(Moniteur belge n°23 du 23 janvier 1840)
(Présidence de M. Fallon)
M. Scheyven procède à l’appel nominal à midi et demi. Il lit le procès-verbal de la séance précédente, la rédaction en est adoptée. Ensuite, il présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.
« Le conseil communal de la ville d’Eecloo adresse des observations contre le projet de loi relatif à la répression de la fraude en matière de douanes. »
- Renvoi à la section centrale chargée de l’examen du projet de loi.
« Le sieur F. Mainvault, brigadier de douanes, ex-entrepreneur des fortifications de la ville d’Ath, réclame les pièces annexées à sa pétition du 13 décembre 1838. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des négociants et boutiquiers de Renaix demandent qu’il soit établi un droit d’entrée sur les monnaies de cuivre françaises. »
M. de Villegas – Messieurs, d’après la requête dont vous venez d’entendre l’analyse, on se plaint de la grande circulation de monnaie de cuivre étrangère, et notamment de monnaie de cuivre française qui a lieu à Renaix. Il n’échappe à personne que cette circulation illégale porte un grave préjudice à la classe ouvrière et au commerce de détail ; elle ne profite qu’aux spéculateurs. Le pétitionnaire demande qu’on assimile ces monnaies de cuivre à une marchandise, et qu’on la frappe à l’entrée d’un droit de 3 p.c. Mon intention n’est pas d’examiner le fondement de cette proposition, je me contenterai de demander que cette requête soit renvoyée au ministre des finances.
M. A. Rodenbach – Ce n’est pas seulement à Renaix qu’a lieu cette circulation des gros sous de France. Il y en a une quantité immense dans le pays ; dans beaucoup de localités les payements ne se font qu’avec cette monnaie de cuivre. Cela nuit beaucoup au commerce. Il y en a pour plus de 300,000 francs dans le pays ; on sait que sur l’émission de la monnaie de cuivre l’Etat fait un bénéfice de 33 pour cent ; je ne vois pas pourquoi on ne ferait pas profiter le trésor de ce bénéfice en remplaçant par de la monnaie nationale cette monnaie de cuivre étrangère. Une circulaire suffirait pour en arrêter la circulation.
L’honorable M. d’Huart en avait fait une, elle est tombée en oubli ; je prie M. le ministre des finances d’en faire une nouvelle et de lui donner la plus grande publicité. Il y a des spéculateurs qui gagnent plusieurs pour cent par l’introduction de cette monnaie. C’est un abus auquel il faut mettre un terme.
M. le président – La pétition est renvoyée à la commission.
M. Villegas demande en outre le renvoi au ministre des finances.
M. de Langhe – Je ne vois pas de motif de dévier de la marche ordinaire. Quand la commission nous fera son rapport, elle nous présentera telles conclusions qu’elle jugera convenables.
M. de Villegas – Je me réfère à l’observation de M. de Langhe, mais en demandant que la commission soit invitée à faire un prompt rapport, dans la huitaine, si c’est possible, car la chose est urgente.
M. Desmet – L’objet de la pétition dont il s’agit est tellement important, qu’il est nécessaire de prendre des renseignements ; il faut voir si, en cédant au vœu des pétitionnaires, on ne ferait pas tort au commerce des frontières où les transactions se font avec cette monnaie. Il faut que la commission ait le temps de prendre ces renseignements avant de faire son rapport.
La demande d’un prompt rapport est adoptée.
M. le président – Nous en étions restés au chapitre VI – Bâtiments publics.
« Art. 1er. Entretien et réparation des hôtels, édifices et monuments de l’Etat : fr. 28,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Reconstruction d’un mur de clôture de l’hôtel du ministère de la justice : fr. 6,000. »
- Adopté.
« Art. 3. Travaux extraordinaires aux hôtels des gouvernements provinciaux à Mons et à Hasselt : fr. 37,500. » -
Adopté.
« Article unique. Ponts et chaussées : fr. 415,150. » - Adopté.
« Art. 1er. Conseil des mines : fr. 45,900. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement des ingénieurs et conducteurs, frais de bureau et de déplacement et impression de travaux statistiques : fr. 45,900. »
- Adopté.
« Art. 3. Subsides aux caisses de prévoyance, secours et récompenses aux personnes qui se sont distinguées par des actes de dévouement, lors d’accidents survenus dans les mines : fr. 45,000. »
- Adopté.
« Art. 4. Encouragement et subventions pour la publication de plans et de mémoires relatifs à l’art de l’exploitation : fr. 10,000. »
« Art. 1er. Traitement des employés : fr. 355,210. »
M. Cools – Messieurs, au moment de voter le chapitre des postes, je crois de mon devoir d’appeler l’attention de M. le ministre sur le sort des maîtres de poste aux chevaux dont l’existence est menacée par la création du chemin de fer. Vous savez que le chemin de fer a apporté un bouleversement complet dans le service de la poste aux chevaux et des diligences. Sur quelques lignes, sur celles qui sont perpendiculaires au chemin de fer, le nombre des diligences a augmenté, mais sur les lignes parallèles au chemin de fer, il a beaucoup diminué. Vous savez que le principal revenu des maîtres de poste consiste dans le droit de 25 centimes payé par les diligences. Sur quelques lignes, sur celles qui ont souffert par suite de l'établissement du chemin de fer, le revenu des maîtres de postes s’est trouvé réduit d’une manière extraordinaire. Je connais des maîtres de poste qui doivent avoir neuf chevaux dans leur écurie et pour lesquels le produit des diligences et des courses de la malle ne s’est pas élevé au-delà de 3,500 francs, tout revenu compris. Je sais qu’on ne tient pas rigoureusement la main à ce que les maîtres de poste aient dans leurs écuries le nombre de chevaux requis, que tel qui doit avoir neuf chevaux, n’en a que 6 ou 7 ; mais est-il possible d’entretenir 6 à 7 chevaux avec 3,500 francs ?
Je sais que M. le ministre a déjà pensé à cet objet, qu’une commission a été instituée pour rechercher les mesures réparatrices qu’on pourrait adopter. Mais il n’est pas à ma connaissance que les travaux de la commission aient amené un résultat. Il est telle mesure qui viendrait à la pensée de tout le monde. Sur quelques lignes le revenu des maîtres de poste a diminué ; sur d’autres il a augmenté. Rien n’est plus simple que d’établir une caisse centrale dans laquelle on verserait le produit de la redevance payée par toutes les diligences, et d’en faire la répartition entre les maîtres de poste, suivant le nombre de chevaux qu’ils sont tenus d’avoir.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Mais il est difficile d’arriver à l’établissement de cette caisse.
M. Cools – Je sais qu’il faut tenir compte des positions acquises, mais il y aurait moyen de concilier les intérêts. J’ai une autre observation à faire.
Il n’y a que les diligences à relais qui payent la redevance. Or, on fraude le droit en établissant des diligences sans relais, au moyen d’une correspondance ; mais en définitive c’est la même diligence. On devrait faire payer un droit quelconque aux diligences sans relais et aux omnibus qui se sont établis en si grand nombre depuis l’établissement du chemin de fer.
Qu’on adopte ou non ce moyen, il y a urgence d’en adopter un, il y a des maîtres de poste dont la position n’est plus tenable. Je demanderai à M. le ministre si, dans le courant de la session, les travaux de la commission auront amené un résultat, et s’il pourra présenter un projet de loi ; s’il ne croyait pas pouvoir le faire, je demanderais s’il ne serait pas nécessaire de porter une allocation pour subsides à accorder aux maîtres des postes qui se trouvent dans une position aussi pénible.
Voilà les deux questions que j’ai cru devoir adresser à M. le ministre.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – La question que soulève l’honorable préopinant est extrêmement grave : d’après sa conclusion, elle aurait pour résultat une allocation nouvelle, à porter au budget, pour subsides aux maîtres de poste. Je regarde cette conclusion comme un moyen extrême, comme un moyen auquel il ne faut recourir que quand tous les autres moyens seront épuisés.
L’honorable membre avait d’abord indiqué deux autres moyens : le premier consistait à constituer en fonds commun la redevance des 25 centimes payée par les diligences. C’est le premier moyen qu’il avait proposé, mais il a senti lui-même qu’une très délicate question de droit acquis se présentait ; en effet, tel maître de poste a acheté un relais parce que la redevance qui y est attachée est considérable ; ce maître de poste ne voudra pas verser le produit de cette redevance dans un fonds commun, où il prendra une part beaucoup moindre.
J’ai tenté un moyen, mais j’ai bientôt reconnu qu’il y aurait des difficultés insurmontables à établir une association mutuelle de ce genre entre les maîtres de postes du royaume.
Un autre moyen a encore été proposé par l’honorable membre, ce serait d’assujettir à une redevance les diligences qui ne relaient pas et même les omnibus. Je crois qu’une semblable mesure serait excessivement impopulaire ; il faudrait une loi, et je doute fort du succès d’une proposition de ce genre.
Tout en examinant cette question d’une manière générale, j’ai cherché à procéder non systématiquement, mais en ayant recours à différents moyens indirects d’indemnisation, si je puis parler ainsi. Voici un des moyens que j’ai employé : un maître de poste a, sur une route parallèle au chemin de fer, un relais dont l’importance diminue par suite de l’établissement du chemin de fer.
Le gouvernement lui accorde comme succursale le relais devenu nécessaire dans son voisinage sur une nouvelle route perpendiculaire à peu près au chemin de fer ; le maître de poste obtient ainsi indirectement une indemnité.
C’est ainsi que le gouvernement en a agi récemment à l’égard du maître de poste d’Ostende, en lui accordant comme succursale le relais de Nieuport ; relais nouvellement créé, et très important, la nouvelle route de Nieuport à Dunkerque par Furnes étant un des affluents du chemin de fer d’Ostende.
C’est pour la même raison que le gouvernement a accordé au maître de poste à Liège le relais de Soumagne ; on lui a même encore proposé celui d’Aywaille.
C’est ainsi qu’au maître de poste d’Oreye, à peu près dépossédé par le chemin de fer de Waremme à Liége, il vient d’être accordé le relais dans le Limbourg, de Hechtel ; le Roi vient de signer l’arrêté. J’ai de même été autorisé à offrir au maître de poste de Tirlemont le relais qui doit être établi à Hannut, point de rencontre des nouvelles routes de la Hesbaye. Il n’a pas accepté ma proposition.
L’on a cherché à indemniser de cette manière certains maîtres de poste sans charge pour le trésor.
Je crois avec l’honorable préopinant que la poste aux chevaux est une institution politique, une institution gouvernementale qu’il faut maintenir. Aussi continuerai-je à donner tous mes soins non seulement à l’examen de cette question, mais à l’examen de la question de réorganisation de la poste aux chevaux.
La commission que j’ai nommée n’a pas seulement été saisie par moi de la question d’indemnité, mais encore et avant tout de la question de réorganisation ; l’organisation de la poste aux chevaux, je saisis cette occasion pour le dire, est vicieuse et mal entendue.
Discipline et économie, non pas par une véritable réduction de prix, mais par l’exemption du supplément à payer aujourd’hui quand on voyage à plus de deux personnes.
C’est là ce que j’ai demandé ; je vais m’arrêter un moment à ces propositions.
La poste n’offre ni assez d’ordre, ni assez de discipline, ni assez d’agrément ; un voyage en poste est une étude pénible de tarif et de droits de barrière ; la garantie de la quittance manque ; une femme seule ne peut voyager en poste ; on se considère comme livré à l’arbitraire du postillon.
La poste n’existe que comme nécessité pour l’aristocratie et pour quelques hauts fonctionnaires.
Il faut discipliner la poste aux chevaux et la démocratiser, si j’ose m’exprimer de la sorte.
Il est absurde, lorsque l’on a une bonne voiture suspendue sur ressorts, de ne pouvoir voyager à plus de deux personnes, sans prendre plus de deux chevaux, quand deux chevaux suffisent, ou sans payer un franc par personne en sus de deux personnes.
Il faut encourager les voyages en famille, les voyages des femmes accompagnées de leurs enfants. Le tarif, par ses combinaisons mal entendues, selon moi, rend ces voyages très coûteux.
Je considère le tarif comme trop élevé, non dans ses bases, mais dans l’application de ses bases ; je les considère comme impolitiques quand aux maîtres de poste. Il nous faudrait, non le tarif français que nous suivons, mais le tarif allemand. En Allemagne, on peut généralement voyager à 3 ou 4 personnes, en ne payant que pour deux chevaux. Lorsque l’on a une bonne voiture et que les routes sont en bon état, les familles, les personnes malades, les femmes avec leurs enfants voyagent en poste, ce qui se fait rarement en Belgique.
Je voudrais aussi qu’on introduisît des mesures d’ordre et de discipline. Je voudrais qu’il y eût une quittance à chaque relais, ce qui se fait encore généralement en Allemagne. Dès lors les voyages en poste deviendraient infiniment plus agréables ; il n’y aurait plus de ces disputes continuelles avec les postillons. Je voudrais même qu’on pût payer au premier relais à l’entrée en Belgique, et, au moyen d’une seule quittance, traverser le royaume ou aller soit jusqu’à Bruxelles, soit jusqu’à la ville de destination, sans plus avoir à s’occuper de calculs et d’argent.
La commission m’a proposé un projet de règlement conçu d’après ces idées ; car il suffirait d’un arrête royal. Les maîtres de poste y ont mis pour condition qu’on statuerait d’abord sur la question de l'indemnité. Je n’ai pas voulu accepter cette condition préalable. C’est pour cela qu’il n’a été donné suite à ce projet de réforme que je considère cependant comme autant dans l’intérêt de la poste aux chevaux que dans l’intérêt public.
J’ai donné ces explications pour prouver à la chambre et l’honorable préopinant que cette question m’a paru digne de l’attention du gouvernement et qu’elle a fixé son attention.
M. Desmet – Cette question est très grave. Je ne puis appuyer la proposition de l’honorable député de Saint-Nicolas. Il ne faut pas songer seulement aux intérêts des maîtres de poste, il faut songer aussi aux intérêts des entreprises de messageries. Pour moi, je crois que les messageries sont plus utiles au pays que les maîtres de poste. On sait ce qui a motivé l’organisation de postes aux chevaux ; mais il faut voir notre organisation actuelle ; et il y aurait lieu d’examiner si le privilège des maîtres de poste n’est pas contraire à l’esprit de notre constitution. La redevance que perçoivent les maîtres de poste n’est pas minime , il en est pour qui elle s’élève jusqu’à 60,000 francs. Je pense qu’au lieu de fortifier le privilège des maîtres de postes, il faudrait le supprimer.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Il est pas exact de dire que le nombre des diligences ait diminué. Je puis prouver, par des relevés statistiques, qu’il y a un plus grand nombre de diligences depuis l’établissement du chemin de fer. Cela se conçoit : le nombre des diligences a diminué sur les grandes lignes parallèles au chemin de fer ; mais il a augmenté sur toutes les roues qui sont des affluents du chemin de fer. Ainsi le nombre des diligences a augmenté en Belgique, quoique les grandes entreprises de messageries aient souffert de l'établissement du chemin de fer, parce qu’ils desservaient les lignes parallèles au chemin de fer.
M. Cools – Dans cette question, nous ne devons pas perdre de vue qu’il ne s’agit pas des diligences, mais de fonctionnaires nommés par le gouvernement et qui sont forcés de tenir une position.
Les maîtres de poste sont obligés de desservit les lignes que le gouvernement leur indique, d’avoir le nombre de chevaux que veut le gouvernement. Quand une entreprise de messageries voit qu’une ligne qu’elle desservait est mauvaise, elle en exploite une autre : le maître de poste ne peut recourir à cet expédient. Quand une entreprise de messageries voit qu’un service n’est pas assez fréquenté, elle diminue le nombre de ses chevaux. Le maître de poste est obligé d’avoir toujours le même nombre de chevaux. C’est pour cela que nous devons examiner si la position des maîtres de poste est tenable. Le gouvernement trouve qu’elle ne l’est pas, puisqu’il a institué une commission pour chercher à remédier à l’état de choses actuel et puisque le ministre des travaux publics a songé à donner des relais supplémentaires aux maîtres de poste qui souffrent par l’établissement du chemin de fer. Remarquez que ce moyen ne peut être employé dans toutes les localités ; ainsi quels relais pourriez-vous donner à un maître de poste qui serait entre la mer et le chemin de fer ?
C’est parce que la position des maîtres de poste est si mauvaise que l’on devra, dans le cours de cette session, faire quelque chose pour eux, ou accorder des subsides à ceux qui ne peuvent soutenir leur position. Ceci concorde avec ce qui a été fait dans d’autres circonstances. C’est ainsi qu’il a été accordé des traitements d’attente aux fonctionnaires sans emploi par suite du traité de paix. C’est ainsi qu’il a été accordé des subsides aux professeurs qui ont été privés de leur charge dans la réorganisation de l’université.
je demanderai donc à M. le ministre des travaux publics s’il ne proposera pas à la chambre, dans le cours de cette session, une mesure quelconque. Sans préjuger la nature de cette mesure, je crois qu’il faudra accorder quelques subsides aux maîtres de poste qui sont dans une position notoirement insoutenable.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Je porte le plus grand intérêt aux maîtres de poste. Mais d’un autre côté, je ne dois pas méconnaître l’importance d’une question d’argent.
J’ai cherché à réduire les obligations des relais ; j’ai autorisé tous les maîtres de poste qui se sont adressés à moi à diminuer considérablement le nombre de leurs chevaux.
J’ai établi des succursales au chemin de fer pour tous les relais voisins ; j’ai autorisé les titulaires de ces relais à voir leurs chevaux dans l’intérieur de la station, afin qu’ils puissent s’emparer en quelque sorte des voitures que transporte le chemin de fer.
Je n’hésite pas à déclarer que si tous les maîtres de poste voulaient donner leur démission, il faudrait l’accepter. Je leur en fais la proposition. Alors il me serait possible de faire précisément ce que propose l’honorable préopinant, c’est-à-dire de constituer avec la redevance de 25 centimes un fonds commun. Mais il faudrait pour cela qu’on eût la démission ou le consentement de tous les maîtres de poste. Ce consentement, vous ne l’obtiendrez pas, parce que les maîtres de poste qui se trouvent dans une position plus avantageuse que celle qu’ils ont jamais eue (par exemple le maître de poste de Huy qui se trouve dans ce cas) refuseront de verser la redevance dans le fonds commun. Il vous faudrait donc le consentement de tous les maîtres de poste, que vous n’obtiendrez pas, ou la démission de tous les maîtres de poste que vous n’obtiendrez pas non plus.
Il était dans l’intention du législateur français de constituer ce fonds commun. Mais la loi n’a jamais été exécutée dans cet esprit. Il est arrivé ce qui arrive presque toujours : ceux qui se trouvaient dans une bonne position, par suite de la redevance de 25 centimes, ont défendu leur position ; et les petits maîtres de poste, pour qui la redevance était peu productive ont en vain réclamé l’institution du fonds commun. C’est ce qui est arrivé en France. C’est ce qui est arrivé en Belgique.
Je regrette que la réforme que j’avais proposée n’ait pu être mise à exécution. Je crois que cette réforme aurait été extrêmement avantageuse pour les maîtres de poste ; je dis qu’elle aurait popularisé l’institution.
Je citerai un seul exemple ; le voyage de Paris coûté généralement 50 francs par diligence, soit pour personnes 200 francs. Si on appliquait la réforme que j’ai proposée on pourrait faire comme par la poste le voyage de Paris (si la France adoptait la même réforme au prix auquel on le fait par la diligence ; c’est-à-dire que quatre personnes allant de Bruxelles à Paris, paieraient encore 200 francs, à raison de 50 francs personne. J’en dirai autant d’un voyage de 4 personnes de Bruxelles à Aix-la-Chapelle, à Luxembourg.
On conviendra avec moi qu’avec une bonne voiture et deux chevaux, quatre personnes peuvent être conduites de Bruxelles à Paris. On voyage ainsi en Allemagne. J’ai dit aux maîtres de poste : le tarif est mal combiné dans votre intérêt ; vous devez encourager les voyages en famille et faire concurrence aux diligences. Cette idée m’était venue, parce que je voyage assez souvent en Allemagne. La poste pour quatre personnes n’y coûte pas plus cher que la diligence. J’en engagé les maîtres de poste à accepter ma proposition, pour que les familles, les femmes avec leurs enfants puissent voyager en poste, surtout si l’on donnait des quittances pour éviter les discussions avec les postillons. On a bien voulu accepter cette réforme en subordonnant à la question d’indemnité ; condition que j’ai repoussée, que j’ai dû repousser.
M. Pirmez – Est-ce qu’on ne pourrait pas, par un règlement, arranger les choses ? est-ce que les maîtres de poste sont libres de refuser un règlement ? Si le ministre est convaincu de l’utilité de ce qu’il propose, qu’il présente un projet de loi dans ce but, il ne doit pas craindre de ne pas obtenir de succès.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – L’honorable préopinant a raison de m’adresser cette question. Quand je dis que la réforme proposée aux maîtres de poste leur serait avantageuse, c’est une opinion controversable. Cette réforme peut être faite par un arrêté royal ; mais les maîtres de poste diraient qu’on leur impose un nouveau sacrifice, et en feraient un grief nouveau pour obtenir des indemnités. Il faudrait que les maîtres de poste reconnussent eux-mêmes que la réforme leur serait avantageuse ; je voudrais avoir l’assentiment des maîtres de poste ; ils n’ont pas voulu me donner cette déclaration ; ils ont semblé regarder ce que je leur proposais comme un sacrifice ; ils ne manqueraient donc pas d’en faire l’objet d’une demande nouvelle en indemnité. Je n’aurais donc fait que compliquer la situation par un nouvel incident.
M. F. de Mérode – Il me semble qu’il suffirait d’avoir l’assentiment de la majorité des maîtres de poste. Il est évident que la circulation en poste n’est pas du tout pratiquée dans ce pays, ni en France, à cause de la cherté de la taxe. On fait payer pour chaque personne un cheval de plus, ce qui ne se fait pas en Allemagne. Il me semble que le ministre peut arriver au changement s’il est admis par la majorité des maîtres de pose, ce qui ne saurait manquer d’avoir lieu ; car à l’exception de l’indemnité des diligences, la plupart ne font rien. Le règlement de la poste est un règlement gothique.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – C’est un règlement aristocratique.
M. F. de Mérode – Je ne sais pas ce qu’il est ; mais il n’a pas le sens commun. On peut le réformer et on doit le faire.
- L’article premier est adopté.
« Art. 2. Frais de tournées des inspecteurs, frais de régie des inspecteurs, directeurs et percepteurs, indemnités de logement, imprimés, registres et timbres : fr. 82,790 francs.
La section centrale a proposé deux réductions.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – La première réduction proposée par la section centrale porte sur les frais de tournée des inspecteurs ; la deuxième porte sur les impressions. Vous devez remarquer que je reste, par ma demande d’allocation, dans le chiffre total de l’année dernière ; mais je propose des transferts d’un article à l’autre. On conviendra que le service de la poste a reçu beaucoup d’extension ; je regarde ce service comme un des plus importants pour le pays. Cette extension exige des inspections plus fréquentes ; maintenant elles ne le sont pas assez. Il faudrait que tous les bureaux de poste fussent visités une fois par semestre, tandis qu’il en est qui n’ont pas été visités depuis deux ans, et même trois ans. Je demande 8,550 francs pour les frais de tournée des inspecteurs et des contrôleurs ; la somme de 5,000 francs n’est pas suffisante. Il faut que les chefs des différents bureaux se trouvent pour ainsi dire sous la menace perpétuelle d’une inspection.
En second lieu, l’extension donnée à la poste a pu réagir sur les frais d’impression ; on a augmenté le nombre des bureaux ; et dès lors les imprimés sont devenus plus considérables. J’ai proposé en conséquence une augmentation de 4,000 francs de ce chef.
Le service rural a été organisé ; beaucoup de nouvelles perceptions et distributions ont été établies ; beaucoup de distributions ont été érigées en perceptions ; toutes ces mesures favorables au public ont augmenté les frais d’impression. Je dois donc persister dans la demande d’augmentation que j’ai faite, en répétant que le chiffre d’ensemble reste le même. Je ne crois pas devoir vous citer tous les bureaux créés depuis le 1er janvier 1837 ou érigés de distribution en réception (liste annexée au Moniteur du jour).
L’administration des postes n’est pas improductive ; elle donne un produit de trois millions ; elle est progressive d’année en année, et la dépense reste stationnaire. Depuis trois ans, par exemple, la recette de la poste a été portée, de 2 millions 600 mille francs, à 3 millions ; et cependant depuis le vote du chiffre nouveau relatif au service de la poste rurale, l’ensemble de l’allocation n’a pas changé. Nous croyons devoir réitérer cette observation importante que les dépenses sont stationnaires et les recettes progressives. Nous pensons que la chambre accordera l’allocation, qui n’est au fond que le maintien du budget précédent autrement réparti.
M. Van Hoobrouck de Fiennes – La section centrale a proposé en effet deux réductions. Mais depuis lors, j’ai acquis la conviction, d’après un tableau qui m’a été présenté, qu’il était impossible, avec le chiffre ancien, de subvenir aux frais d’impression ; et je crois qu’il y a lieu d’accorder ce que demande le ministre
Quant à l’autre augmentation pétitionnée par le ministre, la section centrale n’a pas été persuadée de sa nécessité ; c’est-à-dire qu’elle n’a pas été persuadée de la nécessité d’augmenter les frais de tournée des inspecteurs. Ce que la section centrale croit nécessaire d’augmenter, c’est le nombre des facteurs, car actuellement ce nombre est insuffisant. Leur tournée journalière est tellement considérable qu’ils ne peuvent y suffire. A Liége, il y a, par exemple, trois départs par jour, et néanmoins on ne peut y faire qu’une seule distribution, parce que le gouvernement manque de ressources pour augmenter le nombre de facteurs de cette ville. A Gand, il en est de même, le nombre des distributeurs est insuffisant. L’homme le plus vigoureux ne peut suffire à ce travail.
Mais s’il y a eu une diminution sur les frais généraux de la poste, si le personnel a été réduit, notamment en ce qui concerne les facteurs et les distributeurs, par suite du morcellement, il ne s’ensuit pas qu’il faille augmenter les frais de tournées des inspecteurs ; bien au contraire la section centrale a pensé que si le territoire a été restreint, évidemment les frais de tournée devaient être moindres dans les provinces éloignées où le morcellement a eu lieu et que le produit des économies qui en résultent peut être reporté sur les autres tournées.
Je crois donc que la somme de 3,500 francs peut très bien être retranchée de la partie de l’article 2 qui concerne les frais de tournées, d’autant plus que le personne a déjà été assez considérablement augmenté.
Le chiffre proposé par le gouvernement est mis aux voix et adopté.
« Art. 3. Transport des dépêches : fr. 300,546 francs. » - Adopté.
« Art. 4. Service postal : fr. 230,000. »
M. Lebeau – Je désirerais savoir, messieurs, si, au moyen de l’allocation demandée, M. le ministre des travaux publics pourra introduire le service quotidien dans toutes les provinces, pour la poste rurale. Je crois savoir que le service quotidien n’est encore introduit que dans une faible partie du royaume, et que dans la plupart de provinces ce service ne se fait que de deux jours l’un ; ce qui, comme vous le sentez, diminue singulièrement l’utilité de la poste rurale. Je demanderai une explication sur ce point à M. le ministre.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Le chiffre demandé ne permettra pas encore, messieurs, d’introduire le service quotidien dans toutes les provinces ; je crois même qu’il y a des localités dont les besoins ne réclament pas le service quotidien. J’ai successivement introduit le service quotidien dans différentes localités en dehors des premières prévisions du système du service rural ; car je vous rappellerai, messieurs, que lorsque ce nouveau service a été proposé, il avait été entendu qu’il ne serait quotidien que dans une seule province, le Brabant, et que partout ailleurs le service se ferait de deux jours l’un, ou même, dans certaines localités, deux fois par semaine seulement. J’ai successivement pu introduire le service quotidien dans d’autres provinces, et voici comment : beaucoup de distributions qui avaient été créées en vue du service rural ont pu, depuis deux ans, être successivement mises à charge de l’article 2 ; l’année prochaine nous pourrons probablement faire de nouveaux transferts de l’article 3, transfert de dépêches ; le produit des économies que le chemin de fer nous permettra de faire sur cet article pourra être utilisé pour d’autres articles ; il pourra être, par exemple, ajouté à l’article 4, et nous pourrons, de cette manière, améliorer encore le service rural. Jusqu’ici ce service a reçu successivement de nombreuses améliorations sans que nous soyons toutefois sorti du chiffre total de l’allocation des postes, chiffre que je désire maintenir ; ce que la chambre désire probablement aussi.
M. Van Hoobrouck de Fiennes, rapporteur – Je commence, messieurs, par rendre justice à l’administration des postes. Il y a peu d’administrations qui soient aussi bien montées et qui répondent autant aux besoins du public. Dans nos localités, par exemple, le service rural se fait avec une régularité extrême. Mais, messieurs, ce service est on ne peut plus fatiguant pour les facteurs, et j’appelle l’attention de M. le ministre sur la nécessité d’améliorer leur position. Il y a des facteurs dans les campagnes qui font journellement 7 ou 8 lieues et plus, et cela en tout temps, quelquefois au milieu des boues et de la neige ; c’est un véritable service d’esclaves. Je demande qu’on rende ce service autant que possible journalier dans tout le royaume, mais en même temps qu’on améliorer un peu la position des facteurs ; M. le ministre dût-il, de ce chef, demander une augmentation de crédit, je l’appuierai volontiers, parce qu’il y a ici une nécessité évidente.
M. Lebeau – On semble, messieurs, combattre le vœu que j’ai émis tout à l’heure de voir, dans le courant de 1840, jouir toutes les localités qui en sont susceptibles du bienfait du service quotidien ; on semble combattre ce vœu par des considérations de pure économie. Je comprendrais la valeur d’objections de cette nature si le service des postes était une charge pour l’Etat au lieu d’être une source de revenus ; mais quand nous voyons le produit des postes figurer au budget des voies et moyens pour une somme de 3 millions, ce n’est plus, je pense, par des considérations de pure économie qu’il convient de combattre les améliorations notables qui sont si vivement désirées dans le service rural. Je connais une province, par exemple, où les villages sont, pour ainsi dire, juxtaposés, où la population est excessivement resserrée et où l’on ne jouit pas encore du bienfait du service quotidien. Cependant ceux qui ont l’expérience des inconvénients du service alternatif peuvent dire que les avantages de la poste rurale sont à peu près nuls lorsque le service n’est pas quotidien. Cela est surtout vrai pour la correspondance administrative. Lorsque les ordres de l'administration provinciale doivent parvenir dans un bref délai aux administrations communales, l’absence du service quotidien présente les plus grands inconvénients. La distribution du Bulletin des Lois, du mémorial administratif en souffre extrêmement. Dans plusieurs circonstances, les instructions relatives à la formation des listes électorales, par exemple, parviennent après le jour où l’on devrait en faire usage. Cela n’arrivait pas lorsqu’il y avait des messagers piétons ; mais ce service a été supprimé et la province de Namur, par exemple, a bien voulu consentir, par l’organe du conseil provincial, à verser dans la caisse de l’Etat la somme qui était auparavant consacrée à payer ces messagers ; mais elle ne l’a fait qu’à la condition que le service de la poste rurale serait réorganisé de manière à satisfaire à tous les besoins. Il y a dans cette province un grand mouvement d’affaires et je crois qu’elle ne devrait pas être mise sur une autre ligne que le Brabant et le Hainaut, où je pense que le service quotidien a été introduit, au moins en très grande partie.
J’insiste donc pour que M. le ministre fasse de ma demande l’objet de ses méditations, pour qu’il examine sérieusement s’il n’y a pas moyen d’introduire le service quotidien, sinon dans toutes les localités, au moins dans celles qui sont les plus populeuses.
M. de Langhe – Je sais combien il est difficile d’organiser la poste rurale, et je me joins à l’honorable rapporteur de la section centrale pour dire que M. le ministre, et ses subordonnés ont mis beaucoup de soin à cet objet ; mais je ne puis pas convenir que tout soit parfait. Par exemple, dans nos communes rurales où, en hiver, les chemins sont souvent impraticables, et où les distributeurs pour porter les lettres à domicile devraient quelquefois faire un chemin tel que, si les lieues étaient mises l’une au bout de l’autre, ils auraient souvent fait dix lieues par jour ; dans ces communes les distributeurs ne pouvant pas tout faire, déposent les lettres dans un cabaret ; de sorte que les lettres écrites, par exemple, le lundi et portées le mardi, jour de la tournée, restent dans ce cabaret jusqu’au dimanche, et ce n’est qu’alors que les habitants vont les chercher en allant à la messe. Je voudrais donc qu’il y eût un moyen autres que les messagers ruraux. Ne pourrait-on pas, par exemple, employer à cela les gardes-champêtres ? Il faudrait absolument faire en sorte que les lettres fussent exactement remises, car dans l’état actuel des choses, on est obligé de se servir, pour le transport des lettres, d’autres voies que de la poste rurale, de voies clandestines, et le revenu de la poste rurale ne peut qu’en diminuer beaucoup. Je recommande beaucoup cet objet à M. le ministre des travaux publics, dont j’apprécie d’ailleurs les soins infatigables.
M. Desmet – Dans mon arrondissement, les lettres sont tous les jours exactement remises, et c’est un seul porteur qui les porte dans toutes les communes dont se compose sa tournée ; mais le mal dont se plaint l’honorable M. de Langhe provient de ce que les facteurs ne sont pas assez payés ; tel facteur n’a que 75 centimes par jour, pour être en tournée depuis 8 heures du matin jusqu’à 7 heures du soit, aussi bien en hiver, par la boue et la neige, qu’en été, lorsque les chemins sont meilleurs. Je crois que ces facteurs devraient avoir le double de ce qu’ils ont, c’est-à-dire 1 franc 50 centimes par jour.
Une plainte que je dois faire à l’égard de la poste rurale, c’est que le port des lettres est trop élevé ; je crois qu’il y aurait moyen de concilier l’intérêt du trésor avec une diminution du port des lettres ; j’insiste beaucoup sur ce point.
M. Van Hoobrouck de Fiennes, rapporteur – Messieurs, j’appuie ce que vient de dire l’honorable M. Desmet. Je crois aussi qu’il conviendrait de diminuer la taxe des lettres ; je ne pense pas que cet objet puisse diminuer les revenus de l’Etat ; je crois au contraire que les recettes seraient augmentées. Tout ce qu’on vient de dire prouve que les facteurs à la campagne ne sont ni assez nombreux, ni assez payés. J’appelle toute l’attention de M. le ministre sur la question de savoir si, pour l’année prochaine au moins il n’y a pas lieu de majorer la somme affectée au service rural.
- Personne ne demande plus la parole, le chiffre de 230,000 francs est mis aux voix et adopté.
« Art. 1er Frais d’impression des listes alphabétiques pour l’inscription des miliciens dans les neuf provinces : fr. 1,600. »
- Adopté.
« Art. 2. Frais de voyage de l’inspecteur-général de la garde civique et des aides de camps qui l’accompagnent, et frais de bureau : fr. 9,000.
« Achat, réparation et entretien des armes et équipements de la garde civique : fr. 16,000.
« Total : fr. 25,000. »
La section centrale propose de réduire ce chiffre à 20,000 francs.
M. le président – M. le ministre se rallie-t-il à la réduction proposée par la section centrale ?
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Messieurs, les 25,000 francs qui ont été demandés par le gouvernement ne présentent pas d’augmentation sur le budget de l’année précédente. Il a été voté l’année dernière 25,000 francs, et l’on demande cette année la même somme.
Messieurs, je ne puis considérer avec la section centrale, les frais d’inspection de la garde civique comme inutiles. Je crois, messieurs, qu’il faut maintenir le chiffre, à moins qu’on ne veuille renoncer à l’institution de la garde civique ; mais alors on ne fait pas assez, il faudrait supprimer le chiffre total, il faudrait être conséquent et demander la suppression entière du crédit. Je reconnais, messieurs, qu’il y a beaucoup à faire quant à l’organisation de la garde civique ; mais je crois cependant, d’un autre côté, que personne n’oserait proposer purement et simplement l’abolition de cette institution qui est une de nos institutions constitutionnelles. Si le gouvernement ne s’est pas occupé dans ces derniers temps d’une nouvelle organisation de la garde civique, c’est que nous nous trouvions dans des circonstances extraordinaires, c’est que le moment eût été bien mal choisi pour s’occuper de changements à faire à la garde civique ; il fallait utiliser ce qui se trouvait exister, et dans toutes les localités où la garde civique s’est trouvée organisée, elle a rendu l’hiver dernier de véritables services à la cause de l’ordre ; le gouvernement se plaît à le reconnaître.
Je pense donc que c’est trop faire ou que ce n’est pas assez que de demander une réduction sur le chiffre qui a été voté l’année dernière. Ce n’est pas assez faire si l’on en veut venir à l’abolition de la garde civique ; c’est trop faire si l’on veut que la garde civique soit organisée, et que les membres de la garde civique ne voient pas un motif de découragement dans la réduction qui est proposée.
Je pense, en conséquence, qu’il faut maintenir le chiffre qui a été voté l’année dernière ; de mon côté je m’occupe de la révision de la loi sur la garde civique, et j’espère qu’elle fera l’objet d’une proposition de loi, au moins pour la session prochaine.
M. Van Hoobrouck de Fiennes, rapporteur – M. le ministre dit que la section centrale a fait trop ou trop peu ; que si elle veut abolir la garde civique, il faut retrancher tout le chiffre, et que si elle veut de la garde civique, elle doit vouloir le maintien du chiffre qui a été voté l’année dernière.
Messieurs, cela n’est pas exact ; la section centrale a reconnu que la garde civique était désorganisée dans tout le pays, et que dès lors des frais d’inspection n’étaient pas nécessaires, puisqu’il n’y avait rien à inspecter. Elle a cru dès lors pouvoir proposer de ce chef une réduction de 5,000 francs. La garde civique est organisée à Bruxelles, et la section centrale reconnaît hautement les services qu’elle a rendus dans toutes les circonstances ; c’est pour cela que la section centrale a maintenu le chiffre pour les frais de l’état-major.
Comme M. le ministre a déclaré qu’il s’occupait de la réorganisation de la garde civique, il n’y a plus lieu de refuser des fonds pour frais d’inspection.
- Le chiffre de 25,000 francs est mis aux voix et n’est pas adopté ; celui de 20,000 francs est ensuite mis aux voix et adopté.
« Article unique. Secours : fr. 2,500. »
- Adopté.
« Article unique. Dépenses imprévues. Fr. 30,000. » - adopté.
M. le président – Comme il y a eu des armements, le second vote est remis à après-demain.
M. de Puydt – Messieurs, la chambre a ajourné dernièrement la proposition que j’avais faite de renvoyer aux sections le projet de loi que j’ai présenté en 1836, à l’effet de faire un emprunt qui devait être affecté à l’exécution de canaux ; elle a ajourné ma proposition, jusqu’après distribution des pièces aux membres de la chambre ; cette distribution a été faite, chacun de vous a reçu hier un imprimé de mon projet. Je demande en conséquence que ce projet soit renvoyé aux sections du mois de janvier.
- La proposition de M. de Puydt est mise aux voix et adoptée.
M. le président – MM. d’Hoffschmidt et F. de Mérode ont déposé sur le bureau une proposition qui sera transmise aux sections.
Personne ne demandant la parole, l’article unique du projet ainsi conçu : « La loi du 19 janvier 1832 sur les concessions de péages (Bulletin officiel, n°519, litt. Il) est prorogée au 1er janvier 1841 », est mis aux voix et adopté.
On procède à l’appel nominal ; la loi est adoptée par 61 voix contre 2. Elle est transmise au sénat.
Ont répondu oui : MM. Angillis, Cools, Coppieters, de Behr, de Florisone, de Garcia de la Vega, de Langhe, de Man d’Attenrode, F. de Mérode, de Potter, de Puydt, de Renesse, de Roo, de Sécus, Desmet, de Terbecq, de Villegas, d’Hoffschmidt, d’Huart, Dolez, Donny, Dubois, Dubus (aîné), Dumont, Eloy de Burdinne, Fallon, Fleussu, Hye-Hoys, Jadot, Kervyn, Lange, Lebeau, Liedts, Lys, Maertens, Mast de Vries, Mercier, Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Peeters, Polfvliet, Puissant, Raikem, Raymaeckers, Scheyven, Simons, Smits, Thienpont, Troye, Ullens, Van Cutsem, Vandenhove, Vandensteen, Van Hoobrouck, Verhaegen, Willmar, Zoude, Cogels et Dedecker.
Ont répondu non : MM. de Foere et Vandenbossche.
M. Van Hoobrouck de Fiennes – Le budget des travaux publics n’a pas subi de modifications importantes ; ne pourrait-on pas le voter d’urgence ?
Une voix – Il n’y a pas d’urgence.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Le projet du gouvernement n’a subi que deux changements, l’un à l’article « polders » ; c’est la proposition que j’ai faite et qui n’a rencontré aucune opposition ; l’autre concerne la garde civique. Il me semble que ces deux changement sont si peu importants qu’on pourrait faire disparaître le budget des travaux publics de l’ordre du jour de la chambre, ordre du jour encore si chargé ; ce serait diminuer le nombre des projets de loi que nous avons devant nous.
M. d’Huart – Il n’y a pas urgence ; le sénat n’est pas assemblé.
- La proposition de voter d’urgence est adoptée.
La chambre confirme les amendements introduits au budget des travaux publics.
On passe à la discussion des articles du projet.
« Art. 1er. Le budget du département des travaux publics pour l’exercice 1840 est fixé à la somme de fr. 9,036,031 27 c. conformément au tableau annexé à la présente loi. » - Adopté.
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. – Adopté.
On procède à l’appel nominal sur l’ensemble de la loi.
En voici le résultat.
63 membres répondent à l’appel.
1 membre s’abstient ;
55 membres répondent oui ;
6 membres répondent non.
En conséquence le projet de loi est adopté ; il sera transmis au sénat.
M. le président – M. Milcamps, qui s’est abstenu, est invité à énoncer les motifs de son abstention.
M. Milcamps – Je me suis abstenu par les motifs que j’ai donnés lors de la discussion de la loi de 12 millions, pour le chemin de fer. Je n’ai pas voulu voter contre le projet, parce que je dois reconnaître que toutes les autres dépenses du budget sont utiles.
Ont répondu oui : MM. Cools, de Behr, de Florisone, de Langhe, de Man d’Attenrode, F. de Mérode, W. de Mérode, de Potter, de Puydt, de Renesse, de Sécus, de Terbecq, de Villegas, d’Hoffschmidt, d’Huart, Dolez, Donny, Dubois, Dubus (aîné), Dumont, Eloy de Burdinne, Fallon, Fleussu, Hye-Hoys, Kervyn, Lange, Lebeau, Liedts, Lys, Maertens, Mast de Vries, Mercier, Morel-Danheel, Nothomb, Peeters, Pirmez, Polfvliet, Puissant, Raikem, Raymaeckers, A. Rodenbach, Scheyven, Sigart, Simons, Smits, Thienpont, Troye, Ullens, Vandenbossche, Van Hoobrouck, Willmar, Zoude, Dedecker, Cogels-Dubois.
Ont répondu non : MM. Angillis, Coppieters, de Foere, de Roo, Van Cutsem et Verhaegen.
L’ordre du jour est la discussion du budget de l'intérieur.
M. Dubus (aîné) – M. le ministre de l'intérieur n’étant pas présent, je demande que la discussion soit renvoyée à demain. (Oui ! oui !)
M. Mast de Vries – Nous avons à l’ordre d’un jour différents projets de naturalisation ; il en est un auquel il n’a manqué que la présence de deux membres pour passer. Puisqu’il n’est que deux heures et quart, je demanderai qu’on s’occupe des projets de naturalisation, à la tête desquels se trouve celui qui concerne M. Boursier.
M. le président – Le projet de loi est ainsi conçu :
Vu la demande du sieur J.-B. Bousier, premier commis greffier à la chambre des représentants, né à Saint-Luce (France),tendant à obtenir la naturalisation ordinaire ;
Attendu que les formalités prescrites par les articles 7 et 8 de la loi du 27 septembre 1835 ont été observées ;
Attendu que le pétitionnaire à justifié des conditions d’âge et de résidence exigées par l’article 5 de ladite loi.
Nous avons, de commun accord avec les chambres, décrété et nous ordonnons ce qui suit :
« Article unique. La naturalisation ordinaire est accordée audit sieur J.-B. Boursier. »
« Mandons et ordonnons, etc. »
Ce projet de loi est mis aux voix et adopté à l’unanimité des 59 membres qui ont répondu à l’appel nominal.
Son également adoptés à l’unanimité des membres présents les projets de loi tendant à accorder la naturalisation ordinaire à Messieurs.
Jean-Guillaume Garnier, professeur à l’université de Gand, né à Rheims (France), en 1765 ;
Hippolyte Guillery, ingénieur au corps des ponts et chaussées, né à Versailles (France), en 1793 ;
Frédéric-Guillaume Kuhn, employé de l’administration des postes, né à Lunebourg (Hanovre) ;
Pierre Crepuiet, sous-lieutenant des douanes, domicilié à Bruges, né à Paris en 1791 ;
Gérard-Arnould Coenders, brigadier des douanes au poste de Stromproy (Limbourg), né à Rees (duché de Clèves), le 1er septembre 1783 ;
François Georges, commis des douanés à Maldeghem, né à Vaerwaerden (Hongrie), le 14 avril 1779.
- La séance est levée à trois heures.