(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 2)
(page 585) (Présidence de M. de Gerlache)
Les tribunes sont encombrées de spectateurs : on y remarque un grand nombre de dames. (C., 26 fév.)
La séance est ouverte à une heure. (P. V.)
M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il est adopté. (P. V.)
M. Morel-Danheel et M. Demelin annoncent qu’une indisposition les empêche de se rendre au soin du congrès. (P. V.)
Un des secrétaires donne lecture d'une proposition de M. Lebeau, tendant à ce qu'il soit nommé une députation permanente, chargée de prendre des renseignements sur le choix du chef de l'État, sur les limites et sur les dettes.
- Cette proposition sera imprimée et distribuée ; l'assemblée en ordonne le renvoi à l'examen des sections. (P. V.)
M. Pettens, de Louvain, donne sa démission de membre du congrès ; il la fonde sur le mauvais état de sa santé. (C., 26 fév.)
- Pris pour notification. (P .V.)
M. Mohimont-Bivort, élu en remplacement de M. le baron de Stassart, fait connaître l'impossibilité où il se trouve d'accepter. (C., 26 fév.)
- Pris pour notification. (P. V.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, présente l'analyse des pétitions suivantes :
(page 386) M. Vermeulen-Decock sollicite sa retraite et la pension à laquelle il a droit.
M. Vandelft fait observer que l'uniforme de la garde civique ne peut convenir à la cavalerie de ce corps, et demande qu'on en décrète un autre.
M. Lemaire demande que les cours spéciales soient supprimées et que les affaires qui leur étaient attribuées soient jugées par la cour d'assises.
Des habitants de Bastogne demandent l'exemption du droit de barrières pour leurs chariots chargés de chaux à employer comme engrais.
M. de Bouwens, ex-commandant des volontaires de Roubaix, donne des explications sur sa conduite.
M. Van den Elsacher demande le payement de sa pension. (U. B., 26 fév., P. V.)
- Toutes ces pièces sont renvoyées à la commission des pétitions. (P. V.)
M. Weissenbruch fait hommage au congrès d'une édition de la constitution. (P. V.)
- Dépôt à la bibliothèque. (P. V.)
La cour des comptes soumet à l'approbation du congrès un projet pour son règlement d'ordre.
- Ce projet sera imprimé et distribué (P. V.)
M. le comte de Quarré, rapporteur de la commission chargée de la vérification des pouvoirs des députés et suppléants élus par la province de Namur, propose l'admission de M. Isidore Fallon, en remplacement de M. Mohimont-Bivort, qui n'a point accepté. (P. V.)
- Ces conclusions sont adoptées. (P. V)
M. Isidore Fallon est immédiatement introduit. (C., 26 fév.)
M. le président – Voici une proposition qui a été déposée sur le bureau :
« J'ai l'honneur de proposer que le congrès, avant de nommer le régent, ou de recevoir son serment, adopte le projet de décret suivant :
« AU NOM DU PEUPLE BELGE,
« Le congrès national
« Décrète :
« Article unique. Les décrets du 18 et du 24 novembre 1830, sur l'indépendance nationale et l'exclusion des membres de la famille de Nassau de tout pouvoir en Belgique font partie de la constitution du peuple belge.
« PAUL DEVAUX. » (U. B., 26 fév. et A. C.)
M. Devaux – Tout le monde sent et apprécie les motifs de ma proposition ; aussi n'entrerai-je dans aucun développement ; je dirai seulement que ma proposition est si simple, que nous pourrions la voter séance tenante et sans la renvoyer aux sections. (U. B., 26 fév.)
M. Van Snick – Il avait été décidé qu'un manifeste serait publié et mis en tête de la constitution ; il serait temps que la commission s'en occupât ; et qu'on l'imprimât avec les deux décrets en tête de la constitution. (U. B., 26 fév.)
M. le baron Beyts – Messieurs, je ferai remarquer qu'on n'a jamais décrété que les articles relatifs à l'indépendance nationale et à l'exclusion des Nassau feraient partie de la constitution : il a été seulement décidé qu'ils seraient imprimés en tête. Ce qu'on demande aujourd'hui est un décret tout nouveau, qu'il faut examiner et dont je demande le renvoi aux sections ; car autre chose est de décider que tels articles seront imprimés en tête de la constitution, et autre chose, qu'ils seront déclarés articles constitutionnels. (U. B., 26 fév.)
M. Devaux – Messieurs, les raisons que vient de donner l'honorable M. Beyts m'obligent à insister davantage sur ma proposition. Puisqu'on trouve une différence entre imprimer les décrets en tête de la constitution et déclarer qu'ils feront partie de la constitution, je sens de plus en plus la nécessité d'adopter ma proposition. Vous allez nommer un régent ; il devra prêter serment à la constitution : il est essentiel qu'avant ce serment les décrets, sur lesquels reposent l'indépendance et la liberté du pays en fassent partie. (Appuyé ! appuyé !) (U. B., 26 fév.)
M. le baron Beyts – Je ne conteste pas qu'il ne faille adopter la proposition de M. Devaux, mais je demande que nous ayons le temps de l'examiner ; j'en ai besoin, pour ma part, et je persiste à en demander le renvoi aux sections. (U. B., 26 fév.)
M. Alexandre Gendebien – Je demande (page 587) avant tout la lecture des deux décrets. (U. B., 26 fév.)
M. le comte d’Arschot – L'ordre du jour indique pour aujourd'hui la nomination du régent ; c'est vouloir la retarder que d'exiger que l'on s'occupe préalablement d'autres propositions. Je demande qu'il soit procédé à l'élection : rien n'empêche que la proposition de M. Devaux soit examinée demain. (U. B., 26 fév.)
- Voix nombreuses – Appuyé ! appuyé ! (U. B., 26 fév.)
M. Lebeau – Messieurs, je demande acte du consentement qui paraît résulter de l'assentiment général de l'assemblée, à ce qu'on discute la proposition de M. Devaux après l'élection ; je demande, en outre, que le congrès s'engage à ce que telle discussion ait lieu avant le serment du régent. (U. B., 26 fév.)
- De toutes parts – Oui ! oui ! (U. B., 26 fév.)
M. le président – L'assemblée désire-t-elle qu'on vote sur cette proposition, avant la prestation du serment ? (C., 26 fév.)
- Toute l’assemblée – Oui ! oui ! (C., 26 fév.)
- La proposition de M. Devaux est renvoyée aux sections. (P. V.)
M. le président – Messieurs, l'ordre du jour est la nomination du régent ; désire-t-on passer immédiatement à l'élection ? (Oui ! oui !)
Je vais donner lecture du décret du 28 janvier :
« AU NOM DU PEUPLE BELGE,
« Le congrès national
« Décrète :
» Art. 1er. Par dérogation à l'article 17 du règlement, les votes seront émis par bulletins signés, dont le dépouillement sera fait publiquement et à haute voix par une commission de huit membres désignés par la voie du sort.
« Art. 2. Les membres de cette commission se diviseront en deux scrutateurs, trois contrôleurs et trois secrétaires.
« Ils ne procéderont au dépouillement des bulletins qu'après avoir constaté que le nombre de ces derniers est égal à celui des votants.
« Les scrutateurs proclameront l'élu et le signataire de chaque bulletin.
« Art. 3. Le scrutin s'établira entre tous les candidats indistinctement qu'il plaira à chaque membre de porter.
« Art. 4. Les bulletins seront remis au président par chaque membre au fur et à mesure de l'appel nominal, qui aura lieu d'après la liste de présence.
« Le président déposera immédiatement chaque bulletin dans l'urne.
« Art. 5. Si, au premier tour de scrutin, aucun candidat n'obtient la majorité de 101 voix, on procédera à un second tour de scrutin, et alors l'élection sera faite à la majorité absolue des votants.
« Art. 6. Si, après trois tours de scrutin, aucun candidat n'a obtenu la majorité requise, il sera procédé à un scrutin particulier entre les deux candidats qui auront réuni le plus de voix à la dernière épreuve.
« Tout suffrage donné à d'autres candidats sera nul.
« Art. 7. Seront également annulés les bulletins non signés ou dont les signatures ne pourront être immédiatement vérifiées et constatées.
« Art. 8. Le président proclamera le résultat des scrutins. » (U. B., 26 fév. et Bull. off. n° 34)
M. le président tire au sort les huit membres qui doivent composer la commission chargée de faire le dépouillement du scrutin.
Le sort désigné MM. Louis Coppens, le chevalier de Theux de Meylandt, le comté de Bergeyck, Baugniet, le baron de Sécus (père), Claes (de Louvain), Van Snick, et d'Martigny, (P. V.)
M. de Tiecken de Terhove – Je prierai M. Vilain XIIII de signer pour moi car je suis dans l'impossibilité de le faire. (l’honorable membre porte le bras en écharpe.) (U. B., 26 fév.)
- Les membres de la commission prennent place autour d'une table placée dans l'hémicycle, en face de la tribune.
Ils se partagent les fonctions de scrutateurs, de contrôleurs et de secrétaires. (U. B., et C., 26 fév.)
M. Nothomb, secrétaire, fait l'appel nominal. (C., 26 fév.)
- Les membres viennent successivement remettre leur bulletin à M. le président, qui le dépose dans l'urne. (C., 26 fév.)
L'appel nominal est terminé. (U. B., 26 fév.)
M. le président – MM. de Man et Maclagan viennent se présenter pour voter ; le scrutin doit-il être considéré comme fermé ? (Non ! non !) (J. B., 26 fév.)
MM. de Man et Maclagan ayant remis leur billet, (page 588) on verse les bulletins sur le bureau ; M. Louis Coppens les compte : leur nombre se trouve égal à celui des votants, 157. MM. Louis Coppens et Van Snick en font le dépouillement ; conformément au décret du 28 janvier, ils lisent successivement à haute voix le nom du candidat, et celui du signataire du bulletin. (U. B., 26 fév.)
Le dépouillement des bulletins donne le résultat suivant :
Ont voté pour M. LE BARON SURLET DE CHOKIER : MM. de Man, Maclagan, Destriveaux, Huysman d'Annecroix, Simons, de Gerlache, de Roo, Zoude (de Saint-Hubert), Meeûs, David, Henry, Roeser, le vicomte Desmanet de Biesme, Marlet, de Labeville, Claes (de Louvain), le comte de Quarré, de Ville, Alexandre Gendebien, de Tiecken de Terhove, d'Hanis Van Cannart, le baron de Leuze, le baron Frédéric de Sécus, Speelman-Rooman, Dams, Mulle, Coppieters, Delwarde, Gustave de Jonghe, Watlet, Domis, de Decker, le baron de Stockhem, Gelders, le comte d'Arschot, Fransman, Barthélemy, Trentesaux, le baron Van Volden de Lombeke, Davignon, Claus, le baron de Coppin, Vandenhove, le vicomte de Jonghe d'Ardoie, Frison, Rouppe, Seron, de Schiervel, Lardinois, Henri Cogels, Jean-Baptiste Gendebien, l'abbé Boucqueau de Villeraie, le baron de Terbecq, Teuwens, le baron de Woelmont, Jean Goethals, Thienpont, le baron de Sécus (père), Blargnies, Nothomb, le baron Joseph d'Hooghvorst, le comte d'Ansembourg, le marquis Rodriguez d'Evora Vega, Henri de Brouckere, le baron de Pélichy van Huerne, Leclercq, Van de Weyer, Serruys, le baron de Liedel de Weil, Surmont de Volsberghe, Charles Le Hon, Hippolyte Vilain XIIII, le comte Duval de Beaulieu, Olislagers de Sipernau, Berger, Isidore Fallon, Pirson, d'Hanens-Peers, le marquis de Rodes, Werbrouck-Pieters, Fleussu, le baron Osy, Jottrand, Peemans, Dumont, Lecocq, Van Snick, Barbanson, Gendebien (père), Blomme, le vicomte Charles Vilain XIIII, Goethals-Bisschoff, Cols, le marquis d'Yve de Bavay, Pirmez, de Lehaye, Nalinne, Zoude (de Namur), de Selys Longchamps, Liedts, Baugniet, Defacqz, François, Hennequin, Bredart, Charles de Brouckere, Allard, Destouvelles.
Ont voté pour M. LE COMTE FÉLIX DE MÉRODE : MM. Masbourg, Lefebvre, l'abbé Verbeke, de Sebille, l'abbé Dehaerne, Joos, l'abbé Van Crombrugghe, l'abbé Van de Kerckhove, Peeters, Vander Belen, le baron Beyts, Louis Coppens, l'abbé Pollin, Devaux, Annez de Zillebeecke, Constantin Rodenbach, Deleeuw, Verwilghen, Le Bègue, de Coninck, Ooms, Lebeau, de Rouillé, Vergauwen-Goethals, de Nef, le baron de Meer de Moorsel, l'abbé Corten, Beaucarne, Helias d'Huddeghem, Le Bon, Claes (d'Anvers), l'abbé Verduyn, Charles Rogier, le chevalier de Theux de Meylandt, Du Bus, Bosmans, l'abbé Andries, l'abbé Wallaert, Eugène de Smet, l'abbé de Foere, Alexandre Rodenbach, Van Innis, Van Meenen.
Ont voté pour M. DE GERLACHE : MM. Du Bois, le baron de Viron, Albert Cogels, le comte de Bergeyck, Le Grelle. (P. V.)
Un bulletin portant le nom de M. Surlet de Chokier a été annulé, parce qu'il n'était pas signé.
Un des membres de la commission remet à M. le président le résultat du dépouillement des votes. (U. B., 26 fév.)
M. le président – J'invite l'assemblée et le public à observer le plus profond silence, jusqu'à ce que j'aie proclamé le résultat du scrutin.
Messieurs, 159 membres ont répondu à l'appel : M. Surlet de Chokier a obtenu 108 suffrages ; M. Félix de Mérode 45, M. de Gerlache 5 ; un bulletin a été annulé.
M. le baron Surlet de Chokier ayant obtenu la majorité voulue par le décret du 28 janvier,
Au nom du peuple belge,
Le congrès national,
Décrète :
M. Érasme-Louis, baron Surlet de Chokier est nommé régent de la Belgique.
Il n'entrera en fonctions qu'après avoir prêté le serment suivant, prescrit par l'art. 80 de la constitution :
« Je jure d'observer la constitution et les lois du peuple belge, de maintenir l'indépendance nationale et l'intégrité du territoire. »
(A peine M. le président a-t-il achevé de prononcer ces derniers mots, que des bravos et des applaudissements éclatent de toutes parts dans l'assemblée et dans les tribunes. Les applaudissements recommencent à quatre reprises.) (U. B., 26 fév. et P. V.)
M. le président – Voici une proposition qui vient d'être déposée sur le bureau :
« Aussitôt que le régent aura été élu, une députation (page 589) de dix membres désignés par le sort, ayant le président du congrès à leur tête, sera chargée de faire connaître immédiatement au régent la décision du congrès. Le congrès restera réuni jusqu’au retour de la commission.
« Dans la séance du 25 février à midi, le régent sera installé au sein du congrès national, conformément à l'article 80 de la constitution.
« CH. ROGIER. » (U. B., 26 fév. et P. V.)
- Voix nombreuses – Appuyé ! appuyé ! (U. B., 26 fév.)
- La proposition est mise aux voix et adoptée. (P. V.)
M. Alexandre Rodenbach – Il faut d'abord voter sur la proposition de M. Devaux ; on doit la discuter avant le serment du régent, c'est convenu. (U. B., 26 fév.)
- Plusieurs voix – On peut voter séance tenante. (U. B., 26 fév.)
M. Devaux – On pourrait l'examiner en sections pendant que la députation va annoncer au régent sa nomination. (Appuyé ! appuyé !) (U. B.,26 fév.)
M. le président tire au sort la députation de dix membres.
Le sort désigne MM. David, Claes (d'Anvers), Alexandre Rodenbach, Lefebvre, le comte de Bergeyck, Domis, Davignon , Isidore Fallon, Peeters, le baron de Terbecq. (U. B., 26 fév. et P. V.)
- La commission part, ayant à sa tête le premier vice-président du congrès (M. de Gerlache). (U. B., 26 fév.)
La séance est suspendue ; il est trois heures.
En attendant le retour de la députation, les autres membres de l'assemblée se retirent dans leurs sections respectives pour examiner le projet de M. Devaux présenté au commencement de la séance. (C., 26 fév.)
La séance est reprise à quatre heures. (P. V.)
M. de Gerlache, président, d'une voix fortement émue – Messieurs, votre commission vient de remplir la mission que vous lui avez confiée.
Accueillis par votre digne président, avec cette effusion de bonté que vous lui connaissez et qui fait le charme de son caractère, avec une émotion qui a bientôt gagné tous les membres de votre commission, à peine avons-nous pu échanger quelques paroles.
J'ai dit à M. Surlet de Chokier que son nom, sorti de l'urne, avait été accueilli par les acclamations générales de l'assemblée ; que sa nomination était un témoignage éclatant de gratitude nationale, accordée à une vie sans reproche, à des services signalés rendus à la cause publique dans des circonstances difficiles.
Deux sentiments m'ont paru affecter vivement notre digne président : d'abord la haute marque de confiance qui lui était donnée par cette auguste assemblée, qui n'est que l'organe avoué de la nation, et ensuite l'engagement pris avec lui-même de faire à sa patrie un dernier sacrifice dans des circonstances dont il ne se dissimule pas d'ailleurs la gravité. « Après une longue carrière, nous a-t-il dit, toute de dévouement, quel meilleur emploi puis-je faire des jours qui me restent à vivre que de les offrir à mon pays ? Mais n'oubliez pas que j'ai besoin de votre confiance, de votre amitié de votre coopération !
« Allez dire à nos honorables collègues que j'accepte la qualité de régent qu'il leur a plu de me conférer, et que je me rendrai demain aux désirs de l'assemblée. » (U. B., 26 fév..)
(M. de Gerlache fut souvent interrompu par des mouvements de satisfaction ; il éprouvait lui-même une oppression qui était ressentie de tous. Un silence profond et instantané suivit ses dernières paroles. Mais tout à coup succédèrent des applaudissements unanimes dans l'enceinte et aux tribunes : les bravos, les : Vive le régent ! vive M. Surlet de Chokier ! se répétèrent pendant plus de dix minutes. C'était un véritable enthousiasme, tous les cœurs sympathisaient.) (U. B., 26 fév.)
La séance, un moment interrompue, est reprise. (U. B., 26 fév.)
M. le président – La parole est à M. Van Meenen. (E., 26 fév.)
M. Van Meenen – Messieurs, chargé par votre section centrale de vous faire le rapport sur la proposition de l'honorable M. Devaux, l'émotion que j'éprouve après ce qui vient de se passer ne me permettra pas d'entrer dans de grands développements, Je me bornerai à vous faire connaître sommairement l'avis de chaque section et les conclusions de la section centrale.
(page 590) - M. le rapporteur suit la marche qu'il s'est tracée dans son exorde, et termine ainsi – En conséquence, la section centrale a l'honneur de vous proposer le décret dont je vais vous donner lecture :
« Article unique. Le congrès national, comme pouvoir constituant, déclare constitutionnels les décrets des 18 et 24 novembre 1830, le premier consacrant l'indépendance de la Belgique, et le second l'exclusion perpétuelle de la famille des Nassau. » (U. B., 26 fé_.)
M. le baron Beyts – Je demande la parole. (U. B., 26 fév.)
M. le président – Il faut d'abord que je consulte l'assemblée pour savoir quand elle entend discuter les conclusions de la section centrale. (U. B., 26 fév.)
- Plusieurs voix – Tout de suite ! tout de suite ! (U. B., 26 fév.)
- D’autres voix – A demain ! à demain ! (Oui !oui ! Non ! non ! Bruit.) (U. B., 26 fév.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII – Je ferai remarquer que, puisqu'il est décidé que le régent prêtera serment, il faut absolument voter ce soir ; car nous ne pouvons pas recevoir le régent sans faire quelques préparatifs. Les architectes seront obligés de travailler ici demain matin pour préparer le trône ; la salle ne sera donc pas libre. (U. B., 26 fév.)
- Plusieurs voix – Votons séance tenante. (U. B., 26 fév.)
- La discussion est ouverte sur les conclusions de la section centrale. (J. B., 26 fé_.)
M. le baron Beyts – Messieurs, j'acquiescerai aux conclusions de la section centrale si, au lieu de déclarer constitutionnels les décrets des 18 et 24 novembre, on veut décréter que le congrès les a rendus comme corps constituant. La différence est très grande en effet : si les décrets étaient déclarés constitutionnels, le corps législatif pourrait les rapporter en vertu des articles de la constitution relatifs à sa révision, au lieu qu'en déclarant que nous les avons rendus comme corps constituant, nous les rendons irrévocables ; ils ne feront pas partie de la constitution, mais ils seront comme la base sur laquelle elle repose. Il n'y a donc pas lieu, selon moi, à déclarer ces décrets constitutionnels, mais à déclarer qu'ils ont été rendu par le congrès comme corps constituant. (U. B., 26 fév.)
M. l’abbé de Foere combat les conclusions de la section centrale, et trouve le décret inutile ; car, d'un côté, le régent, en prêtant serment à la constitution, jurera (article 80) de maintenir l'indépendance nationale et l'intégrité du territoire, et, pour ce qui est de l'exclusion des Nassau, cette exclusion sera bien confirmée, puisque, avant de se proroger, le congrès se réserve le droit de nommer un roi. (Aux voix ! aux voix !) (U. B., 26 fév.)
M. Van Snick – On a observé dans les sections qu'il était inutile que le décret d'exclusion de Nassau fît partie de la constitution, parce qu'aucune législature ne viendra nous remplacer avant l'élection du chef de l'État. Cependant on a considéré que le grand nombre de suppléants qui entrent au congrès, vu sa durée, pourraient entièrement en changer la composition ; par conséquent, on a jugé qu'il était prudent de mettre les conclusions de la section centrale au nombre des dispositions de la constitution. (U. B., 26 fév.)
M. Devaux – Je n'avais pas pensé que ma proposition trouverait tant d'opposition. Certes, il n'est entré dans l'esprit de personne, lorsque les décrets des 18 et 24 novembre ont été rendus, qu'ils pussent être révoqués par la législature. Nous avons voulu les placer plus haut que les lois ordinaires ; tout le monde en conviendra : or, je propose seulement de déclarer ce fait. (U. B., 26 fév.)
M. le comte Duval de Beaulieu éprouve toujours du regret quand il voit lancer des propositions inattendues, et qu'on les renvoie immédiatement aux sections pour être discutées sans désemparer ; il craint les effets de la précipitation, et ne voit aucune raison pour s'occuper à l'instant de la proposition de M. Devaux. Le congrès sera toujours à temps de la discuter : car tant qu'il restera assemblé, il conservera son omnipotence et pourra faire plus tard ce qu'il ferait aujourd'hui. (U. B., 26 fév.)
M. le président – M. Beyts a rédigé son amendement ; le voici :
« Je demande la question préalable sur les (page 591) conclusions de la section centrale, et subsidiairement je propose que le décret soit rédigé comme suit :
« Le congrès national déclare que c'est comme corps constituant qu'il a porté ses décrets des 18 et 24 novembre 1830, relatifs à l'indépendance du peuple belge et à l'exclusion à perpétuité des membres de la famille d'Orange-Nassau de tout pouvoir en Belgique. » (U. B., 26 fév. et P. V.)
M. Devaux – Je déclare que si M. Beyts veut faire de sa proposition un décret, et autre chose qu'une insertion au procès-verbal, je l'appuierai. (U. B., 26 fév.)
M. Lebeau – J'appuie la proposition de M. Beyts, et je ferai remarquer que, si M. Devaux n'a lancé, comme on l'a dit, sa proposition qu'aujourd’hui, c'est que, absent du congrès par des raisons que vous connaissez tous, il n'avait pas encore vu la constitution, et il a été fort étonné en arrivant de n'y pas trouver en tête les deux décrets dont il s'agit. Je suis d'autant plus d'avis de la proposition de M. Beyts qu'il y a une lacune, si je puis dire ainsi, dans notre manière de procéder : cette lacune, nous l'aurions évitée si, comme l'assemblée nationale le faisait, nous avions à chaque décret déclaré qu'il était constitutionnel ou simplement législatif. Je demande donc que l'amendement de M. Beyts soit mis aux voix, et s'il y a la moindre incertitude, je demanderai l'appel nominal. (U. B., 26 fév.)
M. Henri de Brouckere – J'appuierai volontiers l'amendement de M. Beyts, mais je dois répondre au préopinant qui nous a dit qu'un de ses collègues a été étonné de ne pas trouver en tête de la constitution les décrets des 18 et 24 novembre. J'aurai l'honneur de rappeler ce qui s'est passé à cet égard. Quand nous commençâmes à travailler à la constitution, la section centrale proposa de mettre en tête les deux décrets : les autres sections goûtèrent assez cette proposition, mais jamais le congrès n'a pris de décision sur ce point. (U. B., 26 fév.).
M. Lebeau – C'est un oubli. (U. B., 26 fév.)
M. Henri de Brouckere – Il n'y avait donc pas lieu de s'étonner de n'avoir pas vu, en tête de la constitution, des décrets que nous n'avions pas le droit d'y mettre, puisqu'il n'y avait pas de décision du congrès pour cela. (Aux voix ! aux voix ! La clôture !) (U. B., 26 fév.)
- La clôture est prononcée. (U. B., 26 fév.)
M. le président – La proposition de M. Beyts se divise en deux parties. Il demande d'abord la question préalable : je vais la mettre aux voix. (U. B., 26 fév.)
- La question préalable est mise aux voix et rejetée (P. V.)
M. le président lit la seconde partie de l'amendement de M. Beyts. (U. B., 26 fév.)
M. Lebeau – Il faut voter par appel nominal. (U. B., 26 fév.)
M. le comte Duval de Beaulieu fait une réclamation qui occasionne un assez long tumulte. (E., 26 fév.)
On procède à l'appel nominal.
131 membres répondent à l'appel.
92 votent pour le décret de M. le baron Beyts.
39 votent contre.
En conséquence le décret est adopté. (P. V.)
Ont voté pour : MM. François, Van Innis, Alexandre Rodenbach, Allard, Defacqz, Liedts, Zoude (de Namur), Nalinne, Baugniet, Jean-Baptiste Gendebien, le vicomte Charles Vilain XIIII, de Schiervel, de Lehaye, Bosmans, Ooms, Gendebien (père), Eugène de Smet, l'abbé Andries, l'abbé Wallaert, Goethals-Bisschoff, de Decker, Claus, de Roo, le baron de Leuze, Pirmez, l'abbé Dehaerne, de Sebille, Vergauwen-Goethals, le chevalier de Theux de Meylandt, Van der Belen, le marquis Rodriguez d'Evora y Vega, Lebeau, Hippolyte Vilain XIIII, Lefebvre, l'abbé Verbeke, Frison, Fleussu, Blargnies, le baron de Meer de Moorsel, l'abbé Van de Kerckhove, Dumont, Thienpont, Davignon, Marlet, Jean Goethals, Watlet, Beaucarne, l'abbé Verduyn, Fransman, Gustave de Jonghe, Speelman-Rooman, Destriveaux, Berger, Delwarde, Jottrand, Roeser, Devaux, Gelders, Masbourg, Peemans, Trentesaux, Du Bus, Mulle, Pirson, Seron, le baron Beyts, Le Bon, Helias d'Huddeghem, Van Meenen, Deleeuw, le marquis de Rodes, David, Leclercq, Van Snick, Barbanson, de Labeville, l'abbé Corten, de Nef, le baron de Coppin, Louis Coppens, Henry, le comte d'Arschot, Coppieters, Isidore Fallon, Peeters, Charles Le Hon, Alexandre Gendebien, Verwilghen, Nothomb, l'abbé Boucqueau de Villeraie, Henri de Brouckere, Van de Weyer.
Quand on a appelé M. Alexandre Rodenbach, il a répondu – Oui, de tout mon cœur et de toute mon âme. (Hilarité.) (U. B., 26 fév.) ,
Ont voté contre : MM. Destouvelles, le marquis d'Yve de Bavay, le baron de Viron, Le Grelle, le baron de Liedel de WeIl, Blomme, le comte Duval de Beaulieu, Claes (de Louvain), d'Hanis Van Cannart, Joos, Annez de Zillebeecke, Domis, le baron de Terbecq, de Rouillé, le baron Joseph d'Hooghvorst, le baron de Sécus (père), Serruys, le baron de Pélichy van Huerne, Werbrouck-Pieters, (page 592) le baron Osy, d'Hanens-Peers, Huysman d'Annecroix, le comte de Bergeyck, Du Bois, Simons, de Gerlache, Henri Cogels, le comte d'Ansembourg, le vicomte de Jonghe d'Ardoie, Claes (d'Anvers), Olislagers de Sipernau, Surmont de Volsberghe, Albert Cogels, Maclagan, d'Martigny, le baron Van Volden de Lombeke, le baron Frédéric de Sécus, de Coninck, Hennequin. (C., 26 fév.)
MM. l'abbé de Foere et Lardinois, présents à l'appel, se sont abstenus de voter (C., 26 fév.)
Avaient signé la liste de présence, mais étaient absents lors de l'appel nominal : MM. l'abbé Pollin, le comte de Quarré, le baron de Stockhem, le vicomte Desmanet de Biesme, Le Bègue, Meeûs, Rouppe, le baron d'Huart, Dams, de Ville, Constantin Rodenbach, de Selys Longchamps, Lecocq, Cols, Barthélemy, l'abbé Van Crombrugghe, Zoude (de Saint-Hubert), Teuwens, Charles Rogier, Vandenhove, de Tiecken de Terhove, Charles de Brouckere, le baron de Woelmont, de Man. (C., 26 fév.)
- Il est cinq heures, la séance est levée. Demain, à midi, séance solennelle pour l'installation du régent. (U. B., 26 fév. et P. V.)