(Annales parlementaires de Belgique, session 1846-1847)
(Présidence de M. Liedts.)
(page 603) M. Huveners procède à l’appel nominal à 1 heure et un quart.
- La séance est ouverte.
M. de Man d’Attenrode donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier, dont la rédaction est approuvée.
M. A. Dubus présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.
M. Huveners fait connaître l'analyse des pièces suivantes adressées à la chambre.
« Le bureau de bienfaisance et le conseil communal d'Osey demandent la remise des droits d'enregistrement et d'hypothèque sur la vente de parcelles de terrain dont l'aliénation est autorisée en faveur des indigents de la commune. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le général-major pensionné Dollin du Fresnel demande le remboursement des retenues qui ont été opérées sur ses appointements depuis janvier 1840 jusqu'à la fin de mai 1841. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Lannoy, commissaire de police à Lessines, demande une loi qui fixe le minimum du traitement des commissaires de police. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Plusieurs fabricants, négociants et propriétaires à Courtray demandent que la société d'exportation ne puisse opérer sur des marchés d'Europe ni se livrer à la fabrication.
« Même demande de plusieurs propriétaires, fabricants et négociants de Wacken, Ingelmunster, Reckem, Hulste et Bavichove.
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi sur la formation d'une société d'exportation.
« Le sieur Narcisse Soudry, présentant des observations sur le rapport concernant sa demande de naturalisation ordinaire, prie la chambre de lui accorder cette faveur. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
« Le sieur Henri-Antoine Hanisch, chef de musique au corps des pompiers à Bruxelles, né à Mugeln (Saxe), prie la chambre de lui accorder la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi au ministre de la justice.
« Le sieur Chevalier, marchand-tapissier, à Mons, réclame l'intervention de la chambre pour obtenir, en faveur de son fils Théodore, la pension annuelle promise par la loi du 29 nivôse an XIII au père de famille qui a sept enfants vivants. »
M. Castiau. - Comme cette pétition touche à une question qui n'est pas tout à fait d'intérêt privé, mais qui est en outre d'intérêt public, je demanderai la faveur d'un prompt rapport sur cette pétition.
- La pétition est renvoyée à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport.
M. de Man d’Attenrode, au nom de la commission des finances, dépose les rapports sur les projets de loi de règlement de comptes des exercices 1836, 1837, 1838, 1839 et 1840.
M. Mast de Vries, au nom de la même commission, dépose le rapport sur un projet de loi de crédit de 530,490 fr. 70 c, concernant le département de la guerre.
- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ces rapports.
M. Donny. - Je demande que le projet de loi de crédit sur lequel il vient d'être fait rapport soit mis à l'ordre du jour et discuté dans un bref délai. Il s'agit de créances fort anciennes, qu'il est plus que temps de payer. Il est d'ailleurs de l'intérêt du trésor que la discussion du projet ne soit pas différée ; car il y a eu des transactions sur la plupart des créances, et ces transactions ont fixé un délai pour la ratification des chambres, délai qui est écoulé. L'Etat est donc exposé à perdre le bénéfice des transactions, et ce bénéfice est considérable.
- La chambre, sur la proposition de M. le président, met à l'ordre du jour, après le budget de la guerre, le projet de loi de crédit concernant le département de la guerre.
Sur la proposition de M. le président, la chambre renvoie à 1’examen des sections de janvier le projet de loi relatif à la réforme du système (page 604) pénitentiaire et le projet de Code disciplinaire de la marine de l'Etat et du commerce, précédemment renvoyés, le premier aux sections de novembre 1844, et le deuxième aux sections de décembre 1846.
M. le président. - La discussion continue sur le paragraphe pénultième de l'article 3, dont M. de Man d'Attenrode propose la suppression, et sur l'amendement de M. de Garcia tendant à ajouter au dernier paragraphe les mots : « ou de médecin principal. »
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Messieurs, je demanderai à communiquer à l'assemblée quelques nouvelles observations quant au grade de médecin en chef, que l'on vous propose de supprimer dans le nouveau projet de loi.
J'ai cherché hier à expliquer à la chambre la nécessité de maintenir cet échelon de la hiérarchie dans le service sanitaire, et je crois qu'il y a nécessité à ce qu'il soit conservé.
« L'arrêté royal du 8 mars 1836 décide, article 4, qu'en cas de vacance, il ne sera plus pourvu au grade de médecin en chef, mais la loi organique du 16 juin 1845 consacre formellement l'existence de ce grade dans le libellé : « Médecin en chef et médecins principaux, quatre. »
« Les chambres se sont donc prononcées à cet égard, et sans vouloir rechercher aujourd'hui les motifs qui ont guidé la législature, en admettant cet intermédiaire entre le grade de médecin principal et celui d'inspecteur général, je crois devoir expliquer, à l'égard du médecin en chef, toute la pensée du gouvernement.
« Nous reconnaissons bien volontiers qu'en temps de paix, le médecin en chef ne peut être chargé de fonctions spéciales inhérentes à son grade ; de même que les médecins principaux, cet officier supérieur doit être placé à la tête de l'un des grands établissements sanitaires de l'armée ; mais il n'en est pas ainsi en temps de guerre ou en campagne.
« Le service important de l'inspection générale embrasse trop de détails, la responsabilité matérielle et morale qui pèse sur le haut fonctionnaire placé à la tête du service de santé est trop grande pour que l'on puisse jamais songer à l'en distraire afin d'utiliser ses moyens à l'armée.
« En temps de guerre ou lorsque l'armée est sur le pied d'observation, le service des ambulances acquiert à son tour une importance telle que la présence au grand quartier général de la seconde autorité du corps devient indispensable, et cependant cette seconde autorité n'existerait pas si la loi n'en avait pas prévu la création ou l'existence.
« La législature, nous ne l'ignorons pas, n'a entendu déterminer, en 1845, que les cadres du pied de paix ; les explications les plus catégoriques de mon prédécesseur sont là pour l'attester ; mais si d'une part nous ne songeons pas à en sortir, même sur le pied de guerre ou d'observation, à moins de nécessité absolue, d'autre part ne pouvons-nous admettre que le gouvernement puisse, dans cette éventualité, créer de nouveaux grades, et dès lors cette même loi a dû prévoir les différents échelons hiérarchiques constituant les divers services de l'armée.
« Il est à remarquer que les chambres ont adopté le même système de progression dans le corps de l'intendance.
« L'échelon supérieur dans ce corps correspond au grade de général-major, sous la dénomination d'intendant général. Sa place se trouve tout naturellement à la tête de la division d'administration au département de la guerre, comme chef de service ; puis nous trouvons un intendant de première classe, remplissant en temps de paix les fonctions de directeur de l'administration dans une division territoriale, fonctions qui se trouvent également dévolues aux intendant de deuxième classe, tandis qu'en temps de guerre, la place de l'intendant de première classe serait au grand quartier général, chargé d'assurer les subsistances de l'armée.
« La consécration du grade de médecin en chef se trouverait donc déjà suffisamment justifiée, si une dernière considération ne venait encore militer en sa faveur.
« Le gouvernement s'est trouvé obligé, on ne saurait trop le dire, à borner les grades supérieurs dans tous les corps à ce qui était justifié par les nécessités du service, sans cependant perdre absolument de vue la nécessité d'une progression naturelle comme récompense de quelques rares élus.
« Dans le service de santé, les grades supérieurs se trouvent limités par la nature des services.
« Le médecin en chef et les médecins principaux se trouvent à la tête de services de la première importance ; les médecins de garnison sont chargés d'hôpitaux d'une importance secondaire, puis vient le service des corps qui ne comportent que des médecins de régiment et de bataillon, et l'on songerait à arrêter la carrière de tous ces hommes d'élite au grade de lieutenant-colonel !
« Lors donc que cet échelon de médecin en chef, ou plutôt du grade de colonel n'existerait pas de fait, cette seule considération suffirait pour en justifier la création.
« Quant à l'assimilation de grades de tous les officiers de santé, elle se justifie :
« 1° Par la nécessité de la discipline militaire ;
« 2° Par le besoin d'être fixé au sujet des prestations de toutes natures en campagne et ailleurs ;
« 3° Par le besoin d'être fixé au sujet du règlement des pensions.
« Il n'en résultera toutefois pas autre chose que ce qui a existé jusqu'à ce jour. »
Messieurs, à la fin de la séance d'hier, une difficulté m'a été présentée. On m'a demandé ce que je ferais si, l'inspecteur général du service de santé venant à manquer, le médecin en chef n'avait pas les deux années de grade, ou si ce médecin en chef, par une circonstance quelconque, n'inspirait pas assez de confiance pour qu'on pût le placer à la tête du service. On m'a dit que dans ce cas je serais bien obligé d'avoir recours à la nomination d'un médecin principal pour remplir le poste d'inspecteur général.
Partant de là, on a demandé la suppression du grade de médecin en chef, et on a proposé que dans le cas où l'inspecteur général viendrait à manquer, le gouvernement pût choisir parmi les médecins principaux le plus digne, afin de l'élever à ce grade.
Je me suis opposé à cette proposition, parce que je pense qu'il ne faut pas admettre dans le service de santé, plus que dans d'autres services de l'armée, que l'on puisse sauter à la fois plus d'un échelon et arriver, par exemple, du grade de lieutenant-colonel à celui de général-major.
Messieurs, la difficulté que l'on prévoit se présente aujourd'hui dans l'intendance, et l'on a pu facilement y remédier.
L'armée a eu le malheur de perdre l'intendant général M. Beunen. L'officier qui marchait immédiatement après lui, n'avait que peu de mois de service dans son grade ; il était donc impossible de l'appeler à l'emploi d'intendant général. Eh bien, on l'a maintenu au poste qu'il occupe, et un intendant de seconde classe a été promu à la première, afin de remplir provisoirement le poste resté vacant. Dans deux ans on pourra choisir entre ces deux fonctionnaires ; ils auront tous deux les années requises par la loi, on aura, si (ce que j'ignore encore), le plus jeune est choisi, respecté l'existence du grade de colonel dans le corps de l'intendance, et l'on ne pourra pas du moins donner à un officier supérieur le déboire de voir son inférieur en grade le dépasser et devenir son chef, sans même avoir été son égal. Nous aurons par ce moyen respecté les exigences de la hiérarchie et conservé dans l'intendance un échelon qui offre aux officiers de mérite un grade de plus à occuper dans les grades supérieurs qui ne sont pas déjà trop nombreux.
Je demande, messieurs, que le même état de choses soit maintenu pour le service de santé, c'est-à-dire que, l'inspecteur général venant à manquer, on puisse parmi les médecins principaux choisir le plus méritant, le nommer médecin en chef et lui faire remplir provisoirement les fonctions d'inspecteur général, mais en ne lui donnant le grade définitif que lorsqu'il aura deux années dans le grade inférieur.
M. de Man d’Attenrode. - Messieurs, il y a deux questions à examiner : une question d'intérêt général et une question de personne ; et ces questions de personnes ont souvent plus d'influence qu'on ne voudrait se l'avouer.
Quant à la question d'intérêt général il me semble qu'elle est complétement vidée par la déclaration qu'a faite M. le ministre de la guerre au commencement de la séance d'hier.
Il vous a dit, messieurs, qu'un médecin en chef n'est employé qu'en temps de guerre, et il est positif, en effet, que ce fonctionnaire n'a absolument rien à faire en temps de paix. M. le ministre n'a rien dit pour démontrer l'utilité de ce grade ; il a dit seulement que si vous supprimiez le grade de médecin en chef, il y aurait interruption dans les divers grades de l’armée.
Je ferai observer d'abord, messieurs, que le service de santé n'est pas une arme ; il n'y a pas d'arme à manier dans ce service... (interruption), si ce n'est la lancette ; ceci prouve, du reste, comme l'honorable M. Brabant l'a parfaitement démontré hier, qu'il est absurde de vouloir assimiler le service de santé à une arme quelconque. Je regrette seulement que l’honorable M. Brabant n'ait pas terminé son excellent discours en proposant la suppression de l'article premier ; M. Brabant n'ayant pas fait cette proposition, l'article premier a passé en quelque sorte sans discussion.
Quant à la question de personne, j'aime à reconnaître que le titulaire actuel est un homme très distingué, qui a rendu de très- rands services, qu'il a peut-être donné quelque célébrité au pays, par une invention qui intéresse au plus haut point l'humanité. Aussi ai-je rédigé un amendement qui, tout en maintenant ce médecin en chef dans son grade, supprime, pour l'avenir, ce grade qui est, je le répète, complétement inutile en temps de paix. Voici, messieurs, cet amendement :
« En cas de vacance, il ne sera plus, en temps de paix, pourvu à la place de médecin en chef. »
Avant de terminer je tiens, messieurs, à rectifier une assertion lancée dans la discussion d'hier. Elle concerne une observation que j'ai faite concernant le fonctionnaire dont je viens de parler. Après avoir dît quel était son traitement, j'ai ajouté qu'il jouissait d'une indemnité de fourrages. Cela a cessé, je ne sais depuis quelle époque ; mais le fait est qu'en ce moment il ne jouit pas d'indemnité de fourrages.
J'espère que la chambre comprendra l'inutilité d'un médecin en chef en temps de paix et que, par conséquent, elle adoptera mon amendement qui tend à faire disparaître, à l'avenir, du budget la dépense que le maintien de ce grade exigerait.
M. de Garcia. - S'il s'agissait, messieurs, de refaire la loi organique qui a été faite en 1843, les considérations présentées par l'honorable M. de Man pourraient avoir quelque intérêt, mais comme cette loi existe, et qu'en résultat la disposition relative à la matière ne présente (page 605) pas de graves inconvénients, je crois qu'elle doit rester debout ; enfin je crois qu'il serait dangereux de renverser incidemment un texte de loi, établi en 1845 par le concours de tous les pouvoirs ; d'un autre côté, les considérations présentées par M. le ministre de la guerre ont, à mes yeux, une certaine valeur. Il n'est pas sans inconvénient de rompre un chaînon dans l'ordre hiérarchique établi pour l'avancement dans l'armée. Il me répugne d'établir, en cette matière, un principe qui conduirait à sauter au-dessus d'un grade.
A ce point de vue, et pesant les inconvénients signalés par les opinions opposées, je crois qu'il vaut mieux se rallier à la mesure proposée par le gouvernement, conforme à la loi organique de l'armée, et maintenir un médecin en chef qui, du reste, en temps de paix, rend des services éminents. C'est ce qu'il me sera facile de démontrer en peu de mots. Le médecin en chef, lorsqu'il y est invité, donne gratuitement des soins à tous les officiers malades ; il ne se borne pas là, et dans les cas de maladies ou d'accidents graves, il s'empresse de donner ses soins et les fruits de sa longue expérience aux sous-officiers comme au dernier des soldats. Le zèle du titulaire actuel dispute avec son talent et sa science, et pour moi je n'aurai nul regret de maintenir ce grade s'il est toujours aussi dignement rempli qu'il l'est aujourd'hui.
M. de Man d’Attenrode. - M. le ministre de la guerre a dit hier le contraire.
M. de Garcia. - Je vous prie de ne pas m'interrompre ; vous pourrez me répondre ; je vous ai écouté avec patience ; je réclame de vous la même indulgence.
Le médecin en chef, titulaire actuel, ne se borne pas à donner, comme je viens de le dire, des soins gratuits à tous les citoyens appartenant à l'armée ; il rend encore au pays d'autres services éminents par les découvertes nouvelles et d'une importance incontestable qu'il a introduites dans le service de santé. Ces découvertes mises au grand jour et à la portée de tout le corps de santé, sont un vrai bienfait pour l'armée. Sous un autre rapport, le médecin en chef rend d'autres services ; il fait partie des jurys chargés des examens dans le corps sanitaire de l'armée ; là encore il se rend éminemment utile. D'ailleurs, je le répète, la loi de 1845 est là ; elle maintient le médecin en chef ; et quant à moi, je le maintiendrai, parce que je n'ai nul motif de renverser une disposition de loi aussi récente.
Messieurs, j'avais présenté un amendement qui avait pour objet d'élargir le cercle dans lequel M. le ministre de la guerre pourrait choisir l'inspecteur général du service de santé. J'avais fait observer hier qu'avec la rédaction présentée par le gouvernement, il ne lui restait aucun choix à faire. Cet ordre de choses, on doit le reconnaître, n'est pas rationnel. Mais mon amendement à un autre inconvénient, c'est que, contrairement à des principes admis dans l'armée, l'on peut être conduit à faire sauter un grade dans l'avancement des officiers de santé. Dans les deux systèmes il y a des inconvénients ; mais il ne peut me convenir d'établir un précédent qui pourrait avoir des conséquences fâcheuses. Dès lors et d'après les considérations émises par l'honorable ministre de la guerre, je pense ne devoir pas insister sur mon amendement ; car M. le ministre a dit qu'il pourra faire occuper par intérim les fonctions de médecin principal, et que quand les médecins intérimaires auront rempli pendant deux ans les fonctions de médecin en chef, alors il aura un libre choix pour les fonctions d'inspecteur général.
Par ces motifs, messieurs, tout en maintenant que la disposition du gouvernement laisse beaucoup à désirer, je déclare ne pouvoir persister dans l'amendement que j'ai soumis à la chambre.
Plusieurs membres. déclarent reprendre l'amendement de M. de Garcia.
- Cet amendement est mis aux voix ; il n'est pas adopté.
L'article 3 est mis aux voix et adopté.
M. le président. - La discussion est ouverte sur les articles 4 et 5 réunis, à la demande de M. le ministre de la guerre, en un seul article ainsi conçu :
« Art. 4. L'avancement aux grades de médecins de bataillon de deuxième et de première classes, et de médecin de régiment, aura lieu, moitié au choix, moitié à l'ancienneté ; à moins d'insuffisance de sujets capables parmi les plus anciens du grade immédiatement inférieur.
« L'aptitude des candidats sera constatée, par les médecins adjoints, par des rapports périodiques des chefs de service et par les inspections générales ; pour les médecins de bataillon, par un examen.
« Ces rapports et ces examens ne porteront que sur des connaissances pratiques. Ils auront, en outre, pour objet, en ce qui concerne les médecins adjoints, l'hygiène militaire et l'administration pharmaceutique. »
M. de Man d’Attenrode. - Jusqu'à présent le gouvernement a exigé des examens pour passer par tous les grades du service de santé de l'armée. Par suite des observations de la section centrale, il a réduit ses prétentions. Maintenant il ne sera plus nécessaire de passer un examen devant une commission pour entrer dans le corps du service de santé de l'armée. Il suffira d'avoir obtenu, devant le jury national, le grade de docteur en médecine et en chirurgie.
Aucun autre examen n'est exigé pour passer, de médecin adjoint, médecin de bataillon. On n'en exige pas non plus pour passer, de médecin de régiment, médecin principal, etc. On n'exige plus d'examen que pour passer, de médecin de bataillon, médecin de régiment.
Je désirerais savoir de M. le ministre de la guerre pourquoi l'on maintient cet examen, alors qu'on a supprimé tous les autres.
Je vous avoue que je ne puis pas bien en comprendre le motif. Du moment où l'on est docteur en médecine, en chirurgie, qu'on peut exercer la pratique civile, traiter des malades, qu'on peut exercer dans un hôpital, on doit être admis à traiter des soldats. L'on a dit quelquefois qu'il fallait soumettre les médecins militaires à des examens, parce que ceux qui sont traités par eux ne peuvent pas faire de choix. Ceux qui traitent des malades dans les hôpitaux ne sont pas soumis à des examens autres que ceux du jury, et les individus qui sont traités dans les hôpitaux n'ont pas plus le droit de faire un choix que les soldats, et on n'a jamais trouvé à y redire.
Je conçois qu'on exige des examens en France dans d'autres pays où l'on ne demande pas à ceux qui entrent dans le service de santé la condition si importante du grade de docteur en médecine. Là le grade de docteur s'acquiert plus tard, quand on est parvenu à des positions plus élevées. Mais du moment où cette condition est reconnue suffisante pour le civil, elle doit l'être également pour traiter le soldat.
Maintenant, comme je viens de le dire, le projet de loi n'exige plus d'examen que pour passer du grade de médecin de bataillon à celui de médecin de régiment.
Pourquoi cette exception ? Je désirerais que M. le ministre nous donnât quelques explications à cet égard. On sera convaincu qu'un médecin de bataillon suppose autant de connaissances qu'un médecin de régiment, si l'on fait attention à leurs attributions, au service qu'on en exige, et je le prouve. La place de Charleroy est importante ; elle a une infirmerie ordinairement composée de 40 malades environ ; c'est un médecin de bataillon qui est à la tête de ce service. Le gouvernement doit exiger de cet officier de santé toutes les connaissances qu'on exige d'un médecin de régiment. Car l'hôpital de Mons, qui est dirigé par un médecin principal, grade supérieur à celui de médecin de régiment, n'a pas un nombre de malades beaucoup plus élevé.
Il résulte de cette comparaison, qu'un médecin de bataillon doit avoir autant de connaissances qu'un médecin de régiment ou qu'un médecin principal. Le médecin de bataillon, pourvu du grade de docteur, est censé aussi instruit que le médecin de régiment. Les grades ne sont que hiérarchiques et ne supposent pas un degré de science plus élevé.
Pourquoi donc supposer moins de connaissances chez un médecin de bataillon que chez un médecin de régiment ? C'est ce que je ne comprends pas très bien. Il est vrai que par suite des amendements déposés par M. le ministre, il ne peut plus être question que d'examens théoriques.
Le projet de loi dit que l'aptitude des candidats sera constatée par un examen qui ne roulera que sur des connaissances pratiques, sur celles acquises par l'expérience. Il me semble que c'est déjà avoir gagné beaucoup. Voici le programme de ces examens que le gouvernement a déposé sur le bureau ; je l'ai parcouru, et je remarque que ce programme ne répond pas exactement au texte de la loi, car j'y trouve des matières qui ne sont pas du tout pratiques, mais bien théoriques ; j'y trouve entre autres choses :
« Les examens auront pour but de constater si les candidats se sont tenus au courant des progrès de l'art. »
C'est un examen théorique ; c'est donner une marge bien large aux examinateurs ; ils pourront, au moyen de cette partie du programme, étendre leurs questions autant qu'ils le voudront. Ce n'est pas là de la pratique, mais bien de la théorie.
Aussi je ne vois pas que cela rentre dans les termes du projet de loi.
On exige encore que l'examen porte sur l'analyse chimique des denrées qui entrent dans la nourriture habituelle du soldat. Mais c'est là une question de chimie, plus spécialement de la compétence des pharmaciens, et que très peu de médecins seraient capables de résoudre. J'espère donc que le gouvernement ne s'écartera pas des termes de la loi, et qu'il n'exigera pas des examens théoriques auxquels des hommes capables seraient très embarrassés de répondre.
Je demanderai, en terminant, à M. le ministre de la guerre pourquoi les médecins de bataillon sont plutôt astreints à subir des examens pour passer au grade supérieur que les titulaires des autres grades, les médecins-adjoints par exemple ?
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - L'honorable M. de Man d'Attenrode demande pourquoi les médecins de bataillon sont assujettis, pour obtenir le grade de médecin de régiment, à subir un examen plutôt que les médecins des autres catégories du corps sanitaire lorsqu'ils avancent en grade. Je pourrais me borner à une réponse fort simple : c'est que du moment qu'un médecin devient médecin de régiment, il assume alors la responsabilité de la santé de trois ou quatre mille hommes. Avant donc que le gouvernement se détermine à confier à un médecin le soin de la santé d'un aussi grand nombre de soldats et la direction d'un personnel nombreux, il semble indispensable de s'assurer de sa capacité.
On dira que le médecin de régiment comme le médecin de bataillon a déjà fait ses preuves, puisqu'il a subi ses examens devant le jury national. Nous savons parfaitement qu'il faut posséder des connaissances réelles pour passer un bon examen devant le jury ; mais c'est un examen purement théorique, l'honorable M. de Man voudra bien le reconnaître.
Du moment que le jeune médecin est admis dans l'armée, il est seulement à même d'acquérir des connaissances pratiques ; et ces connaissances, on est plus tard en droit de les exiger de lui dans les différents grades qu'il est appelé à occuper. Tant qu'il reste dans les emplois subalternes, il est sous la surveillance de ses chefs, par lesquels il peut être heureusement dirigé et conseillé. Mais du moment qu'il est question de lui confier un personnel considérable, le gouvernement juge nécessaire qu'il fasse (page 606) preuve des connaissances pratiques qu'il a pu acquérir au service de l'Etat.
C'est dans les hôpitaux, en présence du malade, devant un conseil composé de plusieurs médecins de différents grades, qu'il est appelé à développer ces connaissances pratiques ; et lorsqu'il a passé convenablement cet examen, on peut sans crainte ni hésitation lui confier la direction du service sanitaire de tout un régiment.
L'honorable M. de Man a parlé de l'infirmerie de Charleroy. Les hôpitaux des petites villes sont confiés à des médecins de bataillon qui ne sont plus, dès lors, placés sous la surveillance directe de leurs supérieurs ; mais ils leur rendent des comptes fréquents sur ce qui concerne leur service, et si une maladie grave se présente, les médecins de régiment peuvent leur adresser une consultation écrite, ou se rendre sur les lieux, si c'est jugé nécessaire.
Mais le médecin de régiment doit non seulement voler de ses propres ailes ; il faut encore qu'il soit capable de guider ses inférieurs. Voilà pourquoi le gouvernement a voulu entourer ce grade de toutes les garanties qu'on peut espérer et attendre d'un examen purement pratique.
L'honorable M. de Man a remarqué, à l'article 2 du programme, qu'on exige des médecins qu'ils se tiennent au courant des progrès de l'art. Cela est tout naturel. Il y a telle maladie, très bien traitée aujourd'hui, dont le traitement était à peu près inconnu, il y a 20 ans.
Eh bien ! si le médecin est resté stationnaire, s'il ne la connaît pas, s'il n'a pas étudié, s'il n'a pas suivi tous les progrès que la science et la pratique ont pu faire, évidemment il lui manque une des qualités que nous avons le droit d'exiger d'un médecin de régiment.
M. Sigart, rapporteur. - Messieurs, l'opinion de la section centrale a été suffisamment expliquée dans le rapport que j'ai eu l'honneur de présenter à la chambre. Je ne crois donc pas devoir présenter de nouvelles considérations. Je désire seulement répondre à une observation de l'honorable M. de Man.
L'honorable M. de Man pense que le programme ne répond pas à l'article de la loi. Il critique la disposition qui dit que l'examen constatera si les médecins de bataillon se sont tenus au courant des progrès de l'art.
Je dois faire remarquer à l'honorable M. de Man une différence qui lui aura sans doute échappé dans les premières dispositions de M. le ministre. Il s'agissait là des progrès de la science. Quand on dit : les progrès de l'art, on entend purement et simplement la science mise en pratique.
Si je le voulais, messieurs, je pourrais épiloguer aussi sur quelques articles du programme. Mais je dois dire qu'il me paraît dans son ensemble répondre aux exigences de l'article en discussion.
M. de Man d’Attenrode. - Messieurs, je désire répliquer encore un mot à M. le ministre de la guerre.
Il nous a dit qu'il fallait exiger des examens des médecins de bataillon qui passaient au grade de médecin de régiment, parce que par cette promotion ils avaient à assumer une plus grande responsabilité, qu'ils devenaient responsables de la santé de 3 à 4,000 hommes.
Je vous avoue que le motif que vient d'alléguer le gouvernement pour imposer des examens aux médecins de bataillon, qui se présentent pour une promotion, m'a paru d'assez peu de valeur. En effet, la responsabilité qu'exige la santé de 300 hommes ou de 3,000 hommes, demande le même degré d'instruction. Le médecin auquel on peut confier là santé de 300 hommes, doit avoir assez de capacité pour qu'on puisse lui confier la santé de 3,000. La mission du médecin de bataillon est de guérir les hommes, tout comme celui du médecin de régiment.
Mais M. le ministre de la guerre a négligé de faire valoir le seul motif plausible qui pourrait expliquer la cause pour laquelle l'on exige un examen des médecins de bataillon qui passent au grade de médecin de régiment.
Les médecins de bataillon ont souvent, en temps de paix, un service plus ou moins militaire. Dans un régiment, il y a un médecin de régiment et deux médecins de bataillon. L'un de ces derniers est chargé du service de la caserne. Il se rend tous les matins au quartier, et là il examine les hommes qui se disent malades, et son service se borne à les déclarer aptes à entrer à l'hôpital, s'il ne les traite pas. Ensuite il accompagne les troupes qui se rendent à l'exercice ou à la parade.
On comprend, messieurs, qu'un pareil service ne donne pas beaucoup d'expérience médicale, ne permet pas d'acquérir beaucoup de connaissances.
Le second médecin de bataillon fait ordinairement un service dans l'hôpital, ou même il a l'importante mission de diriger un hôpital appelé infirmerie, comme cela se passe à Charleroy et dans d'autres localités.
C'est peut-être, messieurs, à cause de cette circonstance que l'on a cru nécessaire de faire passer un examen aux médecins de bataillon.
Il me semble, messieurs, qu'afin d'égaliser les positions, le gouvernement devrait faire en sorte que les médecins de bataillon qui se trouvent chargés du service de la caserne pussent permuter avec ceux qui exercent la médecine dans les hôpitaux.
Car vous le comprenez, un médecin qui passe plusieurs années à faire ce service de caserne et à accompagner la troupe au champ de l'exercice, ne doit pas recueillir beaucoup d'expérience, et lorsqu'il se présentera aux examens que prescrit la loi, ce sera avec des chances très désavantageuses.
Il me paraît, messieurs, qu'il est de toute justice que le gouvernement, autant que le service le permet, rende les chances égales pour tous, et je l'engage à y veiller de la manière la plus attentive.
M. Sigart, rapporteur. - Il est entendu, je suppose, par M. le ministre de la guerre que les médecins qui auront passé un examen d'une espèce ne seront pas tenus aux examens de l'autre espèce.
Je ne sais si je me fais bien comprendre.
Il y a des pharmaciens, par exemple, qui ont satisfait aux exigences de l'arrêté de 1836 : seront-ils tenus aux examens exigés par la loi nouvelle ?
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Dans mon opinion, les médecins de bataillon qui ont satisfait à l'examen exigé par l'arrêté de 1836, ne doivent pas être soumis à un autre examen.
- Les articles 4 et 5 réunis sont mis aux voix et adoptés.
« Art. 6. Les nominations aux grades supérieurs seront au choix du Roi. »
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Messieurs, j'avais demandé la parole au commencement de la séance, afin d'avoir l'honneur de répondre aux dernières paroles prononcées à la séance d'hier par l'honorable M. Sigart. Je ne sais pas, messieurs, s'il conviendrait à la chambre de me permettre de donner cette réponse. (Oui ! oui !)
Messieurs, j'avoue que je n'avais pas très bien entendu les paroles proférées hier par l'honorable M. Sigart ; sans cela je me serais empressé d'y répondre à l'instant même.
Ces paroles, je les ai trouvées dans le Moniteur de ce matin. Elles renferment contre moi une insinuation peu bienveillante. Je demande à y répondre.
Dans son discours, M. Sigart dit :
« Toutes sortes d'influences viennent assiéger M. le ministre de la guerre. Quel moyen y a-t-il de faire changer de garnison à un médecin qui a sauvé, par exemple, le fils d'un représentant, quand ce représentant appartient à la droite de l'assemblée ? Mais moi-même, messieurs, en faisant bien mon examen de conscience, je ne suis pas sûr de n'avoir pas quelquefois sollicité de pareilles faveurs de M. le ministre de la guerre ; il est vrai, pour mon repos, que c'était sans efficacité, comme c'est la coutume pour les recommandations qui parlent de nos bancs. »
M. Sigart. - Ce n'est pas à vous que cela s'adresse.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Vous dites : le ministre de la guerre.
M. Sigart. - Pas le ministre actuel.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Il y a quarante ans, messieurs, que je suis entré au service. Depuis quarante ans j'ai toujours cherché à me conduire avec droiture et impartialité. C'est ce que je fais encore aujourd'hui. Toutes les demandes qui m'arrivent, je cherche à les instruire et à y répondre le plus favorablement possible, sans froisser les intérêts du gouvernement. Je ne regarde pas de quelle couleur elles sont ; je ne demande pas de quel côté elles viennent. Je repousse donc l'insinuation si elle me concerne ; je ne crois pas la mériter.
M. de Brouckere. - Elle concerne tous les ministres.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Puisque j'ai la parole, qu'il me soit permis de donner à l'honorable M. Sigart quelques explications sur les faits dont il a entretenu la chambre dans son discours.
J'avais complétement perdu de vue la lettre de l'inspecteur vétérinaire citée dans la séance d'hier par l'honorable M. Sigart, mais je ferai remarquer à la chambre que cette lettre, dont on n'a cité qu'un seul paragraphe, était dictée dans l'hypothèse de l'interdiction de la clientèle civile aux médecins militaires.
Elle avait pour but de solliciter, en faveur des vétérinaires de première classe, un accroissement de solde destiné à compenser la ressource que l'on proposait de retirer à ces vétérinaires, en même temps que l'on demandait pour les vétérinaires de troisième classe un logement convenable dans les casernes, logement destiné à améliorer leur position sous le rapport financier.
La première de ces deux propositions fait l'objet d'un amendement présenté au budget de 1847, et aurait pour conséquence de porter les appointements des vétérinaires de première classe de 2,950 francs à 3,350 francs.
Cette solde serait l'équivalent de celle des médecins de bataillon de première classe.
Cette demande m'a paru fondée en justice en présence des accroissements de solde pétitionnés en faveur des officiers de santé assimilés au même grade.
La seconde fera l'objet d'un sérieux examen de la part de mon département, tant au point de vue invoqué ci-dessus que parce qu'il peut, en effet, être utile d'avoir constamment sous la main un vétérinaire, quand on songe aux accidents nombreux et instantanés qui peuvent surgir dans une réunion de plusieurs centaines de chevaux sains et d'un nombre indéterminé de chevaux malades.
Quant à ce qui concerne les abus auxquels peut donner lieu la clientèle civile de la part des vétérinaires, il suffit que la possibilité de ces abus me soit signalée pour m'engager à les prévenir. Mon intention est donc, si la chambre adopte les propositions de mon département, de tenir strictement la main à ce que les vétérinaires donnent tout leur temps aux soins qu'exigent les chevaux de l'Etat, « puisqu'en effet leur service est plus étendu, plus compliqué et qu'il demande plus de temps que celui des médecins des corps ».
(page 607) « Ils prescrivent et ils préparent », a dit l'honorable rapporteur de la section centrale, et il suffit que l'emploi de leurs préparations puisse être suspecté, pour que je croie de mon devoir d'aller au-devant d'abus ou de soupçons injurieux ; je ferai dans ce cas ce que je ferai chaque fois que la nécessité m'en sera signalée : j'interviendrai par mesure administrative pour prévenir ou réprimer.
Quant à des abus de même nature qui pourraient se commettre par les médecins de quelques garnisons d'un ordre secondaire et auxquels il n'a pu être adjoint des pharmaciens, ils seraient la conséquence du cadre restreint de ceux-ci ; mais je crois devoir, à cet égard, combattre les craintes de l'honorable rapporteur.
Ce n'est pas dans ces positions que l'officier de santé peut songer à se créer une clientèle civile, puisqu'il peut à peine suffire à ses divers services de médecin, de pharmacien et de comptable ; et y eût-il même possibilité de détournement de médicaments, je croirais devoir, jusqu'à preuve du contraire, défendre l'honneur d'officiers dont la probité n'a jamais été révoquée en doute.
Je me permettrai d'ajouter que, sur un soupçon que je pensais avoir quelque fondement, j'ai éloigné de l'armée, il y a quelques mois, un officier de santé dont la conduite était au moins douteuse.
M. Sigart, rapporteur. - La partie de mon discours d'hier, que vient de relever M. le ministre, n'était pas particulièrement à son adresse. Je déclare, pour la satisfaction de l'honorable M. Prisse, que je n'ai jamais réclamé de lui des moyens de faciliter la pratique civile. Il n'a donc pas pu me les refuser. Le fait que j'avais en vue se rapporte à l'un de ses prédécesseurs. Mais j'avoue que je n'ai qu'une bien mince confiance dans les protestations chaleureuses qu'il vient de faire ; je crois que tous les ministres se ressemblent. Au reste, nous pourrons mettre M. le ministre à l'épreuve ; nous verrons comment il y résistera.
- L'article est adopté.
« Art. 7. Nul ne pourra obtenir le brevet de pharmacien de troisième classe, s'il n'a subi avec distinction l'examen prescrit pour obtenir le diplôme de pharmacien civil et s'il n'est âgé de moins de 24 ans et né Belge ou naturalisé.
« Nul ne pourra obtenir le brevet de vétérinaire de troisième classe, s'il n'a subi avec distinction l'examen prescrit pour obtenir le diplôme de vétérinaire civil, et s'il n'est âgé de moins de 24 ans et né Belge ou naturalisé.
« Nul ne pourra obtenir le brevet de pharmacien ou de vétérinaire de deuxième classe, s'il n'a servi au moins deux ans dans le grade de pharmacien ou de vétérinaire de troisième classe.
« Nul ne pourra obtenir le brevet de pharmacien ou de vétérinaire de première classe, s'il n'a servi au moins deux ans dans le grade de pharmacien ou de vétérinaire de deuxième classe.
« Nul ne pourra obtenir le brevet de pharmacien principal, ou d'inspecteur vétérinaire, s'il n'a servi au moins trois ans dans le grade de pharmacien ou de vétérinaire de première classe. »
M. Manilius. - Je demanderai une explication à M. le ministre de la guerre.
Si je comprends bien le projet, les vétérinaires et les pharmaciens de première classe sont assimilés au grade de capitaine ; est-ce de deuxième classe ?
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - C'est cela.
M. Manilius. - Il me semble que cette assimilation porte quelque dérangement à l'ordre hiérarchique ; car remarquez, messieurs, que les vétérinaires et les pharmaciens de première classe ne peuvent recevoir d'autre avancement que le grade de major, qui correspond au pharmacien principal et à l'inspecteur vétérinaire. Je sais qu'il n'y a, qu'il ne doit y avoir qu'un grade de capitaine, que la qualification de première et deuxième classe n'est intervenue que pour la question financière.
Je n'en dirai pas davantage, messieurs ; je me borne à prendre acte de la déclaration de M. le ministre de la guerre ; mais je me propose de soulever ultérieurement la question, et j'espère que d'ici là M. le ministre voudra bien encore y réfléchir. Je crois que l'on pourrait accorder à une partie des officiers dont il s'agit le grade de capitaine de première classe ; de cette manière, on maintiendrait une certaine progression hiérarchique.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Je tiendrai compte de l'observation faite par l'honorable M. Manilius. Ainsi que j'ai déjà eu l'honneur de le dire, hier, à la chambre, je ne demande pas mieux, dans toutes les circonstances où la chose pourra convenir à l'honorable assemblée, que d'améliorer la position des membres de l'armée. Lorsque nous en viendrons à la discussion du budget de la guerre, je serai préparé à discuter cette question et à la défendre, s'il y a lieu.
M. Manilius. - J'avais encore une demande à faire à M. le ministre de la guerre. Je lui demanderai si les vétérinaires de troisième classe, assimilés aux sous-lieutenants du génie, recevront la solde attachée à ce grade ?
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - 1,800 francs.
M. Manilius. - Il y a donc une différence. Je croyais que le principe de la loi tout entière était d'assimiler les officiers de santé, les pharmaciens et les vétérinaires aux officiers du génie, aussi bien sous le rapport du traitement que sous celui du rang.
Un membre. - C'est une question de budget.
M. Manilius. - C'est une question de budget ; mais il aurait peut-être convenu de la décider maintenant. Du reste, j'y reviendrai dans la discussion du budget.
- L'article est adopté.
« Art. 8. Les brevets de pharmacien et de vétérinaire de deuxième et de première classe ne peuvent être délivrés sans examen pratique préalable.
« Dans la concession de ces brevets, il est fait une part égale au choix et à l'ancienneté, à moins d'insuffisance de sujets capables dans cette dernière catégorie. »
- Adopté.
« Art. 9. Les nominations aux grades de pharmacien principal et d'inspecteur vétérinaire sont au choix du Roi. »
- Adopté.
« Art. 10. Les programmes d'examen pour l'avancement sont arrêtés par le ministre de la guerre. »
- Adopté.
« Art. 11. Le temps de service exigé par les articles 3 et 7 pour passer d'un grade à un autre pourra, en temps de guerre, être réduit de moitié. »
- Adopté.
M. le président. - C'est ici que vient la proposition de la section centrale, qui se trouve à la page 6 du rapport, et qui est ainsi conçue :
« En temps de guerre, il pourra être dérogé, en ce qui concerne les examens, aux dispositions contenues dans les articles 5 et 18. »
Cette disposition formerait l'article 12.
Je demanderai à M. le ministre s'il se rallie à la proposition de la section centrale.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Messieurs, je pense que la section centrale, en présentant cet amendement, a voulu particulièrement avoir égard à la position des médecins de bataillon qui pourraient être appelés au grade de médecin de régiment. Je crois que dans cette circonstance l'examen pratique doit être maintenu en admettant toutefois que l'officier de santé, qui ne peut pas, en temps de guerre, s'éloigner sans inconvénient du corps ou de l'ambulance dont il fait partie, serait admis à le subir là où il se trouverait, en présence des médecins du corps auquel ii appartient.
Car du moment où, en temps de paix, on exige toutes les garanties possibles pour l'obtention du grade de médecin de régiment, on doit à plus forte raison exiger ces garanties en temps de guerre, lorsque le soldat est exposé à mille dangers outre ceux qu'il court en temps de paix, lorsqu'il est soumis à la fatigue qui occasionne un grand nombre de maladies, lorsqu'il est sujet à recevoir des blessures qui exigent souvent des soins très intelligents. Je ne crois pas que dans ces circonstances il puisse y avoir des médecins capables qui se refusent à faire, en présence de quelques personnes de l'art, preuve de leur talent et de leur habileté.
Voilà pourquoi le gouvernement a désiré maintenir l'examen en temps de guerre, parce qu'il peut se faire facilement, et sur les lieux où l'on se trouve. Je crois ne pas me tromper en l'assurant ; je ne pense pas qu'un seul médecin instruit et expérimenté de l'armée songe le moins du monde à reculer même devant l'idée de voir l'examen inscrit dans la loi.
Je demande donc que l'examen soit maintenu même en temps de guerre.
M. Sigart, rapporteur. - J'ai fait remarquer, dans mon rapport, qu'il y avait un article analogue dans un arrêté du 26 novembre 1845, relatif aux officiers du génie. J'ai cité les considérants sur lesquels l'arrêté s'appuie ; on y lit :
« Il est impossible que la marche de l'instruction scientifique soit la même en temps de guerre ; il serait impossible aussi de détacher alors des officiers de leur régiment afin de leur faire passer un examen. D'ailleurs la bravoure, les services éclatants doivent en pareille circonstance être des titres tout particuliers à l'avancement. »
Ces considérants s'appliquent parfaitement aux médecins militaires. Si l'on n'adoptait pas notre amendement, il faudrait aussi détacher les officiers de leur régiment en temps de guerre, les faire venir à Bruxelles, pour leur faire subir des examens ; ou bien il faudrait bouleverser tout le système des programmes.
Je prie M. le ministre de la guerre de remarquer que c'est une faculté que la section centrale veut lui donner ; que cette faculté est bien plus nécessaire ici que dans un arrêté, attendu que nous faisons une loi qui ne peut être changée par un arrêté ; M. le ministre de la guerre pourra appeler ces officiers de santé pour leur faire subir un examen ; mais il n'y sera pas obligé. Voilà la pensée de l'article de la section centrale. Je suis étonné que M. le ministre de la guerre ne veuille pas de cette faculté ; c'est un cadeau que nous avons entendu lui faire.
- La discussion est close.
L'article 12 nouveau, proposé par la section centrale, est mis aux voix et adopté.
« Art. 13 (12 ancien). Les dispositions des articles 10, 11,12, 13, 14 et 15 de la loi du 16 juin 1846, sur le mode d'avancement dans l'armée, sont communes aux officiers brevetés du service de santé, en tous les points qui leur sont applicables. »
- Adopté.
« Art. 14 (13 ancien). Les dispositions de la présente loi sont applicables aux chirurgiens de la marine royale qui sont assimilés, de la manière suivante, aux médecins de l'armée :
« Les chirurgiens-majors de première classe, aux médecins de régiment ;
« Les chirurgiens-majors de deuxième classe, aux médecins de bataillon de première classe ;
(page 608) « Les chirurgiens aides-majors, aux médecins de bataillon de deuxième classe ;
« Les chirurgiens sous-aides-majors, aux médecins adjoints. »
- Adopté.
« Art. 15 (14 ancien). Le service de santé de la marine est distinct de celui de l'armée jusqu'au grade de médecin de régiment inclus.
« A partir de ce grade, les chirurgiens-majors de première classe seront admis à concourir à l'avancement aux grades supérieurs avec les médecins de régiment de l'armée de terre.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Je propose d'intercaler entre les deux paragraphes de cet article le paragraphe suivant :
« Néanmoins les officiers de santé pourront être admis à passer avec les grades et l'ancienneté du service de l'armée de terre au service de la marine et réciproquement. Ces passages se feront de commun accord entre les ministres de la guerre et des affaires étrangères. »
Le dernier paragraphe de l'article commencerait alors ainsi :
« A partir du grade de médecin de régiment. »
- Ces deux amendements sont adoptés.
L'article 15 (14 ancien) ainsi amendé, est mis aux voix et adopté.
M. le président. - Après l'article 15 nouveau vient s'intercaler un amendement de la section centrale. Cet amendement qui formerait, s'il était adopté, un article 16 nouveau, est ainsi conçu :
« La pratique civile est interdite aux médecins militaires en activité de service. »
M. Sigart, rapporteur. - Messieurs, selon la promesse que je vous ai faite, je viens relever les arguments que je n'ai pu saisir dans la séance d'hier.
« L'interdiction de la pratique civile empêcherait les hommes capables d'entrer dans le service de santé. » Il faut dire comment les choses se passent actuellement, et comment sans doute elles continueront encore à se passer ; je crois pouvoir le faire en toute franchise.
La plupart des médecins qui entrent dans le service de santé, n'y entrent que pressés par la nécessité ; tous ceux d'entre nous, et ils sont nombreux, qui ont fréquenté les universités, savent que les élèves en médecine en général appartiennent a des familles moins riches que la plupart des autres étudiants (il n'y a pas de honte à cela), par exemple les étudiants en droit. Je n'ai donc pas la moindre crainte que nous manquions d'hommes capables ; j'ai seulement grand peur que quand ils seront entrés dans le corps, nous ne puissions pas les y retenir.
« Mais, a-t-on dit encore, il peut exister parmi les médecins militaires des spécialités ; ces spécialités seront donc perdues pour le public. »
Ces spécialités peuvent exister sans doute, mais il ne me semble pas que nous devions nous arrêter devant une exception, quand nous faisons une loi.
Il est certain que les spécialités parmi les médecins militaires comme parmi les autres ne sont pas communes ; d'ailleurs cette objection, nous l'avons prévue dans les commentaires que nous donnons à notre amendement ; nous avons soin de déclarer qu'en interdisant la pratique nous ne voulons pas interdire la consultation. Ainsi il sera toujours permis de mettre à profit les lumières des médecins spéciaux ; ce que nous voulons interdire c'est la visite prenant toute la journée,
Des spécialités, est-ce qu'on en manque ? Jamais, quand on a le moyen de payer, les hommes habiles et capables ne manquent ; dès l'instant que les ressources ne manquent pas, les secours ne manquent jamais. Mais, dit-on, la confiance aide à la guérison ; le médecin militaire est imposé au soldat et vous ne voulez pas lui permettre d'acquérir une réputation qui donne de la confiance au soldat !
Pensez-vous que si le soldat était abandonné à lui-même, il choisirait de préférence un médecin qui se livrerait à la clientèle civile ? N'en croyez rien.
Quand le médecin qui pratique civilement vient au soldat, lorsqu'il y vient, car le plus souvent il ne vient pas, il est en course à plusieurs lieues de sa garnison, il vient préoccupé par les luttes du métier ; vous n'ignorez pas qu'en médecine comme dans d'autres carrières, le savoir ne suffit pas, il n'est même pas grand-chose s'il n'est assaisonné de quelque peu de savoir-faire. Le soldat n'a que faire de cette préoccupation ; ce qu'il faut au soldat, c'est un médecin qui lui arrive l'esprit libre et qui ne s'occupe que des moyens de le soulager. On nous objecte que notre interdiction est inexécutable, qu'on ne pourra pas constater les contraventions et que de plus la défense n'a pas de sanction.
La difficulté de découvrir les comptables n'a jamais, je pense, empêcher de faire un article de loi. Quand nous défendons le vol, le meurtre, excusez la comparaison, nous savons bien que nous pourrons éprouver quelques difficultés à découvrir les voleurs et les meurtriers. Cette circonstance ne nous arrête pas. Ici, rien de plus facile que de découvrir les coupables. Sans doute s'il ne s'agissait que d'une seule visite, ce serait difficile ; mais quand on pratique il faut être en course du matin au soir ; tout le monde pourra vous indiquer quels sont les médecins militaires qui pratiquent civilement. On dit aussi : Il n'y a pas de sanction. Je n'entends pas qu'on envoie aux galères les délinquants. Qu'avons-nous besoin de sanction ? Les médecins militaires sont sous la main du ministre de la guerre. Je pense que M. le ministre exécuterait la loi si elle était votée. Je suis sûr qu'une fois la loi votée, M. le ministre tiendrait la main à ce qu'aucun de ses subordonnés ne s'écartât de ses prescriptions.
L'honorable M. de Brouckere nous a dit quelles étaient les armes du ministre : il a le changement de garnison, la mise en non-activité, avec ou sans désignation de résidence ; il a encore beaucoup d'autres moyens.
On vous dit qu'on ne peut, sans être injuste, être plus rigoureux à l'égard des médecins militaires qu'à l'égard des professeurs. Avons-nous à nous occuper des professeurs des universités de l'Etat ? Si nous avions à nous en occuper, il est possible, il est probable qu'on leur interdirait la clientèle. Je ne parle pas seulement des professeurs médecins, je parle aussi des autres professeurs ; je pense qu'ils ne peuvent pas se distraire de leurs devoirs, qu'ils doivent se livrer tout entiers à leur enseignement.
Nous avons fait la défense aux professeurs de l'école militaire. On a reconnu qu'on avait imposé une interdiction aux magistrats, en prétendant, ii est vrai, qu'il y aurait disparité de position ; la même chose avait été défendue aux commissaires de district, aux membres de la cour des comptes et à je ne sais combien d'autres fonctionnaires.
On me reproche ma révolte contre l'Académie de médecine. J'éprouve le plus grand respect pour cette compagnie ; c'est un corps savant qui mérite la considération à bien des titres. Je ne veux rien dire qui puisse être désagréable à aucun membre de ce corps, à son président moins qu'à un autre. Mais je dois faire connaître à l'assemblée quelle est la situation du rapporteur : il est à la fois chef du service de santé, président de l'Académie, et c'est lui qui a le plus contribué à son organisation. Je ne veux pas tirer de conclusion, je pense qu'elle se tire d'elle-même.
Je dois terminer par quelques mots sur la barbarie de notre proposition ; nous voulons étouffer, dit-on, l'humanité des médecins militaires. Qu'on se détrompe, notre désir est de donner libre essor à tout ce qu'ils voudront faire par pure humanité ; ce n'est que la pratique payée que nous voulons interdire, parce qu'elle tend à distraire le médecin militaire des soins qu'il doit au soldat.
Je n'appelle pas pratiquer, donner des soins gratuitement à quelques malheureux, à des parents, à des amis ; c'est ce que je fais encore quoique je n'aie plus de patente. Je n'ai pas peur que M. le procureur du roi vienne me traduire sur les bancs de la police correctionnelle pour quelques avis que j'aurais donnés, par exemple, à des membres de cette chambre, surtout lorsqu'il apprendrait que je sais faire trêve à nos querelles de parti, et que j'ai des conseils pour les membres de la droite comme pour ceux de la gauche.
Quand les médecins militaires voudront montrer ainsi leur humanité, ils le pourront, je ne m'y oppose pas ; mais j'entends qu'ils n'en reçoivent pas le prix en argent. Je veux leur réserver tout l'honneur de leur humanité.
Je ne garde pas rancune à l'honorable M. de Brouckere de l'épithète d'odieuse qu'il a ajoutée à toutes celles dont il avait déjà gratifié la proposition de la section centrale. Le sentiment qui l'animait doit lui faire obtenir grâce. De même que l'honorable M. Brabant obéissait à l'amour paternel, de même M. de Brouckere cédait à la piété filiale. Nous louons leurs sentiments, nous n'exigeons pas d'eux qu'ils soient des Brutus ; mais la chambre doit-elle partager ces sentiments ? Est-ce que le pays, au nom duquel nous stipulons, doit payer les dettes de reconnaissance de deux de nos collègues ? Est-ce que nous faisons une loi pour le père de M. de Brouckere ou pour le fils de M. Brabant ?
M. Rodenbach. - L'honorable préopinant a des opinions très libérales en politique. En thèse générale, il en est sans doute de même des opinions qu'il professe en médecine. Mais qu'il me permette de le élire, il s'est montré, en cette occasion, très illibéral.
En effet, avec des idées larges, il me semble qu'on ne doit pas vouloir interdire la pratique civile à des hommes de science ; car la science est aussi bien pour le civil que pour le militaire.
Voyons ce qui se passe en d'autres pays :
En France, même sous Napoléon, empêchait-on le célèbre chirurgien Larrey de pratiquer la chirurgie dans le civil ? Lui aurait-il été interdit de faire une opération, lorsqu'un civil se serait adressé à lui, lui croyant plus de talent qu'à un chirurgien civil ?
Broussais, qui s'est fait un si grand nom dans l'art médical, était, comme vous le savez, médecin militaire ; il était professeur à l'hôpital militaire du Val-de-Grâce. Ce qui ne l'empêchait pas de pratiquer la médecine dans le civil. Il ne se serait pas sans doute acquis une aussi grande célébrité, s'il avait été borné à la pratique militaire.
Je trouve qu'avec des idées vraiment libérales en médecine, on doit repousser la proposition de la section centrale.
Le médecin de l'empereur lui-même, Corvisart, pratiquait également au civil.
Il est vrai qu'en Hollande, pays éminemment calculateur, il y a eu quelques réclamations contre la pratique civile des médecins militaires. Mais devons-nous nous arrêter à cela ? Ces réclamations n'ont qu'un mobile : jalousie de métier, et presque toujours la jalousie de métier dénote l'incapacité.
Il nous a été adressé trois réclamations seulement. Aucune n'émane ni de l'Académie, ni d'aucun corps constitué.
Je m'arrête, car cette discussion a été fort longue. Les honorables MM. de Brouckere et Brabant ont d'ailleurs fait valoir, dans le sens de mon opinion, des arguments à la force desquels je ne pourrais rien ajouter.
Je me bornerai, en terminant, à faire une observation. Il y a, en Belgique, 1,900 médecins ou chirurgiens civils (un sur 2,300 habitants). Si, comme je n'en doute pas, la proposition de la section centrale est écartée, il y aura 1,915 médecins civils au lieu de 1,900. Sera-ce donc un si grand malheur pour l'humanité !
M. de Brouckere. - Si l'honorable M. Sigart avait une mauvaise (page 609) cause à défendre, je dois du moins convenir qu'il l'a défendue avec esprit ; mais tout l'esprit qu'il y a mis n'a pas suffi pour donner de la force à ses arguments.
Vous aurez pu remarquer que l'honorable M. Sigart, qui avait annoncé qu'il réfuterait tout ce qui avait été dit hier, n'a pas présenté, à l'appui de son opinion, une seule considération nouvelle. Il n'a nulle crainte, dit-il, quand il y aura des places vacantes dans le service de santé, qu'il ne se présente pas de candidats capables ; mais ce ne sont pas des doutes que nous exprimons ; nous prions l'honorable M. Sigart de s'informer de ce qui s'est passé : il saura qu'on a été obligé d'admettre dans le service de santé plus de cent jeunes gens qui n'avaient pas le grade de docteur ; il saura qu'il y en a encore 36 dans le service sanitaire, qui n'ont pas ce grade. Il est, en outre, de notoriété publique qu'on a dû faire des appels nombreux aux docteurs en médecine, afin de les engager à se présenter pour entrer dans le service sanitaire, et que ces appels ont été souvent sans résultat.
Nous avons démontré, dans la séance d'hier, que si la défense de pratiquer civilement était inscrite dans la loi, il serait impossible d'obtenir l'exécution de cette interdiction.
L'honorable M. Sigart répond : Cela n'est pas exact ; rien n'est plus facile : ceux qui pratiquent le font au grand jour ; on les voit parcourir la ville en tout sens, du matin au soir. Mais pourquoi en agissent-il ainsi ? Parce que la pratique civile ne leur est pas interdite. Que l'interdiction soit établie, et qu'arrivera-t-il ? Qu'ils auront recours à tous les moyens de fraude, et ces moyens ne seront pas difficiles à trouver. Dans le système de l'honorable M. Sigart, les consultations seules seraient permises ; eh bien ! le médecin militaire se fera accompagner par un médecin civil qui passera pour le médecin traitant, tandis que ce sera le médecin militaire qui sera le véritable médecin traitant. Mille autres moyens se présenteront d'éluder la loi et nous ne saurions condamner ceux qui y auront recours, parce que la loi serait souverainement injuste et illibérale.
Sous ce rapport, je suis étonné de voir que ce soit l'honorable M. Sigart qui attaque cette disposition libérale, qui est défendue d'un autre côté par l'honorable M. Rodenbach.
M. Rodenbach. - Je me fais gloire d'être libéral, mais pas à la manière de certaines gens.
M. de Brouckere. - L'honorable M. Sigart, à qui nous avons dit que si l’on interdit la pratique civile aux médecins militaires, ou devra également la défendre aux professeurs des universités et aux médecins des hôpitaux civils, ne recule pas devant cette mesure : il est tout prêt à interdire la pratique de la médecine et aux professeurs des universités et aux médecins des hôpitaux civils. Mais quel sera notre lot ? C'est que nous n'aurons plus que des médiocrités pour nous traiter : nous ne pourrons avoir recours ni aux professeurs des universités, ni aux médecins des hôpitaux civils, ni aux médecins militaires. Je sais réellement très mauvais gré à l'honorable M. Sigart de vouloir ainsi limiter mon choix ; je désire, quand j'aurai besoin d'un médecin, avoir toute latitude, pouvoir le choisir, si cela me convient, parmi les hommes appelés à enseigner la médecine, ou à la pratiquer dans les hôpitaux.
D'après l'honorable M. Sigart, c'est bien à tort qu'on a prétendu que la pratique civile est dans l'intérêt du soldat et que si le soldat pouvait choisir son médecin, il prendrait de préférence celui qui ne pratique pas civilement. Je pose en fait que cela n'est pas exact, et je m'engage à en convaincre l'honorable membre, en le conduisant à l'hôpital militaire de l'une de nos principales villes de garnison ; il interrogera les malades ; je suis convaincu que, sur 50, il y en aura 49 qui demanderont de préférence le médecin militaire qui y pratique civilement. Savez-vous où conduit cet argument ? A nous prouver que le meilleur médecin est celui qui a le moins de pratique. Mais si l'un de vous est malade, appellera-t-il de préférence le médecin qui a le moins ut pratique ? Non ! ce sera précisément l'opposé.
Oh ! dit l'honorable M. Sigart, le médecin militaire qui pratique civilement est préoccupé de toute autre chose que des malades de l'hôpital. Les luttes de la pratique civile l'absorbent complétement. A ce compte, le meilleur médecin serait celui qui s'occuperait le moins de médecine !
Pour moi, comme le soldat, je donnerais la préférence au médecin qui a le plus de pratique et par conséquent le plus d'expérience, et je suis persuadé que si l'honorable M. Sigart avait besoin du secours d'un médecin, ce n'est pas non plus celui qui a le moins de pratique qu'il chercherait.
M. de Man d’Attenrode. - Messieurs, nous ne pouvons nous dissimuler que d'excellents arguments ont été donnés ici pour et contre la pratique civile des médecins militaires. Quant à moi, je crois que nous devons traiter cette question abstraction faite de l'intérêt paternel ou filial, et seulement au point de vue de l'intérêt général.
Ceux qui défendent la pratique civile, disent que l'interdire c'est enlever aux médecins militaires les moyens d'acquérir de l'expérience et de l'instruction.
Ceux qui ne veulent pas de la pratique civile, disent que permettre aux médecins militaires de pratiquer civilement, c'est faire servir le service de santé d'échelon pour arrivera une autre position, et que quand les médecins militaires seront devenus capables, ils quitteront le service.
Ces deux arguments m'ont également frappé. L'honorable M. Brabant et l'honorable M. de Brouckere d'une part, l'honorable M. Sigart de l'autre, ont donné de bonnes raisons en faveur de leur système, et je dois dire qu'il y a du pour et du contre.
Cependant, messieurs, je me sens maintenant plus ou moins disposé à voter en faveur du maintien de la pratique civile ; je pense que cette question est gagnée pour le service de santé.
Toutefois, messieurs, je demande que cette question ne soit pas seulement gagnée pour les gros bonnets ; je désire qu'elle le soit pour tout le monde.
Jusqu'ici la pratique civile a été permise, mais qu'est-il arrivé ? On a permis cette pratique aux grands personnages du service de santé ; ou les a laissés pratiquer avec toute la liberté possible. Mais lorsque des médecins de bataillon se sont mis à pratiquer dans des petites villes de province, qu'est-il arrivé ? Si leur pratique civile semblait un peu menaçante pour les médecins civils, ils réclamaient, et si le médecin militaire ne pouvait pas trouver quelque appui dans une haute influence, il lui était interdit de pratiquer civilement.
Il faut, messieurs, qu'il soit bien entendu que la pratique civile est permise pour tout le monde, pourvu que cette pratique civile ne nuise pas au service militaire.
M. Rodenbach. - Cela dépend du ministre de la guerre.
M. de Man d’Attenrode. - L'honorable M. Rodenbach me dit : Cela dépend du ministre de la guerre. Eh bien, j'espère que M. le ministre de la guerre interprétera la disposition de manière à ce que tout le monde soit traité de la même manière.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Messieurs, l'honorable M. de Man vient d'appeler mon attention sur une circonstance que j'avoue ne pas connaître.
D'après l'honorable orateur, la pratique civile aurait été permise aux principaux médecins de l'armée, et elle aurait été défendue aux médecins de bataillon. Je déclare n'avoir aucune connaissance de ce fait, et je ne comprends pas comment le département de la guerre aurait pu y prêter les mains.
Je crois, messieurs, que la pratique civile doit être permise dans tous les rangs de la hiérarchie, du moment où le service est convenablement et soigneusement assuré.
Messieurs, nous sommes les premiers intéressés à ce que ce service soit bien et convenablement établi.
Qu'il me soit permis de dire que sous ce rapport la généralité des médecins militaires méritent de justes éloges.
Visitez nos hôpitaux, messieurs, visitez les infirmeries ; venez dans nos camps, et vous y trouverez des malades soignés, comme j'ose assurer qu'ils ne le sont nulle part.
Je rends donc entière justice à notre corps d'officiers de santé. Il déploie dans l'exercice de ses fonctions un dévouement, un zèle, un talent bien remarquables, et c'est peut-être, messieurs, en raison des soins intelligents et assidus qu'ils apportent aux devoirs de leur profession, que la pratique civile leur est ouverte dans quelques localités du royaume.
On a beaucoup parlé, messieurs, de la question d'humanité, et on a eu grandement raison de la plaider. Il est des circonstances, messieurs, où les malades sont dans l'impossibilité de s'adresser à d'autres docteurs qu'aux médecins militaires. Voulez-vous, dans des occasions pareilles, enlever au malade le remède, le soulagement à ses maux ? Bien certainement le législateur ne peut le vouloir.
Nous avons dans le royaume environ 2,500 communes. L'honorable M. Rodenbach vient de vous dire qu'on comptait environ 1,900 médecins. Il n'y a donc pas un médecin par commune.
Messieurs, dans nos cantonnements j'ai vu dans beaucoup de circonstances des personnes malades s'adresser aux médecins militaires et trouver chez ceux-ci tous les secours possibles. Nous avons vu dans des petites villes qui n'avaient pour garnison qu'un bataillon, les malades n'avoir d'autre ressource que le médecin qui accompagnait ce bataillon.
Les médecins militaires, messieurs, traitent avec la plus grande générosité, avec le plus grand désintéressement tous les indigents. Voudrait-on leur interdire aussi cette faculté de faire du bien même à leurs dépens ? Je ne le crois pas. Vous ne le voudrez pas.
M. de Man d’Attenrode. - Je tiens à déclarer que je n'ai nullement entendu faire allusion aux actes administratifs de l'honorable ministre de la guerre, et que je reconnais que tous ses actes sont marqués au coin de la plus parfaite impartialité.
- La clôture est demandée et prononcée.
Plusieurs membres. - L'appel nominal !
Il est procédé au vote par appel nominal sur la proposition de la section centrale.
61 membres sont présents.
6 adoptent.
54 rejettent.
Un (M. de Foere) s'est abstenu. En conséquence la proposition n'est pas adoptée.
Ont voté l'adoption : MM. de Garcia de la Vega, de Meester, Dumortier, Lange, Lejeune, Sigart.
Ont voté le rejet : MM. Biebuyck, Brabant, Clep, de Baillet, de Breyne, de Brouckere, de Corswarem, Delehaye, d'Elhoungne, de Man d'Attenrode, de Mérode, de Naeyer, de Renesse, de Roo, de Sécus, Desmaisières, de Smet, de Terbecq, de Theux, de T'Serclaes, d'Hoffschmidt, d'Huart, Dolez, Donny, (page 610) Dubus (aîné), Dubus (Albéric), Dumont, Eloy de Burdinne, Fleussu, Goblet, Henot, Jonet, Lebeau, Le Hon, Lesoinne, Liedts, Lys, Maertens, Malou, Manilius, Mast de Vries, Orban, Osy, Pirmez, Pirson, Rodenbach, Rogier, Scheyven, Simons, Troye, Van Cutsem, Veydt, Wallaert.
M. de Foere. - Messieurs, de bonnes raisons ont été produites de part et d'autre, et il m'a été impossible de former mon opinion, c'est pourquoi je me suis abstenu.
« Art. 16 (15 ancien). Les propositions pour la nomination des chirurgiens-majors de première classe au grade de médecin de garnison, seront adressées au ministre de la guerre par l'inspecteur général du service. »
M. de T’Serclaes. - Messieurs, cet article me paraît inutile ; la remarque en a déjà été faite par la section centrale. Les attributions des inspecteurs généraux des divers corps de l'armée n'ont jamais été fixées par la loi et cette matière a toujours été considérée comme étant purement réglementaire. Si la disposition, que je suis loin de trouver mauvaise en elle-même, a semblé devoir être écrite dans la loi au moment où le projet vous a été présenté, elle ne l'est plus aujourd'hui, puisque M. le ministre de la guerre a fait adopter, comme amendement à l’article 14, une disposition d'après laquelle le passage du service de la marine au service de l'armée de terre est réglé de commun accord par les deux ministres. Je ne vois donc pas de motifs pour conserver l'article 16, portant spécialement que les chirurgiens-majors de première classe, qu'il s'agit de nommer au grade de médecin de garnison, seront proposés par l'inspecteur général du service de santé. A moins que M. le ministre de la guerre ne donne des raisons particulières pour le maintien de cet article, j'en demanderai la suppression.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Je demanderai le maintien de l'article afin de rester quant aux chirurgiens-majors de la marine, dans les règles adoptées pour les officiers supérieurs du service de santé. Pour les officiers supérieurs du service de santé, la présentation est faite au ministre par l'inspecteur général ; le ministre la transmet, s'il l'approuve, au Roi ; la nomination appartient à Sa Majesté ; et je ne sais pas pourquoi il n'en serait pas de même des chirurgiens-majors de la marine.
S'il n'est pas fait mention de ces dispositions quant au service de terre, c'est qu'elles sont depuis longtemps prévues par les règlements.
M. T’Serclaes. - L'article 16 est évidemment incomplet. La loi ne dit pas que pour la nomination des médecins principaux et du médecin en chef, les propositions appartiendront à l'inspecteur général ; on ne parle, à l'article 16, que des chirurgiens-majors de première classe ; je ne comprends pas pourquoi, lorsque l'on ne fait pas mention des autres grades, on ferait (erratum, p. 630) exceptionnellement mention de celui-ci. Si toutes les propositions pour les nominations dans le service de santé, doivent être faites par l'inspecteur général (et je crois qu'il en est ainsi), pourquoi parle-t-on des unes et pas des autres ? C'est là, je le répète, un objet qui appartient exclusivement aux règlements particuliers du corps. Mon observation ne porte point sur la chose en elle-même ; elle ne porte que sur l'inutilité de l’insérer dans la loi.
- L'article est mis aux voix et adopté.
« Art. 17 (16 ancien). Les officiers de santé assimilés au grade d'officier supérieur, ainsi que les médecins de régiment qui seront pensionnés après dix ans de grade, le seront dans le grade immédiatement supérieur, c'est-à-dire :
« L'inspecteur général comme lieutenant général ;
« Le médecin en chef comme général-major ;
« Les médecins principaux comme colonels ;
« Les médecins de garnison comme lieutenants-colonels ;
« Les médecins de régiment comme majors. »
La section centrale propose la suppression de cet article, qu'elle considère comme inutile.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Je crois, messieurs, que cet article, loin d'être inutile, rentre en partie dans les vues qui ont été présentées par plusieurs honorables membres de la chambre sur la nécessité d'améliorer la position des officiers du service de santé. Il a été suffisamment démontré, dans la discussion qui a lieu depuis hier, que le nombre des officiers supérieurs de ce service est extrêmement restreint. Eh bien, par l'article en discussion l'on obvie en partie aux inconvénients qui résultent de cet état de choses, et l'on offre au moins pour l'époque de la retraite, aux officiers de santé qui ont longtemps et honorablement servi leur pays, une position avantageuse et analogue à celle que l'on obtient dans tous les autres corps de l'armée. Je pense donc que l'article doit être maintenu.
M. Osy. - Messieurs, je viens combattre la proposition du gouvernement. J'ai examiné la loi qui règle les pensions militaires, la loi de 1838, et je vois que l'article en discussion déroge tout à fait à cette loi. J'ai établi des calculs dont il résulte, par exemple, que si l'inspecteur général avait le malheur de perdre la vue, l'article dont nous nous occupons, lui donnerait droit à une pension de 9,450 fr., tandis que d'après la loi de 1838, il ne toucherait que 7,500 fr. Si je prends maintenant le grade de lieutenant, la pension de ce grade serait augmentée de 375 fr.
Eh bien, vous voyez que le gouvernement ne nous propose pas même, pour ceux-là, de suivre la même marche qu'il nous propose pour les grades supérieurs. Ainsi, la proposition n'est faite que pour les gros bonnets ; et pour les grades inférieurs, on ne propose rien. Pour être juste, il faudrait au moins dire dans la loi que ceux qui ont le grade de lieutenant seront pensionnés comme capitaines.
Mais quant à moi, considérant que les pensions militaires sont assez fortes, je me rallie à la proposition de la section centrale qui demande la suppression de l'article.
M. de Garcia. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour défendre la proposition de la section centrale et pour appuyer les observations que l'honorable M. Osy vient de présenter.
La disposition en discussion me paraît contenir quelque chose d'exorbitant à un point de vue, et consacrer une injustice à un autre point de vue.
L'article est exorbitant, en ce que, sortant des principes que vous avez cherché à établir jusqu'aujourd'hui tant dans les pensions civiles que dans les pensions militaires, vous adoptez la proposition qui vous est soumise par le gouvernement, et vous consacrez un principe qui tend à créer des pensions qui suivant les calculs exacts de l'honorable M. Osy, s'élèveraient à la somme de 10,000 francs. Il m’est impossible, messieurs, de me rendre compte d'une prétention semblable en présence des dispositions qui ont été manifestées dans différentes circonstances par cette honorable assemblée.
Un ministre, eût-il 40 années de service (je ne crains pas au surplus qu'aucun arrive jamais là) ; mais eût-il 40 années de services, n'aurait qu'une pension de 6,000 fr. ; et un officier supérieur du service de santé pourrait obtenir une pension de 9 à 10,000 fr. Un ordre de choses pareil serait évidemment une anomalie, et, qu'on me pardonne l'expression, une absurdité. Envisageant la proposition à un autre point de vue, elle est manifestement injuste. Vous pensionnez tous les officiers supérieurs du service de santé, en les faisant passer à un grade qu'ils n'ont jamais eu ; et vous ne faites cela que pour les grades. La disposition perd complétement de vue les officiers de santé des grades inférieurs qui pourtant rendent des services incessants et incontestables à nos soldats et à nos concitoyens. Quant à moi tous les défauts que je puis reprocher à la loi actuelle, c'est d'avoir trop méconnu ces services. En arrêtant ces bienfaits à la catégorie des officiers supérieurs, on doit l'avouer, la loi pose un acte d'injustice. Dans cet état de choses et d'après ces considérations, j'engage fortement la chambre à adopter la proposition de la section centrale, c'est-à-dire à supprimer l'article du projet du gouvernement ; en agissant ainsi, vous éviterez des anomalies et vous ne consacrerez pas une disposition injuste.
M. de Brouckere. - Messieurs, il a été démontré que, sous le rapport de la quantité des grades supérieurs, le service sanitaire de l'armée était extrêmement maltraité ; il est beaucoup plus maltraité que les armes savantes et même que les autres armes. Lorsque, dans une précédente séance, un amendement a été présenté, tendant à établir une assimilation complète entre le service sanitaire et les armes savantes, qu'a-t-on répondu ? M. le ministre de la guerre, qui a combattu cette proposition, s'est particulièrement appuyé sur ce qu'il faisait dans l'article 16, en accordant un avantage sous le rapport des pensions ; et probablement, c'est en grande partie à cause de cet argument que la proposition a été rejetée. Et maintenant que nous arrivons à l'article 16 sur lequel on s'est appuyé pour faire rejeter l'amendement, voilà que l'article 16 est également combattu !
Messieurs, je trouve de toute justice d'accorder quelques faveurs, sous le rapport de la pension, aux officiers du service de santé, alors qu'ils ont aussi peu de perspective d'avancement qu'ils en auront à l'avenir. Il a été démontré que le cas où un officier de santé passera dix ans dans un grade supérieur, sera un cas tout à fait exceptionnel, de manière qu'il n'est pas à craindre que l'article 16 grève le trésor.
On se récrie sur l'élévation des pensions affectées aux grades. Mais ce n'est pas ici qu'il fallait faire valoir de semblables considérations ; c'est quand nous discutions la loi sur l'organisation de l'armée ; car on ne fera autre chose, par l'article 16, qu'appliquer la loi sur l'organisation de l'armée, sauf cette seule exception, que l'on donne un grade de plus aux officiers du service de santé qui ont passé dix ans dans le même grade.
Nos adversaires prétendent qu'on ne fait pas assez pour les grades inférieurs. Eh bien, qu'ils présentent un amendement et qu'ils proposent d'ajouter : « Le médecins de bataillon comme capitaines. » Pour ma part, je ne m'y opposerai pas.
On me dit que ce sera une nouvelle charge pour le trésor ; mais on conçoit facilement qu'il y aura bien peu de médecins de bataillon qui auront droit à la pension, parce que, pour avoir droit à la pension, il faut un assez grand nombre d'années de service, et que ceux qui ont un grand nombre d'années de services, auront eu l'occasion de passer à un grade supérieur.
M. de Man d’Attenrode. - Messieurs, la section centrale a adopté plusieurs propositions qui tendent à améliorer la position des médecins militaires. C’était une compensation à la proposition faite par la section centrale, d'interdire à ces médecins la pratique civile. Maintenant que nous n'avons pas admis cette dernière proposition, il me semble que l'autorisation de pratiquer civilement assure d'une manière suffisante l'avenir, le bien-être des médecins militaires. Je crois donc devoir appuyer les observations qui ont été faites par MM. Osy et de Garcia, et je voterai contre l'article 16 du projet du gouvernement.
Des membres. - Aux voix ! l'appel nominal !
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Messieurs, si l'article 16, tel que je le propose, n'était pas adopté par la chambre, pourrais-je alors, après l'appel nominal, présenter une autre rédaction ? (Non ! non !)
Dans ce cas, je propose éventuellement dès à présent l'amendement suivant :
(page 611) « L'assimilation de grade, décrétée par l'article premier de la présente loi, produira tous ses effets quant au règlement des pensions de retraite ou de réforme.
« Les officiers de tout grade des diverses catégories du service de santé jouiront de l'augmentation du cinquième de la pension allouée du grade correspondant dans l'armée après dix années d'activité dans le même grade, conformément au prescrit de l'article premier de la loi du 25 février 1842. »
M. Osy. - Je ne sais s'il est convenable de discuter maintenant cet amendement qui n'est présenté que subsidiairement. Mais je m'y étais attendu. La loi de 1838 n'accorde l'augmentation du cinquième de la pension, après dix années de grade, que pour les grades inférieurs.
M. Brabant. - Il y a une loi de 1842 qui a changé cette disposition.
M. Osy. - Pour les grades inférieurs, cet amendement se rapproche de la première proposition du gouvernement. La pension du général-major est de 3,750 francs, en y ajoutant le cinquième en sus, on arrive à 4,500 fr., tandis que l'inspecteur général aurait une pension de 4,725 fr., ce qui ferait une différence de 225 fr. ; il ne faut pas pour si peu de chose apporter une modification à la loi existante, quand les officiers de toutes les armes savantes sont mis sur la même ligne.
M. le ministre des finances (M. Malou). - L'honorable M. Osy devra, d'après ce qu'il vient de dire, voter pour l'amendement présenté par M. le ministre de la guerre, puisqu'il ne constitue pas autre chose que le renvoi aux lois spéciales sur les pensions militaires. Il faut établir l'assimilation quant au traitement et quant au droit à la pension. L'amendement que j'ai sous les yeux ne fait que renvoyer aux deux lois spéciales qui règlent les pensions militaires pour les officiers de grade inférieur, comme pour les officiers supérieurs, à la loi de 1838, à laquelle il a été dérogé par la loi du 25 février 1842.
« L'assimilation de grade, décrétée par l'article premier de la présente loi, produira tous ses effets quant au règlement des pensions de retraite ou de réforme. »
Voilà pour la loi générale.
Par le deuxième paragraphe on renvoie aux règles qui ont été admises par la loi de 1842.
« Les officiers de tout grade des diverses catégories du service de santé jouiront de l'augmentation du cinquième de la pension allouée au grade correspondant dans l'armée, après dix années d'activité dans le même grade, conformément au prescrit de l'article premier de la loi du 25 février 1842. »
M. de Garcia. - En premier lieu, je n'avais pas bien saisi la portée de l'amendement de M. le ministre de la guerre, mais d'après les explications que rient de donner M. le ministre des finances, je suis sûr qu'on n'a pas présenté l'amendement sans l'avoir consulté en sa qualité de gardien et de fidèle et rigoureux gardien du trésor de l'Etat, qui, selon moi, ne permet aucune espèce de prodigalité. Les considérations développées à cet égard me sont un garant que l'amendement proposé n'a d'autre but que de mettre les officiers de santé sur le même pied que les autres officiers de l'armée. Or une disposition semblable a toutes mes sympathies, puisqu'elle tend à réaliser l'assimilation que beaucoup d'entre nous se sont proposée.
M. Vanden Eynde. - Je crois devoir faire une observation sur celle que vient de présenter M. le ministre des balances.
Je déclare d'abord que cette loi aura mon vote négatif, parce qu'à mes yeux elle consacre des faveurs pour certaines catégories de médecins militaires et particulièrement pour les médecins supérieurs ; je voterai encore contre, parce qu'on a conservé le paragraphe 6 de l'article 3, c'est-à-dire la survivance du médecin en chef ; c'est une chose inouïe qu'un médecin en chef en temps de paix et avec le peu de chance que nous avons d'avoir la guerre.
L'observation que je me proposais de faire en prenant la parole est celle-ci : M. le ministre dit que pour la pension on aura égard à la disposition de l'article premier ; mais dans l'article premier du projet du ministre, il n'est pas dit que les médecins seront pour tous les grades assimiles aux armes savantes. Si j'ai recours au tableau publié à la suite du rapport de la section centrale, je vois que les médecins militaires ne sont payés comme les officiers des armes savantes qu'à partir des capitaines de première classe, et que les capitaines de deuxième classe et au-dessous ne sont pas payés comme les officiers des armes savantes. J'en augure qu'on ne donnera pas à ces officiers inférieurs une pension égale à celle des officiers des armes savantes.
Je désire que, dans cette loi, on ne favorise pas les grades supérieurs, en négligeant les grades inférieurs. C'est ce qui résulte, selon moi, de la proposition de M. le ministre de la guerre.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Je demande à faire connaître à l'honorable préopinant que les pensions sont les mêmes dans l'armée pour toutes les armes. Lorsqu'il s'agit de là pension, il n'y a plus de distinction entre les armes savantes ou les autres ; les officiers d'artillerie, de génie ou d'infanterie comme les médecins militaires sont pensionnés sur le même pied, suivant leur grade ; la loi sur les pensions l'indique positivement.
M. Vanden Eynde. - Je remercie M. le ministre de l'explication qu'il vient de donner. L'amendement ayant été jeté en avant au moment où nous allions voter, il ne m'avait pas été possible de bien m'en rendre compte ; mais cela ne m'empêchera pas de voter contre la loi, les motifs que j'ai énoncés subsistant.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - Je retire l'article 17 du projet.
- L'amendement proposé par M. le ministre de la guerre, destiné à remplacer l'article 16- 17, est mis aux voix et adopté.
« Art. 18 (17 ancien). Les officiers de santé commissionnés, à admettre en temps de guerre, jouiront, pendant la durée de leur commission, de tous les avantages consacrés par la présente loi.
M. le ministre de la guerre (M. Prisse). - J'ai un changement de rédaction à proposer à cet article. Je propose de dire :
« Les officiers de santé à admettre en temps de guerre, en vertu de commission, jouiront, pendant la durée de leur commission, de tous les avantages consacrés par la présente loi. »
- Cet article, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.
L'article 18 est mis aux voix et adopté.
Les dispositions transitoires sont successivement mises aux voix et adoptées dans les termes suivants :
« Art. 19. Les officiers de santé, actuellement au service, qui ne réunissent pas les conditions d'entrée exigées par le premier paragraphe de l'article 3, en ce qui concerne les possession du double diplôme de docteur en médecine et en chirurgie, continueront à être soumis aux examens d'avancement prescrits par les arrêtés royaux des 8 mars 1836 et 20 novembre 1845. »
« Art. 20. La promotion de médecin de bataillon à la première classe de ce grade aura lieu, pour la première fois, moitié à l'ancienneté, moitié au choix pour les officiers de santé de cette catégorie qui auront servi au moins deux ans dans leur grade. »
« Art. 21. Par dérogation au paragraphe 4 de l'article 3, la condition de deux années de grade exigée des médecins de bataillon de première classe pour devenir médecin de régiment, ne sera pas applicable à ceux qui auront fait partie de la première promotion à ce grade en exécution de l'article 19. »
« Art. 22. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication. »
- La chambre ordonne l'impression des amendements adoptés et renvoie le second vote à une prochaine séance.
M. Delehaye. - Nous venons d'améliorer la position d'un grand nombre de fonctionnaires de l'Etat. C'est un motif qui doit engager la chambre à faire tous ses efforts pour améliorer aussi la position d'un grand nombre de consommateurs qui subiront les charges nouvelles. C'est pour atteindre ce but, et surtout en présence des mesures que vient de prendre l'Angleterre, que je crois devoir interpeller M. le ministre de l'intérieur.
Vous n'ignorez pas, messieurs, que l'Angleterre vient de modifier sa législation au sujet des droits de navigation et son tarif d'importation des céréales. Cette disposition, que les populations anglaises ont accueillie avec beaucoup de faveur, peut avoir pour nous un contrecoup très fâcheux. Si l'Angleterre attire sur son marché les denrées alimentaires, il est certain qu'elles renchériront sur tous les marchés de l'Europe.
Dans de telles circonstances, cependant, je me garderai de faire connaître ma pensée à l'égard des mesures qu’il importerait de prendre. Je craindrais, en agissant autrement, de répandre la terreur dans le pays. Je ne veux pas encourir un pareil reproche, quelque peu fondé qu'il serait. J'userai de la plus grande réserve, me réservant de faire peser plus tard, s'il y a lieu, la responsabilité sur le gouvernement au sujet de son inaction, ou de l'inefficacité des mesures qu'il aurait prises.
En attendant, qu'il me soit permis d'interpeller M. le ministre de l'intérieur sur ses intentions, relativement à la faculté, que lui laisse la loi sur les denrées alimentaires, d'autoriser la libre entrée du bétail.
J'avais proposé de consacrer cette mesure par la loi même. Le gouvernement a fait remarquer que c'était inutile,. attendu que le gouvernement ne manquerait pas de l'admettre s'il avait cette faculté, et si les circonstances lui en faisaient un devoir.
C'est par cette considération que la chambre a repoussé mon amendement, en laissant au gouvernement la faculté de prendre une mesure qui serait, pour les populations du pays, un grand soulagement. Mais il paraît que le gouvernement ne veut pas user de la latitude que lui donne la loi.
Il doit avoir, pour en user ainsi, des motifs puissants dont je désire qu'il nous rende compte. Il est en effet étrange qu'on néglige une mesure qui peut avoir pour effet de diminuer le prix d'une denrée alimentaire importante.
Le prix des céréales est arrivé à un taux excessif. Si le gouvernement n'y peut rien, il peut en quelque sorte compenser cette cherté, en faisant baisser le prix de la viande, au moyen de la suppression des droits.
J'engage donc le gouvernement à dissiper par cette mesure les craintes qui agitent le pays. Il aurait fait ainsi beaucoup dans l'intérêt des populations, dans l'intérêt de la tranquillité publique. Je me borne, pour le moment, à ces observations, me réservant de répondre au ministre si ses explications ne sont pas suffisantes.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je suis quelque peu surpris des attaques de l’honorable membre. Il doit se rappeler que la Belgique, en matière de denrées alimentaires, a en quelque sorte donné l'exemple, aux autres nations ; car elles les a devancées toutes, quant aux mesures de protection pour l'alimentation du peuple. C'est ainsi que nous avons (page 612) décrété la libre entrée des céréales, alors que pareille mesure n'avait pas été prise par d'autres Etats, que nous avons prohibé l'exportation des denrées alimentaires, alors que des mesures n'ont été prises que tout récemment en France quant à l'exportation des pommes de terre, et en Italie quant à certaines denrées. Mais cette mesure n'est pas admise en Angleterre, où les souffrances sont plus fortes que dans ce pays.
En ce qui concerne le bétail, vous avez vu que la France, quoique la disette se fasse sentir plus cruellement dans certains départements qu'en Belgique même, la chambre des députés n'a pas donné sa sanction à un amendement qui avait été proposé pour admettre la libre entrée du bétail.
M. Delehaye. - Quand cela ?
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Récemment. La commission l'a écarté, et, dans la discussion publique personne n'en a demandé l'adoption. On a pensé qu'en présence des pertes que l'agriculture a éprouvées la libre entrée du bétail lui porterait un notable préjudice.
Telle est aussi notre opinion.
Pour répondre aux observations de l'honorable préopinant, nous lui dirons que la libre entrée du bétail n'apporterait aucun soulagement aux maux des classes souffrantes. Elles ne peuvent aspirer, en ce moment, à manger de la viande ; elles n'en mangent pas, même dans les moments de prospérité. Ce serait un avantage pour les personnes qui peuvent manger de la viande à un prix plus élevé.
Mais ce serait une perte pour le cultivateur qui est obligé de soutenir les indigents. Dans les Flandres (l'honorable préopinant doit le savoir) les cultivateurs viennent, dans de grandes proportions, au secours des classes souffrantes. Avilissez le prix du bétail (si telles pouvaient être les conséquences de la mesure que réclame l'honorable membre) et vous mettrez le cultivateur dans l'impossibilité de faire les sacrifices qu'il fait aujourd'hui.
Je dis donc, messieurs, que la demande de l'honorable membre irait droit à l’encontre du but qu'il se propose d'atteindre ; et dans une semblable situation, il n'est pas dans l'intention du gouvernement de prononcer la libre entrée du bétail.
La chambre, d'ailleurs, ne perdra pas de vue que, par un traité conclu récemment avec la Hollande, il y a eu une réduction considérable du droit d'entrée sur le bétail ; cette réduction a été d'un quart pour le bétail gras, et de moitié pour le bétail maigre et jeune.
M. Delehaye. - Messieurs, je suis réellement étonné que le gouvernement me cite l'exemple de la France. Puisque M. le ministre de l'intérieur sait si bien ce qui se passe dans ce pays, comment se fait-il qu'il ne cherche pas à l'imiter ? Surtout dans les mesures destinées à prévenir les dangers qui nous menacent tout autant et plus que lui !
Savez-vous, messieurs, quelles sont les mesures que vient de prendre le gouvernement français ? Parcourez aujourd'hui les ports de la Hollande, et vous y verrez des agents nombreux achetant pour le gouvernement français toutes les céréales qui se trouvent encore dans ces ports. Moi-même, messieurs, j'ai vu dimanche dernier un de ces agents ayant mission d'acheter des céréales à tout prix ; il m'a assuré que tous les grains que l'on trouvait dans les fermes considérables qui se trouvent dans les polders, étaient enlevés pour compte du gouvernement français.
Si vous invoquez l'exemple de la France, pourquoi n'imitez-vous pas sa sollicitude pour les populations ?
Mais, dit-on, les pauvres ne mangent pas de la viande. Messieurs, je le sais très bien, et ce n'est pas pour la classe malheureuse que je réclame cette mesure. Mais ne s'aperçoit-on pas que si la viande diminue de prix pour ceux qui s'en nourrissent encore, ils auront d'autant plus de ressources à donner aux pauvres ? Aujourd'hui, messieurs, les charges qu'impose la charité publique sont tellement fortes, que chacun doit retrancher de son nécessaire. Ne voyons-nous pas dans la capitale des quêtes se faire pour les populations flamandes, même chez les personnes de la classe moyenne ? Et quand on en est là, c'est que les sources chez nous sont à la veille de se tarir. Messieurs, on est heureux de pouvoir prendre quelque chose du nécessaire pour venir au secours des populations flamandes. Eh bien ! permettez au moins d'avoir la viande à un prix raisonnable. Ce que l'on économisera sur cette denrée sera destiné à soulager le pauvre.
Mais, dit-on, le cultivateur belge n'a d'autre moyen de venir au secours des populations pauvres que dans la vente du bétail. Messieurs, ne sait-on pas que lors même qu'on permettrait la libre entrée du bétail, le prix de la viande sera toujours assez élevé pour que le cultivateur obtienne un prix rémunérateur suffisant de la vente de ses bestiaux ? Ne voyez-vous pas que ce qui est arrivé pour les céréales arrivera également pour le bétail ? Lorsque nous avons demandé la libre importation des céréales, vous avez dit aussi que les cultivateurs seraient ruinés.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Ce n'est pas nous qui avons dit cela.
M. Delehaye. - Vous avez dit à satiété que c’était dans l'intérêt de l'agriculture que vous ne vouliez pas de la libre importation des céréales. Or, aujourd'hui que nous avons la libre importation, quelle en est la conséquence ? Les prix se sont constamment élevés, et ceux des cultivateurs qui conservent encore aujourd'hui une partie de leurs récoltes, attendent qu'une nouvelle hausse vienne encore augmenter leurs bénéfices.
On m'a dit, messieurs, que je devais connaître ce qui se passe à la campagne. En effet, messieurs, j'ai suivi de près ce qui se passe dans nos communes ; je sais que dans les Flandres le cultivateur lui-même ne peut se livrer à l'élève du bétail, parce que le prix des céréales est trop élevé, et comment veut-on que l'élève du bétail se fasse avec profit alors que la nourriture destinée à le produire, n'existe pas ? Ne sait-on pas que les pommes de terre elles-mêmes commencent à faire défaut dans la plus grande partie de nos communes ? Je connais des cultivateurs qui sont obligés de se défaire de leur bétail, parce qu'ils doivent employer le reste de leurs pommes de terre à la nourriture des habitants de la ferme.
Qu'on n'oublie pas, messieurs, que nous sommes encore éloignés de plus de six mois de la récolte prochaine. Ne voyez-vous ais les dangers de la position où nous nous trouvons ? Et puisqu'on m'y provoque, je dirai toute ma pensée. Il est certain que si les prix des denrées se maintiennent au taux actuel, vous avez à redouter les plus grandes catastrophes. Ne voyez-vous pas que déjà de tous côtés on vous signale des individus morts de faim, des individus morts de froid et d'inanition ? S'il en faut davantage pour exciter la compassion du ministère, qu'il parcoure les communes des Flandres, et il verra que ce que nous lui disons ici n'est qu'un pâle reflet de la réalité.
Messieurs, si la chambre ne partage pas mon opinion, j'en éprouverai un vif regret. Mais j'ai rempli mon devoir. Je me présenterai avec confiance à mes commettants, en leur disant que si mes vues bienfaisantes n'ont pas obtenu de succès, c'est que la majorité ne l'a pas voulu.
M. Osy. - Messieurs, je crois aussi que nous aurions dû affranchir de tous droits tout ce qui est comestible, et je regrette que l'amendement qui a été proposé au commencement de la session, ait été rejeté.
Mais je désire entretenir M. le ministre de l'intérieur d'un autre objet.
M. le ministre nous parle beaucoup de ce qui s'est fait en France. Messieurs, je lui demanderai s'il a bien examiné la loi votée récemment par les chambres françaises. Cette loi, messieurs, est beaucoup plus libérale que celle que nous avons faite.
Le gouvernement français avait proposé la libre entrée des céréales jusqu'au 31 juillet. Mais la chambre a inséré dans la loi que tous les navires qui seront chargés au 1er juillet, soit aux Etats-Unis, soit à Odessa et dans les contrées les plus lointaines, seront admis libres de droit même après le 31 juillet.
J'engage beaucoup, messieurs, le gouvernement à voir si, avant la fin de notre session, il ne serait pas nécessaire de nous proposer une disposition dans le même sens. La loi que nous avons votée garantit la libre entrée des céréales en Belgique jusqu'au 1er octobre, et le gouvernement peut, par arrêté royal, la proroger jusqu'au 1er décembre. Mais le gouvernement ne peut faire, par arrêté royal, ce que je demande ; il ne peut déclarer que les navires chargés avant le 1er du mois à la fin duquel expire l'autorisation de libre entrée, pourront également être introduits sans payer aucun droit.
J'insiste donc pour que le gouvernement examine s'il n'y aurait pas lieu de vous proposer par une loi la mesure qui a été adoptée en France. Une semblable mesure, messieurs, permettrait à nos négociants de concourir avec l'étranger sur les grands marchés de grains, et de donner des ordres aux mois d'août et de septembre, dans le cas où l'on s'apercevrait que la récolte ne pourrait suffire. J'espère que la prochaine récolte sera bonne ; mais enfin il faut tout prévoir. Si malheureusement une partie de cette récolte venait encore à manquer, il est certain que, sans la disposition que je réclame, les Français auraient beaucoup d'avantages sur nous.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, je suis véritablement de nouveau étonné d'entendre citer la loi prise récemment en France, comme étant plus libérale que la nôtre ; attendu, dit-on, que d'après cette loi, les navires qui, au 31 juillet, se trouveront chargés de céréales, pourront encore arriver avec exemption du droit en France. Mais, messieurs, nous avons fait beaucoup mieux. Nous avons stipulé, d'après la loi, la libre entrée des céréales jusqu'au 1er octobre sans aucune espèce d'exception.
En fait de mesures qui ont été prises par le gouvernement belge pour les subsistances, je suis charmé d'avoir l'occasion de déclarer que dans un pays où l'on s'est beaucoup occupé de cela, et où le gouvernement a reçu les documents publiés par le gouvernement belge, ou a trouvé de très précieux renseignements dans ces documents, et on a dû reconnaître que c'était en Belgique que l'ensemble des mesures prises satisfaisait le mieux au but que l'on désirait atteindre.
Messieurs, je ne reviendrai plus sur ce que j'ai déjà dit relativement au bétail, car je devrais répéter toutes mes paroles ; l'honorable M. Delehaye n'en a détruit aucune. J'ai dit que les pauvres ne se nourrissent point de viande. J'ai dit que les fermiers n'avaient d'autre ressource que le prix du bétail, parce que si, d'un côté, le prix du blé s'était élevé, d'un autre côté ils avaient éprouvé de grandes pertes, une année, par le manque de la récolte des pommes de terre, l'année suivante, par le manque de la récolte du seigle. C'est dans la vente du bétail qu'ils trouvent leur principale ressource, no -seulement pour payer leurs fermages, mais encore pour venir au secours des pauvres, et il faut bien reconnaître que, notamment dans les Flandres, les cultivateurs font de grands sacrifices pour soulager la misère qui règne autour d'eux. Mettre les fermiers dans une position plus gênée, c'est nuire éminemment aux classes pauvres.
Il est vraiment déplorable, messieurs, de voir que d'une part on aggrave la situation du pays et que d'autre part on déverse le blâme sur une (page 613) administration qui, depuis deux ans, a fait preuve de plus de sollicitude pour les classes indigentes que l'administration des autres pays qui se trouvent dans une situation analogue.
Je dis, messieurs, que ces discussions ne peuvent avoir aucun effet utile. On ne persuadera à personne que le gouvernement n'a pas pris à cœur les intérêts des classes souffrantes ; on ne persuadera à personne que le moyen qu'on indique soit un moyen de sustension pour les classes souffrantes.
M. Mast de Vries. - Messieurs, j'entends, moi, laisser au gouvernement la responsabilité de ce qu'il fait et de ce qu'il ne fait pas pour le bétail. Je me défie et fortement de ces propositions qui sont jetées ainsi d'une manière incidente dans la chambre, et voici un exemple des dangers de ces propositions. Il n'y a pas longtemps que l'honorable membre qui vient de prendre la parole fit une proposition qui, si elle avait été adoptée, aurait maintenant pour le pays tous les malheureux effets dont l'honorable M. Delehaye vient de parler. Cet honorable membre proposa de laisser sortir les grains du pays ; le commerce des grains, disait-il, devait être entièrement libre, aussi bien à la sortie qu'à l'entrée.
Eh bien, messieurs, si cette malheureuse proposition que l'on prônait aussi comme extrêmement libérale, si cette proposition avait été admise, je le demande, où en serions-nous aujourd'hui ? L'honorable M. Delehaye vient de dire que les agents du gouvernement français viennent acheter les grains sur le littoral de la Hollande ; eh bien ! qu'eussent-ils fait si on pouvait exporter les céréales de la Belgique ? Mais nous serions affamés ! Dès aujourd'hui il n'y aurait plus de grains en Belgique !
Maintenant ceux que nous avons, nous pourrons au moins les consommer nous-mêmes. Il n'en serait pas de même si l'exportation était permise. En Angleterre et en France les céréales sont à un prix beaucoup plus élevé qu'en Belgique, et certainement si on pouvait les exporter on viendrait nous les enlever ; nous n'en aurions plus.
Puisqu'on a parlé de mesures propres à conserver les denrées alimentaires, je demanderai à M. le ministre des finances s'il ne serait pas possible, dans la position où nous nous trouvons, d'empêcher qu'on ne distille avec les pommes de terre.
Cela se fait aujourd'hui à cause de la cherté du seigle et c'est un véritable mal ; il est superflu de chercher à le démontrer, tout le monde reconnaît que c'est distiller avec la nourriture du pauvre.
Je prie M. le ministre des finances de bien vouloir examiner cette question.
M. Lebeau. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour engager mes honorables collègues à ne pas prolonger cette discussion, parce que je la regarde comme complétement inutile après la déclaration que vient de faire M. le ministre de l'intérieur. Il est évident, d'après la déclaration faite par M. le ministre de l'intérieur, qu'il tient comme une lettre morte la disposition qui a été insérée dans la loi sur les denrées alimentaires ; car, messieurs, si M. le ministre de l'intérieur ne tenait pas cette disposition pour une lettre morte, pour une disposition dénuée de toute force, en tant qu'elle devrait être appliquée par le ministère actuel, je ne comprendrais pas quand le temps pourrait être venu de la mettre à exécution. Il y a déjà quelques mois, interpellé sur la même question, M. le ministre de l'intérieur a dit que, si le prix de la viande ne subissait pas une réduction, s'il allait s'accroissant, ce serait alors le cas, pour le gouvernement, de prendre en sérieuse considération la faculté qui lui a été donnée par la législature d'abaisser les droits sur le bétail. Eh bien ! je dis que si nous ne sommes pas dans des circonstances où il faille faire usage de cette faculté, jamais ces circonstances ne se présenteront pour M. le ministre de l'intérieur.
Je crois donc que mes honorables amis doivent désespérer de faire changer d'avis sur ce point M. le ministre de l'intérieur ainsi que ses collègues, et je ne puis que les engager à déposer une proposition de loi. Je déclare que je m'associerai de tout cœur à cette proposition.
Et, messieurs, qu'on ne vienne pas encore reproduire l'argument tiré de l'octroi des villes. J'habite une localité qui n'est pas soumise à l'octroi, et cependant le prix de la viande y est très élevé.
Ce serait aussi une erreur de croire que les classes inférieures souffrent seules de la situation actuelle : les classes moyennes en souffrent aussi et en souffrent doublement parce qu'elle est à la fois frappée dans ses ressources que la situation actuelle a considérablement réduites, et dans ses dépenses qui ont augmenté dans une très forte proportion. La classe moyenne doit de plus faire sa part de la charité publique ; elle doit répondre aux appels qui lui sont faits de tous les côtés.
Je livre ces considérations à l'attention de la chambre, et je me borne à prier mes honorables collègues de ne plus perdre leur temps à vouloir engager le gouvernement à prendre les mesures qu'ils ont en vue. M. le ministre de l'intérieur ne verra jamais de circonstances qui soient de nature à faire abaisser les droits sur le bétail.
M. Rodenbach. - J'engage M. le ministre à employer tous les moyens pour que la vie soit le moins chère possible, à faire tout ce qui est en son pouvoir pour attirer les denrées alimentaires dans le pays. Quoique l'honorable M. Lebeau dise que les octrois n'ont aucune influence...
M. Lebeau. - Je n'ai pas dit : aucune.
M. Rodenbach. - Peu d'influence, si vous le voulez.
Moi, je dis et je crois qu'il est difficile de prouver le contraire ; je dis que, lorsqu'aux portes d'une ville on doit payer 10 ou 15 centimes pour une livre de viande, le prix de la viande doit être infiniment plus élevé dans les grandes villes. (Interruption.) Il peut y avoir une exception ; ainsi, dans les faubourgs, la viande de luxe, car je suppose que l'honorable membre, et nous tous, nous mangeons de la viande de luxe ; la viande de luxe peut être aussi chère ; mais la viande ordinaire, que la classe inférieure consomme, est moins chère dans les faubourgs que dans la capitale.
Je dirai encore qu'il est grand temps que les villes diminuent leurs droits d'octroi sur les comestibles. Croirait-on qu'il y a encore des villes en Belgique où un droit d'octroi pèse sur les farines ! Oui, à Anvers et à Gand le peuple, qui a tant de peine à payer le pain nécessaire à son existence, doit payer un droit d'octroi ! Il est du devoir des villes, comme il est du devoir du gouvernement, de faire tous leurs efforts pour diminuer, autant que possible, les droits qui pèsent sur les denrées alimentaires.
Je pourrais signaler d'autres anomalies ; ainsi, par exemple, le petit bétail, dans beaucoup de villes, paye à l'entrée un droit aussi considérable que le gros bétail. Le petit bétail sert à la consommation des classes inférieures de la société ; ainsi, les nécessiteux payent autant de droit, pour cette viande de qualité inférieure, que les classes aisées pour la viande de première qualité.
C'est là une iniquité. Il en est une foule d'autres qu'on pourrait faire disparaître.
J'engage fortement le gouvernement à user de tous les moyens d'influence qui sont à sa disposition, pour que les villes se décident enfin à proposer des diminutions importantes sur les droits d'octroi qui frappent les comestibles. On doit en convenir, la vie animale est excessivement chère ; dans nos Flandres, la misère est extrême ; on y meurt d'inanition ; je l'ai déjà dit, et je ne cesserai de le répéter.
Et à cette occasion, je dirai que j'ai vivement regretté que, malgré tous les sentiments de commisération qu'on a montrés pour les Flandres dans cette chambre, l'assemblée n'ait pas adopté dans le temps mon amendement qui tendait à augmenter de 500,000 francs le crédit demandé pour mesures relatives aux subsistances ; j'espère que sous peu on aura plus de générosité, et qu'on viendra plus efficacement au secours des malheureuses Flandres qu'on ne l'a fait jusqu'à présent.
M. le président. - Je rappelle aux orateurs que la chambre n'est pas saisie d'une proposition.
M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, on nous a dit que le système récemment adopté en France était plus favorable au consommateur que celui que nous avons adopté.
Je ferai remarquer qu'en France l'hectolitre de froment étranger paye un droit de douane de 25 centimes, ce qui est plus de 5 francs par mille kilogrammes, tandis qu'en Belgique il ne paye aucun droit depuis plus d'une année, et que 25 centimes de droit par hectolitre est le taux fixé par notre législation quand le prix de l'hectolitre de froment est coté à 16 francs.
En France, dit-on, on a prolongé la libre entrée jusqu'au 31 décembre, en Belgique seulement jusqu'au 1er octobre.
Si semblable proposition était faite soit par le gouvernement, soit par l'honorable M. Osy ou autres membres je l'appuierais de mon vote.
Messieurs, je dirai aussi quelques mots sur le bétail. On se plaint du prix fort élevé du bétail ou plutôt du prix de la viande. Il n'y a que la viande de luxe qui paye un droit aussi élevé, la viande ordinaire, savez-vous à quel prix on la vend en gros ? à 25 centimes la livre ancienne. Telle tête de bétail de l'espèce dont nous nous occupons, qui pesait 600 kilog., a été vendue, à ma connaissance, pour 300 francs.
Savez-vous à quelle classe vous iriez nuire, en autorisant l'entrée du bétail étranger ? C'est à ces malheureux cultivateurs qui sont obligés de vendre la vache unique qu'ils possèdent pour se procurer du pain.
Oui, sans doute, de nombreuses classes souffrent aujourd'hui, mais il n'en est aucune qui souffre autant que la classe des petits cultivateurs ; croyez-vous que dans les campagnes les petits cultivateurs puissent s'en tirer comme on s'en tire dans les villes, quand de malheureux mendiants viennent leur demander du secours, qu'ils puissent leur dire : Dieu vous assiste ! Il n'en est rien ; cette malheureuse population doit être nécessairement nourrie. Où est aujourd'hui la misère réelle ? Elle est dans les campagnes. Dans quelques communes des Flandres, elle est extrême ; mais dans le pays, partout où il n'y a pas d'industrie, il y a de la misère.
M. d’Elhoungne. - Messieurs, je n'ai qu'une observation à présenter sur ce débat. Je partage le vif regret de mes honorables amis en voyant que le ministère s'obstine à ne pas décréter la libre entrée du bétail, mesure véritablement urgente. Je ne pense pas, messieurs, que les droits trop élevés que notre système d'octroi fait peser sur la viande, comme sur le pain, soient un motif d'imposer de nouveaux droits à l'entrée du pays. Et à ce sujet je dirai aux honorables membres qui s'élèvent contre les droits d'octroi sur le pain on la viande, que je trouve comme eux que c'est là un impôt odieux, injuste, et, dans les circonstances actuelles, absolument injustifiable. Je déplore autant que les honorables membres l'existence d'un impôt pareil ; et je n’hésite pas à déclarer que si une proposition nous est faite, si une loi nous est proposée pour décréter l'abolition des droits d'octroi sur le pain et la viande, je les voterai avec empressement et je contribuerai de toutes mes forces à les faire adopter par la chambre.
Plusieurs membres. - Très bien !
M. le ministre des finances (M. Malou). - Messieurs, je suis chargé de (page 614) déposer plusieurs projets de crédits supplémentaires ; d'abord, un projet de crédit pour le département de la guerre pour l'exercice 1846, crédit s'élevant à 200,000 fr.
- Il est donné acte à M. le ministre des finances de la présentation de ce projet de loi qu sera imprimé et distribué, ainsi que l'exposé des motifs qui l'accompagne.
M. le ministre des finances (M. Malou). - J'ai l'honneur de déposer un projet de loi de crédits supplémentaires pour le département de l'intérieur, exercice 1846. Les divers crédits s'élèvent à 115,482 fr. 26 c.
M. le ministre des finances (M. Malou). - J'ai l'honneur de présenter un troisième projet concernant le département des affaires étrangères, exercice 1846. Le crédit demandé s'élève à 52,500 fr.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Un quatrième projet concernant le département de la justice, exercice 1842 à 1846. Les divers crédits s'élèvent à 804,000 fr. Ces crédits supplémentaires ont principalement pour objet le service des prisons ; une partie n'est pas une dépense réelle, mais une régularisation du service des ateliers dans les prisons.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Le dernier projet concerne le département des finances ; il a pour objet le service des pensions pendant l'exercice 1846 ; le crédit demandé s'élève à 57,000 fr.
- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ces divers projets, la chambre en ordonne l'impression et la distribution, ainsi que des motifs qui les accompagnent, et le renvoi à l'examen des sections centrales qui ont examiné les budgets des départements que ces projets de loi concernent.