Accueil Séances
plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Bibliographie et
liens Note
d’intention
Chambre des représentants de Belgique
Séance du samedi 4 mai 1844
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre,
notamment pétition relative au système des droits différentiels (Lesoinne)
2) Interpellation relative aux pratiques
de vente à l’encan (Delehaye, Mercier)
3) Explications relatives à une pétition
portant sur les droits d’entrée sur les vins (convention du 16 juillet 1842) (Mercier, Osy, Mercier,
Osy, Mercier, Delehaye,
Mercier, d’Elhoungne, Mercier, Lys, Simons,
(+industrie linière) (Dumortier, Nothomb,
de Haerne), Osy,
(+industrie linière) (Delehaye, Delfosse),
Desmaisières, Osy)
4) Conclusions de la commission
d’enquête parlementaire (commission « de Foere ») et système des
droits différentiels. Politique commerciale du gouvernement ((+droit sur le
café) Rodenbach, David, Van Cutsem, Savart-Martel, Mercier, Delfosse, Verhaegen, Dechamps, David, Delfosse)
(Moniteur
belge n°126, du 5 mai 1844)
(Présidence de M. d’Hoffschmidt, vice-président.)
M. Huveners fait l’appel nominal à midi et quart.
M. de Renesse donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en
est adoptée.
M. Huveners présente l’analyse des pièces adressées à la chambre :
PIECE ADRESSEE A LA CHAMBRE
« Le sieur Auguste de Grignart, commis des accises à Boussu, né à Mondercange (partie cédée du Luxembourg), prie la chambre
de lui faire connaître si la qualité de Belge lui est acquise. »
- Renvoi à la commission des
naturalisations.
« Plusieurs négociants de Liége
présentent des observations contre le système des droits différentiels proposé
par le gouvernement. »
- Sur la proposition de M. Lesoinne, la chambre ordonne le dépôt
de cette pétition sur le bureau pendant la discussion des conclusions de
l’enquête parlementaire et son insertion au Moniteur.
_________________________
Lettre de M. Zoude, en date de ce jour, faisant connaître qu’une entorse qu’il s’est faite
hier le met dans l’impossibilité d’assister à la séance.
M. Delehaye. - Au moment où la chambre s’occupe des mesures à prendre dans
l’intérêt du commerce et de l’industrie, il ne sera pas hors de propos
d’interpeller le gouvernement au sujet d’une pétition qui lui a été renvoyée,
il y a 2 ans, et qui semble dormir dans les cartons, quoique l’objet de cette
pétition lui ait été souvent rappelé.
Il y a deux ans, le commerce
du pays s’était alarmé des fraudes commises à l’ombre de la loi sur les ventes
à l’encan. Il avait adressé à la chambre une pétition signée par un grand
nombre de détaillants et d’industriels, appuyée par le commerce et par le
conseil communal de Bruxelles. Le gouvernement avait promis de prendre en
considération cette réclamation. Nous espérions donc qu’au moment où l’on
cherche à faire droit aux justes doléances du commerce et de l’industrie du
pays, le gouvernement s’efforcerait d’entraver ces ventes à l’encan à 50 ou 40
p. c. au-dessous du prix de fabrique ; ces ventes, en général, se composent de
fabricats étrangers, ce qui, on le conçoit aisément, fait un tort immense à
notre commerce et a notre industrie.
La France a donné l’exemple ; elle a
modifié la loi relative aux ventes à l’encan. Nous avions espéré que le
gouvernement aurait suivi cet exemple.
Je crois qu’il est temps de saisir la
chambre d’une loi qui mette un terme aux réclamations du commerce. Je demande
si le gouvernement se dispose à la faire.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Depuis deux ans, a rappelé l’honorable membre, une pétition a été
renvoyée au gouvernement.
Deux fois déjà, le gouvernement s’est
occupé de cet objet d’une manière toute spéciale, lorsqu’il a présenté la loi
de 1836, et lorsqu’il a proposé le projet de loi relatif à la patente des
marchands ambulants, des marchands qui déballent dans les auberges ; et que
l’on a signalés comme vendant à vil prix des marchandises étrangères. Cette loi
a déjà produit de bons fruits.
L’honorable membre réclame des
dispositions nouvelles sur les ventes à l’encan. Déjà une loi sur les ventes à
l’encan a été votée en 1836. Je crois cette loi insuffisante. Depuis quelque
temps, je me suis concerté à ce sujet avec M. le ministre de l’intérieur. Mais
nos travaux ont été si multipliés, si importants, qu’ils ne nous ont pas permis
de donner à cet objet tout le temps qu’il exige. Cependant nous apprécions tout
l’intérêt qu’on doit y porter. Nous nous en occuperons avec sollicitude, de
manière à saisir le plus tôt possible les chambres d’un projet de loi sur cet
objet.
EXPLICATIONS RELATIVES A UNE
PÉTITION PORTANT SUR LA DISPOSITION DE LA CONVENTION DU 16 JUILLET 1842 AVEC LA
FRANCE, EN CE QUI CONCERNE LE DROIT SUR LES VINS
M. le
président. - La parole est à M. le ministre
des finances.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Je vais donner à la chambre quelques explications sur l’application
au commerce des vins de la convention du 16 juillet 1842.
Cette convention est conçue en termes
généraux relativement à l’importation des vins de France ; voici quelles sont
les dispositions de son art. 2 :
« Art. 2. Le gouvernement de S.
M. le Roi des Belges s’engage en outre :
« 1° D’une part, à réduire le
droit de douane sur l’importation des vins de France, tant par terre que par
mer, cinquante centimes par hectolitre pour les vins en cercles, et à deux
francs par hectolitre pour les vins en bouteilles ; d’une autre part, à réduire
de vingt-cinq pour cent le droit d’accise maintenant existant sur les vins de
France ; bien entendu que, pendant la durée du présent traité, ces droits de
douane et d’accise ainsi réduits ne pourront être élevés, et que les vins
d’aucune autre provenance étrangère ne sauraient être soumis en Belgique à des
droits quelconques plus favorables que ceux acquittés par les vins de
France. »
Cette convention fut approuvée par la
loi du 6 août. Dès le 19 août, le département des finances prescrivit les
mesures nécessaires pour son exécution. Dans les dispositions prises se trouve
un paragraphe qui a donné lieu à des réclamations de la part de la France et
dont je vais donner lecture à la chambre ; il concerne le droit sur les vins :
« § 18. Afin de prévenir toute
incertitude pour la perception des droits sur les vins, il ne sera peut-être
pas inutile de faire observer ici que, d’après l’esprit de la convention, la
réduction des droits ne peut être accordée que pour les quantités importées
directement de France soit par mer, soit par terre. Ainsi tous les uns venant
d’autres pays, quoique de cette provenance, doivent être soumis au régime des
droits de douane et d’accise établi avant la mise à exécution de la
convention. »
D’après cette interprétation les vins
devaient arriver directement de France pour pouvoir être admis aux droits
réduits.
Le 16 novembre 1842, l’ambassadeur de
S. M. le Roi des Français remit au gouvernement belge une note pour réclamer
l’entière exécution de la convention ; il fit remarquer que la convention ne faisait
pas de distinction entre l’importation par voie directe et l’importation par
voie indirecte ; que, par conséquent, les vins d’origine française, importés
par les Pays-Bas, devaient jouir de la diminution des droits.
Le gouvernement belge répondit à
cette note le 19 novembre. Il convint que, d’après les termes de la convention,
la Belgique ne pouvait méconnaître qu’elle devait, si la France persistait dans
sa réclamation, réduire les droits sur les vins d’origine française importés
par une frontière quelconque ; la réclamation de la France ne fut combattue que
par des motifs puisés dans l’intérêt des deux pays ; il a représenté que des vins sophistiqués
pouvaient être importés par la Hollande comme vins purs d’origine française,
que ce serait un résultat fâcheux pour les deux pays, pour la Belgique qui
consommerait des vins de mauvaise qualité, tout en perdant une partie de
l’accise, et pour la France qui nous livrerait une moindre quantité de ses
propres vins ; par suite de cette réponse, il ne fut provisoirement apporté
aucun changement au mode d’exécution de la convention.
Le gouvernement français, voulant
s’éclairer sur les craintes que nous avions manifestées, prit des
renseignements pour s’assurer si, en effet, il était présumable que de vins préparés
de la manière usitée dans quelques localités des Pays-Bas, fussent introduits
en Belgique, au lieu de vins d’origine française. Cette information eut pour
résultat que le gouvernement français ne crut son commerce menacé d’aucune
atteinte par l’admission des vins de France aux droits modérés par la frontière
des Pays-Bas ; il fit remarquer d’ailleurs qu’il n’est pas dans nos habitudes
de consommer des vins de l’espèce de ceux qui sont travaillés dans les Pays
Bas. Ces renseignements, recueillis dans l’intérêt de la France, n’avaient rien
de commun avec la question du droit dérivant du traité, question sur laquelle
aucun des deux gouvernements n’a élevé de doutes.
Le gouvernement français ayant, en ce
qui le concernait, toute sécurité sur les abus dont nous avions indiqué la
possibilité, nous adressa, le 11 septembre 1843, une nouvelle note dans
laquelle il prenait d’abord acte de l’aveu fait par le gouvernement belge dans
sa réponse du 16 novembre 1842, que la convention du 16 juillet ne faisant
aucune distinction, nous ne pouvions contester à la France le droit de nous
importer des vins d’origine française par une autre voie que par la voie
directe, Il nous déclarait ensuite qu’à ses yeux la difficulté que nous
signalions n’existait pas, parce que, dans sa conviction, la Belgique ne
consomme pas de ces vins qu’on prépare dans les Pays-Bas ; que, par conséquent,
il demandait l’exécution complète de la convention. En présence d’une
réclamation aussi précise, le gouvernement ne crut pas pouvoir s’abstenir plus
longtemps d’admettre, au droit modéré, les vins d’origine française venant par
une autre voie que celle de France.
Le 13 septembre, après délibération
du conseil des ministres, je fis donc connaître aux directeurs des douanes et
accises dans le Limbourg, que les vins d’origine française, arrivant par la
frontière du Limbourg n’acquitteraient désormais que les droits réduits. Un peu
plus tard, des instructions de même nature furent données aux autres
directeurs.
Peut-être des mesures particulières
auraient-elles pu être prises pour constater l’origine des vins. Mais jusqu’ici
l’on s’est borné à une seule, la dégustation. Les employés des douanes
s’assurent, par ce moyen, de l’espèce de vin importé. C’est ce qu’ils ont fait
même à Anvers pour des vins arrivés directement de France, et qu’on présumait
ne pas être d’origine française.
Si l’on ne s’est pas montré très
rigide pour les formalités, c’est qu’à l’époque où des instructions ont été
données, les vins d’Allemagne étaient également admis aux droits réduits ; de
manière que la substitution de vins étrangers n’était guère à craindre. II n’y
avait donc que la sophistication qui fût possible. Mais nous devons convenir
qu’il n’est pas dans nos habitudes de consommer ces vins mélangés, tels qu’on
les prépare chez nos voisins ; du reste, nous n’en recevons guère que de
Maestricht.
Voyons maintenant quelle a été notre
position vis-à-vis de
En vertu de la loi du 31 mars 1828,
un droit de 3 fl. frappait tous les vins importés dans les Pays-Bas, autrement
que par mer, aussi bien de provenance d’Allemagne que d’origine française. Nous
avons été soumis au régime de cette loi de 1828 vis-à-vis des Pays-Bas, comme
la France, comme l’Allemagne.
Mais deux traités ont été
successivement conclus entre le Zollverein et les Pays-Bas et entre la France
et les Pays-Bas.
Le premier de ces traités porte la
date du 21 janvier 1839. Par ce traité, le droit sur les vins a été réduit de 3
fl. à 10 cents par hectolitre. Les Etats du Zollverein ont joui pendant un an
et demi de cette réduction de droits. Ce traité n’a pas été renouvelé ; il
n’existe plus.
Un autre traité, comme je l’ai dit, a
été conclu par les Pays-Bas : c’est celui du 25 juillet 1840 avec la
France. Il a commencé à recevoir son exécution en vertu de l’arrêté royal du 12
juillet 1841.
Ce traité supprime le droit de 3 fl.
sur les vins en cercles, et réduit aux 2 cinquièmes celui sur les vins en
bouteilles ; de 5 fl. qu’il était il est réduit à 2 fl.
Ce traité, messieurs, accorde la
réduction des droits aux vins français importes dans les Pays-Bas, par voie
indirecte. Le dernier alinéa de son article 10 porte : « On déterminera de
commun accord les mesures de contrôle et les formalités des certificats
d’origine, propres à constater la nationalité des produits énoncés dans le
présent article, hors celle de vins et eaux-de-vie directement expédiés de
Prince, pour lesquels les manifestes ou lettres de chargement, dont les
capitaines, patrons ou bateliers, seront régulièrement porteurs, tiendront lieu
de certificats d’origine. »
Il résulte évidemment de cette
disposition que des vins non importés directement de France, mais d’origine
française, doivent être reçus au droit modéré par le gouvernement des Pays-Bas.
Il se trouve, cependant, messieurs,
que nos négociants éprouvent des difficultés, qu’ils se plaignent de ce que
leurs vins d’origine française sont frappés du droit de douane de 3 1/2 en
Hollande. D’anciennes réclamations relatives à ce droit m’ont été mises sous les
yeux il y a quelques jours, mais depuis mon entrée au ministère il ne m’en est
parvenu aucune de la part de notre commerce sur ce point ; en d’autres termes
aucune observation ne m’a été faite sur l’exécution du traité entre les
Pays-Bas et la France. La réclamation dont nous nous occupons fait présumer que
le gouvernement des Pays-Bas exige certaines formalités qui ne permettent pas à
nos négociants d’user du bénéfice de ce traité en exportant en Hollande des
vins d’origine française qu’ils ont en entrepôt ou dans leurs magasins.
Mon opinion est que le gouvernement
belge ne doit pas prendre d’autres mesures pour l’exécution de la convention du
16 juillet 1842 que celles que le gouvernement des Pays-Bas peut avoir
prescrites pour l’exécution du traité du 25 juillet 1840. Si donc ces mesures
sont telles qu’elles empêchent nos négociants d’exporter les vins français en
Hollande, avec jouissance de la modération des droits, il me paraît de foute
justice que les mêmes formalités soient exigées de la part des négociants des
Pays-Bas qui voudront importer chez nous des vins d’origine française.
M.
d’Elhoungne. - Quelles sont ces formalités ?
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Je crois qu’on exige des certificats d’origine et en outre le
manifeste du capitaine du bâtiment, quand il s’agit d’importations par canaux
ou rivières, ou bien, si c’est par terre, la lettre de voiture du conducteur.
Il résulterait de là qu’il n’y aurait que le transit continu sans interruption,
qui jouirait de la faveur de l’importation dans les Pays-Bas par la voie de
Belgique des vins de France aux droits réduits, mais que les vins sortant, par
exemple, des entrepôts, et ne pouvant plus justifier de la lettre de voiture,
ne seraient pas admis avec cette modération de droit.
De nouveaux arrangements devront donc
nécessairement être arrêtés ; j’espère que le gouvernement des Pays-Bas,
renoncera de son côte, à ce qu’il y aurait de trop rigoureux dans des
formalités qui ne permettent pas à notre commerce d’exporter en Hollande des
vins d’origine française ; en tout cas, le même régime devra être suivi de part
et d’autre. Il est évident que le traité du 25 juillet 1840 doit être exécuté,
sous ce rapport, de la même manière que la convention du 16 juillet. Des
communications seront faites dans ce sens aux gouvernements français et des
Pays-Bas.
M. Osy. - Vous voyez, messieurs, que le gouvernement lui-même avait entendu le
traité avec la France en ce sens qu’il n’était applicable qu’aux vins français
arrivant directement par terre ou par mer et non aux vins arrivant
indirectement par la frontière du Nord.
L’honorable M. Mercier dit qu’il
n’avait aucune connaissance des réclamations des marchands de vin. Cependant
j’ai ici la copie de lettres et pétitions adressées en 1842 au ministère des
finances. C’est une lettre de marchands de vin d’Anvers et une pétition du mois
d’octobre 1842 de négociants en vin de Liège. Le gouvernement ne pouvait donc
ignorer que le commerce belge réclamait dès 1842, qu’il l’engageait à ne plus
faire de concessions à
Vous voyez, messieurs, que le
gouvernement, par sa note du 19 novembre
M. le ministre nous dit : « Le
11 septembre 1843, j’ai reçu une nouvelle note de
« 13 septembre 1843.
« Je vous prie de donner des
ordres, pour qu’à partir du 20 de ce mois, la réduction des droits établis par
la convention du 16 juillet 1842, soit appliquée aux vins de France qui seront
importés par les bureaux de terre et de rivière ouverts à l’entrée des
marchandises d’accises sur la frontière du Limbourg hollandais. »
Messieurs, je demanderai si ce n’est
pas là la manière la plus irrégulière de faire les affaires du pays. Ce n’est
pas par une circulaire qu’on décide des affaires aussi importantes, on prend un
arrêté motivé et on le fait insérer au Moniteur,
pour que chacun sache à quoi s’en tenir et puisse faire des réclamations. Comme
je l’ai déjà dit et comme je l’expliquerai encore tout à l’heure les Hollandais
sont plus favorisés que les Belges ; un négociant de Liége est venu me trouver
au mois de février, et m’a prié de faire des réclamations à la chambre. Comme
je n’ai pas l’habitude de faire des réclamations sans les appuyer de pièces, je
lui ai dit : Prouvez-moi ce que vous dites et je ferai toutes les réclamations
que vous désirez.
Je vous ai déjà parlé de cette
affaire au mois de mars ; mais j’ai cru qu’il valait mieux remettre mes
observations à aujourd’hui, que nous nous occupons des divers traités avec
l’étranger.
Messieurs, je vous ai déjà prouvé que
nous étions mal traités par
Je vous disais, messieurs, que les marchands
de vin hollandais étaient plus favorisés que les marchands belges. Je
rappellerai ce que j’ai déjà dit à cet égard.
Les marchands hollandais reçoivent de
petits vins de Bordeaux qu’ils mêlent avec des vins d’Espagne. J’ai vu,
dernièrement encore, dans les annonces des journaux hollandais, qu’il était
arrivé de l’Espagne des chargements de vins. Nous sommes obligés de payer les
droits d’accises entiers sur les vins d’Espagne. Les marchands hollandais
coupant des petits vins de France avec les vins d’Espagne, les importent en
Belgique comme vins français, et ils obtiennent la réduction sur les droits
d’accises. Vous voyez donc que le marchand hollandais est favorisé au détriment
du marchand belge.
Ce n’est pas tout, messieurs, il se
commet une autre fraude, ou si elle ne s’est pas encore commise, elle se
commettra. Je puis le dire, parce que les négociants hollandais connaissent
leurs intérêts.
Le vin de Grave de France
ressemble beaucoup au vin du Rhin. Les marchands hollandais vont prendre des
barriques de vin de Grave et y mettent des vins du Rhin qu’ils exporteront
ensuite en Belgique comme des vins de France, avec la réduction du droit.
Messieurs, je dois donc blâmer le
gouvernement d’avoir pris une mesure aussi importante par une circulaire, il faut,
quand on explique une convention, que ce soit à la vue de tout le pays et par
arrêté royal.
Nos marchands de vin, messieurs,
faisaient, avant la révolution, un très grand commerce de vin avec
Messieurs, nous avons souvent demandé
le retrait d’un arrêté ; je demanderai formellement à mon tour le retrait de la
circulaire de M. le ministre des finances.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - L’honorable préopinant trouve étonnant que ce soit par une circulaire
que l’on indique aux agents de l’administration la manière dont le traité doit
être exécuté. Or jamais on n’a suivi une autre marche. L’honorable membre ne
fait pas d’observation sur ce que l’exécution du traité tout entier ait été
réglée par une simple instruction, par une simple décision administrative, et
il trouve étonnant que lorsque le gouvernement reconnaît que sur un point cette
exécution n’a pas en lieu d’une manière complète, la première instruction soit
modifiée par une instruction de même nature ; la première instruction, je le
répète, était aussi une décision ministérielle et non pas un arrêté royal.
L’honorable membre ferait-il une distinction entre une longue instruction et
une instruction plus courte ? Mais si la première instruction était plus longue
que la seconde et avait par cela même un caractère plus respectable à ses yeux,
c’est que l’une concernait le traité tout entier, tandis que l’autre ne se
rapportait qu’à un seul point de ce traité.
La question est de savoir, si l’on a
pu donner la première instruction par une décision ministérielle, et si ensuite
on n’a pas pu modifier cette première instruction par une autre décision
ministérielle. Quant au traité nous n’y ajoutons rien, nous n’en retranchons
rien, nous reconnaissons seulement, que moyennant certaines précautions à
prendre, nous sommes tenus d’admettre les vins d’origine française par d’autres
frontières que celle de France.
Voilà, messieurs, ce que nous avons
reconnu et ce qui n’avait pas été contesté par le ministère précédent. Le
ministère précédent n’avait fait des représentations au gouvernement français,
que sous le point de vue des intérêts mêmes de la France ; et n’avait nullement
refusé à la France le droit d’exiger l’importation de ses vins par toutes les
frontières.
Depuis lors, le gouvernement français
nous a déclaré qu’il n’avait pas l’intérêt que nous lui supposions à ce que
nous n’admissions pas les vins français par la frontière hollandaise, et qu’il
réclamait l’exécution complète du traité. Nous avons reconnu le fondement de
cette réclamation comme le ministère précédent l’avait reconnu, et nous y avons
fait droit, nous avons rectifié dans ce sens un paragraphe de l’instruction
ministérielle, relative à l’exécution du traité, et nous l’avons fait par une
autre instruction ministérielle. Fallait-il autre chose ? Fallait-il un arrêté
royal pour modifier une décision ministérielle ? Mais, messieurs, c’eût été là
une chose tout à fait insolite.
Maintenant, messieurs, si nous avons
reconnu que nous ne pouvions pas nous refuser à admettre les vins d’origine
française par toutes les frontières, nous convenons qu’il y a des précautions à
prendre pour constater la réalité de cette origine. Si précédemment il n’a pas
été pris de très grandes précautions à cet égard, c’est, je le répète, que nous
n’y avions pas le même intérêt qu’aujourd’hui, parce qu’alors les vins
d’Allemagne arrivaient aussi aux droits modérés. Aujourd’hui il n’en est plus
de même, et de nouvelles précautions devront être prises.
J’ai ajouté, messieurs, que des
mesures analogues devront être adoptées par les deux gouvernements. Je croyais
que cette déclaration était de nature à satisfaire l’honorable membre, qui
désire surtout que les relations interrompues avec les Pays-Bas puissent être
reprises. Quant au retrait pur et simple de la mesure, c’est chose impossible :
nous n’avons pris de nouvelles dispositions, nous n’avons fait que reconnaître
un droit qui résulte de la convention, et qui avait été
reconnu également par le précédent ministère ; je dis par le précédent
ministère, car il ne s’agit pas ici de l’opinion individuelle du ministre des
finances ; le ministre des finances n’a fait ici qu’agir conformément à
l’opinion du cabinet tout entier, qui est, du reste, je me hâte de le dire,
tout à fait conforme à mon opinion personnelle.
Je dois encore relever une erreur
commise par l’honorable préopinant. Le droit de 3 florins que les Pays-Bas
perçoivent sur les vins importés indirectement, ce droit n’existe pas seulement
à notre égard ; depuis que le traité de 1839 est expiré, ce droit est perçu
également à l’égard du Zollverein. Le tarif des Pays Bas ne fait, sous ce
rapport, aucune distinction ; la France seule, en vertu de son traité, se
trouve dans une autre position que nous.
L’honorable membre a dit que certains
vins du Rhin ressemblent à ces vins de France et qu’on les importera chez nous
en transit par
Je me résume, messieurs, en répétant
qu’il faudra avoir recours à des mesures autres que celles qui ont été prises
jusqu’à présent et que ces mesures devront être les mêmes pour les deux pays.
M. Osy. - Messieurs, je ne partage pas du tout l’opinion de M. le ministre des
finances qu’il pouvait modifier l’exécution du traité avec la France par une
simple circulaire ; l’exécution du traité a été annoncée au public par un
arrêté royal, et lorsque le gouvernement a cru devoir apporter des changements
à cette exécution, il aurait dû également en informer le public au moyen d’un
arrêté royal, ou au moins par une instruction insérée dans tous les journaux et
dont chacun pût avoir connaissance. Je maintiens donc qu’une grande
irrégularité a été commise. La France prétend interpréter le traité dans un
sens qu’elle dit lui être favorable, et qui, selon moi, n’est favorable qu’à
M. le ministre des finances (M. Mercier) - L’honorable M. Osy vient de dire qu’il a été pris un arrête royal
pour l’exécution du traité avec la France ; mais cet arrête n’a été pris que
pour régler les droits à percevoir ; ce n’est pas cet arrêté que nous avons
modifié ; ce que nous avons modifié, c’est l’instruction ministérielle du 19
août 1842. Quant à l’arrête royal dont l’honorable M. Osy a parlé, voici ce
qu’il porte à l’égard des vins :
« Le droit d’accise sur les vins
étrangers, maintenu à 23 fr. 85 c. par hectolitre, par la loi du 29 décembre
1841, est réduit d’un quart pour les vins de France et reste fixé à 17 fr. 80.
»
Maintenant, comme je l’ai fait
observer tout à l’heure, l’instruction du 19 août 1842 exige que les vins
viennent directement de France. C’est à cette instruction ministérielle qu’il a
été dérogé par une autre instruction ministérielle.
Quant à la dernière observation de
l’honorable membre, je ne pense pas que, du moment où nous reconnaissions que
la France ne réclamait que l’exécution complète du traité, il eût été loyal de
notre part de vouloir subordonner cette exécution à telle ou telle condition.
Je pense que nous étions tenus à faire purement et simplement droit à la réclamation de la France, puisque nous
reconnaissions que cette réclamation était fondée en droit.
M. Delehaye. - Le gouvernement est d’accord avec nous que la manière dont
Messieurs, je n’ai pas sous les yeux
la convention qui a été conclue avec le gouvernement français ; mais, si je ne
me trompe il est dit dans la convention : les
vins venant de France.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - La convention porte : les vins
français.
M. Delehaye. - Soit ; j’admets que la convention s’exprime de cette manière ; mais
il n’est pas dit de quelle façon ces vins seront importés.
Messieurs dans une circonstance
précédente, en parlant de la convention faite avec la France, relativement aux
toiles, il m’est arrivé de dire que le gouvernement français avait bien fait,
non pas sans doute au point de vue de l’intérêt belge, mais au point de vue de
l’intérêt français ; avait bien fait, dis-je, de ne pas admettre les toiles
belges pour la confection des habillements militaires,
La convention n’oblige pas en termes
exprès la France à admettre les toiles belges en concurrence avec les toiles
françaises pour l’approvisionnement de l’armée. Si vous vouliez que nos toiles
fussent appelées à concourir à cet approvisionnement, vous deviez vous expliquer
à cet égard d’une manière catégorique dans votre traité. Vous ne l’avez pas
fait ; vous vous plaignez de la mesure nouvelle qui a été prise par le
gouvernement français ! Dans ce cas, vous agissez encore au rebours du
gouvernement français, et si, comme le pense notre gouvernement, le
gouvernement français a manqué de loyauté dans l’exécution de la convention,
c’était un motif de plus pour repousser des frontières de
La loyauté, la bonne foi, nous
imposent le devoir de remplir rigoureusement les obligations contractées ;
aller au-delà n’est plus que duperie.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, l’honorable préopinant paraît croire que c’est l’intérêt
d’une puissance étrangère à la convention qui nous avait préoccupé, et que nous
n’avions cédé qu’à ses instances.
J’ai eu soin cependant de citer les notes
que nous avons reçues du gouvernement français. Sans doute le gouvernement des
Pays-Bas est intervenu de son côté ; mais je ne pense pas que l’on prétende que
sa réclamation dût être un motif pour repousser les prétentions du gouvernement
français, qui demandait l’exécution complète de la convention.
Nous avons reçu, je le répète,
deux notes du gouvernement français, l’une du 16 novembre 1842, l’autre du 11
septembre 1843 ; nous n’avions pas à rechercher si ces notes avaient été faites
à l’instigation du gouvernement des Pays-Bas. Il suffisait que la France
réclamât l’exécution complète de la convention, pour que nous ne puissions pas
nous y refuser. Du reste, il est à notre connaissance que des réclamations fort vives avaient été adressées au gouvernement français
par le commerce de Bordeaux. Au résumé, nous n’avons fait qu’appliquer
loyalement une convention passée entre le gouvernement belge et le gouvernement
français ; abstraction faite de tous autres intérêts, que nous désirions ne pas
froisser, nous ne pouvions pas nous refuser à l’exécution de la convention.
En réponse à une observation faite
par l’honorable préopinant, je ne puis que reproduire l’observation déjà faite,
que lorsque nous avons reconnu la portée d’une convention passée avec un Etat
étranger, nous ne pouvons mettre à l’exécution de cette convention une
condition quelconque.
L’honorable préopinant a pris à tâche
de justifier certaines mesures qui ont été prises relativement aux tissus de
lin. Nous convenons qu’il s’agissait là d’un acte d’administration intérieure
et que la convention ne renfermait, à cet égard, aucune disposition expresse ;
mais nous avons pensé que la saine interprétation de cette convention exigeait
que nos toiles fussent admises à concourir sur le marché français avec les
toiles indigènes, sans aucune espèce d’exclusion.
M. d’Elhoungne. - Messieurs, la réclamation des pétitionnaires soulève une question
d’interprétation de la convention, faite le 16 juillet 1842 avec
Pour mon compte, je ne pense pas que
la chambre puisse partager la conviction de M. le ministre des finances, aussi
longtemps que le traité du 16 juillet 1842 n’a pas reçu l’assentiment du
pouvoir législatif de France. La simple comparaison du traité fait entre la
France et
En effet, dans le traité entre
Dans notre traité avec la France, il
n’y a aucune trace d’une semblable stipulation pour les arrivages indirects. Il
n’y est pas non plus stipulé que les formalités à arrêter pour reconnaître la
provenance des arrivages indirects, le seraient par les deux parties
contractantes. On ne peut donc admettre que ce traité reconnaisse la légalité
des arrivages indirects. Mais il en serait autrement, que ce serait au
gouvernement belge qu’il appartiendrait toujours de régler les formalités pour
reconnaître et constater la provenance. Je répète donc que si l’on veut
interpréter le traité, comme l’interprète M. le ministre des finances, il n’en
dépendra pas moins de notre gouvernement de décider que les vins entrant par
telle ou telle frontière de terre comme vins de France, ne seront admis comme
vins français, qu’aux conditions les plus rigoureuses. Or, cela peut équivaloir
à une véritable exclusion : cela doit suffire encore.
D’après ces considérations je
pense donc qu’il aurait fallu considérer le traité fait entre
Quoi qu’il en soit, je pense que M.
le ministre des finances devra multiplier les précautions pour les arrivages
indirects, afin de rendre les arrivages à peu près impossibles. La convention
faite avec la France est extrêmement onéreuse à la Belgique ; il faut en
restreindre l’effet autant qu’on peut.
Une dernière observation, messieurs ;
j’ai remarqué que, d’après M. le ministre des finances, le gouvernement des
Pays-Bas paraîtrait interpréter en notre faveur le traité que ce gouvernement a
fait avec la France, c’est-à dire, que le gouvernement des Pays-Bas applique la
diminution du droit d’entrée aux vins français qui entrent par
Messieurs, sous tous les rapports, la
réclamation des marchands de vin me paraît devoir être renvoyée à M. le
ministre des finances, qui voudra bien la prendre en sérieuse considération.
Que si la chambre estime que M. le ministre des finances n’a pas mal interprété
la convention du 16 juillet 1842, il n’en restera pas moins, pour le
gouvernement, l’obligation de prendre des mesures rigoureuses pour constater
que les vins venant de Hollande en Belgique, sont réellement des vins français.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, je suis d’accord avec l’honorable préopinant, qu’à la
chambre, en dernière analyse, appartient l’interprétation de tout traité, comme
de toute loi. Mais il y a, en ce qui concerne les traités, une autre partie qui
a aussi son mot à dire, celle avec laquelle ils sont conclus. Une
interprétation à laquelle les deux parties n’interviendraient pas pourrait avoir
pour effet d’annuler le traité. D’ailleurs, la distinction dont a parlé
l’honorable préopinant ne se trouve pas, selon moi, dans le traité de 1840,
comme il l’a dit tout à l’heure.
L’honorable membre a parlé, si je ne
me trompe, de deux dispositions qui se trouveraient dans le traité conclu entre
les Pays-Bas et la France, la première faisant une distinction entre les
provenances, et la seconde, établissant des formalités pour reconnaître
l’origine. Mais, messieurs, il ne trouve dans ce traité qu’une disposition dans
le sens de ses observations, c’est celle qui est relative aux formalités à
prendre pour constater l’origine des vins. Mais de ce qu’il
n’y a pas de disposition formelle pour admettre les importations indirectes aux
droits réduits, je conclus que si la disposition relative aux formalités
n’existait pas, il ne s’ensuivrait aucunement que les vins français ne
pourraient pas arriver par une autre frontière que par la frontière française.
Le contraire me paraît plutôt résulter du dernier alinéa de l’article 10 du
traité.
Je dois combattre aussi une autre
objection de l’honorable membre. « Vous recevrez donc aussi, dit l’honorable
membre, les soieries qui viendront par d’autres frontières ?» S’il avait
examiné les termes de la convention, il aurait vu qu’ils ne sont pas les mêmes
en ce qui concerne les soieries que lorsqu’il s’agit des vins. En effet, la
disposition relative aux vins porte : « Le gouvernement de S. M. le Roi
des Belges s’engage l° à réduire le droit de douane sur l’importation des vins
de France, tant par mer que par terre ; 2° à réduire le droit sur les soieries
venant de France.
Voilà donc une distinction, et cette
distinction n’a pas été insérée sans motif à l’article 2. Au surplus, le renvoi
de la pétition au département des finances est la solution que je désirais voir
donner à ce débat. Mais j’ai déjà dit quelles seraient les démarches qui
seraient faites, pour que les traités conclus avec la France fussent exécutés
d’une manière uniforme de part et d’autre.
En terminant ma réponse, j’ajouterai
que l’honorable préopinant s’est trompé, quand il a cru que j’avais dit que le
gouvernement des Pays-Bas, moyennant certaines précautions, allait admettre aux
droits réduits les vins français arrivant par
M. Lys. - Je suis aussi d’avis que les premières instructions de M. le
ministre des finances étaient conformes au traité ; d’autant plus que je ne
vois aucun intérêt à ce que la France fasse voyager ses vins en Hollande, en
Angleterre ou en Allemagne pour les faire arriver en Belgique. Je pense que
l’intérêt des négociants français est le même que celui des négociants belges.
Il est de leur intérêt commun que les vins français arrivent en Belgique
intacts, sans être soumis à aucune sophistication quelconque. C’est ce qui me
fait penser que les dernières instructions de M. le ministre des finances ne
sont pas conformes à la saine interprétation du traité, car nous ne devrions
recevoir aucun vin livré à la consommation en Hollande, en admettant le système
que, d’après le traité, la France pût faire transiter ses vins par
M. Simons. - Si je prends la parole
dans cette discussion, ce n’est pas pour me montrer l’admirateur de la
convention du 16 juillet 1842. J’ai été du petit nombre de ceux qui ont eu le
courage de refuser leur approbation à cette convention dont les conséquences
devaient évidemment être contraires aux intérêts de
S’il s’agissait aujourd’hui
d’examiner de nouveau cette convention, il n’y en aurait plus seulement 10, sur
86 qui étaient alors présents, qui voteraient contre son approbation, mais la
grande majorité la repousserait.
Comme il ne s’agit plus ici du fond
de la convention, mais de son exécution, je me bornerai à présenter quelques
courtes observations, pour démontrer que le gouvernement a fait une juste
interprétation de la convention telle qu’elle a été approuvée par mes
adversaires eux-mêmes. Pour vous en convaincre, il suffit de prendre lecture
des articles 1 et 2 de la convention, dont les termes sont tellement explicites
que je ne conçois pas qu’il puisse y avoir divergence d’opinion.
Quand les termes d’une convention
sont clairs, ne prêtent pas à double sens, on ne peut pas rechercher les
intentions. Voici ce que porte l’art. 1er de la convention : « Les droits
d’entrée en France sur les fils et les tissus de lin ou de chanvre importés de
Belgique par les bureaux situés d’Armentières à la Malmaison près Longwy
exclusivement, seront rétablis tels qu’ils existaient avant l’ordonnance du
gouvernement français du 6 juin 1842 ; et les droits d’entrée en Belgique sur
les fils et tissus de lin ou de chanvre, importés de France par la frontière
limitrophe des deux pays, seront maintenus tels qu’ils existent actuellement
sans que ces différents droits puissent être augmentés, de part ni d’autre,
avant l’expiration du présent traité. »
Que résulte-t-il de cet article ? que lorsque les deux parties contractantes ont voulu
restreindre à un territoire donné, à une limite donnée, l’importation, elles
s’en sont expliquées d’une manière claire et précise ; elles ont déterminé de
quelle manière l’importation devait se faire. Vous voyez, d’après l’article
1er, que l’importation des fils et tissus dont il y est question ne peut se
faire que par le territoire qui y est déterminé d’une manière positive.
Voyons si, à l’article où il s’agit
des vins, on a fait la même distinction.
« Le gouvernement de S. M. le Roi des
Belges s’engage en outre :
« 1° D’une part, à réduire le
droit de douane sur l’importation des vins de France, tant par terre que par
mer à 50 c. par hectolitre pour les vins en cercles, etc. »
On ne limite pas là le territoire par
lequel l’importation peut se faire. Elle peut donc se faire pour tel territoire
que la France trouve intérêt à emprunter.
Maintenant on dit : La France est
tout à fait désintéressée, c’est une question d’intérêt entre
Il se fait, en réalité, très peu
d’importations de vins de
On prétend que c’est du vin falsifié
qu’on nous introduit par cette voie. On perd de vue qu’il y a impossibilité de
vous faire des importations de vins mélangés. Ce commerce, en Hollande, est
soumis au même régime qu’en Belgique ; c’est-à-dire qu’on ne peut faire une
exportation de vin avec jouissance de la restitution du droit que pour autant
que ce vin sorte de l’entrepôt. Or, dans les entrepôts, on ne permet jamais de
faire des mélanges, il est impossible d’en faire : le gouvernement,
l’administration s’y opposerait. Il faut donc que le vin sorte sans mélange,
sans falsification, pour que le gouvernement restitue le droit que ce vin a
payé.
Maintenant y a-t-il possibilité
d’introduire du vin falsifié ? D’abord la restitution du droit ne serait pas
accordée. Mais, dit-on, on fabrique du vin en Hollande, comme si on importait
en Belgique du vin de cette sorte.
Ceux qui connaissent cette
fabrication savent que c’est un petit vin fabriqué pour le petit peuple, pour
remplacer la bière, et que la valeur de ce vin ne permet pas qu’on l’importe,
parce que le droit d’importation serait double de la valeur du vin.
Je crois donc que ces considérations
suffisent pour vous démontrer que la circulaire du ministre ne peut pas être
révoquée, parce qu’elle est conforme à la saine interprétation qu’on doit
donner au traité.
Qu’on prenne des mesures rigoureuses
pour vérifier et constater l’origine française du vin, je suis le premier à les
provoquer ; mais qu’on veuille, en quelque sorte, par un simple vote, modifier
un traité qui a été stipulé entre deux parties, et adopté par les deux
chambres, je ne pense pas que nous puissions aller jusque-là.
Je le répète, je suis un de ceux qui
ont voté contre le traité. Sur 86 membres présents, 10 seulement ont voté dans
ce sens. C’est alors qu’il fallait faire valoir les considérations qu’on
invoque aujourd’hui. Mais maintenant qu’elle a passé, il faut que nous
subissions les conséquences d’une convention que nous avons acceptée peut-être
à la légère, vous savez en quelles circonstances : on parlait de la misère des
Flandres ; on considérait le traité comme une panacée universelle ; on disait
qu’il allait faire revivre l’industrie linière. Ces considérations ont
déterminé le vote de la loi, bien qu’elle enlève annuellement un million au
trésor.
Si nous étions de nouveau appelés à examiner le fond de la convention, je
serais, comme en août 1842, le premier à m’opposer à son adoption. Mais puisque
la chambre l’a approuvée, il faut que nous l’exécutions loyalement.
Soyons plus prudents à l’avenir.
N’adoptons plus, mus par des considérations de
localités, des conventions ruineuses pour le pays. Mais quand elles sont
adoptées, soyons de bonne foi, exécutons-les loyalement, parce que si nous
voulons que les traités qui nous sont favorables ne soient pas violés à notre
détriment, il faut, je le répète, il faut que nous respections de notre part
les conséquences de ceux que nous avons adoptés, quelque désavantageux qu’ils
soient.
Je regrette d’être obligé de faire
valoir ces considérations. Ce n’est pas moi qui ai fait cette position au
commerce intérieur. Cette position a été faite par la convention du 16 juillet
1842, qui est devenue loi pour nous, et à laquelle nous sommes obligés de nous
soumettre,
M. Dumortier. - J’ai entendu avec la plus grande surprise les paroles prononcées par
un honorable préopinant, M. Delehaye, au sujet de la mesure du gouvernement
français qui exclut nos toiles des fournitures pour l’armée française.
Lorsque nous avons conclu avec la
France un traité de réciprocité, nous avons fait un très grand sacrifice, car
nous avons réduit d’un million au moins les revenus de l’Etat, c’était donc un
avantage bien positif que nous faisions à la France, à son industrie vinicole,
à son commerce de vins. D’autre part, la France avait consenti à nous accuser
en retour un avantage en admettant nos toiles sur l’ancien pied.
Je ne saurais donc m’expliquer
comment mon honorable collègue a pu soutenir dans cette discussion que le
gouvernement français était dans son droit en prenant la mesure relative aux
toiles destinées à l’armée française. Il est évident, au contraire, que le gouvernement
français n’ôtait pas dans son droit. En effet, lorsqu’une convention intervient
entre deux gouvernements, elle est générale ; elle ne comporte pas des
exceptions, des réserves, qui n’y sont pas stipulées.
On a imposé à
C’est sous ce rapport que je regrette
vivement que l’honorable député de Gand se soit exprimé comme il l’a fait ; car
n’est-il pas à craindre que lorsque notre gouvernement réclamera, le
gouvernement français ne lui réponde : « Un député du chef-lieu des Flandres,
un député de Gand trouve que nous sommes dans notre droit ; comment pouvez-vous
soutenir que nous avons tort, lorsque cet honorable député, dont la sympathie
pour l’industrie minière est connue, s’est chargé de prouver dans la chambre
belge que nous avons raison. »
Voilà quelle influence fâcheuse peuvent avoir les paroles de l’honorable député de Gand ;
c’est pour cela que je me vois obligé de les réfuter.
Lorsque
On sait qu’une partie notable des
toiles belges, consommées en France, l’était pour le service de l’armée. Les
expériences qui ont été faites ont démontré que la toile est d’un meilleur
usage que le coton, et que la toile à la main est d’un meilleur usage que la
toile à la mécanique. Donc, en bonne administration, le gouvernement français a
intérêt à se servir de toiles à la main, pour l’usage de son armée, et
Les dispositions de la convention
relatives au droit sur les vins, nous sont préjudiciables. Il est évident que
nous devons y trouver une compensation dans l’introduction de nos toiles en
France.
Vous vous rappelez que déjà le gouvernement
français a réclamé vivement au sujet d’une prétendue augmentation de droits à
Anvers ; on a soutenu alors que
Je maintiens donc que le gouvernement
belge doit réclamer énergiquement. Si sa réclamation n’est pas accueillie, il
doit faire en sorte que nos toiles remplissent les conditions pour être admises
dans les fournitures pour l’armée française.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Que faut-il faire pour cela
?
M. Dumortier. - Acheter quelques coupons de toile fabriquée en France pour qu’on
puisse en fabriquer de semblable en Belgique. Si ce n’est pas possible, c’est
un motif de plus pour défendre les intérêts du pays et pour faire valoir auprès
du gouvernement français les considérations que j’ai invoquées.
J’insiste pour que notre gouvernement
fasse auprès du gouvernement français les démarches nécessaires pour obtenir le
retrait de l’ordonnance qui exclut nos toiles des fournitures de l’armée
française.
M. le ministre de l’intérieur
(M. Nothomb) - Je m’empresse de répondre à
l’honorable préopinant que le gouvernement belge a tenté tous les efforts
possibles. Il a été répondu que l’ordonnance rendue sur la proposition de M. le
maréchal, ministre de la guerre en France, n’innovait pas, que l’on n’avait
fait que régulariser ce qui existait avant la convention du 16 juillet 1842.
Je prie la chambre de croire que je
ne suis ici que rapporteur. Je veux faire connaître les faits.
Le gouvernement français a déclaré
qu’avant la convention du 16 juillet, on n’admettait à la consommation pour
l’armée que les toiles françaises, et qu’en fait les toiles belges étaient
seulement admises à la consommation générale.
Depuis la convention du 16 juillet
(c’est toujours le gouvernement français qui parle), la consommation générale
est restée ouverte aux toiles belges. Mais la consommation spéciale de l’armée
est restée réservée aux toiles françaises.
Mais pourquoi, dira-t-on, a-t-on
rendu une ordonnance ? En voici le motif : Pour éviter la fraude, a-t-on dit,
il fallait une précaution nouvelle. Voici quelle a été cette précaution.
Désormais on n’admettra à la consommation spéciale de l’armée que les toiles
traversées d’une raie rouge en coton ; or, comme le coton est prohibé, toutes
les toiles où se trouve cette raie de coton rouge, sont repoussées à la
frontière, non parce que ce sont des toiles, mais à cause de la raie de coton
rouge qui s’y trouve.
Voilà les faits dans toute leur
exactitude.
Vous voyez que j’avais raison de dire
que l’introduction des toiles belges pour l’armée française est devenue
impossible.
Puisque j’ai la parole, je ferai
quelques observations qui n’ont pas été présentées, pour démontrer à la chambre
qu’il ne peut y avoir de doutes dans l’interprétation de la convention du 16
juillet. Je ferai cette preuve en confrontant les termes de cette convention
avec les termes d’autres conventions.
La convention du 16 juillet 1842
porte que le gouvernement belge s’engage à permettre, avec réduction de droits,
l’importation des vins de France, tant par terre que par mer. On ne parle pas
de pavillon. On ne fait aucune distinction de pavillon. L’expression est
générale.
L’honorable M. d’Elhoungne s’est
demandé si l’expression étant générale, la distinction de pavillon n’était pas
admissible. Il a semblé hésiter sur la réponse à donner. Je m’étonne,
messieurs, de cette hésitation. C’est avec intention au moins de la part du
gouvernement français, qu’aucune distinction n’a été faite. On a stipulé la
réduction du droit pour l’importation des vins de France soit par terre, soit
par mer, sans indication de pavillon.
Il ne résulte pas qu’une autre
puissance que les deux puissances contractantes aurait
pu de plein droit réclamer le bénéfice de la convention. Je me permets
d’appeler votre attention sur ce point. Il n’aurait pas suffi, par exemple, que
A cet égard, pour le gouvernement
hollandais, la convention serait restée ce qu’on appelle res
inter alios acta.
Nous avons conclu, messieurs, dans la
même année 1842, une autre convention ; c’est la convention avec l’Espagne, et
ici, messieurs, comme la réclamation avait déjà été faite par
Voici ce que porte l’art. 3 de la
convention conclue avec le gouvernement espagnol le 25 octobre 1842 :
L’art. 3, n°1, accorde la réduction de
droit d’entrée et d’accise dont jouissent les vins français, aux vins
d’Espagne, directement importés par mer,
sous pavillon belge ou espagnol.
Nous avons eu soin d’établir ici la
distinction ; il faut que ce soit sous pavillon belge ou espagnol.
Le même article 3 accorde encore des
réductions :
2° Des deux tiers des droits aux
huiles d’Espagne.
3° Des deux tiers des droits aux
fruits d’Espagne.
Dans l’un et l’autre cas, il est dit
que ces produits espagnols doivent être importés directement d’Espagne par mer
sous l’un des deux pavillons belge ou espagnol.
Vous voyez donc, messieurs, en
confrontant les deux textes, que ces deux conventions ont des sens différents.
Les expressions de la convention du 16 juillet 1842 sont générales et dès lors,
du moment que le gouvernement français déclarait que l’application de la
convention à l’importation des vins par
Il n’en est pas de même pour la
convention conclue avec l’Espagne. Là nous avons inscrit une limite ; nous
avons dit que l’exportation devait se faire par l’un ou l’autre pavillon belge
ou espagnol, de sorte qu’une tierce puissance ne pourrait venir demander le
bénéfice de la convention avec l’Espagne, quand même celle-ci y consentirait.
On vous a cité, messieurs, un autre
traité, le traité de commerce et de navigation conclu le 25 juillet 1840 entre
la France et les Pays-Bas. Comme on a négligé de vous lire le texte même, je
vous demanderai la permission de le faire. Cette lecture éclaircira un peu la
question, qui n’est pas présentée d’une manière bien nette dans la réclamation
des marchands de vin, réclamation où il y a une confusion d’idées, où il doit y
avoir une erreur de fait.
L’art. 10 de ce traité porte :
« S. M. le Roi des Pays-Bas
consent :
« A affranchir de tout droit de
douanes, à l’entrée de ses Etats d’Europe, les vins, eaux-de-vie et esprits-de-vin en cercles ;
« 2° Et à réduire de 3/5 pour
les vins en bouteille et de 1/2 pour les eaux-de-vie et esprits aussi en
bouteilles les droits d’entrée. »
Cet article ajoute, et remarquez bien
ceci :
« Lorsque lesdits vins, eaux-de-vie
et esprits, tant en cercles qu’en bouteilles, seront importés par mer, sous
l’un ou l’autre des deux pavillons ; et par terre et par les fleuves et
rivières spécifiées en l’article 8, sous pavillon quelconque.»
L’art. 8 que l’on invoque ici, cite
tous les fleuves et cours navigables compris dans l’acte du congrès de Vienne,
en ajoutant les eaux intermédiaires dans le royaume des Pays-Bas.
Ainsi l’on n’a fait qu’une
distinction pour l’importation des vins de France en Hollande. Quand ces vins
sont importés par mer, il faut, pour jouir du bénéfice de la convention du 25
juillet 1840, que ce soit par pavillon hollandais ou par pavillon français.
Mais il n’en est pas de même lorsqu’il s’agit de l’importation par
C’est là qu’il y a, qu’il doit y
avoir une erreur dans la réclamation des marchands de vin. Les eaux intérieures
étant comprises dans les voies navigables indiquées par l’art. 8 du traité du
25 juillet, l’introduction des vins français par cette voie doit se faire avec
le bénéfice de ce traité. Cependant les marchands de vin d’Anvers disent que
les vins de France ne sont pas admis avec la remise des droits par les eaux
intérieures, Ceci est positivement contraire au texte de l’art. 10 du traité du
25 juillet, et s’il en est ainsi, je dis que le gouvernement belge doit faire
une réclamation, et invoquer le texte de cet article 10.
M. de Haerne. - Messieurs, je conçois que
M. le ministre de l’intérieur, en parlant en séance publique, s’exprime de la
manière que vous venez d’entendre, sur l’interprétation que le gouvernement
français, par l’organe du maréchal Soult, a donnée à la convention du 16
juillet 1842, relativement à la consommation des toiles pour l’usage de
l’armée. Mais je suis porté à croire que M, le ministre de l’intérieur se serait
exprimé autrement, si nous avions été en comité secret, ce qui prouve, soit dit
en passant, que le huis-clos est bon à quelque chose.
J’espère bien que M. le ministre de
l’intérieur tiendra aussi, dans ses relations diplomatiques avec le cabinet de
Paris, un autre langage, ou du moins qu’il fera entendre qu’il n’est pas
d’accord avec le ministère français à cet égard.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - J’ai dit que je ne citais
que des faits.
M. de Haerne. - J’ai bien compris.
Messieurs, je ne puis admettre
l’explication donnée par le gouvernement français, car elle est tout à fait
contraire à des faits qui se sont passés. Il est connu, dans les Flandres, qu’antérieurement
à la convention du 16 juillet, les toiles belges étaient employées pour l’usage
de l’armée française, et, s’il le fallait, je pourrais vous citer des maisons
françaises, des maisons de Lille qui étaient dans l’habitude de venir acheter sur
nos marchés des toiles de Flandre pour la consommation de l’armée. Je dirai
plus ; il est à ma connaissance que des régiments français tout entiers ont
renoncé à l’usage de la toile française qui, faite à la mécanique, ne
présentait pas la solidité qu’elle aurait dû avoir, et sont revenus aux toiles
belges.
Ce sont là des faits positifs, d’où
il résulte qu’il est impossible d’admettre l’explication donnée par le
gouvernement français.
Mais il y a plus. Lorsque la
convention du 16 juillet a été conclue, ou du moins quelque temps auparavant,
vous savez que des réclamations unanimes sont parties des intéressés des
Flandres contre cette convention, et cela dans l’espoir de la faire restreindre
ou d’y faire ajouter quelque disposition. Messieurs, nous étions alors dans des
termes assez défavorables vis-à-vis la France, pour ce qui concerne le commerce
des toiles ; nous étions déjà sous le coup du funeste amendement de Lespaul. Vous vous rappellerez que de vives réclamations
ont été faites contre cet amendement par plusieurs chambres de commerce, par
plusieurs marchands de toile et notamment par la députation des Flandres qui
s’est réunie à l’hôtel de l’Univers, et que l’on a engagé le gouvernement à ne
négocier avec le cabinet de Paris que sous la condition du retrait de la
proposition de Lespaul.
Messieurs, j’ai déjà eu l’honneur
d’appeler en comité secret votre attention sur ce point ; j’ai demandé des
explications à M. le ministre des affaires étrangères. Il a bien voulu me
communiquer plus tard quelques notes qui ont été échangées à cet égard, mais je
dois déclarer que je n’ai pas eu toute la satisfaction que je désirais, et
j’espère que le gouvernement ne cessera pas d’insister sur ce point auprès du
cabinet français.
Messieurs, je dois vous entretenir un
moment de l’amendement de Lespaul, dont la portée
n’est pas connue de tout le monde.
M. le
président. - Je ferai remarquer à l’orateur que cet objet n’est pas pour le moment
en discussion.
M. de Haerne. - Cela se rattache à la
convention du 16 juillet. Je puis citer quelques faits qui sont essentiels pour
faire connaître la portée de cette négociation. (Parlez ! parlez !)
M. le
président. - Ce n’est point la convention du
16 juillet qui est en discussion. Si cependant la chambre le permet, la parole
vous sera continuée.
M. de Haerne. - Je vais seulement avoir
l’honneur de vous citer quelques chiffres de l’amendement de Lespaul. D’après cet amendement, qui compte les fractions
de fil tombant sous la coupe, nos toiles peuvent être rangées en trois
catégories. D’abord, un bon tiers des toiles que nous importons en France,
subit une augmentation de 33 p. c., prise sur le
montant des droits tels qu’ils étaient perçus avant l’adoption de l’amendement
de Lespaul. Un autre bon tiers de nos importations
subit une augmentation de 25 p. c. ; enfin, un
cinquième de nos importations est soumis à une augmentation de 16 p. c. Cela
fait en moyenne une augmentation de 24 à 25 p. c. C’est là une entrave
extrêmement considérable pour notre commerce de toiles, et cet amendement nous
fait perdre en quelque sorte tous les avantages que le traité semblait nous
accorder. Si nous tenons compte de l’avantage que les Anglais trouvent dans la
fabrication à la mécanique, nous devons reconnaître qu’en France nos toiles
sont mises absolument sur la même ligne que les toiles anglaises
Voilà, messieurs, les faveurs que la
France nous a accordées. Je ne rappellerai pas l’ordonnance relative aux toiles
blondines, ni les entraves apportées à l’importation de nos fils, ni les
obstacles que l’on oppose au transit de nos toiles vers l’Espagne, ni une foule
d’autres vexations.
La France parle de morale, mais ce
n’est qu’à notre égard qu’elle déploie une morale sévère ; elle n’est pas du
tout aussi difficile lorsqu’il s’agit des fraudeurs français ; là, c’est bien
autre chose, là, la morale est complètement perdue de vue.
Faut-il après cela concéder bénévolement
à la France une faveur qu’elle nous demande, et à l’égard de laquelle le traité
n’est nullement clair ? Il me semble qu’il aurait fallu saisir cette
occasion, pour insister auprès du gouvernement français, afin qu’il fît droit
aux réclamations que nous avons à lui adresser.
Du reste, messieurs, je crois que la
France est la première intéressée à ce que nous n’admettions pas les vins
venant de
Je crois, d’un autre côté,
qu’en n’admettant pas ces vins, nous agissons dans le sens du Limbourg ; en
effet, messieurs, j’ai vu, il y a quelques jours, dans un journal, une pétition
adressée au gouvernement hollandais par les habitants de Maestricht, afin
d’obtenir l’importation, au droit de 10 cents, des vins français, importés par
la frontière belge. C’est là l’intérêt de la généralité des habitants du
Limbourg, et je crois que nous devons appuyer leur réclamation ; car, s’ils ne
sont pas soutenus, ils sont en trop petit nombre pour obtenir justice. Nous ne
devons pas tout concéder de prime abord. Nous devons commencer par exiger que
l’on nous fasse justice. De cette manière nous pourrons en venir à un
arrangement sur ce point avec le gouvernement hollandais. Lorsque le
gouvernement hollandais permettra l’importation au droit de 10 cents des vins
français venant de Belgique, nous pourrons aussi accorder ce que le
gouvernement hollandais demande à l’égard des vins français venant des
Pays-Bas, qu’ils soient sophistiqués ou non.
Je dois m’élever contre des paroles
qui ont été prononcées dans cette enceinte par un honorable membre qui voudra
bien, j’espère, les expliquer d’une manière satisfaisante ; car ces paroles
pourraient produire un mauvais effet dans le pays et surtout dans les Flandres.
Nous avons entendu dire par M. le
ministre de l’intérieur que le gouvernement français n’a rien innové en
défendant l’emploi de nos toiles pour la confection des objets nécessaires à
l’armée. L’honorable membre auquel je fais allusion a été plus loin ; il a dit
que le gouvernement français avait agi loyalement. Il s’est sans doute fondé
sur ce qu’avait dit M. le ministre de l’intérieur. Quoi qu’il en soit, j’espère
qu’il voudra bien donner une explication satisfaisante de ses paroles.
M. Osy. - M. le ministre de l’intérieur convient lui-même que, en vertu du
traité entre la France et les Pays-Bas, nous avons le droit d’importer du vin
français en Hollande au droit de 10 cents.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Pas par mer.
M. Osy. - Par les eaux intérieures.
Je demande le renvoi de la pétition à
M. le ministre des finances, avec prière de donner connaissance à la chambre
des négociations qui seront suivies relativement à cet objet.
M. Delehaye. - La chambre fait toujours bien d’engager le ministère à protester
contre toutes les mesures prises par un gouvernement voisin contre ses intérêts
; comme mes honorables collègues, j’ai protesté dans le temps contre l’ordonnance
prise en France au préjudice de notre industrie linière ; autant que qui que ce
soit, j’ai été alarmé de cette mission ; mais lorsque des réclamations, des
négociations ont repoussé vos réclamations, il est temps alors d’envisager les
choses avec la raison, remettant le sentiment à d’autres circonstances. C’est
ce que j’ai fait, je savais que la mesure contre les toiles n’était point
nouvelle ; que, toujours dans l’intérêt de son industrie, la France avait
prescrit l’emploi exclusif des toiles françaises dans le confectionnement
de l’habillement de l’armée. Je savais aussi qu’on éludait cette mesure en
appliquant sur des toiles belges, la marque qu’on appliquait sur les toiles
françaises.
Lorsque j’ai su que le gouvernement
français avait repoussé nos réclamations, j’ai examiné la question, dégagé de
toute prévention patriotique, et il m’a paru que la France avait agi comme je
voudrais que notre ministère le fît toujours, c’est-à-dire qu’après avoir
rempli ses devoirs envers ses voisins, il ne consultât que les convenances de
son commerce et de son industrie.
Il est temps, messieurs, de faire
entendre au pays la vérité, et je crois en avoir acquis le droit ; lorsqu’il
s’agit des intérêts des Flandres, je ne les ai point négligés ; souvent
messieurs, vous m’avez accusé d’être animé par esprit de localité, je suis
douloureusement affecté de voir que la vérité que je ne saurais cacher doive
m’attirer aujourd’hui, je dirai presque un rappel à l’ordre. J’ai plus de
confiance dans l’impartialité du pays, lui aussi dira avec moi que le sentiment
doit faire place à la vérité.
On se plaint du grand
sacrifice que nous a imposé la convention avec la France ; ce sacrifice est
grave, mais il ne consiste point dans les 700,000 ou 800,000 fr. que le trésor
perçoit de moins ; ce n’est point la France qui a reçu cette somme, ce sont les
consommateurs belges qui l’ont gardée en poche ; il fallait, pour remplacer le
vide que cette convention laissait dans le trésor, frapper l’aisance, le riche
d’un impôt équivalent. A mes yeux le grand sacrifice, c’est qu’il nous a liés
envers la France ; nous n’avons pour le moment aucune réserve contre elle ;
sans la convention, vous pouviez forcer la France à vous traiter plus
favorablement, vous pouviez atteindre ses fabriques de soie, ses vignobles, ses
bijouteries. Aujourd’hui vous êtes liés et malheureusement la France vous tient
dans l’impossibilité de frapper différents produits.
M. Simons a fait un singulier raisonnement. La convention, d’après lui, est bien
nuisible à
Messieurs, ce n’est point en
récriminant contre la France que nous améliorerons notre position ; imitons ce
pays, que notre gouvernement imite celui de cette nation ; et le commerce et
l’industrie n’auront qu’à s’en applaudir ; l’affection du pays sera acquise à
ceux qui, mettant de côté toute sensibilité, n’écouteront que la raison, qui
toujours préférera les mesures les plus utiles au travail national.
M. Delfosse. - Je ferai remarquer en commençant, que l’on vient de traiter en
séance publique des questions au moins aussi délicates que celles pour
lesquelles on avait réclamé le huis clos.
Je ne puis admettre que le
gouvernement français aurait violé la convention du 16 juillet en excluant nos
toiles de l’habillement des troupes françaises ; le gouvernement français est
libre d’habiller ses troupes comme il l’entend, la convention ne lui a pas
enlevé ce droit ; si le gouvernement français, au lieu de mettre la fourniture des
toiles en adjudication, avait trouvé bon de les acheter à main ferme, il aurait
certes pu s’adresser aux fabricants français, il ne serait entré dans la pensée
de personne de l’en blâmer ; et cependant les toiles belges auraient été
exclues. Ce que le gouvernement français pourrait faire dans un marché à main
ferme, pourquoi lui serait-il interdit de le faire dans un marché par
adjudication publique ?
Ceux qui soutiennent que la convention
a été violée, doivent aller jusqu’à dire qu’elle serait également violée par
une réduction de l’armée française, car l’effet de cette mesure serait de
diminuer la consommation de toiles ; une telle opinion est trop exagérée pour
qu’elle ait des chances de succès dans cette chambre.
J’arrive à l’objet en
discussion : on paraît généralement d’accord que le traité entre la France et
les Pays-Bas doit être exécuté en Hollande, dans le même temps que le traité
entre la France et nous l’est en Belgique ; sans cela
Le gouvernement vient de reconnaître
la nécessité de faire exécuter les deux traités dans le même sens ; mais,
puisqu’il a cette conviction, je lui demanderai pourquoi il n’a pas encore
remis une note au gouvernement des Pays-Bas ; lorsque le gouvernement des
Pays-Bas, appuyé par la France, nous a remis une note pour réclamer l’exécution
du traité conclu entre la France et
L’inaction de notre gouvernement dans
cette circonstance prouve ce qui malheureusement est prouvé par beaucoup
d’autres faits, que les gouvernements étrangers montrent plus de sollicitude
pour leurs indigènes que le gouvernement belge n’en montre pour les siens.
M. Desmaisières. - Messieurs, je ne viens pas parler de la question des toiles, car,
selon moi, on en a trop parlé ; je dirai seulement que, dans mon opinion, le
gouvernement français n’a pas agi avec justice envers
Quant à la question des vins,
l’honorable M. Simons vous a donné lecture de l’article du traité du 16 juillet
qui y est relatif ; cette simple lecture doit donner la conviction que du
moment que les vins sont véritablement de France, ils doivent être admis en
Belgique au droit réduit, par quelque partie de nos frontières qu’ils soient
présentés.
Mais, d’un autre côté, nous devons
aussi avouer que les plaintes de nos marchands de vin sont fondées, en ce sens
que d’abord il résulte du silence gardé par le traité sur les mesures à prendre
pour constater que les vins sont véritablement de France ; il résulte, dis-je,
de ce silence, que le gouvernement belge a le droit de prescrire les formalités
à remplir pour qu’il soit constaté que les vins qu’on importe sous le sceau de
vins de France, de Hollande en Belgique, sont véritablement des vins de France.
Les plaintes de nos marchands de vin
sont assez fondées, en ce sens qu’ils demandent, de la part de
Cette injustice serait encore
beaucoup plus grave, s’il était vrai, comme le prétendent nos marchands de vin,
que malgré le traité conclu par nous avec les Pays-Bas, les vins que nous
importons en Hollande par les eaux intérieures sont frappés du droit qui avait
été établi par la loi de 1828 contre
Vous avez appris, messieurs,
par ce que vous a dit M. le ministre de l'intérieur, que, d’après le traité que
nous avons fait avec
Je ne puis donc qu’engager le
gouvernement à profiter de tout ce qui s’est dit dans cette discussion, pour
obtenir du gouvernement hollandais le retrait de l’application de la loi de
1828, pour les vins que nous importons en Hollande, aussi bien par les eaux
intérieures que par mer. Je crois que notre gouvernement peut d’autant plus
faire cette réclamation, que
- Personne ne demandant plus la
parole, la discussion est close.
La commission propose le renvoi de la
pétition à M. le ministre des finances.
M. Osy propose le même renvoi, avec demande de faire connaître le résultat des
négociations.
- La proposition de M. Osy est
d’abord mise aux voix, elle est adoptée.
CONCLUSIONS
DE LA COMMISSION D’ENQUETE PARLEMENTAIRE (COMMISSION « DE FOERE ») ET
SYSTÈME DES DROITS DIFFERENTIELS
Discussion générale
M. le
président. - La parole est à M. Rodenbach.
M. Rodenbach. -
Messieurs, dans la séance d’hier, M. le ministre de l’intérieur m’a fait
observer, avec raison, que j’avais commis une erreur, en déclarant qu’on
n’accordait pas de protection aux navires nationaux. J’ai en effet oublié de
parler de la livre sterling que le gouvernement propose d’accorder par tonneau
de 1,000 kilog. aux navires
du pays. Mais cette livre sterling ne fait que 2 fr. 50 c. par 100 kilog. de café, soit 2 centimes
1/2 par kilo de café, soit enfin 1 centime 1/4 par livre de café. Cette protection
n’est évidement pas suffisante.
L’honorable sénateur Cassiers pense,
avec moi, que les Américains qui arriveront à Anvers avec des cafés, ne
prendront pas en retour des marchandises de notre pays. Il en sera de même des
Anglais, qui iront aux Indes, au Brésil, vendre leurs fabricats, et y
chargeront des cafés qu’ils viendront importer en Belgique. Or, le bénéfice
qu’ils réaliseront sur la vente de leurs marchandises nationales sera bien
supérieur au droit différentiel d’un centime et un quart de centime par livre
de café qu’ils payeront a Anvers. Les Hollandais jouiront aussi d’un immense
avantage ; et puisque
Ainsi, je ne puis que répéter ce que
j’ai dit hier : il serait nécessaire d’augmenter d’un franc le chiffre de la
proposition ministérielle. Je ne veux pas aller aussi loin que la commission
d’enquête ; elle qui propose de faire payer 11 francs aux navires étrangers, et
7 francs aux navires indigènes ; mais je crois qu’il y a lieu de majorer d’un
franc le chiffre proposé par le gouvernement ; un honorable député de Tournay
s’est concerté avec moi, pour déposer un amendement dans ce
sens. Je ne puis assez le répéter, une protection de 2 1/2 centimes par
kilogramme est trop minime. On ne doit pas perdre de vue que lorsque nos
navires iront à Batavia (et il est à présumer qu’ils s’y rendront), ils auront
à payer, à la sortie, un droit de 7 francs que les Hollandais ne doivent pas
payer.
Ainsi donc nous ne pourrons pas, avec
une protection d’une livre sterling par tonneau, atteindre le but que nous nous
proposons. Si nous n’avons pas un droit différentiel plus élevé, les Américains
iront vendre leurs farines à
M. David. -
Messieurs, en relisant le discours que j’ai prononcé il y a trois jours dans le
comité général, je suis forcé de revenir sur l’idée que j’émettais dans la
phrase suivante : « Le port d’Anvers,, par l’organe,
bien entendu, de ses gros commerçants, perd de vue dans cette circonstance tout
le tort que lui ferait la concurrence des autres ports de
(Erratum
Moniteur belge n°127, du 6 mai 1844 :) Je pensais, messieurs, bien
sincèrement, lorsque j’ai prononcé ces paroles, que nos ports de deuxième
classe pourraient élever des chantiers au détriment d’Anvers, mais aujourd’hui,
je viens humblement confesser que j’étais dans le faux et voici pourquoi : Quel
intérêt auraient les ports secondaires à construire des navires, eux qui, sans
doute, n’ont pas la prétention de faire la navigation au long cours et ne
pourraient la faire. Evidemment aucun. Quelle est la seule navigation qu’ils
puissent avoir ? celle du cabotage avec les entrepôts
européens et pas d’autres. Manquera-il de navires pour celle-là ? Oh ! certainement non : on pourra, au contraire, se mettre à
l’œuvre pour dégrever ceux qui sont construits, car les droits différentiels
anéantissent manifestement le commerce et la navigation du cabotage ; et la
navigation du cabotage n’est pas seulement détruite pour tous ces ports, elle
l’est pour Anvers elle-même… A cette vie, à cette activité aux bassins d’Anvers
aujourd’hui, qu’allez-vous voir succéder lorsque vous aurez décrété les droits
différentiels ? L’ennui, le vide à ces mêmes bassins...
Sans cabotage, point de vie pour Anvers
; la mort de la navigation pour tous les petits ports.
Maintenant, ils sont avertis : en
réfléchissant au sort qui les attend, il est, à la rigueur, peut-être encore
temps de faire parvenir leurs protestations dans cette enceinte par la voix de
leurs représentants. Je forme des vœux pour qu’ils méditent mes paroles. Mon
opposition dans la question qui nous occupe n’a rien de passionné. Je dis ce
que je pense ; je signale les dangers que court mon pays.
Entre autres motifs que signale
l’honorable M. Dumortier pour nous rassurer sur les représailles de la
Hollande, il nous dit que toujours nous pourrons paralyser ses mesures en
entrant chez elle par la voie de l’Allemagne. Mais M. Dumortier y a-t-il pensé
? M. Dumortier s’est-il dit que l’Allemagne jouit vis-à-vis de
Et puis, le beau remède d’aller
emprunter cette frontière ! Abandonner toutes nos routes, nos canaux. Oh ! messieurs, espérons que la sagesse de la chambre détournera
de nous tant d’entraves, tant de calamités !
Nous recevons ici, messieurs, un
journal d’une ville secondaire, à la vérité, mais un journal dont les articles
de fond en fait de vues commerciales ne le cède en rien à nos grands journaux.
Je veux parler du journal L’industriel de
Verviers, dont je me permettrai de citer textuellement, quelques lignes.
Vous verrez, messieurs, lorsque vous les aurez méditées, si l’on peut rien
avancer de plus concluant contre l’adoption des droits différentiels.
Plusieurs voix. - Un journal maritime de Verviers !
M. David. -
Messieurs, nous n’avons pas l’immodestie de nous poser
en port de mer. Nous savons ce que nous valons. Verviers donne l’exemple de
l’exportation, Verviers connaît les opérations maritimes autant par expérience
que vous semblez les connaître par théorie.
Dans tous les cas, Verviers permettra
à Bruges de s’immiscer dans les questions industrielles, nous devons avoir le
droit de toucher aux questions maritimes.
« Pour faire accueillir les droits
différentiels par l’industrie, les prôneurs de ce système prétendent qu’en
favorisant les importations directes par navires belges et étrangers, mais par
navires belges surtout, on favorise l’industrie, puisqu’on lui offre des
chances d’exportation.
« Nous consommons des marchandises
coloniales pour 100 millions, dont 59 millions nous sont importés des pays de
production par navires belges et étrangers ; 41 millions nous arrivent des
entrepôts. Il n’est pas difficile d’établir que, bien que les importations
directes soient supérieures à celles qui se font des entrepôts d’Europe, nos
exportations, aux entrepôts d’Angleterre et de Hollande seulement, sont
supérieures à nos exportations directes.
« En 1842, nos importations des pays
transatlantiques et nos exportations ont donné les résultats suivants (en
francs) :
« Singapore : importations
: 1,784,500 ; exportations : 427,7000 ;
fabricats : 343,000
« Java : importations
: 912,300 ; exportations : 123,800 ; fabricats : 87,700
« Etats-Unis : importations
: 22,543,900 ; exportations : 3,287,800 ;
fabricats : 1,647,500
« Mexique : importations
: 128,800 ; exportations : 580,000 ; fabricats : 464,000
« Cuba et Porto-Rico : importations : 6,897,100
; exportations : 831,200 ; fabricats : 739,300
« Haïti : importations : 6,880,400 ; exportations : 14,500 ; fabricats : 10,600
« Brésil : importations
: 12,534,600 ; exportations : 2,058,600 ;
fabricats : 1,121,000
« Rio de la Plata
: importations : ;9,325,600 exportations : 366,100 ; fabricats :
295,900
« Chili : importations
: 432,800 ; exportations : 175,400 ; fabricats : 145,900
« Total : importations : 51,437,000 ; exportations : 7,965,100 ; fabricats :
4,854,700 »
« Voilà certainement des pays avec
lesquels nous avons des relations directes par nos navires et les navires
étrangers et, en échange de 51 millions de marchandises qu’ils nous ont
fournies, nous ne leur en avons livré que pour 8 millions, dans lesquels notre
industrie participe pour 5 millions tout au plus.
« Ce tableau prouve, à moins que l’on
ne soit égaré par des préventions, que les importations faites par un pays dans
un autre ne se payent pas avec les exportations de ce dernier faites
spécialement pour le premier. » (Dénégations
à plusieurs bancs).
Messieurs, je vous prie de ne pas
m’interrompre. Vous me répondrez. Vous avez entendu hier mon honorable ami, M.
Lesoinne, qui nous expliquait d’une manière si pratique, si claire, ce qui se
passe au-delà de l’Atlantique, et vous reviendrez de vos utopies, je n’en doute
pas.
(L’orateur
reprend :) « Les navires des nations transatlantiques qui arrivent dans nos
ports préféreraient en emporter des marchandises plutôt que d’y retourner sur
lest, ou de se rendre aux entrepôts d’Europe pour se charger des fabricats
d’Europe, et s’ils ne nous en prennent pas, c’est que nous n’avons pas de spanihs streeps pour Singapore,
des draps des cotons, des toiles, en un mot, des produits manufacturés tels que
les nations transatlantiques en demandent et tels que l’Angleterre, entre
autres, sait en fournir. Les industriels belges fabriquent, en général, pour
l’intérieur et pour les nations d’Europe, et quand ils voudront fabriquer pour
les nations transatlantiques, quand ils auront des capitaux qui permettront
d’exporter, ou une classe d’hommes achetant des produits pour l’exportation,
nous verrons nos exportations se diriger vers les nations transatlantiques. De
même qu’un capitaliste n’achète pas sur place des fabricats, s’il n’a pas la
certitude de les vendre à l’étranger de même les navires qui touchent à nos
ports préfèrent partir sur lest plutôt que de se charger de marchandises qu’ils
ne pourraient réaliser.
« Voyons maintenant ce que nous avons
importé des entrepôts de
« En Hollande :
« Marché colonial : importations : 19,451,200 ;
exportations : 26,397,500 ; fabricats : 18,218,715
« Autres : importations : 19,632,600
« Angleterre :
« Marché colonial : importation : 17,299,700 ; exportations : 9,073,200 ; fabricats : 1,904,100
« Autres : importations : 30,932,400
« Total : importations : 77,315,900
; exportations : 35,470,700 ; fabricats : 20,222,815
« Pays transatlantiques : importations : 51,437,000 ; exportations : 7,965,100 ; fabricats : 4,854,700
« La simple comparaison de ces
chiffres prouve que nos relations avec les entrepôts d’Europe sont plus utiles
à l’industrie que nos relations directes avec les pays transatlantiques, et que
nous fournissons aux premiers quatre fois autant de produits manufacturés. Ce
tableau prouve encore que c’est contre la Hollande et notre industrie que le
système des droits différentiels est dirigé ; lorsque l’on nous aura fermé la
Hollande, qui consomme nos fabricats à concurrence de 18 millions, sera-ce la
marine belge que nous donnera, comme débouchés, les pays transatlantiques ? »
Ainsi que je l’ai dit les jours
passés, messieurs, je remarque à l’atmosphère de la chambre qu’il y a parti
pris en faveur des droits différentiels. Dans cette situation désespérée,
savez-vous, messieurs, ce qui pourrait nous arriver de plus heureux ? Ce serait
l’adoption de la proposition la plus exagérée, plus avancée, s’il était
possible, que celle de la section centrale. Le remède ainsi serait plus près de
nous ; l’expérience du système ne serait pas de longue durée. Nous ne perdrions
ainsi qu’une année ou deux. Si, au contraire, on est modéré, si l’on adopte le
projet du gouvernement, par exemple, nous n’aurons fait que vivoter plus
longtemps phtisiques ; nos maux seront graves en raison de la lenteur de notre
agonie. Mieux vaut arriver tout à coup au paroxysme, que voir renforcer,
retoucher chaque année au système. C’est ce qui arriverait infailliblement si
l’on adoptait que le projet du gouvernement. On ne manquerait pas de croire
alors que l’inefficacité de la loi des droits différentiels n’a pour cause que
l’inanité des tarifs. Mieux vaut faire d’emblée l’expérience complète, le salta mortale.
Messieurs, je termine en disant,
ainsi que je l’avais annoncé dans mon dernier discours, quelques mots sur
l’intérêt de ma province et en venant protester contre des mesures qui la
compromettent au dernier degré.
La province de Liége est ébranlée,
elle est atteinte jusque dans ses fondements. (Mouvement.) Et c’est par un sourire d’incrédulité, messieurs, que
vous accueillez de semblables paroles ! Je vous en prie, messieurs, écoutez-moi
jusqu’au bout, vous verrez si mes appréhensions sont fondées.
M. Delfosse. - Ecoutons, écoutons, messieurs, la chose est assez sérieuse.
M. David. -
Cette belle province, elle à qui
Par mon vote contre la loi,
par mon vote pur et simple, je ne me sentirai donc pas suffisamment soulagé. Je
veux encore protester contre elle au nom de la province que j’ai l’honneur de
représenter. Je veux protester au nom de notre industrie que vous allez
amoindrir, au nom des représailles que vous allez attirer sur notre jeune
existence. Je proteste contre la loi que vous occupe au nom de tout votre
passé, au nom du péage de l’Escaut dont vous avez voté le remboursement, au nom
de notre chemin de fer qui porte au Rhin l’embouchure de notre fleuve envié, au
nom de la navigation transatlantique que nous vous avons arrachée, au nom de
M. Van Cutsem. - Messieurs, le travail national est considéré partout comme une
condition sine qua non, d’ordre, de moralité d’aisance et de bien-être.
Pour que tous les citoyens d’une
nation soient à l’abri de la misère, il faut que chaque homme valide ait
constamment du travail assuré, et que ce travail produise de quoi subvenir à sa
consommation et à celle de sa famille : c’est au gouvernement, c’est à la
législature qu’incombe le devoir de mettre la nation dans cette position par
une législation commerciale et industrielle, qui, comme toutes les autres
parties de la législation ordinaire, devienne une cause de bien-être et
d’indépendance pour le pays.
Depuis près d’un siècle l’économie
politique est partagée en deux systèmes qui s’excluent mutuellement ; la
plupart des gouvernements sont attachés au régime prohibitif, les hommes de lettres
préconisent la liberté de commerce.
Les peuples ont besoin de faire leur
apprentissage, nous avons fait le nôtre ; mais à présent que nous voyons
combien la liberté commerciale a été fatale à
Avec le système aujourd’hui en
vigueur, notre propre commerce d’échange s’est, au grand détriment de
l’industrie belge, vu réduire à celui de commission.
Pour remédier à cet état de
souffrance on pouvait recourir à différents moyens, entre autres aux traités
internationaux ; mais, pour négocier avec avantage des traités de commerce avec
les peuples voisins, nous eussions dû, comme ces peuples, avant de chercher des
débouchés à l’étranger, en chercher d’abord à l’intérieur par un régime plus
protecteur et ménager dans le pays même à l’industrie nationale un débouché
qu’on peut, sans exagération, porter à 30 millions de francs, et donner, par
des droits différentiels de navigation et de douane, à notre marine une
protection autre que celle qu’elle a aujourd’hui, et qui se réduit sur
l’importation de 100 kil. de café à 80 cent., lorsque
l’Angleterre, forcée de protéger les produits de ses colonies, impose un droit
énorme d’un schelling trois pence à la consommation d’une livre de café et
qu’elle frappe le sucre étranger d’un droit d’environ de 82 fr. par 50 kilog.
Si nous avions suivi l’exemple de
Au lieu de suivre cette marche, qui
était indiquée par la raison et les exemples qui nous étaient donnés par toutes
les nations marchandes et industrielles du globe, nous nous sommes mis à la
poursuite de traités de commerce sans rien obtenir, par cela seul que nous
avons commencé par où il aurait fallu finir.
Le résultat de nos négociations
commerciales ne doit donc surprendre personne pour cette première raison ; il
ne doit pas encore nous étonner, puisque jusqu’aujourd’hui on ne peut citer
aucun traité par lequel des Etats européens se soient accordé au moyen de
l’abaissement mutuel de leurs tarifs la faculté d’importer dans leurs pays
respectifs des fabricats qu’ils produisent eux-mêmes en quantités suffisantes
pour leur consommation, ou qu’ils sont en voie de produire pour suffire à leurs
propres besoins. Les traités de commerce ne se négocient aujourd’hui qu’au
moyen d’articles dissimilaires produits spécialement par l’une partie
contractante et consommée par l’autre.
Ne nous laissons pas leurrer plus
longtemps par l’étranger qui, depuis plusieurs années, a pris des voies
indirectes pour donner le change à
L’Angleterre, malgré quelques
modifications plutôt apparentes que réelles, a encore, pour régler son système
commercial, l’acte de navigation d’Olivier Cromwell, elle n’admet à la
consommation intérieure que les produits de ses colonies et ne reçoit les
produits de l’Asie, de l’Afrique et de l’Amérique qu’importés par ses propres
navires ; si Huskisson a fait réduire le tarif
anglais de manière à n’avoir que des droits de 30 p. c., si le ministre Robert
Peel a fait imposer les matières premières d’un droit de 5 p. c. à leur entrée
en Angleterre, les produits à demi travaillés d’un droit de 10 p. c., les
objets entièrement manufacturés d’un droit de 20 p. c., ils n’en ont agi ainsi,
que parce qu’ils n’avaient rien à craindre pour la plus grande partie de leurs
industries, dans lesquelles ils ont une supériorité marquée ; et si les Anglais
prêchent aujourd’hui la liberté commerciale, ils ne la vantent que parce qu’ils
n’ont plus besoin de protection pour la plupart de leurs fabricats. Lorsque des
produits étrangers doivent faire concurrence aux leurs, ils ne les dégrèvent
pas des énormes droits qui pèsent sur eux à leur entrée en Angleterre ; c’est
de cette manière qu’ils ont maintenu ceux qui existent sur les soieries et les
vins étrangers ; c’est encore ainsi que, s’étant aperçus que nous importions
chez eux pour quelques cent mille francs de chicorée, ils ont frappé cette
denrée de droits prohibitifs, quoique nous leur prouvions qu’ils importaient
annuellement chez nous pour environ cinquante millions de francs de leurs
produits.
L’Amérique, qui est loin encore
d’avoir atteint en industrie la supériorité à laquelle l’Angleterre est
parvenue, s’est, pour y arriver, appropriée le tarif anglais, et par suite de
l’adoption de ce tarif, l’Angleterre, qui envoyait dans ce pays pour 290
millions de francs de ses produits, n’en expédie plus que pour environ 90
millions de francs.
La France s’est donné, sous la
restauration, le système commercial anglais, et ce système n’a pas été changé
depuis lors dans ce pays, pas plus qu’en Angleterre depuis Cromwell.
L’Allemagne a un tarif modéré, mais
supérieur au nôtre. Toutefois elle n’est pas encore constituée commercialement
; elle le sera d’après toutes les apparences, comme la France et l’Angleterre,
d’ici à peu d’années.
Le système commercial de
L’Espagne, le Portugal,
Aucune nation ne peut importer dans
ces pays, sinon pour la réexportation ou en transit des sucres ou des cafés ;
en face de pareils faits peut-on dire que nous ne devions pas majorer dans
l’intérêt de nos exportations nos droits différentiels sur les importations
directes et indirectes ?
Si on ne veut pas adopter les droits
différentiels, qu’on nous dise alors par quels moyens nous parviendrons à créer
un commerce extérieur, comment nous arriverons sur les marchés lointains, les
seuls qui nous soient ouverts, comment nous pourrons échanger nos produits,
comment nous lutterons contre les importations de l’étranger et comment nous
pourrons trouver dans nos propres importations le moyen d’exporter nos
produits ?
Si nous ne recevons les denrées
coloniales que de seconde main, pourquoi
La Hollande, notre rivale la plus dangereuse,
ne pourra-t-elle pas favoriser le transit par des conventions
internationales ?
Soyez convaincus, messieurs, que si
nous conservons notre législation actuelle, nous ne parviendrons pas à créer à
Anvers ces marchés qui existent à Rotterdam, à Amsterdam, à Hambourg et au
Havre ; les denrées coloniales, malgré notre beau réseau de chemins de fer,
continueront à nous arriver en grande partie par cabotage des entrepôts
d’Europe ; les prix en seront affectés par des doubles frais de commission de
transport, de chargement et de déchargement et dans de pareilles conditions,
peut-on croire que l’Allemagne ou
Toutes les nations commerciales et
industrielles des différentes parties du globe sont parties de ce principe :
plus les navires d’un pays industriel fréquentent les ports des différentes
nations du monde, plus il est assuré d’importer favorablement les produits du
dehors qui lui sont nécessaires, et d’exporter avec avantage les objets qu’il
destine à la consommation extérieure ; pour atteindre ce but, elles ont accordé
de grandes faveurs aux importations par navires nationaux.
Si notre marine n’est pas assez
développée dans ce moment pour suffire aux besoins de toutes nos importations
et que nous ayons à craindre pour ce motif la hauteur des frets, nous n’avons
qu’à ne pas frapper de prime abord les navires étrangers de droits élevés.
Accordons, d’année en année, à la navigation nationale une protection
progressive au moyen de laquelle elle pourra s’agrandir et prendre en peu
d’années les proportions des besoins maritimes et commerciaux du pays.
Je viens de vous dire qu’une marine
nationale ouvrira des voies d’écoulement de nos produits ; en effet, sa
destinée étant intimement liée à celle de nos diverses industries dont elle est
l’auxiliaire indispensable, tous ses efforts tendront constamment à entretenir
et multiplier ce grand commerce d’échanges qui fait la richesse des Etats.
S’il n’en était pas ainsi, pourquoi
aurions-nous, depuis plusieurs années, décrété des primes d’encouragement pour
la construction des navires ? Pourquoi le gouvernement aurait-il, avec
l’assentiment du pays entier, établi une navigation régulière par navires
nationaux à voiles avec les Etats-Unis ? Qu’on ne le dissimule donc pas, c’est
parce que les administrations qui se sont succédé au pouvoir, ont été effrayées
de la ruine progressive de notre commerce extérieur et de notre industrie
d’exportation, malgré l’affluence des navires étrangers ; c’est parce qu’elles
ont vu que le pays ne s’ouvrait pas de nouveaux débouchés qu’elles ont eu
recours à l’établissement d’une navigation nationale, pour arrêter les progrès
effrayants du mal qui rongeait le pays ; elles ont senti qu’il fallait faire
pour
Que les pays qui n’ont pas de ports
de mer empruntent les ports étrangers pour s’approvisionner, cela doit-être
ainsi ; mais il est absurde que
Le système de droits différentiels
que nous réclamons pour
Les adversaires du système que nous
défendons disent que nous n’avons pas besoin de droits différentiels, puisque
notre commerce maritime s’accroît progressivement ; cette progression, sur
laquelle ils s’appuient, existe-elle en réalité ? c’est
ce que nous allons voir : en 1836 nous avons exporté des marchandises pour une
valeur de 60 millions ; en 1837 pour une somme de 56 millions ; en 1838 pour 59
millions ; en 1839 pour 56 millions ; en 1840 pour 49 millions et en 1841 pour
51 millions. Peut-on dire à présent qu’il y a progression du commerce maritime,
quand le chiffre des exportations en 1840 et
La Belgique, qui n’exporte, année
commune, que pour 50 millions de francs de ses produits sur toutes les parties
du globe, voit importer chez elle chaque année pour 60 à 68 millions de
produits transatlantiques seulement, et sur ces 68 millions de produits
transatlantiques importés chez elle, il ne lui en arrive que pour quatre
millions et demi par navires nationaux ; le surplus lui est porté par ses
concurrents en industrie, qui échangent, à notre grand préjudice, leurs
fabricats contre ces denrées coloniales.
Ne suffit-il pas de connaître de
pareils faits pour devoir dire qu’un pareil état de choses doit cesser, que
nous devons échanger nous-mêmes les produits transatlantiques, dont nous avons
besoin, contre des produits belges ? Prendre une pareille décision ne suffit
pas pour atteindre le but proposé, je le sais ; il y a un problème à résoudre
pour parvenir à cette fin ; mais ce problème ayant été résolu par d’autres
nations qui étaient dans la même position que nous, nous n’avons qu’à le
résoudre de la même manière qu’elles, quoique nous n’ayons pas les colonies
qu’elles possèdent.
La France exporte chaque année 60 à 80
millions de tissus de coton dans les colonies libres ouvertes à la navigation
belge, aux mêmes titres et aux mêmes conditions qu’à la navigation française.
Les Etats-Unis exportent tous les ans
dans les pays lointains 20 à 25 millions de tissus communs de coton et ils
auraient encore doublé, depuis 5 à 6 ans, cette somme d’exportation en Asie
dans l’Amérique méridionale, si le dérangement de leurs marchés d’argent, causé
par une circulation abusive de leur papier monnaie n’avait pas augmenté le prix
de revient de 25 à 30 p. c.
L’Angleterre expédie à ses propres
colonies pour à peu près 125 millions de francs de coton, et en fait parvenir
une quantité bien plus forte aux colonies libres. Pourquoi
Il résulte, messieurs, de ce
que je viens de vous exposer, qu’il faut adopter en Belgique le système des
droits différentiels pour développer le commerce maritime belge, pour former
dans notre pays un grand marché qui puisse rivaliser avec les grands centres de
commerce des Etats voisins, et enfin pour débarrasser nos fabriques de leur
trop plein.
Si, à mon avis,
Je dois l’avouer, sous ce rapport, le
projet du gouvernement me convient mieux que les conclusions de l’enquête
commerciale dans lesquelles on oublie que, lorsqu’il s’agit de remplacer un
système ancien par un système nouveau, il y a toujours une transition à ménager
; c’est parce que le projet du gouvernement est transitoire, qu’il pourra être
renforcé, si le besoin se fait sentir, en repoussant représailles par
représailles, que jusqu’ores j’y donne mon assentiment, avec la ferme
conviction que le commerce et la navigation pourront être, à l’avenir, le
partage de
M. Savart-Martel. - Je demande à ne m’expliquer qu’à une prochaine séance. Mon intention
serait d’établir qu’il y a nécessité pour
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, j’ai promis de déposer sur le bureau les documents
statistiques relatifs aux importations et aux exportations par
M. Delfosse. - Je suis étonné que M. le ministre n’ait pas encore pu nous fournir
les renseignements que j’ai demandés, car il y a plus de huit jours que la
demande a été faite. Je ne puis prendre part à la discussion que quand j’aurai
lu ces pièces. Je prie M. le ministre de faire en sorte qu’elles soient
insérées dans le prochain numéro du Moniteur.
M. Verhaegen. -
Messieurs, dans la commission d’enquête se trouvait l’un des ministres,
l’honorable M. Dechamps. Des conclusions ont été formulées par cette commission
: trois systèmes ont été présentés à la suite de ses indagations
: un de ces systèmes a été adopté par trois voix, un autre par deux voix et un
troisième par trois voix. Je ne serais pas fâché, pour ma part, puisque nous
connaissons à peu près l’opinion de M. Nothomb, de savoir quelle est l’opinion
de l’honorable M. Dechamps. Adopte-t-il l’opinion de M. de Foere ou celle
d’autres honorables membres qui faisaient partie de la commission d’enquête, ou
bien adopte-t-il l’opinion de son honorable collègue, M. Nothomb ? Dans une
question aussi importante, il faut que nous sachions si le ministère est
homogène, si le ministre des travaux publics pense comme le ministre de
l’intérieur.
M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Messieurs, le projet du gouvernement est conforme à l’opinion que
j’ai toujours défendue, et j’aurai soin, quand la discussion sera plus avancée,
de faire connaître sur quels motifs cette opinion repose. L’honorable membre
demande à quel système je me suis rallié dans le sein de la commission
d’enquête, parmi ceux qui y ont été présentés. Je lui répondrai que, dès le
début, trois systèmes ont été formulés dans les trois annexes B, C et D, qui
sont comprises dans les documents de l’enquête. Je crois pouvoir dire sans
indiscrétion que l’annexe B a été rédigée par l’honorable M. de Foere, l’annexe
C par moi et l’annexe D par l’honorable M. Smits.
Ces trois documents déterminaient les
trois nuances d’opinion représentées dans la commission d’enquête. J’étais
d’accord avec l’honorable M. de Foere sur le fond des idées, sur les principes
essentiels ; la chambre sait que j’ai eu plusieurs fois l’occasion de les
défendre ; mais quant aux modes d’application, nous étions séparés par quelques
nuances. Sur l’article café, par exemple, auquel l’honorable membre a fait
allusion, j’ai voté pour le chiffre intermédiaire.
L’honorable M. Verhaegen sera
sans doute satisfait de cette explication. Du reste, si j’avais changé
d’opinion, je ne ferais aucune difficulté de le reconnaître ; en pareille
matière, tout en restant fidèle au fond même du système, on pourrait modifier
sa manière de voir sur les moyens d’application. Ainsi, il est clair que l’art.
3 du projet du gouvernement, qui autorise un renforcement de droits, pourrait
déterminer ceux qui auraient admis sans cela des droits plus élevés à se
rallier à une application plus modérée du système.
L’honorable M. David, qui vient de
parler avec plus que de la chaleur contre le système des droits différentiels,
tout en n’étant pas dans la commission d’enquête un partisan effréné de ce
système, a voté cependant pour des chiffres différentiels plus élevés que ceux
proposes par la chambre de commerce d’Anvers.
M. David. - J’ai toujours voté en désespoir de cause pour les chiffres les plus
bas. Cependant, je dois dire que je n’ai pas toujours été un adversaire aussi
acharné des droits différentiels que je suis aujourd’hui.
M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - M. David reconnaît donc que son opinion s’est modifiée ; j’aurais la
même excuse que l’honorable préopinant, si j’avais varié dans la mienne ; mais
je n’ai pas besoin de cette excuse, car j’ai conserve l’opinion que j’ai
toujours défendue pendant toutes les opérations de la commission d’enquête.
M. Delfosse. - J’ai considéré l’interpellation de mon honorable ami, M. Verhaegen,
comme entièrement inutile. Il devait être évident, pour lui, comme pour moi que
M. le ministre des travaux publics adhérait au projet du gouvernement. Car si
M. le ministre des travaux publics n’avait pas adhéré à ce projet, il aurait
dû, pour être conséquent, quitter provisoirement le banc ministériel et
remonter à son banc de député pendant la discussion, pour reprendre sa place au
banc des ministres après le vote de la loi.
- La séance est levée à 4 heures.