(Moniteur belge n°15, du 15 janvier 1843)
(Présidence de M. Raikem)
M. Kervyn procède à l’appel nominal à midi et quart.
M. Scheyven donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est approuvée.
M. Kervyn communique les pièces de la correspondance.
« Les négociants et fabricants de tabac, à Bruxelles, déclarent adhérer à la pétition par laquelle les fabricants de tabac d’Anvers ont demandé le rejet de toute majoration de droit sur les tabacs étrangers. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur d’entrée et renvoi à la section centrale chargée, en qualité de commission spéciale, d’en faire rapport avant la discussion du projet de loi.
« Le sieur Sablon, juge de paix du canton de Jodoigne, demande que les traitements des greffiers des justices de paix soient augmentés. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur les traitements des membres de l’ordre judiciaire.
« Le sieur Pitot demande que le gouvernement mette en adjudication l’établissement d’une restauration dans la station du chemin de fer à Quiévrain. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Les brasseurs de Tournay présentent des observations contre le projet de loi tendant à modifier les bases de l’impôt sur les bières. »
M. Savart-Martel. - J’appelle l’attention de la chambre sur cette pétition, qui paraît avoir été rédigé par une personne qui a des connaissances théoriques et pratiques. J’en demanderai le renvoi à la section centrale chargée de l’examen du projet de loi sur les bières.
M. Dubus (aîné). - J’en demanderai également l’insertion au Moniteur.
M. Savart-Martel. - J’avais l’intention de la demander ; je ne l’ai pas fait, parce que la pétition est un peu longue, et qu’à propos d’autres pétitions, la chambre a décidé qu’il n’y avait pas lieu à l’insertion au Moniteur.
M. Dubus (aîné). - On a décidé que la première pétition serait seule insérée, parce que la plupart des pétitions se répètent. Mais je prie la chambre de remarquer que cette pétition contient des renseignements qui ne sont pas dans d’autres pétitions. Je crois qu’il serait utile qu’elle fût imprimée. J’en demande l’insertion au Moniteur.
- Les propositions de MM. Savart-Martel et Dubus (aîné) sont successivement adoptées.
Par dépêche en date du 11 janvier, M. le ministre de l’intérieur adresse à la chambre 97 exemplaires de l’Annuaire de l’observatoire royal de Bruxelles, année 1843, pour être remis à MM. les représentants, ainsi qu’à la bibliothèque et aux archives de la chambre.
- Pris pour notification.
M. Mast de Vries. - M. le ministre des finances étant présent, je reproduirai ma motion concernant la loi des sucres. Je demande que la chambre prenne une décision, soit en fixant la discussion. avec les documents qui nous ont été remis, soit en renvoyant les amendements de M. le ministre des finances à la section centrale, ou aux sections.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Je ne pense pas qu’il y ait lieu de renvoyer soit aux sections, soit à la section centrale les amendements que j’ai présentés sur la question des sucres. Que s’est-il passé ? Le gouvernement a présenté un projet de loi, tendant à assurer la coexistence des deux industries ; ce projet a été examiné par les sections et par la section centrale. Cette dernière a fait un rapport ; dans ce rapport, j’ai cru reconnaître des erreurs de fait et des conséquences fausses résultant de ces erreurs. Pour éclairer la chambre, j’ai cru devoir lui adresser un mémoire où ces erreurs sont rectifiées. Ce mémoire a été distribué. Dans l’intervalle, pendant que je m’occupais de ce travail, un autre fait s’est présenté : Lors de la discussion du budget des voies et moyens, la chambre a manifesté le désir d’obtenir par l’impôt sur les sucres un revenu d’au moins quatre millions. Or, d’après le projet primitif du gouvernement, le revenu ne devait être, dans la première année, que de deux millions. D’après la proposition de la section centrale, le revenu devait être de trois millions seulement. Tous les orateurs qui ont pris la parole dans la discussion du budget des voies et moyens ont témoigné le désir de voir le revenu provenant de l’impôt sur les sucres s’élever au-delà de ces sommes. C’est par suite des idées émises à cette occasion que j’ai cherché le moyen d’arriver à ce chiffre de revenu. Ce moyen, je l’ai trouvé dans les amendements présentés, amendements faciles à apprécier, et qui ont pour but d’établir une parfaite égalité entre les deux industries, de les soumettre à une même règle. Je ne vois donc pas la nécessité de les renvoyer soit aux sections, soit à la section centrale. Il y a d’ailleurs un autre motif d’aborder définitivement cette question, c’est que, dans l’attente de la décision à intervenir, toutes les relations commerciales sont interrompues. D’un autre côté encore, la chambre ayant écarté la proposition du gouvernement relative aux centimes additionnels, il est indispensable, pour combler le déficit du trésor de statuer sur les voies et moyens qui sont proposés, et la loi des sucres en fait partie. Je crois donc qu’il est urgent d’en aborder la discussion.
M. Mercier. - Les amendements qui ont été présentés sont de la plus haute portée. Fussent-ils intervenus au milieu de la discussion du projet de loi sur les sucres, ils eussent été renvoyés au moins à la section centrale. Je ne crois pas que l’on puisse aborder la discussion d’un nouveau système sans rapport de la section centrale. M. le ministre paraît maintenant très empressé de voir discuter la loi. Nous partageons ce désir. Cet empressement d’aujourd’hui ne ressemble en rien à celui dont il a fait preuve pendant les 4 mois qui viennent de s’écouler. il est vrai que son rapport est très long et très développé. Mais enfin la section centrale ne demande pas trois ou quatre mois pour répondre à ce document, qui présente, à son avis, plusieurs erreurs, et pour donner son opinion sur les propositions du gouvernement. Je demande donc non le renvoi aux sections, qui amènerait un trop long retard, mais tout au moins le renvoi à la section centrale. Je crois pouvoir prendre l’engagement, en son nom, qu’endéans dix jours, les observations seront déposées sur le bureau de la chambre.
M. le ministre des finances (M. Smits) - J’ai droit de m’étonner du reproche fait par l’honorable préopinant au gouvernement sur le retard qu’il aurait mis à examiner la question des sucres. Le gouvernement a présenté un projet de loi au mois de mars.
La section centrale s’est réunie peu de temps après ; elle n’a pas discontinué de demander au gouvernement des renseignements qui lui ont été fournis avec la plus grande promptitude, Ce n’est que six mois après la présentation du projet de loi que la section centrale a présenté son travail. Ce travail contenait des erreurs de fait qu’il a fallu rectifier ; toute la chambre a pu voir, par mon rapport qui vient d’être distribué, si le gouvernement a mis le moindre retard dans la réfutation du rapport de la section centrale qui est très volumineux. Non, messieurs, nous n’avons aucun reproche à subir. Nous avons mis toute la promptitude désirable dans l’examen de cette question, et si elle a été mal appréciée, la faute, bien certainement, ne peut nous être imputée.
Aujourd’hui, la question est mûre. Les amendements sont très simples ; je crois qu’on peut mettre la discussion à l’ordre du jour. sans renvoi aux sections, ou à la section centrale.
M. de Garcia. - Je partagerais complètement l’opinion de l’honorable M. Mercier, si je ne regardais comme amendement la proposition du ministre. Je la partagerais si la question des sucres n’avait pas déjà donné lieu à de nombreux mémoires, à de nombreux travaux de la part des sections, ou de sections centrales. Enfin je la partagerais, si je pouvais croire que le renvoi aux sections ou à la section centrale fût de nature à abréger la discussion Mais je le dis à regret, je crois que le travail des sections simplifie très peu le travail de la chambre. Dans cet état de choses, je crois qu’il faut aborder franchement la question. Nous avons besoin d’argent. Nous devons chercher les moyens de remplir le plus tôt possible le trésor. Je crois que tout délai sur ce point serait nuisible à la chose publique. Je le crois d’autant plus que les discussions publiques se prolongent très longuement. La section centrale aura beau travailler avec la plus grande ardeur, les discussions se renouvelleront ici comme s’il n’y avait pas eu de renvoi aux sections. Je suis fâché de le dire ; mais enfin c’est une vérité que tout le monde appréciera comme moi.
M. de La Coste. - Si nous pouvons aborder cette importante question dès aujourd’hui, je ne demanderais pas que la chambre renvoyât le travail du ministre soit aux sections, soit à la section centrale ; car alors les membres de celle-ci auraient sur-le-champ l’occasion d’expliquer plusieurs observations qui ont été contestées, plusieurs propositions qui ont été placées sous un jour tout autre que celui sous lequel elles semblaient devoir naturellement se présenter. Mais il s’écoulera nécessairement au moins quelques jours avant que la discussion ne s’ouvre. La chambre donc peut mettre à profit ce délai, en fournissant à la section centrale l’occasion de donner sommairement son avis sur un système tout nouveau, présenté par M. le ministre des finances, de se justifier en même temps en quelque sorte vis-à-vis de M. le ministre des finances lui-même et, ce qui est plus important, vis-à-vis du pays tout entier, et enfin de calmer certaines inquiétudes qui, selon moi, n’ont point de fondement et qu’ont pu faire naître quelques assertions contenues dans le nouveau, et d’ailleurs, très intéressant rapport de M. le ministre des finances.
Vous savez, messieurs, combien la question des céréales est délicate, combien les moindres inquiétudes en cette matière sont susceptibles de provoquer souvent le mal qu’on redoute. M. le ministre des finances paraît s’inquiéter de la fabrication du sucre indigène, sous le rapport de la subsistance du peuple.
A mon avis, cette inquiétude n’a pas le moindre fondement, la culture de la betterave n’a pas d’influence sensible sur le déficit que nous éprouvons en céréales, Eh bien, voilà un point sur lequel il serait intéressant que la section centrale pût éclairer l’opinion, pour tranquilliser le pays.
Il en a encore plusieurs autres : par exemple, M. le ministre des finances suppose que la section centrale voudrait encourager, par un droit protecteur de 50 p. c., une industrie qui n’aurait aucun germe de vitalité en elle-même. Il est facile, selon moi, d’établir, par le rapport de M. le ministre des finances, que cette industrie, au contraire, est pleine de vitalité et d’avenir ; il est inexact que nous voulions la protéger par un droit de 50 p. c. Nous pourrions en très peu de temps justifier, par les assertions mêmes de M. le ministre des finances, que le droit n’est tel qu’en apparence, attendu que, d’une part, c’est un droit effectif que l’on imposerait à l’industrie indigène, et que, de l’autre, ce serait un droit en partie nominal que l’on imposerait à l’industrie exotique.
J’entends dire que j’entre dans le fond de la question ; mais je ne pouvais exprimer mes idées, faire sentir la nécessité de ce que je propose, sans effleurer au moins ces questions.
Je pense donc que si, d’une part, il est tout à fait inutile de renvoyer ce document très curieux, très intéressant, mais qui, dans plusieurs points, est susceptible d’être contesté, de le renvoyer, dis-je, aux sections ; d’un autre côté, la section centrale pourrait utilement s’en occuper, et que, dans un rapport très court, qui demanderait fort peu le temps, elle pourrait toucher les points principaux ; que cela ne prendrait d’ailleurs, pour ainsi dire, aucun temps ; car il n’y a pas lieu de supposer que la chambre soit disposée à aborder la discussion immédiatement.
En conséquence, je me range à l’opinion de l’honorable M. Mercier, qui est de renvoyer le document de M. le ministre des finances à la section centrale ; et il serait bien entendu qu’on n’attend pas de la section centrale un volumineux mémoire, mais un très court rapport, qui pourrait être prêt, non pas même dans dix, mais dans 3 ou 4 jours peut-être.
M. Desmet. - J’ai toujours pensé que la loi des sucres était à l’ordre du jour et qu’on allait en entamer la discussion immédiatement après celle du projet de loi sur la canalisation de la Campine, qui ne durera guère qu’un jour. De cette manière, nous pourrions aborder la loi des sucres lundi ou mardi, tandis que si vous adoptez le renvoi à la section centrale, nous allons encore avoir un ajournement assez long. Je crois que tous nous connaissons assez bien l’opinion de la section centrale et celle de M. le ministre des finances pour pouvoir aborder la discussion, et que dès lors nous devons la maintenir à l’ordre du jour, immédiatement après celle du projet de loi sur la canalisation de la Campine.
M. Mercier. - Je crois devoir répondre d’abord à une observation de M. le ministre des finances. Je tiens à prouver que la section centrale a mis la plus grande diligence dans ses travaux. M. le ministre rappelle sans cesse qu’il a présenté la loi des sucres au mois de mars. Mais pourquoi M. le ministre n’avait-il pas auparavant consulté les chambres de commerce et les commissions d’agriculture ? Pourquoi a-t-il consenti à la motion d’un ou de deux membres de cette chambre, à soumettre ce projet, déjà présenté à la chambre, déjà revêtu de la signature royale, aux chambres de commerce et aux commissions d’agriculture ? A-t-il oublié que c’est au mois de mai seulement que leurs rapports ont été communiqués aux sections ; que les sections ne se sont réunies que ce mois-là, et que la section centrale n’a pu se constituer que le 19 mai ? A-t-il oublié aussi que le 3 août il s’est rendu, à notre demande, dans le sein de la section centrale qui avait terminé ses travaux ; que la section centrale lui a dit que son rapport était préparé, sauf approbation, depuis la fin de juillet, et lui a communiqué ses décisions ?
Ainsi, la section centrale n’a pas mis six mois pour délibérer sur le projet des sucres, ainsi que l’a prétendu alors M. le ministre dans une de nos précédentes séances, mais seulement deux mois et quelques jours. Voilà ce qu’elle a fait, et certes, pour approfondir une question aussi grave, il eût été impossible de mettre plus de célérité.
J’ai jugé ces observations nécessaires pour réfuter une bonne fois cette assertion, que la section centrale a pris un temps considérable pour ses délibérations. Si elle n’a pas fait son rapport plus tôt, c’est que M. le ministre des finances est resté 23 jours pour lui adresser une lettre de 10 ou 15 lignes, qu’oc lui avait promis d’attendre, avant de clore son travail.
Messieurs, bien que j’aie étudié la question sous toutes ses faces, je trouve qu’il est important que la section centrale soit saisie des nouvelles propositions, et réponde à M. le ministre des finances. Son mémoire se trouve sous les yeux des membres de la chambre ; je ne crois pas que la discussion puisse s’entamer sous l’impression de ce mémoire, qui contient, selon nous, plusieurs erreurs.
D’ailleurs, le rachat de l’industrie du sucre de betterave est une question immense ; et il est à désirer que, si la section centrale n’a pas le temps de l’examiner dans tous ses détails, elle puisse du moins la traiter sommairement et soumettre à la chambre son opinion sur ce système tout à fait nouveau.
Je le répète, si cette question s’était produite au milieu de la discussion, les nouveaux amendements eussent dû être renvoyés à la section centrale, il est impossible de discuter la loi sans discuter en même temps la question de l’anéantissement de l’industrie indigène, puisque M. le ministre des finances en a saisi la chambre ; il y aura donc lieu de rechercher s’il est de l’intérêt du pays, que l’on adopte ce nouveau projet de préférence au premier système du gouvernement ou à celui de la section centrale.
Je crois donc qu’il est indispensable que la section centrale soit chargée de former un rapport aussi succinct que possible, rapport qui dans une dizaine de jours, pourrait être déposé sur le bureau de la chambre. Ce n’est pas là un long retard ; la chambre ne peut se refuser à accepter de nouveaux éclaircissements sur une question aussi importante.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Ce n’est pas moi qui ai adressé un reproche à la section centrale, d’avoir retardé son travail ; c’est un membre de la section centrale qui a fait ce reproche au gouvernement, et le gouvernement, en se justifiant, n’a fait qu’user de justes représailles.
M. Mercier. - Il fallait dire la vérité.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Je ne me suis pas écarté de la vérité. Maintenant l’honorable M. Mercier vient de vous dire qu’il a approfondi la question sous toutes ses faces. Eh bien si, comme je le crois, l’honorable membre a examiné toutes les parties du travail que je viens de présenter à la chambre, si, comme je le pense, il a une connaissance approfondie de toutes les questions qui se rattachent à la loi sur les sucres, l’honorable membre pourra, lorsque la discussion générale s’ouvrira, combattre le mémoire que j’ai présenté. Mais je ne pense pas qu’il faille encore le renvoyer à la section centrale pour en obtenir un contre-mémoire. Sinon, vous devrez permettre au gouvernement de répondre de nouveau.
La question est parfaitement éclaircie aujourd’hui. Dans le premier projet du gouvernement, il s’agissait d’assurer la coexistence des deux industries. La section centrale, par son travail, arrivait, au contraire, à anéantir l’industrie du sucre de canne sans l’indemniser. C’est mon opinion, je ne dis pas qu’elle est fondée ; mais il faut bien préciser l’état de la question.
Le gouvernement n’a pas cru pouvoir adopter les conclusions de la section centrale ; elle a réfuté son rapport, et comme, lors de la discussion du budget des voies et moyens, la majorité de la chambre semblait disposée à demander un revenu de 4 millions à l’impôt des sucres, nous avons subsidiairement, et tout en maintenant notre projet primitif, présenté quelques amendements de nature à assurer ce revenu au trésor, Ces amendements sont très simples ; ils tendent à mettre les deux industries absolument sur la même ligne, et ces amendements peuvent être appréciés par chacun de nous sans qu’il soit besoin, je le répète, de les renvoyer à l’examen spécial de la section centrale. Si les membres de la section centrale croient devoir combattre le mémoire que j’ai présenté, ils pourront le faire dans la discussion générale.
M. de Mérode. - Messieurs, il est évident que si on adopte constamment des renvois en sections, nous n’arriverons jamais à la discussion de la loi. Noirs avons maintenant tous les renseignements possibles ; il est fort inutile que la section centrale fasse un nouveau travail. Les membres de la section centrale sont membres de la chambre, et ils ont droit de développer leur opinion dans la discussion. Ils n’y manqueront pas ; l’honorable M. Mercier en particulier ne manquera pas de faire valoir la sienne, et quant à moi, j’écouterai ce qu’il nous dira avec beaucoup d’attention. De cette manière, nous serons aussi éclairés que si le renvoi à la section centrale avait eu lieu.
Si je pensais que l’on peut acquérir de nouvelles lumières par le délai que l’on propose, je l’adopterais ; mais je n’y vois aucun avantage, tandis que j’en vois un très grand à adopter la loi des sucres et à améliorer la position du trésor public.
Nous discutons le budget des travaux publics, et nous sentons dans cette discussion combien il est nécessaire que l’Etat possède des ressources applicables à de nouveaux travaux dont beaucoup de parties du pays ont besoin.
M. Lys. - Je désire, comme mes honorables collègues, voir une prompte décision en ce qui concerne l’impôt sur les sucres ; mais je suis surpris, messieurs, de l’opposition de M. le ministre au renvoi à la section centrale du nouveau projet qu’il a présenté subsidiairement, et cela après avoir empêché la discussion, lorsque son vieux projet avait été mis à l’ordre du jour à deux reprises.
Le nouveau projet de M. le ministre présente un tout autre système que le premier, et si nous renvoyons souvent à la section centrale des amendements, à bien plus forte raison devons-nous y renvoyer un volumineux mémoire, tel que celui qui est présenté, qui contient une critique très vive du travail de la section centrale.
M. Mercier a pu examiner, sous toutes ses faces, l’impôt à établir sur les sucres ; mais nous, messieurs, nous avons besoin d’une explication préliminaire, et elle ne peut nous être donnée que par la section centrale.
Le rachat proposé est un projet tout à fait nouveau, un projet fort intéressant, car il s’agit de la fortune d’une masse de citoyens. Le renvoi à la section centrale ne peut donc être contesté, et cet ajournement ne sera pas aussi long que ceux accordés à M. le ministre.
M. de La Coste. - Messieurs, M. le ministre nous dit que, suivant son opinion, l’avis de la section centrale est de détruire sans indemnité l’industrie des raffineurs de sucre exotique. C’est cette observation qui m’a engagé à prendre la parole, et c’était un des points sur lesquels je pensais qu’il était fort utile que la section centrale eût l’occasion de donner des explications. Je remercie donc M. le ministre des finances de m’avoir fourni l’occasion de donner ces explications dès à présent.
Plusieurs membres. - C’est le fond.
M. de La Coste. - Si M. le ministre a pu émettre cette accusation, il doit m’être permis de lui répondre ; ceci devient un fait personnel.
Je dirai donc que cette intention n’a jamais été celle de la section centrale. Dans ma section on a posé la question ainsi : « Alimenter le trésor, améliorer sa situation, en conservant, autant que possible, si on ne peut l’améliorer, la position relative des deux industries. » Et c’est dans ce sens qu’a voté la majorité des membres ; au moins moi, c’est dans ce sens que je me suis réuni aux conclusions de la section centrale.
Maintenant, revenant à la question qui nous occupe principalement, je pense que nous ne retarderons pas la discussion en adoptant le renvoi à la section centrale. D’abord nous n’entamerons peut-être pas la discussion du projet de loi sur les sucres aussi prochainement qu’on se le figure, et en second lieu elle durera fort longtemps par la manière même dont la question est posée.
En effet, messieurs, comment pouvez-vous discuter une alternative ? comment pouvez-vous discuter deux systèmes tout à fait contraires, mis en regard l’un de l’autre ? Vous êtes même en présence aujourd’hui de trois systèmes différents : vous avez le système primitif du gouvernement, le système de la section centrale et le nouveau système de M. le ministre des finances, qui pose maintenant la question tout autrement qu’il ne la posait d’abord. Il avait, lorsqu’il a présenté son premier projet, l’intention d’assurer la coexistence des deux industries dont il s’agit ; nous l’avons suivi sur ce terrain, nous avons voulu l’aider à atteindre ce but ; mais maintenant il marche vers un but tout différent ; il marche vers la suppression d’une industrie nationale. il veut donner une indemnité à cette industrie, ou plutôt aux industriels, car on n’indemnisera pas l’industrie elle-même, on n’indemnisera pas les districts qui vivent de cette industrie, ni les ouvriers auxquels elle fournit du travail. Eh bien, messieurs, c’est là une question de la plus haute importance, et elle n’a pas été examinée par la section centrale. Je crois qu’on simplifiera la discussion en renvoyant à la section centrale le nouveau projet qui a été présenté par M. le ministre.
M. le ministre des finances (M. Smits) - J’ai été évidemment mal compris, messieurs, car l’honorable préopinant a donné à mes paroles une portée qu’elles n’avaient point. Je n’ai pas prétendu que la section centrale ou aucun de ses membres ait voulu sciemment détruire l’industrie du sucre. J’ai dit qu’en admettant les bases que je critique dans mon mémoire, on arriverait nécessairement à la ruine de cette industrie ; que ce serait là le résultat inévitable du système que je combattais. Mais il était loin de ma pensée, je le répète, de dire que la section centrale avait voulu détruire, de propos délibéré, une industrie antique et sur laquelle repose l’avenir commercial et industriel du pays.
Je n’entrerai pas dans le fond de la question, mais je persiste à craindre que le renvoi à la section centrale de mes nouvelles propositions, propositions tout à fait subsidiaires, ne ferait que retarder la solution d’une question qu’il devient urgent de résoudre.
M. Eloy de Burdinne. - Je crois aussi, messieurs, qu’il est urgent de s’occuper de la question des sucres, et nul de nous ne révoquera en doute la nécessité de procurer des ressources au trésor ; mais le dernier projet, qui nous a été soumis par M. le ministre des finances, est un projet tout à fait neuf ; et, malgré le vif désir que j’ai de voir discuter immédiatement la question des sucres, je dois appuyer le renvoi du nouveau projet à la section centrale. Je crois que c’est là le seul moyen d’abréger la discussion.
Je vous avoue, messieurs, que si la discussion de la question des sucres pouvait être ajournée, je demanderais le renvoi aux sections, car le nouveau système de M. le ministre est tout à fait opposé au système primitif ainsi qu’au système de la section centrale, je crois que tout au moins le projet doit être renvoyé à la section centrale ; seulement, il pourrait être entendu que la chambre passera outre, dans le cas où la section centrale serait en retard de faire son rapport. Je crois que dans une question aussi grave on ne peut s’entourer de trop de lumières, Il s’agit d’anéantir une industrie nationale qui peut donner dans la suite des résultats immenses. je demande donc que la question soit mûrement examinée avant la discussion publique.
M. de Theux. - Je suis aussi partisan de la discussion la plus prochaine possible de la loi sur les sucres, mais c’est précisément pour ce motif que j’appuierai le renvoi à la section centrale ; mais je demanderai en même temps qu’elle soit invitée à faire un rapport dans un bref délai. Si l’on ne prend point cette mesure maintenant, on sera obligé de la prendre lorsque la discussion aura commencé, et alors, messieurs, vous aurez un ajournement en quelque sorte indéfini. L’expérience a démontré que lorsque dans une discussion importante, des amendements très graves sont présentés, la chambre renvoie presque toujours ces amendements à la section centrale, bien que chacun puisse, en quelque sorte, en apprécier la portée ; c’est que dans ces circonstances on craint les surprises. Eh bien, messieurs, quand nous nous trouverons au moment de prendre une décision dans la question des sucres, nous craindrons de prononcer la condamnation de l’industrie du sucre indigène, sans avoir entendu au moins la défense de cette industrie, C’est cependant de cela, messieurs, qu’il s’agit. Il y a ici un principe nouveau qui consiste à supprimer l’industrie du sucre indigène, moyennant indemnité. Je ne veux rien préjuger pour le moment sur l’opinion que j’émettrai à cet égard, mais je crois que dans l’intérêt de l’accélération de nos travaux, nous devons renvoyer le nouveau projet de M. le ministre de l’intérieur à la section centrale avec demande d’un prompt rapport.
M. Mercier. - L’honorable M. de Mérode a promis d’écouter la discussion avec attention, et je ne doute pas qu’il le fasse ; mais je dois lui faire observer qu’il y a les appréciations en chiffres qu’il est impossible de bien saisir dans la discussion, si les membres ne les ont pas d’abord eues sous les yeux.,
M. de Mérode. - Il est facile de répondre à cette observation : c’est que nos discussions sont imprimées dans le Moniteur, que lorsque des chiffres sont cités dans cette enceinte, nous pouvons les examiner le lendemain à tête reposée. Nous ne manquerons donc pas d’impressions pour nous faire une idée exacte des chiffres qui seront produits. Il me semble donc que ce motif n’est pas de nature à nous faire ajourner l’examen d’une question dont la solution est de la plus haute importance.
M. le ministre des finances (M. Smits) - La chambre comprendra que si je me suis opposé au renvoi à la section centrale, ce que dans la crainte de la voir encore nous faire un très long rapport et retarder ainsi la discussion d’un projet qu’il est urgent d’examiner, non pas seulement dans l’intérêt du trésor, mais encore dans l’intérêt du commerce et de l’industrie. Si la section centrale pouvait s’engager à être prête pour le jour auquel la chambre fixerait la discussion du projet de loi, je n’aurais plus d’objection à faire. Cependant je dois faire une remarque encore, c’est qu’en 1838, lorsqu’il s’est agi de la question des sucres, l’honorable M. d’Huart a ouvert la discussion en présentant un projet entièrement nouveau, et que la chambre à délibéré immédiatement sur ce projet, sans le renvoyer à la section centrale. Quoi qu’il en soit, si la section centrale veut s’engager à faire son rapport dans un bref délai, et si la chambre décide qu’elle passera outre dans le cas où le rapport ne serait pas présenté en temps, dans ce cas je n’ai pas d’objection à faire au renvoi.
- Le renvoi à la section centrale, avec demande d’un prompt rapport, est mis aux voix et adopté.
M. le président. - La discussion est reprise sur la proposition d’ajournement des articles du budget des travaux publics qui concernent le chemin de fer.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) – Messieurs, j’ai déclaré à plusieurs reprises que personne plus que moi ne reconnaissait à la chambre le droit de demander des renseignements et des documents pour s’éclairer, et j’ai prouvé que je n’étais nullement ennemi des renseignements en communiquant à la chambre plusieurs documents et surtout mon compte-rendu du chemin de fer pour l’exercice de 1841, compte-rendu que vous reconnaîtrez tous beaucoup plus détaillé que tous ceux qui ont été présentés antérieurement/
Mais, messieurs, s’il est du devoir d’un ministre de remettre à la chambre les documents et les renseignements qu’il est en son pouvoir de remettre, il y a cependant, à cet égard, certaines règles qui sont passées en force d’usage.
C’est ainsi que, pour les budgets et surtout pour les budgets à l’égard desquels les renseignements les plus détaillés, les plus nombreux peuvent être demandés, ces renseignements sont ordinairement remis à la section centrale. Eh bien, messieurs, que s’est-il passé à l’égard du budget du département des travaux publics ? La section centrale m’a adressé une série de questions auxquelles j’ai répondu, autant qu’il m’était possible en ce moment d’y répondre. La section centrale a ensuite délibéré, elle a déposé son rapport et dès ce moment j’ai dû croire que les renseignements que j’avais fournis avaient été suffisants pour asseoir son opinion, et qu’ils le seraient aussi, par conséquent, pour asseoir l’opinion de la chambre.
Le dépôt du rapport de la section centrale a eu lieu le 23 décembre, et le 24 la chambre mit le budget des travaux publics à l’ordre du jour de la séance du 10 janvier. Je me suis donc présenté le 10 janvier à la chambre, prêt à soutenir la discussion.
Mais l’honorable M. David, membre de la section centrale, qui avait provoqué dans le sein de cette section un assez grand nombre de questions, est venu vous dire qu’il avait été obligé de s’absenter pour des affaires urgentes ; et quand je rappelle cette circonstance, ce n’est pas que je veuille en faire un reproche à l’honorable M. David, car je reconnais que lorsqu’un industriel est membre de cette chambre, il doit pouvoir s’absenter quelquefois pour vaquer à ses affaires particulières, lorsqu’il y a urgence. Toutefois, il ne faut peut-être pas prendre prétexte alors de cette absence pour prétendre arrêter une discussion aussi importante, aussi urgente que celle du budget du chemin de fer.
Quoi qu’il en soit, il est toujours certain que l’honorable M. David vous a proposé, messieurs, par une motion d’ordre, d’ajourner la discussion et le vote du budget du département des travaux publics, jusqu’à ce que le ministre ait fourni les renseignements non pas en réponse aux questions posées par la section centrale, mais à d’autres questions.
L’honorable M. David lui-même vous l’a dit. En effet, au sujet de la troisième question (je cite textuellement le Moniteur), il a dit :
« Cet état de recette devrait correspondre au nombre de lieues parcourues par les locomotives, au lieu de correspondre au mouvement des transports, comme je l’avais demandé ; M. le ministre n’a donc pas eu connaissance des demandes de la première section et, par conséquent, n’a pu y satisfaire. »
Vous voyez donc, messieurs, que l’honorable M. David m’a justifié lui-même.
Je tenais, messieurs, avant tout, à constater qu’il n’y avait, sous ce rapport, aucun reproche à m’adresser, parce que j’avais répondu à toutes les demandes que m’avait faites la section centrale, et que depuis il ne m’était parvenu de la section centrale aucune autre demande de renseignements, ce qui m’autorisait à penser que je n’avais plus aucun autre document à produire.
Les nouvelles demandes, ou si l’on veut les demandes rectifiées de l’honorable M. David, ne me sont connues que depuis trois jours par le Moniteur ; car on conçoit bien qu’à la lecture rapide (et j’ai eu soin d’en prévenir l’honorable membre), on conçoit qu’à la lecture rapide qu’il en a faite, il m’était impossible de saisir toutes ces questions. Ce n’est donc que depuis trois jours que je connais les véritables questions de l’honorable M. David, et l’on comprend dès lors qu’il m’était impossible d’y répondre immédiatement, même à celles pour lesquelles les éléments de réponses pourraient être recueillis actuellement.
J’ai dit hier, messieurs, que très probablement je recevrais, dans la soirée ou ce matin, un document auquel quelques membres de la chambre paraissaient attacher un grand prix, pour éclairer leur opinion : j’ai reçu effectivement ce document hier au soir ; c’est le relevé des objets en magasin à l’arsenal de Malines. Je le dépose sur le bureau.
J’ai également reçu ce matin de M. le directeur de l’administration des chemins de fer en exploitation, les états originaux de la situation des magasins des stations au 1er décembre dernier.
En ce qui concerne l’état des lieues parcourues par les locomotives, j’ai dit hier que M. le directeur des chemins de fer en exploitation, que j’avais interrogé à ce sujet hier dans la matinée, m’avait dit qu’il était impossible de le donner avant quelque temps dans la forme demandée par l’honorable M. David. Mais sur les observations qu’a faites hier M. Devaux, j’ai pu me mettre en état de fournir à la chambre un tableau à cet égard, tableau entièrement semblable à ceux qu’on trouve dans les divers comptes rendus.
Messieurs, bien qu’on ne l’ait pas demandé, et qu’il n’existe qu’à l’état de projet, j’ai encore un autre renseignement à donner à la chambre, pour l’éclairer, en ce qui concerne le personnel du chemin de fer.
Messieurs, je me suis occupé, aussitôt après la session dernière des chambres, de la recherche des moyens d’organiser le personnel du chemin de fer de manière à ce que, tout en respectant les droits acquis, il devienne plus économique sous le rapport des traitements, plus utile sous le rapport des services, et aussi que les droits des différents fonctionnaires et employés à l’avancement soient bien établis ; de manière, en un mot, à constituer une véritable et forte administration.
J’étais sur le point de soumettre ce projet à la sanction du Roi lorsque la section centrale a déposé son rapport. Dès lors, j’ai cru devoir attendre, parce qu’il me paraissait que je ne devais pas préjuger en quelque sorte le vote des chambres sur le budget, ou plutôt que je ne devais pas m’exposer à devoir peut-être présenter une nouvelle proposition au Roi sur ce point, aussitôt après le vote des budgets, si ce vote contrariait les dispositions de ce projet d’arrêté.
Ce projet, je le dépose également sur le bureau de la chambre, afin que l’assemblée puisse connaître les vues que j’ai à l’égard du personnel du chemin de fer.
Enfin, messieurs, l’honorable M. Rogier vous a parlé hier de tableaux qui avaient été fournis à la section centrale du budget de l’année dernière, et qui ont été déposés sur le bureau pendant la discussion de ce budget. Ces tableaux sont relatifs au mouvement sur le chemin de fer. Aussitôt après la session dernière des chambre, j’ai donné des ordres pour que ces tableaux fussent commencés pour les premiers mois de l’année ; ce sont des tableaux très détaillés et très volumineux qui servent d’élément pour établir le compte-rendu. J’ai donc demandé qu’on me fournît tous ceux qui se trouvaient faits actuellement ; ce sont les tableaux des huit premiers mois de l’année 1842 ; je les ai ici en ma possession, et je les déposerai également sur le bureau.
Maintenant, messieurs, afin que les honorables membres qui ont désiré obtenir ces renseignements aient le temps de les examiner, je crois devoir proposer à la chambre de passer actuellement aux autres articles du budget, sauf à revenir à l’article du chemin de fer lundi ou mardi.
M. David. - Les accusations de M. le ministre se reproduiront donc toujours sous la même forme. Trente-six fois je me suis lavé de la prétendue faute d’avoir quitté Bruxelles 3 jours avant la vacance. Pouvais-je jamais m’imaginer qu’un jour ou deux après avoir déposé mon rapport, on avait fait et le rapport de la section centrale et répondu à des questions qui me semblaient si importantes et devaient demander une quinzaine de jours de recherches peut-être ?
M. le ministre est pourtant bien heureux d’avoir, pour persister dans ses refus, l’excuse de mon éloignement de Bruxelles. Je suis sûr qu’au fond de son âme il ne voudrait, pour rien au monde, que je fusse resté à mon poste.
Voilà, messieurs, l’éternel prétexte sur lequel roule toute sa défense.
Je passerai désormais outre à des attaques aussi puériles, et je rentre dans la discussion.
Puisque l’honorable M. de Theux a cru devoir, je ne rechercherai pas dans quel but, enrayer, si je puis me permettre cette expression, le vote de la chambre sur la question d’ajournement de la discussion du crédit à accorder pour l’exploitation du chemin de fer, je demanderai à dire encore quelques mots à la chambre sur la nécessité de cet ajournement.
Je crois n’avoir pas besoin de répéter, et j’ai l’espoir que la chambre l’a parfaitement compris, que toutes les questions que j’ai posées sont inséparables, qu’elles forment un tout destiné à pouvoir nous permettre de juger, avec connaissance de cause, quel doit être l’import du crédit à accorder pour l’exploitation du chemin de fer.
Je me résume : le tableau par ligne, par convoi, du nombre de lieues à parcourir en 1843, est nécessaire pour que nous sachions au moins approximativement le nombre de convois par jour que l’on veut établir sur chaque ligne.
M. le ministre des travaux publics a dit « qu’il avait demandé à M. le directeur de l’exploitation ce renseignement et que ce haut fonctionnaire lui avait fait connaître que ce nombre de lieues pourrait être d’environ 300 mille, mais qu’il ne pourrait donner ce renseignement par ligne. » Eh bien, j’avais supplée à l’avance à ce renseignement que je prévoyais qu’on nous refuserait. Je l’avais dressé moi-même, et je le dépose sur le bureau, pour faire suite à mes questions. J’ai d’ailleurs communiqué ce tableau en section centrale, en l’expliquant à mes honorables collègues.
Voici ce tableau :
(Ce tableau, intitulé : Parcours présumé en lieues des sections à exploiter en 1843, basé sur le tableau de la marche des convois du 11 décembre 1842, n’est pas repris dans cette version numérisée.)
Dans ce tableau je me suis rencontré à peu près, pour le nombre de lieues, avec le nombre indiqué par M. le ministre. Ce parcours, d’après mon tableau, est de 316,220 lieues.
Et j’y ai ajouté pour convois imprévus ou extraordinaires, indépendamment de ceux déjà prévus, 13,780 lieues.
Ensemble : 330,000 lieues.
Je n’ai donc pas cherché à dissimuler les besoins du chemin de fer.
Mais pour savoir si ce grand nombre de convois était réellement utile, et sur quelle ligne ils étaient nécessaires, je demandais qu’on nous fît connaître le mouvement des transports d’hommes et de marchandises effectués en 1842, par bureau de départ et par destination.
J’ai demandé la recette des voyageurs et des marchandises, également par bureau de départ et par destination, afin de pourvoir vérifier si l’application des tarifs se faisait loyalement, régulièrement, d’après les quantités transportées et les longueurs des transports.
J’avais surtout demandé ces deux tableaux du mouvement des transports et des recettes par bureau et par destination, afin de pouvoir comparer les produits sur.les diverses sections, où des tarifs différents sont appliqués. Par ces tableaux, on verra de la manière la plus évidente les résultats obtenus, tant par les bas tarifs appliqués seulement sur quelques sections des anciennes lignes, tant par les tarifs élevés, qui pèsent si injustement sur le Hainaut, que par le tarif moyen appliqué à la plupart des sections des anciennes lignes. Car, dans nos tarifs, il y a des tarifs pour tous les goûts, pour toutes les opinions ; il y en a pour tout le monde.
J’ai enfin demandé un état détaillé des dépenses de 1842, afin de m’éclairer sur le coût des transports effectués pendant le même exercice :, pour m’assurer enfin de l’emploi utile que l’on doit avoir fait des crédits votés l’an dernier pour le même exercice. Dans ce détail des dépenses de 1842, rentrent naturellement toutes les fournitures emmagasinées et qui doivent servir à tout ou partie de l’exercice de 1843.
Vous voyez donc, messieurs, que toutes mes demandes se lient intimement et qu’il n’est pas possible d’en distraire une seule, sans rendre les autres à peu près inutiles.
Je ne les ai formulées, en définitive que pour être à même de remplir consciencieusement le devoir qui nous a été imposé à tous, par la loi du 1er mai 1834, qui a exigé que compte serait rendu aux chambres de toutes les opérations du chemin de fer.
Et je prie la chambre de ne pas oublier que j’ai fait observer à M. le ministre dés travaux publics que si même les renseignements demandés nous étaient fournis, ce n’était pas une raison pour passer outre à la discussion ; qu’il nous fallait le temps de les examiner.
Vous comprendrez, messieurs, que ce ne sont pas des jouets que nous demandons ; qu’il ne s’agit pas de contenter notre amour-propre par un semblant de condescendance, mais que ce sont des pièces à examiner scrupuleusement, sans quoi, si elles n’étaient pas indispensables, je conviendrais que nous serions tout à fait blâmables de perdre ainsi, sans fruit, le temps si précieux de la chambre.
Je persiste donc plus que jamais dans la demande d’ajournement et pour qu’il soit accordé un crédit provisoire pour les 2 ou 3 premiers mois de l’exercice 1843.
Je dis plus, messieurs, et j’attire toute l’attention de la chambre sur l’utilité extrême qu’il y aurait à arrêter définitivement qu’à l’avenir il serait accordé, chaque année, un crédit provisoire pour les trois premiers mois de chaque exercice, basé sur les crédits accordés pour l’exercice écoulé, afin que, pendant les 2 ou 3 premiers mois du nouvel exercice entamé, M. le ministre des travaux publics puisse recueillir tous les renseignements, tant en recettes qu’en dépenses de l’exercice écoule, et en former le compte-rendu exigé par la loi du premier mai 1834, et qui nous servirait en même temps à arrêter le budget définitif de l’exercice courant avec connaissance de cause.
Si vous n’adoptez pas cette marche, messieurs, les inconvénients qui existent aujourd’hui, et qui arrêtent nos délibérations, se représenteront plus ou moins à la fin de chaque exercice, selon que l’on aura pour ministre des travaux publics un homme plus ou moins ami de la publicité.
M. de Theux. - Messieurs, l’honorable préopinant a demandé dans quel but j’ai cru devoir enrayer hier le vote sur sa motion ; j ai lieu de m’étonner de cette question ; mais le but dans lequel j’ai agi, je l’ai expliqué hier clairement à la chambre. Je me suis opposé à un ajournement indéfini de la discussion du budget des travaux publics, prononcé sans connaissance suffisante de cause. Je désire que ce budget puisse être discuté, dans l’intérêt de nos travaux et aussi dans l’intérêt de la bonne administration du département des travaux publics, parce qu’il est important que le chef de ce département, chargé d’autant de détails d’administration, soit débarrassé des soins de la discussion de son budget, pour pouvoir se livrer avec d’autant plus d’assiduité à l’examen des questions très essentielles qui doivent être résolues dans cette administration.
Comment l’honorable membre s’est-il permis de demander dans quel but j’ai enrayé le vote sur sa motion, alors qu’il a besoin de toute l’indulgence de la chambre pour avoir enrayé ses délibérations sur le budget des travaux publics ? Si l’honorable membre s’était acquitté du mandat qu’il avait accepté de sa section, s’il s’était rendu aux séances de la section centrale et s’il avait démontré la nécessité d’avoir une réponse à ses questions, la section centrale aurait fait droit à sa demande ; elle aurait posé ces questions au ministre, qui eût été à même d’y répondre. Le retard dans nos délibérations, les discours multipliés que nous avons dû entendre, car, je dois le dire, c’est à mon grand regret que j’ai dû entendre ces discours, c’est à l’honorable membre, à son absence de la section centrale, au non-accomplissement de son mandat, que nous les devons.
J’ai une observation à ajouter sur la motion faite par l’honorable membre, de voter à l’avenir trois mois de crédits provisoires à chaque département ministériel, pour pouvoir s’occuper des budgets des dépenses pendant les trois premiers mois de l’exercice. Je dirai que cette proposition est incompatible avec le texte et l’esprit de la constitution, qui veut que les budgets soient, autant que possible, votés avant l’exercice, et non qu’on mette des crédits provisoires d’une manière générale et permanente à la disposition des chefs des départements ministériels pendant les trois premiers mois de l’année.
M. Rogier. - Je regrette aussi beaucoup les nombreux discours prononcés à la séance d’hier, et dont j’ai eu ma part. Mais ces nombreux discours…
M. de Theux. - Je n’ai pas entendu parler des discours prononcés par M. Rogier, mais seulement de ceux prononcés par l’auteur de la motion.
M. Rogier. - Eh bien, ces nombreux discours de l’honorable M. David auraient été évités si M. le ministre des travaux publics avait fourni les renseignements demandés. Ce n’est que la persistance tout à fait extraordinaire du ministre qui a provoqué ces discours que regrette l’honorable membre.
Quant à la question de savoir si M. David a bien ou mal fait de ne pas assister à une séance de la section centrale, je la trouve tout à fait sans objet dans cette circonstance ; la question utile est celle de savoir si les renseignements demandés par M. David sont de nature à éclairer la discussion. Voilà toute la question.
Je ne mets pas en doute que les renseignements demandés seraient extrêmement utiles pour éclairer la discussion, et je crois que toutes les personnes un peu au courant des affaires du département des travaux publics doivent le penser.
M. le ministre s’est enfin décidé, après avoir longtemps lutté, à fournir des renseignements, et il vient de proposer, je ne puis en cela que lui adresser des éloges, il vient de proposer de remettre la discussion à lundi ou mardi, afin que les membres qui attachent de l’intérêt aux documents demandés puissent les examiner. Je dois, avec la même franchise, déclarer que lundi et mardi ces mêmes membres se trouveront peu près aussi avancés qu’hier et aujourd’hui, car les renseignements déposés, à l’examen desquels je viens de me livrer rapidement, n’éclaireront pas beaucoup la discussion, parce qu’ils se trouvent tout à fait incomplets. Hier, on a demandé le nombre de lieues parcourues en 1842. Le ministre ne les donne que pour onze mois. Si nous n’avons pas ce renseignement pour toute l’année, nous n’aurons pas une appréciation exacte de l’état des choses en 1842, qui doit exercer une grande influence sur la fixation de l’allocation à accorder pour 1843.
M. Dubus (aîné). - Si le budget avait été voté en décembre, comme il devait l’être on n’aurait pu connaître que ce qui s’est passé pendant onze mois.
M. Rogier. - L’observation de M. Dubus est exacte ; mais comme le vote n’a pas eu lieu en décembre, et que nous pouvons être éclairés de renseignements ultérieurs, je ne vois pas pourquoi on les refuse.
Ainsi donc, en ce qui concerne le nombre de lieues parcourues, ce renseignement, si essentiel pour la discussion, est incomplet. L’état des magasins, on ne le donne que pour les 11 premiers mois de 1842 ; le document s’arrête au mois de décembre. La chambre ignorera les approvisionnements faits en décembre et qui ont pu être considérables. Cependant, aux termes des règlements, au 31 décembre, le ministre doit avoir l’inventaire du magasin central de Malines et des magasins des stations. Voilà donc deux des documents principaux incomplets.
Pour le mouvement des marchandises, M. le ministre a étalé huit grands tableaux qui ne comprennent que 8 mois de l’année. Resteraient 4 mois sur lesquels nous serions sans renseignements. Lundi et mardi on sera dans la nécessité de demander le complément, si le ministre, d’ici là, n’est pas parvenu à rendre suffisant ce qui ne l’est pas.
J’espère que la chambre ne verra pas, dans l’insistance que je mets à appuyer la motion de M. David, un désir mesquin de susciter des tracasseries au ministre des travaux publies. Ma conviction est que l’on demande beaucoup trop au budget pour l’exploitation dia chemin de fer. D’après l’étude que j’en ai faite, je crois qu’il y a de grandes réductions introduire dans ce budget. J’en ai la conviction, peut-être parviendrai-je à la faire partager à la chambre. Mais je veux baser mes calculs sur des documents officiels. Si je vous en présentais d’après 1es renseignements que j’ai pu recueillir, ils manqueraient de base certaine, et ne porteraient peut-être pas dans vos esprits la conviction que je partage avec d’autres membres sur la trop grande élévation du chiffre porté au budget pour les dépenses d’exploitation du chemin de fer.
Il est fort important que le budget du chemin de fer, dans ses rapports avec l’industrie et le commerce et avec le trésor lui-même, ne présente pas d’exagération. Plus nous ferons d’économies sur le budget des dépenses du chemin de fer, plus il y aura profit pour le trésor et pour l’industrie et le commerce, en ce que nous pourrons fixer les tarifs à un taux modéré.
Un honorable membre a dit que la question des dépenses du chemin de fer était insignifiante, que la question des recettes était la seule importante. Mais cet honorable membre, qui a fait partie d’une commission chargée de l’examen des tarifs, professait alors une opinion contraire, car la commission n’examinait que la question des dépenses et non celle des recettes. Les questions de dépenses et de recettes sont liées très intimement. Vous recevez 40 francs et vous en dépensez 20. Vous avez 20 francs de bénéfice ; si vous receviez 40 fr. et que la dépense ne fût que de 15 fr., le bénéfice serait de 25 fr. Si l’on démontre qu’on peut recevoir 40 fr. en n’en dépensant que 15, au lieu de 20, ce n’est sans doute pas chose inutile qu’une telle démonstration.
Je ne préjuge pas l’opinion de la chambre, mais je suis sûr d’établir qu’une économie considérable peut être effectuée sur le chemin de fer, sans entraver le service. Quand des hommes qui ont étudié la question avec assez de soin, qui ont appartenu à l’administration ou qui appartiennent au commerce et à l’industrie, viennent dire qu’on peut effectuer une économie considérable sur un article du budget, je crois que la chambre ne peut pas se refuser à les entendre et à faire en sorte que tous les documents qui peuvent les éclairer leur soient fournis.
Serait-ce le moment de dédaigner les économies, quand on vous demande un million de plus que l’année précédente et quand, de toutes parts, on crie au déficit, quand le budget de la guerre est gravement compromis. Vous avez vu quel concert de plaintes s’est élevé au sénat contre l’élévation du budget de la guerre. Quant à moi, ce serait avec la plus grande peine que je verrais porter atteinte aux intérêts de l’armée, qui fait la principale force de notre nationalité, qui a droit à toutes nos sympathies ; aussi donnerai-je la main à toutes les économies raisonnables qui pourront être faites en dehors du budget de la guerre. Si cependant on me démontrait qu’en peut faire des économies sur ce budget sans nuire à notre organisation militaire, j’y donnerais également les mains, mais je proposerai, en dehors du budget de la guerre, toute espèce d’économie qui ne sera pas de nature à nuire au service.
En concluant, je répéterai que mardi nous ne serons guère plus avancés qu’aujourd’hui si les documents fournis ne sont pas complétés.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Jusqu’ici, on s’était borné à demander des renseignements pour les onze premiers mois, et on disait qu’alors on serait en état de discuter. Aujourd’hui que j’ai fourni ces renseignements pour les onze premiers mois, cela ne signifie plus rien, on ne peut plus discuter, à moins d’avoir les renseignements pour l’année entière. J’ai dit qu’aussitôt que les questions rectifiées de M. David m’ont été connues, j’ai demandé à l’administration du chemin de fer tout ce qu’il lui était possible de me donner en réponse à ces questions, que je n’ai bien connues qu’il y a trois jours par le Moniteur. Or, ces questions ne portant que sur les onze premiers mois de 4842, les renseignements que j’ai fournis ne portent également que sur ces onze premiers mois. Maintenant on conçoit que les renseignements relatifs au mois de décembre ne peuvent être donnés immédiatement, comme ceux des onze premiers mois ; mais je pense que je pourrai fournir ces renseignements après-demain.
M. David. - M. le ministre reviendra donc toujours avec ses insinuations à propos de rectification des questions ? Encore une fois et pour la dernière, messieurs, ces questions sont entre les mains de l’honorable rapporteur, qui, en les exhumant, pourrait mettre un terme à toutes les tracasseries dont je suis l’objet à leur occasion.
Je viens encore de demander, messieurs, que, quand même on nous fournirait toutes les pièces demandées, l’on nous donnât le temps moral non de les lire, de les parcourir, mais de les étudier, de les dépouiller.
Pour vous donner une idée du peu d’utilité que l’on peut tirer des renseignements que l’on soumet à la chambre sans qu’on ait le temps de pouvoir les examiner, il suffira de dire que personne peut-être de nous ne se serait avisé de penser qu’il n’y avait d’autre différence entre les recettes totales nettes et les recettes totales brutes du chemin de fer, que les seuls frais de camionnage !!! (Voir pages 2 et 3 du supplément aux annexes du rapport de la section centrale.)
Serait-il donc possible qu’il n’y ait d’autre dépense au chemin de fer que celle du camionnage ?
M. le ministre devrait bien avoir l’extrême obligeance de nous expliquer ce nouveau mode de comptabilité. Elle n’est guère usitée en commerce ni en affaires, que je sache.
Pour la recette brute, elle est vraie ; mais, pour la recette totale nette, c’est évidemment une mauvaise plaisanterie.
Mais ce qui est sérieux, messieurs, et sur quoi je désire avoir quelques explications, c’est que je ne comprends pas, si la chose est comme le tableau l’annonce, qu’on ait continué un service de camionnage, c’est-à-dire, la remise et la prise des marchandises à domicile, qui aurait coûté sur les lignes du Midi :
En janvier, 1,652 94 et n’aurait rapporté que fr. 23 00
février, 1,452 81 soit fr. 40 90
mars, 1,562 80, soit fr. 27 70
avril, 449 02, soit fr. 20 80
mai, 901 78, soit fr. 24 50
juin, 706 50, soit fr. 34 10
juillet, 748 19, soit fr. 24 70
aout, 785 56, soit fr. 27 70
septembre 896 12, soit fr. 35 30
octobre, 1058 86, soit fr. 34 10
Ensemble : 10,154 58, soit fr. 292 80
Evidemment, messieurs, il doit y avoir erreur d’indication dans ce tableau, sans quoi je demanderais à M. le ministre de nous donner en détail l’indication de ces dépenses et de ces recettes.
M. de Mérode. - Je ne puis concevoir la difficulté qu’on fait à M. le ministre des travaux publies, au sujet des réponses qu’il a faites, pour onze mois d’exploitation du chemin de fer ; car comme l’a fait observer l’honorable M. Dubus, si l’on avait discuté le budget des travaux publics à l’époque convenable, on n’aurait pas eu ces renseignements, et l’on n’aurait pas pu dire que la chambre n’était pas assez éclairée.
M. le ministre des travaux publics a suffisamment fait remarquer que les questions de M. David ne concernent que onze mois. Si on connaît onze mois, on peut connaitre approximativement le 12ème mois. Si l’on veut être informé jusqu’au dernier jour de l’exploitation du chemin de fer, il nous faudra des renseignements jusqu’au 13 janvier, puisque c’est aujourd’hui le 14. On pourrait dire que le ministre, ayant constamment les états de situation sous la main, devrait nous communiqua la situation pour la journée d’hier.
Quant à moi, ce n’est pas ce que j’ai voulu. J’ai demandé des renseignements, parce qu’il y a, selon moi, de grands abus dans l’administration du chemin de fer. Sous l’administration précédente le pont du Val St-Benoît avait été adjugé à 1,019,000 fr., y compris 122 mille francs d’imprévu ; on y a joint un supplément de travaux de 335,000 fr., accordé au même entrepreneur sans adjudication publique.
La cour des comptes a signalé cet abus très grave. Il en a été signalé un autre dans le rapport de cette année ; il concerne le personnel. Ainsi, le précédent ministre des travaux publics a pris un arrêté d’après lequel deux personnes reçoivent un traitement fixe de 6 mille fr., et l’une d’elles, sous le prétexte qu’elle perd une position dans une ville du royaume, est assurée de 3 mille fr. de plus, c’est-à-dire qu’elle a le traitement d un conseiller à la cour de cassation.
Si j’appuie donc la demande de renseignements, c’est parce que je suis décidé à m’opposer à tous les désordres.
Mais je n’exige pas que le ministre vienne donner des renseignements pour douze mois. Quand on aura ceux qui sont fournis pour onze mois, il est évident que nous pourrons aborder la discussion des articles relatifs au chemin de fer.
Nous avons une foule d’autres objets à traiter. Nous devons en finir avec cette affaire, puis passer à d’autres objets.
M. Liedts, rapporteur. - Je regrette que, pour la troisième fois, l’honorable M. David mette en cause le rapporteur de la section centrale, et fasse croire qu’il est resté en défaut de soumettre au ministre les véritables questions posées. Je dois répéter à la chambre que les sept questions, telles qu’elles sont minutées dans le rapport de la section centrale, ont été en quelque sorte dictées par l’honorable préopinant, qu’elles ont été posées au ministre, et qu’on a attendu sa présence pour les discuter dans la section centrale. Si, le lendemain, il s’était présenté, il nous aurait fait comprendre que ces questions n’avaient pas été posées comme elles devaient l’être, qu’il fallait les poser de nouveau. Le ministre se serait empressé d’y répondre. Nous aurions ainsi évité une discussion qui dure depuis deux jours.
Quoi qu’il en soit, je suis aussi de l’avis de ceux qui pensent qu’avec les documents relatifs aux onze premiers mois, nous pouvons connaître approximativement le 12ème mois. Du reste si le ministre peut se procurer ce renseignement d’ici à demain, c’est un motif de plus pour continuer la discussion à lundi ou mardi. Il faut bien s’arrêter quelque part. Autrement il n’y a pas de motif pour que cela finisse. On a dit qu’il était possible de connaître les détails de l’exploitation pour le mois de décembre. Quand nous arriverons à la fin de janvier, on pourra demander les mêmes renseignements pour le mois de janvier. Je ne vois pas de motif pour qu’on ne vienne dire qu’il serait également utile de connaître les approvisionnements du mois de janvier.
Quoi qu’il en soit, pour ce qui me regarde, j’ai l’intime conviction que, discuteriez-vous pendant six mois, vous finiriez toujours par vous convaincre que le crédit du chemin de fer est un crédit de confiance. Si j’étais ministre des travaux publics, vous réduiriez le budget d’un million, que je pourrais l’accepter, parce qu’à la fin de l’année je viendrais déclarer qu’il a été impossible de marcher avec la somme allouée. C’est une prévision. Il est impossible d’indiquer une somme précise. Ceux qui ont été aux affaires doivent le savoir.
M. David. - Ce qui me blesse, c’est cette rectification dont on parle toujours. Je tiens à déclarer que je n’ai jamais rectifié mes questions. Elles sont entre les mains de M. le rapporteur de la section centrale, qui aurait pu, d’un mot, faire cesser la discussion..
M. Liedts, rapporteur. - Je prie la chambre de remarquer que les questions ne m’ont été remises que quand la section centrale avait terminé son travail. Comment pouvais-je alors poser ces questions au ministre ! C’était à l’honorable membre à se trouver à la section centrale, pour demander que les questions fussent posées autrement.
M. de Man d’Attenrode. - Messieurs, M. le ministre a fourni les renseignements demandés pour les onze premiers mois ; d’honorables collègues ne se trouvent pas encore satisfaits de ces renseignements ; le 12ème mois leur manque. Je ne puis, je vous l’avoue, partager leur avis. Si la section centrale avait produit les renseignements pour les onze premiers mois, on eût été satisfait ; on n’en eût plus demandé davantage. Quant à moi, je me trouve satisfaits des onze premiers mois ; on peut évaluer le 12ème mois proportionnellement aux onze autres ; il faut bien que les renseignements s’arrêtent quelque part. Mais il est des abus infiniment plus graves que ceux que l’on peut découvrir par les renseignements demandés par M. David ; quant à ceux-là, je me réserve d’en parler lors de la discussion générale du chap. IlI.
M. d’Hoffschmidt. - L’honorable M. David a présenté une série de questions qui ont entre elles la plus grande liaison, et qu’il déclare en quelque sorte indivisibles. Dans la séance d’hier, plusieurs membres de la chambre ont appuyé sa demande. Il s’en trouvait même qui sont les amis politiques de M. le ministre des travaux publics (et je tiens du reste à déclarer qu’il n’y a, selon moi, rien de politique dans cette question qui est toute d’administration), ces membres ont aussi comme nous, dans la séance d’hier, demander des renseignements de nature à entraîner la conviction.
Aujourd’hui, M. le ministre des travaux publies vient nous annoncer qu’enfin il peut répondre à quelques questions. Il dépose sur le bureau non une réponse à toutes celles posées par l’honorable M. David, mais à quelques-unes, et encore ces réponses ne sont pas complètes. Elle ne concerne, quant au nombre de lieues parcourues, que onze mois de l’année dernière ; il en est de même pour les autres.
On vous dit : mais il y a de quoi être satisfait avec une réponse qui concerne onze mois. Messieurs, si on demande d’avoir des renseignements sur les douze mois, c’est qu’il s’agit d’une allocation pour une année entière, que par conséquent il faut obtenir des renseignements sur toute l’année précédente, pour établir une comparaison. Si nous calculons le 12ème mois par analogie, nos calculs ne seront pas aussi positifs. D’ailleurs, en raisonnant de cette manière, on pourrait aussi calculer par analogie sur l’année entière.
Les renseignements que nous donne M. le ministre seront-ils imprimés et distribués aux membres de la chambre ? Non, ils resteront déposés sur le bureau. Or, vous le savez, des pièces un peu volumineuses déposées sur le bureau ne peuvent être examinées que par un très petit nombre de membres de cette chambre. Nous sommes dans cette chambre quatre-vingt-quinze membres ; ordinairement une soixantaine siègent à nos séances. Eh bien ! comment voulez-vous qu’un pareil nombre de députés aillent examiner les pièces qui sont déposées sur le bureau d’ici à lundi prochain. Cette manière de donner des renseignements est donc tout à fait incomplète.
Mais, dit-on, si nous tardons davantage, il y a un grave inconvénient, c’est que le vote du budget des travaux publics sera ajourné, et qu’il est important, disait tout à l’heure l’honorable M. de Theux, qu’un ministre soit débarrassé de la discussion de son budget, pour pouvoir se livrer à d’autres occupations. Mais, messieurs, ce qui est aussi de la plus haute importance, c’est que la chambre, c’est que la législature puisse juger une question aussi majeure que celle des chemins de fer en pleine connaissance de cause.
Remarquez-le bien, messieurs, la dépense du chemin de fer constitue une des questions les plus graves qu’il soit possible d’examiner. On parle toujours de la lenteur de nos discussions ; mais il y a une chose plus importante que d’aller vite, c’est de marcher bien. Or, je le demande à tous les membres, en est-il un seul qui soit suffisamment éclairé sur la question qui nous occupe ? Je n’hésite pas à répondre que non. Eh bien si nous ne sommes pas assez éclairés, nous devons l’être davantage. Quant à moi, je déclare que le dépôt qu’on vient de faire ne me paraît pas suffisant, et qu’il nous laisse dans la position où nous étions hier.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Messieurs, l’honorable membre a demandé si les pièces que j’ai déposées seraient imprimées. On conçoit très bien que ces pièces sont, ainsi qu’on a pu le juger, trop considérables pour pouvoir être imprimées et distribuées sans retarder considérablement la discussion. Mais ce que je puis faire imprimer tout de suite et de manière à vous être distribué dès demain, ce sont les résultats des tableaux détaillés, répondant aux trois questions principales, auxquelles on a attaché le plus de prix. Alors, messieurs, tous les membres de la chambre qui auraient des doutes sur ces résultats, et qui voudraient les vérifier, seront à même de le faire en les confrontant aux tableaux que j’ai déposés. Je ne crois pas impossible d’ajouter le 12ème mois, et, dans tous les cas, le 12ème mois diffère toujours très peu du 11ème.
M. Devaux. - Messieurs, la nuit a porté conseil à M. le ministre des travaux publics ; il nous a fait quelques communications ; il nous en promet encore d’autres, et propose de remettre la discussion du chapitre du chemin de fer, et de passer aux autres chapitres du budget. Quant à moi, je ne vois aucun inconvénient à adopter cette marche.
Il est bien évident que nous ne pouvons pas forcer M. le ministre à nous donner des renseignements qu’il ne veut pas nous donner, mais mardi chacun restera dans son droit. On aura le temps d’examiner les renseignements fournis ; M. le ministre des travaux publics aura peut-être encore pris conseil d’un délai, et d’ailleurs il nous a promis de nous donner les autres renseignements qu’il pourra nous fournir. Nous pourrons voir l’état dans lequel se trouvent ces renseignements. Ceux qui en désireraient davantage pourront en démontrer la nécessité. Mais maintenant je pense que cette discussion a duré assez longtemps et que nous pouvons passer aux autres chapitres du budget. Je le répète, chacun reste dans son droit.
Je sais fort bien, comme l’a fait remarquer un honorable membre, que le vote du budget du chemin de fer est un vote qui est tout de confiance. Mais pour obtenir des votes de confiance, il faut les mériter ; et c’est un très mauvais moyen pour l’administration de mériter la confiance, que de s’entourer de mystères. C’est une chose qui n’a jamais eu lieu ; le système mystérieux de l’administration du chemin de fer est de nouvelle date ; mais il paraît s’étendre très loin.
M. Peeters. - Je demande la parole.
M. Devaux. - Et puisqu’on s’apprête à me répondre, j’ajouterai encore une observation. Je dirai que la mesure qui vient d’être prise, de défendre à tous les employés du chemin de fer de communiquer le moindre renseignement à qui que ce soit, même aux membres de la chambre, est de nature à inspirer une grande méfiance. Dans une matière où la publicité est si naturelle, il est difficile qu’on n’en vienne pas à dire que qui se cache, a des raisons de se cacher.
Messieurs, il s’agit ici d’un vote tout différent de celui que nous émettons pour les autres départements, pour lesquels les crédits sont repartis en petites sommes de 50 et de 100 mille francs ; de telle manière que nous pouvons en quelque sorte répondre que, dans tel département ministériel, il n’y a pas cent francs qui puissent se dépenser irrégulièrement ; tandis que tout est global pour le chemin de fer, et que pas un de nous ne peut répondre que là il n’y a pas des centaines de mille fr. qui puissent se dépenser irrégulièrement, si l’administration est mal gérée ou mal contrôlée. Une pareille administration a besoin de publicité, d’autant plus encore que ses opérations échappent, en grande partie, au contrôle de la cour des comptes car tous les transferts sont possibles avec des crédits globaux.
Je ne vois donc pas de difficulté à passer aux autres chapitres du budget. On verra la portée des renseignements qui ont été déposés ; on verra ceux que M. le ministre déposera encore, et chacun reste dans un droit qu’on ne peut lui contester.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Messieurs, je n’ai, quant à moi, donné aucun ordre de ne pas communiquer des renseignements, et surtout aux membres de la chambre. Je crois que tous les membres de la chambre ont droit à obtenir des renseignements ; mais je pense aussi qu’il est dans les convenances, lorsqu’un représentant désire avoir des éclaircissements, qu’il s’adresse au chef de l’administration, au ministre.
Messieurs, comme déjà hier un honorable ami du préopinant a émis cette assertion, qu’une défense avait été faite aux employés du chemin de fer de communiquer des renseignements, j’ai demandé à M. le directeur de l’exploitation s’il avait fait cette défense, et il n’a pas hésité à me répondre qu’effectivement cette défense existe et existe depuis longtemps. Je dirai plus, messieurs, c’est que cette défense doit exister, car s’il était permis à tous les employés inferieurs de donner à tout le monde des renseignements dont ils ne comprennent pas la portée et qu’ils pourraient donner inexactement et peut-être méchamment pour se venger de l’un ou l’autre de leurs chefs, il n’y aurait plus d’administration possible.
Mais, je le répète, tous les membres de la chambre qui voudront obtenir des renseignements, n’ont qu’à s’adresser à moi. Toutes 1es fois que cela me sera possible, je les leur ferai donner, et je ne me mêlerai aucunement de l’usage que l’on veut en faire.
M. David. - Et vous nous les refusez ici !
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Je ne refuse rien de ce qu’il m’est possible de donner.
M. Peeters. - Messieurs, je suis aussi un de ceux qui désirent avoir tous les renseignements possibles sur le chemin de fer ; car j’ai la conviction intime qu’il y a beaucoup d’abus dans cette administration.
Messieurs, l’année dernière, en ma qualité de rapporteur du budget des travaux publics, j’avais préparé un rapport dont plusieurs expressions ont été supprimées par la majorité de la section centrale, parce qu’elles les a regardées comme trop critiques pour le chemin de fer. Vous ne pouvez donc douter que je désire aussi d’avoir beaucoup d’éclaircissements.
Mais je trouve aussi, avec l’honorable M. de Theux, que l’honorable M. David aurait dû insister auprès de la section centrale pour avoir ces éclaircissements ; c’est ce que nous avons fait l’année dernière ; et je dois à la vérité de dire qu’alors M. le ministre s’est empressé de nous fournir tous les renseignements que nous lui avons demandés ; ce qu’il aurait probablement fait cette année-ci, si la section centrale le lui avait demandé. L’année dernière, la section centrale a posé, si je ne me trompe, vingt-trois questions à M. le ministre sur le chemin de fer, dont les réponses ont été imprimées à la suite du budget.
Pour que les renseignements demandés par l’honorable M. David eussent quelque utilité, il faudrait qu’ils fussent imprimées ; or, pour cela il aurait fallu qu’ils fussent demandés par la section centrale. Mais exiger maintenant des documents aussi volumineux qui, je le répète, devraient être imprimés pour être utiles, comme le reconnaît M. David lui-même, c’est dire que nous ne voulons pas cette année de budget des travaux publics.
M. le président. - Je vais mettre aux voix la proposition de M. le ministre, tendant à renvoyer à mardi la discussion de l’article relatif au chemin de fer.
M. David. - Je demanderai s’il n’y aurait pas moyen de différer la discussion d’un ou de deux jours de plus ?
- La proposition, de remettre à mardi la discussion de l’article relatif au chemin de fer, est adoptée.
M. le président. La chambre passe à la discussion de la section II du chapitre III, Postes.
« Art. unique. Personnel, matériel, transport de dépêches, service rural, etc. : fr. 1,170,546 »
La section centrale propose de diviser cet article comme suit :
« Art. 1er. Personnel : fr. 800,000 »
« Art. 2. Matériel : fr. 370,546 »
M. le ministre des travaux publics déclare se rallier à la proposition de la section centrale.
M. Cools. - Plusieurs fois, messieurs, j’ai appelé l’attention du gouvernement et j’ai même été le premier à appeler son attention sur la situation précaire des maîtres de la poste aux chevaux. Le il nous a annoncé, il y a à peu près un an, je pense, qu’une commission était instituée pour aviser aux mesures à prendre dans l’intérêt de cette institution, et je m’attendais à ce que la chambre fût saisie d’une proposition à sa rentrée, mais jusqu’à présent mon attente a été déçue. Je ne sais si elle le sera encore longtemps, mais à mesure que l’exécution des diverses lignes du chemin de fer avance, la position des maîtres de poste devient plus mauvaise. Je demanderai au gouvernement où en est le travail de la commission qui a été instituée l’année dernière et si nous serons incessamment saisis d’une proposition quelconque.
M. de Mérode. - Il est certain, messieurs que les maîtres de postes sont dans la position la plus fâcheuse possible dans ce moment, parce que les chemins de fer détruisent entièrement l’exploitation de leurs relais. J’ai été nommé président d’une commission que M. le ministre des travaux publics a jugé utile d’établir, relativement à cette institution, dont le maintien est très essentiel. Cette commission, messieurs, a fait un rapport à M. le ministre sur la position des maîtres de postes et sur les moyens à employer pour améliorer une fâcheuse situation. Je désire aussi savoir ce que M. le ministre voudra bien proposer, pour les tirer de l’extrême embarras dans lequel ils se trouvent.
Les maîtres de poste paient pour leurs chevaux un droit que ne paient pas les autres cultivateurs. Cependant s’ils ne gagnent rien, il est impossible qu’ils entretiennent leurs chevaux et qu’en outre ils supportent des impôts. Précédemment les diligences fournissaient pour l’entretien de la poste une somme considérable ; le gouvernement a remplacé les diligences par les chemins de fer, il me paraîtrait tout à fait juste que le chemin de fer payât une indemnité aux maîtres de postes. Cela n’a pas été fait par l’administration, mais si elle l’avait voulu, je crois qu’elle aurait pu donner aux maîtres de postes une indemnité équivalente à celle qu’ils recevaient précédemment des entrepreneurs de messageries.
Aujourd’hui, messieurs, il existe, indépendamment du chemin de fer, plusieurs espèces de voitures qui remplacent les diligences ; il y a des omnibus, il y a encore un certain nombre de diligences. Si l’on rendait le droit applicable à toutes ces voitures, on pourrait, au moyen des sommes que l’on en retirerait indemniser les maîtres de postes et empêcher ainsi que leurs relais soient totalement détruits. Il n’est pas nécessaire que ces relais soient de 20 ou 30 chevaux, comme ils l’étaient précédemment, mais il serait très utile qu’il y eût toujours des relais de10 ou 12 chevaux, car le service du chemin de fer peut être interrompu par des circonstances extraordinaires, par des émeutes, par la neige, par une invasion, enfin par différents événements imprévus, et si tout autre moyen de communication rapide est supprimé, le gouvernement se trouverait dans un grand embarras lorsqu’il aurait des ordres à transmettre. Vous voyez donc, messieurs, qu’il est très important de ne pas laisser périr la poste ; cependant elle est véritablement au moment de devoir cesser son service si l’on n’apporte pas un prompt remède à sa position.
Je prierai M. le ministre de bien vouloir nous indiquer ce qu’il compte faire relativement à cette institution.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Il est certain, messieurs, qu’il y a des mesures à prendre relativement à la poste aux chevaux. Depuis l’établissement du chemin de fer plusieurs maîtres de postes du royaume se trouvent dans une espèce de détresse, par suite de la concurrence que le chemin de fer est venu leur faire et qui les tue presque entièrement. Aussi, messieurs, un de mes premiers soins, lorsque j’ai pris la direction du département des travaux publics, a été de faire faire, d’abord par de hauts fonctionnaires de l’administration, une enquête générale sur la question des postes aux chevaux, et ensuite de rechercher les moyens de réorganiser les relais sur de nouvelles bases, de manière à faire trouver aux maîtres de postes, dans la nouvelle organisation, une indemnité en quelque sorte de ce que le chemin de fer leur a fait perdre.
Immédiatement après cette enquête, j’ai institué une commission dont effectivement l’honorable préopinant a bien voulu accepter la présidence. Cette commission m’a proposé un projet de loi qui tend à faire payer par toutes les messageries et par toutes les autres voitures qui louent des places, une rétribution au moyen de laquelle on formerait un fonds qui serait réparti erre les différents relais du royaume ; mais, messieurs, j’ai cru qu’avant de demander à Sa Majesté l’autorisation de soumettre ce projet à la chambre, je devais examiner s’il n’est pas possible d’organiser la poste aux chevaux de manière à ce qu’elle serve d’auxiliaire au chemin de fer et à ce qu’elle trouve dans les services qu’on lui donnerait une indemnité de ce que le chemin de fer lui a fait perdre. Cette question, messieurs, est très grave, très difficile, et les renseignements que j’ai pu me procurer sur ce point ne sont pas assez complets, assez décisifs pour que je puisse, dès à présent, proposer à la législature une disposition de loi à cet égard. Cependant, comme l’état de détresse dans lequel se trouvent actuellement les propriétaires de plusieurs relais du royaume ne peut durer plus longtemps il y aurait en quelque sorte injustice à ne pas le faire cesser. Je ne tarderai pas à proposer à Sa Majesté le projet de loi qui m’a été soumis par la commission, sauf à y introduire quelques modifications que j’ai jugées convenables, ainsi qu’une disposition qui permette au gouvernement d’arriver à une organisation de la poste aux chevaux qui la mette en rapport avec le chemin de fer, qui la rende utile à cette entreprise et lui procure en même temps des revenus.
M. de Mérode. - D’après ce que vient de dire M. le ministre des travaux publics., il ne serait pas encore fixé sur le projet de loi qui doit être soumis à la chambre relativement aux maîtres de postes ; mais, messieurs, si un retard un peu long a lieu, il sera trop tard, la poste aux chevaux n’existera plus. Beaucoup de maîtres de postes, surtout ceux qui faisaient le service des lignes principales, sont obligés de renoncer à leurs relais, car les avantages qu’ils pouvaient recueillir précédemment n’existent plus, et les charges qui leur étaient imposées pèsent toujours sur eux. J’espère que M. le ministre des travaux publics se décidera à prendre des mesures en faveur des maîtres de postes, un peu plus promptement qu’il ne paraît vouloir le faire, d’après les paroles qu’il vient de prononcer.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Il faut que je me sois mal expliqué ou que l’honorable préopinant m’ait mal compris. J’ai voulu dire que dans un délai très court. J’aurai l’honneur de demander au Roi l’autorisation de présenter le projet de loi dont j’ai parlé.
M. Dedecker. - Je désirerais savoir si, sur le chiffre pétitionné pour les postes, M. le ministre pourra trouver les sommes nécessaires pour établir des bureaux de poste dans quelques localités où la nécessité s’en fait sentir. Dans mon district, il y a deux communes qui demandent un bureau des postes et qui ont, je pense, droit à l’obtenir, à cause de l’importance de ces communes sous le double rapport de la population et du mouvement des affaires. L’établissement de ces bureaux coûterait peu de chose, car il y a dans ces communes un grand mouvement de voyageurs qui se transportent à la station de Termonde.
Je prierai M. le ministre de bien vouloir nous dire s’il a l’intention de faire droit à la demande de ces communes et s’il trouvera sur le crédit demandé de quoi faire face à la dépense que cela nécessitera.
(Moniteur belge n°16, du 16 janvier 1843) M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Messieurs, la chambre a pu voir par les développements du budget et par les réponses que j’ai faites à la section centrale, que déjà il m’a été possible, grâce au crédit global que la chambre a eu la confiance de m’accorder l’année dernière, d’augmenter le nombre des distributions de postes. Il y a un grand nombre de communes qui, par leur situation industrielle, agricole ou commerciale, ont des titres réels à obtenir des distributions. Je dirai même que cette augmentation du nombre des distributions ne peut être que très profitable au trésor.
J’espère qu’avec le crédit demandé, je pourrai en créer quelques-unes, mais pas en aussi grand nombre qu’il serait nécessaire. La situation des budgets de 1843 m’a fait une loi de ne pas demander une augmentation, mais il sera nécessaire de majorer ce crédit ami budget prochain de 40 à 50 mille francs au moins.
(Moniteur belge n°15, du 15 janvier 1843) M. Osy. - Messieurs, j’ai une interpellation à adresser à M. le ministre des travaux publics, interpellation qui intéresse la dignité nationale et qui peut avoir aussi pour résultat d’augmenter les revenus du trésor.
Au commencement de la révolution, la France a été obligée d’envoyer sa correspondance pour la Hollande par les Etats prussiens ; en 1836, la France a désiré faire passer sa correspondance hollandaise par la Belgique. Le 27 mai 1836, le gouvernement belge a fait une convention avec le gouvernement français ; convention dont je crois utile de vous lire l’art. 24 :
« Art. 24. L’office des postes belges transportera entre Valenciennes et Groot-Zundert, les correspondances et dépêches closes, moyennant la somme de 45 c. par 30 grammes pour les lettres et 1 c. par 30 grammes pour les journaux, etc.
« Toutefois, il est convenu que la précédente stipulation cesserait d’avoir son effet du moment où l’office des postes belges viendrait à s’entendre avec l’office des postes de la Hollande pour livrer à la France les correspondances ci-dessus désignées, suivant un autre mode et à des conditions différentes. »
Le 10 octobre 1836, le gouvernement français a conclu avec le gouvernement hollandais une convention pour l’exécution de celle qu’il avait conclue avec le gouvernement belge.
En 1836, comme nos démêlés avec la Hollande n’étaient pas terminés, on conçoit que nous ne pussions pas alors faire des arrangements avec l’office des postes hollandaises ; mais en 1839 nous avons fait un arrangement avec ce pays pour la poste belge. En conséquence, il me paraît que le traite fait le 27 mai 1836 avec la France devrait cesser, et que c’est avec la Belgique seule que la France devait traiter pour le transport des dépêches pour la Hollande. Je crois qu’usant de la réserve stipulée dans le paragraphe de l’article 24 du traité du 27 mai 1836, le gouvernement aurait dû faire une nouvelle convention pour cette affaire. La dignité nationale, je le répète, y était intéressée, car je crois, d’après le Moniteur français du 31 décembre 1842, que le gouvernement français vient de faire avec le gouvernement hollandais un nouvel arrangement pour le transport de ses dépêches de Lille à Breda, et cela sans demander le consentement de la Belgique. Il est impossible que les puissances étrangères disposent de nous sans nous.
La France fait-elle transporter ses dépêches pour la Russie, la Suède, le Danemarck, sans s’entendre avec la Prusse, pays qu’il faut traverser ?
Le Nord et toute l’Allemagne peuvent-ils transporter leurs dépêches pour l’Espagne et le Portugal sans s’entendre avec la France ?
Je demanderai à M. le ministre des travaux publics pourquoi l’on n’a pas fait cesser l’arrangement conclu le 27 mai 1836 avec la France.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Messieurs, il est très vrai, comme le dit l’honorable préopinant, que par la convention du 27 mai 1836, l’office des postes de Belgique s’est engagé à transporter en transit par son territoire, moyennant les prix stipulés dans ladite convention, les dépêches que les offices de France et des Pays-Bas jugeraient convenable d’échanger par les bureaux de Valenciennes et de Groot-Zundert. Lors de la convention de 1836, il a été convenu entre les parties contractantes que la disposition dont je viens de parler serait également applicable aux dépêches que la France jugerait convenable d’envoyer en Hollande, ou recevrait de ce pays par les bureaux autres que ceux de Valenciennes et de Groote-Zundert. L’office de Belgique n’a donc pas pu s’opposer au traité qui est intervenu dernièrement entre la France et les Pays-Bas et dont l’article est ainsi conçu :
« Il sera établi en transit par la Belgique et par la route la plus directe, aux mêmes conditions que celles stipulées dans l’arrangement provisoire, le 10 octobre 1836, et les articles additionnels du 20 septembre 1839, un échange de correspondance directe et réciproque entre le bureau français de Lille et le bureau néerlandais de Breda, pour les lettres et les journaux que les offices reconnaîtront utile de diriger par cette voie. »
Mais, messieurs, le gouvernement de Belgique a été entendu, et ce n’est que provisoirement qu’il a consenti à ladite convention.
Je dis provisoirement, parce que notre convention postale avec la France a prévu le cas où nous prendrions d’autres arrangements avec les Pays-Bas ; et il est à remarquer que jusqu’ici nous n’avons pas de convention définitive avec les Pays-Bas. Mais je n’ai rien négligé pour arriver à cet arrangement définitif. C’est ainsi que j’ai déjà réussi à obtenir une convention avec le grand-duché de Luxembourg. Lorsque l’agent belge, chargé de cette affaire, s’est rendu à la Haye, il a eu pour mission de pressentir le gouvernement des Pays-Bas sur l’intention où nous étions d’arriver à une convention avec les Pays-Bas, mais il a été répondu que le gouvernement des Pays-Bas désirait d’abord voir terminer ses différends financiers avec la Belgique, différends que le projet de traité soumis à la chambre a pour objet de terminer.
M. Osy. - Messieurs, les explications de M. le ministre ne me satisfont pas. Nous avons un arrangement provisoire avec l’office des postes hollandaises et nous avons des comptes avec cet office. La preuve en est que dans le principe nous étions obligés d’affranchir nos lettres pour la Hollande ; aujourd’hui, nous pouvons envoyer en Hollande des lettres non affranchies, et la Hollande nous envoie également des lettres sans les affranchir. Ainsi, la Belgique a un arrangement avec la Hollande. La France aurait dû s’entendre avec la Belgique pour le transport de ses dépêches destinées à la Hollande ; il est contraire à la dignité nationale qu’une puissance étrangère dispose de notre transit sans notre consentement. J’engage beaucoup M. le ministre des travaux publics à ne pas perdre de vue la réserve stipulée dans le § 2 de l’art. 24 de la convention du 27 mai 1836.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Je ne perdrai certainement pas cet objet de vue. Nous n’avons maintenant avec les Pays Bas qu’une convention provisoire, et pour ainsi dire de circonstance ; mais j’ai déjà, je le répète, fait des démarches pour arriver à une convention définitive. Je pourrai renouveler les démarches dès que le traité soumis aux chambres aura été converti en loi, et je suis persuadé que les deux gouvernements ne seront pas longtemps à s’entendre. Mais l’honorable membre ne me paraît pas avoir bien compris ce que j’ai dit tout à l’heure ; j’ai dit que nous avions été consultés sur le traité nouveau conclu récemment entre la France et les Pays-Bas, et que nous avions dû y acquiescer provisoirement. Ainsi, la dignité nationale n’a reçu aucune atteinte.
M. Cools. - Après avoir écoulé les explications qui ont été données par M. le ministre des travaux publics, en réponse à une interpellation, j’ai, comme un honorable préopinant, éprouvé le regret que M. le ministre ne fût pas encore fixé sur les mesures à prendre en faveur des maîtres de postes aux chevaux. Cependant les paroles que M. le ministre a prononcées ensuite pour compléter ses explications, me donnent l’espoir que son indécision ne se prolongera pas, et que dans un court délai nous serons saisis d’une proposition formelle. Je prends acte de cette promesse.
Messieurs, la situation des maîtres de poste est tellement mauvaise, que je voudrais que tous les membres de la chambre fussent convaincus comme moi de l’urgence qu’il a à venir à leur secours.
Je suis informé que M. le ministre des travaux publics a reçu un mémoire imprimé, rédigé par les maîtres de postes du royaume, mémoire dans lequel leur situation est exposée. A la différence de beaucoup de pétitionnaires, ces messieurs ont cru devoir s’adresser au gouvernement avant de réclamer auprès de la chambre. Pour ce qui me regarde, j’approuve beaucoup les maîtres de postes de ce témoignage de déférence à l’égard du gouvernement ; mais je crois qu’il n’y a aucun inconvénient à ce que leur mémoire soit maintenant distribué aux membres de la chambre. Si les promesses du gouvernement tardaient à se réaliser, peut-être un de nous puiserait-il dans ce document des motifs pour user de son droit d’initiative et de saisir la chambre d’un projet de loi. J’espère que nous ne serons pas réduits à cette extrémité ; mais dans tous les cas, je désire que la situation des maîtres de postes soit connue de tous les membres de la chambre, et j’engage M. le ministre à faire la distribution que je demande.
M. Mast de Vries. - J’ai une observation à faire. Elle n’est pas relative aux maîtres de postes, mais à une recrudescence de sévérité de l’administration des postes, qui est telle qu’elle rendra une foule de communications impossibles. Depuis quelque temps, le transport des petits paquets est interdit aux diligences. Aussitôt qu’un paquet transporté par une diligence pèse moins d’un demi-kilogramme, on le prend, on dresse procès-verbal et un procès s’ensuit. Les communications sont déjà assez difficiles entre certaines localités ; cette sévérité met dans la nécessité d’envoyer des exprès. Je vais vous citer un fait. Il est à ma connaissance qu’un notaire ayant fait imprimer des affiches à Lierre, on les lui avait envoyées à sa résidence qui est à trois lieues de la ville, elles ont été saisies, parce qu’elles pesaient moins d’un demi-kilogramme. L’affaire se juge au tribunal correctionnel de Malines. Le lendemain on fut obligé de faire de nouvelles affiches ; on les a remises à la poste et ou a dû payer 7 fr. 65 pour des affiches que n’en valaient pas trois, Vous sentez qu’avec cette rigueur on rend impossible des communications. Que la poste empêche le transport des lettres, c’est son devoir, mais qu’elle n’empêche pas le transport de paquets de moins d’un demi-kilogramme par la diligence. On est obligé de mettre un caillou pour faire arriver un petit paquet par cette voie, sans cela on exige qu’il soit mis la poste et on fait payer le prix énorme de 7 fr.. 65 c. pour moins d’un demi-kilogramme.
Cela est d’autant plus extraordinaire que le chemin de fer transporte le plus petit paquet qu’on veut lui remettre. Si c’est un abus, je demande que le ministre le réforme. On me dit que c’est l’exécution de la loi ; je ne dis pas non ; mais c’est une exécution rigoureuse dont on n’avait pas encore entendu parler ; c’est une recrudescence de sévérité qui rendra impossibles les communications entre beaucoup de localités.
M. Desmet. - L’observation de l’honorable préopinant tombe sur la loi existante, je crois que cette observation est dans l’intérêt du commerce et de l’industrie. Vous savez, que pour le transport des lettres, on doit payer au poids. Quand ce poids dépasse un décagramme, on paie le triple de la taxe. C’est très désavantageux pour le commerce. Pour tout ce qui est imprimé on ne paie pas autant, on paie par feuille pour tout ce qui est imprimé, livres ou journaux. Aujourd’hui, je crois qu’il se fait un grand transport d’imprimés par diligence. Je demanderai si pour ces imprimes la tolérance est plus étendue que pour ce qui est relatif aux industriels. Je prie M. le ministre de nous donner des explications.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Par leurs observations, MM. Mast de Viles et Desmet ont cru signaler des abus ; ces honorables membres n’ont signalé que des faits dérivant de lois existantes. Le gouvernement est obligé d’exécuter les lois telles qu’elles sont. La loi de 1835 a prévu le transport des feuilles imprimées. Ces feuilles payent un centime par feuille de la plus petite dimension, deux centimes par feuille de moyenne dimension et quatre centimes quand elles sont de la plus grande dimension. C’est ainsi que la taxe a lieu, parce que le gouvernement ne peut pas se dispenser d’exécuter les lois existantes.
M. Mast de Vries. - Je ne dis pas que le fait que j’ai cité n’est pas l’exécution de la loi, mais on y a mis une sévérité inaccoutumée. Au reste, s’il y a un abus dans la loi, ce n’est pas, une raison pour ne pas le redresser.
M. Verhaegen. - J’aurai l’honneur de faire observer à mon honorable collègue, M. Mast de Vries, qu’il ne faut pas faire à la loi un reproche qui ne doit pas lui être fait. Si le notaire dont il a parlé avait mis ses affiches sous bandes, il n’aurait payé que quelques centimes ; mais s’il les met sous enveloppe, la poste ne peut pas savoir si ce sont des affiches ou si c’est autre chose.
M. de Mérode. - J’avais demandé la parole pour faire la même observation que l’honorable M. Verhaegen, que quand les imprimés sont sous bandes et qu’on affranchit, on ne paie pas au poids. Quant à l’obligation de joindre une pierre ou toute autre chose pour envoyer une lettre par la diligence, c’est une chose à laquelle il faut se soumettre dans l’intérêt du trésor. On ne fait cela que quand on a un besoin réel d’envoyer une lettre par la diligence. S’il n’en était pas ainsi, le revenu de la poste se réduirait à rien. Si on veut des revenus publics, il faut en subir les inconvénients. Sans doute, ce serait mieux de n’être astreint à aucune gêne, mais un gouvernement ne peut pas exister sans ressources.
M. Peeters. - J’avoue que les affiches peuvent être mises sous bandes, et qu’alors elles ne paient que par feuille. Mais d’après les instructions, rien ne peut être écrit dessus. Quelquefois on change une date., et il suffit qu’il y ait un seul mot écrit pour qu’on fasse payer d’après la taxe des lettres
Plusieurs voix. - C’est la loi, cela doit être.
M. le président. - Je vais mettre les articles aux voix.
«Art. 1er. Personnel : fr. 800,000 »
- Adopté.
« Art. 2. Matériel : fr. 370,546 »
- Adopté.
« Art. 1er. Conseil des mines : fr. 45,600 »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement des ingénieurs et conducteurs, frais de bureau et de déplacement et dépenses éventuelles par suite de promotions ou d’admissions dans le corps : fr. 156,300 »
M. Dolez. - Messieurs, je crois devoir signaler à la chambre et à l’attention de M. le ministre des travaux publics une inconcevable anomalie qui existe dans la répartition du personnel de l’administration des mines, entre les trois divisions territoriales de cette administration. La première de ces divisions comprend le Hainaut seul ; la seconde, les provinces de Namur et de Luxembourg ; la troisième, les provinces de Liége et du Limbourg.
Voici, messieurs, quelle est l’importance respective de ces trois divisions d’après des documents officiels : (suit tableau, non repris dans cette version numérisée).
Il résulte, comme on le voit, de ces chiffres que la première division des mines, c’est-à-dire le Hainaut, a, à lui seul, une importance plus que double de celle des deux autres divisions réunies.
Voyons maintenant comment le personnel de l’administration des mines est réparti entre les trois divisions : (suit tableau, non repris dans cette version numérisée).
Ainsi, la première division, qui est à elle seule deux fois plus importante, sous tous les rapports, que les deux autres réunies, n’a que le même nombre de fonctionnaires des mines que la troisième, et encore ce nombre ne se compose-t-il pour 11/19ème que de conducteurs de troisième classe, tandis que dans les autres divisions figurent des ingénieurs de rangs beaucoup plus élevés. Ainsi encore les traitements attribués aux fonctionnaires de la première division ne s’élèvent qu’à 54,000 francs, tandis que ceux des fonctionnaires de la troisième s’élèvent à 64,535 fr.
Il est évident, messieurs, qu’il y a eu trop de fonctionnaires dans la troisième division et aussi dans la seconde, ou qu’il y en a trop peu dans la première. De ces deux propositions, la première seule est vraie, car les ingénieurs de la première division suffisent à leurs importants travaux.
Il semble donc, messieurs, que le gouvernement ferait chose utile aux intérêts du trésor en diminuant un personnel évidemment trop nombreux dans les deuxième et troisième divisions, et qu’il ferait en même temps acte de justice envers les fonctionnaires de la première, en faisant disparaître l’infériorité de rang dans laquelle on les laisse, respectivement à ceux qui remplissent les mêmes fonctions dans les autres divisions.
J’appelle sur ce point l’attention de M. le ministre, et l’engage à voir par lui-même s’il n’a pas été jusqu’ici trop accord d’un côté, au détriment de l’autre.
M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Le personnel de l’administration des mines est réparti comme il l’était à mon entrée au ministère. il est possible qu’il y ait disproportion dans le personnel des trois divisions. Je dois cependant faire remarquer à l’honorable membre qu’à Liége il y a, de plus que dans le Hainaut, une école des mines du gouvernement, près de laquelle l’ingénieur en chef de cette division remplit les fonctions d’inspecteur des études. Je ne me refuse pas à examiner de nouveau la répartition du personnel ; il y aura même pour moi nécessité de le faire, puisque j’aurai à remplacer l’ingénieur en chef de la 2ème division, dont le pays a malheureusement à déplorer la perte récente.
M. Liedts, rapporteur. - Les chiffres que vient de présenter l’honorable M. Dolez sont d’une rigoureuse exactitude.
Ce qui peut, jusqu’à certain point, expliquer l’inégalité du nombre des ingénieurs et conducteurs distribués dans les trois divisions, c’est que dans la deuxième et la troisième, comprenant 4 provinces, les sièges d’exploitation sont plus éloignés les uns des autres que dans le Hainaut ; mais ce qui est pour moi inexplicable, c’est que tous les hauts grades semblent réservés à la 2ème et à la 3ème division, qui ensemble n’ont pas la moitié de l’importance de la 1ère division seule. Je ne veux pas en faire un reproche au gouvernement, car je pense que l’abus remonte très haut ; mais si les ingénieurs du Hainaut ne se plaignent pas d’un excès de travail, bien que ce travail soit considérable, ils ont, semble-t-il, le droit de s’attendre à ce que le gouvernement tienne équitablement la balance et ne réserve pas toutes ses faveurs à la division des mines de Liège.
C’est ce dernier point surtout que je recommande à la sollicitude du gouvernement.
- L’art. 2 est adopté avec le chiffre de 156,300 fr.
- Les articles suivants sont successivement adoptés sans discussion.
« Art. 3. Subsides aux caisses de prévoyance ; secours et récompenses aux personnes qui se sont distinguées par actes de dévouement : fr. 45,000 »
« Art. 4. Impressions, achats de livres et d’instruments, encouragements et subventions pour la publication des plans et mémoires, essais et expériences : fr. 10,000 »
« Article unique. Secours à des employés ou familles d’employés qui n’ont pas de droits à la pension : fr. 3,000 »
- Cet article est adopté sans discussion.
- « Article unique. Dépenses imprévues, 30,000 »
- Cet article est adopté sans discussion.
M. le président. – La discussion sur l’ensemble du projet de loi relatif à la canalisation de la Campine est ouverte
(Moniteur belge n°16, du 16 janvier 1843) M. Huveners. - Messieurs, la canalisation de la Campine a été demandée avec instance ; depuis plusieurs années des voix éloquentes se sont souvent fait entendre dans cette enceinte en faveur de cette œuvre nationale ; tous les ministres qui se sont succédé ont fait promesses sur promesses ; enfin la canalisation de la Campine a été généralement comprise, et, à l’occasion du dernier emprunt la chambre, usant de l’initiative, a alloué une somme de 1,750,000 francs.
Mais après avoir doté la plus grande partie de la Belgique de voies de communication aux frais de l’Etat ; après avoir employé 154 millions au chemin de fer, 16 millions et demi à la construction de routes, et je ne sais quelles sommes encore, sommes auxquelles la Campine du Limbourg a contribué, mais dont elle n’a pas obtenu la moindre part, jusqu’à ce jour ; après tant de dépenses en travaux d’utilité publique, la législature, pour la première fois, et cela dans un pays pauvre et dénué de ressources, impose aux propriétaires intéressés l’obligation du concours.
Force nous a été de la subir, nous avons pensé qu’il était préférable de faire encore quelques légers sacrifices, que de contribuer toujours au bien-être des autres localités sans en retirer aucun avantage ; mais nous étions aussi pénétrés des bonnes intentions de la chambre, nous étions convaincus que, tout en consacrant le concours, elle voulait faire quelque chose en faveur de la Campine, qu’elle voulait enfin lui faire bonne justice ; d’après les intentions du gouvernement, cette justice, pour être malheureusement un peu tardive, paraît devoir lui coûter cher.
Je disais tout à l’heure et avec intention, que la loi du 29 septembre dernier consacre pour la première fois le système du concours en Belgique ; car on ne peut argumenter ni prendre pour base ce qui a été fait pour le canal de Zelzaete ; ce canal sert uniquement au dessèchement des propriétés intéressées : M. l’inspecteur Vifquain, dans le rapport qui était déposé sur le bureau pendant la discussion, tout en admettant le système du concours pour ce canal, mettait tous les frais du canal de la Campine à la charge de l’Etat. Du reste il n’y a pas de comparaison possible entre le canal de Zelzaete et le canal qui nous occupe. En effet la section de Damme à la mer, si elle servait exclusivement à l’évacuation des eaux du bassin du Zwyn, coûterait 825,000 fr. ; les propriétés intéressées contribuent à concurrence du quart, ce qui donne une charge annuelle de 60 centimes par hectare, rachetable par huit à neuf francs ; ce n‘est pas tout, messieurs, le bassin du Zwyn se compose de terres de première qualité, de terres en plein rapport ; elles peuvent donc facilement supporter la charge qui leur est imposée ; aussi pas une plainte de la part des intéressés, pas une voix ne s’est élevée contre ce concours, ce concours a même été demandé.
Il n’en est pas ainsi du canal de la Campine, et surtout de la section de Bocholt à la Pierre-Bleue ; cette section traverse la partie la plus pauvre de la Campine, qu’on ne doit pas confondre avec les parties à traverser par les autres sections ou embranchements ; de l’aveu de M. Vifquain, le mérite agricole est presque nul pour la première section, et, d’après le tableau imprimé à la suite du rapport de la section centrale, 1,777 hectares seulement sont irrigables, savoir : les deux premières zones de Caulille, de Liile-St.-Hubert et de Neerpelt.
Ceci explique les justes doléances de ses habitants, doléances qui, malheureusement ne sont pas comprises par ceux qui vivent dans l’opulence, et qui considèrent une somme de deux francs par hectare comme une misère, qui mérite à peine les honneurs d’une discussion.
Je passe à l’examen du projet de loi légèrement modifier par la section centrale.
D’après le tableau annexé au rapport, les communes, pour s’acquitter immédiatement, devraient céder à l’Etat 2,823 hectares de bruyères : 1145 dans la première zone ; 958 dans la deuxième ; 663 dans la troisième ; 43 dans la quatrième, et enfin 44 hectares dans la cinquième zone ; mais en prenant un nombre égal dans chaque zone, au taux fixé par ce projet, les communes, au lieu de 2823, auraient à céder 3,595 hectares, c’est-à-dire 719 hectares de chaque zone, il ne resterait plus aux communes que 10,595 hectares dans les différentes zones ou 13,222 de toutes leurs bruyères.
Quelque exorbitant que soit ce concours, M. le ministre hésite encore de se rallier à la légère réduction de la section centrale, il attend la discussion pour se prononcer, fort probablement de l’exemple produit à la section centrale et cité à la suite du rapport. Le canal de Bois-le-Duc a certes été très avantageux au défrichement des bruyères, mais je ne puis admettre l’exagération de l’exemple cité à Rothem, exemple qui m’est connu personnellement. Je prierai donc M. le ministre de nous dire quelles sont les données du gouvernement ? Sur quoi, sur quelles ventes cet exemple est basé ? Du reste, je le reconnais, on ne pouvait citer de cas plus favorable de défrichement ; je n’entrerai pas dans les explications qui vous ont été données par le conseil communal de Lommel dans la pétition qui nous a été distribuée, mais je dirai à M. le ministre que l’exemple de Rothem est un cas tout spécial, un cas exceptionnel qu’on ne peut admettre pour base, que des plantations de l’espèce sur la rive opposée du canal de Bois-le-Duc ne valent pas la moitié, que le gouvernement aurait dû s’assurer des ventes qui ont eu lieu là comme ailleurs et citer de pareils exemples, ce qui ne lui était pas difficile ; je pense même que le gouvernement en a vendu lui-même à Lanklaar et à Eysden ; du reste les bruyères étaient sans valeur il y a 15 à 20 ans, mais aujourd’hui elles se vendent au moins 30, 40 à 50 francs dans les contrées privées de tout moyen de communication.
Il résulte de ce que je viens de dire que le concours tel qu’il est fixé par la section centrale est encore exorbitant ; cependant en vue de l’intérêt général et parce que nous pensons que les communes profiteront même des bruyères qu’elles auront cédées à l’Etat après qu’elles seront livrées à l’exploitation particulière, nous ne sommes pas très éloignés de l’admettre pour les bruyères, mais il nous reste un doute : nous ne savons pas si toutes les communes conserveront encore assez de bruyères pour suffire aux besoins du moment, et je vous prie, messieurs, de ne pas vous faire illusion à cet égard.
Les bruyères leur seront pour longtemps encore d’un besoin indispensable ; toutes les richesses de leurs habitants consistent dans l’exploitation des bruyères communales, ils en coupent la plus touffue pour servir de chauffage et de litière aux bestiaux, ils enlèvent une partie avec la terre végétale pour servir de combustible, enfin le droit de vaine pâture leur permet d’en tirer un certain avantage pour leurs bestiaux, pour leurs troupeaux de moutons : ses besoins doivent être remplacés, les habitudes ne changent pas d’un jour à l’autre, il faut du temps, un changement par trop subit plongerait cette contrée dans la plus grande désolation et causerait la ruine de ses habitants.
Mais si je suis tant soit peu disposé à admettre le concours de la section centrale pour les bruyères, je suis obligé de combattre ces propositions en ce qui concerne les terres cultivées, il faut nécessairement réduite les annuités ; j’espère vous faire partager ma profonde conviction à cet égard.
Le canal de la Campine n’augmentera pas la valeur des terres cultivées dans la même proportion que celle des bruyères, il n’y a pas le moindre doute possible pour quiconque connaît tant soit peu la Campine ; la section centrale, tout en le reconnaissant, prétend que la plus-value des terres cultivées ne sera pas moins considérable, eu égard à la superficie des terrains ; il ne m’a pas été donné de comprendre ce raisonnement, la section centrale faudra bien s’en expliquer.
Le gouvernement prétend que les terrains cultivés profiteront immédiatement par l’augmentation dans la valeur des produits et la facilité de leur exportation. Ces motifs peuvent être appliqués et paraître très fondés aux habitants de Namur, de Liége, d’Anvers, de Lierre, etc., etc., lesquels, tout en retirant des avantages immenses de ce canal sous le rapport commercial, ne contribuent point aux frais de son établissement. J’espère donc que leurs députes, en vue de ces avantages, ne voudront pas ruiner les habitants de la Campine que le canal doit traverser et ce d’autant moins que la réduction que je proposerai ne s’élèvera tout au plus qu’à 4,490 fr. si toutefois les bois sont rangés par le gouvernement parmi les bruyères. A la page 4 de l’exposé des motifs, deux catégories seulement sont indiquées, les bruyères et les terrains cultivés. Quoi qu’il en soit, les bois doivent nécessairement être mis sur la même ligne que les bruyères. Les avantages que les terrains cultivés retireront du canal sous le rapport agricole, et nous ne pouvons les envisager que sous ce rapport, sont très douteux : la partie de Bocholt à la Pierre Bleue, je ne puis assez le répéter, ne peut être confondue avec la Campine anversoise ; de Bocholt à la Pierre-Bleue les terres se louent au prix moyen de 15 à 20 francs l’hectare. On n’y cultive qu’eu égard à l’engrais dont on peut disposer. Celui qui cultiverait davantage y perdrait nécessairement ; cela fait que les terres cultivées le sont aussi bien que le sol le permet, le canal ne changera pas la nature du sol et si nous nous en rapportons à ce que dit M. Vifquain, dans son ouvrage sur Les Voies navigables nous ne trouvons rien de rassurant à cet égard. Voici comment il s’exprime à la page 427 : « L’amélioration et la fertilisation des localités traversées n’avaient eu aucune part dans le projet du canal de Bois-le-Duc ; il paraît, au contraire, que de grandes surfaces de terrains ont souffert et souffrent toujours des filtrations qui ont lieu à travers les digues sablonneuses et le sol graveleux sur lesquelles elles sont élevées. » Et plus loin : « le canal de Bois-le-Duc n’a rien fait, ou n’a fait que peu de chose pour le développement de l’agriculture de la Campine. »
Du reste, depuis Eysden jusqu’à la frontière hollandaise les terres cultivées sont-elles augmentées de valeur ? L’augmentation de la valeur des propriétés y a exercé son influence comme partout ailleurs, mais l’établissement du canal n’y a nullement, ou au moins très faiblement contribué, les terres y sont et resteront sablonneuses.
Je livre ces réflexions avec confiance à vos méditations : les charges qu’on propose avec les contributions existantes absorberaient le quart de leurs revenus.
Les propriétés situées de part et d’autre du canal sur une profondeur de 5,000 mètres sont appelées à concourir aux frais de son établissement.
Pour maintenir les eaux au même niveau que celles du deuxième biez du canal de Bois-le-Duc, le nouveau canal prend son origine à Bocholt en amont de l’écluse n°18, de là il longe en quelque sorte le canal de Bois-le-Duc sur une distance de 3,000 mètres, de manière que vis-à-vis de l’écluse n°17 les deux canaux ne sont séparés que d’environ mille mètres. Est-il juste, est-il équitable de faire contribuer les propriétés situées dans le rayon de 5,000 mètres du canal de Bois-le-Duc ? S’il vous restait encore quelque doute sur les avantages plus ou moins grands, que les propriétés retireront du canal, tout doute doit disparaître relativement aux propriétés qui se trouvent dans le rayon de 5,000 mètres du canal de Bois-le-Duc. Ces propriétés sont déjà bénéficiées par ce canal. La réponse que le gouvernement a donnée à la section centrale est incomplète ; il y a d’autres terrains situés dans ce rayon ; ces terrains ont droit à l’exemption, d’après les bases mêmes du projet ; en effet, nous lisons dans l’exposé des motifs, page 3 « C’est jusqu’à la profondeur de 5,000 mètres que s’est étendue la culture des propriétés privées de part et d’autre du canal de Bois-le-Duc, canal ouvert depuis l826, et établi dans une contrée fort semblable. »
Les propriétés situées dans cette profondeur sont déjà bénéficiées ; donc elles ne peuvent retirer aucun avantage du nouveau canal dont on ne peut les appeler au concours.
J’ai vu avec regret que la section centrale n’a pas laissé aux communes la faculté de libérer les propriétés particulières au moins en ce qui concerne les propriétés cultivées, et ce tout en reconnaissant que : « refuser aux communes et aux particuliers la faculté de se libérer autrement qu’en espèces, ce serait rendre leur position extrêmement difficile, et donner une grande force aux réclamations qui ont été adressées par la plupart des conseils communaux (il fallait dire par tous les conseils communaux. Voir pages 8 et 9 du rapport.)
Mais, je le demande, de quelle autre manière les propriétaires des terrains cultivés se libéreront-ils qu’en espèces ? Par des bruyères ? Mais ils n’en possèdent pas ! Ce sera peut- être en cédant de leurs propriétés cultivés au taux fixé dans le projet !!
La grande force des réclamations, que la section centrale a voulu éviter, reste debout. La section centrale pense que cette mesure est peu équitable, que ce serait imposer la commune ou la masse des contribuables au profit de quelques intérêts particuliers ; que ce serait accorder une véritable faveur à un petit nombre au détriment de tous ; ces motifs dénotent le peu de connaissance des localités ; tous les habitants sont propriétaires, les propriétés cultivées n’appartiennent qu’aux habitants des communes, les étrangers n’y possèdent que quelques bruyères achetées naguères par spéculation ; enfin différentes communes : Lille-St.-Hubert, Neerpelt et Overpelt, etc., devront contribuer pour toutes les propriétés cultivées. La faculté dont il s’agit peut donc sans inconvénient être accordée, sauf à la restreindre aux terres cultivées, et pour plus de garantie encore, elle peut être subordonnée à l’approbation du gouvernement, la députation du conseil provincial entendue ; d’ailleurs, il est de l’intérêt du gouvernement comme du pays que les bruyères communales, pour autant que cela est possible, et équitable, soient livrées à l’exploitation privée ; c’est le but du canal, il faut donc fournir aux communes l’occasion de céder les bruyères dont elles pourront encore disposer sans inconvénient pour alléger le fardeau que vous imposerez à leurs habitants.
Je me résume, quoique le concours, tel qu’il est fixé par la section centrale, est encore exorbitant. Je me bornerai à vous proposer une réduction pour les terrains cultivés et l’exemption pour les propriétés situées dans le rayon de 5,000 mètres du canal de Bois-le-Duc. Je demanderai ensuite que les riverains de la première section ne soient tenus à payer les annuités qu’après l’entier achèvement de la ligne de Bocholt à Herenthals ; enfin je demanderai que la faculté soit réservée aux communes de libérer les propriétés cultivées de leurs habitants sous l’approbation du gouvernement et de l’avis de la députation permanente.
Je dépose ces amendements sur le bureau ; je termine par une considération qui, je l’espère, ne sera pas perdue de vue dans la discussion du projet de loi qui nous occupe. Il s’agit d’une contrée intéressante et laborieuse où le développement de l’industrie et de l’agriculture a besoin de beaucoup d’encouragements ; d’une contrée dont les habitants sont animés d’un vrai patriotisme, d’un dévouement sans égal au Roi et à l’état de chose actuel ; d’une contrée qui a toujours été surtaxée dans les contributions (le conseil provincial a demandé à différentes reprises un dégrèvement de 3.000 fr. pour le canton d’Achel) ; d’une contrée qui a le plus souffert de la révolution, alternativement occupée par l’ennemi et par les volontaires, exposés et victime d’exactions de pillage jusqu’à l’assassinat ; d’une contrée à laquelle les plus grands sacrifices ont été imposés dans l’intérêt général et de notre nationalité ; d’une contrée qui a le plus souffert du morcellement du malheureux Limbourg, en perdant toutes ses relations et qui pour toute compensation subit les inconvénients et entraves inévitables de la ligne de douanes ; enfin d’une contrée, qui, malgré tous ces sacrifices, n’a pas obtenu la moindre faveur ; et chose extraordinaire, aucune plainte ne vous est parvenue de leur part, qu’en cette circonstance ; vous prendrez donc en sérieuse considération ses justes doléances, et après avoir fermé tant de plaies de la révolution dans la session précédente, vous vous souviendrez de promesses que vous avez faites dans des circonstances tristes, mais solennelles ; vous montrerez que vous n’avez pas oublié les vives sympathies dont vous étiez animés.
- La chambre ordonne l’impression des amendements présentes par M. Huveners,
La séance est levée à 4 heures.