(Moniteur belge n°76, du 16 mars 1844)
(Présidence de M. Liedts.)
M. Huveners procède à l’appel nominal à 1 heure.
M. de Renesse lit le procès-verbal de la séance précédente, la rédaction en est adoptée.
M. Huveners présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.
« Les conseils communaux des cantons d’Erezée demandent que la dépense à résulter de la construction d’une route de Salm-Châte à Weiswempach ne soit pas imputée sur les fonds votés en faveur du Luxembourg par la loi du 19 décembre 1842. »
Renvoi la commission des pétitions.
« Quelques distillateurs de la Flandre occidentale présentent des observations contre les droits d’octroi dont sont frappés les genièvres à l’entrée des villes, et demandent qu’il soit interdit aux administrations communales d’élever ces droits d’une manière exagérée. »
M. Rodenbach. - Messieurs, les distillateurs du plat pays de la Flandre occidentale signalent à la chambre combien leur industrie souffre par suite de l’élévation exagérée des droits d’octroi dont sont frappés les genièvres à l’entrée des villes.
Les pétitionnaires démontrent par des chiffres que l’économie de la loi de l’Etat sur les distilleries est dérangée par le système de perception des taxes municipales : Ils citent, entre autres, qu’à Anvers où le droit de fabrication est de 30 centimes, l’hectolitre de genièvre revient à 5 fr. et à 9 fr. à l’importation ; à Bruges, droit de fabrication, 5 fr. 50, droit d’importation, 9 fr. ; à Gand, droit de fabrication, 5 fr. 50 ; droit d’importation, 15 fr. ; à Tournay, fabrication, fr. 3 33, importation, 20 fr. ; et qu’outre cet immense droit différentiel dont ces diverses villes sont dotées, elles accordent encore une décharge au draw-back qui constitue une vraie prime d’importation, prime qui est d’autant plus nuisible aux distillateurs des campagnes, qu’elle leur enlève la consommation du plat pays, en ce qu’elle permet aux distillateurs des villes d’y livrer leur genièvre à un prix inférieur au leur. Enfin, les distillateurs du plat pays prétendent que cet état de choses est un droit qui consacre un acte que notre pacte fondamental ne permet point. Cette pétition, messieurs, me paraît très importante et je la crois digne d’être examinée par la législature pour ce motif. Je demande son impression dans le Moniteur ainsi qu’un prompt rapport de la part de la commission des pétitions.
M. Desmet. - A cette occasion, je demanderai à M. le ministre de l’intérieur s’il se propose de nous présenter dans peu de temps la loi sur les octrois des villes.
Puisque j’ai la parole, je me permettrai de dire deux mots en faveur des distillateurs. Je prie le gouvernement de vouloir bien retirer l’arrêté sur le transit du bétail ; ce qu’a dit l’honorable M. Delehaye dans une séance précédente est bien vrai : les distillateurs n’osent pas acheter du bétail en ce moment pour l’engraisser.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, je ne suis pas encore à même de déterminer l’époque où le projet de loi sur les octrois municipaux pourra être présenté. Lors de la discussion de mon budget, je n’ai émis qu’une idée, je me suis fait une question, il est vrai, publiquement : Ne faudrait-il pas sur les octrois municipaux une loi déterminant certaines bases, fixant certaines limites ? Je rassemble, en ce moment, les matériaux nécessaires pour étudier la question. Ces matériaux consistent dans le recueil de tous les tarifs d’octroi et des règlements municipaux. On ne s’est pas assez occupé des règlements municipaux. (C’est très vrai.) Ce recueil est à peu près achevé, et il est probable que je le ferai imprimer.
- La chambre consultée décide que la pétition des distillateurs de la Flandre occidentale sera renvoyée à la commission des pétitions, avec demande d’un prompt rapport, et qu’elle sera, en outre, insérée au Moniteur.
« Plusieurs cultivateurs du canton de Vervicq prient la chambre de mettre à son ordre du jour le projet de loi sur les tabacs. »
M. de Haerne. - Messieurs, à l’occasion d’une pétition du même genre qui a été analysée dans une séance précédente, j’ai déjà eu l’honneur de faire observer à la chambre que cet objet est de la dernière urgence, à cause des intérêts qui y sont engagés. Les cultivateurs doivent semer au mois de mars, et plutôt dans la première quinzaine que dans la seconde. Tout retard qui serait apporté à la discussion de la loi sur les tabacs serait funeste à l’agriculture.
Les fermiers, signataires de la pétition, se plaignent qu’eu égard à l’effet qu’a produit la présentation de la loi sur la culture et la fabrication, ils éprouvent une grande difficulté à se défaire de la récolte précédente. Les prix baissent, et par conséquent les cultivateurs sont moins tentés de semer de nouveau.
Ils ne savent s’ils doivent se livrer à la culture du tabac, ou remplacer le tabac par un autre produit ; il est donc urgent qu’une décision intervienne. L’on sait que la culture du tabac est la culture essentielle dans une partie de l’arrondissement de Courtray et de celui d’Ypres ; cette culture entre dans la rotation des produits, elle est nécessaire à l’assolement, et, par conséquent, on ne peut remplacer ce produit par un autre, sans s’exposer à des pertes.
Je demande donc que la section centrale soit invitée à faire son rapport le plus tôt possible sur le projet de loi. J’ai appris que quelques membres de la section centrale sont en ce moment absents pour des motifs très légitimes. Je demande qu’il soit pourvu à leur remplacement. Je ne puis assez le répéter, l’objet est de la dernière urgence : il s’agit de l’intérêt d’un grand nombre de fermiers, dont quelques-uns seraient gravement lésés, si une décision n’était pas prise immédiatement ; ils seraient dans l’impossibilité de payer leur bail.
M. Rodenbach. - Je ne pense pas que les pétitionnaires aient des motifs de s’effrayer. Rien ne les empêche d’ensemencer. Il n’entre sans doute dans la pensée de personne de donner un effet rétroactif à la loi ; ce n’est pas dans nos mœurs administratives. Loin donc de jeter l’alarme, loin de décourager les cultivateurs, il est de notre devoir de leur donner de la confiance, de les encourager.
M. de Haerne. - Il y a une observation que n’a pas saisie l’honorable M. Rodenbach : c’est la liaison qui existe entre la culture et la fabrication. Si la fabrication est frappée, la culture doit souffrir aussi. Par conséquent, jusqu’à ce qu’on connaisse le sort que la loi fera à la fabrication, on ne peut plus se rassurer sur la culture. En ce moment, les prix sont en baisse, comme je viens de le dire, les fermiers ne peuvent se défaire des produits de la récolte de l’année dernière. Jusqu’à ce que cet état de choses change, ils n’osent semer.
D’après la nouvelle que je viens de recevoir, les Français importent actuellement des tabacs sur votre territoire ; ils font des approvisionnements à Herzeaux, à Mouscron, à Reckem. C’est là un fait qui va se prolonger, si l’on ne prend pas une prompte mesure. Il faut donc, si l’on ne veut exposer le cultivateur à des pertes considérables, que la question soit tranchée au plus tôt et pour la culture et pour la fabrication.
M. le président. - La section centrale du projet de loi sur les tabacs ne s’est pas réunie pendant deux jours, en l’absence du rapporteur qui est retenu chez lui par la maladie de son frère. Il a paru dès lors inutile de convoquer la section centrale pour prendre des résolutions.
M. de Haerne. - Ne pourrait-on pas pourvoir au remplacement du membre absent ?
M. Rodenbach. - Je ne puis assez le répéter, la loi ne doit pas avoir d’effet rétroactif. Les cultivateurs peuvent en toute confiance planter le tabac. Il n’y a donc pas aussi grand péril en la demeure.
- Le renvoi de la pétition à la section centrale est ordonné.
La chambre consulté décide ensuite qu’il n’y a pas lieu à pour voir au remplacement du membre absent de la section centrale.
« Plusieurs fabricants de Gand réclament des mesures de protection pour l’industrie cotonnière. »
M. Desmaisières. - Je demanderai que cette pétition soit insérée au Moniteur et déposée sur le bureau pendant la discussion de l’enquête commerciale et industrielle.
M. Rodenbach. - N’y aurait-il pas lieu à la renvoyer à la commission d’industrie ?
M. Delehaye. - C’est inutile ; la commission d’industrie a déjà statué à cet égard.
- Le dépôt de la pétition sur le bureau pendant la discussion de l’enquête est ordonné.
La pétition sera, en outre, insérée au Moniteur.
« Les candidats en droit de l’université de Liége demandent que la disposition transitoire de l’art. 68 de la loi sur l’enseignement supérieur soit prorogée jusqu’à la fin de la session de 1846. »
« Même demande des étudiants en droit de l’université de Louvain. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur le jury universitaire.
« Le collège des bourgmestre et échevins de Dorinne demandent une interprétation l’art. 23 de la loi du 23 septembre 1842, quant à la charge qui incombe à la commune en faveur de l’instruction primaire. »
M. Pirson. - L’interprétation que demandent les pétitionnaires intéresse toutes les communes du royaume ; je propose à la chambre d’inviter la commission des pétitions à faire un prompt rapport.
- Cette proposition est adoptée.
M. Fallon, retenu à Namur par la maladie de sa belle-fille et de ses enfants, demande un congé.
- Accordé.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - J’ai l’honneur de proposer à la chambre de fixer à jeudi prochain la discussion de la loi sur le jury universitaire. Le rapport sera distribué ce soir. On a bien voulu m’en envoyer un exemplaire, mais la distribution n’a pas encore eu lieu. Je tiens en main la pétition des candidats en droit des universités de Liège et de Louvain, qui demandent que l’art. 68 de la loi actuelle soit prorogé jusqu’à la fin de la première session de 1846. Je pense qu’on ferait bien d’insérer ces pétitions au Moniteur.
M. d’Elhoungne. - Les pétitionnaires sont-ils majeurs ?
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Qu’on insère la pétition sans insérer les noms. Au reste, il y au moins un des signataires qui soit majeur, cela suffit.
M. Delehaye. - Et si la loi des pensions n’est pas terminée ?
M. Malou. - Il n’est pas probable que la loi des pensions soit finie jeudi. En 1841, on n’a pas trouvé d’inconvénient à interrompre plusieurs fois la loi sur les pensions, pour s’occuper de lois urgentes. Le sénat doit être assemblé en ce moment. La loi sur le jury est urgente ; si on n’interrompait pas la discussion de la loi sur les pensions, il serait possible qu’on ne pût pas voter la loi sur le jury en temps utile. Je regrette même qu’on ne puisse pas fixer un jour plus rapproché pour cette discussion. La distribution du rapport aura lieu ce soir, ne pourrait-on pas fixer la discussion à lundi ou mardi ?
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je désire que la discussion n’ait pas lieu avant jeudi. J’attends des renseignements dont j’ai besoin et que je recevrai lundi. La distribution du rapport aura lieu ce soir ; cette distribution est la publicité pour nous, mais la grande publicité est l’insertion du rapport au Moniteur. J’espère que cette insertion pourra avoir lieu demain. C’est à la chambre à décider s’il y a lieu de fixer définitivement à jeudi la discussion de la loi sur le jury, ou de subordonner cette fixation au vote de la loi sur les pensions.
M. Devaux. - Je crois que la discussion de la loi sur les pensions sera très avancée jeudi ; s’il ne s’en fallait que d’un jour ou deux pour la terminer, je pense qu’il serait très fâcheux de remettre cette discussion, car toute la discussion que vous avez maintenant, s’il y a un grand intervalle, reviendra aux dispositions générales, car vous aurez pu remarquer que l’honorable rapporteur et d’autres membres ont dit souvent, à propos de questions soulevées : Cette discussion reviendra aux dispositions générales. Ces dispositions générales se rapportent en effet, d’une manière très intime, à ce que nous discutons dans ce moment. Si vous mettiez un long intervalle entre la suspension et la reprise des délibérations, vous vous exposeriez à renouveler toute la discussion. Ce sera la troisième fois que vous discuterez cette question. Je pense qu’on pourrait ne pas préjuger si la loi sur les pensions sera renvoyée, car il n’y aurait aucun inconvénient à retarder d’un jour ou deux la discussion de la loi sur le jury. Le sénat a assez de travail pour quelque temps, et il pourrait au reste attendre un jour ou deux avant de s’ajourner. L’inconvénient serait moins grand que celui de recommencer toute la discussion à laquelle nous nous livrons en ce moment ; car, comme je l’ai fait observer, les mêmes questions se présentent au commencement et à la fin de la loi.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je crois qu’on peut fixer à jeudi la discussion de la loi sur le jury ; la loi sur les pensions sera probablement terminée ; si elle ne l’était pas, on pourrait voir mercredi s’il y a inconvénient à maintenir la fixation à jeudi. Peut-être cela ne présentera-t-il pas d’inconvénient, car il se peut que si la loi sur les pensions n’est pas achevée, une seule question spéciale reste à résoudre, par exemple, celle des pensions des professeurs ; il n’y aurait pas d’inconvénient à remettre cette question spéciale qui ne tient pas à l’ensemble de la loi sur les pensions. Fixons donc à jeudi la discussion de la loi sur le jury ; nous serons libres mercredi de décider si cette fixation est définitive ou non.
- La chambre fixe à jeudi la discussion de la loi sur le jury.
M. Malou, rapporteur. - La chambre a renvoyé à la section centrale diverses pétitions et deux amendements relatifs à la loi des pensions. La section centrale s’en est occupée ce matin. Je rendrai compte de ses délibérations, dans l’ordre des articles du projet.
Une pétition vous a été adressée par le sieur Huyghe, commissaire de police à Ostende. Il demande que les commissaires de police soient pensionnés par l’Etat. La section centrale, pense qu’il n’y a pas lieu d’accueillir cette demande. Les commissaires de police sont des agents communaux rétribués par la commune. Les admettre à la pension, serait une exception à l’art 1er qui a été adopté à la séance d’hier et cette exception ne me paraît pas admissible.
Une autre pétition, adressée à la chambre par les fonctionnaires et employés civils du ministère de la guerre, se rattache à l’art. 6 du projet. D’après cet article, on ne compterait les services de ces fonctionnaires et employés qu’à partir de l’âge de 21 ans. Il faut remarquer que sous le régime de l’arrêté de 1814, cette condition n’était pas exigée. Ils prétendent que l’exiger à l’avenir serait porter atteinte à un droit acquis. La section centrale n’a pu partager cette opinion. Sans doute, la loi qui intervient sur les pensions doit respecter les droits acquis antérieurement à son émanation, mais il s’agit de savoir où est la limite du droit acquis en matière de pension.
Si la législation actuelle devait être prise à l’avenir pour règle, quant à la pension et aux diverses conditions d’admissibilité, en ce qui concerne les fonctionnaires en exercice, la loi que nous faisons ne pourrait recevoir son application que dans 30 ans. La loi nouvelle dispose pour l’avenir, en ce sens qu’elle règle comment seront rémunérés les services qui seront reconnus comme titres d’admissibilité à la pension, soit que ces services soient antérieurs à la loi, soit qu’ils doivent être rendus à l’avenir.
On ne porte pas atteinte aux droits acquis en exigeant que les services admissibles désormais ne comptent qu’à partir de 21 ans. S’il en est autrement pour les employés du département des finances, c’est à cause des retenues qu’ils ont subies depuis 1822. La section centrale estime, en conséquence, qu’il y a lieu de maintenir l’art. 6 du projet ; elle propose le dépôt de la pétition sur le bureau pendant la discussion.
- Ce dépôt est ordonné.
M. Jadot. - L’honorable rapporteur de la section centrale vient de vous dire qu’on ne pouvait maintenir la législation existante que jusqu’à l’époque de la promulgation de la loi nouvelle. Je n’ai pas sous les yeux le projet de loi qui a été présenté en France, je ne puis pas vous donner le texte de la disposition qu’il contient, mais il porte que les lois actuellement existantes continueront d’être appliquées à tous les employés en fonctions et que la loi proposée ne recevra exécution qu’à l’égard des employés qui seront nommés à dater de sa promulgation.
M. Malou, rapporteur. - A la fin de la séance d’hier, M. le ministre des finances a proposé à l’article que nous allons discuter tout à l’heure, un amendement ainsi conçu :
« Les surnuméraires dûment commissionnés ne sont pas soumis à cette dernière condition. Il en est de même des seconds secrétaires et des attachés de légation, pour le temps pendant lequel ils seront employés soit à l’étranger, soit à l’intérieur, près du département des affaires étrangères. »
La question soulevée par cet amendement est celle de savoir si les deuxièmes secrétaires de légation et les attachés peuvent être assimilés aux surnuméraires. La section centrale n’a pas pensé que cette assimilation fût possible. On compte les services rendus par les surnuméraires, parce qu’ils remplissent des fonctions continues qui, à leur défaut, devraient être remplies par des employés rétribués.
Les attachés de légation et les secrétaires dé légation sont en quelque sorte des surnuméraires diplomatiques ; cependant leurs fonctions ne sont pas de même nature. Quant aux employés du département des affaires étrangères, ceux qui ont réellement le caractère de surnuméraires, rentrent dans le principe du projet. A leur égard, une disposition serait donc inutile. La section centrale, à l’unanimité des membres présents, s’est prononcée contre l’amendement de M. le ministre des finances.
Les professeurs civils de l’école militaire demandent à être assimilés, quant au règlement de la pension, aux professeurs des universités. Cette pétition se rattache à l’art. 21 du projet du gouvernement. L’examen, qui en a été fait par la section centrale a donné lieu à un partage de voix : deux membres ont admis l’assimilation, les deux autres ne l’ont pas admise. Il a paru aux premiers que les études étaient de la même nature, que la loi de 1838 exigeait les mêmes connaissances, qu’elle supposait même que, si l’école militaire avait été établie dans une ville où il existait une université de l’Etat, les cours auraient pu être communs. Ces membres ont d’ailleurs fait remarquer que si les fonctions étaient de même nature, quant à leur caractère scientifique, il y avait désavantage pour les professeurs de l’école militaire, en ce sens qu’ils n’ont pas des minervales comme les professeurs des universités. Les deux membres qui n’ont pas admis l’assimilation, ont surtout insisté sur cette considération que les professeurs des universités ne sont placés dans une position exceptionnelle qu’à raison même des minervales qui sont un supplément réel de traitement et qui n’entrent pas en compte pour règle de la pension.
La section centrale propose le dépôt de la pétition sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
Au sujet de l’art. 21, j’ai encore à rendre compte, messieurs, de l’examen qu’a fait la section centrale des amendements présentés par MM. les ministres des finances et de l’intérieur.
La section centrale a changé le projet du gouvernement, sous deux rapports ; elle a divisé la disposition de l’art. 21 en quatre articles distincts, le premier relatif à la pension de l’éméritat, le second, aux pensions pour cause d’infirmités, le troisième, à l’admissibilité d’autres services, enfin le quatrième, aux maximum. Le nouvel amendement, est copié en quelque sorte, sauf une légère modification, sur l’article du projet primitif. Or, il est un point sur lequel la section centrale a insiste et dont l’amendement n’a pas tenu compte, c’est que la disposition relative aux maximum doit dans tous les cas être étendue à toutes les pensions des professeurs des universités. Pour l’éméritat, d’après le projet du gouvernement et d’après le nouvel amendement, le maximum absolu de 6,000 fr. est posé, mais il n’est point établi de maximum pour les pensions accordées aux professeurs, par suite d’infirmités. Cependant, une limite est nécessaire, d’après l’esprit général du projet. Les professeurs dont le traitement serait de 9,000 fr. auraient, après 25 années de service, déjà droit à une pension de plus de 6,600 fr. Si l’on veut rester fidèle aux principes du projet, il faut que le maximum soit rendu commun aux pensions accordées du chef de l’éméritat et aux pensions accordées aux professeurs atteints d’infirmités.
L’amendement maintient, comme base du traitement moyen, les trois dernières années. C’est un point secondaire et qui sera résolu déjà en principe, lorsque nous arriverons à l’art. 21. La section centrale a proposé d’établir ce traitement sur les cinq dernières années. Il n’y a pas d’autre différence, quant aux pensions accordées pour cause d’infirmités, mais il y en a quant aux pensions d’éméritat.
Le projet primitif n’accordait pas l’éméritat, à raison de l’âge seulement, et c’était là une modification de l’arrêté de 1816. L’amendement au contraire permet de déclarer émérite le professeur âgé de 70 ans, quel que soit le nombre de ses années de service, pourvu que ces années ne soient pas inférieures à 25 ans, ou après 30 années dans l’enseignement académique, quel que soit son âge.
La section centrale s’est demandé d’abord comment il était possible de distinguer ainsi entre les services admissibles aux termes de la loi et les services académiques. Probablement telle n’a pas été l’intention du gouvernement, mais il résulterait du paragraphe premier de l’amendement qu’un professeur à l’âge de 70 ans pourrait être déclaré émérite, c’est-à-dire avoir le traitement entier, bien que n’ayant rendu des services dans l’enseignement académique que pendant un petit nombre d’années. Ce serait une étrange anomalie, car l’éméritat est attaché, comme faveur spéciale, à de longs services rendus dans l’enseignement académique.
La section centrale n’a pas pensé qu’il fallût modifier les dispositions qu’elle vous a proposées. Déjà dans son rapport elle a indiqué les motifs pour lesquels, d’accord sur ce point avec les propositions primitives du gouvernement, elle n’admettait pas l’éméritat à raison de l’âge seulement
Supposons, messieurs, qu’un professeur âgé de 70 ans n’ait consacré qu’un certain nombre d’années à l’enseignement académique ; déjà ces années pourront lui être comptées à raison d’un 35ème, et les autres services à raison d’un 60ème. Cette faveur et les autres qui sont consacrées par le projet, ont paru suffisantes. La section centrale maintient, en conséquence, les articles 16 et suivants de son projet.
Il me reste, messieurs, à rendre compte de l’examen que la section centrale a fait d’une pétition de MM. les bourgmestre et échevins de la ville d’Anvers demandant que les pensions des professeurs de l’académie royale soient mises à la charge de l’Etat.
L’académie d’Anvers porte le titre d’Académie royale. Il paraît, d’après les indications fournies, que la moitié de ses dépenses est couverte par un subside de l’Etat, et l’autre moitié par un subside de la ville d’Anvers. Les professeurs sont nommés par le gouvernement et il paraît même que l’administration communale reste étrangère à ces nominations. Dans ces circonstances, messieurs, et d’après la discussion même qui a eu lieu dans la séance d’hier, au sujet de l’art. 1er, il paraît évident qu’une exception au principe général de cet article devrait être, pour déclarer les professeurs de l’académie d’Anvers admissibles à la pension à la charge de l’Etat.
Cette exception n’a cependant pas été admise par la section centrale, et déjà les motifs vous en ont été indiqués.
Les exceptions de cette espèce, par leur nombre, par leur importance, compromettraient entièrement le principe de la loi ; si on les considère séparément, l’équité peut les justifier, mais réunies, elles vicient en quelque sorte toute la loi des pensions. La section centrale se borne donc à proposer le dépôt de la pétition sur le bureau, pendant la discussion du projet de loi.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, la réclamation dont vient de parler l’honorable rapporteur de la section centrale, est aussi parvenue au gouvernement. Le collège des bourgmestre et échevins de la ville d’Anvers nous a signalé la lacune qui existe dans le projet, en ce qui concerne l’académie royale des beaux-arts.
D’un autre côté, le collège des bourgmestre et échevins de la ville de Liége a signalé une autre lacune, en ce qui concerne le conservatoire de musique de cette ville.
Nous avons pensé, messieurs, qu’il était juste de comprendre les professeurs de l’Académie royale des beaux-arts, ainsi que ceux des conservatoires de musique dans la catégorie des membres du corps enseignant ayant des titres à la pension. Nous nous sommes donc concertés, M. le ministre de l’intérieur et moi, pour former une nouvelle rédaction des articles 23 et 24 du projet de loi.
Cette rédaction est ainsi conçue :
« Art. 23. Les professeurs nommés par le gouvernement et dont le traitement est payé par le trésor public ; les directeurs et professeurs des conservatoires royaux de musique de Bruxelles et de Liége, ceux de l’école royale de gravure de Bruxelles, ainsi que les directeurs et professeurs des écoles primaires supérieures, seront admis à la pension, et leur pension sera liquidée conformément au chapitre premier de la présente loi. »
« Art. 24. Le directeur et les professeurs de l’académie royale des beaux-arts d’Anvers seront admis à la pension, et cette pension sera liquidée conformément au chapitre premier de la présente loi ; la moitié en sera à la charge du trésor public, et l’autre moitié à la charge de la commune.
« Les professeurs dont le traitement n’est pas payé par le trésor public, mais qui sont nommés par le gouvernement ou dont la nomination est soumise à son agréation, seront admis à la pension, et leur pension sera liquidée conformément au chapitre premier de la présente loi ; le tiers de leur pension sera à la charge du trésor public.
« Les pensions des instituteurs communaux primaires continueront à être régies par les dispositions prises ou à prendre en vertu de l’art. 27 de la loi du 23 septembre 1842. »
- Ces amendements seront imprimés et distribués.
M. le président. - Nous en revenons à la discussion des articles du projet de loi.
M. le président. - La chambre en est restée à l’art. 6, ainsi conçu :
« Art. 6. Sont susceptibles de conférer des droits à la pension :
« A. Les services civils ou judiciaires, rendus depuis l’âge de 21 ans, par suite de nominations faites en exécution des lois ou émanées du gouvernement et rétribuées par le trésor public. Le surnumérariat dûment commissionné n’est pas soumis à cette dernière condition. »
La section centrale propose de rédiger ainsi le § B :
« B. Les services militaires effectifs, à partir de l’âge de 16 ans révolus. »
M. le ministre des finances a proposé, par amendement, de terminer l’art. 6 par la disposition suivante :
« Les surnuméraires dûment commissionnés ne sont pas soumis à cette dernière condition. Il en est de même des seconds secrétaires et des attachés de légation, pour le temps pendant lequel ils seront employés soit à l’étranger, soit à l’intérieur près du département des affaires étrangères. »
M. le ministre des affaires étrangères (M. Goblet d’Alviella) - Messieurs, je suis très étonné que l’on n’ait pas reconnu la justice et la convenance de l’amendement présenté par mon collègue M. le ministre des finances en faveur des seconds secrétaires et des attachés de légation. Non seulement ces fonctionnaires ne sont pas rétribués, mais encore ils sont forcés, dans la position qu’ils occupent, à des dépenses extraordinaires.
Pour ces fonctionnaires, les années de désintéressement sont fort nombreuses : on est ordinairement plusieurs années attaché de légation avant d’obtenir le rang de secrétaire de 2ème classe, et quand on y est parvenu, ou n’obtient pas encore d’appointements. Pour être rétribué, il faut être secrétaire de 1ère classe, et on ne le peut devenir qu’après avoir occupé la 2ème classe pendant trois années, Il est évident d’après cela, messieurs, que tout homme qui entrera dans la diplomatie comme attaché atteindra désormais sa trentième année avant d’obtenir aucun traitement.
En présence de tels désavantages, il serait de toute injustice qu’arrivés à l’âge de 65 ans, après avoir traverse les vicissitudes d’une carrière de 30 années de service actif, il ne leur fût pas tenu compte des années où ils ont montre le plus de désintéressement, le plus d’abnégation personnelle. Je ne puis donc croire que si la question est bien envisagée, on puisse repousser la proposition qui vous est faite par le gouvernement.
M. Donny. - Messieurs, l’art. 6, au § A, pose en principe qu’aucune pension ne sera accordée en vertu de la loi en discussion, que pour autant que la personne à pensionner ait été rétribuée par le trésor public. Voilà le principe général. Mais en posant ce principe, on a senti qu’il était trop absolu, qu’il fallait nécessairement y apporter des exceptions, et dans le projet de loi de même on en a fait une première en faveur des surnuméraires dûment commissionnés. Cette exception, messieurs, me paraît extrêmement rationnelle, et je l’adopte sans aucune difficulté.
Dans la séance de hier, M. le ministre des finances vous a proposé une seconde exception, en faveur des seconds secrétaires et des attachés de légation pour le temps pendant lequel ils sont employés, soit à l’étranger, soit à l’intérieur, auprès du département des affaires étrangères.
Il me semble, messieurs, que cette seconde exception est aussi rationnelle que la première. Je dirai même qu’il me semble qu’elle est mieux fondée encore que l’autre.
L’exception proposée par M. le ministre s’applique à deux cas : au cas où l’attaché se trouve employé au département des affaires étrangères et au cas où il se trouve à l’étranger.
Quant au premier cas, je ne puis pas, je l’avoue, voir la moindre différence entre un attaché diplomatique travaillant gratuitement dans les bureaux de M. le ministre des affaires étrangères et un surnuméraire travaillant également dans les mêmes bureaux, sans recevoir de salaire. Il n’y a pas, selon moi, la moindre différence entra les deux positions, et si l’on a accepté l’exception pour les surnuméraires ordinaires, il faut, me semble-t-il, pour être conséquent, l’accepter aussi pour les attachés qui se trouvent dans la même position.
Quant aux attachés qui se trouvent à l’étranger, mais, messieurs, ils rendent dans les chancelleries à l’étranger les mêmes services qu’ils rendraient au département des affaires étrangères, s’ils se trouvaient dans le pays. Il y a de plus en leur faveur, qu’ils sont obligés, par la position qu’ils ont à l’étranger, de faire beaucoup plus de dépenses, beaucoup plus de sacrifices que s’ils se trouvaient simples surnuméraires.
J’accepte donc avec empressement la seconde exception qui vous est proposée.
Mais il en est une troisième qui me paraît également de nature à devoir être adopté par la chambre, c’est celle que j’aurai l’honneur de proposer en faveur des commissaires de police.
Les commissaires de police, messieurs, sont des fonctionnaires qui rendent des services d’une part aux communes, et d’autre part au ministère public ; ils se trouvent à la fois à la disposition des régences et des officiers du parquet ; il y a plus, messieurs, ils sont appelés à remplir les fonctions du ministère public devant les tribunaux de simple police. Ce sont donc bien réellement des fonctionnaires de l’Etat, au moins pour une partie de leurs attributions.
D’après cela, l’équité et la raison sembleraient exiger que leur traitement fût payé en partie par les communes et en partie par le trésor. Messieurs, il n’en est pas ainsi, non pas par suite de quelque considération d’équité ou de bonne administration, mais simplement parce qu’on a voulu maintenir ce qui existe depuis longtemps.
Aujourd’hui, l’Etat a donc dans les commissaires de police des fonctionnaires qu’il ne rétribue pas, mais qui sont payés pour lui par les communes. Je pense, messieurs, que l’Etat devrait tenir compte de cet état de choses, et que tout en laissant les traitements de commissaires de police à la charge des communes, il devrait se charger de leur pension. De cette manière, les charges provenant de ces fonctionnaires seraient partagées entre l’Etat et les communes, et ce ne serait pas le premier, qui serait lésé dans cette espèce de partage.
Je proposerai donc, par sous-amendement, à l’amendement qu’a déposé, dans la séance d’hier, M. le ministre des finances, de rédiger ainsi la dernière partie de l’art. 6 :
« Ne sont pas soumis à ces dernières conditions ; 1° les commissaires de police ; 2° les surnuméraires dûment commissionnés ; 3° les deuxièmes secrétaires et les attachés de légation pour le temps pendant lequel ils sont employés, soit à l’étranger, soit à l’intérieur près du département des affaires étrangères. »
- L’amendement de M. Donny est appuyé.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, j’ai déjà indiqué les motifs pour lesquels la section centrale n’avait pas admis l’assimilation proposée entre le surnumérariat et la position d’attaché ou de second secrétaire de légation.
On compte au surnumérariat quelques années de stage administratif, parce que ce stage impose des devoirs continus, et de tous les jours, qu’il s’agit enfin de véritables fonctions. Mais nous savons tous quels peuvent être les devoirs journaliers d’un second secrétaire de légation, d’un attaché de légation. C’est un stage diplomatique, si l’on veut, mais ce stage diplomatique, l’expérience est là pour le prouver, n’est pas bien pénible.
Les années sont fort nombreuses, nous dit M. le ministre des affaires étrangères ; messieurs, c’est une raison pour ne pas les compter. Vous admettez quelques années de surnumérariat à celui qui va ensuite consacrer au pays presque toute son existence. Mais qu’une personne ait été pendant dix ou douze ans diplomate-amateur, c’est-à-dire, attaché ou second secrétaire de légation, qu’ensuite pendant quelques années elle ait un traitement qui sera nécessairement assez élevé, elle serait en droit de réclamer une très forte pension.
Il y a une différence notable entre le surnuméraire obligé à un service régulier et le deuxième secrétaire ou l’attaché de légation, et il n’y a aucune injustice à ne pas accorder à ces derniers les mêmes faveurs qu’au premier.
Quant aux commissaires de police, il me paraît évident que l’exception proposée n’est nullement admissible.
Le commissaire de police est un fonctionnaire communal, rétribué par la commune. On ne peut déroger au principe qui a été voté hier, sans ouvrir la porte à des réclamations incessantes de tous les fonctionnaires mixtes. Le commissaire de police a des devoirs de plusieurs ordres ; il rend, dans le sens le plus étendu, des services à l’Etat.
Mais, messieurs, cette distinction que nous faisons sans cesse entre l’Etat, les provinces et les communes, n’est autre chose qu’une sorte de fusion administrative. L’employé provincial, l’employé communal, dans le sens le plus étendu, rend des services publics. Mais la question que soulève la loi des pensions est celle de savoir si des services rendus à l’Etat d’une manière indirecte, c’est-à-dire, à la province, à la commune, doivent être rémunérés par l’Etat.
L’on pourrait même considérer l’amendement de l’honorable M. Donny comme déjà rejeté par l’adoption de l’art. 1er.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, il existe dans la diplomatie belge, comme dans toutes les diplomaties, des secrétaires et des attaches de légation. Les secrétaires de légation sont ordinairement partagés en deux classes. En Belgique, il n’y a de traitements affectés qu’à la première classe ; les seconds secrétaires de légation ne sont pas rétribués, et il en est de même des attachés de légation.
C’est là, messieurs, une position tout exceptionnelle dans laquelle on a placé, par des motifs d’économie, les seconds secrétaires et les attachés de légation. Dans les autres diplomaties les seconds secrétaires de légation ont des traitements, et de plus, en France, par exemple, on fait une distinction entre les attachés payés et les attachés non payés.
Vous voyez donc, messieurs, que dans la diplomatie belge on a déjà placé dans une position plus défavorable les seconds secrétaires de légation et les attachés indistinctement ; les uns et les autres ne jouissent d’aucun traitement. La question qui se présente maintenant est véritablement celle-ci : Faut-il rendre cette position plus défavorable encore ; faut-il (je vous prie, messieurs, de bien apprécier ces faits), faut-il, parce que, par des motifs d’économie, on a placé les seconds secrétaires de légation et les attachés indistinctement dans une position plus défavorable, faut-il rendre cette position plus mauvaise encore en ne comptant pas comme années de service le temps pendant lequel ils ont rempli gratuitement des fonctions utiles ?
On suppose que ces employés ne font rien, qu’ils ne sont adjoints au corps diplomatique que par une espèce de luxe ; c’est encore là commettre une erreur, c’est même être injuste ; si les seconds secrétaires de légation, si les attachés ne sont point payés, ce n’est pas parce qu’ils ne rendent point de services, c’est uniquement par des motifs d’économie ; dans beaucoup de résidences, ce sont eux qui remplissent les fonctions de secrétaires ; prenez le budget les affaires étrangères, et vous verrez qu’il est peu de secrétaires de légation qui reçoivent un traitement. (Interruption.)
Je vois, messieurs, que les faits ne sont pas assez connus : je crois devoir insister. On croit généralement qu’il s’agit de donner une extension au principe de la loi. C’est une erreur : dans la diplomatie belge, il n’est alloué de traitement qu’aux premiers secrétaires de légation, il n’y a point de traitement pour les seconds secrétaires, ni pour les attachés ; dans les autres pays, au contraire, il y a des traitements pour les seconds secrétaires et pour ce qu’on appelle la première classe des attachés, c’est pour des motifs d’économie que le gouvernement ne vous demande point de traitement, ni pour les seconds secrétaires, ni pour les attachés. Voilà donc une position défavorable faite à ces membres du corps diplomatique belge ; faut-il maintenant aller plus loin ; et, parce que ces fonctionnaires, par exception en Belgique, ne reçoivent point de traitement, faut-il encore ne pas compter pour la liquidation de la pension qui pourra leur être due plus tard, ne pas compter les années pendant lesquelles ils auront été secrétaires non payés, attachés non payés ?
Je dois supposer, messieurs, que c’est par un véritable oubli que ces membres du corps diplomatique n’ont pas été compris dans le premier projet de loi sur les pensions.
Nous posons en fait, messieurs, que ces membres du corps diplomatique belge sont nécessaires, que dans beaucoup de résidences, ils remplissent les fonctions de secrétaire auxiliaire collaborateur du ministre ou du chargé d’affaires, que ce n’est pas du tout par une espèce de luxe qu’ils sont attachés au corps diplomatique, uniquement pour faire je ne sais quelle escorte au ministre ou au chargé d’affaires. Ces employés sont nécessaires, j’en appelle à tous ceux qui ont appartenu au corps diplomatique belge ; ils sont nécessaires, mais ils sont placés dans une position tout à fait défavorable ; on les prive de tout traitement aussi longtemps qu’ils sont seulement seconds secrétaires ou attachés.
M. Orts. - Messieurs, à la fin de la séance d’hier, j’ai demandé la parole pour présenter à l’art. 6 un amendement qui rentre dans le sens de la deuxième des pétitions dont l’honorable rapporteur nous a entretenus. L’art. 6 dit que pour les fonctionnaires civils ou de l’ordre judiciaire, le temps de service ne sera compté qu’à partir de 21 ans, tandis que pour les militaires, le service effectif est compté depuis l’âge de 16 ans. Je me suis demandé, messieurs, s’il ne fallait pas éviter d’enlever une espèce de droit acquis aux fonctionnaires qui seront en exercice au moment de la promulgation de la loi et qui ont rempli des fonctions même rétribuées avant leur 21ème année. Pour ce qui concerne l’ordre judiciaire, je crois que la chose est impossible, car il faut être majeur pour remplir des fonctions judiciaires ; pour les militaires, on exige l’âge de 16 ans, et je pense qu’avant 16 ans, il n’est guère de militaires qui aient rendu des services ; un de mes honorables collègues, que j’ai consulté à cet égard, m’a dit qu’il est même très rare qu’on en rende à cet âge ; ma sollicitude ne porte donc que sur des fonctionnaires qui n’appartiennent ni à l’ordre judiciaire, ni à l’armée. La classe en est nombreuse ; cependant l’exception que je propose d’établir n’aura pas un effet bien large, car elle s’appliquera seulement aux fonctionnaires qui auraient eu le bonheur d’être placés avant l’âge de 21 ans, là où la loi n’exige pas la majorité.
Il se présente ici une question de rétroactivité, de droits acquis à enlever, et cette question est très délicate, Enlève-t-on un droit acquis à celui qui est entré en fonctions avant l’âge de 21 ans et sous le régime de l’arrêté-loi de 1814 ? D’après cet arrêté-loi, les services rendus avant la majorité étaient comptés pour le règlement de la pension ; les fonctionnaires qui ont rendu des services avant l’âge de 21 ans sons l’empire de l’arrêté-loi de 1814 ont donc une espèce de droit à voir compter ces services lorsqu’il s’agira de liquider leur pension.
Je ferai observer, messieurs, que ces premières années sont souvent les plus dures pour les fonctionnaires ; alors d’une part, les administrations exigent d’eux, et avec raison, plus d’assiduité, plus de zèle ; d’un autre côté, les employés stimulés par un sentiment d’émulation, par l’espoir de parvenir, se donnent plus de peine. Il me semble donc, messieurs, que ces premières années devraient entrer en ligne de compte. Je n’invoquerai pas le droit acquis, car on le conteste formellement. M. le rapporteur nous dit que le taux des pensions, les conditions d’âge, que tout peut être changé par la loi ; on a même discuté ici, pendant deux jours, la question de savoir si l’on ne supprimerait pas toutes les pensions.
Si, donc dans la rigueur des principes, il n’est pas exact de dire qu’on enlèverait un droit acquis aux fonctionnaires dont il s’agit, pas plus qu’on n’enlève un droit acquis à ceux qui devaient être pensionnés à 60 ans d’âge et qui ne le seront plus qu’à 65 ans, je dis qu’il y a au moins des motifs d’équité pour admettre une exception en faveur des fonctionnaires dont il s’agit. D’un autre côté, les résultats financiers de cette exception seraient très peu importants.
D’après ces considérations, je proposerai de placer après le litt. a, un paragraphe additionnel ainsi conçu :
« Néanmoins les fonctionnaires ou employés en exercice au moment de la promulgation de la loi, pourront compter leurs services pour la pension à partir de leur entrée en fonctions. »
Puisque j’ai la parole, messieurs, je dirai un mot sur l’exception que veut introduire notre honorable collègue, M. Donny, en faveur des commissaires de police. Je ne puis aucunement appuyer cette proposition, car si elle devait être admise, il y aurait des raisons bien plus puissantes à faire valoir pour une autre classe de fonctionnaires qui, sous le double rapport administratif et judiciaire, sont placés sur la même ligne que les commissaires de police ; ce sont tous les bourgmestres et tous les échevins du royaume ; c’est ainsi, messieurs, que nous arriverions aux conséquences que vous avez déjà appréciées.
Je dirai deux mots seulement pour prouver que les bourgmestres et les échevins auraient plus de droits à être pensionnés que les commissaires de police.
Vous savez, messieurs, que les bourgmestres et les échevins remplissent, dans certaines circonstances, les fonctions d’officiers de police judiciaire. La police est exercée par les bourgmestres et échevins et par les commissaires de police. Les bourgmestres et échevins et les commissaires de police exercent aussi une partie des attributions judiciaires. En matière répressive, les contraventions de simple police doivent, dans le cercle d’une certaine compétence, être jugées par le juge de paix, et dans ce cas le commissaire de police remplit les fonctions de ministère public ; mais il est certaines catégories de contraventions déterminées par le code d’instruction criminelle, qui ne peuvent être jugées par le juge de paix que concurremment avec le bourgmestre, et dans ce cas ce sont les échevins qui remplissent les fonctions de ministère public.
Vous voyez donc, messieurs, qu’il est impossible de faire une exception pour les commissaires de police, sans en faire une au même instant pour tous les bourgmestres et échevins du royaume. Maintenant, que l’on soit sans sollicitude à l’égard de la plupart de ces fonctionnaires ; l’indemnité accordée aux bourgmestres et échevins est payée par les communes ; ils ne sont donc pas rétribués par l’Etat. D’un autre côté, il existe dans beaucoup de grandes villes des caisses de pension auxquelles prennent part les commissaires de police et leurs adjoints. Cela n’est pas général, aussi je ne donne pas cette raison comme péremptoire.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, ce que j’avais craint se réalise ; la brèche est ouverte, toute la loi va peut-être y passer ; il ne s’agissait d’abord que de quelques surnuméraires diplomatiques, si l’on veut bien me pardonner l’expression ; maintenant, il s’agit de la classe beaucoup plus nombreuse des commissaires de police ; je croyais un instant qu’il allait être question des bourgmestres et échevins, peut-être de toute la population de la Belgique, avant que la chambre arrivât à la fin de l’art. 6.
Messieurs, je pense remplir un devoir en résistant à toutes ces exceptions.
La première, celle qui concerne les agents diplomatiques, je l’ai déjà combattue par plusieurs motifs qui n’ont point été réfutés et sur lesquels je ne reviendrai pas. Que vous a dit, en effet, M. le ministre de l’intérieur ? Que c’est par une raison d’économie qu’on ne rétribue pas ces fonctionnaires, que leur position étant déjà défavorable, il ne faut pas créer une seconde défaveur.
Mais, messieurs, si ces fonctionnaires sont nécessaires dans la diplomatie, il faut les rétribuer, et s’ils sont inutiles, il ne faut pas leur conférer des titres à la pension.
Veuillez remarquer la relation qui existe, d’une part, entre le principe qu’on rémunère seulement les services rétribués, et, d’autre part, les conséquences financières de la loi.
Lorsque vous déclarez admissibles à la pension des fonctionnaires rétribués, comme vous êtes appelés à voter des crédits, vous avez en mains chaque année un moyen de contrôle, pour qu’on ne crée pas, en dehors des nécessités reconnues, des droits à la pension. Il en est autrement pour ces surnuméraires diplomatiques.
J’admets que jusqu’à présent le désir d’être second secrétaire ou attaché de légation, d’avoir un titre diplomatique dans une capitale de l’Europe, n’est pas très développé ; mais s’il se développait, où serait la limite aux nominations du gouvernement ? S’il n’y a pas de limite, si le gouvernement peut créer un grand nombre de ces agents secondaires investis d’un simple titre honorifique, qui peut être fort flatteur pour eux, mais fort inutile au pays, ne crée-t-on pas une charge pour le trésor, une charge parfaitement injustifiable ?
Il m’est impossible, sans doute, de définir en quoi consistent ces fonctions. J’admets que dans une ou deux légations il peut y avoir un travail réel pour le deuxième secrétaire, ou pour un attaché ; mais ceux qui passeront par ces postes, qui rempliront convenablement ces devoirs, non par nominaux, mais réels, conquerront promptement un titre à l’obtention d’un traitement ; ce traitement sera d’emblée très élevé, la pension qui est relative au traitement sera également considérable. Ainsi, pour ceux qui rendent des services, le motif d’exception disparaît, et quant aux autres l’exception est inadmissible.
Les commissaires de police, les bourgmestres, tous les autres fonctionnaires mixtes ne peuvent avoir des droits à la charge de l’Etat. Déjà, dans la séance d’hier, j’ai fait remarquer que leur refuser des droits à la charge de l’Etat, ce n’est pas les livrer au besoin dans leurs vieux jours ; ainsi, dans les grandes villes, comme l’a dit l’honorable M. Orts, il existe des caisses de pensions, ou des règlements sur la pension.
Ne peut-on pas faire pour les commissaires de police ce qu’on a fait dans une province, dans plusieurs provinces peut-être pour les secrétaires communaux ? On peut établir des retenues, des caisses de secours ou de pension. Le principe que je défends consiste seulement à ne pas rémunérer à la charge du trésor public les fonctionnaires qui rendent indirectement des services à l’Etat ; tous les autres moyens de rémunération, analogues à la position de ces fonctionnaires, aux services qu’ils rendent, continuent à exister ; le gouvernement pourra seconder l’action des autorités communales et provinciales ; il pourra même, au besoin, donner l’impulsion.
L’honorable M. Orts, en assimilant, quant aux attributions, les bourgmestres et les échevins aux commissaires de police, a commis une erreur que je crois devoir signaler. Les articles du code d’instruction criminelle que l’honorable membre a cités ont été reconnus contraires à la constitution ; il y avait là, comme l’a dit un arrêt du 29 mars 1833, confusion du pouvoir administratif et du pouvoir judiciaire. Aussi, un bourgmestre qui s’était érigé en juge, a-t-il vu sa justice renversée par arrêt de la cour de cassation.
M. Dumortier. - Messieurs, je ne puis partager l’opinion de l’honorable préopinant, en ce qui concerne les seconds secrétaires de légation. Il confond les seconds secrétaires de légation avec les attachés. Les attachés sont de véritables surnuméraires, mais les seconds secrétaires sont des agents réels ; ils exercent des fonctions, seulement ils ne sont pas rétribués sur le trésor public.
Maintenant, on nous dit : Si ces agents sont nécessaires, qu’on les rétribue. Pour éviter un mal, on veut en créer un second, cela ne me paraît pas logique. Dès l’instant qu’il est reconnu que c’est seulement par économie que les seconds secrétaires n’ont pas été rétribués jusqu’ici et puisqu’ils rendent des services réels, on ne peut contester leurs droits à la pension ; mais il me paraît singulier que, pour établir ces droits, qui me paraissent incontestables, on veuille créer une nouvelle charge pour le trésor public, on veuille faire rétribuer les seconds secrétaires.
Je dis, messieurs, que les seconds secrétaires rendent des services réels, il faut ignorer complètement l’organisation de nos légations, pour prétendre le contraire. Les seconds secrétaires sont employés du matin au soir, surtout dans les capitales avec lesquelles la Belgique a de fréquents rapports. Il y a plus, lorsque le ministre plénipotentiaire est absent, le premier secrétaire devient chef de légation, et le second secrétaire remplit les fonctions de premier secrétaire. Cette organisation est indispensable. Il faut être juste envers tout le monde, et, dans l’espèce, ce serait aller trop loin que de ne pas adopter l’amendement de M. le ministre des affaires étrangères.
En est-il de même des commissaires de police ? Je ne le pense pas :
Les commissaires de police sont des agents exclusivement locaux rétribués par la localité, et dès lors l’Etat ne doit pas intervenir dans les pensions accordées à ces fonctionnaires.
L’honorable M. Orts, par son amendement, veut qu’aux fonctionnaires, actuellement en fonctions, on compte les années de surnumérariat et toutes les années antérieures à l’âge de 21 ans.
Je ferai remarquer à l’honorable membre qu’il y a une disproportion considérable dans la situation des fonctionnaires publics, selon qu’ils dépendent de tel ou tel ministère. Ainsi les fonctionnaires de l’administration des finances entrent souvent comme surnuméraires à l’âge de 20, de 18 ans, et même à un âge inférieur à 18 ans. Quand ils ont atteint l’âge de 46 ans ou de 48 ans, ils ont accompli leurs 30 années de service, et alors avec un certificat de maladie, on se fait accorder une pension à charge du trésor, tandis que les conditions sont bien différentes, par exemple, dans l’ordre judiciaire où l’on ne peut entrer qu’après avoir parfait ses études, obtenu le diplôme de docteur en droit et fait un stage pendant quelques années. Lorsque nous nous sommes occupés de la loi des pensions en 1841, j’ai fait remarquer cette énorme différence à l’assemblée, et c’est pour égaliser en quelque sorte les positions qu’on a admis qu’il fallait avoir 21 ans révolus pour avoir droit à la pension.
J’insiste donc pour que la chambre adopte purement et simplement le § A du projet du gouvernement, auquel la section centrale s’est ralliée.
Mais j’ai un doute, relativement au litt. B ; il s’agit, dans ce paragraphe, de compter, dans le calcul de la pension, les services militaires, à partir de l’âge de 16 ans.
Si nous faisions la loi des pensions militaires, je concevrais qu’on fît compter les services à partir de l’âge de 16 ans, mais nous faisons ici la loi des pensions civiles. Il résulterait de la disposition, si elle était adoptée, qu’à 46 ans un fonctionnaire qui aurait passé ses premières années sous les drapeaux aurait atteint ses 30 années de service et pourrait obtenir sa pension au moyen d’un certificat de complaisance, comme cela est arrivé souvent. Je vous le demande, est-ce là une bonne chose ? Je voudrais savoir sur quoi repose cette idée de faire remonter jusqu’à l’âge de 16 ans les services militaires comptés pour la pension civile. Je le répète, s’il s’agissait de pensions militaires, je serais le premier à proposer une disposition semblable, mais il s’agit de pensions civiles, et je ne vois pas pourquoi on dérogerait au principe admis, de ne compter les services civils qu’à partir de l’âge de 21 ans.
Je désirerais avoir une explication sur ce point ; si on ne m’en donnait pas une satisfaisante, je voterais contre le 2ème § de l’article qui me paraît détruire le principe posé dans la loi. Il me paraît que ce principe, de ne compter les services qu’à partir de 21 ans, n’est que le rétablissement du principe d’égalité qui doit régler la loi des pensions. Mais dit-on, les employés ont des droits acquis. Je ne reconnais pas de droits acquis en matière de pensions. Les lois de pensions n’établissent pas des droits, mais des faveurs. Si vous n’examinez que la question du droit, le fonctionnaire, comme le particulier, doit faire des économies pour vivre plus tard. La loi des pensions est une loi de faveur et de générosité, Quels sont ces droits acquis qu’on invoque des droits de surnumérariat qui reposaient sur un abus, le plus souvent ? Il est peu de surnuméraires admis avant l’âge de 21 ans ; ceux qu’on admet avant cet âge sont plutôt admis par faveur qu’en vertu d’un droit. La loi pourra créer un droit quand elle sera votée, mais il n’est pas de droits acquis qu’on puisse lui opposer.
M. d’Hoffschmidt. - Messieurs, il m’est impossible aussi d’admettre l’opinion de l’honorable rapporteur de la section centrale sur l’amendement de M. le ministre des affaires étrangères. Et effet, il admet l’exception pour les surnuméraires du ministère des finances, mais il ne l’admet pas pour les deuxièmes secrétaires de légation et pour les attachés. Cependant, quoique je l’aie écouté attentivement, il m’a été impossible de saisir la différence qui existait entre les fonctions des premiers et celles des seconds, entre le droit des uns, à l’exclusion des autres, à l’exception qu’on réclame. Le surnuméraire des finances travaille dans les bureaux de ce département, les deuxièmes secrétaires et les attachés, s’ils sont à l’intérieur, travaillent dans les bureaux du département des affaires étrangères, et s’ils sont à l’extérieur dans les bureaux soit du ministre plénipotentiaire soit du chargé d’affaires ; et s’il y a une différence, elle me semble toute en faveur de ces derniers, car ils doivent faire les dépenses considérables, abandonner leur patrie et quelquefois traverser les mers et courir ainsi des dangers auxquels ne sont pas exposés les surnuméraires des autres départements. La différence est donc en faveur des fonctionnaires qu’a en vue l’amendement de M. le ministre des affaires étrangères.
On a dit que si ces fonctionnaires sont utiles, il faut les rétribuer, que s’ils sont inutiles, il n’est pas nécessaire de leur accorder des pensions. Cet argument peut s’appliquer aux surnuméraires, tout aussi bien qu’aux deuxièmes secrétaires et attachés de légation ; il n’y a pas la moindre différence. Ainsi, si vous voulez être justes, il faut ou supprimer l’exception pour tout le monde, pour les surnuméraires comme pour les autres ; ou si vous admettez cette exception en faveur de ces derniers, il faut l’admettre aussi en faveur des deuxièmes secrétaires de légation ; sans cela, vous aurez deux poids et deux mesures.
Quant aux commissaires de police, je crois que la proposition de l’honorable M. Donny n’a pas grande chance d’être adoptée ; elle serait en contradiction avec l’opinion qui a semblé dominer hier En effet, hier un honorable membre avait parlé d’employés qui mériteraient aussi d’être admis à la pension, des employés des commissariats d’arrondissement.
On n’a pas adopté la proposition à la section centrale, et elle n’a pas trouvé plus de faveur dans la chambre, parce que ces employés ne sont pas rétribués directement sur le trésor public. Cette condition manque également aux commissaires de police ; pourquoi ferait-on une exception en faveur de ces derniers, quand on refuse de la faire en faveur d’employés qui sont dans des conditions plus avantageuses ? En effet, les employés des commissariats d’arrondissement ne peuvent attendre de pension ni de l’Etat, ni de la province, ni de la commune, tandis que les commissaires de police peuvent en espérer une de l’administration communale. Je crois que, quant aux commissaires de police, si vous admettiez l’exception qu’on vous propose, vous devriez l’étendre à beaucoup de fonctionnaires, et déjà on vous cité les bourgmestres et les échevins. Quant aux deuxièmes secrétaires de légation, nous n’avons pas à redouter qu’il en résulte une grande charge pour le trésor. Je crois donc que nous devons adopter l’amendement qui les concerne et nous borner à cela.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Goblet d’Alviella) - Je demande la parole pour répondre quelques mots à l’honorable rapporteur de la section centrale. Il vous a dit que si les attachés et les seconds secrétaires étaient nécessaires et travaillaient, il fallait les payer. On sait bien quelles difficultés éprouverait le gouvernement s’il demandait une augmentation d’allocation pour les missions à l’étranger.
On sait que déjà, bien qu’il ait réduit au strict nécessaire les allocations pour les légations, combien il a de peine, chaque année, pour les obtenir.
Il ne faut pas perdre de vue que, dans une nation comme la nôtre, qui ne compte pas de longues années d’existence, les fonctionnaires ne sont pas échelonnés sur tous les âges de la vie. Le personnel de notre diplomatie est, si je puis m’exprimer ainsi, jeune de la tête à la queue. Nécessairement il ne s’y fait pas de vide, comme il s’en fait naturellement dans les administrations, depuis longtemps organisées, des vieilles nations.
Voilà, messieurs, ce qui rend impossible de donner à certains sujets très capables la position rétribuée qu’ils méritent. Si je voulais apporter ici des noms propres, je pourrais citer des employés qui, depuis six à sept ans, remplissent avec zèle et intelligence les fonctions qui leur sont confiées et à qui il ne m’a pas été permis de donner le moindre traitement,
Je pense que ces considérations pourront vous déterminer à adopter l’amendement.
M. de Saegher. - Messieurs, l’art. 1er du projet de loi que nous avons adopté hier exige, comme condition d’admissibilité à la pension, que les fonctionnaires soient rétribués par le trésor public. Faut-il dévier de cette règle générale ? Faut-il poser une exception quelconque à la règle ? Je dois dire que ma première opinion était, d’après tout ce que j’avais entendu dans cette enceinte, qu’il ne fallait dévier, sous aucun rapport, de la règle générale que nous avions posée ; qu’ainsi on ne devait pas même admettre d’exception pour les surnuméraires. Cependant, d’après ce que je viens d’entendre dans cette séance, ma conviction se trouve un peu ébranlée.
Les honorables préopinants ont fait valoir, en faveur des deuxièmes secrétaires de légation, des arguments qui, je dois le reconnaître, ne sont pas sans importance. Mais s’il en est ainsi, il est une autre classe de fonctionnaires qui se trouvent absolument dans les mêmes conditions et auxquels tous les arguments qu’on a fait valoir en faveur des deuxièmes secrétaires peuvent s’appliquer. Ce sont les juges suppléants des tribunaux de première instance. Ces magistrats exercent des fonctions non rétribuées, et cependant il en est parmi eux qui, dans certains tribunaux, notamment dans les tribunaux de troisième et quatrième classe, siègent presque aussi souvent que les juges titulaires eux-mêmes.
Pour ma part, j’en connais un qui, depuis 12 ans, siège presque constamment et qui n’a pas pu être placé, parce qu’à cause de certaines circonstances ; il ne pouvait pas quitter la localité qu’il habitait. Eh bien, j’applique à ces magistrats les arguments qu’a fait valoir M. le ministre de l’intérieur. Faut-il, parce que, par raison d’économie, on n’a pas jugé à propos de rétribuer ces magistrats, faut-il rendre leur position plus défavorable ? Est-il possible de rencontrer une position qui mérite davantage d’être l’objet d’une exception que celle des juges suppléants ? Je ne le pense pas ; car remarquez que, pour être nommé juge suppléant, il faut avoir atteint l’âge de 25 ans accomplis. Presque toujours ceux qui sollicitent les places de juges suppléants se destinent à la magistrature. C’est une espèce de noviciat. Pendant cinq ou six ans ils exercent les fonctions de juges suppléants, dans l’espoir de devenir juges effectifs. Ils ont donc le plus souvent atteint l’âge de 30 à 35 ans avant de pouvoir obtenir une place de juge titulaire. Faut-il maintenant priver ces magistrats de la légère faveur qu’on peut leur accorder en comptant les années de noviciat pour la pension de retraite, afin de subvenir, dans certains cas, à leurs besoins dans leurs vieux jours ?
Je pense, moi, que quand même l’exception proposée pour les secrétaires de légation qui, pour la plupart, appartiennent à la classe riche de la société, ne serait pas admise, il faudrait dans tous les cas admettre l’exception pour les juges suppléants près les tribunaux de première instance.
En conséquence, je propose de sons-amender l’amendement de M. le ministre des finances en y ajoutant : « et des juges suppléants près les tribunaux de première instance. »
M. de Muelenaere. - Lorsqu’on a discuté l’art. 1er, j’étais d’avis qu’il y aurait justice et équité à récompenser par une pension les services rendus a la société. Mais s’il y a justice de la part de l’Etat, il ne faut pas qu’il y ait prodigalité dans la collation des pensions. Les pensions ne doivent s’accorder que pour des services réels.
Je ne dirai rien de l’amendement proposé par l’honorable M. Donny. Je crois que nous sommes tous d’accord que cet amendement ne peut être admis.
Quant aux surnuméraires des administrations des finances, cette question a été examinée par la section centrale. Quant à moi, je le déclare, je ne connais pas assez les règlements sur cette matière pour exprimer une opinion a cet égard.
Je me bornerai donc à vous présenter quelques observations sur l’amendement présenté par M. le ministre des finances, d’après lequel on compterait, pour la pension aux attachés et aux seconds secrétaires tout le temps qu’ils ont passé en cette qualité.
D’abord, si l’on entre dans la voie de compter aux fonctionnaires, pour la liquidation de leurs pensions, leurs services gratuits, je ne sais où ce système nous conduira ; car, pour être juste, il faudra récompenser tous les services quelconques.
Evidemment, quelque importants que puissent être les services des attachés, il y en a d’une plus haute importance pour la société. On vous a cité tout à l’heure les juges suppléants. Je suis d’avis que les juges suppléants ont au moins autant de droits que tout autre fonctionnaire non rétribué. D’abord les inconvénients qui se produisent ailleurs ne peuvent se produire à l’égard des juges suppléants. Le nombre des juges suppléants est déterminé par la loi. On sait combien il peut y en avoir dans chaque ville où siège un tribunal de première instance. Leurs fonctions sont réelles ; ils doivent résider dans la ville où réside le tribunal.
Quant aux autres fonctions gratuites, vous savez avec quelle facilité on procède à ces nominations. Ce sont des faveurs qu’on sollicite du gouvernement comme elles s’accordent facilement, comme elles ne coûtent rien au trésor, le gouvernement ne s’en montre pas avare. C’est une objection réelle contre l’amendement. Dans l’état actuel des choses, l’amendement ne peut être admis tel qu’il est rédigé. Mais je crois qu’il y a une distinction à faire, que l’on ne peut compter les années de service des attachés. La première raison, c’est que le nombre des attaches est illimité, que le gouvernement peut en nommer tant qu’il veut.
Indépendamment de cela, on nous dit qu’on ne leur compterait que le temps passé en pays étranger, et leur temps de surnumérariat au département des affaires étrangères. Quant au temps passé à l’étranger, il serait extrêmement difficile de le déterminer. Vous savez qu’un attaché se rend à son poste, revient en Belgique, où il passe 2 ou 3 ans, après quoi il a une autre destination. Il faudrait, chaque fois qu’il quitte son poste, le constater par une pièce officielle et authentique et constater l’époque à laquelle il y retourne ; cela me paraît impossible, d’autant plus que ce sont des faits qu’il faudra constater dans 25 ou 30 ans. Il y a des attaches nommés en 1831 qui sont encore en fonctions, ils auraient ainsi à compter 13 ou 14 ans pour leur pension. C’est impossible dans la pratique, il en résulterait les plus graves inconvénients.
Je reconnais cependant que, d’après ce qu’a dit M. le ministre des affaires étrangères, les seconds secrétaires se trouvent aujourd’hui dans une position difficile. Ils ne sont nommés qu’après des examens ; le nombre en est plus ou moins limité ; dès lors, je crois qu’il y aurait possibilité de leur compter, pour la liquidation de leur pension, le temps qu’ils passent en cette qualité ; mais cela à deux conditions essentielles, d’abord que le nombre des seconds secrétaires fût limite par un règlement d’administration générale ; ensuite qu’on ne leur comptât qu’un certain nombre d’années, soit 3, 4 ou 5 ans, afin d’éviter qu’un second secrétaire qui, après avoir quitté son poste et passé plusieurs années en Belgique, retourne à un autre poste et puisse compter toutes les années écoulées depuis sa nomination primitive.
Je dis donc que si l’amendement était proposé pour les seconds secrétaires seulement, je serais disposé à l’adopter.
M. Malou, rapporteur. - Il m’a été très difficile de comprendre quelle influence peut avoir sur le résultat de la discussion le point de savoir si le corps diplomatique est entièrement jeune de la tête aux pieds.
La question est exclusivement de savoir s’il faut comprendre dans les années qui comptent pour la pension des services qui, d’après l’explication de l’honorable M. de Muelenaere, ne sont pas des services effectifs, continuels, comme le sont, d’après les explications qui nous ont été données, les services rendus par les surnuméraires dont s’occupe l’art. 6 de la section centrale.
Il résulte, en effet, de ces explications que les personnes qu’on appelle attachés, quittent leur légation et viennent passer plusieurs années en Belgique ; je ne sais même pourquoi on les appelle attachés.
J’insiste peu sur ce point, puisque les attachés me paraissent être condamnés.
Reste les secrétaires : les seconds secrétaires de légation peuvent être nommés à discrétion comme les attachés ; ils peuvent, comme eux, venir passer plusieurs années en Belgique, rester amateurs diplomates pendant nombre d’années, se créer des droits à la pension sans avoir rendu des services continuels et pénibles. Une telle disposition ne peut trouver place dans une loi sur les pensions.
On vous a cité des fonctionnaires qui remplissent, à l’intérieur du pays, des fonctions quelquefois continuelles ; ce sont les juges suppléants.
Evidemment, si vous voulez sortir de la règle générale, des exceptions sans nombre bien mieux justifiées que celles des seconds secrétaires se présenteront. Du moment que vous abandonnerez la règle, rien ne vous arrêtera, car l’équité et la justice comparative peuvent vous mener très loin dans cette matière.
J’avais négligé tout à l’heure de dire quelques mots de l’amendement de l’honorable M. Orts. La loi nouvelle déclare que, pour les pensions qui seront liquidées à l’avenir, on ne comptera pas les services rendus avant l’âge de 21 ans. Comme l’a fait observer l’honorable M. Dumortier, on rétablira ainsi, jusqu’à un certain point, l’égalité dans les conditions d’admission maintenant si différentes dans les diverses administrations.
Les services rendus avant la majorité sont, en général, plutôt fictifs que réels. Il n’y a enlèvement ni d’un droit acquis, ni d’une espèce de droit acquis, lorsqu’on se refuse à reconnaître, pour le règlement des pensions, les services rendus avant l’âge de 21 ans. J’insiste sur ce point, que la loi nouvelle peut supprimer les pensions. Dès lors, elle peut subordonner à des conditions nouvelles l’obtention de la pension. Une des conditions, c’est l’admissibilité des services, qui fait l’objet de l’art. 6.
Si nous ne nous plaçons pas à ce point de vue, nous ne pouvons faire une loi, car il n’y a pas un article qui n’enlève ce qu’on appelle un droit acquis.
L’honorable M. Dumortier a demandé des explications sur le § littera B. Le § littera A est relatif aux services civils ou judiciaires rendus depuis l’âge de 21 ans. Le littera B est relatif aux services militaires effectifs à partir de l’âge de 16 ans révolus. Pourquoi fixe-t-on un âge différent dans ces deux dispositions ? C’est à raison de la diversité des services ; parce que nos lois supposent qu’on peut, avant la majorité, rendre des services militaires effectifs, puisqu’elle appelle à les rendre. La loi nouvelle doit d’ailleurs être mise en harmonie avec la loi des pensions militaires ; c’est à quoi nous nous sommes attachés.
Les services militaires sont rendus à l’Etat ; l’Etat les rémunère, il n’y a donc aucune difficulté à les compter à dater de l’âge de 16 ans révolus et à fixer, quant à l’admissibilité, un âge différent pour les services civils ou judiciaires.
M. Orts. - Je ferai observer, avec l’honorable rapporteur, à l’honorable M. de Saegher que s’il faut admettre, pour la liquidation à la pension, les années de service des juges suppléants, quoiqu’ils ne soient pas, au vœu de l’art. 1er, rétribués par la loi, il est une classe en faveur de laquelle je déposerai un amendement. Je veux parler des juges consulaires nommés par le Roi et non rétribués par l’Etat. Ils rendent des services plus importants que les juges suppléants, car leurs services sont permanents, et les juges suppléants ne siègent que quand les titulaires ne peuvent remplir leurs fonctions. Cela nous démontre combien il faut s’attacher strictement aux deux règles de l’article 1er ; sans cela je ne sais où l’on s’arrêtera. Un grand nombre de fonctionnaires qui rendent des services, qui méritent bien de la patrie auraient droit à la pension.
Relativement à l’amendement, je ferai observer que je n’ai pas dit qu’on enlevât un droit acquis. Je n’ai pas invoqué l’art. 2 du code civil, parce que je sais qu’il n’y a pas là de contrat. La question que vous aurez à examiner, lorsqu’il s’agira du ministère des finances, de la caisse des retraites, ne se présente pas ici ; mais j’ai fait valoir des motifs d équité. Il me semble que des jeunes gens qui ont rendu des services à l’Etat avant l’âge de 21 ans, sous l’empire d’une législation qui leur comptait ces années de service pour la pension, ne doivent pas être déçus dans leur attente. C’est sous ce rapport que j’ai présenté mon amendement.
Plusieurs membres. - La clôture.
M. de Garcia. - Je demande la parole contre la clôture. Je désire demander une explication a M. le ministre des finances, explication nécessitée par les attaques dirigées contre le § A par l’honorable M. Dumortier. Si la disposition doit être entendue comme l’interprète l’honorable M. Dumortier, je ne pourrais voter le § ; je suis persuadé que M. le ministre ne l’entend pas ainsi.
- La clôture est mise aux voix ; l’épreuve est douteuse ; elle est renouvelée, la clôture est prononcée.
Pendant le vote, M. le ministre des finances (M. Mercier) se rend auprès M. de Garcia et semble lui donner l’explication qu’il demandait.
M. de Chimay. - Je demande la division.
- L’amendement restreint aux seconds secrétaires de légation est mis aux voix ; deux épreuves sont douteuses.
M. de Muelenaere. - Est-il entendu que le nombre seconds secrétaires sera déterminé par un règlement ?
M. le président. - On ne peut parler entre deux votes.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Goblet d’Alviella) - On pourra régler cela ; dans l’état actuel il n’y a que 4 seconds secrétaires.
- Il est procédé au vote par appel nominal. En voici le résultat :
65 membres répondent à l’appel nominal.
32 votent pour l’amendement.
31 votent contre,
2 s’abstiennent.
Ont voté l’adoption : MM. Smits, Van Cutsem, Vandensteen, Van Volxem, Vilain XIIII, Coghen, d’Anethan, de Chimay, de Garcia de la Vega, de Haerne, de Muelenaere, de Nef, de Renesse, de Saegher, de Sécus, Devaux, de Villegas, d’Hoffschmidt, Dolez, Donny, Dumont, Dumortier, Duvivier, Goblet, Kervyn, Lesoinne, Liedts, Lys, Meeus, Mercier, Nothomb et Pirson.
On voté le rejet : MM. Thienpont, Thyrion, Troye, Van den Eynde, Verhaegen, Verwilghen, Castiau, Coppieters, David, de Baillet, de Corswarem, de La Coste, Delehaye, de Meer de Moorsel, de Meester, de Mérode, Deprey, de Terbecq, de Tornaco, Eloy de Burdinne, Huveners, Jadot, Jonet, Lange, Malou, Morel-Danheel, Ors, Osy, Pirmez, Sigart et Simons.
Se sont abstenus : MM. Wallaert et Lejeune.
En conséquence, l’exception, en ce qui concerne les seconds secrétaires de légation, est admise.
Les membres qui se sont abstenus sont invités à en faire connaître les motifs.
M. Wallaert. - J’aurais voté pour l’amendement, si l’on avait admis certaines conditions qui ont été définies par de Muelenaere. M. le ministre ne s’étant pas expliqué à cet égard, j’ai dû m’abstenir.
M. Lejeune. - J’aurais voulu voter l’amendement dans la limite indiquée dans la discussion, c’est-à-dire, si le nombre des seconds secrétaires et le nombre des années de service que l’on compterait pour la liquidation des pensions, eussent été limités. Comme M. le ministre n’a pas donné d’explications à cet égard, je me suis abstenu.
M. le ministre des finances (M. Mercier) déclare retirer la partie de l’amendement qui concerne les attachés.
- L’amendement de M. Donny est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
L’amendement de M. de Saegher est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
L’amendement de M. Orts est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
M. le ministre des finances (M. Mercier) déclare se rallier à l’addition du mot révolus proposé au § B par la section centrale,
- Cette addition est mise aux voix et adoptée.
M. Malou, rapporteur. - Par suite de l’adoption de l’amendement relatif aux secrétaires de légation, il y a lieu de changer la rédaction de la dernière partie du § A. Il faut changer les mots : « Le surnumérariat dûment commissionné n’est pas soumis à cette dernière condition, » et dire : « Les surnuméraires dûment commissionnés ne sont pas soumis, etc. »
- Ce changement de rédaction est adopté.
L’article est ensuite adopté dans son ensemble.
« Art. 7. Tout magistrat, fonctionnaire ou employé, qui aura bien mérité dans l’exercice de ses fonctions, pourra, à sa retraite, être autorisé par le gouvernement à conserver le titre honorifique de son emploi. »
- Adopté.
M. le président. « Art. 8. Les pensions de retraite seront liquidées, sauf les exceptions indiquées au chapitre II du présent titre, à raison, pour chaque année de service, de 1/60 de la moyenne du traitement dont l’intéressé aura joui pendant les trois dernières années.
« Chaque année passée en service actif, dans l’un des emplois désignés au tableau annexé à la présente loi, comptera, dans la liquidation, pour 1/50 de la moyenne de ce traitement. »
La section centrale a proposé de remplacer le mot trois par le mot cinq.
M. Osy a proposé de substituer le mot dix au mot trois.
M. le ministre des finances (M. Mercier) déclare se rallier à l’amendement de la section centrale.
M. Osy. - Messieurs, les observations qui ont été faites dans la discussion générale ont démontré quels grands inconvénients il y a à liquider la pension sur la moyenne des trois dernières années de traitement. Vous savez, messieurs, que, pour obtenir une pension aussi élevée que possible, des fonctionnaires se sont très souvent fait nommer à la fin de leur carrière, à des emplois plus lucratifs, quoique moins élevés en rang, que ceux qu’ils remplissaient. Je crois que l’amendement de la section centrale ne suffit pas pour faire cesser cet abus, et qu’il faut admettre le chiffre de 10 années. Alors il n’y aura plus aucun abus à craindre.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, le mal auquel on veut porter remède est tout à fait atténué ; il disparaîtra même, en quelque sorte, par suite des dispositions de la loi qui est actuellement soumise à la chambre. Cependant, pour des motifs d’économie, j’ai cru pouvoir me rallier à l’amendement de la section centrale, d’après lequel les pensions seront liquidées sur la moyenne des 5 dernières années de traitement, au lieu de l’être sur la moyenne des 3 dernières années, comme cela s’est fait jusqu’à présent.
Messieurs, le mal auquel on veut remédier consiste en ce que des fonctionnaires supérieurs acceptaient, à la fin de leur carrière, des recettes, de simples places de receveurs et obtenaient ainsi une pension de 6, 7 et 8,000 francs. Je dois faire observer en premier lieu que depuis cinq ou six ans, aucune pension supérieure à 6,000 fr. n’a été accordée ; ensuite, d’après le projet actuel les pensions des receveurs seront limitées à un maximum de 4,000 francs. L’inconvénient dont il s’agit ne se rencontrera donc plus.
Je ne puis admettre, messieurs, l’amendement de l’honorable M. Osy. Les fonctionnaires ne parviennent que très lentement à des grades supérieurs, et il ne faut pas que leur pension soit liquidée sur le traitement minime qu’ils ont eu pendant un grand nombre d’années. Je crois donc qu’en proposant de faire liquider les pensions sur la moyenne des 5 dernières années de traitement, on a été assez loin pour l’intérêt du trésor ; si on allait au-delà, on ne serait pas équitable envers les fonctionnaires. En admettant le chiffre de cinq ans, vous frapperez déjà les fonctionnaires doublement : d’abord nous réduisons les pensions par leur base ; ensuite la loi que nous discutons ne permet plus de liquider celles des comptables que sur les trois quarts du montant de leurs remises, et nous fixons pour cette catégorie de fonctionnaires un maximum spécial. Enfin, nous ferons liquider les pensions sur la moyenne des cinq dernières années de traitement, tandis que jusqu’à présent elles l’ont été sur la moyenne des 3 dernières années. Je pense, messieurs, que si nous allions plus loin, nous commettrons une véritable injustice.
M. Osy. - Messieurs, je dois ajouter à ce que j’ai eu l’honneur de dire tout à l’heure, que le projet de loi présenté en France, en 1841, admet le principe que je propose. Je crois qu’en effet il n’y a pas grand inconvénient pour la généralité des fonctionnaires à ce que nous admettions le chiffre de 10 ans ; et pour la caisse de retraite, la chose est absolument nécessaire. Vous savez, messieurs, que la caisse de retraite qui, avant la révolution ne recevait qu’un subside dont le maximum était fixé à 30,000 florins, vous savez que cette caisse de retraite se trouvait en 1830 dans une position telle que le traité avec la Hollande nous a fait récupérer de ce chef 450,000 florins ; eh bien dans les premières années qui ont suivi la révolution, nous avons dû porter au budget une somme de 200,000 francs pour la caisse de retraite, et l’année dernière nous avons dû lui accorder près de 950,000 francs. Si nous n’admettons pas le chiffre de 10 ans, nous ne pourrons jamais en venir à un taux normal pour les pensions. Je crois que nous devons suivre l’exemple que la France vient de nous donner à cet égard.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - L’honorable M. Osy argumente toujours sur les effets de la législation actuelle. Mais je dois faire remarquer qu’il n’a pas dépendu du gouvernement que cette législation ne fût modifiée déjà depuis plusieurs années. La loi que nous discutons doit précisément avoir pour effet de réduire considérablement toutes les pensions et surtout celles des fonctionnaires du département des finances. Il ne faut donc pas argumenter des abus auxquels la législation actuelle peut avoir donné lieu.
M. de Mérode. - Je pense, messieurs comme on l’a déjà fait observer plusieurs fois, que l’Etat n’est pas obligé de pensionner les fonctionnaires. Souvent l’avancement est donné à la faveur, et il doit nécessairement en être ainsi, car entre plusieurs concurrents, à mérite égal ou à peu près égal, il faut bien que le ministre choisisse. Or, celui qui a déjà obtenu de l’avancement ne doit pas avoir encore, sous le rapport de la pension, un avantage si grand sur ses concurrents qui ont été moins heureux que lui. Si nous voulons que la loi des pensions soit bien accueillie tant par l’opinion publique que par la chambre, il ne faut pas la rendre trop onéreuse pour le trésor. Je pense donc, messieurs, que l’amendement de M. Osy, qui n’est que la reproduction d’une disposition proposée en France, peut très bien être adopté, et quant à moi, je voterai cet amendement.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Je dois protester contre l’assertion de l’honorable comte de Mérode, que les emplois seraient donnés à la faveur ; si le gouvernement donnait les emplois à la faveur, il ne ferait pas son devoir.
Je déclare que les emplois sont donnés au mérite, et l’avancement aux services rendus ; nous ne pouvons pas envisager ici autrement les positions acquises.
M. de Mérode (pour un fait personnel). - Je n’ai pas dit qu’il y eût dans la manière dont on distribue les emplois, une faveur injuste ; j’ai dit que souvent pour un emploi il y avait 5 ou 6 concurrents qui avaient des droits à peu près égaux, ou même égaux, et le ministre est obligé de choisir. Il faut bien qu’il nomme quelqu’un. Or, si vous donnez des pensions, d’après les dernières années calculées d’une manière restreinte, vous accordez un double avantage à celui qui obtient la préférence dans l’avancement.
M. Dumortier. - Messieurs, deux questions ont été soulevées dans le débat actuel par M. le ministre des finances. La première, c’est celle du nombre d’années qui devra être compté pour le fonctionnaire qui sera admis à la pension. La seconde question, c’est celle de l’abus qui s’est présenté et qui consiste en ce que les fonctionnaires prennent un grade inférieur, pour obtenir une plus forte pension.
Quant à la première question, je suis aussi d’avis qu’il serait à désirer qu’on insérât dans la loi une disposition d’après laquelle on pût arriver à donner au fonctionnaire qui se retire une pension proportionné non pas à l’existence qu’il a eue pendant les dernières années, mais à l’existence moyenne qu’il a eue pendant toute la durée de l’exercice de ses fonctions.
Il existe certaines administrations où les avancements sont beaucoup plus rapides que dans d’autres ; par exemple, on avance bien plus vite dans l’administration financière que dans l’ordre judiciaire. Dans l’ordre judiciaire, vous voyez un juge rester juge pendant toute sa vie ; s’il peut arriver à la cour d’appel, c’est un immense avancement. Dans l’administration financière, au contraire, on avance beaucoup plus promptement, parce que le nombre des emplois y est beaucoup plus considérable et les traitements plus élevés ; les pensions finissent par s’en ressentir.
Il faudrait donc admettre un plus grand nombre d’années, pour fixer le dividende la pension.
Je ne terminerai pas sans rencontrer l’observation de M. le ministre des finances, Il s’agit de certains employés qui prennent un grade inferieur, pour pouvoir toucher une pension plus forte. C’est là un véritable abus qui est de nature à désorganiser l’administration.
Or, cet abus a souvent lieu dans l’administration des finances, Il y arrive parfois qu’un contrôleur, un inspecteur, et peut-être même un directeur, demande à être nommé receveur, afin d’avoir une plus forte pension ; messieurs, il y a là quelque chose de véritablement immoral, qui rompt les liens de l’administration. Lorsqu’un employé supérieur demande à descendre de son grade, pour obtenir une pension plus forte, il faut convenir que l’administration est exposée à se priver des lumières des fonctionnaires souvent les plus capables. Il faut donc porter remède à un si grand mal. Je sais qu’il est peut-être difficile d’y porter un remède absolu.
Dans le projet de l’honorable M. d’Huart, il existait un tableau en vertu duquel les maxima de pension étaient échelonnés de telle manière que jamais un receveur ne pouvait avoir plus qu’un contrôleur, un contrôleur plus qu’un inspecteur, un inspecteur plus qu’un directeur, et ainsi du reste. Or l’expérience a prouvé que des contrôleurs, des inspecteurs, ont obtenu des pensions beaucoup plus fortes que celles d’employés d’un grade supérieur. Je ne trouve pas un remède à cet abus dans le projet de loi.
On dit : Il y a un maximum pour les receveurs, mais ce maximum n’empêchera pas que le receveur qui a une très grande recette n’ait une pension supérieure à celle qu’obtiendra son supérieur en grade.
C’est là un véritable abus, et il est à désirer qu’on introduise dans la loi une disposition tendant à empêcher qu’un fonctionnaire, quel qu’il soit, n’obtienne une pension plus élevée que son supérieur en grade. Ce serait rendre à la fois un service au trésor et à la moralité publique.
M. de Muelenaere. - Messieurs, d’après l’art. 13 du projet, le maximum de la pension pour les fonctionnaires et les employés comptables sera désormais fixée à la somme de 4,000 francs. C’est là une grande amélioration dans le système des pensions, mais nous n’avons pas la certitude que cet article sera adopté ; s’il ne l’était pas, peut-être même que le terme de dix années serait insuffisant.
Dès lors il me semble que, pour pouvait se fixer sur l’amendement que l’honorable M. Osy a présenté aujourd’hui, il conviendrait d’attendre la discussion de l’art. 13 ; cet amendement est en rapport intime avec cet article ; car si l’art. 13 était adopté, il en résulterait que le maximum des pensions auxquelles on a fait allusion, et qui s’élevait à des sommes plus ou moins considérables, ne pourra plus être que de 4,000 francs. Dès lors, M. le ministre des finances a consenti aussi à ce que le terme de trois ans fût fixé à 5 ans. Voilà des dispositions qui peuvent avoir une certaine influence sur le vote que nous sommes appelés à émettre en ce moment.
Je demande donc que la chambre veuille bien postposer la discussion de l’art. 8 à l’art. 10 et à l’art. 13 du projet.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, mon intention n’est pas de m’opposer à la proposition de l’honorable M. de Muelenaere ; cependant, s’il est vrai, comme je le pense, que ces dispositions soient connexes, qu’il me soit permis de rencontrer en ce moment les observations des honorables MM. Dumortier et Osy, en ce qui concerne les maximum établis par l’art. 13.
Quel est l’abus qui a été signalé ? Comment peut-on le couper à sa racine ?
L’abus consistait en ce que des fonctionnaires descendaient d’un grade pour acquérir en peu de temps des droits à une augmentation de pension. Or, cet abus est rendu impossible par la combinaison de l’article que nous discutons avec les art. 10 et 13.
D’abord le gouvernement propose, d’accord en ce point avec la section centrale, d’exiger 5 années pour établir la moyenne. C’est déjà une amélioration : l’espérance d’obtenir une pension supérieure au chiffre réel qu’elle aurait dû atteindre est diminuée par la prolongation du terme. D’après l’art. 10, on ne peut plus tenir compte aux fonctionnaires et employés comptables que des trois quarts de leurs remises, lorsqu’elles excédent 2,000 francs. L’art. 13 donne pour limite à toutes les pensions des fonctionnaires et magistrats les trois quarts du traitement qui a servi de base à la liquidation. Mais un 2ème § fixe à 4,000 francs le maximum pour les fonctionnaires et employés comptables.
L’honorable M. Dumortier a cité les projets précédents, le projet de l’honorable M. d’Huart et le projet que la chambre avait provisoirement adopté en 1841. Dans le projet de 1838, l’on distinguait aussi les fonctionnaires, et l’on proportionnait les maximum au traitement ; pour les fonctionnaires à remises, on établissait un maximum absolu, invariable, et la chambre avait provisoirement adopté le même système.
Il peut bien résulter de là qu’un fonctionnaire d’un grade inférieur en administration aura une pension excédant celle de son supérieur hiérarchique, qui a un traitement moindre, mais il ne peut en résulter que des fonctionnaires supérieurs ambitionnent un grade inférieur, pour avoir droit à une pension plus forte que celle à laquelle leur traitement réel leur donnerait droit.
Il est à remarquer encore que l’art. 8 et le terme de cinq années se trouvent en corrélation avec d’autres articles du projet. Dans certains cas, et notamment dans le cas de l’art. 4, déjà adopté, il suffit d’avoir 5 années de fonctions pour être admissible à la pension. Si vous fixez un terme plus étendu pour établir la moyenne, vous devez modifier toutes les dispositions de la loi qui autorisent à pensionner un fonctionnaire qui n’a que 5 années.
Si l’on étend trop cette moyenne, on réduit considérablement les pensions et on le fait au-delà des nécessités reconnues d’après l’expérience.
L’honorable M. Osy a parlé d’un projet de loi présenté en France. Mais ce projet n’a pas été converti en loi. Les projets se sont succédé avec une grande rapidité depuis 1830 et on n’est pas encore arrivé à la solution de l’importante question des pensions.
Aujourd’hui, c’est sur la moyenne des quatre dernières années qu’on base la liquidation des pensions.
M. le président. - M. Orts propose de postposer les art. 7, 10 et 13 à l’art. 64.
M. Orts. - Messieurs, je crois qu’en faisant cette postposition nous faciliterons la discussion, car il y a connexité entre ces dispositions, je crois pouvoir l’établir par le rapprochement des articles 10, 13 et 64.
L’art. 10 porte :
« Sont compris dans l’évaluation de la moyenne du traitement, le casuel et les autres émoluments tenant lieu de supplément de traitement.
« Toutefois, pour les fonctionnaires et employés de l’administration des finances, auxquels des remises tiennent lien de traitement, la moyenne ne s’établira que sur les 3/4 de ces remises, sans qu’elles puissent être réduites au-dessous de 2,000 fr. »
L’article maintenant fixe le maximum pour les fonctionnaires de l’administration des finances. Il porte que le maximum sera de 6 mille francs pour les fonctionnaires et de 4 mille francs pour les comptables.
Vient l’art. 64 qui est plus important.
Il est ainsi conçu : « Les fonctionnaires et employés ressortissant au ministère des finances ou à l’administration des postes, actuellement en fonctions, conservent la faculté de faire liquider éventuellement leur pension d’après les bases de l’arrêté royal du 29 mai 1822. »
Voici le paragraphe sur lequel j’appelle l’attention de la chambre :
« Toutefois, les services postérieurs à la présente loi ne seront pas pris en considération pour dépasser les limites établies par l’art. 13 ci-dessus. »
Maintenant comment faut-il comprendre cet article, faut-il entendre qu’un fonctionnaire du ministère des finances qui aujourd’hui aurait droit à sept mille francs de pension (je prends ce chiffre parce qu’il excède le maximum posé par la loi), je suppose que ce fonctionnaire ne fait pas liquider sa pension et continue à exercer ses fonctions pendant dix ans encore, il n’aura jamais que sept mille francs. Voilà comment je comprends l’article. Quand on sera arrivé là, je me propose de le combattre. Il faudrait qu’on lui comptât le temps qu’il aura servi et qu’on lui donnât une augmentation à raison du nombre d’années au-delà de l’époque actuelle. Vous voyez que dans l’opinion de ceux qui ne partagent pas celle du ministre, relativement à l’art. 64, il y aurait avantage à postposer les art. 7, 10 et 13.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Les articles 7, 10 et 13 établissent des règles générales, et l’art. 64 une exception. Or la règle générale n’empêche pas que l’exception soit modifiée. Dans mon opinion, il faut maintenir l’art. 64 tel qu’il est. L’honorable M. Orts fait une proposition dont la conséquence serait de supprimer la deuxième partie du premier paragraphe de l’art. 64. Mais cet article n’empêche nullement de votes les règles établies par les articles 7, 10 et 13. L’adoption de ces articles n’empêchera pas, quand nous en viendrons à l’art. 64, de proposer à celui-ci telles modification qu’on jugera convenables. Je suppose que l’honorable M. Orts ne veuille pas de cette disposition ; rien ne l’empêchera de proposer de fixer la limite qu’il voudra. Mais on doit voter la règle générale avant de s’occuper des exceptions.
Je ne vois rien de corrélatif entre les articles 7, 10 et 13 et l’article 64. La proposition faite n’aurait d’autre résultat que de rendre la discussion confuse et sans utilité.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, j’ai reconnu que les articles 7, 10 et 13 sont connexes. Dans la première, il s’agit de la base de la liquidation des pensions, dans la deuxième de déterminer les éléments et dans la troisième des maximums. Ce sont là les règles générales que nous posons pour l’avenir ; ces règles se lient entre elles. Mais il n’y a aucun rapport entre les articles que je viens de citer et l’art. 64. Le texte de cet article et la rubrique sous laquelle il se trouve le démontrent. C’est une disposition transitoire rendue nécessaire à raison de l’existence de la caisse de retraite et des versements qui ont été faits à cette caisse ; on sera libre encore, après avoir arrêté des règles générales pour l’avenir, d’adopter, de modifier ou de rejeter l’art. 64. Si nous mêlons l’examen des questions transitoires relatives à la cause des retraites à l’examen des questions de principe, la discussion sera confuse et sans issue.
C’est pour diviser la question que j’ai négligé des observations relatives à la caisse des retraites qui ont été faites par plusieurs membres, et notamment par l’honorable M. Osy. Laissons donc de côté pour le moment les dispositions transitoires et discutons les articles 7, 10 et 13.
M. Verhaegen. - Il me semble qu’on n’a pas voulu comprendre mon honorable ami M. Orts. Il a demandé que la question restât entière, et pour cela qu’on postposât les articles 7, 10 et 13 à l’art. 64 ; on a donné de très bonnes raisons pour cela. M. Orts avait aussi de très bons motifs pour demander de postposer ces articles à l’art. 64. L’article lui-même en contient une, c’est le renvoi à l’art. 13. En effet, l’art. 64 dit :
« Les fonctionnaires et employés ressortissant au ministère des finances ou à l’administration des postes, actuellement en fonctions, conservent la faculté de faire liquider éventuellement leur pension d’après les bases de l’arrêté royal du 29 mai 1322. Toutefois, les services postérieurs à la présente loi ne seront pas pris en considération pour dépasser les limites établies par l’art. 13.
Puisque l’art. 6 renvoie à l’art. 13, il y a lieu de coordonner ces articles. Il est vrai que les articles. 7, 10 et 13 renferment la règle générale, le principe ; mais le principe exercera aussi son influence sur l’exception. Le principe, c’est que le maximum pour les fonctionnaires des finances ne peut pas excéder 6 mille francs, et s’ils sont comptables, il ne peut pas dépasser 4 mille fr. Je vous avoue que cette disposition m’étonne. Pourquoi un comptable est-il moins bien traité qu’un autre fonctionnaire du même département. S’il y avait lieu de faire une différence…
Plusieurs membres. - Ce n’est pas la question.
M. Verhaegen. - Je réserve cela pour la discussion. Mais je voulais démontrer l’importance de la question, en demandant pourquoi on établissait une différence...
M. Malou, rapporteur. - C’est l’art. 13.
M. Verhaegen. - C’est pour cela qu’il faut renvoyer la discussion de tous ces articles après l’art. 64, sur lequel ils pourraient exercer de l’influence s’ils étaient adoptés. Quand nous arriverions à l’art. 64, on dirait que le principe est posé. C’est pour laisser la question intacte que nous demandons que la discussion soit postposée.
M. Malou, rapporteur. - Je regrette de devoir insister. Le premier paragraphe de l’art. 64 s’applique à la caisse de retraite exclusivement. Il décidé que les services antérieurs à la présente loi seront rémunérés conformément au règlement de 1822, mais que les services postérieurs ne seront pas pris en considération pour dépasser les maximum à établir pour l’avenir. Tel est le sens de l’art 64.
Il n’y a donc aucune connexité entre cette disposition et celles des articles 7, 10 et 13, quels que soient les principes posés par ces articles. Quand nous serons à l’art. 64, nous verrons s’il y a lieu d’adopter cette règle ou de la modifier, et dans quel sens.
Le but des honorables membres est de ne rien préjuger. Il suffit dès lors d’admettre que la question est réservée.
J’insiste sur ce point, parce qu’il est impossible que nous discutions les questions relatives à la caisse de retraite, en même temps que la règle générale posée pour l’avenir. (Adhésion.)
- La chambre consultée déclare qu’en délibérant sur l’art. 8, elle réserve l’art. 64.
M. de Garcia. - L’honorable M. de Muelenaere a demandé que l’on postposât la discussion de l’art. 8 du projet du gouvernement après avoir statué sur l’art. 13. L’honorable rapporteur, si je l’ai bien compris, voudrait qu’on discutât simultanément les articles 8, 10 et 13. Ce dernier mode, s’il était adopté, apporterait de la confusion dans nos débats, et je crains que, si l’on s’occupe à la fois des trois articles, cela n’amène le plus grand désordre dans la discussion. Je pense donc qu’il faut se rallier à la proposition de M. de Muelenaere, et se borner à discuter l’art. 14 avant d’aborder l’art. 8 en discussion.
Au surplus, tous ces articles, pour être connexes, pour converger vers un but d’économie, sont essentiellement différents, ils doivent avoir un résultat différent, au moins quant aux propositions d’économies qu’ils sont appelés à introduire en faveur du trésor.
M. Malou. - Je me rallie à la proposition de l’honorable M. de Muelenaere, surtout pour ne pas discuter plus longtemps sur ce qu’on discutera.
- La chambre consultée ajourne la discussion de l’art. 8 après la discussion de l’art. 13.
La séance est levée à 4 heures et demie.