(Moniteur belge n°74, du 14 mars 1844)
(Présidence de M. Liedts)
M. Huveners procède à l’appel nominal à 1 heure 1/4.
M. de Renesse lit le procès-verbal de la séance précédente, la rédaction en est adoptée.
M. Huveners présente l’analyse d’une pièce adressée à la chambre.
« Le sieur Charles-Mathieu Linthel, chirurgien-accoucheur à Saint-Laurent, né à l’Ecluse (Pays-Bas), demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi au ministre de la justice.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - J’ai l’honneur de présenter à la chambre un projet de loi ayant pour objet d’ouvrir au budget de la dette publique (exercice 1843), un crédit supplémentaire de 646,338 fr. 89 c., applicable au paiement des créances arriérées restant à liquider sur des exercices clôturés, du chef de traitements d’attente, de traitements supplémentaires, de pensions supplémentaires et de secours annuels.
- Il est donné acte à M. le ministre des finances de la présentation de ce projet de loi ainsi que des motifs qui l’accompagnent ; il sera imprimé et distribué.
La chambre le renvoie à l’examen des sections.
M. le président. - Deux autres projets de loi relatifs à des crédits supplémentaires, ont déjà été renvoyés aux sections. Je prie MM. les présidents de convoquer leurs sections pour demain, afin de s’occuper de l’examen de ces projets.
M. Henot. - J’ai l’honneur de présenter différents rapports sur des demandes en naturalisation.
- Ces rapports seront imprimés et distribués.
Le jour du vote pour la prise en considération sera ultérieurement fixé.
M. de La Coste. - Messieurs, je viens vous présenter le rapport de votre section centrale sur le projet de loi contenant un mode définitif de nominations des jurys universitaires.
Plusieurs membres. - Les conclusions ?
M. de La Coste. - Si la chambre désire connaître les conclusions, je donnerai lecture du projet de loi :
« Art. 1er. Les articles 41 et 42 de la loi du 27 septembre 1835 sur l’instruction supérieure, sont remplacés comme il suit :
« Art. 41. Chaque jury est composé de sept membres : deux sont nommés par la chambre des représentants, deux par le sénat et trois par le gouvernement.
« Il est nommé de la même manière un suppléant individuel à chaque titulaire.
« Les membres titulaires désignés par chaque membre sont soumis annuellement à un tirage au sort qui détermine la sortie de l’un des deux et de son suppléant.
« Les membres et les suppléants nommés par le gouvernement le sont pour une année.
« Les membres titulaires choisis par les chambres législatives, qui auront été éliminés par le sort, ainsi que les titulaires nommés par le gouvernement, qui auront fait partie d’un jury pendant deux années consécutives, à partir de la mise en vigueur de la présente loi, ne pourront être replacés dans le même jury qu’après une année d’intervalle.
« Les suppléants sortants peuvent être immédiatement replacés dans le même jury, soit en ladite qualité, soit comme titulaires.
« Chaque chambre ne pourra placer dans le même jury plus d’un membre titulaire appartenant à un même établissement d’instruction.
« Chaque jury ne peut comprendre à la fois plus de deux membres titulaires appartenant à un même établissement d’instruction.
« Les nominations à faire par les chambres ont lieu un mois, au moins, avant l’ouverture de la première session du jury. Le tirage au sort se fait dans chaque chambre quinze jours, au moins, avant ces nominations.
« La chambre des représentants procède la première, au choix qui lui est attribué, et le porte, dans les 24 heures, à la connaissance du sénat qui, ensuite, fait le sien.
« Ces nominations effectuées, le gouvernement procède à celles qui lui sont attribuées dans le mois qui précède la première session du jury.
« Art 42. Un jury distinct pour la philosophie et les lettres, et pour les sciences, est chargé de procéder à l’examen de candidat et à celui de docteur. Pour le droit et la médecine, il y a un jury pour le grade de candidat et un pour le grade de docteur. »
« Art. 2. La loi du 27 mai 1837 continuera à sortir ses effets jusqu’à la fin de la 2ème session de 1844. »
M. le président. - A quel jour la chambre veut-elle fixer la discussion ?
M. de Haerne. - Messieurs, avant de fixer le jour auquel l’assemblée se décidera à discuter la grave question des jurys d’examen, je désirerais faire une interpellation à MM. les ministres, et en particulier à M. le ministre de l’intérieur que je regrette de ne pas voir présent dans ce moment.
Voici, messieurs, quel est l’objet de cette interpellation.
Vous savez que les journaux ont répandu le bruit de la dissolution du ministère d’un côté, de la dissolution de la chambre de l’autre, à propos du projet de loi sur lequel il vient de vous être fait rapport.
Messieurs, je ne crois pas à ces bruits, mais le pays s’en alarme, parce qu’on croit que, dans ce moment, une dissolution du cabinet aussi bien qu’une dissolution de la chambre serait désastreuse, et surtout en présence des projets importants qui devront être discutés après les vacances de Pâques, d’après l’engagement du cabinet.
Messieurs, représentez-vous ce qui arriverait, si dans ce moment une dissolution avait lieu ou si le cabinet avait à se retirer. (Bruit.)
Un membre. - Nous n’avons pas à nous occuper d’une pareille question.
M. de Haerne. - Messieurs, j’ai commencé par dire que je ne croyais pas à ces bruits ; mais je désirerais que quelques apaisements fussent donnés à cet égard au pays, afin que l’on sache si les conclusions de la commission d’enquête commerciale ainsi que les changements à apporter à notre tarif des douanes pourront être discutés dans cette session. Car il est certain que, dans le cas, soit de la dissolution des chambres, soit de la retraite du cabinet, ces deux graves questions seraient encore ajournées indéfiniment.
Dans ces deux cas, je demanderais que la discussion du projet de loi sur le jury d’examen fût ajournée, jusqu’après l’adoption des mesures relatives à l’enquête commerciale et à la révision du tarif.
Je tiens beaucoup, messieurs, à ce que ces deux dernières questions soient discutées dans cette session, et le pays y tient autant que moi. C’est pour cela que je désire que le cabinet veuille bien nous donner quelques explications.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, je déclare que le gouvernement n’a rien de commun avec les journaux qui ont pu répandre les bruits dont vient de parler l’honorable membre. Aucun de ces journaux ne peut être considéré comme étant l’organe du gouvernement, comme ayant avec lui le moindre rapport direct ou indirect.
M. de Muelenaere. - Il me semble qu’il serait désirable que M. le ministre de l’intérieur fût présent, avant que la chambre fixe le jour auquel la discussion du projet de loi aura lieu. (Oui ! oui !)
M. le président. - La chambre attendra la présence de M. le ministre de l’intérieur.
M. de Garcia (pour une motion d'ordre). - Messieurs, la chambre est saisie d’un projet de loi d’un haut intérêt, et dont les discussions qui ont eu lieu dans cette enceinte depuis quelque temps, ont prouvé la nécessité. Je veux parler du projet de loi sur le cumul.
Messieurs, la loi sur le cumul se rattache à la loi de comptabilité et au projet de loi que l’honorable M. Verhaegen nous a promis de présenter ; elle se rattache aussi à la loi des pensions.
Depuis 1838, un projet de loi sur le cumul, présenté par l’honorable M. d’Huart, est resté dans les cartons de la chambre. Je demande que la chambre en décide le renvoi à l’examen des sections, pour que nous puissions nous en occuper le plus tôt possible.
M. le président. - Ce projet a été examiné par cinq sections. Mais deux des rapporteurs des sections devraient être remplacées, de manière qu’il a été impossible de réunir la section centrale. Les membres à remplacer sont M. de Langhe et M. le ministre des finances actuel.
M. Malou. - Je ferai remarquer que le projet de 1838 se trouve presque tout entier dans la loi que nous discutions ; il doit donc être considéré comme retiré, du moins en grande partie, par suite de la présentation de la loi générale sur les pensions.
Cette observation se trouve dans le rapport de la section centrale.
M. de Garcia. - Je ne puis admettre l’observation que vient de présenter l’honorable rapporteur du projet de loi sur les pensions.
Il est bien vrai que, dans la loi des pensions on prévoit les cas de cumul ; mais il est d’autres cas de cumul qui n’y sont pas prévus : c’est lorsqu’il s’agit de donner des indemnités, c’est enfin lorsqu’il s’agit des cas dont on s’est occupé depuis quelques semaines c’est enfin lorsqu’il s’agit de collation de fonctions hors les cas prévus par la circonstance des pensions.
Je ne vois donc pas que les dispositions de la loi des pensions nous dispensent d’examiner le projet de loi présenté par l’honorable M. d’Huart, et les observations de l’honorable M. Malou ne me donnent nullement la conviction que nous ne devons pas nous en occuper.
Si la chambre veut s’occuper précisément du projet de loi sur le cumul, elle pourrait prier le bureau de nommer une commission spéciale pour faire rapport sur ce projet de loi qui est fort court. Nous ne pouvons être arrêtés par la considération que des commissions ne peuvent plus être composées comme elles l’étaient au moment de la présentation des projets de loi. Ce serait dire, en effet, que les projets de loi qui ont été présentés lorsque la chambre était composée autrement qu’elle ne l’est aujourd’hui, ne pourront jamais être examinés. Au surplus, messieurs, si vous ne voulez pas renvoyer le projet à une commission spéciale, nous pourrions autoriser le bureau à compléter la section centrale qui a été chargée de l’examiner.
M. Malou. - Je dois, messieurs, reproduire l’observation que j’ai faite tout à l’heure ; je tiens en main le projet de loi sur le cumul ; ce projet renferme deux dispositions essentielles et quelques dispositions accessoires ; les deux dispositions essentielles se trouvent presque tout entières dans le projet de loi sur les pensions ; je pense dès lors, que l’honorable membre ferait bien d’ajourner au moins sa proposition jusqu’à ce que la chambre ait voté sur ce dernier projet. C’est alors seulement que nous pourrons juger s’il y a utilité de compléter la section centrale, chargée de l’examen du projet de loi sur le cumul.
Je propose donc à la chambre de ne pas statuer, quant à présent, sur la proposition de l’honorable M. de Garcia.
- La proposition de M. Malou est mise aux voix et adoptée.
(Moniteur belge n°75, du 15 mars 1844) M. le président. - M. le ministre de l’intérieur étant maintenant présent, nous pourrions fixer le jour de la discussion du projet de loi sur le jury universitaire.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je proposerai un jour lorsque le rapport sera distribué, car si je faisais une proposition maintenant, sans savoir quand l’impression sera achevée, je m’exposerais à indiquer un jour trop éloigné ou trop prochain.
(Moniteur belge n°74, du 14 mars 1844) M. d’Hoffschmidt. - Messieurs, dans la séance d’hier, plusieurs orateurs ont combattu le projet de loi qui vous est soumis. Ces honorables membres n’adoptent pas même le système qui sert en quelque sorte de base au projet. Ils ont formulé ou plutôt indiqué quelques autres systèmes qui, selon eux, mériteraient la préférence.
Il importe, comme le disait hier, avec raison, l’honorable membre qui a parlé à la fin de la séance, il importe qu’avant d’aborder la discussion des articles, la chambre soit bien fixée sur le système qu’elle veut définitivement adopter. Ce système une fois admis, les conséquences en découleront tout naturellement et notre tâche sera considérablement simplifiée.
Je crois, messieurs, qu’il est un premier point sur lequel nous sommes tous d’accord, c’est la nécessité de changer la législation actuelle. En effet, messieurs, cette législation n’est point complète, elle n’est point uniforme. Elle consacre deux modes de rémunération différents : l’une accorde directement des pensions sur le trésor public, c’est celui qui résulte de l’arrêté-loi de 1814. Or, cet arrêté, vous le savez, messieurs, est tout à fait incomplet ; il ne fait aucune distinction entre les fonctionnaires, quelle que soit la nature des services qu’ils rendent ; ensuite il garde le silence le plus absolu sur ce qui concerne les veuves et les orphelins.
L’autre mode de rémunération, messieurs, c’est celui qui résulte du règlement de 1822. D’après ce règlement les pensions des employés du ministère des finances sont imputées sur une caisse de retraite alimentée par des retenues faites sur les traitements de ces employés. Vous connaissez tous, messieurs, les embarras que l’exécution de ce règlement a entraînés à sa suite ; on lui a reproché de faire naître des abus et les revenus de la caisse de retraite ont fini par être complètement insuffisants, de sorte que, dans la situation actuelle, vous êtes obligés de porter chaque année au budget des sommes très considérables pour suppléer à cette insuffisance, sommes qui ne font que s’accroître tous les ans.
Il est donc évident, messieurs, qu’il faut, le plus promptement possible, réviser la législation actuelle. Il ne suffit pas d’apporter à cette législation des améliorations nombreuses, il faut faire une législation d’ensemble, une législation qui comprenne toutes les classes de fonctionnaires et qui puisse s’appliquer à tous les cas.
Mais si l’on est d’accord sur la nécessité de réviser la législation actuelle, il paraît, d’après ce qui s’est passé dans la séance d’hier, qu’on ne l’est point sur le système qui doit remplacer cette législation. Ainsi que je l’ai dit, plusieurs systèmes ont été indiqués. On n’a point, à la vérité, développé ces systèmes, on s’est borné à émettre seulement quelques idées ; cependant ces idées méritent d’être sérieusement examinées.
Parmi les différentes opinions émises, celle de l’honorable M. Pirmez est la plus excentrique. Si cette opinion était admise, la loi sur les pensions serait facile à faire ; il suffirait de déclarer qu’aucune rémunération ne sera accordée, sauf dans des circonstances tout à fait extraordinaires. Mais une pareille idée revient à nier le principe même, à nier l’obligation où se trouve l’Etat de rémunérer les fonctionnaires publics qui ont servi, pendant de longues années utilement leur patrie ou qui ont contracté des infirmités ou reçu des blessures dans l’exercice de leurs fonctions. Or, cela serait tout à fait contraire à ce qui s’est constamment pratiqué chez toutes les nations civilisées ; cela serait aussi contraire à tous nos antécédents.
Messieurs, on nous a distribué une brochure qui est due à la plume du savant directeur de l’administration des mines. Dans cette brochure on trouve un résumé des législations sur les pensions de plusieurs nations qui nous avoisinent, et l’on peut y remarquer que ces nations sont toutes très généreuses envers les employés qui les ont servies fidèlement. On nous a cité hier l’Angleterre et un honorable membre a même émis le vœu de voir adopter chez nous le système anglais, qui consiste à faire conférer les pensions par la loi. Eh bien, messieurs, en Angleterre il existe des pensions qui s’élèvent jusqu’à 35,000 et même jusqu’à 50,000 fr. ; et voulez-vous savoir à quel chiffre s’élève le total des pensions accordées dans ce royaume ? Il s’élève à 141 millions de fr. Dans cette somme sont comprises à la vérité les pensions accordées à l’armée et à la marine, mais le chiffre des pensions civiles seules dépasse 30 millions de fr.
En Autriche et en Saxe, les fonctionnaires civils obtiennent aussi des pensions sur le trésor public. Je citerai encore le royaume de Wurtemberg, où l’on a adopté un système exactement conforme à celui qui vous est soumis ; les pensions des fonctionnaires publics y sont à la charge du trésor public sans retenue, et quant aux pensions des veuves et des orphelins, on y subvient au moyen de caisses de retraite particulières, comme le prescrit également le projet de loi dont nous nous occupons.
En France, messieurs, ces principes ont également été suivis d’une manière invariable ; il est vrai qu’avant la révolution de 1789, il n’existait, je pense, aucune loi sur les pensions, mais il ne résultait point de là qu’aucune rémunération n’était accordée ; il en résultait seulement que la collation des pensions était abandonnée entièrement à l’arbitraire du pouvoir. En 1790 une loi intervint ; c’est celle du 22 août 1790 ; et cette loi consacra aussi de la manière la plus formelle le principe de la rémunération.
Et que l’on ne dise point que la loi dont je viens de parler n’avait en vue que des services extraordinaires ! Car l’art. 14 de cette loi affectait une somme de 10 millions de francs aux pensions et une somme de 2 millions aux gratifications, et certes, si elle n’avait en vue que des cas extraordinaires, cette somme n’aurait pas dû être aussi élevée.
L’arrêté loi de 1814, qui nous régit encore aujourd’hui, consacre le même principe, et depuis 1814 les chambres ont constamment approuvé ce principe. Le projet de loi présenté en 1838 le proclamait, et lorsque ce projet fut discuté en 1841, le principe dont il s’agit fut adopté à une grande majorité. Enfin, messieurs, vos sections n’ont fait aucune objection contre cette base du projet de loi et la section centrale l’a adopté à l’unanimité.
Savez-vous, messieurs, comment le gouvernement français considère le principe de la rémunération ? A la page 10 de la brochure que j’ai déjà citée, nous trouvons un passage de l’exposé des motifs du projet de loi présenté en 1841 par le ministre des finances en France, M. Humann, et voici comment ce ministre s’exprime :
« Les lois et règlements qui assurent des pensions de retraite aux fonctionnaires civils, sont le nerf de l’administration, le lien le puis puissant de sa vaste hiérarchie, la sanction la plus efficace des devoirs imposés à tous ses agents. La perspective de cette rémunération, qui doit leur donner le pain de la vieillesse, au bout d’une carrière utilement et honorablement remplie, entretient la discipline, anime le zèle, et suscite parfois le dévouement, etc. »
Ces expressions, messieurs, démontrent suffisamment quelle importance l’administration attache, en France, au principe de la rémunération en faveur des fonctionnaires civils.
Il est heureux, disait-on hier, d’obtenir une place, et celui qui l’obtient est plutôt l’obligé de l’Etat que l’Etat son obligé.
Je conçois, parfaitement, messieurs, qu’au moment où la place est conférée, celui qui l’obtient est l’obligé du gouvernement, et doit lui en savoir gré. Mais aussi ce n’est pas à l’employé qui vient d’obtenir la place qu’on propose d’accorder une pension ; c’est à celui qui aura 60 ans d’âge, et qui aura fidèlement servi l’Etat pendant 30 ans ; c’est à celui à qui des infirmités ne permettront plus de servir, à celui qui aura reçu des blessures dans l’exercice de ses fonctions ! Or, dans de cas pareils, il est certain que le corps social doit une certaine reconnaissance à celui qui a passé la plus grande partie de sa vie à exécuter fidèlement ses devoirs, et il y aurait une espèce d’ingratitude à le laisser en quelque sorte dans la misère, et à lui prêter aucun secours dans sa vieillesse.
Je passe maintenant aux idées qui ont été émises par l’honorable M. Savart.
L’honorable M. Savart adopte le principe de la rémunération ; mais il voudrait que l’on fît une espèce de classification des fonctionnaires et que l’on n’accordât la pension qu’à ceux qui n’ont pas certaines conditions de fortune.
Messieurs, je crois que cette classification est impossible. Ce serait d’abord faire de la pension une espèce d’aumône ; ce serait en livrer aussi la collation à un très grand arbitraire de la part du gouvernement. Ce serait enfin récompenser la dissipation et punir l’esprit d’ordre et d’économie.
D’ailleurs, messieurs, la pension n’est pas seulement conférée comme un acte d’humanité ; elle est aussi conférée comme une récompense des services rendus à l’Etat.
Ensuite, messieurs, quelle serait la limite que vous traceriez entre les fonctionnaires pensionnés et les fonctionnaires non pensionnés ? Hier, l’honorable M. Savart fixait cette limite à 10,000 fr. de revenu. Mais il y aurait d’abord de très grandes difficultés à connaître quelle est la fortune de celui qui demande la pension. Il faudrait, comme on l’a fort bien dit, une espèce d’inquisition dans les fortunes. De plus, cela consacrerait les plus étranges anomalies. Par exemple, à un célibataire qui aurait 9,500 fr. de revenu, vous accorderiez une pension ; et au père de famille qui aurait 10,000 fr. de revenu et une famille de dix enfants, vous n’accorderiez rien.
Sans aucun doute, messieurs, un pareil système soulèverait encore une foule de difficultés qui en rendraient impossible l’application juste et équitable, et, ce qui le prouve, c’est que, malgré son côté séduisant, il n’a jamais été adopté dans aucun pays ni dans aucune législation sur la matière.
L’honorable M. de Garcia n’adopte pas non plus le système que propose le gouvernement, si toutefois je l’ai bien compris, car il n’a pas beaucoup développé ses idées.
M. de Garcia. - Je demande la parole.
M. d’Hoffschmidt. - Son système est resté un peu dans le vague.
Il voudrait, m’a-t-il paru, subvenir aux pensions des fonctionnaires au moyen de retenues à faire sur leurs traitements.
Déjà hier l’honorable rapporteur de la section centrale vous a démontré les nombreux inconvénients d’un semblable système. En France, le gouvernement se trouve à peu près dans la même situation qu’en Belgique. Il y a aussi deux modes de rémunération : un mode fondé sur les dispositions de la loi du 22 août 1790 et du décret de 1806, et un autre mode imputant les pensions sur des caisses de retraite subsidiées. Les pensions de cette seconde catégorie sont infiniment plus nombreuses et plus considérables que celles de la première ; c’est au point que le montant des pensions accordées maintenant sur la caisse des retraites en France, s’élève jusqu’à 18 millions de francs, et que l’Etat intervient par des subsides pour une somme de 11 millions de francs.
Cet état de choses inspire des inquiétudes au gouvernement et il se propose d’y mettre un terme. Cinq projets de loi ont déjà été présentés depuis 1834 sur les pensions ; ces projets de loi, examinés par des hommes très compétents, n’ont pas subi l’honneur d’une discussion. Le dernier est de 1841 et jusqu’à présent les chambres ne s’en sont pas occupées.
Eh bien, ces projets de loi, messieurs, consacraient tous le système des pensions en faveurs des fonctionnaires avec retenue sur les traitements, mais en y ajoutant, à charge du trésor public, les pensions des veuves et des orphelins.
Ce système a toujours paru très compliqué aux commissions de la chambre des députés qui l’ont examiné. Du reste, messieurs, tous ces projets adoptent la même disposition que celle qui nous est présentée et ce qui concerne les pensions du passé, les pensions qui sont payées par la caisse de retraite ; ils mettent ces pensions à charge du trésor public, et les dispositions nouvelles qu’ils consacrent n’ont rapport qu’aux pensions qui seront accordés à l’avenir.
D’un autre côté, messieurs, ce système des retenues pour payer les pensions aux employés de l’Etat n’est pas du tout conforme aux principes sur la matière. Vous voulez déclarer, d’une part, que l’Etat doit une rémunération au fonctionnaire public arrivé dans l’âge ou il ne peut plus servir l’Etat, et d’un autre côté vous voulez payer cette rémunération au moyen des retenues à faire sur leurs traitements ; de sorte que, comme on l’a fort bien dit, vous leur retireriez d’une main ce que vous leur accorderiez de l’autre. De deux choses l’une, messieurs, ou les traitements des fonctionnaires publics en Belgique sont trop élevés, et alors vous devez les réduire, ou bien ils ne sont pas trop élevés et alors le système que l’on voudrait introduire, consisterait en une véritable diminution dans les traitements, en une véritable contribution que l’on ferait peser sur les employés de l’Etat.
Qu’on ne croie pas d’ailleurs, messieurs, que ces retenues seraient suffisantes pour le payement de toutes les pensions. Il est démontre par des calculs qui ont été faits en France, qu’une retenue de 5 p. c. sur les traitements des fonctionnaires publics serait insuffisante pour leur accorder les pensions nécessaires, ainsi qu’a leurs veuves et à leurs orphelins, et que, pour que la retenue fût suffisante, il faudrait qu’elle fût portée de 7 à 8 p. c.
Quant à moi, messieurs, je pense que le projet qui vous est présenté est fondé sur des principes beaucoup plus rationnels. Remarquez, d’ailleurs, que ces principes ne sont pas nouveaux ce sont les mêmes que ceux que vous avez adoptés lors de la discussion de 1841. Il est vrai qu’alors l’ensemble du projet a été rejeté à une faible majorité, mais on peut dire que d’autres circonstances ont pu influer sur ce rejet.
On redoute que le projet de loi, s’il est adopté, n’entraîne des charges immenses pour le trésor public. Il est certain que les pensions seront toujours une charge très lourde pour le trésor, et on ne peut pas se dissimuler que cette charge doit s’accroître d’une manière assez notable par suite de la nouvelle administration qui s’est établie dans le pays, l’administration des chemins de fer.
C’est là une classe nouvelle et assez nombreuse de fonctionnaires, dont les pensions ne peuvent manquer de peser dans l’avenir sur le trésor public, quel que soit le système que vous adoptiez : mais je dis que le projet qui vous est présenté est plus avantageux au trésor que le système qui existe actuellement. Dans l’état actuel des choses, tons les fonctionnaires et employés de l’Etat ont droit à la pension : rien n’est changé à cet égard par le projet, sauf qu’il introduit des améliorations importantes.
En effet, il contient un grand nombre de garanties dont plusieurs ne se trouvent pas dans la législation actuelle.
Indépendamment des garanties d’âge et de durée des services, vous avez celles qui doivent résulter de dispositions claires et précises, en ce qui concerne la collation des pensions, conditions qui ne laissent en quelque sorte rien à l’arbitraire, Vous avez encore une garantie dans la publicité, qui devra être donnée aux arrêtés qui confèrent les pensions ; vous avez surtout une garantie très importante dans le contrôle des chambres, contrôle que le nouveau projet de loi organise.
En effet, il prescrit que les pensions seront payées par chaque département ministériel : les sommes nécessaires de ce chef, seront portées à chaque budget particulier ; d’après une autre disposition du projet de loi, la liste des pensions sera en quelque sorte annuellement contrôlée par les chambres.
It résultera de là que ces pensions ne seront jamais accordées que dans les limites des crédits qui auront été votés par les chambres, de sorte que la législature aura toujours un moyen facile d’arrêter les charges qui dépasseraient les ressources du trésor public.
Toues ces dispositions me semblent donc de nature à rassurer la chambre sur les conséquences financières du projet de loi.
J’avoue cependant que j’aurais désiré voir ajouter au projet de la section centrale quelques calculs sur les charges qui dans l’état normal incomberont probablement au trésor public ; je crois que des calculs de ce genre auraient été de nature à tranquilliser beaucoup de membres de la chambre sur les dangers que peut faire courir au public le projet qui vous est présenté,
Quoi qu’il en soit, messieurs, le système formulé par ce projet, me paraît indubitablement mériter la préférence sur ceux qu’on a formulés dans la séance d’hier ; il est conforme aux vrais principes sur la matière ; il établit l’ordre et la régularité dans la collation des pensions ; enfin il organise le contrôle des chambres, sur la liste des pensions, contrôle qui doit nous rassurer, je le répète, sur les conséquences financières de la loi.
M. Vandensteen. - Messieurs, les orateurs qui ont pris la parole dans la séance d’hier ont semble plutôt appeler l’attention de la chambre sur les charges qui pèseraient sur le trésor par le système proposé, qu’ils n’ont combattu le principe même. La rémunération de longs et honorables services rendus à l’Etat se trouve consacrée depuis longtemps par notre législation. Les pays voisins ont aussi rendu justice à ce principe dans une application plus ou moins large, mais au moins ils l’ont reconnu.
Il ne pourrait en être autrement, car la rémunération s’applique à des individus qui ont constamment rendu des services à l’Etat, à des hommes auxquels leur âge et leurs infirmités ne permettent plus de se livrer à un service actif. C’est une question de convenance, je dirai plus, c’est une question de sage administration.
Avant 1830, comme depuis notre régénération politique, il y a eu certainement des abus et des abus très graves dans la collation des pensions, mais ces abus étaient inévitables, sous l’empire d’une législation qui, il faut bien le dire, s’appuyait sur les bases incertaines et très élastiques résultant, les unes d’arrêtés, les autres de règlements qui venaient souvent régir la matière dans d’autres sens ou lui donner plus d’extension.
Je crois, messieurs, que le moment est venu de faire disparaître ces abus. C’est pour atteindre ce but, que le projet de loi vous a été présenté. La constitution même impose à la législature l’obligation de s’occuper de cet objet, on pourrait même dire que la constitution, dans son art. 114, semble tout au moins présupposer un droit à la pension. Cet article porte, en effet : « qu’aucune pension, aucune gratification à charge du trésor public, ne peut être accordée qu’en vertu d’une loi. »
Or, il me semble que, par cet article, on a eu en vue de remédier à des abus auxquels avait donne lieu l’application de la législation précédente, et qu’on a voulu en même temps reconnaître les droits qu’ont les fonctionnaires publics à une pension.
C’est sur cette disposition que repose la légitimité de l’opinion de ceux qui pensent que l’Etat est obligé envers des fonctionnaires.
Dans la séance d’hier, l’on a formulé deux systèmes, l’un consistant à ne rémunérer que les fonctionnaires qui sont en quelque sorte dans un état d’indigence ; dans l’autre système, on subordonnerait la pension à la condition que les fonctionnaires auront contribué à la formation d’une caisse de retraite.
Quant au premier système, il me paraît inadmissible et impossible dans la pratique. En effet, quelle serait la base d’après laquelle on établirait les droits des intéressés ? Evidemment, il ne pourrait y avoir d’autre règle que l’arbitraire, ainsi que l’a fort bien démontré l’honorable M. d’Hoffschmidt, telle somme qui pour un individu pourrait être considérée comme le constituant dans un état d’aisance, serait pour le collègue une somme qui le placerait dans l’indigence peut-être.
Il y a une autre considération qui est très puissante : il me semble impossible d’exiger que le fonctionnaire ou l’employé vienne pour ainsi dire constater sa misère à la face de la nation.
Cette rémunération ne serait plus le prix de services rendus à l’Etat, ce serait un secours accorde à l’indigence, ce serait un aveu blessant pour celui auquel le secours serait accordé.
Je crois donc que le premier système ne pourrait être admis.
Le second système n’est pas nouveau, c’est celui qui a donné lieu aux abus contre lesquels on a tant réclamé.
Il est évident que si l’on n’impose pas une retenue très considérable aux fonctionnaires, les fonds de la caisse seront insuffisants. L’expérience nous l’a prouvé. N’avons-nous pas été obligés de voter annuellement des sommes fort élevées pour couvrir le déficit de la caisse de retraite actuellement existante au département des finances ?
D’un autre côté, je ne pense pas qu’en Belgique les fonctions soient rétribuées au-delà du strict nécessaire. On est d’accord sur ce point. Il est des administrations où le traitement des employés n’est nullement en rapport avec la position qu’ils occupent.
Je crois donc que le second système n’a pas beaucoup plus de chance de viabilité que le premier, et, suivant moi, il conduirait inévitablement à ce résultat, l’augmentation des traitements. Or, c’est ce que nous ne voulons point.
L’honorable M. Pirmez a développé un système à lui, système qui ne paraît pas exclure le principe de la rémunération. L’honorable membre a poussé un peu loin les conséquences de ce système ; toutefois, j’ai vu avec plaisir qu’il admettait la rémunération ; seulement il ne veut pas que l’on considère cette rémunération comme une obligation stricte pour l’Etat, et il ne l’admet que dans certains cas.
Quant au projet de loi en discussion, je crois que sous bien des rapports, il offre des garanties. Ces garanties se trouvent dans l’obligation où se trouvera en quelque sorte placé le gouvernement, de ne plus accorder de pension qu’aux fonctionnaires qui sont réellement dans l’impossibilité de rendre encore service à l’Etat. Je sais bien que cette restriction n’est pas positivement écrite dans le projet ; on pourrait examiner s’il n’y aurait pas lieu à insérer cette clause d’une manière précise dans la loi ; quant a moi, je n’y verrais point d’inconvénient.
En second lieu, je vois dans le projet de loi un grand avantage, c’est qu’il va nous faire sortir de cette espèce de législation provisoire qui a régi les pensions jusqu’ici, législation qui n’a cessé d’être interprétée de la manière la plus large dans l’intérêt des individus auxquels on l’appliquait. Cela ne pouvait être autrement, puisqu’ils concouraient à ces différentes caisses.
Dans le projet actuel on consacre un principe que, pour ma part, je reconnais juste, c’est que pour les caisses des veuves et orphelins le gouvernement, bien qu’il ne reconnaisse pas devoir une rémunération plus étendue que celle qu’il accorde aux fonctionnaires, se charge cependant de la surveillance et de la direction de la caisse sans y intéresser l’Etat en aucune manière. Je crois que c’est là un très grand avantage et un bienfait.
Je ne terminerai pas sans donner mon assentiment à une proposition qui sera faite par un honorable membre relativement à l’utilité, à la nécessité qu’il y a de régler par une loi les différents traitements des fonctionnaires de l’Etat. Je crois que le système où nous entrons, qui tend à mettre à charge de l’Etat toutes les pensions des fonctionnaires, quand ils se trouvent dans les conditions établies par la loi, oblige la législature à s’occuper de ce point essentiel. Car il ne faut pas qu’au moyen de suppléments et d’indemnités on augmente des traitements, qui dans la suite servent de base pour la fixation des pensions.
M. Pirmez. - On m’a reproché d’avoir sur les pensions un système excentrique. Si je m’étais fait doter de quelque bonne sinécure, peut-être ma position aurait-elle rectifié mes idées en cette matière.
Mais, messieurs, je n’ai fait sur le projet actuel aucune proposition. On m’a reproché d’avoir été contraire au système des pensions, et dans la réponse que j’ai faite à M. le ministre de l’intérieur, j’ai dit que je n’étais pas du tout contraire à ce principe. J’ai répondu à deux ou trois orateurs qui avaient parlé du droit des fonctionnaires à la pension d’après la législation existante. J’ai cru devoir dire que la législation existante, l’arrêté-loi de 1814 qu’on invoque, ne donnait pas ce droit aux fonctionnaires, que vous étiez entièrement libres d’agir comme vous le vouliez et que vous aviez carte blanche, que vous pouviez faire votre loi comme vous l’entendiez. Mais on a tant de fois invoqué la loi de 1814 que je devais dire qu’on en avait fait un très grand abus en prétendant qu’on donnait aux fonctionnaires des pensions en vertu du droit que leur conférant cet arrêté-loi.
Il est inutile d’examiner les termes de la loi pour s’assurer du contraire, il suffit de voir ce qu’a fait l’auteur de la loi, avant 1830 ; ce qui était alloué alors et ce que l’on paie maintenant.
Messieurs, on n’est parvenu à faire donner de si grosses sommes au trésor que par des déclamations sur le service des employés et qu’on n’aurait pas accordé pareilles sommes pour les pensions si on n’avait pas été aveuglé par ces déclamations.
J’ai dit aussi que la plupart des employés recevaient une faveur du gouvernement quand on les nommait, qu’ils demandaient des places en grâce et en concurrence avec d’autres individus qui mettaient autant d’insistance qu’eux et étaient aussi capables de remplir l’emploi. J’ai dit que dans cette circonstance, c’était le gouvernement qui rendait le service à l’employé et non l’employé qui le rendait au gouvernement, J’ai reconnu que dans d’autres circonstances l’Etat recevait des services qui ne pouvaient être rendus que par certains employés et qu’aux employés de cette catégorie la nation devait de la reconnaissance pour leur travail.
Je crois qu’au moment où vous allez voter une loi sur les pensions, je devais présenter cette distinction pour que vous ne vous ne vous laissassiez pas entraîner à des dépenses trop considérables, pour qu’on ne fît pas ce qui a été fait jusqu’à ce jour.
Je ne nie pas que tous les employés rendent des services, mais ces services, il ne faut pas les exagérer. Ils trouvent déjà d’ailleurs une grande compensation en ce qu’on les met en dehors de la concurrence du travail qui existe dans les industries.
Je crois que ce que j’avais eu l’honneur de vous dire hier ne méritait pas les termes un peu durs dont s’est servi un honorable membre, en taxant ces idées d’excentriques.
M. de Muelenaere. - Il paraît que les paroles prononcées par l’honorable M. Pirmez avaient été assez généralement mal comprises. L’honorable membre vient de déclarer qu’il n’est pas entré dans ses intentions de contester le principe de la loi. Dès lors, les considérations que je me proposais de vous présenter deviennent sans objet. J’y renonce volontiers. Il est cependant une seule de ses observations à laquelle il n’a pas été répondu jusqu’à présent, qui me paraît constituer une grave aberration. L’honorable membre a paru croire qu’antérieurement à la loi de 1790, ii n’existait pas de pensions en France.
C’est là une erreur. La loi de 1790 n’a pas créé un système ni un principe nouveau en faveur des fonctionnaires de l’Etat. L’assemblée constituante, en décrétant cette loi, n’a eu qu’un seul but, celui de régulariser cette partie du service public, en France, et d’extirper les abus qui étaient très nombreux, et dont on se plaignait généralement ; en un mot, l’intention de l’assemblée constituante a été de substituer l’ordre au désordre. Les pensions, surtout en France, sont anciennes, je crois qu’il faudrait monter bien haut pour trouver l’origine de ces pensions, mais il est vrai qu’avant 1790 ces pensions ne constituaient que de véritables faveurs, elles étaient accordées par les gouvernants, selon leur bon plaisir, sans règle fixe, sans contrôle, sans qu’on tînt compte du mérite et des services rendus. C’est à cause de cela que les nombreuses pensions, les nombreux bénéfices accordés par le gouvernement précédent avaient fait naître des plaintes générales. L’assemblée constituante a voulu faire cesser ces plaintes. C’est dans l’intérêt du trésor et non des fonctionnaires qu’elle a voté la loi du 22 août 1790, qui la première en France a soumis la collation des pensions à des règles fixes et invariables.
Messieurs, il n’est donc plus question, ce me semble, de contester le principe de la loi. La nécessite, la convenance d’accorder des pensions à d’anciens fonctionnaires me paraît plus ou moins généralement reconnue. L’honorable député du Luxembourg qui, le premier, a porté la parole dans cette séance, vous a fait remarquer que le système de la loi qui vous occupe était adopté par toutes les nations de l’Europe. Je ne crois pas qu’il y ait une seule de ces nations où on n’accorde pas de pension aux fonctionnaires dans certaines limites et à certaines conditions. Tous les hommes pratiques, tous les hommes qui se sont occupés de cette matière, soit comme membres des assemblées délibérantes en France et en Angleterre, soit ceux qui ont traité la question ex professo sont d’accord sur la nécessité, la convenance d’accorder une pension à des fonctionnaires qui ont rendu de longs et éminents services.
Dès lors, il ne peut, ce me semble, y avoir contestation que sur la manière d’admettre les fonctionnaires à la pension et sur le taux de la pension. Ce sont là des questions de détail, des questions sur lesquelles je ne veux pas m’étendre en ce moment. Les observations qu’on pourrait avoir à faire sur l’une ou l’autre disposition trouveront mieux leur place, quand ces propositions seront mises en discussion.
Toutefois, nous devons nous proposer un but, en faisant par la loi ce que la justice et l’équité commandent en faveur des anciens fonctionnaires ; nous devons éviter cependant aussi de grever le trésor outre mesure et pour des services qui n’ont pas été réellement rendus. Sous ce rapport, il est quelques dispositions qui méritent de fixer l’attention particulière de la chambre. Je n’en citerai qu’une seule en ce moment. C’est une disposition qui de tout temps a donné lieu à des abus et à des abus assez graves.
D’après un article de l’arrêté-loi du 14 septembre 1814, article qu’on a reproduit dans les différents projets qui ont été présentés jusqu’ici aux chambres, la pension du fonctionnaire est liquidée d’après la moyenne du traitement des trois dernières années. C’est là une disposition qui a été très onéreuse au trésor. C’est une disposition dont on peut abuser, et on a abusé sous le gouvernement précédent comme sous le gouvernement actuel, car il est difficile d’éviter les abus. Je crois que, dans l’intérêt du trésor, cette disposition devrait être modifiée. La section centrale a proposé de porter à 5 au lieu de trois les années dont on prendrait la moyenne. C’est une amélioration ; mais ce n’est peut-être pas encore assez.
En France, d’après un des derniers projets présentés à la législature, je crois que c’est celui présenté en 1841, on a fixé le terme de 10 ans.
Je crois que ce terme n’est pas trop long. Je crois qu’on pourrait fixer à 20 ans au moins le nombre des années dont la moyenne doit servir de base à la liquidation de la pension.
Il en résulterait, j’en suis convaincu, un allégement considérable pour le trésor. D’un autre côté, on ne léserait aucun droit réel, on pourrait récompenser les services loyalement rendus au gouvernement.
C’est une disposition de détail, j’en conviens mais assez importante pour appeler, dès à présent, l’attention de la chambre sur sa portée.
M. Savart-Martel. - Conséquent avec ce que je disais hier, je pense que la loi a une portée trop étendue. Mon opinion repose sur deux raisons principales.
La première, c’est qu’avec une disposition aussi large, nous nous exposons à créer des pensions nombreuses dont nous ne saurions même apprécier le chiffre approximativement. S’il suffit d’être employé d’une administration pour avoir un droit à la pension, la charge peut devenir immense et dépasser toute prévision dans un certain nombre d’années.
Dans un pays où presque tous les travaux publics se font par l’Etat, dans un pays où presque tous le monde veut vivre aux dépens du budget, où le nombre des employés ministériels n’est point fixé et ne saurait l’être, pareille disposition n’en peut être admise, sinon elle deviendrait dangereuse pour les pensionnaires mêmes, car un jour arriverait où la charge étant devenue insupportable, l’excès du mal nécessiterait des modifications.
Si je ne me trompe, on nous a dit hier que les personnes auxquelles s’applique essentiellement cet article n’excéderaient guère dix mille. C’est, convenons-en un chiffre déjà fort élevé ; mais qui nous garantit que ce chiffre ne sera point augmenté ?
Quand on réfléchit que la proposition a une portée telle qu’elle ne s’appliquerait point seulement aux magistrats, et fonctionnaires proprement dit, mais aussi à tous les employés créés et à créer, il est à craindre que, par la suite, le nombre d’employés ayant droit éventuellement à la pension, dépassât celui des contribuables ayant assez d’aisance pour les payer. Ce n’est pas que je veuille abandonner ces employés inférieurs, il serait aisé de pourvoir à leur sort par une légère retenue de prévoyance et un subside même que fournirait l’Etat.
Ma deuxième raison, la voici :
Pour fonder le droit à la pension, vous invoquez l’arrêté-loi de 1814 et les considérants de cette disposition que Guillaume Ier, alors prince souverain, a puisé dans le décret de l’assemblée constituante du 29 août 1790. Ces motifs, on nous les a lus et relus, comme expliquant la pensée du législateur.
Eh bien, ces motifs sont loin de favoriser la généralité des termes de l’art. 1er qui vous est soumis.
La loi de 1790 établit le principe, que l’Etat doit récompenser les services rendus au corps social, quand leur importance et leur durée méritent ce témoignage de reconnaissance. Elle interdit la réversibilité, mais dans le cas de défaut de patrimoine, la veuve d’un homme mort dans le cours de son service public pouvait obtenir une pension alimentaire.
L’arrêté-loi de 1814 est moins favorable encore : « Considérant, dit-il, qu’il est de la justice du gouvernement de récompenser de longs et fidèles services, et de fournir un soutien à des hommes qui ont consacré leur vie au service de l’Etat, et auxquels leur âge et leurs forces ne permettent plus de le servir activement. »
Invoquer les motifs de ces lois pour en tirer la conséquence que tout employé (sans distinction aucune), a un droit expectatif à la pension par cela seul qu’il était rétribué par le trésor public, serait méconnaître l’intention du législateur, qui a eu en vue de longs et honorables services.
Le droit à la pension dérivant de la seule circonstance qu’on a été rétribué par le trésor public, est vraiment une anomalie.
S’il est juste de récompenser les longs et honorables services de fonctionnaires qui ont été rétribués par l’Etat pour exercer leurs fonctions, à plus forte raison le serait-il de récompenser les services de ceux qui ont exercé gratuitement ; tel, par exemple, que les chambres et les juges de commerce ! Mais, non, sous notre législation, c’est le salaire qui donne droit à la pension, tandis que pour être conséquent avec les principes de justice et de dignité, ce devrait être le contraire.
Au surplus, messieurs, je n’entends point contester la retraite à laquelle ont droit les magistrats et fonctionnaires publics. J’avoue même que le projet fixe avec économie ces pensions. Il a suivi une échelle de proportion qu’admet l’équité.
Pour repousser à la pensée que j’ai émise de ne point accorder de pension à ceux qui sont notoirement dans l’aisance, on suppose que je veux des classifications de fortune et l’arbitraire du gouvernement ; mais il n’en est rien, absolument rien, puisque la simple déclaration de la partie prenante me suffirait. La différence entre ceux qui contestent mes observations et moi, c’est que ceux-ci ont principalement en vue les pensionnaires, tandis que moi j’ai principalement en vue le contribuable sans vouloir toucher à des droits acquis.
La modification que je propose en faveur du trésor public contre une opulence évidente ne fournira qu’une faible économie, dit-on, mais si ma proposition est juste, si elle peut dégrever le trésor on doit l’admettre. Je veux de grandes économies, et à défaut de grandes, je veux même des faibles économies. Non, messieurs, il ne faudra point, comme on vient de vous le dire, que le fonctionnaire établisse sa misère pour obtenir la pension, c’est dénaturer ma proposition, puisque l’homme qui possède un revenu de 9 à 10,000 fr. ne peut être rangé au nombre des misérables. Je voudrais que tous nos contribuables aient pareille fortune. Les charges énormes qu’on leur fait supporter seraient moins lourdes.
M. de Garcia. - Messieurs, dans la séance d’hier, trois orateurs vous ont présenté des considérations qui avaient pour objet de modifier certains principes de la loi qui vous est soumise.
Ces orateurs n’ont pas eu le bonheur d’être compris, car on les a combattus en déplaçant complètement leur pensée et la portée de leurs observations.
L’un de ces orateurs, l’honorable M. Pirmez, avait contesté le principe qui avait été mis en avant, que les fonctionnaires avaient un droit acquis à la pension et que ce droit ne pouvait être modifié par la loi actuelle. L’honorable M. Pirmez, pas plus que les autres orateurs qui ont présenté des observations contraires à certains principes du projet, n’a jamais prétendu qu’il ne fallait pas accorder des pensions à d’anciens fonctionnaires qui étaient devenus infirmes ; mais il a prétendu qu’il n’y avait pas pour les fonctionnaires un droit acquis, tellement acquis, qu’il ne puisse être modifié par une loi nouvelle.
On a répondu à l’honorable M. Pirmez qu’il s’était trompé, et que lorsqu’on avait tiré des inductions de l’arrêté-loi de 1814 et de la loi qui a précédé celle de 1790, il était tombé dans l’erreur. Je crois, au contraire, que les motifs qu’on a fait valoir contre son opinion sont de nature à prouver que la législature peut toujours modifier son système de pensions.
Ce qu’a dit l’honorable M. de Muelenaere le prouve évidemment. Avant 1790, les pensions étaient accordées par le souverain, mais elles étaient accordées abusivement. Si vous admettez que les droits étaient acquis, l’abus était consacré par l’usage, par la coutume qui est aussi une loi, et la loi de 1790, si le principe de l’honorable M. Pirmez n’était pas vrai, n’aurait pas pu ôter ces droits acquis. L’assemblée constituante, cet illustre réformateur, ne s’est point arrêté devant les considérations qu’on fait valoir en ce moment.
Messieurs, vous êtes appelés aujourd’hui à faire une loi sur les pensions. Eh bien, votre puissance, votre droit vous donnent la faculté de modifier tout ce qui est antérieur. Qu’on ne vienne pas dire qu’il y a des droits acquis, la loi que nous sommes appelés à faire est une loi organique, qui doit être conçues uniquement dans des vues d’intérêt général. Le projet de loi en discussion et les observations de la section centrale prouvent eux-mêmes que le prétendu principe du droit acquis n’est pas sérieusement opposé. Il résulte de l’examen de ces documents qu’on s’est mis au-dessus de ces considérations, On a en effet réduit les plus fortes pensions à une somme déterminée. Si, comme on vient de prétendre, le droit était acquis, on ne le pouvait.
Or, qui peut le moins, peut le plus. Si vous avez pu modifier les lois existantes en bornant les pensions à un taux déterminé, la chambre a le droit de modifier ces lois sur d’autres points et elle puise ce droit dans le projet même présenté par le gouvernement et dans le rapport de la section centrale.
L’honorable M. Savart a aussi été combattu, parce qu’on a complètement déplacé, faussé même les idées qu’il avait émises. Il n’a jamais prétendu qu’il ne fallait pas accorder des pensions aux anciens fonctionnaires, mais il s’est demandé s’il était convenable, dans l’intérêt du pays, de donner des pensions à des fonctionnaires qui étaient en possession d’une fortune de 10,000 fr. de revenu.
Messieurs, en examinant cette question, l’honorable M. Savart a posé des idées et des considérations dignes de l’attention de la chambre et de tout homme qui s’occupe de l’économie politique.
Sa théorie est des plus justes, mais je pense qu’elle est inexécutable dans la pratique, et dès lors il m’est impossible de l’admettre. Cette théorie comporte une investigation de fortune que je ne puis vouloir consacrer.
Moi aussi j’ai combattu les principes de la loi, je les ai combattu surtout parce qu’ils tendent à mettre d’une manière absolue à la charge du trésor public, toutes les pensions des fonctionnaires. Pour me combattre, on a dit que ce principe n’est pas neuf, j’en conviens, mais j’espère que mes adversaires conviendront avec la même franchise que moi, que si en lui-même le principe n’est pas neuf, on lui donne une étendue qu’il n’avait pas dans la loi, sous le régime de laquelle nous nous trouvons encore. En effet, jusqu’ici, grand nombre de fonctionnaires ont été soumis à une retenue, pour alimenter le fonds des pensions, et dorénavant ils ne seront plus soumis à cette charge. Vous avez les fonctionnaires de l’administration des postes, du chemin de fer, des finances, des eaux et forêts, qui sont tous soumis à une retenue ; eh bien, si vous admettez la loi proposée, cette retenue n’existe plus. D’un côte vous élargissez le cercle des dépenses en appelant à la pension tous les pensionnaires, tous les employés, à quelle catégorie qu’ils appartiennent, quelque bas qu’ils soient placés, et d’un autre côte vous restreignez le cercle des revenus publics, en supprimant toutes les retenues. Eh bien, messieurs, dans l’état ou se trouvent nos finances, cette mesure est-elle sage, est-elle prudente ?
Les honorables membres qui ont combattu les considérations que je vous soumettais hier, n’ont en rien détruit les motifs sur lesquels je les fondais, et de la manière dont ils y ont répondus, je dois croire qu’ils ne m’ont pas compris plus que M. Pirmez et M. Savart. Pour se donner des armes ils ont dû entrer dans des exagérations auxquelles jamais je n’ai songé. Au surplus, voici ce que je voudrais ; que tous les fonctionnaires fussent soumis à une retenue proportionnelle au moyen de laquelle on alimenterait en partie au moins le fonds des pensions. On m’a demandé ce que je ferais à l’égard des veuves et des orphelins, si je proposerais la suppression de la partie de la loi qui les concerne ; je ne me suis pas expliqué sur ce point parce que je n’avais point d’objection à faire contre cette partie de la loi ; je n’ai parlé que des pensions des fonctionnaires envers lesquels seuls, l’Etat peut être tenu à quelque rémunération.
On a dit aussi, contre mon opinion, que l’expérience de ce qui s’est passé en Belgique et en France, démontre qu’on ne peut pas couvrir les pensions avec une retenue de 5 p. c. Je ne conteste pas cette assertion. Cependant je pourrais dire que si une retenue de 5 p. c n’a pas suffi, c’est qu’en France comme chez nous, il y a eu des abus dans la collation des pensions. Le gouvernement constitutionnel est souvent trop faible, je ne dirai pas corrompu, mais il cède trop facilement aux importunités de ceux mêmes qui sont chargés de défendre les intérêts de la nation.
Messieurs, je ne conçois pas que mes observations d’hier n’aient pas été comprises. Quoiqu’il en soit, je les ferai comprendre par un amendement. D’après cet amendement, tous les fonctionnaires seraient obligés de concourir au moyen d’une retenue, à la formation, non pas de tout le fonds des pensions, mais d’une partie de ce fonds ; cette retenue viendrait à alléger la charge que les pensions font peser sur le trésor, sur la nation, sur les contribuables.
Vous avez, messieurs, une quantité de fonctionnaires qui ne sont pas payés d’une manière convenable, et lorsqu’on vous propose d’améliorer le sort de ceux qui sont trop mal rétribués, lorsqu’on vous propose d’établir quelque harmonie entre les traitements des différentes catégories de fonctionnaires, alors vous reculez à cause de l’état de nos finances, et maintenant vous ne craindriez pas de sacrifier vos finances pour faire des pensions à tous les employés de l’Etat.
Je crois, messieurs, avoir rencontré la plupart des objections faites contre les observations que j’ai présentées dans la séance d’hier. Ces objections n’ont pu prendre une apparence de fondement qu’en exagérant mes pensées, et, disons-le, en me prêtant ce que je n’ai pas dit, et cela pour me combattre avec plus de facilité.
C’est ainsi que M. le rapporteur et M. le ministre des finances m’ont dit que des fonctionnaires qui ne seraient plus capables de remplir leurs fonctions, resteraient cependant en place, parce que le gouvernement ne voudrait pas réduire à l’indigence des fonctionnaires qui auraient fidèlement servi le pays. Cette pensée, messieurs, n’est jamais entrée dans mon esprit et mes honorables contradicteurs, en me faisant cette réponse, ont dû m’attribuer une opinion et des théories que je n’ai jamais émises. Je n’ai jamais prétendu, en effet, qu’il ne fallait pas donner de pensions. Il n’y a que M. Savart qui a voulu établir une ligne de démarcation entre les fonctionnaires qui auraient 10,000 livres de rente et ceux qui n’auraient pas ce revenu. Eh bien, j’ai fait remarquer moi-même que cette théorie, quelque juste qu’elle soit, n’est pas exécutable.
Pout faire comprendre mon idée, pour en écarter toute fausse interprétation, dès aujourd’hui je présenterai un amendement qui résume toute la première partie des considérations générales que j’ai eu l’honneur de vous soumettre. Cet amendement, je crois, doit trouver sa place à l’art. 40. Je ne prétends pas qu’il soit complet ; je désire être éclairé par mes honorables collègues ; je désire que mon amendement reçoive toutes améliorations dont il est susceptible ; je désire donc qu’il soit imprimé et renvoyé à la section centrale. Voici messieurs cet amendement.
L’art. 40 est conçu comme suit :
« Les pensions de retraite sont à la charge du trésor public.
Je propose d’ajouter à cette disposition un second paragraphe dans les termes suivants :
« Mais tous les fonctionnaires ayant droit à ces pensions concourront à la formation du fonds de dotation nécessaire à ce service, en versant au trésor de l’Etat, partie de leur traitement dans la proportion suivante :
« 1° 5 p. c. des traitements et émoluments dont le montant s’élève ensemble à 3,600 et au-delà.
« 2° 4 p. c. des traitements et des émoluments dont le montant s’élève ensemble de 2,400 à 3,300 fr..
« 3° 3 p. c. des traitements et des émoluments dont le montant s’élève ensemble de 1,200 à 2,400 fr.
« 4° 2 p. c. des traitements et des émoluments dont le montant s’élève ensemble de 600 à 1,200 fr.
« Sont exempts de toutes retenues les ministres à portefeuilles et les fonctionnaires dont les traitements et les émoluments sont inférieurs à la somme de 600 fr. »
M. Orts. - Je désirerais avoir une explication sur la portée de cet amendement. Je demanderai si par le mot concourront, l’honorable membre entend : devront concourir, au lieu : pourront concourir ; en d’autres termes, s’il sera facultatif aux fonctionnaires de dire : Je ne concours pas, je renonce à ma pension.
M. le président. - L’amendement se rattache l’art. 40, nous pourrons le discuter lorsque nous en serons arrivés à cet article.
M. Verhaegen. - Messieurs, depuis hier, le cercle de la discussion s’est agrandi. L’amendement que vient de présenter l’honorable M. de Garcia a une immense portée et pour mon compte, je ne sais pas, jusqu’à présent, si je dois l’appuyer ou le combattre ; toutefois, je pense, qu’avant de s’occuper des pensions qui, dans l’opinion de la section centrale, ne sont que des corollaires des traitements, il conviendrait de s’occuper des traitements mêmes ; de cette manière, on pourrait tout coordonner ; une fois que les cadres des fonctionnaires et des employés dans toutes les administrations ainsi que les traitements attachés aux fonctions et emplois seraient déterminés par la loi, et en outre qu’il y aurait une loi sur le cumul, il serait facile de faire une bonne loi sur les pensions, mais jusque-là tout est dans le vague. Et qu’on ne se le dissimule pas, faire peser encore de nouvelles charges sur des fonctionnaires qui n’ont pas même le stricte nécessaire, c’est faire plus de mal que de bien ; à ce point de vue, l’amendement que présence l’honorable M. de Garcia a dans ce moment bien de chances de succès.
Messieurs, ce qui a frappé surtout mon attention dans le projet que nous discutons, c’est encore une fois que tout est laissé à l’arbitraire du gouvernement, et en effet, si tous les fonctionnaires et employés de différentes administrations ont droit à des pensions, il en résultera que le gouvernement pourra créer autant de pensions qu’il le vaudra.
L’article premier du projet est très élastique : « tout fonctionnaire, tout employé, quelque petit qu’il soit à quelque administration qu’il appartienne a droit à la pension. » Cette disposition est générale et ne souffre aucune exception.
J’aurais voulu, moi, que les traitements fussent une bonne fois fixés par la législature, et que les pensions, qui ne sont en définitive que le corollaire des traitements, suivissent le sort de cette fixation.
Messieurs, j’ai entendu dire par l’honorable que le projet de loi actuel est plus favorable à l’Etat que la loi qui nous régit ; et il a ajouté qu’il est aussi plus favorable à certains fonctionnaires : Mais, messieurs, s’il est plus favorable à certains fonctionnaires, il est plus défavorable à certains autres ; je dirai plus, il enlève à certains fonctionnaires des droits acquis, des droits qu’on ne peut pas leur enlever.
Je supplie la chambre de bien y réfléchir, on vient de parler de droits acquis ; l’on semble émettre l’opinion que la chambre peut toucher à semblables droits ; je me hâte de protester contre une semblable doctrine ; il est des droits acquis en matière de pensions, auxquels il ne nous est pas permis de toucher, et ici j’entends parler des droits des fonctionnaires du département des finances, des postes, des ponts et chaussées et du cadastre, car la loi de 1822 a rendu applicable à ces fonctionnaires les dispositions relatives à la caisse de retraite, qui, auparavant, n’étaient applicables qu’ana seuls employés de l’enregistrement :
Dès l’an 4 de la république française, l’administration de l’enregistrement, dans le but de pourvoir au sort des veuves et des orphelins de ses employés, obtint l’autorisation de prélever 1 p. c. sur les appointements.
Les autres administrations des finances obtinrent la même autorisation, et successivement la retenue fut augmentée de 1 jusqu’à 5 p. c., non seulement dans le but d’améliorer le sort des veuves et orphelins, mais aussi dans celui de satisfaire, autant que possible, aux pensions des employés sans le secours de l’Etat.
Ce système de tontine a été mis en vigueur parmi les employés des finances, des postes, des eaux et forêts, et du cadastre, par arrêté royal du 22 mai 1822.
Les fonctionnaires qui ont concouru à cette tontine ont fait avec le gouvernement un véritable contrat, et leurs droits sont régis par la législation qui était en vigueur au moment où ils se sont engages.
La caisse de retraite a été alimentée :
1° Par les versements qui avaient été faits sous le gouvernement français ;
2° Par le subside annuel de 30,000 florins des Pays-Bas accordé par le gouvernement précédent ;
3° Par les 10 p. c. que les intéressés ont été obligés de verser pour les années antérieures à 1822 ;
4° Enfin, par la retenue de 2 p. c. opérée jusqu’en 1836, et par la retenue de 5 p. c. faite depuis cette époque jusqu’aujourd’hui.
Maintenant quels étaient les droits des fonctionnaires dont nous venons de parler aux termes de la convention que l’Etat a conclu avec eux ? Les employés des finances et autres qui ont été mis sur la même ligne, étaient, au moyen de la retenue opérée sur leurs traitement, admis à la retraite, après 30 ans de service ; ils auraient, à titre de pension, la moitié de leur traitement qui était augmenté de 1/40 pour chaque année au-delà des trente ans, cependant la totalité de la pension ne pouvait, dans aucun cas, excéder les 4/5 du traitement. Voilà les droits qui étaient acquis à ces fonctionnaires.
M. Donny. - Je demande la parole.
M. Verhaegen. - Voici quels étaient les droits des veuves ; elles avaient les trois quarts de la pension de leur mari, si elles étaient mariées depuis plus de huit ans ; elles recevaient la moitié, si elles étaient mariées depuis moins de huit ans, mais depuis plus de trois ans, et même si n’étant pas mariées depuis trois années, elles avaient des enfants.
Quant aux enfants, ils avaient la moitié de la pension du père, jusqu’à l’âge de 18 ans.
Tels sont les droits des fonctionnaires dont je m’occupe en ce moment. Tels étaient les droits de leurs veuves et de leurs orphelins, droits que j’ai cru devoir défendre contre les attaques dont ils sont l’objet.
Ces droits leur sont acquis par suite des retenues et versements qu’ils ont subis ou opérés pendant 30 ou 40 ans. Je n’hésité pas à le dire, si au lieu de verser ces sommes dans la caisse de retraite, ils les avaient versés dans une caisse particulière tontinière, les avantages qu’ils auraient retirés de pareil versement auraient été peut-être plus considérables que ceux que leur assure la législation existante ; législation à laquelle on veut déroger, en enlevant des droits acquis.
Je dis messieurs qu’il ne nous est pas permis d’agir ainsi, parce que les fonctionnaires dont je parle ont dû s’attendre, comme équivalent de leurs versements, à jouir des avantages que leur garantissait la législation sous l’empire de laquelle ces versements ont eu lieu.
Maintenant, le projet de loi tend à consacrer des dispositions toutes différentes. Ce n’est plus un 40ème, c’est seulement un 60ème qu’on veut leur assurer, pour chaque année au-delà des 30 années de services, et cela sans que la pension puisse excéder les trois quarts du traitement, et dans aucun cas dépasser 6,000 fr. Pour les comptables, le maximum ne peut pas même aller au-delà de 4,000 fr. et pour ceux qui sont payés par remises, ces remises ne sont comptées que pour les deux tiers du traitement.
M. Malou, rapporteur. - Vous perdez de vue l’art. 64.
M. Verhaegen. - Je prétends que l’art. 64 ne sauve pas les droits de ces fonctionnaires ; au reste, si l’on entend cet article autrement que je ne l’entends, la discussion actuelle aura au moins pour résultat de lever tout doute et de consacrer irrévocablement les droits des intéressés.
D’après le projet de loi, quoiqu’on en dise, il ne s’agit plus pour les fonctionnaires eux-mêmes d’invoquer les dispositions de la loi existante pour le règlement de leurs pensions.
Quant à leurs veuves, il est institué une cause de pension, à l’alimentation de laquelle ils concourent encore par une retenue de 5 p. c.
Le projet de loi ne détermine même aucune condition de réversibilité, aucun tarif de pension ; tout cela est en quelque sorte abandonné à l’arbitraire : on se borne à fixer un maximum de 4,000 fr. Il y a plus : en ce qui concerne les veuves et orphelins, chaque administration aura sa caisse particulière. Il y aura donc autant de règles spéciales qu’il y aura d’administration.
Messieurs, je le répète, il ne nous est pas permis de toucher à des droits acquis ; et l’art. 64 du projet de loi né répond pas à mes objections, ou, dans tous les cas, ne lève pas mes doutes.
Voici comment est conçu l’article :
« Les fonctionnaires et employés ressortissant du ministère des finances ou à l’administration des postes actuellement en fonctions, conservent la facilité de faire liquider éventuellement leur pension d’après les bases de l’arrêté royal du 29 mai 1822. »
Mais il ne s’arrête pas là, il va plus loin. Il dit :
« Toutefois, les services postérieurs à la présente loi, ne seront pas pris en considération pour dépasser les limites établies à l’art. 13 ci-dessus. »
C’est cette addition qui enlève aux fonctionnaires dont je parle les droits qui leur étaient acquis par la législation existante. Et ne vous y trompez pas, quand je fais avec quelqu’un un contrat, contrat d’après lequel je verse annuellement des sommes d’argent, pour retirer des avantages de ces versements d’après des principes reçus en matière de tontine, ce n’est pas seulement l’époque présente que j’ai en vue, mais j’ai aussi en vue l’avenir, et cet avenir on ne peut pas toucher, sans m’enlever les droits que j’ai irrévocablement acquit par le contrat.
Qu’arriverait-il d’abord, à l’égard de ceux de ces fonctionnaires qui ont fait des versements annuels et qui n’ont pas encore 30 ans de service, qui n’ont, par exemple, que 29 ? Liquiderait-on leur pension, conformément à l’arrêté de 1822 ?
Un membre. - Oui.
M. Verhaegen. - Vous liquiderez, conformément à l’arrêté de 1822, c’est-à-dire, que vous établiriez, d’après l’ancien tarif, ce qui est dû à ces employés pour ces 29 années. Mais ces employés restant encore en fonctions pendant 5, 6 ou 7 ans, que leur donnerez-vous pour le surplus ? Leur donnerez-vous une augmentation de pension, calculée à raison du 40ème fixe d’après l’arrêté de 1822, ou bien à raison du 60ème sur pied du projet en discussion ? Vous voyez donc que la différence est énorme.
Oh ! je comprends fort bien que vous veniez leur dire : « cela est plus avantageux à l’Etat. » Mais il ne n’agit pas de ce qui peut être avantageux à l’Etat, mais des droits qui découlent d’un véritable contrat.
J’arriverai à l’objection, que la caisse de retraite ne peut pas exister sans subside et je réponds que si l’on n’avait pas fait abus de la caisse de retraite, cette caisse n’aurait pas eu besoin des subsides énormes que nous avons été obligés de lui accorder annuellement. Ce ne sera certes pas l’Etat qui, après avoir abusé de la caisse de retraite viendra répudier sa responsabilité, viendra violer un contrat formel ! ! !
Quelle était donc la position de la caisse de retraite en 1830 ?
Je pense qu’en 1830, au lieu d’un déficit, il y avait un boni de 300,000 fr. Je crois même qu’une somme assez considérable nous a été bonifiée en compte par la Hollande. Le déficit date de 1831, il était alors de 350,000 fr. ; il s’est accru successivement et s’élève maintenant à 944,000 fr., ainsi que le prouve le budget des dotations dont je vous parlais hier. A qui donc la faute ? Sous le gouvernement hollandais, les fonctionnaires ne payaient que 2 p. c., ils payent aujourd’hui 5 p. c.
Le subside, sous le gouvernement hollandais, ne pouvait excéder 30,000 fl., pour tout le royaume des Pays-Bas et aujourd’hui pour les provinces méridionales seules, nous voilà arrivés à 944,000 fr. Comment donc ce résultat a-t-il été amené ? Peut-on objecter l’abus qu’on a fait de la caisse de retraite ? Sont-ce les fonctionnaires publics qui ont commis cet abus ? Non ; c’est le gouvernement qui n’est pas resté dans les limites qui lui étaient tracées. C’est le gouvernement qui, ne se contentant pas des suppléments, des indemnités, des gratifications des tantièmes, etc., etc., a mis à la pension, avec les trois quarts de leur traitement, des personnes qui n’y avaient aucun droit, qui étaient très capables de servir encore l’Etat pendant 20 ans et plus.
Si l’on n’avait pas arrêté ces abus, en les rendant publics, on serait arrivé tôt ou tard à un subside de 2 ou 3 millions ; car en laissant les places ouvertes au moyen de la mise à la pension, on peut remplir des promesses qui sont faites, placer des créatures, renouveler, en un mot, tous les inconvénients que nous avons si souvent signalés.
Ce n’est pas pour les fonctionnaires que je me plains, c’est encore au nom de leurs veuves et orphelins, et à cela il n’y a pas de réponse. Car là évidemment, on enlève des droits acquis.
La législature est-elle omnipotente à ce point qu’elle puisse enlever des droits irrévocablement acquis, violer un véritable contrat ; car c’est un contrat que ces fonctionnaires ont fait avec l’Etat.
S’il y avait moyen, comme je le disais tantôt, de coordonner avec les traitements tout ce qui est relatif aux pensions, si alors on retranchait à ceux qui sont trop bien rétribués, pour ajouter à ceux qui n’ont pas assez, en d’autres termes, si l’on pouvait améliorer la position de la magistrature, il n’y aurait plus d’inconvénient à ce que tous les fonctionnaires et magistrats prissent part à une caisse de retraite.
Alors toute objection contre l’amendement de l’honorable M. de Garcia viendrait à cesser. Il ne s’agirait plus d’examiner si l’Etat doit une pension aux fonctionnaires, en rémunération de leurs services, si des fonctionnaires, jouissant d’une belle fortune, n’ayant aucun besoin doivent, à charge du trésor et à charge, en définitive, de ceux qui ont des besoins, jouir d’une belle pension, tous les fonctionnaires auraient des droits de leur propre chef : c’est-à-dire qu’eux, leurs veuves et orphelins, prendraient part dans cette caisse tontinière, où ils auraient versé annuellement des sommes qu’on aurait déterminées et à l’égard desquelles on pourrait établir une échelle proportionnelle.
Si l’on adoptait ce système, le droit des fonctionnaires dont j’ai parlé tantôt serait aussi intact. Toutes les objections tirées de droits acquis en vertu d’une législation en vigueur viendraient à cesser.
C’est donc cette question de principe qu’il m’importe d’examiner avant tout, et je désire que ceux de mes honorables collègues qui partagent à cet égard mon opinion veuillent bien y réfléchir, et voir s’il ne conviendrait pas peut-être de renvoyer l’adoption de la loi actuelle, quant à ce point, à une époque où l’on pourrait s’occuper des traitements et de la loi de cumul.
Je n’en dirai pas davantage pour le moment, me réservant de revenir dans la discussion des articles sur les dispositions dont je me suis déjà occupé.
M. Jadot. - Messieurs, les observations que je vais avoir l’honneur de vous soumettre, auraient pu n’être produites qu’à l’occasion de la discussion des articles auxquels elles se rapportent, mais j’ai préféré les placer dans la discussion générale, afin qu’on ait le temps de les examiner, si on le trouve bon, et parce qu’elles sont le développement des amendements que j’aurai l’honneur de proposer, s’il y a lieu.
L’article 81 du règlement du 29 mai 1822 fixe aux 4/5 du traitement le maximum de la pension à accorder à tous les employés des finances, indistinctement : ceux à remises comme ceux à traitement fixe.
Le projet de loi présenté le 11 mars 1834 ne faisait pas non plus de distinction entre les employés de ces deux catégories. Le maximum pour les uns et les autres était fixé à 6,000 fr.
Ce projet avait spécialement pour objet, ainsi que le règlement de 1822, les pensions des employés participant à la caisse de retraite du département des finances.
Le 10 février 1838 le gouvernement le retira et en présenta un autre qui avait pour objet toutes les pensions à la charge du trésor public, les pensions militaires exceptées.
Par ce nouveau projet, les trois quarts seulement du traitement des employés à remises devaient entrer dans le calcul de la pension.
Outre ce, le maximum de la pension de ces employés ne pouvait être que de 3,000 fr,, tandis que celui des pensions des employés à traitement fixe était fixé à 6,000 fr.
Ces deux dispositions modifiaient singulièrement la législation existante, au préjudice des employés à traitements proportionnels.
Ce projet, après avoir été discuté et voté article par article, fut rejeté par la chambre dans la séance du 10 février 1841.
L’article 16 de cette loi, relatif au maximum, portait :
« Dans aucun cas et sous aucun prétexte, la pension ne pourra excéder les 3/4 du traitement moyen ou le maximum déterminé par le tableau annexé à la présente loi, n°2.»
Cette disposition était empruntée à l’ordonnance française du 12 mars 1825, mais il est à remarquer que cette ordonnance ne concernait que les employés des finances, et qu’ici elle s’appliquait à tous les fonctionnaires et employés des différents départements ministériels.
L’ordonnance française qui, comme je viens de le dire, ne concernait que les employés des finances, les avait divisés en deux catégories, savoir : les fonctionnaires à traitement fixe et les fonctionnaires à remises et salaires ; cette division se conçoit lorsqu’il s’agit du département des finances seul.
Dans la loi générale en discussion, au lieu des mots fonctionnaires à remises et salaires, employés dans la loi de 1838 et l’ordonnance française, on s’est servi des mots fonctionnaires ou employés comptables, ce qui rend la disposition applicable aux comptables de tous les départements ministériels, à traitements fixes comme à traitements proportionnels ou remises.
Mais dans l’un comme dans l’autre cas, il est impossible de justifier la mesure.
Il suffirait donc qu’un employé fût comptable pour qu’alors même qu’il jouit d’un traitement supérieur à celui d’un employé qui ne l’est pas, il reçut une pension inférieure à celui-ci.
Ainsi, par exemple, le caissier-général de l’Etat qui, tôt ou tard sera un individu personnellement et au besoin corporellement responsable, et qui, bien certainement n’est qu’un comptable comme les receveurs ordinaires, n’aurait droit, en payant la plus forte retenue 500 fr , qu’au maximum de 4,000 francs, tandis qu’un chef de division ou de direction dans un ministère et dont la retenue, sur le pied de 8,000 francs de traitement fixe, ne s’élèverait qu’à 400 francs, pourrait prétendre à une pension supérieure de 4,000 fr. et même au maximum de 6,000 fr.
Je pourrais citer une foule d’autres exemples.
S’il fallait faire une distinction entre les fonctionnaires non comptables et les fonctionnaires comptables, elle devrait être à l’avantage de ceux-ci, à raison de ce qu’ils sont tenus de fournir un cautionnement et de ce qu’une plus grande responsabilité pèse sur eux.
Je ne comprends pas les motifs d’une semblable disposition et je crois qu’il serait bien difficile d’en donner un satisfaisant ; aussi je suis persuadé qu’après y avoir bien réfléchi, la chambre ne voudra pas donner son approbation à une déclaration qui blesse la justice et jette de la déconsidération sur une classe de fonctionnaires dont les services méritent, à l’égal de tous les autres, la sollicitude du gouvernement.
Je reproduirai ici que ce j’ai dit dans la séance du 14 février 1841 lors de la discussion du projet qui fut rejeté le jour même.
« Cette déclaration n’est ni dans nos mœurs, ni dans l’esprit de nos institutions suivant lesquelles la loi doit être la même pour tous lorsque tous sont dans les mêmes conditions, sans privilège pour personne. Or, il y a privilège alors qu’un fonctionnaire paye autant et même plus qu’un autre fonctionnaire sans prendre dans les avantages une part égale à celle que celui-ci y prend, (ou sa veuve, ou ses orphelins.) »
Je proposerai le retranchement du 2° alinéa de l’article 13, et si mon amendement est rejeté, je me verrai obligé de voter contre la loi. Je ne consentirai jamais à donner mon approbation à l’injustice que ce paragraphe consacre.
Il est encore d’autres dispositions que je rejetterai si elles ne sont pas examinées.
Je ne veux pas que le gouvernement puisse instituer des caisses de pension là où il trouvera convenable et d’y faire contribuer des fonctionnaires à son choix.
Je ne veux pas que le gouvernement ait la faculté de régler les conditions d’admissibilité des veuves et orphelins par des statuts particuliers à chaque caisse.
Il faut une caisse par département ministériel et des règles communes à toutes pour l’admissibilité des veuves et orphelins à la pension en prenant pour base du calcul de la pension non le rang qu’occupait le fonctionnaire, mais bien l’importance de son traitement et conséquemment sa part contributive dans le fond de la caisse.
En admettant les articles 33 à 37 nous livrerions le sort des veuves et des orphelins à l’arbitraire du gouvernement.
C’est ce qu’il faut éviter.
M. Orts. - Je ne comptais pas prendre la parole dans la discussion générale, parce que je suis partisan du principe fondamental de la loi que l’Etat doit à titre de rémunération pour services rendus une pension aux fonctionnaires qui sont dans les conditions fixées par la loi ; mais je me réservais de prendre la parole dans la discussion de plusieurs articles, et l’article 64 sur lequel mon honorable collègue et ami M. Verhaegen s’est déjà expliqué, avait fait naître dans mon esprit des doutes très sérieux sur cette grande question de la rétroactivité ; sur cette considération n’attaque-t-on pas des droits acquis ? Je n’aborderai pas cette discussion parce que je craindrais de tomber dans des redites lorsqu’il sera question de cet article.
Je ferai seulement une observation qui concorde avec celle de l’honorable M. Verhaegen. Pourquoi la caisse des retraites a-t-elle essuyé des pertes, des diminutions de ses fonds ? C’est parce que, tandis que les fonctionnaires du département des finances auraient dû être à l’abri de l’arrêté-loi de 1822, être pensionnés comme tous les autres fonctionnaires sur le pied de l’arrêté-loi de 1814, est arrivé que la caisse des retraites non seulement n’a pu assurer une somme aux veuves et orphelins, mais même n’a pu servir les pensions de la caisse des retraites parce qu’on a accordé des pensions beaucoup trop fortes à des fonctionnaires eux-mêmes qui auraient pu, pendant de longues années, rendre des services à l’Etat. Voilà où était le vice.
Il serait donc question d’examiner avec beaucoup de maturité quelles sont les dispositions à prendre, relativement aux fonctionnaires qui puisent à la caisse des retraites.
J’avais demandé la parole lorsque l’honorable M. Savart avait énoncé différentes propositions qui me semblent contraires au principe fondamental et fixé par la loi qui nous est soumise.
Pour avoir droit à une pension, il faut deux conditions : l’une que le fonctionnaire ait fait partie de l’administration générale, la seconde qu’il ait été rétribué par le trésor public. D’une part on voudrait que cette disposition ne fût pas appliquée à tous les employés qui réunissent ces deux conditions : par exemple aux concierges, portiers etc. ; d’autre part il est des employés comme ceux des chemins de fer pour lesquels on voudrait restreindre le nombre des années de service qui donnent des droits à la pension ; mais les simples douaniers n’ont-ils pas autant de droits que les employés du chemin de fer à être retraités comme employés du service actif.
On voudrait ne pas donner de pensions à certains employés parce qu’ils sont d’un rang subalterne ; un instant après on dit qu’il ne faut pas donner de pensions à ceux qui sont riches. Ainsi les fonctionnaires du dernier ordre ne doivent pas avoir de pension, ceux de l’ordre le plus élevé n’en doivent pas avoir non plus.
Lorsqu’on cherche à fixer ce qu’on entend par les fonctionnaires qui ont de la fortune, on jette en avant le chiffre de 10,000 fr. de rentes. Je demanderai où est le contrôle. Dans la quittance, direz-vous, on devra faire une déclaration de son revenu. C’est une inquisition dangereuse.
M. Savart-Martel. - J’ai dit seulement qu’on devait déclarer qu’on n’a pas 10,000 fr. de rentes.
M. Orts. - N’est-ce pas mettre au courant de votre fortune l’Etat, tout le public ? Ces déclarations sont toujours extrêmement dangereuses. En matière de succession, on avait cru devoir les corroborer par le serment : je m’étonne qu’on ne fasse pas aussi affirmer par serment aux fonctionnaires que leur fortune ne dépasse pas 10,000 francs de rentes. C’est une inquisition à laquelle on ne peut se livrer.
Tandis qu’on ne veut pas accorder de pension à tout le monde, pas aux fonctionnaires qui rendent des services à l’Etat et qui n’ont pas de pension ; mais c’est qu’ils ne réunissent pas les deux conditions faire partie de l’administration générale et être rétribuée par l’Etat. Dans cette catégorie sont les juges consulaires. Mais si on leur donne une pension pourquoi n’en donnerait-on pas aussi aux jurés ? C’est parce que les uns et les autres ne font que remplir un devoir. Les juges consulaires rendent un service au commerce auquel ils appartiennent eux-mêmes ; le commerce à intérêt à être jugé par ses pairs ; sous ce rapport les juges consulaires qui sont ce que le commerce a de plus distingué reculeraient devant l’idée d’une pension pour les services qu’ils rendent à leurs concitoyens d’abord et ensemble à ceux qui appartiennent à la même classe qu’eux.
On dit qu’il faudrait faire contribuer tous les fonctionnaires à la caisse des retraites. On vous a répondu qu’il faudrait commencer par donner à ces fonctionnaires quelque chose qui fût l’équivalent de cette charge nouvelle.
On a cité l’ordre judiciaire pour lequel, depuis longtemps, ou réclame une augmentation de traitement ; mais ce ne sont pas seulement les fonctionnaires de l’ordre judiciaire qui réclament à bon droit une augmentation de traitement. Vous avez eu des réclamations de ce genre en faveur des commissaires de district et d’autres fonctionnaires. Si vous assujettissez tous les employés de l’Etat à verser annuellement une partie de leur traitement dans une caisse, il est juste de commencer par augmenter leurs traitements
Toutes ces théories vagues et pour ainsi dire inexécutables, sont très belles : mais j’attends toujours à l’exécution. Je ne conçois pas comment on pourrait formuler quelque chose d’assez précis pour ne pas tomber dans l’arbitraire, tout en voulant éviter l’arbitraire et les trop fortes dépenses ; car tous les systèmes formulés hier et aujourd’hui me laissent dans une incertitude telle qu’il me paraît impossible de ne pas y renoncer. Que les honorables veuillent bien formuler des amendements, alors on pourra les discuter ; comme il n’en a surgi aucun, je crois qu’il vaudrait mieux passer le plus tôt possible à la discussion des articles ; il y a des dispositions qui donneront nécessairement lieu à de très graves observations.
M. Donny. - J’ai demandé la parole, lorsque j’ai entendu l’honorable M. Verhaegen vous dire et vous répéter à plusieurs reprises que si la caisse des retraites des employés des finances se trouve en quelque sorte dans un état d’insolvabilité, cela provenait uniquement de ce que le gouvernement aurait disposé de cette caisse d’une manière abusive. Vous vous rappellerez, messieurs, que c’est un langage qu’on a tenu pendant plusieurs années dans cette enceinte, langage qui a fini par déterminer l’autorité supérieure à faire examiner la question à fond.
Une commission a été nommée à cet effet. Parmi les membres de cette commission, se trouvait notre honorable collègue M. de Brouckere. J’avais aussi l’honneur d’en faire partie.
Nous avons travaillé, pendant trois années entières, à examiner les pensions qui avaient été accordées sur la caisse des retraites, depuis la révolution. Nous les avons révisées une à une, en relisant successivement les dossiers, nous avons refait tous les calculs, discuté le mérite de toutes les pièces. Au bout de trois années, nous avons remis à Sa Majesté un rapport qui a été imprimé, et qui vous a été distribué.
Je vais vous rappeler en peu de mots les principaux résultats de ce travail.
Si l’on avait appliqué les règlements avec la plus scrupuleuse exactitude, si l’on ne s’en était écarté en aucune circonstance, en faveur d’aucun individu, il y aurait à payer de moins qu’aujourd’hui, environ 56,000 fr. sur la totalité des pensions.
Vous voyez, messieurs, que ce n’est pas une bagatelle de cette espèce qui peut amener l’énorme déficit que présente la caisse de retraite. C’est évidemment ailleurs qu’il faut chercher les causes de ce déficit.
Nous les avons cherchées ; nous avons trouvé que le déficit était la conséquence naturelle et nécessaire des dispositions mal combinées du règlement, et nous l’avons prouvé dans notre rapport.
A l’appui des observations que nous avons faites alors, messieurs, est venu se présenter un fait qui est la confirmation de tout ce que nous avions dit : c’est qu’en Hollande la caisse de retraite se trouve dans la même position que celle de Belgique. Elle est épuisée, et à tel point que, lorsqu’en exécution des arrangements faits par la commission d’Utrecht, il a fallu rembourser à la Belgique une somme de 7 à 800 mille fr., le gouvernement des Pays Bas a été obligé de faire acheter à la bourse la totalité des inscriptions qui devaient nous être remises de ce chef.
Il est une autre assertion de l’honorable membre, à laquelle je désire faire une réponse.
Le projet, vous a-t-il dit, porte un grave préjudice aux intérêts des employés des finances ; et pourquoi ? Parce que, dit-il, ce projet leur enlève des droits acquis, résultant d’un contrat. Mais, messieurs, il n’en est rien et j’espère vous faire partager ma manière de voir.
D’abord il n’y a pas de contrat, il n’y a du moins pas de contrat qui puisse imposer à l’Etat l’obligation de faire le service des pensions déjà accordées ou des pensions qui le seront à l’avenir sur la caisse des retraites. L’Etat n’a jamais contracté ni directement ni indirectement l’obligation de payer les pensions de retraite avec les deniers du trésor public.
Ensuite, quel est donc le préjudice que la loi nouvelle peut causer aux employés des finances ? Ces employés n’ont jamais eu le moindre droit à faire valoir sur le trésor, et le projet leur accorde un droit formel à sa charge. Je ne pense pas que ce soit là empirer la position des employés, que ce soit leur causer un préjudice.
Il est vrai, messieurs, qu’en compensation de ce droit nouveau, de ce droit efficace sur le trésor, ou leur enlève les droits qu’ils avaient acquis sur la caisse de retraite, mais comme cette caisse de retraite, leur unique débiteur, se trouve en déconfiture, on ne leur enlève pas grand’chose, on ne leur enlève rien du tout.
M. Verhaegen. - C’est par la faute du gouvernement
M. Donny. - On nous dit ; c’est par la faute du gouvernement ; mais non ; j’ai déjà eu l’honneur de le dire à la chambre, le gouvernement a appliqué le règlement, sauf dans quelques cas assez rares que nous vous avons signalés dans notre rapport et qui, étant redressés n’amèneraient qu’une réduction minime, une réduction de 36,000 fr. par an.
Ce ne sont pas les suites de ces irrégularités, ou, si l’on veut, de ces abus qui ont amené le déficit c’est, je le répète, l’application rigoureuse du règlement qui en est la cause.
Le projet de loi accorde donc aux employés des finances des droits effectifs, et cela en remplacement de droits inefficaces, de droits devenus complètement sans résultats utiles pour eux.
Je voudrais bien que l’honorable membre qui porte tant de sollicitude aux employés des finances, voulût se donner la peine de leur poser une question et de leur dire : choisissez de deux choses l’une : voulez-vous conserver tous les droits que vous ont accordés les règlements de 1822, mais n’avoir d’autre débiteur que la caisse de retraite avec obligation de la part du gouvernement d’y verser annuellement, je dirai même 30,000 florins, bien que cette somme soit le chiffre du subside fixé pour l’ancien royaume tout entier ; ou bien voulez-vous, en remplacement de ces droits, acquérir des droits nouveaux à la charge du trésor public, droits limités comme l’indique le projet de loi ? Je n’ai pas le moindre doute, messieurs, sur la réponse que l’on fera à l’honorable membre. Tous les employés, ceux au moins qui comprennent la chose, regarderont le projet de loi et les droits qu’il leur confère comme un véritable bienfait, comparativement à l’état de choses qui est résulté de l’arrêté de 1822.
Si cependant je me trompais, si telle n’était pas l’opinion des employés des finances, s’ils croyaient voir dans le projet des dispositions qui empirent leur condition au lieu de l’améliorer, je suis, quant à moi, tout prêt à leur laisser la position que leur a faite le règlement de 1822. Le trésor y gagnerait, et beaucoup ; les employés seuls se repentiraient d’un semblable marché. Ils n’ont qu’à parler, j’appuierai leur demande.
M. Coghen. - Messieurs la chambre parait fatiguée ; on voudrait peut-être clore la discussion générale (parlez ! parlez !)
Messieurs, je ne comptais pas prendre la parole dans la discussion générale, mais des discours ont été prononcés, qui m’obligent à répondre.
D’abord, on émit cette pensée qu’il n’y a pas de droits acquis à la pension, pourtant la constitution est formelle, et dit dans son art. 117 : « Les traitements et pensions des ministères des cultes sont à la charge de l’Etat, les sommes nécessaires pour y faire face sont annuellement portées au budget. » Je crois que c’est un droit acquis.
La loi du mois d’août 1832, pour l’organisation judiciaire, dit : « Les pensions des magistrats seront liquidées d’après l’arrêté-loi de 1814. » Je crois encore que c’est un droit acquis.
La loi de 1835, sur l’enseignement supérieur, dit, art. 70, que : « Les pensions du corps enseignant seront liquidées conformément à l’arrêté de 1816. » Je crois aussi que c’est un droit acquis.
Messieurs, quant à l’administration des finances, il est évident qu’on ne pourrait pas équitablement contester à des fonctionnaires, à des employés qui pendant 35 ou 40 ans ont versé au trésor des retenues considérables, les droits acquis d’après les règlements arrêtés en 1822.
La caisse de retraité est obérée, et je crois, messieurs, que la faute n’en est pas à MM. les ministres qui se sont succédé, mais que les circonstances de la révolution ont amené beaucoup de nécessités. Il y a peut-être eu quelque entraînement, c’est possible ; mais l’épuisement de la caisse de retraite provient surtout des événements.
Messieurs, je ne veux pas de prodigalité ; je désire que nous soyons économes des deniers publics, que nos impôts ne soient pas majorés. Mais il faut aussi que le gouvernement, que le pays soient équitables et sachent récompenser les services rendus. Nous voulons tous une bonne administration, et une bonne administration n’est pas possible, si vous abandonnez les employés de l’Etat, après de longs services, à la merci de leur position particulière.
Messieurs je considère les rémunérations des employés divisées de deux manières ; d’abord connue rémunération immédiate qui constitue le traitement, et ensuite comme rémunération différée qui constitue la pension. Leur refuser la récompense qui est due à de longs services, ce serait porter la perturbation dans l’administration générale, ce serait encourager l’immoralité et l’improbité.
Je ne m’effraie pas, messieurs, du nombre illimité d’employés qui pourront venir concourir aux pensions. Les budgets sont votés tous les ans, la législature aura dont toujours le droit de refuser son vote à ce qui serait exagération.
On a dit que l’on descendait trop bas dans l’échelle administrative pour les pensions. Messieurs, à mon avis, c’est où il y a peu de ressources et beaucoup de besoins que la sollicitude législative doit se porter. C’est pour l’homme qui n’a jamais pu faire aucune économie, qui n’a jamais pu ramasser aucune ressource pour sa vieillesse, qu’il est de notre devoir de stipuler qu’au moins il ne sera pas abandonné, et obligé d’aller mourir dans des dépôts de mendicité.
Messieurs, on a parlé de refuser la pension aux veuves et aux orphelins qui auraient de la fortune. Je ne saurais admettre cette opinion ; je ne saurais obliger par mon vote le gouvernement de contester sur le cercueil d’un ancien fonctionnaire qui aura été pendant trente ou quarante ans au service de l’Etat, la question de savoir s’il doit donner à la veuve et à ses orphelins quelques secours pour vivre.
Messieurs en 1833, la chambre effrayée de l’augmentation successive des pensions, a appelé l’attention du gouvernement sur ce point, et lors du ministère de l’honorable M. Duvivier, il a été institué une commission composée de M. Engler, sénateur, de M. d’Hane, sénateur, de l’honorable M. de Brouckere et de l’honorable M. Donny, nos collègues. Ces messieurs ont fait un travail long et difficile, il en est résulté que sur les 772 pensions colloquées depuis 1830 jusqu’en 1835 il y aurait peut-être eu une erreur ou une exagération, d’environ 30,000 fr. d’après la commission, et seulement de 1,400 d’après le ministère des finances même.
On s’effraie aussi de l’exagération des pensions qui ont été accordées. Mais si je suis bien informé, le nombre de celles qui dépassent 6,000 fr. est aujourd’hui seulement de quatre et l’excédant se monte à une somme de 5,990 fr. Ce n’est donc pas de l’exagération des pensions que peut provenir la situation de la caisse de retraite ; comme j’ai eu l’honneur de le dire, cette situation résulte peut-être bien un peu de ce que l’on a pu céder plus ou moins à l’entraînement, mais elle résulte surtout des nécessités de la révolution même.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, plusieurs amendements ont déjà été présentés ; il nous est également arrivé des pétitions, je pense qu’il serait bon de renvoyer ces amendements et pétitions à la section centrale. Si d’autres membres avaient des amendements préparés et s’ils voulaient bien les présenter, j’en demanderais également le renvoi à la section centrale.
La plupart des observations qui ont été présentées se rattachent à diverses dispositions du projet et je pense, messieurs, qu’il sera plus utile de ne les rencontrer que lorsque nous en serons arrivés à ces dispositions. Si donc la chambre pensait pouvoir clore la discussion générale je renoncerais pour le moment à la parole.
- La clôture de la discussion générale est mise aux voix et prononcée.
La séance est levée à 4 heures et demie.