(Moniteur belge n°68, du 9 mars 1843)
M. de Renesse fait l’appel nominal à midi et quart.
M. Scheyven donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.
M. de Renesse communique les pièces de la correspondance.
« Le sieur Delbecque, ancien militaire, réclame le paiement de sa dotation sur l’octroi du Rhin. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Scheys prie la chambre de statuer sur la demande qu’il lui a adressée de concert avec le sieur Verheyden, à l’effet d’obtenir du gouvernement une indemnité du chef de dépenses faites pour concession de mines de fer. »
- Même renvoi.
M. Lys (pour une motion d’ordre). - Messieurs, je demande pardon à la chambre, si je reviens un moment sur ce qui s’est passé à la séance d’hier ; j’avais déposé au greffe une pétition, dont on a présenté l’analyse, pendant que j’étais occupé à la section centrale chargé de l’examen du budget de la guerre. Cette pétition, messieurs, est revêtue des signatures de la très grande partie des cultivateurs du canton de Herve, et des communes avoisinantes. Elle mérite, messieurs, votre attention, car elle contient la critique de plusieurs dispositions du projet de loi du gouvernement, sur la contribution personnelle. Les observations que cette pétition contient me paraissent fondées, et les motifs d’opposition très bien établis ; je demanderai donc, qu’outre le renvoi à la section centrale qui sera chargée de l’examen de ce projet de loi, ainsi qu’il a été prononcé hier, cette pétition soit insérée au Moniteur, pour que chacun des membres de la chambre puisse apprécier le mérite de cette pétition.
La proposition de M. Lys est adoptée.
En conséquence, la pétition dont il s’agit sera insérée au Moniteur.
M. Osy (pour une autre motion d’ordre). - La chambre est saisie de trois rapports de la commission des finances. Je demande qu’ils soient mis à l’ordre du jour entre les deux votes de la loi des sucres.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je demande qu’on y joigne le projet de loi qui a pour but de proroger la loi qui a été votée l’année dernière pour le transit.
- Ces deux propositions sont adoptées.
M. le président. - Par suite des votes que la chambre a émis hier, il y a lieu, me semble-t-il, de revenir au projet du gouvernement, en commençant par l’article 1. (Oui ! oui !)
« Art. 1er. Indépendamment des droits de douanes établis par les tarifs en vigueur, le sucre brut de canne est assujetti à un droit d’accise, qui est dû à l’importation en raison des quantités importées. »
« Art. 2. § 1er. Il sera accordé une tare ; savoir :
« Pour le sucre importé dans des caisses de la Havane, 14 kil. par 100 kil.
« Dans d’autres caisses, 16 kil. par 10 kil.
« En tonneaux, 15 kil. par 100 kil.
« En canassers, 10 kil. par 100 kil.
« Dans des emballages de cuir, paniers, toiles et autres semblables, 8 kil. par 100 kil.
« En nattes, 5 kil. par 100 kil.
« § 2. Cependant, lorsque la partie intéressée demandera la vérification de la tare, le résultat de l’opération servira de base à la perception de l’accise. »
« Art. 3. § 1er. Les sucres, importés en quantité de 500 kilog. au moins, pourront être emmagasinés :
« a. Sous termes de crédit pour l’accise ;
« b. Par dépôt dans les entrepôts.
« § 2. Toute quantité inférieure sera soumise au payement des droits au comptant. »
- Ces trois articles auxquels la section centrale n’a proposé aucun changement, sont adoptés sans discussion.
« Art. 4. § 1er. Il sera payé un droit de fabrication de 1 fr. 20 par 100 kilog. de sucre brut de betterave fabriqué dans le royaume. Aucun centime additionnel ne sera prélevé sur cette somme au profit de l’État.
« § 2. Chaque quittance est soumise à un droit de timbre de 25 centimes. »
La section centrale propose la suppression de cet article.
M. d’Huart. - Messieurs, il me paraît que la conséquence nécessaire de la disposition que la chambre a adoptée hier, est la suppression de l’art. 4 du projet du gouvernement, parce qu’ainsi que j’ai eu l’honneur de l’indiquer dans les courts développements que j’ai présentés, il ne pouvait s’agir en aucune façon de droit de douane, en ce qui concerne le sucre de betterave, comme addition à la disposition dons je viens de parler.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, je n’ai pas compris de cette manière l’amendement qui a été présenté par l’honorable M. d’Huart ; l’honorable membre a voulu égaliser les droits d’accise entre les deux sucres ; mais, puisque le sucre exotique est assujetti à un droit de droit de douane qui s’élève, en moyenne, à 1 fr. 20 c., il me paraît juste, pour maintenir la pondération qu’avait en vue l’honorable M. d’Huart, que le droit de fabrication d’une prime de 20 centimes soit également maintenu pour le sucre de betterave.
On a fait observer que cela compliquerait les écritures ; mais comme, dans tous les cas, nous devons tenir une comptabilité pour les droits d’accise, ce n’est qu’une colonne de plus à ajouter aux registres à ouvrir.
D’ailleurs, si le droit d’entrée venait à être modifié par suite du système commercial que la chambre pourrait adopter, afin de favoriser le commerce direct, le gouvernement s’empresserait de vous proposer un autre droit à la fabrication du sucre de betterave, que nous considérons ici comme un droit d’entrée par assimilation.
M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, s’il y a quelque chose qui doive nous étonner, c’est la proposition que vient de faire M. le ministre des finances ; il vous demande un droit sur la fabrication du sucre de betterave, égal au droit qui frappe l’entrée des sucres étrangers. C’est sans exemple dans aucun pays du monde.
A-t-on jamais vu imposer sur les produits nationaux un droit égal au droit dont on frappe les produits étrangers à l’entrée ? Et c’est après avoir voté une loi qui prive la fabrication du sucre de betterave, même de l’avantage dont elle jouissait sous l’empire de la loi de 1822, qu’on ose venir insister pour obtenir un droit de fabrication sur un produit de son pays !
Mais, messieurs, pour être conséquent, on devrait proposer également un droit de 14 fr. 80 c. sur ce que je ne dirai pas la fabrication, mais la production de la houille, parce que la houille étrangère, en entrant dans le pays, paie un droit de 8 francs 80 c. Il faudrait également, pour être conséquent, imposer la fabrication du coton au même taux que le droit établi à l’entrée des cotons étrangers en Belgique. On devrait encore frapper la fabrication du fer d’un droit égal au droit qu’on perçoit sur les fers étrangers. Or, messieurs, croyez-moi, vous en avez fait assez pour tuer l’industrie du pays ; avant deux ans, elle n’existera plus.
Dès que la fabrication du sucre de betterave sera anéantie dans le pays, savez vous ce qui en résultera ? C’est qu’on percevra sur la consommation du sucre un impôt équivalant au droit établi. Et que rentrera-t-il de cet impôt dans les caisses de l’Etat ? 3 millions de plus, et l’on percevra près de 7 millions.
Un honorable député d’Anvers me dit que je suis dans l’erreur ; eh bien, je vais lui rappeler ce qui s’est passé en 1841. En 1841, on a consommé 10 millions de sucre exotique en Belgique ; l’impôt a été perçu en 1841 à raison de 2 millions de kilog. de sucre versés à la consommation. Seulement 8 millions ont été livrés à la consommation indemnes de droit. C’est l’impôt sur deux millions qui forment le dixième de 20 millions importés.
Eh bien, l’excédant, qui est de 8 millions, a été déversé dans la consommation indemne de tout droit. La preuve que mes calculs sont exacts, c’est que vous n’avez reçu en 1841 que la somme représentant l’impôt sur 2 millions de sucre exotique qui forment le dixième des 20 millions introduits. Voilà ce qui répond à l’argument qu’on pourrait faire valoir pour nous persuader que tout l’impôt dont on frappe le sucre exotique est perçu par l’Etat. Je crois que l’honorable député d’Anvers qui paraît denier mes calculs aurait beaucoup de peine à les réfuter malgré son grand talent arithmétique.
La loi que vous avez votée à la séance d’hier est la mort d’une industrie de votre pays. En adoptant ce système, je crains que, pour favoriser la navigation on ne suive cet exemple à l’égard de toutes les industries du pays, sous prétexte que l’étranger produit à meilleur marché que nous et qu’on doit aller chercher les choses là où nous pouvons les payer moins cher.
Le seul moyen qui vous resterait encore de sauver cette industrie, mais vous n’en userez pas, serait de frapper à l’entrée d’un droit de 8 à 10 fr. par 100 kilo. les sucres étrangers. Alors vous protégeriez la fabrication du sucre indigène à l’égal de toutes les autres industries du pays. Je bornerai là mes observations.
M. Mercier, rapporteur. - Messieurs, bien que la chambre, par son vote d’hier, ait dans mon opinion consommé le sacrifice de l’industrie du sucre indigène, je n’en persévérerai pas moins à défendre jusqu’à la fin, le projet de la section centrale. Le vote qui a été émis semble assurer une protection de 25 francs au sucre indigène, ainsi que l’avait proposé la section centrale ; mais cette protection n’est que nominale. La prime de mévente doit s’accroître à raison de la quotité du droit, alors que le rendement reste le même, ou de l’augmentation de la prime d’exportation qui est aussi en rapport avec le droit prélevé à la consommation. Je comprends que l’industrie du sucre exotique ne soit pas entièrement satisfaite, parce que la réserve de 4/10 limite les exportations. Mais je soutiens, que par 100 kilog. de sucre exportés la prime sera augmentée, tout en tenant compte des 4/10 dans la retenue, empire la position du raffineur seulement en ce sens que les exportations seront moins considérables. Si la prime augmente en raison de l’élévation du droit et cela ne peut être contesté, elle sera plus forte sur une quantité donnée, qu’elle n’est aujourd’hui.
Cela étant, voyons ce qui résultera des droits que la majorité a votés. Le raffineur paiera quatre fois le droit intégral de 45 fr. et six fois le droit réduit de 33 p. c. et par conséquent a baissé à 30 fr. 15 c. si la prime de mévente reste telle qu’elle est sous la législation actuelle, et je crois qu’elle doit s’accroître en raison de l’augmentation de la prime d’exportation, si, dis-je, la prime de mévente reste telle qu’elle est aujourd’hui, la moyenne du droit que paiera le sucre exotique sera de 36.09 ; en imposant le sucre de betterave à 20 fr. il lui restera une protection de 16 fr. 09 c. Aujourd’hui le minimum de la protection est de 26,02, non compris le droit de douane ; quand la prime de mévente n’est que de 20 p. c. ce qui arrive souvent, cette protection est de 50 fr.
Il résulte de ce rapprochement que la situation actuelle du sucre indigène se trouve considérablement empirée, puisqu’au lieu d’une protection de 20,02 minimum, elle ne trouvera plus qu’une surtaxe de 16 fr. 9 c sur le sucre exotique ; ces motifs me déterminent à insister de toutes mes forces pour la suppression que propose la section centrale, de l’art 4 du projet du gouvernement.
La moyenne de 1,20 qu’on prend pour le droit de douane est d’ailleurs trop forte ; elle n’est pas en rapport avec les droits perçus par 100 kilog de sucre importé, surtout si on l’établit d’après les importations de 1840 et 1841, qui se sont faite principalement par navires nationaux ; au reste, cette considération n’est que secondaire relativement aux autres que j’ai fait valoir, je ne crois pas même que par l’adoption de cet article, comme le propose la section centrale, l’industrie du sucre indigène puisse se maintenir. Ma conviction est qu’elle perd ses conditions d’existence et que les 7/8 des établissements devront succomber.
M. Osy. - Je demande le maintien de l’art. 4 proposé par le gouvernement. L’honorable M. Dubus a fait observer que le sucre exotique ne payait que 20 cent de droit. Cela est vrai, pour les arrivages par pavillon belge mais il arrive des sucres par pavillon étrangers et ceux-là payent 1 fr 80 c Le projet de la commission d’enquête est d’imposer fortement les arrivages des entrepôts d’Europe. Le projet le plus modéré est celui de la chambre de commerce d’Anvers. Elle propose 20 cent. pour les arrivages de provenance directe par pavillon national, 1 fr. 80 cent. pour les arrivages de provenance directe par pavillon étranger ; 3 fr. pour les arrivages des entrepôts d’Europe par pavillon national ; et 5 francs pour les arrivages des entrepôts d’Europe par pavillon étranger.
Vous voyez que si ce projet était adopté, la moyenne de 1 fr. 20 c. ne serait pas trop élevée.
Si je ne craignais de prolonger cette discussion, je ferais dès aujourd’hui la proposition d’imposer à 3 et 5 fr. les arrivages des entrepôts d’Europe.
M. de La Coste. - Ce n’est pas dans l’intérêt de la fabrication indigène que je veux appuyer la suppression proposée par la section centrale Sans vouloir décourager les fabricants qui pourraient avoir encore quelque confiance dans l’avenir, je dois avouer que le principe adopté hier par la chambre me paraît conduit plus ou moins immédiatement à la suppression de leur industrie. C’est dans l’intérêt de la loi même et des principes que j’appuie la suppression.
En effet, il ne faut pas, du moins, que la loi porte un caractère ouvertement hostile à l’industrie qu’elle anéantit. Il est aussi dans l’intérêt des principes de ne pas établir un droit d’entrée sur un produit indigène. Ce serait une chose exorbitante et menaçante pour toutes les industries. C’est un principe tout nouveau qu’on introduit dans la législation et qui n’a jusqu’ici été invoqué que contre le produit dont nous nous occupons.
Et quand on irait jusqu’à l’admettre, il y aurait encore ici, dans son application, une grande injustice. Le produit étranger a le choix du pavillon. Le produit indigène n’ayant pas ce choix serait toujours soumis à la moyenne. Il en résulterait de plus d’interminables complications. Toutes les fois que nous toucherions au tarif, il faudrait toujours s’occuper des intérêts de la navigation et du commerce, d’une part, et, de l’autre, de l’industrie indigène. C’est nous jeter dans une voie nouvelle qui ne peut nous mener qu’à d’inévitables erreurs et à d’inextricables difficultés.
Il y a, du reste, quelque chose qui tranche la question. D’après les considérations que l’honorable M. d’Huart a présentées à l’appui de la proposition que la chambre a adoptée, c’est dans le sens de la suppression du droit de fabrication qu’elle a été conçue ; c’est dans ce sens qu’on a voté. On veut donc remettre en question ce qui a été décidé.
M. Cogels. - Dans les travaux de la section centrale, j’avais consenti à la suppression de l’art. 4 du projet du gouvernement, parce que le droit différentiel qui devait frapper les deux sucres n’avait pas encore été fixé.
J’aurais désiré que ce droit fût fixé à 40 et 20 fr. Mais la section centrale a adopté le chiffre de 50 et 25 fr. Dès lors je n’ai pas pu revenir sur ma première résolution.
Maintenant la question à examiner est celle-ci : Quel est le droit différentiel que vous voulez établir entre les deux sucres ? Si vous ne voulez pas compenser le droit de douane que paie le sucre exotique par un droit de fabrication sur le sucre indigène, quelle en sera la conséquence ? Que le sucre exotique aura à supporter un droit différentiel plus fort.
Remarquez qu’il ne supporte pas seulement ce droit sur toute la partie livrée à la consommation, mais sur toutes les importations, qu’elles s’exportent ou non. Si les exportations sont égales à la quantité livrée è la consommation, le droit s’élèvera à 2 fr. 40. On nous a dit que la prohibition dont jouissait le sucre de betterave ne sera pas suffisante et qu’elle sera beaucoup moindre que celle qu’on avait voulu accorder.
Je ne rentrerai pas dans cette discussion qui a déjà été trop longue, mais je ferai observer qu’il n’est pas exact de dire que sous le régime de la loi de 1838 le sucre indigène jouissait d’une protection de 26 fr. et autant de centimes. On ne peut pas considérer comme protection la charge que le consommateur s’impose volontairement. Le chiffre de la protection est représenté par la somme versée au trésor. Ainsi, quand le sucre exotique, en 1841, a payé 750 mille fr. pour dix millions de sucrés consommés, l’impôt réel n’a été que de 7 fr. 50 par cent kilog., et non de 26 fr.
Quelle sera cette somme avec l’amendement de M. d’Huart que vous avez adopté ? Elle sera de 36 fr. ; c’est du moins le chiffre admis par l’honorable M. Mercier.
Eh bien, vous voyez qu’il y a une différence de 29 francs.
Maintenant, que le raffineur de sucre exotique vende ses produits plus cher au consommateur, tant mieux pour le fabricant de sucre indigène ; plus le fabricant de sucre exotique tiendra la dragée haute, moins la concurrence sera redoutable pour le sucre indigène. Si, au contraire, le raffineur donne les sucres à bon marché, s’il fait au consommateur une concession sur le droit, alors le sucre indigène aurait plus à redouter, car la protection ne serait plus la même. Les calculs que l’on nous oppose pèchent donc par leur base. Si vous voulez calculer la protection effective, il ne faut prendre en considération que les sommes versées au trésor, les sacrifices que le fabricant s’impose en faveur du trésor, et non les bénéfices qu’il peut faire quand les marchés ne seront pas bien fournis, ou les pertes qu’il peut subir lorsque les marchés seront surchargés.
Il y a un motif de plus pour maintenir l’art. 4 : c’est que l’honorable M. Eloy de Burdinne vient de nous dévoiler des projets qui m’inquiètent un peu ; il voudrait, indirectement, détruire l’ouvrage de la chambre, et remplacer, par un droit de douane de 7 à 8 fr. sur le sucre exotique, la faveur qu’il n’a pu obtenir pour le sucre indigène ; mais, par le fait, ce droit s’élèverait à 15 où à 16 fr. C’est donc un motif de plus pour maintenir l’art. 4 car, si vous admettez ce droit, la fabrication de sucre indigène devra le subir également ; elle saura donc à quoi elle peut s’attendre.
M. Verhaegen. - Messieurs, ce que moi je ne comprends pas, c’est qu’on veuille, dans une loi fiscale, opérer par fiction. Le droit de fabrication dont parle M. le ministre des finances est une fiction car ce n’est, dit-il, au fond qu’une droit d’entrée. Ainsi, pour frapper la betterave, il faut supposer que la betterave entre de l’extérieur dans l’intérieur, car je ne conçois de droit d’entrée que sur des objets qui viennent de l’étranger et entrent dans le pays
Ainsi, non seulement, vous aurez frappé de mort l’industrie indigène, mais maintenant on veut quelque chose de plus, on veut supposer que les produits de notre sol sont des produits étrangers ; c’est une fiction qui doit amener ce résultat que vous venez demander à la chambre, c’est une dérision complète. Je le répète, je ne comprends pas de fiction en matière de loi fiscale ; il faut quelque chose de positif pour frapper un produit à l’entrée. Vous avez frappé un droit sur la consommation de la betterave, soit ; la majorité a usé de son droit, mais la frapper d’un droit d’entrée, ce serait écrire dans la loi une fausseté ; car elle n’entre pas dans le pays ; c’est le comble de l’absurde ; et je n’ai vraiment pas le courage de discuter ultérieurement sur ce point. Je ne sais si la majorité qui a soutenu la canne veut donner le dernier coup à la betterave au moyen d’une fiction, mais ce n’est pas ainsi qu’on a entendu hier la question, et je fais ici un appel à l’honorable M. d’Huart comme un orateur l’a déjà fait, pour qu’il s’explique sur le sens de sa proposition.
M. d’Huart. - J’ai fait demander le Moniteur, mais toute la séance d’hier n’a pas été imprimée. Il aurait suffi de lire ce que j’ai dit pour voir que c’était bien ainsi que j’avais entendu ma proposition.
M. Verhaegen. - La chambre a adopté hier un droit.de 20 fr. et non pas un droit de 21 fr. 20 c. Si vous l’adoptiez aujourd’hui ce serait détruire l’ouvrage de M. d’Huart. La majorité a accepté cet ouvrage, il faut le maintenir dans son entier et ne pas y toucher. Je fais donc un appel à l’honorable M. d’Huart qui, mieux que moi, soutiendra son ouvrage.
M. Desmet. - Messieurs, il faut voir ce qu’on a voté hier. L’amendement de M. d’Huart était clair. Si j’ai bien compris hier l’honorable M. d’Huart, et je pense avoir pris continuellement attention à ce qu’il a avancé, quand il a développé son amendement, il s’est entièrement reporté à la proposition du ministre des finances, à l’exception des chiffres qui devaient servir à la pondération ou au proportionnement des deux droits, et pour le restant, comme je l’ai dit, il a adopté totalement la proposition du gouvernement. En effet, qu’a-t-il dit ? Qu’il ne voulait modifier la proposition du gouvernement qu’en ce sens qu’il fallait chercher une juste pondération entre les sucres. C’est comme cela qu’on l’a entendu, c’est comme cela qu’on l’a voté.
Le but de l’amendement était de chercher des moyens de conciliation entre la pondération établie par la section centrale et celle établie par le gouvernement. Quelle était la différence établie par la section centrale ? Elle était de 25 à 50 fr. ; donc une différence de 25 fr. Qu’a proposé M. d’Huart ? Une différence de 25 fr. avec le maximum de 45 fr. pour le droit sur le sucre exotique. Si maintenant vous ajoutez 1 fr. 20 c. vous aurez 26 fr. 20 de différence ; et alors, au lieu de modifier l’amendement en moins, vous établirez une différence plus élevée que celle de la section centrale. Il faut donc continuer le vote comme nous avons voté hier.
M. Demonceau. - Messieurs, si je me rends compte du vote de mes honorables collègues de la majorité d’après le mien, j’ai entendu que l’on n’exigerait du sucre indigène rien d’autre que le droit proposé par l’honorable M. d’Huart. Il est, en effet, contraire à toutes les idées de frapper un produit indigène d’un droit fictif de douane ; cela est même contraire à la loi de douane ; car si la loi de douane reçoit son exécution, on ne peut demander que 20 centimes par 100 kil. au sucre brut importé par navire belge ; la loi a été faite dans le but de favoriser la marine nationale, elle ne demande que 10 cent. Sur les sucres importés par navire national des produits étrangers au simple droit de 10 cent., on ne peut demander à la betterave un droit de fabrication de 1 fr. 20 c. Quant à moi, je ne pourrais pas donner mon assentiment à une pareille proposition.
Maintenant, messieurs, comme j’ai entendu qu’on adressait à ceux qui ont voté l’amendement de l’honorable M. d’Huart le reproche d’avoir tué l’industrie indigène, je demanderai à donner quelques mot d’explications, parce que dans cette circonstance, si j’ai défendu l’industrie indigène, j’ai entendu compromettre le moins possible l’industrie du raffinage, mais plus encore les intérêts du trésor. J’ai cru que l’amendement de M. d’Huart était un moyen de pondérer les droits et de mettre les deux sucres sur la même ligne en assurant des revenus au trésor. On craint que l’industrie de la betterave ne trouve pas dans cet amendement autant de protection qu’on aurait désiré, mais on oublie qu’il fallait assurer au trésor les revenus dont il a besoin ; il n’était donc pas possible d’agir autrement qu’on ne l’a fait, ces revenus n’étaient assurés selon nous, qu’au moyen de la retenue votée ; mais qu’on ne dise pas que la betterave n’a plus de protection. Quelle était auparavant la protection de la betterave ? Je vous en ai donne le chiffre : elle était de 7 fr. comme le supposait la loi. Or, aujourd’hui combien les raffineurs paieront-ils ? Trois fois plus qu’ils ne payent aujourd’hui : ainsi, quand ils ne sont grevés aujourd’hui que de 7 fr. environ, ils supporteront à l’avenir 28 fr. Sans doute, la position de l’industrie indigène est aggravée, mais l’industrie du sucre exotique est aussi frappée d’une augmentation considérable.
Je sais qu’il y a une grande différence entre les prix de revient des deux sucres. La différence est toujours de 17 à 18 fr. Quel eût été le résultat du vote d’hier, si nous avions adopté le rendement de la section centrale avec la retenue de 2 1/2 dixième ? C’eût été faire indirectement contre le sucre exotique ce que nous n’avons pas voulu faire directement : C’eût été compromettre, annuler même l’exportation que l’on avait dit vouloir maintenir.
Qu’avons-nous toujours dit ? Que nous voulions maintenir les deux industries, et assurer au trésor les revenus dont il avait besoin. Nous avons voulu la coexistence des deux industries. Hausser le rendement et retenir le quart ; c’était, selon moi, empêcher l’exportation du sucre exotique ; c’était donc faire indirectement ce qu’on n’avait pas voulu faire directement en adoptant la proposition de l’honorable M. Dumortier. Ceux qui ont combattu cette proposition, qui était expresse, ne doivent donc pas, se plaindre du résultat ; l’adoption du système de la section centrale eût, d’après moi, empêché toute exportation, et je saisis volontiers cette occasion pour m’en expliquer.
M. Rogier. - Je ne puis considérer comme une fiction le droit extraordinaire de fabrication de 1 fr. 20 c. auquel le sucre de betterave serait assujetti, par assimilation au sucre exotique qui paye un droit de douane. La loi cherche à concilier deux choses, que je crois inconciliables ; elle cherche à maintenir l’existence des deux industries et les assujettit à un droit d’accise. Le sucre de betterave ne supportant pas de droit de douane, pour conserver l’équité, on l’assujettit à un droit de fabrication équivalent au droit de douane.
Hier, l’honorable M. d’Huart vous a dit qu’il voulait conserver entre les deux droits une différence de 25 fr. en faveur du sucre de betterave ; si vous ajoutez à l’un un droit de 1 fr. 20 c. que payent les sucres importés et destinés à l’exportation, droit qui sera doublé pour l’exportation, la différence ne sera plus de 25 fr. mais de 27 fr. 40 c. Or, M. d’Huart n’a pas annoncé une pareille différence ; il s’est borné à annoncer une différence de 25 fr.
M. d’Huart. - Je n’ai parlé que du droit d’accises.
M. Rogier. - Vous avez parlé d’une différence de protection entre les deux sucres.
Messieurs, si l’on veut maintenir le vote d’hier, il y a deux choses à faire : ou ajouter 1 fr. 20 c. au droit sur le sucre de betterave, ou supprimer le droit d’entrée sur le sucre exotique. De cette façon vous conserverez la proportion qui a été établie hier de 20 fr. à 45 fr.
Je ne pense pas que l’honorable M. d’Huart ait fait hier une déclaration contraire à l’opinion que nous énonçons en ce moment. On dit que l’industrie de la betterave est frappée de mort ; si cela était, je ne conçois pas pourquoi on espérerait la sauver par une augmentation de 1 fr. 20 c. Quant à moi, je ne sais si cette industrie est frappée de mort, mais je ne pense pas que le sucre exotique ait lieu de se réjouir grandement du vote que vous avez émis dans la sénace d’hier.
Je crois que la loi ne satisfera complètement aucun des deux intérêts ; c’est mon opinion.
M. d’Huart. - C’est ce qu’il faut.
M. Rogier. - Du reste, le temps nous fera connaître les conséquences de cette loi que je continuerai à considérer comme provisoire.
Je m’oppose fortement, messieurs, à ce qu’on n’assujettisse pas le sucre de betterave à un droit que l’on appellera comme on voudra, mais à un droit équivalent au droit d’entrée dont le sucre exotique est frappé. Car l’honorable M. Eloy de Burdinne vient de nous dire que dans son opinion il faudrait, pour faire vivre le sucre de betteraves, frapper le sucre exotique d’un droit de douane. Eh bien, si dans l’intérêt du trésor on veut frapper le sucre exotique d’un droit de douane plus élevé, il faudra que le sucre de betterave soit aussi frappé d’un semblable droit, et alors on verra si l’on demandera encore une augmentation de droits de douane sur le sucre exotique.
M. Eloy de Burdinne. - Il paraît que plus on accorde à l’industrie du sucre exotique, et plus elle pousse loin ses prétentions.
Messieurs, s’il y a quelque chose qui doit m’étonner, c’est de voir qu’un honorable député d’Anvers vienne nous demander que le sucre indigène supporte un droit égal à celui qui paie le sucre exotique à l’entrée, taux moyen.
Messieurs, le sucre indien qui sera introduit en Belgique par navire belge paie 20 cent. L’honorable M. Osy me fait remarquer que lorsqu’il sera introduit par navire étranger, il payera 1 fr. 80. L’honorable Osy veut traiter le fabricant belge à peu près comme l’étranger.
Messieurs, le navire belge qui introduira du sucre en Belgique sera donc traité bien plus avantageusement que le fabricant belge ; car le premier ne payera que 20 c. par 100 kilog., tandis que le second payera 1 fr. 20 c.
Messieurs, on fait valoir la protection prétendue de 25 fr. accordée au sucre indigène sur le sucre exotique. Eh bien ! on est gravement dans l’erreur et je vais vous le démontrer. L’honorable M. Cogels, qui a bien voulu contester ce que j’avais dit tout à l’heure, verra si mes calculs sont exacts. Je crois pouvoir lui prouver à l’évidence que le sucre indigène n’obtient qu’une protection de 7 fr. par 100 kil. par la loi que nous avons votée ; tandis que par la loi de 1828 le sucre indigène avait une protection de 8 centimes ; eh bien ! votre vote d’hier lui enlève un centime par kil., 1 fr. par 100 kil. Je vais vous le prouver. Je me serais abstenu d’entrer dans ces détails si on ne m’avait poussé à bout ; car je sais que la chambre est fatiguée, et je désire autant que personne de voir la question des sucres résolue.
Dans la supposition qu’en 1841 on ait introduit en Belgique 20 millions de sucre brut de canne, et c’est le minimum ; deux millions sur 20 devaient le droit à l’Etat, le dixième réservé, à raison de 37 francs 2 centimes aux termes de la loi de 1838, de ce chef l’Etat a dû recevoir la somme de 740,000 fr. somme à peu près égale à la recette faite en 1841, de manière que sur dix millions de kilogrammes de sucre entrés en consommation en 1841, 8 millions ont été affranchis du droit d’accise, et si on n’avait pas fait la retenue d’un dixième, il en serait résulté qu’il aurait dû recevoir 37 fr. 2 c. par 100 kil. et pour 10 millions de kilog. la somme de 3,700,000.
Voyons quel fût l’impôt payé par le sucre exotique.
Dix millions livrés à la consommation ayant payé au trésor 740,000 fr. donnent par 100 kilog. 8 fr. 8 c. par kilog. Telle est la protection accordée à l’industrie du sucre indigène en 1841 qui était livré à la consommation indemne de droit, encore faut-il qu’on ait importé en 1841 20 millions de kilog. de sucre exotique. Si on en avait importé seulement 15 millions, dont 10 millions pour la consommation et 5 millions pour l’exportation, alors la protection n’eût été que de 6 c. par 100 kilog. en faveur du sucre de betterave.
La loi de 1843 donnera un avantage au trésor sur la loi de 1838 en ce que 4/10 sont réservés au trésor et que l’impôt est porté à 45 fr. par 100 kilog. pour le sucre exotique et à 20 fr. pour le sucre indigène.
Admettons que l’on importe 15 millions de sucre exotique, dont 10 millions pour la consommation et 5 millions pour l’exportation ; la betterave fournira le complément de la consommation du royaume, soit 5 millions.
Voyons quel sera le montant du droit perçu par le trésor en même temps que la protection accordée à la fabrication du sucre indigène.
Sur les 15 millions de sucre exotique importé, il sera acquis au trésor l’impôt sur 4/10, soit 6 millions de kilog., qui paieront à raison de 45 fr. pour 100 kil. la somme de fr. 2,700,000.
5 millions de sucre indigène, à raison de 20 francs, donneront fr. 1,000,000.
Total de la recette : fr. 3,700,000.
4 millions formant les excédants sur 15 millions de raffinage de sucre exotique, entreront en consommation indemnes de droit parmi l’exportation des produits en sucre raffiné de 5 millions de sucre exotique ; Ce beau résultat est l’effet du rendement auquel on n’a pas voulu toucher.
Si on contestait mes calculs, je ferais remarquer qu’en 1841 le dixième des importations a seul payé l’impôt, et on doit croire que ce qui a eu lieu sur un dixième de réserve, se reproduira sur les 4/10 que nous réservons par la loi de 1843 ; c’est-à-dire que l’Etat ne recevra l’impôt que sur 4/10 réservés.
Nous ne pouvons supposer que les raffineurs soient plus maladroits sous l’empire de la loi de 1843, qu’ils ne l’étaient sous l’empire de la loi de 1838.
En d’autres termes, nous devons être certains que le droit ne sera perçu que sur les 4 dixièmes réservés ; le surplus livré pour compléter la consommation sera pris sur les excédants, comme il le fut en 1841, sous l’empire de la loi de 1843.
Le sucre exotique entrera dans la consommation pour 10 millions sur 15 millions importés qui payeront comme je l’ai établi plus haut 2,7000,000 fr.
5 millions de sucre exotique payeront 1,000,000 fr.
Soit sur 10 millions de sucre exotique à raison de 27 fr. par 100 kilog. ou 27 c. par kilogramme, quand le sucre indigène payera 20 c. par kilogramme, différence en faveur du sucre indigène, 7 c. au lieu de 8 c. dont il jouit sous l’empire de la loi actuelle. Nous avons donc aggravé la position de la fabrication du sucre indigène, et telle n’a pas été l’intention de la législature.
En révisant la loi, nous avons voulu faire produire au trésor au moins quatre millions, en même temps que nous désirons améliorer l’industrie indigène. D’après ce qui précède on doit reconnaître que nous avons manqué notre but, tant sur ce qui concerne l’intérêt du trésor que sous le rapport de.la protection à accorder à une industrie nationale qui a toutes nos sympathies, autant bien que les autres industries.
En apparence, nous aurons en recette 3,700,000 francs; mais je doute que nous les obtenions. Les raffineurs de sucre exotique trouveront les moyens d’améliorer leur industrie, et, en résultat, il est probable que le trésor, au lieu de recevoir 3,700,000 fr. recevra moins de 3 millions; n’oublions pas que sous l’empire de la loi de 1822, l’impôt a produit 1,800,000 francs, et qu’en 1836 il ne produisait plus que 180,000 francs, et que si nous n’avions pas fait la réserve des dixièmes en 1838, en 1841 la consommation du sucre n’eût plus rien produit au trésor. Ce que je dis est incontestable, puisqu’en 1841 on n’a perçu le droit sur le dixième réservé, que le surplus de la consommation a été livré indemne de droit au moyen de quelques exportations.
Notre loi de 1843 donne le dernier coup à la fabrication du sucre de betterave, vous l’avez renversée; elle languira encore deux ans au plus. Vous l’enterrerez sans payer ses funérailles, et vous ferez un tort incalculable à d’autres industries, à la classe ouvrière en même temps qu’à la production des céréales et autres produits de la terre.
Alors le commerce du sucre exotique aura le monopole de la consommation du pays, il introduira en Belgique 20 millions de sucre brut. 15 millions pour la consommation, 5 millions seront exportés sur 20 millions à raison de 4/10 réservés, 8 millions payeront un droit à raison de 45 francs par 100 kil. de 3,600,000 fr.
Le surplus de la consommation sera produit par les excédants obtenus sur les 20 millions de sucre brut raffinés, et au moyen de l’exportation de 5 à 6 millions du sucre, le raffineur sera liquidé avec le trésor sur la prise en charge des 20 millions de sucre importé.
Le commerce de sucre exotique, ayant le monopole, percevra de 3 à 4 millions, sur la consommation pour se rembourser du droit ; en outre pareille somme en prime pour être à même de concourir avec la Hollande sur les marchés étrangers. En finale, le consommateur alors payera, en sus de la valeur du sucre et du droit à percevoir par l’Etat environ 20 centimes par kilogrammes pour faite manger du sucre à bon marché à l’étranger.
Preuve: 15,000,000 de kilogrammes consommé en Belgique, frappé d’un droit de 45 fr par 100 kilogrammes devraient payer 6,750,000 fr , le trésor ne percevra que 3,600,000 fr., donc prime pour l’exportateur, 3,150,000
Encore faudra-t-il pour que la prime ne soit pas plus élevée que de 3,150,000 fr. ; il faudrait que le droit soit perçu d’après nos prévisions, tandis que d’après les précédents nous avons appris à nos dépens que par suite d’amélioration dans le raffinage on trouve le moyen d’éluder le droit dû à l’Etat, sans préjudice à la fraude, si commune et si familière en Belgique.
La loi étant votée et ne pouvant plus y revenir nous n’avons d’autre moyen pour accorder la protection convenable aux fabricants de sucre indigène, en même temps que pour assurer 4 à 5 millions de recette au trésor, que d’augmenter le droit d’entrée de 10 fr. par 100 kilogrammes.
M. Mercier, rapporteur. - Messieurs, je dois surtout prémunir la chambre contre une erreur qui est partagée, je ne puis me dispenser de le dire, par deux membres qui viennent de parler, l’un en faveur de la proposition de la section centrale, l’autre contre ; ces honorables membres prennent pour base de la protection dont jouit aujourd’hui le sucre indigène, le droit verse au trésor. Mais, messieurs, ce n’est pas là ce qui fait la condition d’existence du sucre indigène ; c’est le droit prélevé à la consommation, (et nous sommes d’accord sur ce point, du moins avec M. le ministre des finances) c’est, dis-je, le droit prélevé à la consommation sur le sucre, et non le droit versé au trésor. Venir raisonner autrement, c’est méconnaître complètement le véritable objet de la question.
Ce que nous avons à comparer, ce sont les conditions d’existence, sous l’une et l’autre législation. L’honorable M. Dubus a parfaitement développé cette proposition dans la séance d’hier; et d’accord en cela avec M. le ministre des finances, nous avons établi que la prime de mévente était de 33 p. c., les conditions d’existence du sucre indigène se résument dans une protection de 26 fr. 2 c. C’est ce chiffre de 26 fr. 2 c. qui est le droit prélevé réellement à la consommation du sucre que l’on doit comparer avec les effets des propositions adoptés dans notre séance d’hier. Or, j ai prouvé que, par suite de ces proposition, la prime de mévente était toujours supposée de 33 p. c., le droit prélevé à la consommation doit être de 36 fr. 9 c., tandis que le droit prélevé sur le sucre indigène sera de 20 fr. ; la différence en sa faveur ne sera plus de 26 fr. 2 c. comme aujourd’hui, mais seulement de 16 fr. 9 c. Voilà ce qu’il faut apprécier, si l’on veut connaître réellement la différence des conditions d’existence des deux sucres.
Pour déterminer le droit prélevé à la consommation, il faut porter en ligne de compte d’abord les 4/10, qui sont acquittés intégralement au trésor, et ensuite les. 6/10 sur lesquels le raffineur, qui travaille pour la consommation intérieure, ne paie à celui qui travaille pour l’exportation que les deux tiers du droit. La moyenne de la charge supportée par le raffineur, tant par suite des droits acquittés au trésor que de ceux qui sont versés entre les mains du raffineur qui travaille pour l’exportation, sera de 36 fr. 9 c.
Du reste, je dois ajouter que dans l’esprit de plusieurs membres de la majorité, il était bien entendu qu’on ne reviendrait pas sur ce droit de douane ou de fabrication, droit complètement insolite. Car si l’on voulait imposer davantage le sucre indigène, il ne fallait pas avoir recours à un moyen détourné. Pourquoi établir deux droits et non un seul ? Je ne comprends pas pourquoi il faudrait diviser l’impôt.
Au reste, je me renferme dans mon argument principal : la condition de la fabrication indigène est gravement empirée par les propositions que vous avez adoptées hier ; on doit le reconnaître si l’on prend en considération, non pas le droit verse au trésor, mais le droit prélevé à la consommation. Or, je crois vous avoir démontré, avec plusieurs honorables membres, que le doit perçu sur le sucre exotique ne sera que de 36 fr 9 c., tandis que celui qui frappera le sucre indigène sera de 20 fr.; qu’ainsi, la protection dont jouira ce dernier ne sera plus que de 16 fr. au lieu de 26, qu’elle est aujourd’hui.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, je déclare sincèrement que si j’avais compris l’amendement de l’honorable M. d’Huart dans ce sens, qu’il proposait la suppression du droit de 1 fr. 20 c stipulé à l’art. 4, je n aurais pas insisté en faveur de cet article ; j’aurais respecté la décision de la chambre. Mais je ne l’ai pas entendu de cette manière, et j’ai dû dès lors soutenir ma proposition pour l’honneur des principes et pour l’économie générale de la loi.
En effet, qu’avons-nous voulu par notre projet ? C’est établir une parfaite pondération entre les deux industries. Ainsi, nous disons le sucre de betterave vaut 74 fr., le sucre de canne en vaut 57, donc il faut favoriser le sucre de betterave par un droit protecteur de 17 fr. En conséquence, nous avons fixé le droit sur le sucre de canne, à 50 fr., et celui sur le sucre de betterave, à 33 fr., ce qui établissait la différence de 17 fr. entre le prix marchand des deux sucres.
Mais, par la proposition de l’honorable M. d’Huart, qui a été acceptée hier, on accorde, au lieu de 17 fr., une protection de 25 fr. Ainsi, une différence avec la proposition primitive du gouvernement de 8 fr., différence à laquelle il faut encore ajouter 2 francs pour les quantités qui échapperont à l’impôt, et 2 fr. que la loi elle-même accorde au fabricant de sucre de betterave, ce qui fait en tout 12 francs.
Dans cette état de chose et n’ayant pas compris l’amendement de l’honorable M. d’Huart comme quelques honorables membres l’ont expliqué, nous avons dû maintenir l’art. 4, que je persiste à considérer comme équitable
M. Delehaye. - Messieurs, j’ai peine à croire que le vote que nous avons émis hier, concernant les droits de consommation, soit la mort de l’industrie du sucre de betterave. J’ai d’autant plus de peine à le croire que ce sont précisément les partisans de ce sucre qui ont donné un vote approbatif à la proposition de l’honorable M. d’Huart, tandis que nous nous avons vote contre.
On avait commencé par dire que la betterave était frappée d’un coup qui devait l’écraser. Mais l’honorable M. Mercier, revenant à des sentiments beaucoup plus doux, s’est borné à dire que sa position était empirée. Eh bien, moi je dis que sa position est améliorée. Il est incontestable que sous l’empire de la loi actuelle, la betterave n’est protégée que de 8 cent. et l’honorable M. Meeus lui-même n’a évalué la protection qu’à 10 cent.
Or, messieurs j’ai démontré hier que d’après la législation nouvelle la protection sera de 45 cent. Il est donc évident que la position du sucre de betterave est améliorée d’au moins 5 centimes par kilo.
Messieurs, lorsque vous avez établi un droit différentiel pour les deux sucres, vous avez eu en vue la position que vous vouliez faire à l’une et à l’autre industrie, eh bien cette assimilation serait détruite si vous ne compensiez le droit de douane, que vous voulez maintenir à charge du sucre exotique.
Toutefois, je vous avoue, messieurs, que j’éprouve aussi quelque répugnance à donner mon assentiment à la disposition qui nous occupe, et voici pourquoi : Il faut que le droit de douane qui pèse ou qui pèsera plus tard sur le sucre exotique, pèse également sur le sucre de betterave; il faut donc que toutes les modifications que vous introduirez en ce qui concerne le droit de douane sur le sucre de canne se fassent également sentir sur le sucre de betterave.
Messieurs, nous sommes probablement à la veille de discuter le projet de loi qui nous est soumis par la commission d’enquête commerciale et qui tend à établir des droits différentiels à l’importation du sucre brut. Dès lors, je ne sais pas s’il ne serait pas convenable de suspendre le vote de cet article jusqu’à ce que nous discutions le projet de loi de la commission d’enquête. J’appelle sur ce point l’attention de M. le ministre des finances. En discutant le rapport de la commission d’enquête nous pourrions mettre définitivement les deux sucres sur la même ligne, en ce qui concerne les droits de douanes. Je ne fais pas de proposition formelle à cet égard, mais je désire que M. le ministre des finances s’en explique. Si la chambre n’était pas d’avis de suivre cette marche, alors je pense qu’il faut adopter la proposition du gouvernement.
M. Dubus (aîné). - Il est question, messieurs, d’aggraver encore la position que le vote d’hier a fait a l’industrie du sucre indigène. Je dis, aggraver plus encore que ne l’a fait le vote d’hier ; car il est certain que ce vote a réellement aggravé la position de l’industrie indigène; c’est ce que toutes les personnes de bonne foi qui étudieront la question, seront obligées de reconnaître.
On vient de dire messieurs, que les artisans du sucre indigène ont donné leur vote à cette aggravation; cela est très inexact, je prie l’honorable membre qui vient de présenter cette assertion de se rappeler qu’un vote très important a été émis hier en faveur du sucre exotique et contre le sucre indigène, et que ce vote n’a été émis qu’à la majorité de 2 voix; certes ce n’est pas à nous qu’on reprochera d’avoir donné notre approbation à ce vote que nous avons repoussé de toutes nos forces.
J’avais pensé, en effet, qu’une surtaxe de 25 fr. serait suffisante pour protéger le sucre indigène, mais à une condition essentielle, c’est que le rendement fût changé. Or, la chambre a repoussé à la majorité de deux voix la proposition de la section centrale qui tendait à changer le rendement et dès lors la surtaxe nominale de 25 fr. se réduit en réalité à 16 fr. En effet si, comme j’en suis convaincu, le sucre de betterave ne peut participer à l’exportation parce que son prix de revient est beaucoup plus élevé que le prix de revient du sucre exotique, dès lors la prime d’exportation ne profitera qu’à ce dernier sucre ; cette prime réduira le droit de consommation qui frappe le sucre exotique à 36 fr. et l’impôt de consommation qui frappe le sucré indigène sera payé intégralement ; la différence sera donc de 36 fr à 20 fr. c’est-à-dire de 16 fr., tandis que si le droit sur le sucre exotique n’était pas réduit par la prime l’exportation, la différence serait de 45 à 20, c’est-à-dire de 25 fr.
Ainsi, messieurs, vous n’avez voté hier qu’une surtaxe de 16 fr. tandis qu’auparavant la surtaxe était nominalement de 36 et en réalité de 26 fr. Vous avez donc aggravé considérablement la position du sucre indigène. Eh bien, l’on demande maintenant une aggravation nouvelle, car tandis qu’aujourd’hui le sucre exotique paie un droit de douane à l’importation et que le sucre indigène ne paie aucune espèce de droit, on propose de frapper ce dernier sucre d’un droit de 1 fr. 20 cent., indépendamment du droit d’accise de 20 fr. C’est donc une nouvelle aggravation de 1 fr. 20 cent. que l’on propose. Eh bien, messieurs, il est impossible que la chambre adopte cette nouvelle aggravation qui consommerait la destruction de l’industrie du sucre indigène.
Quel est le motif, messieurs, de cette prétendue compensation du droit de douanes? Remarquez, messieurs, que sauf les cas exceptionnels dont je vais parler, le droit de douane sur le sucre exotique n’est que de 20 cent., n’est qu’un simple droit de balance. Il est vrai messieurs, qu’il y a une surtaxe pour le sucre importé par navires étrangers et je conviens que la plus grande partie des importations se font de cette manière, mais ce n’en est pas moins là une position exceptionnelle....
M. le ministre des finances (M. Smits) - La moyenne des droits est de l fr. 20 c.
M. Dubus (aîné). - Il ne s’agit pas ici de moyenne. Le droit de douane est de 20 c., mais pour favoriser la navigation nationale on a frappé d’un droit différentiel les sucres importés par navires étrangers, et d’un droit différentiel plus élevé ceux qui sont importés par le cabotage. Eh bien, vous devez prendre pour type l’importation faite par navires nationaux, le reste forme l’exception. Proposez donc, si vous en avez le courage, une surtaxe de 20 c. pour balancer le droit de douanes, qui est de 20 c.
Ainsi, messieurs, le sucre étranger, par ce seul motif qu’il est importé par navires belges, ne paie que 20 c., et le sucre qui est le produit de fabriques belges, qui doit par conséquent être traité d’une manière beaucoup plus favorable, ce sucre serait frappé de 1 fr. 20 c. Mais par quel principe d’économie politique justifierait-on une pareille anomalie ?
Je m’oppose de toutes mes forces à l’adoption de l’art. 4.
- La clôture est demandée et prononcée sans opposition.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l’art. 4.
70 membres prennent part au vote ;
27 adoptent,
43 rejettent.
En conséquence, l’article n’est pas adopté.
Ont voté l’adoption : MM. Cogels, Cools, de Brouckere, Dedecker, de Foere, Delehaye,
de Meer de Moorsel, de Potter, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, Donny, Hye-Hoys, Kervyn, Lebeau, Lejeune, Manilius, Mast de Vries, Nothomb, Osy, Rodenbach, Rogier, Scheyven, Smits, Van Cutsem, Van Hoobrouck, Van Volxem.
Ont voté le rejet: MM. Brabant, Coghen, de Behr, de Garcia de la Vega, de La Coste, Delfosse, de Mérode, Demonceau, de Muelenaere, de Prey, de Renesse, de Sécus, de Theux, de Villegas, d Hoffschmidt, d’Huart, Dubus (aîné), Dumont, Dumortier, Eloy de Burdinne, Fallon, Fleussu, Huveners, Jadot, Lange, Lys, Malou, Meeus, Mercier, Morel-Danheel, Pirmez, Raikem, Raymaeckers, Savart, Sigart, Simons, Thienpont, Troye, Vandenbossche, Vanden Eynde, Vandensteen, Verhaegen, Zoude.
« Art. 5. § 1er. Nul ne pourra ouvrir une nouvelle fabrique de sucre, ni remettre une ancienne en activité, sans en avoir fait, au moins un mois à l’avance, la déclaration par écrit au receveur de son ressort.
« § 2. Cette déclaration contiendra :
« a. Les noms, prénoms et raison de commerce des propriétaires, possesseurs ou sociétaires et leur demeure,
« b. Les nom, prénoms du gérant on régisseur et sa demeure ;
« c. La commune où est située la fabrique ;
« d. La description et la destination des locaux, ateliers, magasins et autres dépendances ainsi que de toutes les issues ;
« e. Le nombre, le numéro et la capacité des chaudières à déféquer ;
« f. Le nombre, le numéro et la capacité des rafraîchissoirs ;
« g. Le nombre, le numéro et la capacité des formes ou cristallisoirs.
« § 3. Un écriteau portant en caractères apparents, peints à l’huile, les mots: Fabriques de sucre, sera placé à l’extérieur de toutes les usines de la fabrique, donnant sur la voie publique.
« Le fabricant sera en outre tenu de placer une sonnette a l’entrée principale de son usine. »
La section centrale a adopté l’article.
M. le ministre des finances (M. Smits) - La section centrale a proposé une modification à l’art. 7, modification à laquelle je me rallierai ; mais il importe dès lors d’apporter un léger changement au § g. de l’art. 5, en remplaçant le mot numéro par le mot série.
M. Mercier, rapporteur. - Je me rallie à ce changement de rédaction.
- L’article ainsi amendé est adopté.
« Art. 6. § 1er. Après la remise de la déclaration de profession, les employés constateront, par empotement, la contenance de tous les ustensiles et vaisseaux dénommés à l’article précédent.
« §, 2 Il sera rédigé en double un procès-verbal d’épalement, dont une expédition sera remise au fabricant; les employés y mentionneront son absence ou son refus de signer cet acte. »
La section centrale propose de rédiger l’article ainsi qu’il suit :
« Art. 5. § 1er. Après la remise de la déclaration de profession, les contenances de tous les ustensiles et vaisseaux dénommés à l’article précédent seront vérifiées métriquement; s’il y a contestation, elles le seront par empotement.
« § 2. Il sera rédigé en double un procès-verbal de contenance dont une expédition sera remise au fabricant; en cas d’absence de ce dernier ou de refus de sa part de signer le procès-verbal, il en sera fait mention, dans cet acte, par les employés. »
M. le ministre des finances (M. Smits) déclare se rallier au projet de la section centrale.
- L’art. proposé par la section centrale est mis aux voix et adopté.
« Art. 7. § 1er. Chaque vaisseau épalé portera un numéro et l’indication de sa contenance, en litres, en caractères visibles et peints à l’huile.
« § 2. Après l’épalement des formes ou cristallisoirs; les employés apposeront un plomb sur chacun d’eux. A cet effet, le fabricant sera obligé de les faire perforer à la distance de 40 centimètres au plus du rebord. L’ouverture aura un centimètre de diamètre, et sera pratiquée au dessus du numéro et de la contenance des formes ou cristallisoirs. »
La section centrale adopte le premier paragraphe de l’art, 7, et elle propose de rédiger le 2e paragraphe ainsi qu’il suit :
« § 2. Les vaisseaux jaugés ou épalés seront tous marqués distinctement. Les formes ou cristallisoirs d’une même grandeur seront désignés par la même lettre et composeront une série. Chacun des autres vaisseaux recevra un numéro d’ordre et l’indication de sa contenance en litres. Les lettes distinctes des séries, les numéros des vaisseaux et l’indication des contenances seront peints à l’huile en caractères ayant au moins cinq centimètres de hauteur.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, la section centrale ayant amendé le § 2 de l’article du gouvernement, je pense que le § 1er, auquel la section centrale s’était rallié, devient inutile, le § 2 étant suffisamment complet ; seulement, au lieu du mot distinctes, dans ce dernier paragraphe il faudrait mettre le mot distinctives.
M. Mercier, rapporteur. - Je pense aussi que le premier § peut être supprimé. Je suis également d’avis qu’il y a lieu de substituer le mot distinctives au mot distinctes.
- Le 1er § de l’article est supprimé ; le 2ème § est adopté, avec le changement de rédaction proposé par M. le ministre des finances.
« Art. 8. Les chaudières à déféquer et les rafraîchissoirs seront fixés à demeure ; ils ne pourront être déplacés, sans déclaration préalable. »
La section centrale propose de rédiger l’article ainsi qu’il suit :
« Art. 7. Les chaudières à déféquer seront fixées à demeure ; elles ne pourront être déplacées sans déclaration préalable. »
M. le ministre des finances (M. Smits) - Je ne puis pas me rallier à l’amendement de la section centrale.
Je ne sais pour quel motif elle propose une modification à l’article 8 du projet du gouvernement ; il me semble que les rafraîchissoirs devraient, comme les chaudières à déféquer, être fixés à demeure ; sinon nous aurons des fraudes à craindre ! Il ne faut pas que les employés des accises soient assujettis à parcourir toutes les places d’une usine pour découvrir le rafraîchissoir. D’ailleurs, dans presque toutes les fabriques, ces vaisseaux sont à demeure fixe ; s’il y a des exceptions, elles sont fort rares ; et la loi doit s’appliquer à la généralité.
Je maintiens, en conséquence, l’art. 8 du gouvernement.
M. Mercier, rapporteur. - Messieurs, dans beaucoup d’usines que j’ai visitées, le rafraîchissoir n’est pas fixé à demeure, et je crois qu’il ne peut en résulter aucune espèce d’inconvénient pour la surveillance, car le rafraîchissoir est toujours dans la même partie de la fabrique ; seulement on doit le rapprocher des formes pour y verser le sirop de betterave. Nous ne voulons pas, comme on paraît le supposer, que le rafraîchissoir puisse être transporté d’une place dans une autre ; nous demandons qu’il ne doive pas être fixé à demeure, ainsi que l’entend la section centrale. C’est une grande facilité pour les fabricants de pouvoir placer le rafraîchissoir plus près des formes à remplir de sirop. C’est le motif qui a engagé la section centrale à ne pas proposer d’exiger que le rafraîchissoir fût fixé à demeure ; je suis persuadé d’ailleurs qu’il n’en peut résulter aucune occasion de fraude.
Je crois donc devoir maintenir la proposition de la section centrale, tout en répétant qu’elle n’a pas voulu qu’on déplaçât le rafraîchissoir. Si M. le ministre veut proposer une autre rédaction dans ce sens, d’ici au second vote, nous l’admettrons.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, au second vote, j’aurai l’honneur de proposer une rédaction dans le sens indiqué par l’honorable rapporteur ; car mon intention n’est pas non plus de gêner le travail des fabricants ; nous désirons également que la possibilité des abus soit prévenue. Provisoirement, on peut adopter l’article de la section centrale.
- L’art. 7 du projet de la section centrale (8 du projet du gouvernement) est mis aux voix et adopté.
« Art. 9. § 1er. Il est interdit :
« a. De changer, modifier, ou altérer la contenance des vaisseaux épalés, de les remplacer ou d’en établir de nouveaux, de même nature, sans en avoir fait la déclaration, par écrit, au moins 24 heures à l’avance ;
« b. De faire usage de chaudière à déféquer, de rafraîchissoirs, de formes ou cristallisoirs dont les parois seraient échancrées ou entaillées ;
« c. D’avoir, dans les bâtiments et maisons enclavés dans l’enceinte dé la fabrique, et d’employer des hausses mobiles propres à être adaptées aux chaudières à déféquer.
« § 2. Le fabricant ne pourra faire usage des vaisseaux dont la contenance aura été changée ou modifiée, qu’après qu’ils auront été épalés comme le prescrit l’art. 6. »
La section centrale adopte le 1er § de l’article, sauf à remplacer au litt. a. les mots : vaisseaux épalés, par ceux : vaisseaux jaugés au poids.
Elle propose de rédiger le 2ème § ainsi qu’il suit :
« § 2. Le fabricant ne pourra faire usage des vaisseaux dont la contenance aura été changée ou modifiée, qu’après que leur contenance aura été vérifiée conformément à l’art. 5. »
M. le ministre des finances (M. Smits) déclare se rallier à ces modifications.
- L’article ainsi modifié est mis aux voix et adopté.
« Art. 10. Quand une forme ou cristallisoir aura été brisé ou démonté, le fabricant sera tenu de remettre aux employés le plomb qu’ils y auront apposé. »
La section centrale propose la suppression de cet article.
M. le ministre des finances (M. Smits) déclare se rallier à cette suppression.
- L’article est supprimé.
« Art. 11. Pendant la durée des travaux de fabrication, le raffinage des sucres et la distillation des jus de betterave, des sirops et mélasses sont interdits dans l’enceinte des fabriques. Toute communication intérieure de celle-ci avec les raffineries ou autres usines est également interdite et devra être scellée, selon les circonstances, soit en maçonnant les issues, soit en élevant un mur de 4 mètres de hauteur à partir du sol. Il en sera de même pour les bâtiments ou les maisons voisines non occupées par les fabricants. »
La section centrale propose de rédiger l’article, ainsi qu’il suit :
« Art. 9. Pendant les travaux de fabrication, la distillation des jus de betterave, des sirops et mélasses est interdite dans l’enceinte des fabriques. »
M. le ministre des finances (M. Smits) - Vous avez remarqué que, par l’art. 11 du projet du gouvernement, le raffinage est interdit dans les fabriques de sucre de betterave. La section centrale vous propose d’autoriser ce raffinage, puisqu’elle s’exprime de la manière suivante : Pendant les travaux de fabrication, la distillation est interdite dans l’enceinte de la fabrique. Par cette disposition, elle modifie l’art. 14, portant :
« Art. 11. Pendant la durée des travaux de fabrication, le raffinage des sucres et la distillation des jus de betterave, des sirops et mélasses sont interdits dans l’enceinte des fabriques. Toute communication intérieure de celles-ci avec des raffineries ou autres usines est également interdite, et devra être scellée selon les circonstances, soit en maçonnant les issues, soit en élevant un mur de 4 mètres de hauteur à partir du sol. Il en sera de même pour les bâtiments ou les maisons voisines non occupées par les fabricants. »
Messieurs, en autorisant le travail du raffinage dans les usines il en résulterait que le contrôle de l’administration deviendrait complètement illusoire ; le sirop pourrait être enlevé pour être livré au raffinage, de sorte que tout contrôle échapperait aux préposés des accises. En France, le raffinage est permis, mais c’est à une seule condition, que la surveillance soit permanente, que les fabricants mettent à la disposition de l’administration des locaux pour le séjour et le logement des préposés. N’ayant pas cette surveillance permanente dont la dépense serait considérable, il convient, dans l’intérêt de la loi et du trésor, de maintenir la proposition proposée par le gouvernement, sans cela une quantité considérable échapperait au contrôle, et les recettes du trésor s’en ressentiraient nécessairement. D’ailleurs, je ne vois pas une grande nécessité de modifier le projet de gouvernement puisque, dans la Belgique entière, un seul fabricant semble se borner au raffinage. L’exception serait pour un seul individu et elle entraînerait l’administration dans des dépenses considérables. Il faudrait, pour une seule fabrique quatre employés auxquels on ne pourrait pas donner moins de mille francs d’appointements, ce qui ferait une dépense de 4 mille fr. par fabrique.
M. Verhaegen. - Messieurs, le système du gouvernement est réellement inconcevable, et j’ose croire que ceux qui lui ont prêté leur appui pour les premières dispositions qu’il a proposées, ne le lui prêteront plus cette fois, car il s’agit d’une exagération excessive.
Messieurs, c’est l’art. 11 qui m’a donné la conviction que la loi actuelle n’était pas faite pour favoriser le commerce maritime, comme on a voulu le faire accroire, mais dans l’intérêt de certains raffineurs et de certaines localités. Je prie la chambre de me prêter toute son attention, car l’objet est important.
Que veut-on maintenant ? On veut arrêter l’élan de l’industrie ; c’est au progrès que l’on fait la guerre. M. le ministre me fait un signe négatif. Je vais le lui prouver. On est parvenu, au moyen d’une opération connue ou quasi-connue, à produire du sucre tout raffiné de premier jet, et de très beau sucre, le plus beau sucre que l’on puisse trouver. Je suis au regret que M. le ministre, qui est venu souvent nous apporter des échantillons, n’ait pas fait déposer un petit pain de sucre sur le bureau...
Un membre. - Il y en a dans la salle des conférences.
M. Verhaegen. - Je prie tous les membres d’aller l’examiner. Ma prière est inutile ; car j’entends dire à mes côtés qu’il est mangé. (Hilarité.)
Eh bien, on veut empêcher l’application de ce progrès. On est parvenu, je le répète, à faire, de premier jet, le plus beau sucre qu’on puisse trouver ; on veut l’empêcher !
Examinons un peu où l’on veut en venir. Maintenant qu’on a mis les producteurs de sucre de betteraves dans une position déjà très précaire, on voit, car il ne s’agit pas d’une seule fabrique, mais de toutes, c’est qu’il reste un moyen de salut pour l’industrie indigène, et à mon avis c’est le seul moyen qui consiste à pouvoir raffiner dans les établissements, à appliquer le procédé qui donne de premier jet des sucres en pains ; que fait-on ? On voudrait, et c’est tout ce système qu’on vous présente, on voudrait que les producteurs du sucre de betteraves se bornassent à faire ce qu’on appelle du sucre brut, qu’ils ne pussent pas aller plus loin. Ce sucre brut serait envoyé à des raffineries qui en feraient du sucre proprement dit. Pourquoi ne dites-vous pas aussi que les distillateurs ne devraient faire que du flegme et qu’ils seront tentés de faire transporter ce flegme dans d’autres établissements pour le rectifier ? Est-ce que dans aucun pays du monde on s’est jamais avisé d’arrêter l’élan de l’industrie ?
Comment, on introduit des betteraves dans un établissement, on les y convertit en sucre le plus brun qu’on ait jamais vu ; et on veut empêcher le fabricant de faire cela, on veut qu’il se borne à faire du sucre brut qui sera transporté dans d’autres établissements où on en fera du sucre raffiné.
Vous l’avez dit vous-même, en France le raffinage est permis dans les fabriques ; pourquoi le défendrait-on en Belgique ? Parce que la surveillance manque ? Etablissez-la ; si les mesures que vous proposez ne suffisent pas, ajoutez-en d’autres ; mais ce n’est pas là une raison qu’un gouvernement puisse alléguer pour arrêter l’élan industriel.
En France, on raffine dans les fabriques de sucre de betterave, et j’espère qu’on permettra de faire en Belgique ce qu’on peut faire en France.
Je ne vois pas ce qu’on peut avoir à craindre. Les fabriques seront surveillées. Vous avez établi une surveillance ; plusieurs articles de votre projet ont cela pour objet, et je suis convaincu qu’ils atteindront le but que vous vous êtes proposé. Je crois que cette surveillance continuelle empêchera la fraude d’une manière efficace ; si le gouvernement croit devoir y ajouter d’autres mesures encore, qu’il le fasse, nous les examinerons.
Il n’est pas exact de dire qu’une seule fabrique procède de la manière que j’ai indiquée ; toutes emploieront le même procédé, car c’est, je le répète, le seul moyen maintenant de les empêcher de tomber. Je prie les honorables collègues de ne pas perdre de vue, que si après le vote d’hier, on leur enlève encore cette ressource, c’en est fait de l’industrie indigène. Si le fabricant de sucre de betterave ne peut faire que du sucre brut, qui devra être renvoyé dans un autre établissement pour être raffiné, ces opérations ainsi divisées entraîneront des frais considérables, et la lutte deviendra impossible avec le sucre exotique. Je m’attends à voir les partisans du sucre exotique, ou plutôt des raffineries de certaines localités s’y opposer ; mais je demanderai à ceux qui se posent les défenseurs du commerce maritime, quels motifs pourront les engager à voter pour le projet du gouvernement ? Là le commerce maritime n’est en aucune façon intéressé ; vous avez obtenu pour ce commerce tout ce que vous pouviez obtenir. Si vous vous ralliez ici au projet du gouvernement, votre seul but sera d’entraver l’industrie indigène, dans l’intérêt des raffineurs de certaines localités, car le commerce maritime est, dans cette question, sans intérêt aucun ; le trésor est également désintéressé. J’entends dire la fraude pourra se faire. Non, messieurs, car vous avez pour l’empêcher les moyens nécessaires, moyens qu’on peut encore augmenter. M. le ministre des finances est là pour les proposer, si besoin est. Les fabriques doivent être surveillées dans tout état de choses, et si les mesures de surveillance déterminées dans le projet ne suffisent pas pour le cas où la raffinerie serait réunie à la fabrication, ajoutez-en de nouvelles, nous les examinerons.
Je prie M. le ministre de me répondre, faut-il qu’au lieu d’avancer on rétrograde ? Pour moi, je ne l’admets pas plus en industrie qu’en autre matière ; il faut lui permettre d’aller en avant ; elle gagne tous les jours ; il serait honteux pour la Belgique de donner cet exemple, de défendre à l’industrie de faire plus qu’elle n’a fait jusqu’à présent.
Je ne pense pas que, parmi les producteurs de sucre de betterave, il y ait ici rivalité. Cette rivalité serait fâcheuse. Les fabriques qui travaillent maintenant de telle manière qu’elles produisent le sucre raffiné se trouvent dans la position où peuvent se placer toutes celles qui voudront entrer dans la même voie, adopter le même système. Et si, pour le moment, quelques intérêts particuliers, quelques fabriques spéciales pouvaient voir leurs intérêts froissés par la disposition que je défends, j’augure trop bien de leur patriotisme pour croire que ces intérêts pourraient faire sacrifier le grand principe industriel et arrêter la marche de l’industrie dans un point aussi important que celui dont nous nous occupons.
Je me résume ; il ne s’agit pas ici du commerce maritime, mais de l’intérêt de quelques industries spéciales. M. le ministre des finances ne donne aucun motif sérieux pour s’opposer à la proposition de la section centrale. Quant à la crainte de la fraude, elle est chimérique, car vous aurez tous les moyens nécessaires pour surveiller les fabriques indigènes, et si vous ne les trouvez pas suffisants, proposez-en d’autres, nous vous donnerons notre concours.
J’ose donc espérer que cette ressource, qui reste encore à l’industrie indigène, ne lui sera pas enlevée, et que la chambre adoptera la proposition de la section centrale.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Quoi qu’en dise l’honorable préopinant sur le projet de loi que nous avons présenté en 1842, il était rédigé dans la vue de concilier tous les intérêts, ceux du trésor, ceux des fabricants de sucre indigène et ceux des raffineurs de sucre exotique.
Mais, messieurs, nous avons voulu, par la disposition insérée dans l’article 11, prévenir une fraude immédiate, une frustration des droits du trésor. Si vous permettez au fabricant de sucre indigène d’assujettir ce sucre à un raffinage dans un autre local, le contrôle de l’administration, qui ne peut s’opérer que sur les sirops, deviendra illusoire ; les sirops seront enlevés pour être soumis au raffinage, et les droits du trésor seront fraudés. Nous n’entendons pas proscrire les progrès que l’industrie pourrait faire. Lorsque le fabricant pourra produire au premier jet et sans interruption du travail de fabrication du sucre blanc pareil à celui qui est déposé ici dans l’antichambre, ce sucre blanc sera considéré comme du sucre brut ; mais si le fabricant ne travaille que du sucre en pains destiné à être assujetti au raffinage dans le même ou un autre local, il ne pourra pas le faire, parce que le contrôle nous échapperait. Il y aura donc une grande distinction à faire. Le sucre blanc obtenu du premier jet sera considéré comme sucre blanc ; mais si le fabricant produisant un sucre en grains de 1er, 2ème et 3ème types, etc. veut l’assujettir à un raffinage, la permission ne doit pas lui en être donnée, car le sirop serait enlevé clandestinement, et le droit serait soustrait au trésor. Nous sommes donc bien loin de vouloir nuire au progrès, nous voulons, au contraire, l’encourager.
M. Mercier, rapporteur. - Messieurs, beaucoup de fabricants de sucre de betteraves, ont érigé leurs usines de manière à pouvoir se livrer au raffinage. Ils ont fait pour cela de grandes dépenses, en agrandissant les bâtiments qui leur auraient été suffisants s’ils n’avaient pas eu l’intention de livrer leurs produits au raffinage. Ce serait donc pour eux une très grande perte, en même temps qu’un grand inconvénient, de ne pouvoir raffiner leurs produits après avoir tout disposé pour cela.
Je comprends que M. le ministre craigne les abus ; cependant il y a un article du projet qui laisse au gouvernement une telle latitude, qu’il peut prendre toutes les mesures nécessaires peur entraver la fraude. C’est l’article 73 (66 de la section centrale). Si les dispositions de cet article ne suffisaient pas, nous serions prêts à en adopter d’autres.
Messieurs, il est à remarquer que la prise en charge des sucres bruts et tellement surveillée, qu’il est bien difficile que des abus puissent se commettre. D’abord, on prend en charge, en raison du jus de betterave, selon le degré et la quantité inscrite. On constate la quantité de sirop au rafraîchissoir ; s’il y a un excédant sur la première prise en charge, on le porte en compte ; ensuite, à l’empli, l’action de l’administration arrive encore, et fournit un nouveau contrôle. On connaît donc parfaitement la quantité de sucre brut qui est obtenu ; les abus seraient fort difficiles à commettre ; si à cela on ajoute quelques moyens nouveaux de surveillance, tels que ceux qui ont été indiqués par M. le ministre des finances, entre autres, le placement d’employés en permanence dans les usines, on aura toute sécurité. Je crois d’ailleurs que tous les fabricants, tant s’en faut, ne se livreront pas au raffinage ; il n’y en aura que quelques-uns, et le surcroît du personnel qu’il faudra pour cette surveillance spéciale ne devra pas être très considérable.
Je pense que, quand le nouveau procédé sera plus connu, les fabricants l’emploieront de telle sorte que le cas admis par M. le ministre des finances, sera le plus fréquent, et le seul peut-être, qui se présentera dans quelque temps.
Cependant, nous ne pouvons rien préjuger avec certitude, parce que ce mode est encore aujourd’hui un secret : il est jusqu’à un certain point connu depuis quelque temps, mais on y a apporté des perfectionnements qui le rendent plus avantageux. Puisque les perfectionnements sont encore un secret, nous ne pouvons asseoir là-dessus la base de l’article qui est en discussion.
J’insiste donc pour l’adoption de la proposition de la section centrale, et je suis tout prêt, du reste, à me rallier à toutes les mesures possibles de contrôle.
M. Rodenbach. - Lorsque j’ai demandé la parole, c’était pour appuyer l’honorable M. Verhaegen. Mais M. le ministre a répondu que si on n’interdisait pas le raffinage dans le même local, cela faciliterait la fraude. La question a changé de face. Lorsque j’ai développé mon amendement, j’ai dit que les progrès de l’industrie étaient tels, qu’on pouvait faire du sucre blanc sans faire de cassonade. Je pense donc que l’article 11 devrait être rédigé autrement. Il faudrait le rédiger d’une autre manière, et dire que les établissements qui font du sucre d’un seul jet feront leur déclaration, et seront mis dans une classe à part. Je veux empêcher la fraude ; mais, ami des progrès, et puisque la chimie a fait ces progrès, il faut les admettre. Les fabricants déclareront qu’ils font du sucre blanc du premier jet et non de la cassonade.
Quant au secret dont a parlé l’honorable rapporteur, je l’ai déjà dit, on a demandé des brevets ; ainsi les autres raffineurs, quand ils voudront faire du sucre d’un seul jet, pourront se mettre dans cette classe ; il faut distinguer les classifications. Je voudrais que ceux qui font de la cassonade pussent la vendre aux raffineurs de sucre, mais ceux qui voudront se faire raffineurs se mettront dans la classe de ceux qui feront ce sucre. Je pense donc qu’avec ce changement de rédaction nous devons admettre l’article de M. le ministre ; mais celui de la section centrale pourrait donner trop d’appât à la fraude.
M. Coghen. - Je crois que la disposition de la section centrale serait dangereuse pour le trésor, en ce qu’elle faciliterait la fraude, si pendant la fabrication du sucre de betterave on permettait le raffinage dans la fabrique même, sans des dispositions spéciales, ou un contrôle très sévère. Je serais donc d’avis de maintenir l’art. 11 du projet du gouvernement et de défendre pendant la fabrication le raffinage proprement dit. Ce qui m’embarrassait, c’était de connaître l’opinion du gouvernement à l’égard d’une nouvelle application qu’on vient de faire d’un mode pour la fabrication du sucre de betterave ; mais la réponse de M. le ministre me donne tout apaisement. Si on peut du premier jet faire du sucre blanc comme celui qui a été soumis à la chambre, M. le ministre a dit qu’il serait considéré comme du sucre brut. Comme la base du droit repose sur la densité du jus, n’importe ce qu’on en fera après ; parce que c’est là la base, jamais on ne pourra en prendre que la matière saccharine renfermée dans le jus, et qui est de 12 hectogrammes par 100 litres de jus.
Si le projet du gouvernement avait pour lui d’interdire le progrès qui deviendra bientôt général pour toutes les fabriques, il ne faudrait pas l’adopter ; mais M. le ministre ne veut pas le proscrire ; il veut, au contraire, permettre que l’on puisse fabriquer du premier jet du sucre avec un degré de perfectionnement tel qu’il nous a été soumis. On doit donc admettre le projet du gouvernement.
M. de La Coste. - L’honorable préopinant vous a dit que, dans son opinion, il faudrait, dans le cas où la raffinerie aurait lieu dans le même local que la fabrication, un contrôle spécial et très sévère. Je suis aussi de cet avis, qui vient d’être développé par l’honorable rapporteur de la section centrale ; mais M. Coghen passe de cette proposition à une autre qui me semble la contredire ; il dit qu’il faudrait prononcer l’interdiction du raffinage ; mais si on interdit le raffinage, il n’y a plus besoin de contrôle. Quant à moi, j’admets un contrôle général, mais non l’interdiction.
L’honorable M. Coghen veut faire une distinction pour les sucres qui s’obtiendront d’un seul jet, mais ce serait pour les fabricants qui emploient ce procédé un privilège au détriment des autres.
Il faut remonter à l’origine, à la cause première de l’existence des raffineries dans les fabriques. Cette origine est due aux prétentions trop élevées des raffineurs, auxquelles les fabricants n’ont pas pu se soumettre ; ils n’auraient pas raffiné, mais ils y ont été forcés, et ils ont dit : Puisque l’on ne veut pas acheter nos sucres, nous raffinerons nous-mêmes.
Messieurs, vous avez vu, dans tout le cours de ces débats, combien est animée la malheureuse rivalité entre ces deux classes d’industriels. Elle deviendra encore plus ardente, car vous avez restreint le cercle dans lequel la lutte s’exerçait. Eh bien ! la question qui vous est soumise est de savoir si voulez mettre les industriels dont vous avez aggravé la position à la merci de leurs rivaux, si vous voulez que les fabricants reçoivent la loi des raffineurs.
Je crois qu’il ne faut pas les mettre à la merci de leurs rivaux, qu’il ne faut pas créer, en faveur de ces derniers, un monopole contre les premiers.
Je maintiendrai donc la rédaction de la section centrale, sauf à M. le ministre des finances à employer les moyens les plus sévères et les plus exacts de contrôle, car la fraude ne doit jamais ni se présumer ni se tolérer.
M. Dumortier. - Messieurs, la discussion qui s’agite en ce moment me paraît avoir un caractère que l’on ne saisit pas généralement, il s’agit de savoir si des fabricants de sucre de betterave pourront perfectionner leurs produits. Eh bien ! ceux qui s’opposent à ce que les fabricants de sucre de betterave puissent ainsi perfectionner leurs produits, sont à mes yeux les mêmes qui veulent qu’on puisse introduire en Belgique sur le même pied de sucres de canne bruts et des sucres de canne perfectionnés.
Ainsi, on voudrait que l’on pût introduire en Belgique sur le même pied des sucres terrés et des sucres moscovades, et l’on ne veut pas que les fabricants de sucre de betterave puissent perfectionner leurs produits. Cela me paraît tout à fait déraisonnable.
Voulez-vous adopter un système juste, mettre tout le monde sur le même pied ? Je le veux bien. Admettez alors en principe que, d’une part, les fabricants de sucre de betterave ne pourront produire que des sucres moscovades, mais qu’on ne pourra aussi importer que des sucres moscovades. Alors au moins toutes les industries seront sur le même pied. Mais si vous laissez introduire aux mêmes droits des sucres terrés et des sucres moscovades, vouloir interdire à l’industrie du sucre de betterave ce que vous accordez à l’autre, c’est encore une de ces surprises dont nous avons été témoins dans toute la discussion.
On a parlé de l’intérêt de la navigation. Eh bien, si vous voulez favoriser la navigation, vous devez faire en sorte qu’on transporte la plus grande quantité possible de produits en Belgique. On a parlé de l’intérêt de l’industrie ; eh bien, si vous voulez favoriser notre industrie, il faut établir une différence entre les droits sur le sucre terré et le sucre moscovade, de manière à favoriser la fabrication du sucre dans notre pays avec le plus grand travail possible.
Je le répète donc, il faut agir de même pour une industrie comme pour l’autre. Quant à moi, je suis très disposé à voter des droits de douane différents sur les sucres terrés et sur les sucres bruts ; et j’ai même l’intention d’en faire la proposition dans l’intérêt de l’industrie. Mais tant qu’une pareille disposition n’est pas adoptée, je ne puis m’opposer aux progrès que l’on signale. Car, encore une fois, après le vote d’hier dont je crois qu’on n’a pas compris parfaitement la portée, mais qui tue les fabriques de sucre de betterave, après que la chambre avait décidé qu’elle voulait leur maintien, je suis d’avis qu’il ne reste plus à nos industriels qu’un moyen de vivre ; c’est de pouvoir perfectionner leurs produits.
Dans tous les cas, je déclare à la chambre qu’avant la fin de la discussion, je ferai la proposition d’augmenter le droit à l’entrée sur le sucre terré, de manière à forcer notre navigation à importer surtout des sucres moscovades, et à mettre les raffineurs de sucre exotique dans les mêmes conditions que les fabricants de sucre indigène.
M. Coghen. - Messieurs, je n’ai pas été compris par l’honorable M. de La Coste. J’ai dit qu’à mon avis, si l’on voulait empêcher la fraude et ne pas froisser les intérêts du trésor, il fallait défendre le raffinage pendant le temps de la fabrication ; sinon, qu’il fallait prendre d’autres mesures qui garantissent les intérêts du trésor. Je ne m’oppose donc point à ce qu’on autorise le raffinage pendant le temps de la fabrication, pourvu que l’on prenne des mesures de précaution telles qu’on ne puisse abuser de cette faculté.
M. d’Huart. - Messieurs, il me paraît, ainsi que l’ont dit plusieurs préopinants, qu’il est très important de conserver aux fabricants de sucre indigène les moyens de perfectionner leurs produits. D’un autre côté aussi, il faut se mettre en garde contre la fraude qui pourrait résulter des libertés trop larges, des facultés trop grandes laissées au fabricant. Mais il semble que, dans l’art. 18 du projet, on trouve un moyen de contrôle certain pour l’administration. En effet, on y détermine la prise eu charge du jus. Ainsi, dès sa naissance, la quantité de sucre est connue de l’administration.
Je ne me dissimule pas cependant qu’ainsi que le fait remarquer M. le ministre des finances, il pourra se commettre quelques fraudes si on n’a pas d’autres moyens de contrôle. Mais M. le ministre des finances nous a indiqué lui-même un moyen très simple, très facile, et dont, quant à moi, je ne suis nullement effrayé, c’est d’exercer dans les fabriques une surveillance continuelle pendant la fabrication.
Cette surveillance entraînera très peu de dépenses pour l’Etat, car la fabrication ne dure que pendant trois mois à peu près, et bien probablement le raffinage ne s’opérera que dans cinq ou six usines. Mais admettons que tous les fabricants veuillent raffiner ; je ne vois pas, même dans ce cas, qu’il soit du tout impossible à l’administration de satisfaire à la surveillance. En effet, pendant ces trois mois, M. le ministre des finances pourra donner des ordres pour qu’il soit détaché, soit de certains postes de douane où l’on remarquera que le service exige une surveillance moins active, soit de certains postes d’employés d’accises, le nombre d’employés nécessaire pour exercer une surveillance continuelle dans les fabriques.
Et lors même que cette mesure devrait entraîner à la nomination de quelques employés de plus, je n’y verrais pas grand inconvénient. Car, si d’un côté, il en résultera quelques frais, de l’autre, on empêchera la fraude et on garantira les intérêts du trésor. Pendant le temps où l’on ne fabrique pas, l’administration aura ces employés à sa disposition, soit pour la douane, soit pour les accises, soit pour les autres parties du service que l’on jugerait exiger une plus grande surveillance.
Ainsi, vous le voyez, messieurs, l’honorable ministre des finances a reconnu qu’il y avait un moyen d’empêcher la fraude. Mais il reculait devant la dépense ; je viens vous démontrer que nous ne devons pas nous en effrayer, et que M. le ministre peut fort bien avoir recours à ce moyen.
Par ces considérations, je voterai pour la proposition de la section centrale, qui a pour but exclusivement d’empêcher la distillation du jus de betterave, des sirops et de la mélasse dans le même bâtiment. Il se conçoit facilement que nous devions établir cette interdiction, parce qu’on pourrait, au moyen d’autres matières qui servent à la distillation, frauder en mêlant deux matières ensemble.
Je désire que M. le ministre des finances puisse consentir au moyen de surveillance dont je viens de parler et qui me paraît donner en général plus de garanties pour la bonne exécution de la loi, car s’il y a constamment des employés dans les fabriques, il est évident qu’il sera impossible qu’on y fraude.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, je consentirai volontiers à adopter la rédaction de l’art. 9 proposée par la section centrale ; mais je dois rendre la chambre attentive aux dépenses qui en résulteront. Car une fois que la faculté existera, pour le fabricant, de raffiner le sucre qu’il aura produit, tout le monde pourra jouir de cette faculté, et dans ce cas, il faut que l’Etat se soumette à une dépense d’environ 140,000 francs. Il faudra, en effet, pour chaque fabrique quatre employés au moins ; vous ne pouvez salarier ces employés à moins de mille francs chacun ; cela fera donc pour les 36 fabriques existantes 144,000 francs pour l’année, 72,000 francs pour six mois.
Veuillez remarquer d’ailleurs, messieurs, que la distillation du genièvre s’opère surtout à partir du mois de septembre. C’est dans ce moment qu’il faudrait détacher des employés des accises pour surveiller les sucreries. Cela serait impossible. Il faudra donc créer un nouveau personnel.
Si donc je me rallie à la proposition de la section centrale, c’est avec la réserve que, dans le budget des dépenses de l’année prochaine, je pourrai venir vous demander un crédit pour augmentation des frais d’administration.
M. Mercier, rapporteur. - Après la déclaration que vient de faire M. le ministre des finances, je n’aurai que peu de mots à dire. Je ferai seulement observer qu’il faut en tous cas un personnel pour surveiller les fabriques de sucre indigène, qu’ainsi il ne s’agira que d’un supplément de dépenses peu considérable.
Une seconde observation que je veux vous soumettre, c’est que beaucoup de fabricants, au lieu de faire usage de la faculté de raffiner d’après les procédés ordinaires, auront recours aux moyens que l’on a indiqués pour obtenir des sucres raffinés au premier jet, et que, parmi ceux qui ne suivront pas ce mode, il n’y en aura probablement pas le tiers, ni même le quart qui raffineront eux-mêmes leurs produits. Ce que l’on veut surtout garantir aux fabricants de sucre indigène, c’est qu’ils ne soient pas à la merci d’une industrie rivale. Du moment que les fabricants auront cette garantie, le but sera atteint et peu d’entre eux useront directement du bénéfice de la loi.
M. Delehaye. - Messieurs, il est certain que la disposition que l’on veut introduire dans la loi peut donner lieu à des fraudes multipliées. Cependant, comme M. le ministre des finances croit pouvoir prévenir ces fraudes, je ne m’opposerai pas à son adoption.
Je ferai seulement une observation à M. le ministre des finances, je lui demanderai s’il croit pouvoir permettre que, dans les raffineries de sucre de betterave, on raffine également le sucre exotique. Je fais cette observation, parce que s’il en était ainsi, je crois qu’en présence de telles dispositions que l’on veut consacrer dans la loi, il est certain qu’il y aurait lieu aux plus grands abus. Vous remarquerez que, sous prétexte de raffiner du sucre exotique qui a payé le droit à l’entrée, on pourrait soumettre au raffinage du sucre indigène, et de cette manière, le soustraire à tout droit.
J’appelle l’attention sur ce point, parce que j’ai la conviction intime que si vous permettez en même temps le raffinage du sucre exotique et celui du sucre indigène, il y aura fraude, quelles que soient les mesures que prendra le gouvernement, M. le ministre des finances vous a dit que ces mesures de surveillance entraîneraient une dépense de 140,000 fr, Quant à moi, je crois que cette somme sera à peine suffisante. Car il faudra que les employés qui seront préposés à la surveillance des fabriques, soient bien payés pour que l’administration puisse avoir confiance eu eux. S’ils n’avaient pas des traitements d’au moins 1,000 fr., ils pourraient se laisser corrompre par les fabricants.
Je crois donc que le gouvernement doit fixer son attention sur ce point. Du reste, je le répète, puisqu’il a déclaré qu’il se ralliait à la rédaction de la section centrale, je ne m’y opposerai pas.
D’un autre côté, je désire que le gouvernement songe à ce que je viens de dire : Permettra-t-il le raffinage, en même temps et dans le même établissement, du sucre exotique et du sucre indigène ? Je pense qu’il serait de toute nécessité que le gouvernement s’expliquât sur ce point, et s’il se prononce pour la négative, je serai le premier à l’appuyer.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, je ne me suis rallié que provisoirement à l’amendement de la section centrale ; d’ici au second vote, j’aurai probablement des modifications à proposer, entr’autres, une qui tendra à permettre les visites permanentes des employés. D’après la loi actuelle, nous ne pouvons visiter que depuis le moment où les travaux commencent jusqu’au moment où ils finissent ; il faudra changer, sous ce rapport, la loi générale. Par la même raison, j’examinerai l’observation que vient de faire l’honorable M. Delehaye.
- L’amendement de la section centrale est mis aux voix et adopté.
« Art. 12. § 1er. Chaque année, avant de commencer ses travaux, le fabricant devra déclarer :
« a. L’époque à laquelle il commencera ses travaux de fabrication et celle à laquelle ils seront terminés ;
« b. Les heures de travail pour chaque jour de la semaine ;
« c. Le procédé qu’il emploiera pour l’extraction du jus ;
« d. Le nombre, le numéro et la contenance des chaudières à déféquer, des rafraîchissoirs, des formes ou cristallisoirs ;
« e. La quantité de betterave qu’il se propose de mettre en fabrication pendant la durée de la campagne ;
« § 2. Cette déclaration sortira ses effets après que le receveur en aura donné ampliation. »
La section centrale propose la suppression des mots : Et celle à laquelle ils seront terminés, ainsi que du § e.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Il me paraît, messieurs, que, par suite des changements apportés dans l’art. 7, il faudrait introduire les modifications suivantes dans l’article 12 :
Au § 1er, littera d, il faudrait dire : « Le nombre, le numéro et la contenance des chaudières à déféquer et des rafraîchissoirs. »
Il faudrait ensuite introduire un littera e nouveau, qui serait ainsi conçu :
« Le nombre par série et la contenance des formes ou cristallisoirs. »
Le littera e primitif deviendrait le littera f
M. Mercier, rapporteur, déclare se rallier aux modifications proposées par M. le ministre des finances.
L’art. 12, ainsi modifié, est adopté.
« Art. 13. Le fabricant qui voudra augmenter ou diminuer le nombre des vaisseaux déclarés, changer les heures de travail, modifier le procédé d’extraction du jus, suspendre ou cesser les travaux de sa fabrique, ou les continuer hors des jours et heures déclarés, devra en faire, la veille, la déclaration au bureau des accises de son ressort. »
« Art. 14. § 1er. Les chaudières à déféquer et les rafraîchissoirs non compris dans la déclaration de travail prescrite par l’art. 10, seront mis sous scellé.
« § 2. Pareille formalité sera observée à l’égard des râpes et des chaudières à déféquer, lors de la suspension ou de la cessation des travaux de la fabrique.
« § 3. Les employés rédigeront, en double, un procès-verbal de cette opération ; il contiendra la désignation des ustensiles et le nombre des scellés apposés sur chacun d’eux. Une expédition de ce procès-verbal sera remise au fabricant. Les employés indiqueront son absence ou son refus de signer cet acte.
« § 4. Le fabricant est obligé de représenter, à toute réquisition, les ustensiles mis sous scellé. Il ne pourra vendre, prêter ou céder ses formes ou cristallisoirs, sans déclaration préalable. »
- Ces articles sont adoptés.
« Art. 15. § 1er. Les fabricants tiendront deux registres. Le premier, à souche, servira à inscrire toutes les défécations, à mesure qu’elles auront lieu, et sans interruption ni lacunes.
« § 2. Le numéro de la chaudière, la date et l’heure de l’opération y seront inscrits à l’instant même où le jus commencera à couler dans la chaudière, ainsi que l’heure à laquelle la défécation sera terminée.
« § 3. Au moment où le jus sera déféqué, et avant que le robinet de décharge soit ouvert, ou qu’aucune partie de ce jus soit enlevée de la chaudière, un bulletin contenant les mêmes indications que la déclaration, sera détaché de la souche et jeté dans une boîte dont les employés auront la clef.
« § 4. Si la défécation a lieu dans plusieurs chaudières à la fois, le fabricant remplira un bulletin pour chaque chaudière.
« § 5 Toute rature ou surcharge, dans les heures qui marquent le commencement et la fin des défécations doit être approuvée.
« § 6. Le second registre, résumant les opérations journalières à la défécation présentera :
« a. La date ;
« b. Le numéro des chaudières employées à la défécation et le nombre des défécations opérées dans chacune ;
« c. Le volume, en litres, du jus soumis à la défécation, d’après la contenance des chaudières, et sous la déduction accordée par l’article 17. »
La section centrale propose la suppression du § 5.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Je ne sais pas le motif, messieurs, pour lequel la section centrale propose de supprimer le § 5 qui donne une espèce de garantie à l’administration.
M. Mercier, rapporteur. - Le motif pour lequel la section centrale a proposé la suppression de ce paragraphe, c’est simplement que les indications dont il s’agit sont tenues par de simples ouvriers, ou par des contremaîtres, qui la plupart du temps n’apprécieraient pas l’importance du paragraphe dont il est question. Je crois que nous pourrions nous en rapporter à cet égard à l’équité du gouvernement qui probablement n’exercerait aucune poursuite alors qu’il n’y aurait pas de motif de supposer la fraude. C’est donc là un amendement auquel je ne tiens pas beaucoup, persuadé que je sais que le gouvernement agira avec bienveillance et qu’il ne fera de poursuite que lorsqu’il soupçonnera qu’il y a fraude.
- La suppression du § 5 est mise aux voix ; elle n’est pas adoptée.
L’art. 15, tel qu’il a été proposé par le gouvernement, est adopté.
« Art. 16. Les bulletins déposés dans la boîte mentionnée à l’article 15 seront retirés par les soins de l’administration ; il en sera donné récépissé au fabricant pour sa décharge. »
« Art. 17. § 1er. Les fabricants devront représenter, à toute réquisition des employés, les registres des défécations et des opérations journalières. Ces registres seront renfermés dans une boîte à fournir par les fabricants ; elle sera placée, ainsi que celle servant à déposer les bulletins, dans la partie de l’atelier de fabrication où se trouvent les chaudières à déféquer.
« § 2. Les ampliations des déclarations de travail, pour la durée de la campagne, resteront annexées au registre des défécations. »
- Ces articles sont adoptés.
Mode de prise en charge au compte de fabrication
Article 18 du projet du gouvernement
« Art. 18. § 1er. Le compte du fabricant sera chargé, au minimum, de 12 hectogrammes de sucre brut par 100 litres de jus et par chaque degré du densimètre au-dessus de 400 degrés (densité de l’eau) reconnu, avant la défécation, à la température de 15 degrés centigrades.
« § 2. Les fractions au-dessous d’un dixième de degré du densimètre seront négligées. »
La section centrale propose l’adoption de l’article.
- L’article est adopté.
« Art. 19. Le volume du jus soumis à la défécation sera évalué d’après la contenance des chaudières, déduction faite de 10 p. c. »
La section centrale propose l’adoption de l’article.
- L’article est adopté.
« Art. 20. A leur arrivée dans les fabriques, les employés constateront la densité du jus, et appliqueront cette densité à toutes les défécations opérées depuis leur dernier exercice. »
La section centrale a proposé la suppression de cet article.
M. Mercier, rapporteur. - La section centrale a déjà fait connaître, dans son second rapport, que son intention n’est pas de proposer la suppression de l’art. 20 ; ainsi la section centrale se réunit au projet au gouvernement.
- L’art. 20 est adopté.
« Art. 21. § 1er. Les fabricants qui ajoutent dans le jus à déféquer des sucres imparfaits, devront, à chaque défécation, et au moment où le jus commence à couler dans les chaudières, indiquer le volume, en litres, de ces sucres, sur le registre des défécations.
« Art. 2. Pour s’assurer de l’exactitude de la déclaration, les employés prépareront un mélange de jus pur et de sucres imparfaits dans la proportion indiquée par l’inscription au registre des défécations. La densité de ce mélange sera comparée à celle du liquide contenu dans la chaudière. Il y aura contravention, si la différence est supérieure à un dixième de degré de densité du jus pur mis en défécation.
La section centrale propose l’adoption de cet article.
- L’article est adopté.
« Art. 22. § 1er. Dans les fabriques où les procédés ordinaires de défécation ne sont pas suivis, la quantité de sucre à prendre en charge au minimum fixé par l’art. 18, sera déterminée d’après la capacité des chaudières, cuves ou autres vaisseaux, dans lesquels seront réunis les liquides obtenus par le déplacement du jus, la macération des betteraves desséchées, la macération des betteraves fraîches, ou par tout autre procédé, et en raison de la densité desdits liquides.
« § 2. Les formalités prescrites, pour la tenue du registre des défécations, seront appliquées, dans ces fabriques, à la première réunion des jus dans les chaudières, ou dans les autres vaisseaux qui les remplacent. »
La section centrale propose l’adoption de cet article.
- L’article est adopté.
« Art.23. § 1er. Indépendamment du registre des défécations et de celui des opérations journalières, les fabricants tiendront un troisième registre, à souche, indiquant :
« a. L’heure à laquelle le rafraîchissoir commencera à être chargé ;
« b. La quantité de sirop cuit qu’on y déposera ;
« c. Le numéro des formes ou cristallisoirs dans lesquels le sirop aura été versé.
« § 2. Ce registre sera conservé dans l’empli, de la manière indiquée à l’art. 17, afin de pouvoir être remis immédiatement aux employés. »
La section centrale propose l’adoption de cet article.
- L’article est adopté.
« Art. 24. § 1er. Aussitôt que la dernière forme du cristallisoir aura été rempli, un bulletin contenant les mêmes indications que la déclaration sera détaché de la souche, et jeté dans une boîte dont les employés auront la clef.
« § 2. Dans les fabriques où l’empli est séparé de la purgerie, les formes en cristallisoirs devront être conservés à l’empli pendant six heures au moins. Les fabricants seront, en outre, tenus de représenter ces mêmes formes ou cristallisoirs à toute réquisition des employés, pendant un délai de 48 heures. »
La section centrale propose l’adoption de cet article.
- L’article est adopté.
« Art. 25. § 1er. Il sera établi par les employés, de concert avec les fabricants, une échelle métrique, suivant la forme à prescrire par l’administration, pour reconnaître la quantité de sirop déposée dans les rafraîchissoirs, et faciliter ainsi aux fabricants les moyens de satisfaire, sous ce rapport, aux obligations qui leur sont imposées.
« § 2. Cette échelle sera également conservée dans l’empli. »
La section centrale propose l’adoption de cet article.
- L’article est adopté.
« Art. 26. Les bulletins d’empli seront retirés de la boîte en observant les formalités indiquées dans un cas analogue par l’art. 16. »
La section centrale propose l’adoption de cet article.
- L’article est adopté.
« Art. 27. La quantité de sucre brut que contiennent les sirops passés au rafraîchissoir, sera établie en raison de la capacité de ce vaisseau et de celle des formes ou cristallisoirs remplis, dans la proportion de 49 kilog., par 100 litres de sirop, pour les premiers et seconds produits, et de 25 kilog., par 100 litres de sirop, pour les troisièmes (sucres imparfaits). »
La section centrale propose l’adoption de cet article.
- L’article est adopté, avec la suppression des mots sucres imparfaits, proposée par M. le ministre des finances.
« Art, 28. 1er. Ainsi que cela est stipulé à l’art. 18, la prise en charge au compte de fabrication aura lieu d’après la densité de jus à déféquer. Toutefois, quand elle sera inférieure aux quantités de sucre brut constatées par le registre à l’empli, le compte sera chargé de la différence en plus que présentera ce dernier registre.
« § 2. Les fabricants seront redevables du droit d’accise d’après les mêmes bases. »
La section centrale propose l’adoption de cet article.
- L’article est adopté.
« Art. 29. Les fabricants qui voudront clarifier les sucres imparfaits en troisièmes produits, devront en faire la déclaration trois jours à l’avance.
« Les employés assisteront au versement de ces sucres dans la chaudière de clarification, et constateront la quantité de sucre brut qu’ils représentent, d’après la proportion mentionnée à l’art. 27. Cette quantité sera ensuite portée en décharge au compte de fabrication, sauf à prendre en charge le sirop obtenu et passé au rafraîchissoir, dans la proportion de 47 kilog. par 100 litres de sirop. En aucun cas, la prise en charge, après la clarification, ne sera inférieure à la quantité de sucre des troisièmes produits primitivement constatée, et dont le compte aura été déchargé. »
La section centrale adopte la rédaction du gouvernement, sauf en ce concerne les mots : ou troisièmes produits insérés au § 1er, et dont elle propose la suppression.
M. le ministre des finances (M. Smits) déclare se rallier à cette modification.
- L’article ainsi modifié est mis aux voix et adopté.
« Art. 30. Avant de commencer ses travaux, le fabricant garantira le montant du droit de fabrication et du droit d’accise dont il deviendra débiteur. A cet effet, il fournira un cautionnement en rapport avec la quantité de betterave déclarée, conformément à l’art. 12, § e.
« § 2. Ce cautionnement sera déterminé sur un rendement de 5 kilog. de sucre brut par 100 kilog. de betteraves, et devra représenter les droits dus, pendant un mois, en raison de la durée des travaux de fabrication.
« § 3. Si le fabricant emmagasine une plus grande quantité de betteraves que celle déclarée primitivement, il sera obligé d’en faire la déclaration, et de fournir un supplément de cautionnement sur le pied indiqué ci-dessus. »
La section centrale propose de rédiger le § 1er de l’article, ainsi qu’il suit :
« Art. 27. § 1. Avant de commencer ses travaux, le fabricant garantira le montant du droit d’accise dont il deviendra débiteur. A cet effet, il fournira un cautionnement en rapport avec la quantité de betterave, qu’il aura déclaré vouloir employer pendant un mois. »
La section centrale maintient le 2ème § du projet du gouvernement et elle propose de rédiger le 3ème § ainsi qu’il suit :
« § 3. Si le fabricant veut employer pendant le mois une plus grande quantité. (Le reste comme au projet.)
M. le ministre des finances (M. Smits) déclare se rallier à la rédaction proposée par la section centrale.
- L’art. 30 ainsi amendé est mis aux voix et adopté.
« Art. 31. Lorsqu’il sera constaté que la quantité de betteraves mise en fabrication aura dépassé de 10 p. c. celle qui, chaque mois, pouvait être employée aux termes de sa déclaration, le fabricant sera privé, pour la durée ou le restant de la campagne, de la faveur d’enlever ses sucres sous termes de crédit ou de les déposer en entrepôt fictif, et il devra en acquitter les droits à l’époque fixée par l’art. 32. »
La section centrale propose de substituer les mots pendant le mois à ceux-ci : chaque mois.
M. le ministre des finances (M. Smits) déclare se rallier à ce changement.
- L’art. 31 ainsi amendé est adopté.
« Art. 32. A l’expiration de chaque mois, les sucres extraits des formes ou cristallisoirs devront être déclarés en consommation, sous paiement des droits au comptant ou à termes de crédit, ou dirigés sur entrepôts fictifs ; dans le cas contraire, le droit d’accise, à liquider suivant la quotité fixée à cette époque, sera exigible, et le recouvrement en sera immédiatement poursuivi. »
La section centrale propose l’adoption de l’article.
- L’article est adopté.
Art. 33. § 1er. Après la cessation des travaux de chaque campagne, le compte du fabricant sera déchargé des quantités de sucres imparfaits repassés à la défécation.
« § 2. Celui qui, alors, aura conservé des sirops et mélasses cristallisables, sera tenu de les représenter en tout temps aux employés, à moins qu’il ne les dénature par l’addition d’un levain, opération à laquelle ceux-ci devront assister. »
La section centrale propose l’adoption de l’article.
- L’article est adopté.
« Art. 34. Les registres et boîtes mentionnés aux art. 15 §§ 1 et 3, 25, § 1 et 24 § 1 seront fournis par l’administration. »
La section centrale propose l’adoption de cet article.
- L’article est adopté.
« Art. 35. Le droit de fabrication sera réglé au dernier jour de chaque mois, et la somme due de ce chef devra être acquittée au plus tard le 20 du mois suivant. »
La section centrale propose la suppression de cet article,
M. le ministre des finances (M. Smits) déclare se rallier à cette suppression.
- L’article est supprimé.
« Art. 36. L’enlèvement des quantités inscrites au compte de fabrication aura lieu :
« a. Pour la consommation, sous paiement de l’accise au comptant ou à terme de crédit au compte d’un raffineur ou d’un négociant ;
« b. Par dépôt en entrepôt fictif concédé pour des sucres bruts de betterave, lorsque les sucres qu’on voudra y déposer seront en poudre et de qualité marchande. »
La section centrale propose l’adoption de l’article.
M. Coghen. - Messieurs, M. le ministre des finances a déclaré antérieurement qu’il considérait comme sucre brut celui qui était produit du premier jet en pains. Maintenant, dans l’art. 36, il est dit qu’on n’admettra dans les entrepôts fictifs que le sucre en poudre et de qualité marchande ; par conséquent, le sucre qui serait le résultat du jet premier ne pourrait pas être admis en entrepôt fictif.
Il faut donc à cet article une modification pour appliquer le système qui a été admis par M. le ministre des finances.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, au second vote, je proposerai une série de modifications qui sont les conséquences des résolutions adoptées aujourd’hui.
- Personne ne demandant plus la parole, l’art. 36 est mis aux voix et adopté.
« Art. 37, 1er. Le droit d’accise est fixé à 45 fr. les 100 kil. de sucre brut de canne, et à 20 fr. les 100 kilog. de sucre brut de betterave. »
Cette disposition a été adoptée à la séance d’hier.
Il reste à voter sur les 2ème et 3ème §§ de cet article, qui sont ainsi conçus :
« § 2. Sont supprimés, comme rentrant dans cette somme, les centimes additionnels perçus au profit de l’Etat, ainsi que le timbre collectif des quittances.
« § 3. Chaque quittance du paiement de l’accise est frappée d’un droit de timbre de 25 centimes. »
- Ces paragraphes sont mis aux voix et adoptés.
Les articles 38, 39 et 40 du projet primitif sont supprimés.
« Art. 41. § 1er. Les mouvements à l’entrée et à la sortie des entrepôts, pour les sucres bruts de canne ou de betterave, sont réglés de la manière suivante :
« SUCRES DE CANNE.
« Entrepôts libres.
« § 2. Les comptes seront débités des quantités :
« a. Importées directement ;
« b. Transcrites dans le même entrepôt au compte d’un autre négociant.
« Ils seront déchargés des quantités ;
« a. Déclarées pour la consommation ;
« b. Transcrites dans le même entrepôt au compte d’un autre négociant ou transférées sur entrepôts publics ou fictifs ;
« c. Déclarées à la réexportation ou au transit.
« Entrepôts publics.
« § 3. Les comptes seront débités des quantités :
« a. Importées directement ;
« b. Transcrites dans le même entrepôt au compte d’un autre négociant ;
« c. Transférées des entrepôts libres ou publics.
« Ils seront déchargés des quantités :
« a. Déclarées pour la consommation ;
« b. Transcrites dans le même entrepôt au compte d’un autre négociant ;
« c. Transférées sur entrepôts publics ou fictifs
« d. Déclarées au transit.
« Entrepôts fictifs.
« § 4. Les comptes seront débités des quantités :
« a. Importées directement ;
« b. Transférées des entrepôts libres, publics ou fictifs.
« Ils seront déchargés des quantités :
« a. Déclarées pour la consommation ;
« b. Transférées sur entrepôts fictifs.
« § 5. Les comptes seront débités des quantités :
« SUCRES DE BETTERAVE.
« Entrepôts fictifs.
« a. Enlevées des fabriques ;
« b. Transférées d’un autre entrepôt fictif.
« Ils seront déchargés des quantités :
« a. Déclarées pour la consommation ;
« b. Transférées sui entrepôts fictifs.
« § 6. Les mouvements autorisés par le présent article n’auront pas lieu en quantité inférieure à 500 kilogrammes, à moins que ce ne soit le restant des diverses prises en charge.
« § 7. Les livraisons à des particuliers pourront s’effectuer en quantité de 50 kilogrammes, et plus, sous payement de l’accise au comptant. »
« Art. 42. § 1er. Il est interdit de déposer des sucres bruts de canne et des sucres bruts de betterave dans le même entrepôt.
« § 2. Aucun changement d’emballage n’est permis dans les entrepôts fictifs, à moins d’une autorisation spéciale de l’employé supérieur dans l’arrondissement. »
« Art. 43. Les transports sur entrepôts s’effectueront sous passavants à caution : ils seront soumis à la vérification des employés, tant au lieu du départ qu’à celui de la destination, et devront être représentés au lieu de passage, sur la route à parcourir, et à désigner sur les documents. »
« Art. 44. L’entrepôt fictif pourra être concédé dans l’intérieur du royaume, ainsi que dans les villes fermées, les forts et les communes dont la population agglomérée est de 2,000 âmes ou plus, placées dans la distance de 5,500 mètres de la frontière de terre et des côtes maritimes, pourvu qu’il existe dans les endroits où l’on se propose de les établir, un receveur chargé de la perception des droits d’accise. »
« Art. 45. Quiconque voudra jouir de l’entrepôt fictif devra :
« a. Faire à cet effet la demande au directeur dans la province ;
« b. Décrire exactement tous les magasins et locaux ;
« c. Fournir un cautionnement suffisant pour garantir les droits.
« Les sucres déposé dans les entrepôts fictifs seront représentés en tout temps aux employés. La vérification à faire de ce chef aura lieu sans frais pour les entrepositaires. »
« Art. 47. Si l’administration juge utile de faire dans les mêmes entrepôts fictifs plus de deux recensements dans le courant d’une année, l’on ne pourra y procéder qu’en vertu de l’autorisation, par écrit, de l’employé supérieur de l’arrondissement. »
« Art. 48. Toute quantité excédant celle qui devrait exister dans les entrepôts fictifs, sera prise en charge au compte nouveau à ouvrir aux entrepositaires. Quant aux manquants, les droits seront acquittés immédiatement, d’après le montant de l’accise due au moment où les manquants auront été reconnus. »
- Tous ces articles sont adoptés sans discussion.
« Art. 49. § 1er. Les termes de crédit seront fixés d’après le montant de l’accise, et divisés, en ce qui concerne les négociants, en sucres bruts, en deux termes, de 3 en 3 mois, si l’accise atteint ou reste en-dessous de la somme de 1,000. fr. Lorsqu’elle dépassera cette somme, les échéances auront lieu en trois termes, de 3 en 3 mois.
« § 2. Quel que soit le montant de l’accise, les crédits ouverts aux raffineurs auront, chacun, une durée de six mois.
« § 3. Les termes de crédit commenceront à courir du jour de la délivrance du document qui aura servi à la prise en charge de l’accise au compte soit des négociants soit des raffineurs.
« § 4. Il sera fourni une caution suffisante pour garantir les droits. »
- Cet article est adopté sans discussion.
« Art 50. § 1er. Les comptes seront débités des quantités provenant d’importation directe, de sortie d’entrepôts ou des fabriques de sucre de betterave. La prise en charge aura lieu au moyen d’un passavant à caution qui sera déchargé par le receveur du lieu de la destination.
« § 2. Les quantités formant chaque prise en charge ne pourront être inférieures à 500 kilog. »
- Cet article est adopté sans discussion.
« Art. 51. L’apurement des comptes ouverts aura lieu :
« a. Par paiement des termes échus ;
« b. Par exportation de sucres raffinés avec décharge de l’accise, mais seulement en ce qui concerne les raffineurs, et jusqu’à concurrence des six dixièmes du montant des prises en charge ;
« c. Par dépôt des sucres raffinés dans les entrepôts publics conformément à l’art. 59. »
- Cet article est adopté sans discussion.
« Art. 52. § 1. La décharge de l’accise résultant des sucres exportés ou déposés dans les entrepôts publics, sera imputée sur les termes de crédit dont l’échéance est la plus prochaine, et calculée proportionnellement, mais avec suppression de toutes les fractions de centimes, d’après le droit dû au moment où la prise en charge a été opérée au compte.
« § 2. Néanmoins, pour jouir de cette décharge, les sucres destinés à l’exportation devront être présentés à la vérification des employés, avant l’échéance des termes sur lesquels ladite décharge sera imputée. »
La section centrale propose de remplacer le 1er § de cet article par la disposition suivante :
« La décharge de l’accise résultant des sucres exportés ou déposés dans les entrepôts publics sera imputée sur les termes de crédit dont l’échéance est la plus prochaine. »
M. le ministre des finances (M. Smits) se rallie à cet amendement.
- L’article ainsi amendé est adopté.
« Art. 53 § 1er. La décharge de l’accise au compte des raffineurs sera calculée :
« a. Au rendement, par 100 kilogrammes sucre
« - brut de canne, de 57 kil. sucres
« - brut de betterave, de 49 kil. sucres
« raffinés en pains dits métis, blancs, parfaitement épurés et durs, dont toutes les parties sont adhérentes et non friables, et de sucres candis à larges cristaux, clairs et secs.
« b. Au rendement par 100 kilogrammes, sucre
« - brut de canne, de 60 kil. sucres
« - brut de betterave, de 52 kil. sucres
« raffinés en pains dits lumps, blancs, sans teinte rougeâtre ou jaunâtre, durs, dont toutes les parties sont adhérentes et non friables, et bien épurés.
« c. Aux taux respectivement établis aux §§ a et b, pour les sucres raffinés en pains mélis et lumps concassés ou pilés dans les entrepôts publics à désigner à cet effet. La quantité et la qualité des pains et lumps à piler ou à concasser seront vérifiés avant leur admission dans les entrepôts. Les sucres qui ne réuniront pas les qualités spécifiées auxdits § ne seront pas emmagasinés.
« d. Au rendement, par 100 kilog. de sucre brut de 100 kil, de tous autres sucres raffinés, tels que sucres candis dits manqués, à petits cristaux, humides, revêtus de croûtes et sucres de teinte rougeâtre ou jaunâtre. Sont rangés dans la même catégorie, les sucres tapés ou comprimés, et les sucres raffinés en poudre, dits cassonade.
« § 2. Les morceaux dits croûtes, provenant de la fabrication du sucre candi, seront cependant admis dans la catégorie A, pourvu que la quantité ne dépasse pas le tiers de la partie intégrale déclarée à l’exportation, et sous la condition que les croûtes renfermées dans une même caisse soient reconnues provenir d’une même fabrication, et soient d’une même teinte et qualité que le sucre sans croûtes que contient le restant de la caisse. »
M. le président. - L’amendement de la section centrale n’est pas été adopté. On a adopté le rendement du gouvernement, reste maintenant à statuer sur le reste de l’article.
M. Mercier. - La section centrale n’avait pas cru devoir fixer un rendement pour le sucre de betterave. Cependant, pour ce qui me concerne, je n’y vois aucun inconvénient ; quoique je sois dans la persuasion que l’exportation n’aura pas lieu, je ne m’oppose pas au projet du gouvernement.
Il y dans cet article d’autres points à régler ; par suite des changements apportés dans le droit, il y aura des modifications à apporter dans les chiffres, et notamment aux §§ d et f. La chambre peut toujours adopter ces paragraphes, ou les ajourner au second vote.
M. d’Huart. - Il n’y a qu’à mettre 45 et 20 au lieu de 50 et 25 fr.
M. le président. - Le gouvernement accorde le rendement intégral pour la cassonade, la section centrale propose la diminution d’un cinquième.
M. Mercier. - On pourra toujours y revenir au second vote.
M. le président. - Je vais mettre l’article aux voix en ces termes :
« e. A 36 fr. les 100 kilog. de sucres raffinés en poudre dits cassonade, de canne, et à 16 fr. les nièmes sucres de betterave.
« f. A 8 fr. les 100 kilog. de sirop de sucre de canne et à 2-40 les 100 kilog. de sirop de sucre de betterave. »
- L’article 53, ainsi modifié, est adopté, sauf à y revenir au second vote.
« Art. 54. Lorsqu’on voudra exporter des sucres mélis ou des lumps, autrement qu’en vrac, ils devront être dirigés sur l’entrepôt public, où ils seront ensuite, après vérification, placés dans les colis destinés à les contenir. Toutefois, avant d’en autoriser l’emmagasinage, les employés s’assureront si ces sucres réunissent les qualités exigées par le § 1er de l’art. 53. »
- Cet article est adopté.
« Art. 55. § 1er. La décharge de l’accise ne sera pas accordée pour l’exportation des sucres raffinés mélangés de sucre brut ; elle sera également refusée lorsque les exportations auront lien en quantité inférieure à 100 kilog. pour les sucres candis, et à 200 kilog. pour tous les autres sucres raffinés.
« § 2. Les employés n’admettront, du reste, les sucres mélis et lumps, soit à l’exportation immédiate, soit en entrepôt, dans les cas prévus par la présente loi, qu’en pains de forme conique pesant au moins chacun 5 kilog. Afin de s’assurer si ces pains sont réellement composés de sucre, ils en feront diviser un certain nombre en morceaux. Cette vérification s’opérera au moins dans la proportion d’un p. c. de la partie déclarée. »
La section centrale propose de supprimer au 2ème § les mots : pesant au moins chacun 3 kilog.
M. le ministre des finances (M. Smits) se rallie à cette suppression.
- L’article ainsi modifié est adopté.
« Art. 56. Pour jouir de la décharge de l’accise à l’exportation par terre ou par rivières, des sucres pilés on concassés, les colis devront avoir un poids brut de 180 kilog. au moins, Ces colis seront en bois, sains et entiers, et conditionnés de manière que les plombs, qui y seront apposés, puissent empêcher tout enlèvement clandestin.
« § 2. Les colis porteront, en outre, l’empreinte d’un fer adent indiquant l’entrepôt dans lequel les sucres auront été pilés on concassés, le millésime et le numéro du permis qui en autorise l’exportation. »
« Art. 57. Les déclarations d’exportation contiendront l’indication du poids brut et du poids net des sucres, ainsi que leur catégorie. »
« Art. 58. § 1er. Si les employés soupçonnent l’existence de sucres tapés ou comprimés parmi ceux présentés à l’exportation, ils pourront les admettre provisoirement au taux de la catégorie désignée par le déclarant. Toutefois ils choisiront, pour servir d’échantillon, un pain qui devra être revêtu d’une enveloppe ordinaire en papier. Cet échantillon sera muni du cachet de l’administration et de celui de la partie intéressée, pour être soumis à une expertise.
« § 2. Il y sera procédé par deux experts que nommeront les parties ; les frais de cette opération, pour laquelle il sera rédigé un procès-verbal, seront à la charge de celle dont la prétention aura été reconnue mal fondée.
« § 3. S’il y a partage, les experts s’adjoindront un tiers expert pour les départager ; s’ils ne s’accordent pas sur le choix, il y sera pourvu par le président du tribunal de première instance de l’arrondissement. »
- Tous ces articles sont adoptés sans discussion.
« Art. 59. § 1er. Les raffineurs qui, à l’expiration du terme de crédit fixé par l’art. 49, voudront conserver leurs sucres pour l’exportation, pourront en faire le dépôt dans les entrepôts publics, soit en leur nom, soit au nom d’un négociant exportateur, et sous la condition que les quantités soient chaque fois de 500 kilog. au moins.
« § 2. Les sucres ainsi déposés pourront être transcrits, dans le même entrepôt, au nom d’un autre négociant exportateur. »
- Cet article est adopté sans discussion.
« Art. 60. L’enlèvement de ces sucres n’aura lieu que pour l’exportation, et sous caution suffisante, ou moyennant le payement de l’accise au comptant. Dans ce dernier cas, les droits seront liquidés au taux de l’accise dont ils étaient passibles lorsque le compte de crédit a été déchargé. Il en sera de même à l’égard des manquants constatés. »
La section centrale propose de supprimer le dernier paragraphe à partir des mots : Dans ce dernier cas.
M. le ministre des finances (M. Smits) se rallie à cette suppression.
- L’article ainsi amendé est adopté.
M. Malou - J’ai l’honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale sur le projet de loi tendant à assurer l’exécution régulière et uniforme de la loi électorale du 3 mars 1831.
- Ce rapport sera imprimé et distribué.
M. Malou. - La chambre a renvoyé à la section centrale une pétition dans laquelle on signale une circonstance, où le secret du vote a été éludé au moyen d’un papier spécial. La section vous propose le dépôt de cette pétition sur le bureau pendant la discussion du projet de loi. -
- Ce dépôt est ordonné.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Quand le rapport pourra-t-il être distribué ?
M. Malou. - Je pense que le rapport pourra être distribué dans la soirée de demain,
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je demanderai alors que la discussion en soit fixée à lundi.
- Cette proposition est adoptée.
La séance est levée à 4 heures et demie.