(Moniteur belge n°92, du 2 avril 1835 et Moniteur belge n°93, du 3 avril 1835)
(Moniteur belge n°92, du 2 avril 1835)
(Présidence de M. Raikem.)
M. de Renesse procède à l’appel nominal à une heure. Il donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; il est adopté.
M. Verdussen donne lecture de l’analyse suivante d’une pétition adressée à la chambre.
« Le sieur J.-P. Motte, dont la boutique a été pillée par les Hollandais dans les journées de septembre, demande le paiement de l’indemnité qui lui revient de ce chef. »
M. le président. - Les sections ayant autorisé la lecture de la proposition de MM. Corbisier. Gendebien et de Sécus, la parole est à M. Corbisier. (Nous publierons le discours de l’honorable membre).
- La proposition de MM Corbisier, Gendebien et de Sécus est prise en considération.
Elle est renvoyée aux sections. L’impression en est ordonnée.
M. le président. - La discussion est continuée sur l’article 5 et sur les divers amendements qui ont été proposés. Si personne ne demande la parole, je vais les mettre successivement aux voix.
Voici la proposition présentée par M. Dumortier :
« Si la dissolution a eu lieu hors des époques périodiques ordinaires, les membres de la chambre dissoute seront respectivement élus pour le terme qui restait à chaque série.
« Néanmoins, lorsque la dissolution a eu lieu après les 40 jours prescrits par l’article 70 de la constitution, il n’y aura pas de renouvellement partiel au mois de juin suivant. »
Celle de M. Devaux est ainsi conçue :
« En cas de dissolution, les élections pour remplacer la première série sortante auront lieu, pour la chambre des représentants ainsi renouvelée, au mois de juin qui suivra la seconde session ordinaire ; et pour le sénat, s’il a été renouvelé de cette manière, au mois de juin qui suivra la quatrième session ordinaire.
« Les élections en remplacement de la seconde série de la chambre des représentants auront lieu deux ans plus tard, et pour la seconde série du sénat, quatre ans plus tard.
« La session ordinaire est celle qui comprend le deuxième mardi de novembre, soit que les chambres se soient réunies ce jour même, soit qu’elles aient été réunies antérieurement par le Roi. »
L’amendement de M. Gendebien est ainsi formulé :
« En cas de dissolution des chambres ou de l’une d’elles, les élus prendront la place des membres de la chambre dissoute, et siégeront pendant le temps nécessaire pour l’accomplissement des mandats précédents, conformément aux articles 51 de la constitution et 53 de la loi électorale. »
Il s’agit de savoir quelle proposition nous mettrons d’abord aux voix.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Celle de M. Dumortier.
M. Gendebien. - Il me semble que c’est mon amendement ou celui de M. Dumortier qu’il faut mettre aux voix. Si c’est le mien qui est admis, vous serez dispensés de voter sur l’article 5.
M. Devaux. - Mais l’article 5 est indépendant des amendements proposés, du moins du mien. Les amendements fixent le jour des élections après la dissolution ; mais il y a encore une autre question à décider, c’est celle de savoir quand les députés élus entreront en fonctions et si ceux dont ils sont les successeurs siégeront encore quelques mois. Mon amendement ne décide pas cette dernière question dont la solution est dans l’article 5 ; ainsi il se concilie parfaitement avec l’article 5.
M. Gendebien. - Mon amendement est nécessairement exclusif de l’article 5. Je maintiens dans son intégrité l’article 53 de la loi électorale, lequel est tout autre que l’article 5 de la loi en discussion. D’après l’article 53 les fonctions des représentants cessent en novembre, tandis que, d’après l’article 5, les fonctions cessent au moment où commencent les élections. Cela n’est pas dit explicitement dans cet article, mais cela résulte de son texte. Mon amendement ne peut pas marcher avec l’article 5, puisque je conserve dans toute leur intégrité et la constitution et la loi électorale.
Je ne reviendrai pas sur les inconvénients résultant de l’article 5, et que j’ai signalés. Je me permettrai de faire une seule remarque.
Dans le cas du renouvellement par série, par suite de cet article 5, vous avez une moitié des membres de la chambre dont le mandat cesse par le seul fait de la réunion des électeurs ; eh bien, je suppose qu’arrive alors un des nombreux cas prévus par la constitution : le décès du Roi, la déclaration qu’il est incapable de régner, le Roi laissant un mineur pour lui succéder, le cas de guerre, etc. Il faut que la chambre se réunisse immédiatement.
Dans toutes ces situations, où l’urgence est plus ou moins grande, que fera la chambre réunie ? Rien ; la moitié des membres sera d’abord occupée à vérifier les pouvoirs de l’autre moitié ; et vous ne pourrez parer aux plus graves événements. Par mon amendement, je maintiens ce qui a été régularisé par le congrès et dans la constitution et dans la loi électorale : or, en vertu de la constitution et de la loi électorale, il n’y a jamais absence des chambres ; on peut toujours les réunir de manière à les faire délibérer quelques heures après leur réunion. Voyez si les inconvénients résultant de l’article 5 ne sont pas très graves. Peut-on me dire quels avantages, dans la nouvelle loi, compenseront ces inconvénients ? Je ne les aperçois pas.
M. Dumortier. - Je veux faire observer la différence qui existe entre mon amendement et celui de M. Devaux.
La proposition faite par M. Gendebien et la mienne ont pour but de fixer l’ouverture des élections aux époques périodiques établies par la loi électorale et par la constitution, et tellement que dans aucun cas les élections des membres du sénat ne puissent avoir lieu dans d’autres années que celles où les élections des membres de la chambre des représentants seront effectuées. Par l’amendement de M. Devaux, il en serait autrement, et c’est là un très grave inconvénient.
Dans l’état actuel des choses, les périodes de réélection tombent dans des années impaires. Une conséquence de l’amendement de M. Devaux ferait tomber les périodes de réélection dans des années paires si la dissolution avait lien une année paire, tandis que la chambre non dissoute continuerait ses élections périodiques dans les années impaires. Voilà un très grand vice dans cette proposition de M. Devaux. Cette différence entre cette proposition et la mienne doit être comprise par toute l’assemblée.
Ainsi que le mien, l’amendement présenté par M. Gendebien et à la première partie duquel je me rallierai bien volontiers, a pour but d’établir d’une manière irrévocable les réélections partielles dans les années impaires.
On a fait une objection à ma proposition : on m’a fait observer qu’il se pourrait que la moitié des membres de la chambre pourrait bien n’être appelée à siéger que pour quelques jours ; j’ai compris cette objection, et c’est pour parer à l’inconvénient signalé que j’ai ajouté un second paragraphe à mon amendement. Au reste, quel que soit l’amendement que vous adoptiez, il faudra également ajouter ce second paragraphe.
M. Devaux. - L’inconvénient que signale M. Dumortier, existe toujours dans le second paragraphe de son amendement. Comme l’a démontré M. de Brouckere, il n’y aura de coïncidence entre les élections du sénat et celles de la chambre que dans les huit ans : entre ces périodes la coïncidence ne peut avoir lieu : ainsi l’avantage que présentent les amendements de MM. Gendebien et Dumortier, me paraît très léger.
Quant aux objections faites contre ma proposition, elles s’appliquent également aux propositions de ces honorables membres, et ne prouvent rien de plus contre l’une que contre l’autre.
Relativement à l’article 5, je répète que nous aurons à le voter après avoir voté sur les amendements. J’admettrai cet article du gouvernement.
On prétend que par l’article 5 on pourra se trouver, dans des circonstances graves, obligé de s’occuper de vérifier des pouvoirs au lieu de s’occuper des affaires de l’Etat ; mais cet inconvénient se trouve dans les systèmes des amendements ; ils ne méritent donc, sous aucun rapport, d’être préférés à l’article du gouvernement.
Je désire que l’on en finisse, et que l’on mette aux voix les amendements.
M. Dumortier. - L’honorable préopinant est dans l’erreur. Il croit que dans tous les systèmes les élections du sénat et des chambres auront lieu alternativement : cela aurait lieu par suite de son amendement ; mais cela n’aura pas lieu par suite de la proposition de M. Gendebien et de la mienne. Ces propositions maintiennent l’ordre bisannuel établi par la législature du congrès, et sont conformes en tout point à ce qui a été fait pour les deux assemblées législatives élues intégralement par le pays depuis la révolution.
La première de ces assemblées a été élue en août 1831 ; elle a commencé à siéger au mois d’octobre, et ses pouvoirs n’ont été terminés que quatre années plus tard au mois de novembre.
La deuxième de ces assemblées a été élue en mai. Il y a eu dissolution de la chambre en avril. La chambre a commencé à siéger au mois de juin. Ses pouvoirs seront en vigueur jusqu’au deuxième mardi de novembre de cette année, du moins pour la moitié de ses membres.
Il faut que l’on prenne une base certaine. La question qui nous occupe est plus grave que la plupart des questions : quand il s’agit du pouvoir législatif comme il n’a pas de supérieur dans l’Etat, il faut que la loi précise tout ce qui le concerne et tous les cas qui peuvent arriver. La loi seule peut régler les difficultés relatives à la législature. Si la loi ne les réglait pas, qu’arriverait-il ? C’est que deux chambres pourraient se présenter en même temps dans cette enceinte ; l’une dirait : C’est moi qui suis la chambre, mes pouvoirs ne sont pas expirés ; l’autre dirait : Vous vous trompez, c’est moi qui suis la chambre, mes pouvoirs ont commencé. Qui est-ce qui déciderait cette question ? Ce ne serait pas le Roi.
Mais si la loi doit résoudre toutes les difficultés, elle doit s’appuyer sur la constitution : or, l’amendement de M. Gendebien et le mien ont cet immense avantage.
M. le président. - Je vais mettre ces amendements aux voix.
M. Gendebien. - Je demande la division.
Mon amendement a cet avantage qu’il établit des séries fixes, et qu’il pare aux inconvénients que j’ai signalés. On n’a pas répondu à mes objections, l’amendement de M. Dumortier présente encore des inconvénients. Je pense qu’il faut rester dans les termes de la loi ; les séries établies resteront alors les mêmes.
- L’amendement de M. Gendebien est mis aux voix et n’est pas admis.
M. le président. se dispose à mettre aux voix l’amendement de M. Devaux.
M. Gendebien. - Il y a des membres qui croient que d’après l’amendement de M. Devaux, les députés sortants, non réélus, conserveraient néanmoins leurs fonctions jusqu’au mois de novembre suivant : il faut s’entendre sur ce point.
M. Devaux. - Mon amendement ne décide pas cette question. Mais, après avoir prononcé sur mon amendement, on aura à voter sur l’article 5 du projet de loi lequel résout la difficulté ; mon amendement décide seulement quand auront lieu les élections en cas de dissolution.
M. Dumortier. - Mais il faudrait commencer par établir dans notre délibération quand les fonctionnaires seront élus, avant de dire quand ils commenceront à entrer en fonctions.
M. Devaux. - C’est la même chose !
- L’amendement de M. Devaux mis aux voix est adopté.
M. le président. - L’article 5 est ainsi conçu :
« Art. 5. Les députés nouvellement élus entreront en fonctions à la première réunion ordinaire ou extraordinaire des chambres. »
M. Dumortier. - Cette disposition me paraît singulièrement obscure ; je ne sais si quelqu’un la comprend dans cette assemblée.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - On a discuté l’article pendant deux jours.
M. Dumortier. - Si on l’a discuté pendant deux jours, cela prouve qu’il n’est pas clair.
Je demanderai quelle sera la chambre qui siégera immédiatement après les élections.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Ce sera la chambre nouvelle.
M. Dumortier. - Laissez-moi achever, ne m’interrompez pas. Les élections ont lieu, aux termes de la constitution le deuxième mardi du mois de juin… je veux dire aux termes de la loi électorale… on fait tant de bruit que l’on en est étourdi.
Les élections ont lieu le deuxième mardi de juin, aux termes de la loi électorale ; alors la chambre constituée continue ses fonctions comme nous avons continué les nôtres jusqu’au mois d’août en 1833... (Bruit.) Les uns me disent oui ; les autres me disent non… Je crois entendre M. le rapporteur dire non.
M. H. Dellafaille, rapporteur. - J’ai dit oui.
M. Dumortier. - Quand l’élection a été faite, les élus peuvent-ils venir dire : Cédez-nous la place ? (Aux voix ! aux voix !)
- L’article 5 mis aux voix est adopté.
« Art. 6. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. »
- Adopté.
M. le président. - M. Dumortier vient de déposer sur le bureau un article additionnel, ainsi conçu :
« Les gouverneurs ne pourront être élus dans les provinces ni les commissaires de district dans les districts où ils exercent leurs fonctions.
« Néanmoins, les gouverneurs et les commissaires de district qui lors de la promulgation de la présente loi seraient députés des provinces ou des districts où ils exercent leurs fonctions pourront, par continuation, être élus par ces provinces ou par ces districts. »
M. Dumortier. - Je prie mes honorables collègues de ne pas regarder comme un acte d’hostilité l’amendement que je viens de déposer sur le bureau ; et il me sera facile de démontrer qu’une pareille disposition est indispensable dans la loi qui nous occupe. Je l’ai puisée dans la loi française relative au renouvellement de la chambre.
Cette loi porte à l’article 8 :
« Les sous-préfets ne peuvent être élus députés dans les collèges d’arrondissements électoraux qui comprennent la totalité ou une partie des électeurs de l’arrondissement de leur sous- préfecture. »
Une autre loi de 1817 porté à l’article 17 :
« Les sous-préfets et les officiers généraux commandant les divisions militaires des départements ne peuvent être élus députés dans les départements où ils exercent leurs fonctions. »
Eh bien, messieurs, cette garantie que la restauration avait cru devoir donner aux électeurs, n’a pas paru suffisante à la chambre des députés sortie de la révolution de juillet. La loi du 19 avril 1831 est ainsi conçue en l’article 64 :
« Il y a incompatibilité entre les fonctions de député et celles de préfet, sous-préfet, de receveurs généraux, receveurs particuliers des finances et de payeurs.
« Les fonctionnaires ci-dessus désignés, les officiers généraux commandant les divisions ou subdivisions militaires, les procureurs-généraux près les cours royales, les procureurs du Roi, les directeurs des contributions directes et indirectes des domaines, enregistrement et douanes dans les départements, ne pourront être élus députés par le collège électoral d’un arrondissement compris en tout ou en partie dans le ressort de leurs fonctions.
« Si, par démission ou autrement, les fonctionnaires ci-dessus quittaient leur emploi, ils ne seraient éligibles dans les départements, arrondissements ou ressorts où ils ont exercé leurs fonctions qu’après un délai de six mois à dater du jour de la cessation des fonctions. »
Remarquez, messieurs, la proposition que je viens de faire ne comprend qu’une faible partie de l’article 64 de la loi de 1831. J’ai cru pouvoir le restreindre aux seules personnes qui exercent une influence directe sur les administrations locales. Maintenant je vous dirai pourquoi j’ai déposé cet amendement.
Il est reconnu qu’une chambre qui doit représenter l’opinion du pays doit être composée de personnes qui ne soient pas sous la dépendance absolue du gouvernement. Une chambre qui doit être l’émanation du pays ne doit pas être composée de personnes révocables par le gouvernement et qui possèdent une influence immédiate et directe sur les élections.
Les gouverneurs et les commissaires de district auront désormais une influence directe sur l’élection du pays. Car par la loi communale, vous avez admis que les bourgmestres sont nommés par le Roi, soit en dehors, soit dans le sein du conseil, qu’ils sont susceptibles d’être révoqués par le Roi sans même que l’on expose les motifs qui pourraient donner lieu à l’exercice de cette faculté. On a fait en un mot des bourgmestres, les agents purs et simples du gouvernement.
Maintenant, messieurs, que vous avez admis un pareil système, il faut également eu admettre les conséquences. Si vous aviez voulu, comme sous le congrès, que les bourgmestres fussent élus par le peuple, qu’ils ne pussent être révoqués ni suspendus par le gouvernement, que, placés sur la même ligne que les autres magistrats, ils ne pussent perdre leurs fonctions qu’en vertu d’un jugement, je me serais bien gardé de présenter l’amendement que j’ai déposé sur le bureau.
Mais après avoir inséré dans la loi communale que c’est le pouvoir exécutif qui nomme les bourgmestres, révoque ces fonctionnaires et suspend les échevins, il faut comprendre qu’il est nécessaire d’admettre dans l’appendice de la loi électorale que nous votons en ce moment des garanties contre les manœuvres électorales qui tendent à fausser le système représentatif.
Lorsqu’il s’est agi de la discussion de la loi communale, un honorable membre, M. Devaux a dit avec raison que ce qu’il importait à un pays gouverné constitutionnellement, c’était d’avoir des chambres qui représentassent réellement l’opinion du pays. Maintenant que le gouvernement a le pouvoir de nommer les bourgmestres, de révoquer et de suspendre les échevins, pouvez-vous maintenir comme éligibles aux chambres des hommes qui ont ces fonctionnaires sous leur dépendance immédiate et qui s’en serviront dans leur propre intérêt.
Messieurs, on l’a dit et répété plusieurs fois, il y a en Belgique à peu près 3,000 communes qui ont à leur tête chacune un bourgmestre, et au moins deux échevins. Ainsi, voici 9,000 personnes que le gouvernement peut révoquer ou suspendre, et quels sont les agents qui peuvent provoquer ces révocations ou suspensions ? Ce sont les commissaires de district et les gouverneurs. Ceci est d’autant plus grave que lorsque l’on vous demanda le droit de révocation et de suspension, l’honorable M. Lebeau, ancien ministre de la justice, déclara formellement que la révocation des fonctionnaires de l’ordre municipal était un moyen de gouvernement, et vous savez ce que l’on entend par des moyens de gouvernement.
Lorsque dans les élections un fonctionnaire amovible n’usera pas de son influence en faveur du gouvernement, on lui donnera sa démission, comme on l’a fait à l’égard de mon honorable ami M. Doignon.
Pour moi, mon vœu le plus ardent est qu’en Belgique la représentation nationale représente réellement le pays. Mais j’ai compris que nous devions quelque chose aux membres sur lesquels s’est fixé le choix des électeurs alors que le gouvernement n’avait pas le droit de révoquer et de suspendre les bourgmestres et les échevins. J’ai compris que ces honorables membres n’ont pu exercer sur leurs mandataires une influence pareille à celle que je crains, qu’il fallait donc établir une disposition spéciale en leur faveur. J’ai demandé qu’ils pussent exercer leur mandat de députés, s’il leur était continué dans leurs provinces ou dans leurs districts. Mais s’ils cessaient d’être élus, ils rentreraient à l’avenir dans la catégorie générale.
L’article additionnel que je présente est extrait textuellement de la loi française. A coup sûr, nous ne devons pas désirer à donner moins de garanties en Belgique que dans les pays voisins.
Messieurs, il existe en Belgique 42 commissariats de district ; eh bien si nous n’y prenons garde, avec les moyens d’influence que nous avons donnés au gouvernement par la loi électorale, avant peu d’années ces 42 commissaires seront tous membres des chambres. Et je vous le demande, que deviendra alors la représentation nationale ? Sera-t-elle encore l’image fidèle du pays ? Pourra-t-elle faire entendre ici sa voix ? Non, messieurs il faut bien le reconnaître, alors la représentation nationale sera un mensonge ; elle représentera le ministère et cessera de représenter le pays.
Vous apporterez, messieurs, un remède à un aussi grand mal par l’adoption de la proposition que je vous soumets. Par là, les gouverneurs, les commissaires de district, continueront à pouvoir faire partie des chambres, mais ils devront être élus par des électeurs sur lesquels ils n’exercent aucune influence et alors, du moins, la représentation nationale ne sera pas faussée.
M. Desmanet de Biesme. - La proposition que vient de faire l’honorable M. Dumortier me semble digne de fixer l’attention de la chambre et mériter un sérieux examen. Cette proposition, si elle était adoptée, aurait pour résultat de modifier le personnel actuel de la chambre des représentants. Dès lors il y avait du courage de la part de l’honorable M. Dumortier à présenter sa proposition, puisqu’elle pouvait blesser des susceptibilités.
Aussi, en prenant la parole pour la soutenir, j’ai eu besoin de me rappeler que nous devons travailler dans l’intérêt du pays et faire abnégation des sentiments d’estime et d’amitié qui nous lient à beaucoup de nos collègues qui sont fonctionnaires révocables du gouvernement. Je dois m’avouer que je suis plus préoccupé de l’avenir que des inconvénients présents.
Je me plais dans cette occasion à rendre justice à l’indépendance des fonctionnaires révocables qui siègent dans cette assemblée ; si je ne le faisais pas, leurs votes sauraient répondre victorieusement à des allégations malveillantes.
Vous le savez, cette question a été déjà agitée dans le sein du congrès. Si ma mémoire est bonne, il avait été question d’exclure une grande partie des fonctionnaires de la chambre. Mais les partisans du système contraire ont fait valoir des considérations importantes. Ils ont dit que le gouvernement devait être soutenu dans la chambre, que les fonctionnaires publics y apporteraient le tribut de leurs lumières, qu’il en résulterait du bien pour l’administration.
Les orateurs qui soutenaient l’exclusion des fonctionnaires avaient fait valoir de leur côté de très bonnes raisons. Cependant leurs efforts furent sans succès.
Je ferai remarquer que la situation actuelle relativement aux gouverneurs, aux commissaires de district, n’est plus la même qu’à cette époque. Depuis, la chambre a paru revenir à un système différent et créé des incompatibilités, quant à la cour de cassation par exemple. L’on a décidé que les membres de cette cour ne pourraient faire partie de cette chambre. Cependant l’on aurait pu établir l’exception contraire. Car il y a en faveur des membres de la cour de cassation présomption de capacités, d’indépendance par leur position.
La cour n’est pas surchargée de besogne ; de plus son siège est fixé à Bruxelles. Il aurait donc été facile aux membres d’assister à nos séances. Malgré toutes ces raisons qui militaient contre l’incompatibilité, la législature a cru devoir la consacrer.
Nous savons tous qu’en ce qui concerne les élections, le gouvernement constitutionnel est soumis à des influences diverses qu’exerce chaque fraction de la société.
Parmi ces influences, je ne nierai ni celles du rang, de la propriété, ni celles de la position politique, ni beaucoup d’autres. Mais toutes ces influences se combattent l’une l’autre. La partie se trouve à peu près égale. L’on peut croire par une fiction que le produit des élections représente l’opinion générale. Mais s’il se trouve une classe de citoyens tellement placés que leur influence tende à absorber toutes les autres, je pense qu’il y a lieu de la neutraliser. C’est le but que veut atteindre l’honorable M. Dumortier.
J’ai dit que la position n’était plus la même qu’au temps du congrès : à cette époque l’administration communale était toute différente de ce qu’elle sera à l’avenir. Les bourgmestres étaient dans une position d’indépendance vis-à-vis du gouvernement. Aujourd’hui il n’en est plus ainsi. Si le système adopté par la chambre est ratifié par le sénat, les bourgmestres se trouveront bien certainement en grande partie sous la dépendance des commissaires de district. Leurs relations directes avec les bourgmestres leur donneront une grande influence sur ces fonctionnaires, et l’on sait jusqu’où elle peut aller dans certaines communes rurales.
On me demandera peut-être : Quel mal trouvez-vous à ce que des fonctionnaires siègent dans la chambre ? Trouvez-vous que le gouvernement soit tellement fort dans le pays qu’il n’ait pas besoin d’appui ? Je ne refuserai jamais au pouvoir exécutif toute la force dont il a besoin. C’est tout à fait dans mes vues. Aussi ai-je voté en faveur de la nomination des bourgmestres par le Roi. Je veux que le gouvernement ait une grande force dans l’administration. Mais je veux qu’il ait cette force par des moyens loyaux, par des moyens directs. Mais lorsque par des moyens indirects il cherchera à placer dans les chambres des hommes sous sa dépendance, je lui refuserai toujours mon assentiment.
L’honorable M. Dumortier vous a fait voir que ce qu’il vous proposait était ce qui existe en France.
Cependant en France l’on est certes assez partisan du pouvoir fort, du gouvernement central. Cependant l’on a senti dans ce pays que le gouvernement constitutionnel perdrait de sa force, s’il arrivait trop de fonctionnaires révocables à la chambre. Si le gouvernement n’a de force que dans l’opinion publique, ce serait y porter atteinte que d’avoir dans la législature trop d’hommes sous sa dépendance. Je crois, messieurs, avoir établi que les commissaires de district surtout ont des moyens très faciles de parvenir à la chambre. Voyons quelle est leur position quand ils s’y trouvent.
Je me suis souvent demandé comment un fonctionnaire révocable consentait à faire partie de la chambre. Sa position me semble tout à fait difficile ; supposez le fonctionnaire révocable faisant de l’opposition. Si le ministère est fort, il sera révoqué de ses fonctions. Notez bien que je ne blâme pas le ministère qui agit ainsi. Il est dans son droit de vouloir que ceux qui ne partagent pas son système cessent leurs fonctions.
La position d’un fonctionnaire dans notre pays n’est pas la même que partout ailleurs.
En Angleterre, lorsqu’un ministère tory arrive au pouvoir, une partie des fonctionnaires de l’administration, ceux qui sont attachés à l’opinion whig, résignent leurs fonctions. Il leur reste l’espoir d’être replacés par un nouveau revirement de ministères. En Belgique il n’en est pas ainsi. Les changements de ministères sont en général de simples changements de personnes. La démarcation des opinions n’est pas aussi tranchée, et le personnel de l’administration ne change pas.
Ce n’est pas que je trouve mauvais qu’à chaque changement de ministère l’on ne révoque pas tous les fonctionnaires. Je ne fais ce raisonnement que pour démontrer que les fonctionnaires révoqués ne peuvent avoir l’espoir d’être replacés sous le ministère suivant. Il y a donc, si je puis m’exprimer ainsi, une espèce de niaiserie, de la part d’un fonctionnaire public, à faire de l’opposition en Belgique. Une fois révoqué, il est sûr de ne pas être replacé.
Si des fonctionnaires soutiennent consciencieusement le gouvernement dans la chambre (et cela est plus commun que ne le croirait généralement), s’ils votent avec le ministère, parce qu’ils trouvent que les ministres ont raison, ils n’en sont pas moins en butte aux attaques personnelles. L’on suppose qu’ils votent ainsi à cause de leur position, tandis que le plus souvent ils ne suivent que l’impulsion de leur conscience.
Je crois dans tout ce que je viens de dire avoir fait une large part à l’indépendance que je me plais à reconnaître dans les fonctionnaires révocables qui font partie de la chambre. Nous ne pouvons nous dissimuler qu’il n’en sera pas toujours ainsi. A la suite d’une révolution, les sentiments de générosité font explosion ; on comprend l’abnégation de soi-même. Dans les temps calmes tout reprend son assiette naturelle. Or, l’assiette naturelle de l’homme c’est son intérêt personnel. Il ne faut pas que l’on vienne à la chambre avec l’intention de faire son chemin. L’honorable M. Jullien disait que nous nous occupons de nos funérailles ; je m’empare de cette idée pour ajouter que les mourants doivent la vérité aux vivants.
Les différents ministres qui se sont succédé en Belgique ont fait la part trop large à la chambre des représentants dans la collation des emplois ; aussi l’opinion est-elle générale dans le pays qu’il faut entrer dans la chambre pour parvenir. Je ne crois pas que jamais la législature doive être un moyen de parvenir, que l’on doive se servir du mandat de député pour arriver au pouvoir.
Après ces considérations je m’en permettrai quelques-unes de particulières. Il est assez difficile de remplir deux mandats qui exigent la présence d’une même personne dans deux endroits différents. L’un des deux doit nécessairement en souffrir.
Si nous reconnaissons depuis longtemps qu’une grande partie des fonctionnaires publics sont peu assidus aux chambres, ils ont un excellent prétexte à nous donner, c’est qu’ils remplissent d’autres fonctions. Nous savons avec quelle difficulté nos séances se traînent depuis longtemps.
Il est loin de ma pensée de croire que si l’amendement de M. Dumortier était adopté par la chambre, il aurait pour résultat d’en éloigner les grandes capacités ; il arriverait ce qui arrive en France. Les grandes villes se disputeraient les capacités et les enverraient aux chambres. Déjà Bruxelles en a donné un noble exemple. Nous lui devons d’avoir conservé deux députés qui, s’ils suivent une ligne de conduite politique différente, sont l’un et l’autre des hommes d’un talent incontesté. Repoussés dans leurs districts, ils ont reçu un mandat des électeurs de la capitale. Je crois que cet exemple ne sera pas perdu de vue par les grandes villes.
Je voterai en faveur de la proposition de l’honorable M. Dumortier.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - La question soulevée par l’honorable député de Tournay ne me paraît pas devoir être présentée à l’occasion d’une loi sur le renouvellement des chambres. Mais puisqu’elle a été présentée, puisqu’elle vient d’être discutée, je crois devoir soumettre quelques réflexions.
Cette question a déjà été agitée dans le sein du congrès. La section centrale du congrès fut appelée à l’examiner, à l’occasion d’une proposition tendante à exclure les gouverneurs de l’élection de leurs provinces.
Le système d’exclure les fonctionnaires publics fut écarté par le congrès. Nous avons donc à cet égard un préjugé qui me semble devoir être considéré comme définitif. Jamais assemblée chercha-t-elle plus que le congrès à établir les droits constitutionnels ? Si le congrès, si susceptible pour tout ce qui pouvait porter atteinte à la constitution, a cru devoir rejeter la proposition de l’exclusion des fonctionnaires publics, est-ce à nous qu’il appartient maintenant de la reproduire ?
Vous remarquerez que la loi électorale donne toute garantie pour la liberté des élections. Ses votes se font par bulletins secrets, de telle manière qu’un électeur qui reçoit par complaisance un suffrage écrit, n’en dépose pas moins ce suffrage selon sa conscience dans l’urne, parce qu’il sait qu’il y a impossibilité qu’on le recherche pour son vote. Si le choix des électeurs tombe sur le fonctionnaire public à la tête de leur district et de leur province, c’est que ce fonctionnaire a leur confiance et qu’ils le croient capable de remplir dignement la mission qu’ils lui confient.
Il est inexact de dire qu’un fonctionnaire public élu député ne représente pas aussi bien l’opinion publique que tout autre député.
Après ces observations, il est inutile d’entrer dans de plus longs détails. Je réfuterai seulement deux considérations émises par l’honorable préopinant.
Il a dit que depuis l’époque du congrès il s’est opéré un changement important, les bourgmestres ne devant plus être élus directement par le peuple. Cette assertion de l’honorable préopinant est inexacte. Le congrès a prévu que lors de l’organisation communale, l’élection directe des bourgmestres n’aurait plus lieu, puisqu’il a établi une exception dans la constitution.
Il n’y a donc rien de changé depuis le congrès, puisque, malgré ses prévisions sur l’organisation municipale, le congrès n’a pas exclu les fonctionnaires publics de la représentation nationale.
L’on a parlé de l’incompatibilité établie dans la loi d’organisation judiciaire entre les fonctions de membre de la cour de cassation et de membre de l’une ou de l’autre chambre.
Mais, messieurs, il est à remarquer que la cour de cassation est appelée à juger les ministres, quand ils sont mis en accusation. C’est la raison fondamentale qui a été alléguée pour établir l’incompatibilité. On a voulu que les membres de la cour de cassation n’eussent pas pris parti dans les discussions politiques qui ont pu amener la mise en accusation d’un ministre quelconque. Sous ce rapport, il n’y a aucune espèce d’analogie entre l’incompatibilité des fonctions de membre de la cour de cassation, et je ne dirai pas l’incompatibilité de fonctionnaire public et de député, car on propose simplement de les déclarer inéligibles dans la province ou le district où ils exercent leurs fonctions.
Je dis que cette question a été résolue par le congrès après mûr examen, et que nous ne pouvons pas aujourd’hui entrer dans un système de réaction plus fort que celui adopté par le congrès. Ce serait un véritable contre-sens que d’établir maintenant des incompatibilités que le congrès a formellement repoussées. Je crois donc qu’il n’y a pas lieu d’admettre la proposition de M. Dumortier.
M. Gendebien. - Il est vraiment étonnant qu’on vienne devant la chambre affirmer comme positives des choses qui n’existent pas.
On vient d’affirmer qu’il existe un antécédent, que le congrès s’est prononcé positivement sur la question qui vous est soumise par l’honorable M. Dumortier. Messieurs, il n’en est rien ; positivement rien le congrès n’a pas eu à s’en occuper. Il s’agit d’une toute autre question que celle qui a été résolue par le congrès.
Le congrès a été appelé à examiner la question de savoir si on exclurait de la représentation nationale un grand nombre de fonctionnaires publics, entre autres les gouverneurs, mais non si on prendrait des précautions vis-à-vis de ces fonctionnaires. Il ne s’est pas agi de la question de savoir s’ils pourraient être élus là où ils administrent.
Mais en admettant qu’il en soit ainsi, cela changerait-il rien à la question ? Non, car il est vrai de dire, ainsi que l’honorable membre l’a fait observer, que les bourgmestres du temps du congrès étaient directement élus par les électeurs, et il n’est pas exact de dire que le congrès a établi à cet égard une exception formelle : non, il a autorisé les chambres à établir ou à ne pas établir cette exception ; vous voyez donc que la décision n’a pas pu être prise dans la prévision que les bourgmestres ne seraient plus nommés directement par le peuple. Il y avait seulement une disposition autorisant à faire ou à ne pas faire. Maintenant il y a plus, c’est que les bourgmestres, non seulement sont nommés, mais révocables par le pouvoir. Il n’y a pas un seul bourgmestre qui ne soit à la merci du gouverneur.
Et l’on prétend qu’il n’exerce pas plus d’influence qu’il n’en exerçait au moment du congrès, alors que les bourgmestres étaient nommés directement par le peuple, alors qu’on ne s’était pas expliqué sur la question de savoir si les bourgmestres pourraient être nommés directement par le pouvoir, toutefois en les prenant dans le sein du conseil car, d’après le texte de la constitution, le bourgmestre ne pouvait jamais être pris hors du sein du conseil ; cependant le gouvernement a obtenu de pouvoir les prendre hors du sein du conseil.
Il y a plus, c’est qu’on lui a donne la faculté de les révoquer. Et l’on sait que tout fonctionnaire révocable, dont les fonctions dépendent d’un supérieur, est nécessairement le très humble serviteur de ce supérieur. Sans doute, il y a beaucoup de bourgmestres qui ne tiennent pas à leurs fonctions et qui pourraient en faire le sacrifice. Mais on sait qu’une révocation jette toujours sur le fonctionnaire qui en est l’objet, un vernis fâcheux qui le met dans la nécessité de présenter une justification. Eh bien, un homme honnête, timide, évitera de se trouver mis dans l’obligation de se justifier même d’un acte de brutalité ; il consentira à faire le sacrifice de son choix pour placer dans l’urne tel bulletin qu’on lui remettra.
Mais, dit le ministre, le vote est secret, il n’y a pas moyen d’influencer les élections : l’expérience a démontré qu’il n’y avait aucune espèce d’influence à craindre dans les élections de la part des fonctionnaires publics. Je ne sais si M. le ministre a assisté à beaucoup d’élections, pour être convaincu qu’on n’a aucune influence à craindre.
Pour moi qui ai assisté à quelques élections, j’ai une opinion contraire, je sais quelle influence on y exerce ; j’ai vu remettre des bulletins à des électeurs dans le moment où ils étaient appelés pour voter, et les suivre de l’œil jusqu’à ce qu’ils aient déposé leur bulletin dans l’urne pour s’assurer qu’ils déposaient bien celui qu’on leur avait remis. J’ai vu cela non pas une fois, mais deux cents fois dans les élections.
Je voudrais savoir quel est le fonctionnaire dépendant directement ou indirectement d’un gouverneur ou d’un commissaire de district, qui oserait se permettre même de ne pas aller aux élections ; car on ne lui permet pas de s’abstenir, ou de ne pas exécuter les instructions qu’on lui donne.
Le résultat du scrutin peut jusqu’à certain point faire connaître les votes ; on va à la recherche, et il y a des officieux qui s’empressent de faire connaître leur vote, et ils ont les moyens de prouver qu’ils ont voté pour le gouverneur ou le commissaire de district. Alors un soupçon plane sur les autres fonctionnaires. Ce soupçon est pire que le mal. Le mal serait en effet moins grand, parce qu’un certain nombre de fonctionnaires seraient seulement sous le coup de la vengeance du gouverneur, ou du commissaire de district. Mais l’inquiétude qui pourra planer sur tous les fonctionnaires fera qu’ils iront voter pour le gouverneur ou le commissaire de district, quand ils voudront se faire élire.
Messieurs, je pense qu’il convient, dans l’intérêt des représentés, de la chambre et du gouvernement, de diminuer autant que possible le nombre des hauts fonctionnaires siégeant dans la chambre, de rendre leur élection difficile.
Qu’arrive-t-il quand les hauts fonctionnaires sont membres de la chambre ? Un gouverneur qui reçoit un gros traitement équivalant à 20,000 fr. : oui messieurs, avec le logement, le feu, et la lumière, le traitement de gouverneur équivaut à 20 mille fr., quoique vous ayez entendu récemment un gouverneur crier misère et s’apitoyer sur son propre sort de ce qu’il s’était trouvé dans la nécessité d’accepter les fonctions de gouverneur en sortant du ministère.
Les fonctions de gouverneur, avec l’indemnité de représentant valent environ 25 mille fr. Je vous demande quelle influence un gouvernement n’exercera pas pour se faire nommer membre de la chambre et quelles platitudes il ne se permettra pas pour conserver son gouvernement, à part l’appoint qui réunit à son traitement de vingt mille francs !
Vous voulez faire croire après cela qu’il n’y a aucune espèce d’inconvénient à laisser nommer un gouverneur dans sa province. Mais ces inconvénients ont été reconnus par un gouvernement qui n’avait aucune prétention au libéralisme, qui était même accusé d’illibéralisme, par la restauration enfin, par la branche aînée des Bourbons qui a été chassée de France pour son illibéralisme ; et vous voudriez, vous gouvernement des barricades, être moins libéral que le gouvernement de sa majesté Charles X ou de Louis-Philippe ! Je désespère de nos institutions, si le ministère persiste à repousser l’amendement de M. Dumortier. Je voterai pour cet amendement. S’il n’est pas adopté, je voterai contre la loi. J’ai d’ailleurs assez de raisons pour la repousser.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je demande la parole pour la rectification d’un fait. J’ai dit que la question d’incompatibilité dont il s’agit avait été agitée au congrès. Voici ce que je lis dans un rapport de la section centrale du congrès : « Une incompatibilité relative a été aussi réclamée ; cinq membres de la section centrale ont demande que les gouverneurs et les commissaires de district ne pussent être élus dans la province où le commissariat qu’ils administrent. La majorité a rejeté cette exclusion. »
Je ne dirai plus qu’un mot relativement aux influences. Je n’ai pas nié qu’on cherchât quelquefois à en exercer, mais j’ai dit que l’électeur était toujours libre de s’y soustraire, parce qu’en acceptant le bulletin qu’on lui présente, il pouvait avoir sur lui un bulletin portant le candidat de son choix et le déposer dans l’urne. Celui qui cherche à exercer une influence sur les électeurs n’a aucune espèce de garantie.
M. de Brouckere. - Je n’ajouterai que peu de mots à ce qu’ont dit les honorables préopinants, parce que, sur une question de la nature de celle qui nous est soumise, chacun des membres a son opinion à peu près formée. Je ne me décide à prendre la parole que parce que le ministre de l’intérieur a cherché à faire prévaloir une espèce de question de constitutionnalité, une fin de non-recevoir.
S’il faut en croire le ministre de l’intérieur, la question a été décidée par le congrès ; et il vient de prendre une seconde fois la parole pour répéter cette assertion. Messieurs, la question a été décidée par la section centrale du congrès, mais la section centrale du congrès n’était pas plus le congrès que la section centrale de la chambre des représentants n’est la chambre des représentants. Je tiens pour certain que la question n’a jamais été décidée par le congrès.
Qu’est-ce que vous a démontré le ministre de l’intérieur ? Que cinq membres de la section centrale du congrès ont été d’avis qu’il ne fallait pas statuer dans la constitution que les gouverneurs et les commissaires de district ne pourraient pas être élus dans la province ou le district qu’ils administrent. Il y aura encore des membres qui partageront l’opinion des cinq membres de la section centrale du congrès, mais est-ce à dire que le congrès a repoussé une proposition dans le sens de celle de M. Dumortier ? Non, il n’en est pas ainsi ; vous êtes entiers dans vos droits ; la question se présente neuve à l’assemblée législative.
Quant au fond de la question, les trois honorables préopinants, MM. Dumortier, Desmanet de Biesme et Gendebien, ont fait valoir la plupart des arguments qui militent en faveur de la proposition ; j’en ajouterai cependant un.
Lorsque le congrès a statué que les fonctionnaires pouvaient être appelés à faire partie de l’assemblée nationale, il n’a pas pu croire que, deux ans après sa dissolution, des fonctionnaires seraient destitués pour l’indépendance qu’ils auraient apportée dans l’exécution de leur mandat de député ; et moi, ancien membre du congrès, j’ose ici faire un appel à tous mes anciens collègues, pour leur demander si jamais ils ont pu penser que, si peu de temps après la révolution, les ministres destitueraient des fonctionnaires pour les opinions qu’ils auraient soutenues dans la chambre. Je ne crains pas d’affirmer que tous mes anciens collègues répondront négativement.
Maintenant que vous avez été témoins de plusieurs de ces révocations, je demande si vous ne devez pas vous attendre à ce que tôt ou tard les fonctionnaires appelés à siéger dans cette enceinte n’y arrivent pas avec l’indépendance que doit apporter tout bon mandataire de la nation. N’est-il pas à craindre que tôt ou tard les fonctionnaires qui entreront dans la chambre, je ne parle pas de ceux qui y siègent en ce moment, ne se voient toujours en face d’une destitution, s’ils se permettent de combattre le ministère ?
Il vous reste à voir s’il est dans votre intention que la chambre se peuple de fonctionnaires qui peut-être n’apporteront pas, dans l’émission de leur vote et la défense de leur opinion, l’indépendance qui doit être la principale qualité de tout bon député. Je livre ces observations à vos réflexions. Pour moi, je voterai pour la proposition de M. Dumortier.
(Moniteur belge n°92, du 2 avril 1835) M. Dumortier. - Je n’ajouterai que deux mots à ce qu’on dit les honorables préopinants pour appuyer ma proposition. Je dirai que c’est précisément l’article de la constitution indiqué par le ministre, que le congrès lui-même et la chambre des représentants ont interprété par les lois relatives a la cour de cassation et à la cour des comptes.
Le congrès a dit que les membres de la cour de cassation ne pourraient pas siéger dans les chambres législatives ; et la seconde législature, qui était encore en grande partie composée d’anciens membres du congrès, a admis la même disposition a l’égard des membres de la cour des comptes. Or, remarquez bien que ces deux dispositions étaient relatives à l’article même de la constitution sur lequel s’est appuyé le ministre pour combattre ma proposition.
Vous vous opposez à ma proposition, parce que, dites-vous, la constitution porte qu’aucune autre condition d’éligibilité que celles qu’elle stipule ne pourra être exigée. Je ferai observer qu’il ne s’agit pas ici de condition d’éligibilité, mais d’incompatibilité. Le congrès, ainsi que la législature qui l’a suivi, ont fort bien distingué les conditions d’éligibilité des incompatibilités.
La condition d’éligibilité est celle sans laquelle on ne peut pas donner validement un vote à un citoyen ; en cas d’incompatibilité, au contraire, on peut donner son vote d’une manière valide à l’individu, seulement après que le vote a été donné, le citoyen qui l’a reçu doit faire option pour l’une ou l’autre fonction. Ici ce n’est pas d’une condition d’éligibilité, mais d’une incompatibilité qu’il s’agit.
Ainsi, le congrès, loin de s’être prononcé dans un sens contraire à ma proposition, a décidé d’une manière conforme, puisqu’il a décidé que les membres de la cour des comptes et de la cour de cassation ne pourraient être en même temps membres des chambres législatives. Vous voyez que ceci corrobore l’opinion que j’ai émise.
L’honorable M. Legrelle qui était aussi membre du congrès vient de me dire qu’il se rappelait formellement que le congrès a voulu laisser la question tout à fait entière.
Je pense que maintenant il n’y a plus d’objection sérieuse à faire à ma proposition. Remarquez qu’elle n’exclut ni le gouverneur ni le commissaire de district de la représentation nationale ; que seulement elle ne permet pas que leur élection ait lieu dans la province on l’arrondissement qu’ils administrent. Ils pourront être élus dans une autre province si c’est un gouverneur, et dans un autre arrondissement si c’est un commissaire de district. De cette manière, ils ne pourront pas user de leur influence pour se faire élire ; ils ne pourront pas dire à tous les bourgmestres qui sont dans leur juridiction : Si vous ne votez pas pour moi, je vous révoquerai.
Quant aux honorables membres qui font partie de cette assemblée, le paragraphe 2 a pourvu à l’objection qu’on pourrait faire.
Je rappellerai qu’en France cette disposition existe dans la loi électorale, et qu’elle comprend non seulement les préfets et les sous-préfets, mais les administrateurs militaires.
M. Lardinois. - Il faut comprendre aussi les colonels de la garde civique.
M. Dumortier. - Si quelqu’un veut en faire la proposition, je serai le premier à l’appuyer. Je ne veux pas que les fonctionnaires amovibles, que le gouvernement tient dans sa main, auxquels il peut dire : Si vous ne votez pas pour moi, je vous briserai comme verre, viennent fausser la représentation nationale. Je crois que ceci répond à ce qu’a dit l’honorable M. Lardinois.
Je dis donc que ma proposition n’est pas nouvelle. Cette disposition se trouve dans les lois de Louis XVIII et de Charles X ; elle existe en Angleterre et elle existait aussi pour les états-généraux. Vous savez que les gouverneurs ne pouvaient pas siéger aux états-généraux.
Cette disposition existe donc dans tous les pays soumis au régime constitutionnel. Si vous ne voulez pas que tous les commissaires de district arrivent dans cette enceinte, il est indispensable d’y mettre obstacle.
J’ai entendu un commissaire de district dire qu’il n’y avait qu’un seul moyen d’avoir de l’avancement, que c’était de se faire nommer membre de la chambre. Je cite ces paroles qui ont été prononcées dans une occasion récente.
Je vous le demande, les commissaires de district, étant imprégnés de cette idée, ne feront-ils pas les plus grands efforts pour se faire élire ? Ils parviendront à éliminer la partie saine de la représentation et à la remplacer. Que deviendra alors la représentation nationale, avec les doctrines liberticides que nous avons entendu professer dans cette enceinte, que tout fonctionnaire qui ne votait pas avec le gouverneraient était passible d’être destitué ? Ce système, il est vrai, a été proclamé par l’ancien ministère, mais il n’a pas été désavoué par le nouveau ; et jusqu’à ce qu’il ait été désavoué formellement, nous devons croire que c’est encore le système du gouvernement.
Voyez si vous voulez que la représentation nationale soit corrompue. Si nous en arrivions là, on serait forcé d’avoir recours à des moyens dont la constitution a voulu prévenir l’emploi.
Le principe de l’élection directe serait manifestement faussé si vous admettiez que ceux-là qui ont le droit de nommer et de révoquer puissent se faire élire par ceux qu’ils tiennent dans la main.
M. Van Hoobrouck. - S’il s’agissait de frapper d’exclusion les honorables membres qui sont en possession de gouvernements de province ou de commissariats de district, je m’opposerais à la proposition de M. Dumortier, parce que je ne pense pas que nous pourrions prendre une pareille disposition. Car ces honorables fonctionnaires avaient été élus, peu de temps après la révolution, membres du congrès ou de la première législature pour les services qu’ils avaient rendus : c’était une marque d’estime que leur donnaient leurs concitoyens ; et le gouvernement, en les nommant fonctionnaires, n’a fait que confirmer le premier jugement des électeurs.
Mais l’honorable M. Dumortier ayant dit que sa proposition n’atteignait pas les commissaires de district actuellement membres de la chambre, qu’ils conserveraient leur position, en ce sens qu’ils pourraient être réélus, je voterai pour son adoption.
Je dirai quelques mots pour répondre à M. le ministre de l’intérieur, en ce qui concerne l’influence que peuvent exercer les commissaires de district. Il vous a dit que chaque électeur était libre dans l’émission de son vote, parce qu’il pouvait toujours avoir sur lui le bulletin sur lequel serait inscrit le candidat auquel il veut accorder sa confiance, et que, dans le cas où on lui remettrait un bulletin, il pourrait le prendre et déposer dans l’urne celui qu’il aurait préparé d’avance.
Messieurs, il faut connaître bien peu ce qui se passe dans les collèges électoraux, pour ne pas savoir l’influence qu’y exercent les commissaires de district. Nous avons pu cependant nous en convaincre : pour moi, j’ai eu la preuve de l’influence exercée dans un district où j’ai ma principale résidence, par un commissaire de district nommé depuis peu de temps et qui ne pouvait pas encore s’être concilié l’estime de ses administrés, de manière à mériter l’honneur d’être porté à la députation. Je dirai plus, c’est que les députés de ce district avaient toujours jusque là été élus à la presque unanimité.
Ces députés, vous avez pu apprécier leur mérite ; ils jouissent de l’estime générale, et particulièrement de la vôtre ; eh bien, le commissaire de district de cet arrondissement, arrivé depuis quelques semaines seulement, a pu, sur 800 électeurs et autant, en réunir 400. L’honorable M. Dellafaille a été nommé simplement à la majorité de quelques voix. Voilà, je crois, un exemple frappant de l’influence que les commissaires de district exercent par leurs fonctions. Car, comme je l’ai déjà dit, cet homme placé depuis quelques semaines dans l’arrondissement ne pouvait pas, par ses services, avoir acquis l’estime de ses administrés, de manière à mériter d’être porté aux fonctions de représentant. Je pense que cet exemple suffira pour prouver la nécessité d’insérer dans la loi une disposition qui empêche que les fonctions de commissaire de district ne servent de marchepied pour arriver à la représentation nationale, et de là à des emplois supérieurs.
D’après ces motifs, je voterai pour la proposition de mon honorable collègue et ami M. Dumortier.
M. Fallon. - Sans rien préjuger sur la proposition de restreindre le droit électoral, tel qu’il a été établi par la constitution, la distinction que vient de faire l’honorable M. Dumortier entre les conditions d’éligibilité et les incompatibilités, me semble prouver que son amendement serait inconstitutionnel, si on l’admettait tel qu’il a été proposé. Voici ce que dit l’article 50 :
« Pour être éligible, il faut :
« 1° Etre Belge de naissance ou avoir reçu la grande naturalisation ;
« 2° jouir des droits civils et politiques ;
« 3° Etre âgé de 25 ans accomplis ;
« 4° Etre domicilié en Belgique. »
« Aucune autre condition d’éligibilité ne peut être requise. »
Par conséquent, on est éligible dès lors qu’on remplit les qualités déterminées par l’article 50.
Vous pouvez dire que les fonctions de gouverneur sont incompatibles avec le mandat de député, quand il a été élu dans sa province ; mais vous ne pouvez empêcher qu’un gouverneur puisse être élu dans sa province. Vous pouvez établir qu’il aura à opter entre les fonctions de gouverneur et le mandat de député, mais voilà tout.
M. Dumortier. - Je reconnais la justesse de l’observation de l’honorable préopinant, et je vais changer la rédaction de mon amendement. Il suffira de dire :
« Tout gouverneur, tout commissaire de district élu membre de l’une ou de l’autre chambre par un district qu’il administre, devra opter entre ces fonctions et celles de député ou de sénateur. Néanmoins les gouverneurs et commissaires de district qui, lors de la promulgation de la présente loi, seraient élus dans la province ou le district où ils exercent leurs fonctions, pourront, par continuation, siéger dans les chambres sans être tenus à cette option. »
M. Jullien. - Je pense avec l’honorable préopinant que le gouvernement représentatif ne sera jamais qu’un mensonge et qu’une déception, aussi longtemps que vous laisserez au pouvoir exécutif la faculté de peupler les chambres de ses agents et de ses créatures. Qu’est-ce qu’un représentant de la nation ? C’est incontestablement un homme envoyé par les électeurs pour surveiller et contrôler les actes du gouvernement. N’est-il pas absurde d’envoyer des valets pour contrôler les maîtres ? (Murmures.) Faites attention, messieurs, que je ne me sers pas de ces expressions dans un sens injurieux pour les honorables fonctionnaires qui siègent dans cette assemblée ; j’ai voulu seulement faire comprendre ma pensée, et je n’ai entendu faire aucune allusion.
Dans cette position, l’amendement de l’honorable M. Dumortier n’a rien que de raisonnable, et je ne vois pas comment on pourrait le repousser.
On a d’abord invoqué l’inconstitutionnalité ; maintenant il n’en existe pas par la manière dont il est rédigé. Il est toujours dans le domaine de la loi d’établir telle ou telle incompatibilité. Quand vous direz au gouverneur élu dans sa province, au commissaire élu dans son district : Vous n’avez qu’à opter entre la conservation de vos fonctions et le mandat de député, ils sauront tous deux ce qu’ils auront à faire. J’attends comment on pourra dire que cette rédaction a quelque chose d’inconstitutionnel.
L’honorable M. Dumortier propose quelque chose de plus ; il propose que son principe ne s’applique pas du tout aux fonctionnaires qui siègent déjà dans cette chambre. Je ne comprends pas cette exception.
Si vous déclarez qu’il y a incompatibilité pour le nouveau mandataire, vous ne devez pas placer les autres sur une ligne différente. Ce sentiment a été dicté à l’honorable M. Dumortier par des motifs d’amitié pour des collègues qui le méritent ; mais je ne vois pas que cela doive donner lieu à une disposition spéciale. Ces fonctionnaires seront élus de nouveau s’ils sont jugés dignes de l’être, mais je ne vois pas qu’on puisse leur accorder une prérogative qui serait refusée aux autres. Si cette opinion n’est pas celle de l’honorable M. Dumortier, je demanderai la division, et je n’adopterai que la première partie de son amendement.
M. Fleussu. - Placé que je suis sous les souvenirs du congrès, je ne puis donner mon assentiment à l’amendement de l’honorable M. Dumortier.
Lorsque la constitution fut soumise à l’examen des sections, les uns avaient dit qu’il ne fallait pas donner le mandat de député aux commissaires de district, d’autres avaient soulevé une question identiquement pareille à celle qui nous occupe en ce moment. Ces deux propositions ont été longuement examinées par la section centrale, et on a pensé que ce serait porter atteinte à la liberté des électeurs que de les empêcher de donner leur vote aux hommes déjà investis de la confiance du gouvernement.
C’est dans ce sens qu’a été conçu l’article 59 de la constitution ; mais c’est peut-être aussi tout à dessein qu’on a ajouté qu’aucune autre condition d’éligibilité ne pourrait être requise. N’est-ce pas ajouter une condition à l’éligibilité que de dire qu’un gouverneur et un commissaire de district ne pourront pas être élus dans leur province ? Or, la constitution est expresse. Vous avez entendu le rapport de la section centrale du congrès, il est également positif ; il dit que cette question avait été soulevée et qu’elle n’avait pas reçu d’accueil.
Il me semble que s’il avait été dans l’esprit du congrès d’établir cette question d’éligibilité ou d’incompatibilité, un membre du congrès au moins se serait levé pour elles ; rien de tout cela n’a eu lieu, on s’est borné à adopter l’article 50.
Je vous avoue, messieurs, que je n’ai pas été peu étonné d’entendre tout à l’heure M. le ministre de l’intérieur invoquer ce rapport de la section centrale comme étant un motif d’exclusion. Lorsqu’il s’est agi de donner l’ordre civil, les membres de l’opposition à laquelle j’appartiens, déclarèrent que c’était inconstitutionnel. A cette époque M. de Theux, qui était également ministre de l’intérieur, ne tenait pas aussi grand compte des rapports de la section centrale ; il semble que, d’après lui, ces rapports changent de valeur selon ses opinions.
Moi qui me fais un devoir d’être conséquent avec moi-même, j’ai rassemblé mes souvenirs, et m’étant rappelé que, lors de la proposition de la section centrale, aucun membre du congrès ne s’y était opposé, j’ai pensé que nous ne pouvions revenir sur ce qui a été fait, quoique indirectement, par le congrès.
L’incompatibilité doit être dans les choses et non dans les mots. On ne crée pas des incompatibilités ; il faut qu’elles existent. Vous vous souvenez, messieurs, de ce qui eut lieu quand on a décidé l’incompatibilité des membres de la cour de cassation avec les fonctions de député. On a dit que l’incompatibilité existait dans la chose elle-même, parce que c’est à la cour de cassation à mettre les ministres en accusation, et qu’ils ne pouvaient être députés et juges à la fois. Relativement à la cour des comptes, le motif d’incompatibilité était encore dans les choses. La cour doit nous rendre compte de ses opérations, et l’on ne peut être à la fois rendant compte et ayant compte.
Si j’étais libre de mon choix, j’adopterais l’amendement de l’honorable M. Dumortier : d’abord parce que je reconnais l’influence du gouvernement sur le gouverneurs et les commissaires de districts, et en second lieu parce que je ne m’attendais pas qu’un gouvernement aussi jeune pût faire des actes aussi audacieux que ceux auxquels il s’est livré.
M. de Brouckere. - L’honorable préopinant nous a prouvé que les rapports de la section centrale sont, dans les mains de MM. les ministres, des armes à deux tranchants. Lorsque ces messieurs voulaient faire voter par la chambre un ordre civil, on leur opposa le rapport de la section centrale du congrès. Que répondirent les ministres ? C’est là l’opinion de la section centrale, ce n’est pas celle du congrès.
Aujourd’hui c’est l’inverse, et on vous soutient que l’opinion de la section centrale, c’est celle du congrès ; et voilà comme ces messieurs argumentent selon la commodité de la question qu’ils défendent.
S’il faut en croire l’honorable M. Fleussu, en admettant la proposition de l’honorable M. Dumortier vous ferez une inconstitutionnalité, parce que vous établissez des conditions d’éligibilité qui ne se trouvent pas dans la constitution, et qui même sont prohibées par elle.
Je ferai observer à l’honorable membre que, tel que l’amendement est rédigé maintenant, on n’établit pas de conditions d’éligibilité ; car, tel qu’il est aujourd’hui, cet amendement autorise les électeurs à choisir le gouverneur de leur province, le commissaire de leur district ; seulement le gouverneur ou le commissaire devront opter entre ces fonctions et le mandat de député ou de sénateur.
C’est donc une incompatibilité, et non une condition d’éligibilité. Or, messieurs, pour les incompatibilités, vous n’en êtes pas à votre début, vous en avez établi plusieurs ; celles de la cour des comptes, de la cour de cassation dont il a été parlé tout à l’heure. S’il n’y avait pas inconstitutionnalité alors, il n’y en a pas aujourd’hui ; et des motifs, sinon identiques, au moins aussi forts, combattent en faveur de l’amendement de l’honorable M. Dumortier. De manière que pour les incompatibilités dont je viens de parler, si vous n’adoptez pas cet amendement, il est incontestable que d’ici à quelque temps la plupart des gouverneurs et des commissaires de district seront membres des deux chambres ; et cela est si vrai, que je pose en fait qu’aujourd’hui, quand on sollicite les fonctions de gouverneur ou de commissaire de district, on calcule les avantages de ces places avec ceux qu’on retirera en étant membre des chambres ; on se dit ; Je me ferai élire député, et, aux appointements de gouverneur, de commissaire de district, j’ajouterai les 200 florins accordés à chaque représentant.
Voilà le calcul que l’on fait. Et si je voulais citer des noms propres, cela me serait fort aisé. Je pourrais affirmer à la chambre que ces fonctions ont etc sollicitées par plusieurs personnes dans le but de se faire nommer membres de cette assemblée ; les solliciteurs ne s’en cachent pas. Je tâcherai après cela, disent-ils, et rien n’est plus facile, de me faire nommer membre de la chambre des députés ; j’aurai de bons appointements, une forte indemnité, et de plus je passerai agréablement l’hiver dans la capitale. (On rit.)
M. Jullien. - Je vous avoue qu’en recherchant bien s’il y avait inconstitutionnalité dans la première rédaction de l’amendement de l’honorable M. Dumortier, je n’en ai pas plus trouvé que dans la seconde. Quand on lit bien attentivement l’article 50, que l’on fait valoir dans les deux cas, je ne sais pas de quelle partie de cet article on peut tirer la conséquence d’inconstitutionnalité. Que dit-il ? (L’orateur donne lecture de l’article 50.) Eh bien ! où est la condition d’éligibilité que requiert le premier amendement de l’honorable M. Dumortier ? Les fonctionnaires publics pourront être élus partout en remplissant les conditions de l’article 50, mais seulement ils ne pourront pas l’être dans la province ou le district qu’ils habitent.
Il n’y a là aucune condition d’éligibilité ; il y a seulement la circonstance que celui qui administre un gouvernement ou un district ne sera pas élu à cause de l’influence qu’il exerce dans ce gouvernement ou ce district. Mais, quant à la capacité pour être élu, rien n’est changé.
Quant à la deuxième rédaction de M. Dumortier, je ne sais pas ce qu’on pourrait opposer aux observations de l’honorable M. de Brouckere. Il n’y a là dedans aucune espèce de condition d’éligibilité, il y a seulement nécessité, et comme on vous l’a fait observer, vous avez déjà établi des incompatibilités pour la cour de cassation et la cour des comptes ; vous pouvez adopter celle-ci sans crainte de violer davantage la constitution.
Ainsi, soit que l’on reprenne le premier amendement soit que l’on s’attache au deuxième, de mon côté je ne vois aucune espèce d’inconvénient à l’un ni à l’autre. Je vois un motif d’intérêt public à adopter soit le premier, soit le deuxième amendement.
M. le président. - La division ayant été demandée sur l’amendement de M. Dumortier, je vais mettre aux voix le paragraphe premier de cet amendement. Il est ainsi conçu :
« Tout gouverneur, tout commissaire de district élu membre de l’une ou de l’autre chambre, devra opter entre ces fonctions et celle de député on de sénateur. »
- Plusieurs membres. - L’appel nominal.
- Le premier paragraphe de l’amendement de M. Dumortier est mis aux voix par appel nominal ; voici le résultat du vote :
72 membres sont présents.
6 s’abstiennent.
66 prennent part au vote.
27 votent pour l’adoption.
39 votent contre.
La chambre n’adopte pas.
Ont voté pour l’adoption : MM. Bosquet, Corbisier, Dautrebande, de Brouckere, A. Dellafaille, de Meer de Moorsel, de Renesse, Dechamps, Doignon, Dumont, Dumortier, Frison, Gendebien, Jadot, Jullien, Polfvliet, Rouppe, Thienpont, Trentesaux, Troye, Vanden Wiele, Vanderheyden, Van Hoobrouck, L. Vuylsteke, Watlet, Zoude.
Ont voté contre : MM. Bekaert, Brabant, Cols, Cornet de Grez, Davignon, de Behr, de Man d’Attenrode, W. de Mérode, de Muelenaere, de Nef, de Sécus, de Stembier, de Terbecq, de Theux, Devaux, Dewitte, d’Huart, Duvivier, Eloy de Burdinne, Ernst, Fallon, Fleussu, Hye-Hoys, Lardinois, Milcamps, Morel-Danheel, Olislagers, Raikem, A. Rodenbach, C. Rodenbach, Schaetzen, Simons, Smits, Ullens, Vandenhove, Van der Belen, Verdussen, Verrue-Lafrancq, Wallaert.
Se sont abstenus : MM. H. Dellafaille, de Puydt, Desmet, Helias d’Huddeghem, Legrelle, Nothomb.
M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités à vouloir bien, conformément au règlement, faire connaître les motifs de leur abstention.
M. H. Dellafaille. - L’honorable M. van Hoobrouck de Fiennes vous a fait connaître que, dans une élection précédente, j’avais eu pour concurrent précisément le commissaire de mon district.
Ce fait connu, j’ai craint que mon vote, qui eût été affirmatif, ne parût à quelques personnes dicté par des vues d’intérêt personnel. Dans cette position j’ai cru devoir m’abstenir de voter.
M. de Puydt. - N’ayant assisté qu’à une partie de la discussion, je n’aurais pas pu voter en connaissance de cause. C’est pour cela que je me suis abstenu.
M. Desmet. - D’une part reconnaissant l’utilité de la proposition, de l’autre ayant des doutes sur sa constitutionnalité, j’ai cru devoir m’abstenir.
M. Helias d’Huddeghem. - Reconnaissant aussi l’utilité de la proposition, j’ai été arrêté par la question de constitutionnalité.
M. Legrelle. - J’avoue franchement que je n’ai pas été assez éclairé par la discussion pour émettre un vote affirmatif ou négatif sur l’amendement. D’un côté, la mesure proposée me paraissait utile, quoique incomplète ; de l’autre, la question de constitutionnalité m’embarrassait.
M. Nothomb. - Fonctionnaire public moi-même, j’ai cru, par délicatesse, devoir m’abstenir de voter sur une proposition qui tendait à écarter d’autres fonctionnaires publics.
M. le président. - Le second paragraphe de l’amendement de M. Dumortier tombe par suite du rejet du premier paragraphe. En conséquence. il n’y a plus rien à mettre aux voix. S’il n’y a pas d’opposition, le vote définitif du projet de loi relatif au renouvellement des chambres aura lieu après-demain. (Adhésion.)
M. le président. - La discussion est ouverte sur l’ensemble du projet de la section centrale auquel le gouvernement se rallie.
M. Hye-Hoys. - Messieurs, ne trouvant pas dans le tarif, parmi les articles tissus, la dénomination de foulards, il me semble qu’il n’est pas juste de dire tissus de foulards écrus ; le mot foulard, d’après le dictionnaire de Boiste, dit que le foulard est une étoffe de soie peinte des Indes. Dans le commerce, le mot foulard ne s’applique réellement qu’à des mouchoirs de soie imprimés. Il s’en suit que l’étoffe de soie écrue, qu doit recevoir l’impression qui la convertit en foulards, ne constitue nullement ce qu’on entend par foulard ; elle n’est, jusqu’à ce qu’elle ait reçu l’impression, que la matière qui sert à former les mouchoirs dits foulards, qui ne peuvent être formés que d’une étoffe de soie. Il devient en quelque sorte superflu d’y ajouter le mot soie ; ce ne serait là qu’une répétition de mots qui ont le même sens.
Mais, si la dénomination de tissus de foulards écrus n’est pas vicieuse sous ce rapport, ce qui précède démontre qu’elle l’est évidemment pour désigner l’étoffe de soie écrue qui doit servir à former des mouchoirs dits foulards, par le motif péremptoire que c’est l’impression qui peut seule transformer cette étoffe en foulards, laquelle reste jusque là une simple étoffe de soie écrue qui ne constitue et ne peut constituer les foulards. Dire dès lors tissus de foulards écrus, c’est comme si on disait mouchoirs de soie écrue imprimés ; ce qui renferme une contradiction patente, en ce que la soie imprimée n’est plus de la soie écrue, et que la soie écrue cesse de l’être lorsqu’elle est imprimée.
Il me semble donc qu’il faudrait mieux dire : « Le droit d’entrée sur les tissus de soie écrue pour foulard est réduit à 5 fr. par kilogramme. »
Cette dénomination serait rationnellement caractéristique, et écarterait la contradiction que présente celle de tissus de foulards écrus.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je crois qu’il ne peut y avoir aucune espèce de doute sur ce que l’on doit entendre par « tissus de foulards de soie écrue, non teints ni imprimés. » Tout le monde comprendra qu’il s’agit là de l’étoffe dont on fait les foulards. Je ne crois donc pas que l’objection de l’honorable préopinant soit bien importante. Quand bien même le dictionnaire auquel il a eu recours ne serait pas d’accord avec le projet de loi, il n’en est pas moins certain qu’à la douane et dans le commerce, on entendra toujours par les termes du projet de loi les tissus dont on fait les foulards.
Il est à remarquer que la commission d’industrie a admis les expressions du projet, sans y faire aucune objection,
Je ne m’oppose pas à la modification demandée ; mais je la considère comme inutile.
- La discussion générale est close.
M. le président. - L’article premier est ainsi conçu :
« Art. 1er. Par modification au tarif des douanes (article tissus), le droit d’entrée sur les tissus de foulards de soie écrue, non teints ni imprimés, est réduit à cinq francs par kilogramme.
« Le droit de sortie sur les foulards teints ou imprimés est réduit à dix centimes par kilogramme. »
M. Hye-Hoys propose sur cet article un amendement qui consiste à dire « les tissus de soie écrue pour foulards » au lieu de « les tissus de foulards de soie écrue non teints ni imprimés. »
M. A. Rodenbach. - Il me semble que quand on dit « écru, » cela indique bien que c’est un tissu qui n’est ni imprimé ni teint ni blanchi. Ces mots constituent donc un pléonasme.
M. Duvivier. - Je pense avec M. le ministre des finances que la rédaction du projet de loi ne présente aucun inconvénient. Cependant je crois avoir compris l’honorable auteur de l’amendement en ce sens que, tant que l’étoffe est écrue, il ne voudrait pas qu’elle portât le nom de foulards, attendu qu’elle n’est alors que matière première. Je crois que la rédaction qu’il propose serait plus exacte, bien que la rédaction du projet ne pût donner lieu à aucune espèce de difficulté dans l’application des droits.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je ne m’oppose pas à la transposition des mots que propose l’honorable M. Hye-Hoys, puisqu’elle a pour objet de lever toute espèce de doute.
Je suis convaincu que dans le commerce et à la douane on entendra toujours par les expressions de la loi les tissus pour foulards. Néanmoins cette dernière expression est peut-être plus claire ; je ne m’oppose donc pas à l’amendement.
M. Lardinois. - Je pense qu’il y a un pléonasme dans l’article et qu’il suffit de dire tissus de foulards de soie écrue ; car s’ils sont écrus, il est certain qu’ils ne sont ni teints ni imprimés.
Je m’oppose à l’amendement de M. Hye-Hoys, parce qu’il serait un moyen de favoriser la fraude. En effet il est reçu dans le commerce que la soie écrue destinée à faire des foulards porte le nom de foulards écrus. Si maintenant vous adoptez la rédaction proposée par M. Hye-Hoys, il en résultera que, pour toute soie écrue que l’on déclarera être destinée à faire des foulards il y aura la réduction du droit d’entrée, que l’on ne veut appliquer qu’aux tissus de foulards. L’amendement de M. Hye-Hoys serait donc un moyen de favoriser la fraude.
M. le président. - M. Lardinois propose, par amendement, de supprimer dans l’article premier les mots : non teints ni imprimés.
M. Davignon. - Je pense qu’il faudrait supprimer les mots « de soie » et ceux : « non teints ni imprimés, » et dire simplement : « les tissus de foulards écrus. »
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - La proposition de l’honorable M. Davignon est la reproduction de l’article tel qu’il avait été présenté par le gouvernement, sauf la proposition de supprimer les mots « non teints ni imprimés. » A la section centrale on a pensé qu’il était préférable, pour qu’il n’y eût aucune espèce de doute, d’ajouter la nature des tissus, parce que dans le commerce, on appelle foulards certains tissus de coton, et que l’on pourrait confondre les foulards de coton avec les foulards de soie. C’est par ce motif que les mots « de soie » furent ajoutés. Le gouvernements a adhéré à cette addition.
Quant aux mots « non teints ni imprimés, » je ferai observer qu’ils se trouvent dans le tarif ; on a voulu se conformer à la locution du tarif.
Un honorable membre, M. Verdussen, me fait remarquer qu’il y a des foulards écrus imprimés ; ainsi vous voyez qu’il est nécessaire de maintenir les mots « non teints ni imprimés. »
M. Davignon. - L’intention de la commission d’industrie et de la section centrale a été de n’admettre de modifications aux droits de douanes que pour les foulards écrus. Or, à mon avis, c’est par suite du dégommage qu’un foulard cesse d’être écru ; or, le dégommage étant la première opération sur le foulard écru, il n’est pas exact de dire qu’il y ait des foulards écrus teints ou imprimés.
M. Duvivier. - Je pense avec M. Davignon que les mots « foulards écrus » excluent toute espèce de préparation comme teinture, impression, etc.
M. Verdussen. - Comme j’ai été interpellé par M. le ministre des finances, je dois déclarer que j’ai vu des foulards imprimés. Ce n’est que par le débouillissage que les foulards cessent d’être écrus. Or, il n’est pas nécessaire que les foulards soient dégommés pour être imprimés ; cela n’est nécessaire que pour la teinture.
M. Duvivier. - Je n’ai point d’observations à faire sur ce que l’honorable membre dit avoir vu ; mais du moment où les foulards sont imprimés, on ne les qualifie plus de tissus de soie écrue.
M. A. Rodenbach. - On dit, dans la loi « tissus de soie écrue, non teints et non imprimés ; » je crois qu’il faudrait encore dire et non blanchis. Je sais qu’il existe des foulards blancs ; il en est de très blancs même. J’en possède.
M. le président. - Je vais mettre aux voix l’amendement.
Je dois vous faire observer qu’il ne s’agit pas ici d’un amendement, mais d’un simple changement de rédaction. On ne propose pas de modifier un principe de la loi.
- La rédaction proposée par M. Hye-Hoys mise aux voix est adoptée.
L’article ainsi rédigé est adopté.
« Art. 2. Les tissus de soie venant directement du Bengale ou autres endroits des Grandes-Indes par navires nationaux, seront seuls admis au droit de six pour cent de la valeur. »
- Cet article est adopté sans discussion.
La loi, dans son ensemble, est soumise à l’appel nominal ; elle est adoptée à l’unanimité des 57 membres présents.
- La séance est levée à quatre heures et demie.