(Moniteur belge n°67, du 7 mars 1832)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est ouverte à midi et demi.
Après l’appel nominal, le procès-verbal est lu et approuvé.
M. Lebègue analyse quelques pétitions, qui sont renvoyées à la commission.
L’ordre du jour appelle le rapport de la section centrale sur le projet de loi relatif aux barrières.
M. Leclercq, rapporteur, conclut, au nom de la section centrale, à ce que le projet soit ajourné jusqu’à la discussion du budget et des lois sur l’organisation provinciale et judiciaire. Il propose de maintenir provisoirement les trois décrets du congrès du 6 mars 1831 sur la taxe des barrières, et présente la rédaction suivante :
« Art. 1er. Les trois décrets du congrès en date du 6 mars 1831, relatifs à la taxe des barrières, continueront à avoir force de loi jusqu’au 1er janvier 1833.
« Art. 2. Les barrières seront remises en adjudication, conformément aux dispositions de ces décrets, pour le temps à courir depuis le 31 mars 1832 à minuit jusqu’au 31 mars 1833 à minuit.
« Art. 3. La taxe des barrières établies en vertu des actes de concessions sur les routes construites par des compagnies sera perçue conformément à ces actes.
« Les dispositions du décret spécial réglant le mode de perception, et celle du cahier des charges y joint, sont applicables à cette taxe, sauf les modifications résultant desdits actes de concession.
« Art. 4. Par modification de l’article 7, paragraphe 3, du décret du 6 mars 1831, réglant le mode de percevoir la taxe des barrières, les chariots, voitures et animaux passant à vide, en allant chercher ou après avoir conduit de l’engrais, du fumier ou des cendres pour l’agriculture, seront exempts du droit.
« Il en sera de même des voitures et animaux passant à vide dans les cas prévus par le paragraphe 5 du même article. »
M. Leclercq, en terminant, annonce que M. le ministre de l'intérieur a adhéré à ce nouveau projet, mais a demandé la prorogation des décrets jusqu’au 1er avril.
M. le président. - Comme ce projet est extrêmement simple, il pourrait être discuté sur-le-champ. (Appuyé ! appuyé !)
M. Goethals. - Il contient un amendement très important ; je voudrais avoir au moins une heure pour l’examiner. (Non ! non !)
- La discussion est immédiatement ouverte sur l’ensemble.
Personne ne demandant la parole, on passe à la discussion de l’article premier.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - J’ai demandé la prolongation des décrets jusqu’au 1er avril, au lieu du 1er janvier, par deux motifs. D’abord je craignais qu’un plus court délai nuisît au trésor, et les renseignements que j’ai pris depuis m’ont confirmé dans cette opinion. Ensuite les locataires doivent transporter leur demeure à l’endroit où sont situées les barrières, et le mois de décembre est très peu favorable pour ce changement. Je propose par amendement de faire cette substitution de mots.
M. d’Elhoungne défend la rédaction de la section centrale, en se fondant sur le motif qu’elle a voulu éviter toutes les contestations qui auraient lieu par suite du nouveau système monétaire, d’où il résultera que la comptabilité se fera en centimes et en francs.
M. Fleussu se plaint de ce que le gouvernement présente trop tard ses projets et ne laisse pas le temps de les discuter, ce qui fait ajourner toutes les améliorations.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux) répond que c’est la chambre elle-même qui, dominée par le désir de voter le budget, n’a pas cru devoir discuter le projet qu’il lui avait présenté.
Quant à l’introduction du nouveau système monétaire, il ne peut y avoir aucune difficulté ; car d’après une règle invariable que chacun connaît, quand il y a une fraction, elle appartient de droit au créancier.
M. Bourgeois appuie la proposition de la section centrale, tendante à maintenir les anciennes lois, pour ne pas distraire la chambre de l’examen de lois de la plus haute importance.
M. Jullien appuie l’amendement de M. le ministre de l'intérieur.
- Cet amendement est mis aux voix et adopté.
L’article premier ainsi modifié est également adopté, ainsi que les articles 2 et 3.
A l’article 4, M. Zoude propose, par amendement, d’accorder au transport des pierres calcaires, réduites à un décimètre cube au plus, l’exemption du droit de barrière dont jouit la chaux.
M. Jullien lit, à l’appui de cette proposition, une pétition d’un propriétaire de la province de Luxembourg.
M. Leclercq propose l’ajournement de cet amendement.
M. Poschet. - Je crois que la chambre ne peut adopter l’amendement de M. Zoude ; car il présente de grandes difficultés. En effet, qui pourra dire si la pierre calcaire qu’on voudra faire exempter sera réellement destinée à l’agriculture ? Les particuliers en vendront la moitié. Il a été déposé sur le bureau une pétition qui demande l’exemption pour le charbon servant à faire de la chaux. On vous fera encore d’autres réclamations, si vous l’adoptez pour la pierre calcaire.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Sans me prononcer définitivement sur l’amendement de l’honorable M. Zoude, j’appuie l’amendement proposé par M. Leclercq.
M. d’Huart. - Je conçois qu’on peut ajourner tout ce qui touche au principe de la nouvelle loi, mais il ne s’agit ici que d’étendre l’exemption pour un objet exclusivement consacré à l’agriculture. Quant à la prétendue difficulté de reconnaître si la pierre calcaire déclarée sera employée l’agriculture, elle cessera quand le particulier aura un certificat du bourgmestre.
M. Jullien et M. Jamme insistent pour l’adoption de l’amendement.
M. d’Elhoungne. - Je conçois bien qu’on veuille exempter l’engrais, mais je ne puis concevoir qu’on exempte les matières premières servant à faire de l’engrais. Si l’on exempte la pierre calcaire parce qu’elle sert à faire de la chaux, il faudrait étendre cette mesure à la paille qui sert à faire le fumier, et ensuite au bois de chauffage, puisque la cendre qui en provient est aussi employée comme engrais. Je vote contre l’amendement.
- La discussion est close et l’amendement de M. Zoude ajourné.
L’article 4 est adopté.
M. Goethals propose un paragraphe additionnel ainsi conçu :
« Les conducteurs de voitures qui voudront profiter de cette exemption à des barrières situées hors de leur commune, devront être porteurs d’un certificat signé par le bourgmestre et un échevin ou assesseur du lieu de leur domicile, constatant que la chaux, gypse, marne ou cendres qu’ils voiturent, sont exclusivement destinés à l’agriculture. Ce certificat devra être revêtu du sceau de la commune. »
Sur l’observation de M. Fleussu que la chambre, pour se montrer conséquente avec elle-même, doit rejeter tous les amendements, puisqu’elle n’a pas cru devoir discuter en ce moment les améliorations que propose le ministre, l’amendement est mis aux voix et adopté.
Un paragraphe additionnel de M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux) est adopté en ces termes :
« Néanmoins le droit devra être consigné en allant à vide, sauf la restitution au retour. »
Un autre paragraphe de M. d’Hoffschmidt, auquel consent M. le ministre des finances, est également adopté. Il est ainsi conçu : « Les déclarations prescrites par le même article 7, lettre A, du décret précité seront exemptées de timbre. »
M. Osy. - Je propose, par déviation au règlement, de procéder immédiatement à l’appel nominal, parce que le sénat doit s’assembler demain, et je sais qu’il est pressé de partir.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je crois qu’il ne doit pas y avoir de difficulté, puisque le projet n’a pas rencontré d’opposition.
M. Jullien et M. H. de Brouckere s’opposent à ce que l’on déroge au règlement, parce qu’il n’y a pas urgence, comme lors de la proposition de M. Destouvelles, à l’occasion de laquelle pareille déviation a eu lieu.
M. Gendebien appuie ces observations, et ajoute que c’est une faculté de remédier à un projet qu’a eue en vue le règlement. Il ne faut pas qu’elle soit enlevée aux membres.
- Le vote sur l’ensemble est remis à après-demain.
La séance est levée à 3 heures.