’exécution, en présence des nombreux travaux dont la chambre est chargée, sera remise à Dieu sait quand.
On m’objectera peut-être que le nombre de magistrats qui figurent dans le projet de loi pour un traitement de 2,500 fr. est bien petit ; que le traitement des magistrats des tribunaux de troisième est portée à 3,000 fr., et ceux de première et de deuxième classe à 3,500 et 4,000 fr.
Mais, messieurs, pourquoi cette différence entre les traitements des tribunaux de 3e et 4e classe ? Sont-ce des considérations de capacité ou d’importance de l’arrondissement qui ont déterminé cette distinction entre les appointements ?
Si c’est la capacité que l’on a prise pour base, pourquoi, messieurs, un habitant de petite ville serait-il exposé à se voir appliquer la loi par un juge de capacité médiocre ?
Les études que doit faire un magistrat ne sont-elles pas les mêmes pour tous, à quelque juridiction qu’il puisse être attaché ? Un magistrat d’un tribunal de quatrième classe ne doit-il pas connaître toutes les lois aussi bien qu’un magistrat de tribunal de troisième classe ? Les fonctions de juge d’instruction ne sont-elles pas les mêmes près de tous les tribunaux ? Leur pouvoir est énorme, puisqu’ils peuvent ordonner les visites à domicile, citer les citoyens à comparaître devant eux, disposer de leur liberté, en décernant des mandats d’amener et de dépôt. Eh bien ! ce pouvoir énorme ne s’exerce-t-il pas de la même manière près de tous les tribunaux ? Dès lors, messieurs, les magistrats de toutes les juridictions doivent présenter aux justiciables les mêmes garanties de capacités !
Est-ce l’importance de l’arrondissement ? Mais, messieurs, les contestations relatives à la propriété, celles qui naissent des rapports commerciaux et des entreprises industrielles, les affaires correctionnelles, ne peuvent-elles pas présenter la même importance dans la juridiction d’un tribunal de 4e classe que dans celle d’un tribunal de 3e classe. Et quand bien même ce ne serait pas, les justiciables ne sont-ils pas égaux ? Les droits des parties ne sont-ils pas également sacrés ? Ne leur faut-il pas des juges également sérieux, des juges également véritables ?
La dignité de la magistrature, aussi bien que les intérêts des justiciables, repoussent les considérations tirées de la capacité et de l’importance de l’arrondissement.
Ce n’est pas non plus sous le rapport du nombre des causes annuellement introduites et jugées qu’on a établi une distinction entre les traitements des tribunaux de 3e et 4e classe.
Si j’ouvre la statistique du département de la justice, j’y trouve, par exemple, que, pour toutes les affaires entièrement terminées, le tribunal de Dinant occupe le 10e rang, dont il faut déduire 9 tribunaux des chefs-lieux de province qui, composés de trois ou de deux chambres, ne peuvent être pris pour point de comparaison ; de telle sorte que le tribunal de 4e classe de Dinant se présente au premier rang, laissant derrière lui trois tribunaux de 2e classe et sept tribunaux de 3e classe. Sous le rapport du nombre d’audiences, le tribunal de Dinant en donne annuellement 168, autant que chacune des chambres du tribunal de Bruxelles, plus qu’aucune de celles des tribunaux d’Anvers, Gand, Arlon, Namur, Bruges, Mons, Tongres, et plus encore qu’aucun des tribunaux de Verviers, Audenarde, Courtray, Hasselt et Ypres, tous appartenant à des classes supérieures assignées au tribunal de Dinant.
Sous le rapport de la durée du temps consacré aux audiences, je trouve encore pour Dinant le chiffre de 510 heures, chiffre supérieur à aucune des chambres des tribunaux d’Arlon, Bruges, Gand, Namur et Tongres, et que ceux des tribunaux d’Audenarde, Hasselt et Verviers.
M. le ministre de la justice vient de vous dire qu’il comprend que l’on demande la suppression des tribunaux de 2e, 3e et 4e classe, c’est-à-dire qu’on ramène tous les tribunaux de première instance à une même classe mais qu’il ne comprend pas que l’on demande la suppression d’une seule classe.
Pour moi, messieurs, je conçois très-bien qu’il y ait 3 classes de tribunaux de première instance avec traitements différents, et qu’on donne aux tribunaux de le et 2e classe des traitements supérieurs, parce que les tribunaux de le et de 2e classe sont composés de trois et de deux chambres ; parce que ces tribunaux sont juges d’appel en matière de répression ; parce qu’ils sont membres des cours d’assises là où ne se trouve pas le siège d’une cours d’appel. Mais, messieurs, il y a convenance et justice à ne pas étendre au-delà de trois classes la classification des tribunaux.
Telles sont, messieurs, les considérations qui me déterminent à repousser le projet du gouvernement, et à lui préférer celui de la section centrale.
M. le ministre de la justice vous a dit encore qu’on avait pris pour base de la différence des appointements, la cherté de la vie dans les différentes localités. Certainement il peut exister quelques différences dans les prix des loyers d’habitation d’une ville à une autre. Mais aussi ceux qui habitent dans les grandes villes ne jouissent-ils pas d’autres avantages. Les rapports sociaux y sont plus agréables, et en outre il y a plus que compensation par une foule de choses qui se rapportent à l’existence matérielle.
Dans les grandes villes on a tout sous la main ; la plus grande partie des objets d’approvisionnement s’y obtient à meilleur compte que dans les localités de moindre importance, où le consommateur doit payer de plus le prix de revente et celui des transports. Et puis, messieurs, de quels avantages ne jouissent pas, sous le rapport de l’éducation de leurs enfants, ceux qui habitent les grandes villes ? D’ordinaire le magistrat destine l’un ou l’autre de ses fils à suivre la carrière qu’il a embrassée et honorée.
Tout en conservant ses enfants auprès de lui, il peut suivre et diriger leur éducation. Et évidemment la maison paternelle est plus favorable aux études sérieuses, plus propre à donner des habitudes d’ordre et de régularité au fils d’un jurisconsulte ou d’un magistrat que tout autre séjour où il n’aurait pas constamment sous les yeux l’exemple de mœurs pures et simples, et d’une vie dans laquelle il peut puiser les devoir de son futur état.
Les magistrats des petites villes, au contraire, sont obligés d’exiler les enfants du toit paternel pour les envoyer chercher au loin une instruction coûteuse et qui leur impose souvent les plus dures privations et les plus légitimes inquiétudes.
Plus j’examine la question, plus il me semble évident qu’il y a justice et convenance à ne pas établir de distinction entre les appointements des magistrats des tribunaux de troisième et de quatrième classe, aussi j’espère, messieurs, que vous vous rallierez à la proposition de la section centrale, en ce qui concerne la suppression des tribunaux de quatrième classe.
Je terminerai par une dernière observation.
De tout temps on a compris que l’intérêt de la société exigeait que la magistrature fût considérée. Le respect qui doit l’entourer lui ferait défaut, si vous ne la mettriez pas en position de vivre d’une manière honorable. Ce n’est pas, messieurs, que je désire la voir replacée dans le luxe et l’opulence. La magistrature héréditaire, qui ne serait plus en harmonie avec nos institutions, a péri, et avec elle son opulence et son luxe. Je crois, au contraire, que c’est un honneur pour la Belgique, que cette magistrature, vivant modestement et pourtant si intègre, si indépendante, si éclairée, et je ne voudrais pas porter atteinte à la considération qui naît de sa vertueuse médiocrité. Mais il me semble que les juges de paix et les magistrats des tribunaux de première instance méritent une amélioration de position, et je vous prie de ne pas hésiter à la leur accorder immédiatement, parce qu’elle leur est nécessaire.
(page 55) M. de La Coste – Il y a eu, de la part du gouvernement et des chambres, des promesses tellement renouvelées de concourir à l’amélioration de la position des membres de l’ordre judiciaire, que c’est pour ainsi dire une dette arriérée que nous sommes maintenant appelée à acquitter. L’effet immédiat de la mesure que nous allons prendre sera l’amélioration du sort des magistrats. Mais quelque juste sympathie que nous ayons pour eux, ce n’est pas cependant là le but véritable que nous nous proposons ; ce but, c’est l’intérêt du peuple en rapport avec la bonne administration de la justice.
Nous devons, je pense nous proposer un autre but encore ; c’est de faire quelque chose de définitif, de ne pas tomber d’un provisoire dans un autre ; c’est que la question de l’ordre judiciaire soit maintenant effacée de l’ordre du jour.
Je ne dirai pas, comme l’honorable préopinant, que je suis étranger au barreau et à l’ordre judiciaire. J’ai l’honneur d’être avocat ; mais depuis longtemps mes principales occupations ont eu une direction différente ; je laisserai donc la discussion de la plupart des questions qui se présenteront à d’honorables membres qui pourront y porter plus de lumières que moi ; j’écouterai beaucoup plus que je ne parlerai.
Je me bornerai à un point dont j’ai fait l’objet d’une étude spéciale. Je l’ai étudié d’après un principe que je suis toujours. Je considère l’intérêt local comme ne devant jamais faire fléchir devant lui un seul principe de justice ou d’intérêt public ; mais il nous impose l’obligation d’étudier spécialement les questions auxquelles il se rattache.
J’avoue que jusqu’à présent je ne puis partager l’opinion de mon honorable ami M. le ministre de la justice relativement à la classification des tribunaux de 1er instance. Je craindrais que le résultat de l’adoption de son opinion ne fût pas tel qu’il paraît le supposer. Cette question de classification se lie essentiellement à la question qui nous occupe. En effet, quel est l’objet de la classification ? C’est précisément la fixation des traitements. Ainsi séparer la classification des traitements, c’est séparer deux choses indivisibles.
Ce que nous ne ferons pas à cet égard dans la discussion qui s’ouvre, sera, je le crains, ajourné indéfiniment. Voyez combien il a fallu de temps pour amener ces débats, combien il a fallu que la chambre exprimât souvent le désir de voir améliorer le sort de l’ordre judiciaire, combien il a fallu attendre pour que la situation financière se présentât sous un aspect assez favorable.
Maintenant tous les intérêts qui appellent cette discussion forment ensemble un faisceau. Si vous déliez ce faisceau, vous en ôtez la force. Les intérêts d’accord avec la justice, les droits, par conséquent, que vous en aurez séparés, perdront la force qu’ils ont aujourd’hui, comme partie de ce faisceau.
D’ailleurs, la question de classification est posée, et de quelque façon qu’elle soit résolue, elle sera tranchée.
Si vous mettez dans la loi le traitement des tribunaux de quatrième classe, vous déciderez qu’il y aura une quatrième classe. Si, au contraire, vous supprimez la quatrième classe, vous faites entrer, comme l’a fait observer M. le ministre de la justice, tous les tribunaux de la quatrième classe dans la troisième. Du moins suivant le rapport de la section centrale, telle paraît être son intention quoique son projet présente peut-être à cet égard une sorte de lacune. Mais si vous faites passer tous les tribunaux de la quatrième classe dans la troisième, évidemment vous changez la classification, et je suis d’accord avec M. le ministre de la justice qu’il ne faut pas s’arrêter là.
D’après les motifs développés par l’honorable M. Pirson, et sans toutefois me prononcer encore, je ne suis pas éloigné de l’idée qu’il ne faut que trois classes, mais à la condition que nous fassions en même temps une bonne répartition des tribunaux entre ces trois classes. Remarquez bien que c’est ici précisément le rendez-vous qui nous avait été donné par le département de la justice pour traiter cette question.
Il y a très-longtemps que j’ai réuni des notes relatives au tribunal de Louvain et que j’ai formé le dossier qui est maintenant devant moi. J’ai eu, à plusieurs reprises, l’occasion d’entretenir la chambre de cet objet ; je ne l’ai touché qu’une seule fois sans m’y appesantir, parce que j’avais sous les yeux le rapport de M. Ernst, qui indiquait l’occasion actuelle comme celle où la question devait être traitée. Et maintenant on reculerait ! Je comprends qu’on désire simplifier, qu’on redoute les embarras qui peuvent résulter de prétentions diverses. Mais les embarras sont là. Il vaut mieux les régler, et je le répète, faire du définitif, que de tomber d’un provisoire dans un autre.
Que disait M. le ministre de la justice en 1838 ? En s’occupant de la réclamation du tribunal de Louvain, à l’effet de passer à la deuxième classe, après avoir exprimé l’opinion qu’il n’y avait pas lieu d’en faire dès lors l’objet d’une mesure spéciale, il ajoutait : « Les titres à cette promotion mériteront sans doute d’être examinés, lorsqu’il, s’agira, soit de modifier le classement de tous les tribunaux, soit d’améliorer le sort de tous les membres de l’ordre judiciaire. »
Et plus loin : « Du reste, quelle qu’ait été l’opinion émise sur la suppression de la quatrième, l’on a reconnu unanimement qu’il conviendrait, en adoptant cette mesure, de reporter à la deuxième classe quelques tribunaux qui font partie de la troisième, il ne paraît pas juste, en effet, d’assimiler tous les tribunaux de quatrième classe aux plus importants de la troisième, par exemple, à ceux de Charleroy, Louvain, Termonde et Courtray ; si l’on adoptait le transport pur et simple des tribunaux de quatrième classe dans la troisième, il serait donc nécessaire de refaire entièrement la classification établie par la loi du 4 août 1832. Maintenant une expérience de plusieurs années permettrait de calculer, d’une manière approximative, les travaux des corps de magistrature, etc… »
Eh bien ! c’est d’améliorer le sort de tous les membres de l’ordre judiciaire qu’il s’agit maintenant. C’est donc précisément le moment que depuis 4 ans le département de la justice indique comme celui où il devra être fait droit à ces réclamations.
C’est, je le répète, le rendez-vous qui nous a été donné par M. le ministre de la justice, auquel je me trouve, et auquel il me peinerait de ne pas le rencontrer.
Il y a d’autres villes que celles que j’ai plus spécialement indiquées qui peuvent avoir des titres. Par exemple (je ne tranche pas la question), il me semble que le tribunal de Bruges pourrait avoir des droits à passer dans la classe supérieure. Cette ville a une population de 45,000 âmes. Remarquez que c’est là le principe que posait le département de la justice en 1838 : « En principe, disait M. Ernst, l’on a été assez généralement d’avis de conserver les bases de la classification actuelle, qui semble justifiée par les différences existantes entre les grandes villes et celles dont la population est faible. »
Mais Louvain, de son côté, a une population de 25,000 âmes, et si on faisait un recensement bien exact, je crois que l’on trouverait sa population réelle plus près de 30,000 que de 25,000 âmes. Louvain est une ville importante sous le rapport de l’industrie et du mouvement commercial. Son université, ses grands établissements de tout genre y multiplient les affaires. L’expérience a prouvé non-seulement l’importance du tribunal qui devait conduire à le ranger dans la classe supérieure, mais une importance qui devait le conduire à une augmentation de personnel.
Quoi que cette question ne soit pas inséparablement liée aux présents débats, j’en dirai un mot, parce qu’elle peut avoir de l’influence sur la question de classification.
Je ne veux pas fatiguer la chambre de détails ; mais on a eu l’obligeance de me communiquer tout le dossier de la correspondance à ce sujet ; je l’ai étudié et analysé. J’y ai vu qu’au tribunal de Louvain les affaires ne marchent qu’à grand renfort d’expédients. Il a fallu former une chambre extraordinaire, composée de juges-suppléants et présidée par un membre de la magistrature. Est-ce là l’occupation des suppléants ? Est-ce à une situation normale ? N’est-ce pas la preuve de l’insuffisance du personnel ?
Cette insuffisance résulte encore, évidemment, de la comparaison avec d’autres tribunaux. Supposez que le président ou le procureur du Roi fût envoyé à la chambre, les affaires marcheraient-elles ? Il y aurait impossibilité absolue, incontestable ; il y aurait interruption, stagnation complète.
Je ne pose cette hypothèse que pour faire voir et toucher au doigt qu’il y a inégalité quant aux moyens d’expédition des affaires entre Louvain et les autres arrondissements ; que, dès lors, le but d’intérêt public que nous devons surtout nous proposer, et qui est d’assurer la bonne administration de la justice, ne sera pas atteint, si nous nous bornions à un changement dans les traitements ; qu’il faut un changement de classification, gage et prélude d’une augmentation de personnel.
On a d’abord contesté, je l’avoue, qu’il fallût augmenter le personnel du tribunal de Louvain. A la fin cependant, je crois savoir que M. le procureur-général a été lui-même d’avis qu’il fallait l’augmenter, et a proposé l’adjonction d’un juge et d’un substitut au moyen desquels ce tribunal pourrait continuer à donner cinq ou six audiences par semaine et se tenir au courant. Eh bien ! dans beaucoup d’autres tribunaux, on donne trois audiences civiles et trois audiences correctionnelles et dans des chambres différentes.
Messieurs, je serai peut-être accusé de vous occuper trop longtemps d’un intérêt local. J’ai déjà expliqué comment j’entends l’intérêt local. J’ajouterai qu’il y a dans notre arrondissement une opinion que je désirerais pouvoir détruire : c’est qu’il est fort négligé par le gouvernement. Je voudrais, dis-je, pouvoir détruire cette opinion. Lorsque dans six mois je me présenterai devant les électeurs, les preuves de sympathie et d’indulgence que j’ai reçues des électeurs de l’arrondissement de Louvain, me font espérer que j’y rencontrerai les mêmes sentiments.
Mais, je voudrais, en soumettant ma conduite parlementaire au jugement de mes concitoyens, ne pas avoir à l’expliquer aux dépens du gouvernement. Je désirerais donc vivement trouver dans ses actes quelque marque de sympathie et de justice envers l’arrondissement de Louvain, et d’après ce qui nous est annoncé, pour la session actuelle, d’après les pièces qui ont été distribuées par le gouvernement, d’après son silence sur d’autres points, s’il n’est pas fait droit aux justes réclamations de notre tribunal, mes désirs, je le crains bien ne seront réalisés, sous aucun rapport, au moins sous aucun rapport d’une importance généralement sentie.
M. Lys – Les justices de paix n’ont pas encore complètement atteint le but de leur institution. L’assemblée constituante, en établissant les justices de paix, a voulu rétablir cette magistrature des premiers âges, que la confiance décernait à la vertu, qui commandait par l’exemple, et comprimait par la seule autorité de la raison. Pour quoi le juge de paix n’est-il pas toujours l’ami, l’arbitre, le père bien plus que le juge de ses concitoyens ? Pourquoi ne réussit-il pas toujours à prévenir les procès par ses conseils, les délits, par sa vigilance ? C’est parce que la justice de paix n’est pas, en général, une position fixe pour celui qui l’occupe ; c’est parce que la justice de paix, au lieu d’être une sorte de mariage entre le magistrat et les fonctions dont il est revêtu, n’est ordinairement qu’une situation d’attente, qu’un marchepied pour arriver à de plus hautes fonctions. Or celui qui ne regarde la place qu’il occupe, que comme une position purement transitoire, ne peut pas et ne doit même pas la remplir avec goût et avec le zèle que la société est en droit d’exiger de tout fonctionnaire, et à plus forte raison de tout magistrat. Voilà, messieurs, l’une des cause les plus réelles du (page 56) peu de succès de l’institution des juges de paix. Il est facile de remédier à ce vice d’organisation. Que la justice de paix devienne une position sociale convenable pour l’homme qui en est revêtu, et la mission de conciliation confiée aux justices de paix deviendra une espèce de sacerdoce qui produira les effets les plus heureux.
Quel est aujourd’hui le traitement d’un juge de paix ? L’Etat ne lui donne généralement que 960 francs. Il est vrai que le juge de paix a droit à des émoluments ; mais les émoluments, réunis au traitement, ne donnent pas toujours, aux juges de paix des cantons ruraux et des villes de deuxième et de troisième ordre, un traitement de 1,500 francs.
Comment un magistrat pourrait-il suffire honorablement à ses besoins et à ceux de sa famille, avec une somme aussi chétive. Comment espérer que le juge de paix ne sera pas impatient de son sort ? Comment exiger de lui, qu’il ne cherche pas à sortir d’une position de gêne et à obtenir d’autres fonctions ? Cependant, messieurs, rien n’est plus contraire au principe de l’institution des juges de paix, que le déplacement du titulaire ; rien n’est pas obstatif à la réalisation du but que la loi s’est proposé d’atteindre que cette incertitude vague, qui agite celui qui ne considère pas sa position comme définitive.
Et ici, messieurs, se présente une observation qui s’applique généralement à tous les traitements qui sont trop modiques : qu’il faut assurer une existence à l’abri du besoin et de ses tentations.
Comment veut-on, par exemple, qu’un commis-greffier, père de famille, puisse vivre avec 1,000 ou 1,200 francs ? Cependant le commis-greffier d’un tribunal de première instance doit posséder une instruction assez approfondie des lois de procédure, il doit faire un long apprentissage, une grave responsabilité pèse sur lui, et la loi ne lui assure pas un traitement, qui le mette à l’abri du besoin, qui lui donne les moyens d’élever ses enfants, de leur donner de l’instruction.
Il est encore une autre lacune, qu’il importe de signaler, et que M. le ministre de la justice reconnaît exister, mais dont il ajourne le redressement, lors de l’examen d’une loi qu’il se propose de présenter sous peu de temps. Les greffiers des tribunaux de commerce ont un traitement fixe, qui est inférieur à celui des commis-greffiers des tribunaux de troisième classe. Cependant les greffiers des tribunaux de commerce forment en quelque sorte la base sur laquelle repose l’institution des tribunaux consulaires. Ces greffiers doivent, plus encore que tous les autres, posséder une connaissance parfaite des lois de la procédure et de l’enregistrement, et néanmoins la loi oublie de rétribuer convenablement leurs importants services.
Il est donc essentiel, dans l’intérêt d’une bonne distribution de la justice, que les fonctionnaires de l’ordre judiciaire trouvent, dans leur traitement, une rétribution convenable des services qu’ils rendent à la chose publique. Ces observations vont encore s’appliquer de plus près à l’objet de cette discussion.
Un juge de paix qui veut remplir dignement l’honorable mission que la loi lui a confiée doit commencer par acquérir une connaissance exacte des hommes et des choses de son canton ; sans cette double connaissance, impossible qu’un juge de paix soit vraiment digne de ce nom. Comment, en effet, concilier, prévenir des différends, lorsqu’on est étranger aux détails de localité, à ces malheureuses sources de division qui, pour être futiles, ne sont que plus dangereuses.
Il faut du temps, il faut des années, avant qu’un juge de paix ait acquis une connaissance parfaite de son canton, et c’est précisément lorsque le juge de paix commence à pouvoir répondre à la confiance de la loi, c’est lorsque son noviciat s’achève, que le juge de paix réussit, en général, à se faire élever à des fonctions plus lucratives. La justice de paix est ainsi dans un état perpétuel d’incertitude et de tâtonnement, qui empêche que, même aujourd’hui, l’on puisse encore apprécier tous les services que cette institution peut rendre.
Quelle autorité aura dans un canton un jeune homme qui quitte les bancs de l’école, et qui ne se rend à son poste que faute de mieux ? Quels services pourra jamais rendre ce jeune magistrat, qui n’envisagera ses fonctions, que comme le premier degré de l’échelle des emplois ?
Il est temps, messieurs, de rendre à la justice toute sa dignité et toute son importance ; il faut, pour atteindre ce but, que le juge de paix ne soit pas tenté de changer de position ; il faut lui donner un traitement qui lui assure une existence honorable et au-dessus des besoins. La majoration de traitements est chose indispensable pour cette classe de magistrats ; il y a même longtemps que cela aurait dû avoir lieu. Le principe de la proposition que vous fait le gouvernement est de toute équité. La réalisation du but de l’institution est à ce prix ; il faut, si je puis m’exprimer ainsi, immobiliser le juge de paix.
Il est encore une autre cause qui doit décider la chambre à majorer le traitement des juges de paix. La loi de compétence en matière civile a étendu le cercle des attributions de leur juridiction ; on a donné plus d’importance à leur compétence, il y a ainsi une augmentation de travail ; il y a nécessité d’études plus approfondies pour le juge de paix qui veut se mettre en état de remplir dignement sa mission ; il est juste qu’un surcroît de travail soit convenablement rétribué : la société ne doit pas exiger d’un magistrat des services qu’elle ne salarie pas, car c’est exposer les justifications à de graves mécomptes. Ce n’est pas uniquement dans l’intérêt des juges de paix qu’il importe qu’un traitement convenable leur soit attribué, mais c’est principalement dans l’intérêt des citoyens qui se trouvent dans le besoin d’invoquer l’appui et l’intervention de cette magistrature.
N’oubliez pas non plus, messieurs, que le juge de paix est le seul membre de l’ordre judiciaire qui ne puisse se soustraire à la responsabilité directe de ses actes. Le juge de paix décide seul, sans assesseurs, tous les litiges qui se présentent devant lui ; le juge de paix est donc directement responsable de ses décisions vis-à-vis des parties, et, ce qui est plus important encore, vis-à-vis de la société ; il ne peut, sous nul prétexte, décliner le fardeau de cette responsabilité ; il n’en est pas de même des juges faisant partie d’un tribunal civil ou des conseillers des cours de justice. La responsabilité des jugements retombe, non pas sur un seul juge, mais sur tous les membres du corps ; elle se divise, et par suite, elle disparaît en réalité. En effet, l’individualité du juge s’efface devant celle du tribunal entier. Cette face de la position des juges de paix mérite, selon moi, d’attirer toute l’attention de la chambre. Le juge de paix, forcé, par la nature de ses fonctions, d’accepter toute la responsabilité morale de ses actes, doit être dans une position qui le mette à l’abri de la tentation de reculer devant les obligations que lui impose une pareille responsabilité.
Vous n’hésiterez pas, messieurs, à prendre une mesure qui aura sans doute pour résultat de grever le budget ; mais aussi peu de dépenses se présentent sous un aspect plus favorable, mais aussi il n’y a pas de dépenses nouvelles qui soient plus indispensables, qui soient mieux justifiées.
Et quelle sera la base qui sera adoptée pour le traitement des juges de paix ? Divisera-t-on les juges de paix en plusieurs classes, ou bien adoptera-t-on un traitement uniforme ? Je pense, messieurs, qu’il convient d’adopter un taux uniforme pour tous les juges de paix. J’ai vu, avec plaisir, que M. le ministre de la justice s’était rallié à la proposition de la section centrale dont j’avais l’honneur de faire partie.
Il y aurait injustice à établir plusieurs catégories pour les traitements. En effet, les attributions des juges de paix, sous le rapport de la compétence, sont partout les mêmes ; il n’y a entre eux aucune différence : c’est ensuite que les juges de paix ont certaines fonctions à remplir, pour lesquelles ils ont droit à des émoluments de la part des parties. Le casuel des justices de paix est par conséquent plus élevé dans les grandes localités que dans les cantons ruraux, ou que dans les villes de moindre importance. Or, le système des catégories a justement pour effet de favoriser ceux d’entre les juges de paix dont l’insuffisance des traitements est déjà largement compensée par les produits du casuel ; ce sont en effet les juges de paix établis dans les grandes villes qui, d’après le projet primitif, auraient droit aux traitements les plus élevés.
Le motif qui a fait établir des différences dans les traitements des juges des tribunaux de première instance n’existe pas pour les justices de paix. Les juges de première instance n’ont pas de casuel, ils n’ont qu’un traitement fixe.
On conçoit donc qu’un juge de première instance, étant tenu à plus de frais dans une grande ville, que le magistrat remplissant des fonctions de même nature dans certaines autres localités, reçoive un traitement plus considérable ; mais comme la source du traitement du juge de paix est double, comme ces magistrats ont un casuel il faut bien admettre que les grandes localités donnent à ces magistrats des revenus beaucoup plus considérables que ceux des juges de paix des autres cantons ; si l’importance d’une localité est une cause de dépenses, elle est, par une juste compensation, productive par le casuel d’un revenu plus fort ; il est par suite impossible d’établir une classification là où les titulaires ont encore droit à des émoluments.
Une autre considération, toute aussi importante que la multiplicité des affaires, c’est la différence du tarif établissant le coût des actes soumis au casuel.
Dans les villes de première et de deuxième classe, les juges de paix ont droit pour des actes de même nature, de même importance, à des émoluments de beaucoup supérieurs à ceux des juges des autres cantons : ce serait donc, messieurs, bouleverser toutes les idées de justice que d’adopter le système des classes : pour que ce système présentât l’ombre de quelque justice, il faudrait que les bases en fussent complètement changées ; il faudrait que la dernière classe devint la première, et ainsi de suite.
Vous adopterez donc le principe d’un traitement uniforme, comme étant la base la plus équitable et la plus conforme aux véritables besoins. Le chiffre de 1,800 fr. proposé par la section centrale, me paraît également devoir réunir tous les suffrages ; c’est une moyenne entre les deux chiffres qui avaient formé la première proposition du gouvernement, qui me paraît concilier et les droits légitimes des juges de paix et la nécessité où je trouve le pays de ne faire que les dépenses strictement nécessaires.
Les observations que je viens d’avoir l’honneur de vous présenter disent assez que le chiffre proposé par la section centrale pour le traitement des greffiers des justices de paix me paraît également devoir être adapté.
Le temps, messieurs, prouvera que jamais dépense et plus utile et plus juste n’a été votée ; car c’est assurer le service de la justice pour les classes les plus malheureuses de la société ; car organiser fortement les justices de paix, c’est leur dire que la loi veut protéger sérieusement leurs intérêts.
M. le président – La chambre n’est plus en nombre.
- La séance est levée à 2 heures.