(Moniteur belge n°213, du 1er août 1834)
(Présidence de M. Raikem.)
M. de Renesse fait l’appel nominal à midi et demi.
M. H. Dellafaille donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse fait connaître l’objet des pièces adressées à la chambre.
« La régence de la ville de Wavre réclame contre le projet de reconstituer l’ancien canton de Grez. »
- Renvoi à la commission chargée d’examiner le projet de loi relatif aux circonscriptions des justices de paix.
« Trois habitants de Humbeke demandent l’abrogation de l’arrêté du 26 juin 1829, qui crée des brigades de gardes-champêtres recevant un traitement supplémentaire des communes. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
M. le ministre de l'intérieur adresse à la chambre, pour être déposé à la bibliothèque, un exemplaire des Annales de l’observatoire, tome premier, première partie.
M. J.-L. Cosson fait hommage à la chambre de son Résumé de l’Histoire nationale.
M. Verdussen. - Messieurs, dans la séance d’avant-hier j’ai déjà eu l’honneur de vous prévenir que je me rallierai aux conclusions de la section centrale, lorsque celle-ci vous propose d’ajourner la discussion du projet de changer le commencement de l’année financière ; peu de mots suffiront pour développer les motifs de mon adhésion
La proposition que j’ai déposée sur le bureau, conjointement avec MM. A. Rodenbach et H. Dellafaille n’avait qu’un seul but, celui d’obvier aux graves inconvénients que l’époque de la discussion des budgets a présentés jusqu’ici. Nous ne nous sommes pas dissimulé que l’introduction de notre système en présente aussi ; mais s’il nous est permis de juger de leur importance par la réponse que la cour des comptes a faite aux demandes de la sixième section, dont j’ai fait partie, ou par tout ce que M. le ministre des finances en a déjà dit dans cette enceinte et dans l’autre chambre, je suis loin d’en être effrayé ; et, partageant en ce point l’opinion de la cour des comptes, je crois que les difficultés qui ont été signalées ne sont pas insurmontables et ne peuvent point être mises en comparaison avec les irrégularités que présentent les crédits provisoires, le vote des voies et moyens avant les dépenses ou le défaut d’un examen réfléchi des budgets par le sénat.
Si la section centrale avait conclu au rejet de la proposition qui lui était soumise, je croirais devoir employer tous mes efforts pour en prouver l’utilité ; mais puisqu’elle n’en propose que l’ajournement, je me rallie à sa conclusion, non seulement par les motifs indiqués par M. le rapporteur, mais aussi par la circonstance de la présentation anticipée des budgets des dépenses pour l’exercice de 1835, qui vient d’avoir lieu. Si cette diligence du ministère est due en partie à la proposition que nous avons eu l’honneur de vous faire, nous nous en félicitons ; elle aura déjà porté son fruit, quoiqu’en mon particulier je demeure convaincu que cette mesure ne suffit pas, et qu’elle ne sera efficace que pour autant qu’elle se trouve liée à une réunion des chambres avant l’époque fixée par l’article 70 de la constitution.
Je sais, messieurs, qu’il n’appartient qu’au gouvernement de juger définitivement de l’opportunité de cette mesure, aussi mon intention n’est aucunement d’empiéter sur ses droits ; mais il m’est sans doute permis, en qualité de député, de lui soumettre quelques observations à l’appui de l’opinion que je viens d’émettre.
A l’ouverture de la session actuelle, en novembre dernier, la question de la discussion des budgets a naturellement aussi occupé la chambre ; alors je lui prédisais que le mois de mars serait atteint avant qu’ils ne fussent convertis en loi ; on m’a taxé d’exagération, et l’événement a prouvé que je n’avais pas été assez loin dans mes fâcheuses prévisions. Que le passé nous serve de leçon pour l’avenir.
On peut supposer avec raison que la discussion future du budget sera moins longue, j’en conviens ; mais quand on considère qu’à chaque ouverture de session la chambre doit se livrer à quelques travaux préparatoires et qu’aucun changement d’impôt ne nous a encore été présenté par le gouvernement, malgré les réclamations les plus vives de la représentation nationale, on demeurera convaincu qu’il faudra encore nous hâter beaucoup pour pouvoir envoyer au sénat tous les budgets, aux premiers jours de décembre, en supposant même que de la session future se fasse au premier octobre prochain ; et si cette mesure de précaution n’est pas adoptée, je prédis dès à présent qu’on entrera dans l’exercice de l’année prochaine avec tous les embarras et toutes les irrégularités qui ont accompagné les commencements des exercices antérieurs et que pour sortir de cette voie vicieuse, nous nous verrons forcés alors d’adopter le projet que je consens à ajourner aujourd’hui.
Je prendrai la liberté de présenter encore à MM. les ministres une autre observation en faveur de la convocation anticipée des chambres pour la session de 1834-1835, c’est qu’il ne sera guère possible de prolonger sa durée au-delà du mois de mai, à cause du renouvellement partiel de la chambre des représentants, qui doit s’effectuer dans les premiers jours du mois de juin, en vertu de l’article 18 de la loi électorale ; après cette opération, à laquelle la plupart des membres de cette assemblée voudront sans doute ne pas rester étrangers, viendra la réunion des conseils provinciaux, dont les premiers travaux, entrepris simultanément sur tous les points du royaume, occuperont suffisamment le ministère, pour lui faire désirer de n’être pas en même temps obligé de représenter le gouvernement devant les chambres législatives.
Quant aux sessions qui suivront celle qui va s’ouvrir dans quelques mois, j’ai dû ne pas les perdre de vue, en m’occupant d’une mesure générale et permanente de changer le commencement de l’année financière, et je demeure convaincu, d’après les considérations que j’ai déjà plusieurs fois reproduites, que pour éviter ce nouveau système, il sera indispensable de voter les différents budgets, au moins ceux de dépenses, dans la session qui précédera celle de l’exercice auquel ils se rapportent ; et à cet effet, il faudra chaque année les présenter au plus tard dans les premiers jours de mars, époque fort reculée sans doute, et qui offre aussi des inconvénients, mais qui permettra au moins de laisser aux choses leur cours naturel, en ne forçant point le gouvernement de convoquer les députés de la nation avant le temps fixé par la constitution.
J’abandonne ces remarques à l’examen de mes honorables collègues et de MM. les ministres, et je conclus à l’adoption de l’ajournement que la section centrale vous propose, mesure qui nous permettra de reconnaître si celle de nous avoir délivré les budgets de dépenses avant notre séparation est ou n’est pas efficacement utile.
M. le président. - Si personne ne demande la parole, je vais mettre aux voix l’ajournement proposé par la section centrale.
M. Dubus. - Je demande la parole.
Messieurs, dans le sein de la section centrale, j’ai voté contre l’ajournement de la proposition de MM. Verdussen, Rodenbach et Dellafaille. Il m’avait semblé que si la proposition avait rencontré des objections très graves, il était du devoir de la section centrale de les aborder et de chercher à les résoudre, et dans tous les cas de proposer à la chambre ou l’adoption ou le rejet, ou enfin la modification de la proposition. Mais la situation des choses n’est plus la même. Il y a au moins un mois que nous délibérions dans le sein de la section centrale. Aujourd’hui que la session touche à sa fin et la section centrale ne pourrait plus s’occuper utilement de la proposition, je suis disposé à me rallier à l’ajournement qu’elle propose.
Mais je ne pense pas que ce soit un ajournement indéfini qui doit être mis aux voix ; car, aux termes de l’article 21 du règlement, un ajournement doit toujours être limité. D’après cet article, on n’admet pas d’autre question d’ajournement que celle de savoir s’il y a lieu de suspendre la délibération ou le vote pendant un temps déterminé. Il faudrait, pour se conformer à cette disposition du règlement, déterminer le terme de l’ajournement. Je proposerai de fixer l’ajournement à la session prochaine.
Il conviendra alors que la section centrale s’occupe du fond de la proposition. Son examen doit amener une solution quelconque. Si les difficultés que présente la proposition sont insurmontables, elle proposera le rejet. Si la section centrale trouve ces difficultés surmontables, elle proposera les modifications qu’elle jugera nécessaires. Si le terme proposé est trop rapproché, comme je le pense, elle en proposera un autre. Je demande donc que les conclusions de la section centrale soient modifiées en ce sens que l’ajournement soit fixé à la session prochaine.
M. Milcamps. - J’appuie d’autant plus l’opinion de l’honorable M. Dubus que l’intention de la section centrale n’a pas été d’ajourner indéfiniment la proposition de l’honorable M. Verdussen.
Elle a proposé cet ajournement dans la pensée que le ministre à qui elle recommandait la proposition, s’occuperait de son objet et pourrait présenter lui-même un projet, soit dans le sens de la proposition de M. Verdussen, soit pour discuter deux budgets dans la même session ; car le rapport de la section centrale présente différents moyens pour parer aux inconvénients qui résultent de ce que les budgets des recettes et des dépenses ne peuvent jamais être votés avant le commencement de l’exercice. En conséquence j’appuie la proposition de M. Dubus.
- L’ajournement à la session prochaine proposé par M. Dubus est mis aux voix et adopté.
M. le président. - « Art. 25 devenu art. 20 (du projet du gouvernement).
« Pour être électeur, il faut :
« 1° Etre Belge par la naissance ou la naturalisation, et être majeur aux termes du code civil ;
« 2° Avoir son domicile réel dans la commune au moins depuis le 1er janvier de l’année dans laquelle se fait l’élection ;
« 3° Payer dans la commune, en contributions directes, y compris les patentes, le cens électoral d’après les bases suivantes :
« Dans les communes au-dessous de :
« 2,000 habitants, 20 fr.
« De 2,000 à 5,000, 30 fr.
« De 5,000 à 10,000, 40 fr.
« De 10,000 à 15,000, 50 fr.
« De 15,000 à 20,000, 60 fr.
« De 20,000 à 25,000, 70 fr.
« De 25,000 à 30,000, 80 fr.
« De 30,000 à 35,000. 90, fr.
« De 35,000 à 40,000, et au-dessus, 100 fr. »
La section centrale adopte les deux premiers paragraphes du gouvernement et propose de substituer au reste de l’article les dispositions suivantes :
« 3° Verser au trésor de l’Etat, en contributions directes, patentes comprises, le cens électoral fixé d’après les bases suivantes :
« Dans les communes au-dessous de :
« 2,000 habitants, 20 fr.
« De 2,000 à 5,000, 30 fr.
« De 5,000 à 10,000, 40 fr.
« De 10,000 à 15,000, 50 fr.
« De 15,000 à 20,000, 60 fr.
« De 20,000 à 25,000, 70 fr.
« De 25,000 à 30,000, 80 fr.
« De 30,000 à 35,000. 90, fr.
« De 35,000 à 40,000, 100 fr.
« De 40,000 à 60,000, 110 fr.
« De 60,000 et au-delà, 120 fr. »
M. le président. - M. le ministre se rallie-t-il à la proposition de la section centrale ?
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Le gouvernement ne pourrait pas se rallier à la proposition de la section centrale sans qu’on ait bien défini le sens de la modification introduite au paragraphe 3.
Le paragraphe du projet du gouvernement est ainsi conçu : « Payer dans la commune, en contributions directes, y compris les patentes, le cens électoral fixé d’après les bases suivantes. »
La section centrale propose de remplacer ce paragraphe par la disposition suivante :
Verser au trésor de l’Etat en contributions directes, patentes, comprises, le cens électoral fixé d’après les bases suivantes. »
Si je jette les yeux sur les développements dans lesquels la section centrale est entrée, il semble qu’elle n’ait eu en vue que d’exclure du cens les impositions communales ; mais son amendement a une autre conséquence, c’est qu’il suffit d’être imposé dans telle partie que ce soit du royaume. Je ne sais pas si c’est là de qu’elle a voulu. Il me semble qu’elle ne s’en explique pas clairement.
Dans le dernier paragraphe des développements du rapport, je vois :
« La première section a demandé le retranchement des mots ; dans la commune. Elle pense qu’il suffit que les contributions soient payées dans le pays. La cinquième a proposé de dire verser au trésor de l’Etat, afin d’écarter tout doute sur les impositions communales qui ne doivent pas entrer en compte pour parfaire le cens électoral. Ces deux propositions ont été admises par la section centrale, »
Je n’avais pas remarqué la première partie de ce paragraphe. Toutefois, nous aurions besoin d’entendre les raisons pour lesquelles on veut comprendre dans le cens électoral les contributions payées dans quelque partie que ce soit du royaume.
Il me semble que la garantie du droit électoral repose sur l’intérêt local. Quand il s’agit d’élections pour les chambres législatives, je conçois qu’on tienne compte à l’électeur des contributions payées dans le royaume, mais je ne sais pas s’il doit en être de même quand il s’agit d’élections communales. Celui qui ne paie pas de cens dans la même commune n’a pas le même intérêt à son administration. Je demanderai quelques explications sur ce point.
M. H. Dellafaille - La section centrale a effectivement cru qu’il ne fallait pas comprendre dans le cens les centimes additionnels pour contributions provinciales ou communales. C’est pour cela que nous avons substitué aux mots payer dans la commune, ceux-ci : verser au trésor de l’Etat. Quant au second changement, consistant dans le retranchement de ces mots dans la commune, nous avons considéré que la patente, la contribution personnelle se payaient toujours dans la commune, et que des contributions payées hors de la commune ne pourrait tomber que sur la contribution foncière. Un habitant n’a pas moins d’intérêt à la bonne administration de la commune, n’a pas moins le droit d’y prendre part, parce qu’il possède un champ en dehors du territoire de la commune. Nous n’avons pas pensé qu’il fallût exclure du cens les contributions payées hors de la commune parce que nous avons considéré le cens exigé par la loi comme une garantie que l’électeur appartenait à une classe ayant des intérêts à défendre.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - D’après ce que vient de dire l’honorable préopinant, il n’y aurait pas de raison pour qu’un Belge qui verserait des contributions dans le trésor public de France, ne fût pas électeur. Je ne dis pas qu’il y ait identité entre les cas, mais il y a analogie. Je pense que celui qui paie hors de la commune les contributions qui forment son cens électoral, n’offre pas la même garantie que celui qui a des intérêts permanents dans la commune. Je déclare au reste que nous n’attachons pas une grande importance à l’amendement. Nous n’avons voulu qu’appeler l’attention de la chambre sur ses conséquences.
M. le président. - Je vais mettre aux voix successivement les divers paragraphes.
M. Verdussen. - On ne peut pas séparer les paragraphes ; si le système de M. le ministre prévalait, il faudrait supprimer le paragraphe 2.
M. de Muelenaere. - M. Verdussen a raison. Il faudra régler la capacité électorale, soit d’après le domicile réel, soit d’après la contribution payée dans la commune. Si on n’exige pas qu’on paie la contribution dans la commune, il faudra exiger que l’électeur y ait son domicile réel.
Si le paragraphe 3 était modifié dans ce sens, peut-être pourrait-on alors modifier la disposition du paragraphe 2 qui n’exige pas le domicile réel ; avant de voter le paragraphe 2, il faut être d’accord sur le paragraphe 3.
Si je ne votais pas en faveur de l’amendement de M. le ministre de la justice, ce serait par la considération seule que les électeurs devraient avoir leur domicile réel dans la commune.
M. de Theux. - J’appuie la proposition de la section centrale qui exige simplement que l’on paie le cens électoral dans le royaume. Je ferai remarquer que, d’après l’article 24 du règlement des villes, il suffisait de payer le cens électoral dans le royaume. L’on n’était pas obligé de le payer dans la ville même où l’on avait son domicile. D’après le même règlement des villes, le droit de patente n’était pas compris pour la formation des listes électorales. La proposition du gouvernement aujourd’hui compte le droit de patente comme faisant partie du cens électoral. Et si vous obligiez l’électeur à avoir son domicile réel dans la campagne, vous accorderiez la faculté électorale presque exclusivement aux personnes payant patente. Ce serait bouleverser ce qui a existé jusqu’ici. En principe il me paraît incontestable qu’il faut admettre la contribution foncière payée dans toute l’étendue du royaume.
En effet, celui qui paie ses contributions en dehors de la commune où il a établi son domicile n’en paie pas moins les taxes municipales. Il ne verse pas moins sa quote-part dans les recettes locales en raison de la consommation qu’il fait dans le lieu de son domicile. Il a un intérêt réel dans la gestion des affaires communales. Je ne vois pas pourquoi il ne serait pas admis à jouir des droits électoraux.
La quotité du cens qui est exigé n’a d’autre but que de faire apprécier la bonté de l’indépendance du suffrage d’un homme qui doit posséder une position notable.
Quant à l’observation qui a été faite sur le n°2, j’ai soutenu dans une discussion précédente que, pour être éligible, il n’était pas nécessaire d’avoir son domicile dans la commune ; mais que, pour être électeur, le domicile réel peut être exigé, parce que c’est dans l’électeur que réside tout entière la faculté de choisir les magistrats municipaux.
Je me propose de revenir au second vote sur la question du domicile des éligibles. Je représenterai les arguments que j’ai fait déjà valoir, et j’espère les voir mieux accueillis par la chambre.
Je pense actuellement qu’il faut donner la préférence au paragraphe 3 de la section centrale et que l’on peut en même temps admettre le paragraphe 2 qui fixe le domicile réel.
M. Dubus. - J’avais l’intention de parler dans le sens du préopinant en faveur de la proposition de la section centrale. Je pense que pour avoir un intérêt dans les affaires de la commune et pour être appelé à nommer ceux qui gèrent ces intérêts, il faut y avoir son domicile réel. Mais la question du cens est d’une tout autre nature. Celui qui paie le cens déterminé par la loi est supposé jouir d’une position sociale assez notable pour qu’il puisse donner son suffrage à ses concitoyens. Cela est si vrai que l’on fait entrer en ligne de compte dans le paiement du cens les contributions directes que l’on paie à l’Etat.
Si vous alliez exclure les contributions foncières que l’on paie, pour des biens situés dans une commune, il s’ensuivrait que vous priveriez beaucoup d’habitants notables de la qualité d’électeur, à laquelle plus que tout autre ils auraient des droits. En effet, n’étant pas porté sur les listes électorales des communes, où leurs biens seraient situés parce qu’ils n’y habitent pas, ni sur les listes électorales de la ville où ils ont leur domicile réel parce qu’ils n’y paieraient pas de contribution, ils se verraient injustement exclus des listes où ils auraient des droits incontestables à figurer. Il est impossible que vous adoptiez un pareil système.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Mon amendement avait pour but de suppléer à l’absence des motifs dans le projet de la section centrale. La discussion qu’il a soulevée a rempli la lacune, que j’avais signalée. Je déclare donc ne pas insister davantage et le retirer dès ce moment.
- Les chiffres de l’article en discussion sont successivement adoptés.
L’ensemble de l’article est mis aux voix et adopté.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) monte à la tribune et donne lecture du rapport d’un projet de loi sur l’instruction publique.
- La chambre ordonne l’impression du projet ainsi que du travail de la seconde commission chargée par le Roi de son élaboration.
M. le président. - « Art. 21. de la section centrale (auquel le gouvernement se rallie). Les contributions payées pas la femme sont comptées au mari ; celles qui sont payées par les enfants mineurs sont comptées au père, pour parfaire son cens électoral.
« La veuve payant ce cens pourra le déléguer à celui de ses fils qu’elle désignera, pourvu qu’il réunisse les autres qualités requises pour être électeur.
« Le tiers de la contribution foncière d’un domaine rural exploité par un fermier compte au locataire sans diminution des droits du propriétaire. »
M. Dubus. - Je remarque qu’on a inséré dans la loi provinciale une disposition qui me paraît devoir trouver sa place ici ; elle formerait le troisième alinéa de cet article et serait ainsi conçu :
« La déclaration de la mère veuve sera faite à l’autorité communale ; elle pourra toujours être révoquée. »
- L’amendement de M. Dubus est mis aux voix et adopté.
L’article 21 de la section centrale est adopté avec cet amendement.
Les articles 22 et 23 du projet de la section centrale, auxquels le gouvernement se rallie, sont adoptés en ces termes :
« Art. 22. Dans la commune où il n’y a pas 25 électeurs payant le cens requis, ce nombre est complété par les habitants les plus imposés. »
« Art. 23. La liste des électeurs communaux est permanente, sauf les radiations et inscriptions qui peuvent avoir lieu lors de la révision annuelle.
« Aucune radiation ne peut être effectuée d’office par l’autorité communale qu’après avertissement préalable, notifié à la partie intéressée par le ministère d’un agent de la police locale au moins 48 heures avent la clôture définitive des listes. »
M. le président. - La chambre passe à la discussion de l’article 24 de la section centrale auquel le gouvernement se rallie ; il est ainsi conçu :
« Art. 24. Ne peuvent être électeurs ni en exercer les droits les condamnés à des peines afflictives ou infamantes, ceux qui sont en état de faillite déclarée ou interdiction judiciaire ou qui ont fait abandon de leurs biens ; les condamnés, pour vol, escroquerie, abus de confiance, ou attentat aux mœurs ; les individus notoirement connus comme tenant maison de débauche et de prostitution. »
M. Ernst. - C’est sur les derniers mots de l’article 24 du projet de la section centrale que je prends la parole ; ces mots déclarent indignes d’être électeurs les individus notoirement connus comme tenant une maison de débauche et de prostitution.
S’il est possible de constater légalement que des individus tiennent des maisons de prostitution, je crois qu’il est fort juste de les exclure du collège électoral. Celui qui se livre à une profession aussi infâme ne peut pas être appelé à exercer à côté des habitants notables de la commune un droit civique aussi honorable que celui d’élire les membres du conseil d’administration communale.
Mais il est deux choses sur lesquelles j’appellerai l’attention de la chambre, 1° Quel est le fait qui donne lieu à l’indignité ? 2° Comment constaterez-vous le fait et la notoriété du fait ?
Car remarquez-le, messieurs, il faut, pour être déclarés indignes du droit électoral, que les individus tenant des maisons de débauche et de prostitution soient notoirement connus comme tels.
Ces mots : « maisons de débauche » peuvent donner lieu à des difficultés. Quant à tenir des maisons de prostitution il ne peut pas y avoir de doute. S’il m’est permis d’expliquer la portée de cette expression, je dirai qu’elle désigne ce qu’on entend par maisons publiques, par maisons de rendez-vous. Or, on peut comprendre ces deux espèces de maisons dans ces mots : « maisons de prostitution. » Mais quant a l’expression « maisons de débauche, » elle est inutile et peut donner lieu à une interprétation dangereuse. Je sens, messieurs, que cette matière est délicate, et je fais ce qui dépend de moi pour en parler d’une manière digne de l’assemblée.
Qu’entend-on par maison de débauche ? Je désirerais avoir à cet égard une explication de l’honorable rapporteur de la section centrale. (On rit.) Si on peut comprendre les deux espèces de maisons que j’ai désignées dans ces mots : « maisons de prostitution, » dès lors cette expression est suffisante. Car si on recherche le sens du mot débauche, on voit qu’il est tout autre que celui qu’on attache au mot de prostitution. Si on consulte le dictionnaire de l’académie, on voit qu’on entend par débauche « les excès dans le boire et le manger, l’incontinence outrée, les dérèglements. »
Vous voyez donc le danger qu’il y aurait à se servir de cette expression. Voulez-vous que la disposition de cet article soit appliquée aux cabaretiers, aux maisons de réunions nocturnes de personnes des deux sexes, aux maisons où l’on reçoit au-delà de telle heure, et où il est permis de se livrer à des excès de boisson ? Non sans doute, ce n’est pas là ce que vous entendez ; rien ne serait plus arbitraire, rien ne serait plus difficile que de déterminer une maison de débauche. Je crois donc qu’il suffit de dire « maisons de prostitution. »
Voilà pour ce qui regarde le fait ; mais maintenant y a-t-il moyen de constater le fait ?
La patente est un moyen, quoiqu’il soit singulier que la patente qui donne un titre à être électeur devienne indirectement un moyen d’exclusion du droit électoral. Il est à remarquer que la section centrale ne se réfère pas à la patente ; car elle dit : « les individus notoirement connus. » Mais la notoriété, comment l’établirez-vous ?
Ici je dois dire qu’il est scandaleux que d’honorables citoyens se trouvent dans le collège électoral à côté d’hommes flétris par l’opinion. Mais n’est-ce pas mettre le comble au scandale que de faire rechercher si tel individu tient une maison de débauche ou une maison de prostitution ? Voyez où vous conduit la proposition de la section centrale.
Je ne sais si les bourgmestres, qui ont dans leurs attributions la police locale, auront lieu d’être très satisfaits du soin dont vous les chargez ici. A cet égard, comme j’ai déjà eu l’honneur de le dire, j’attends les explications de l’honorable rapporteur de la section centrale.
Je désire qu’on détermine d’une manière précise quelle sera la cause de l’indignité. Lorsqu’un individu sera notoirement connu comme tenant une maison de prostitution, qu’il soit déchu de ses droits d’électeur, fort bien ; mais il ne faut pas qu’il y ait le moindre doute sur l’application de cette espèce de pénalité ; car, remarquez-le, il s’agit ici d’une pénalité réelle, de l’exclusion d’un droit civique. Il faut aussi que nous ayons nos apaisements sur la manière de constater les faits et d’établir leur notoriété.
Si, d’après les explications qui seront données, je trouve qu’on peut dans la pratique arriver à la preuve de cette notoriété, je voterai l’exclusion de ceux qui tiennent des maisons de prostitution ; quant à l’expression « maisons de débauche, » je la crois inutile, dangereuse même. J’en propose la suppression.
M. Dumortier, rapporteur. - L’honorable préopinant m’a demandé des explications sur le sens de la modification proposée par la section centrale au projet du gouvernement ; je les lui donnerai de mon mieux. Je ne suis pas l’auteur de l’amendement, mais je l’accepte très volontiers. L’honorable préopinant et moi sommes parfaitement d’accord sur le fond. Toute la difficulté consiste dans la manière d’établir la notoriété ; c’est au moins la seule qui me paraisse avoir été soulevée. A cet égard je ferai remarquer que la notoriété est exigée par une foule de lois en vigueur. Ainsi l’article 444 du code civil exclut de la tutelle et déclare même destituables, s’ils sont en exercice, les gens d’une inconduite notoire.
L’honorable préopinant a demandé ce que signifient les mots maisons de débauche. Il a dit qu’il ne comprenait point ces expressions. Nous avons pris, messieurs, ces expressions dans les lois en vigueur. La loi du 19 juillet 1791 soumet à la visite les lieux notoirement livrés à la débauche. On conçoit facilement, messieurs, quels sont les motifs qui nous ont déterminés à consacrer dans la loi actuelle les expressions qui existaient dans des lois en vigueur. Tous les individus qui exercent une profession infâme, publiquement infâme, ne doivent pas faire partie du conseil communal ; ils ne doivent pas venir par leur vote créer une majorité.
Mais, demande-t-on, comment constater la notoriété ? Je l’ai déjà dit, le code civil établit la notoriété ; ensuite il existe d’autres moyens de la constater. Vous n’ignorez pas qu’en vertu des lois hollandaises encore en vigueur sur les patentes, les individus tenant des maisons dont il s’agit sont soumis à prendre patente ; en outre elles sont soumises à des visites, et le magistrat communal a des rapports de police à leur égard.
On craint des discussions scandaleuses. On dit que, pour éviter un scandale, on tombera dans un scandale plus grand. Je pense, messieurs, que ces craintes sont plus chimériques que réelles. En effet, devant qui auront lieu les discussions scandaleuses dont on parle ? Elles auront lieu devant des magistrats qui délibèrent en comité secret ; s’il y a réclamation contre la décision, la discussion s’établira également en comité secret devant les états députés.
J’appuie l’amendement de la section centrale d’autant mieux qu’il est arrivé souvent que des personnes, tenant des maisons de prostitution, étaient électeurs par leur patente. Des individus acquéraient le droit à l’un des titres les plus honorables dans un gouvernement constitutionnel, parce qu’ils exerçaient une profession infâme. C’est pour remédier à cet état de choses que nous n’avons pas hésité à proposer la disposition qui vous est soumise ; nous ne voulons point que la contribution que l’on a mise dans l’intérêt de la moralité publique, puisse servir contre la moralité publique.
M. Raikem. - Comme ce qui a été dit pourrait prêter à croire que c’est moi qui ai proposé la disposition dont il s’agit, parce que j’ai fourni quelques documents à la section centrale, je déclare que je ne suis pas l’auteur de l’amendement ; toutefois, je partage cette opinion émise par l’honorable M. Ernst, que s’il est possible d’établir, même d’après les lois en vigueur, quelles sont les personnes tenant des maisons livrées notoirement à la débauché et à la prostitution, nous serons tous d’accord pour dire qu’il y a lieu d’exclure ces individus de la liste électorale. Ce n’est pas du reste sur ce point que je voulais faire quelques observations, c’est sur ces mots : ou qui ont fait abandon de leurs biens.
Je ne sais pas, messieurs, si nous devons adopter cette disposition de l’article, telle qu’elle est rédigée maintenant. On a pu exclure ceux qui sont en état de faillite déclarée, soit comme éligibles, soit comme électeurs ; depuis longtemps, j’ai manifesté mon opinion à cet égard : j’ai soutenu et j’ai proposé dans la loi électorale, discutée au congrès, un amendement d’après lequel les individus en état de faillite déclarée ne devaient être ni éligibles ni électeurs pour les chambres. Sur ce point il n’y a pas eu de difficulté, et l’amendement a été adopté et reproduit dans toutes les lois relatives aux élections.
Il s’agit ici, non pas de ceux qui sont en état de faillite déclarée ; mais de ceux qui ont fait abandon de leurs biens. Cette disposition nécessite quelques explications.
Il existe deux sortes d’abandon de biens : l’abandon volontaire et l’abandon judiciaire.
Je conçois que dans le cas de la cession judiciaire lorsqu’il est constaté qu’un individu n’a pas payé intégralement ses créanciers, on puisse l’exclure de la liste électorale, jusqu’à ce qu’il ait satisfait à ses créanciers ; mais il faut faire une distinction pour l’abandon volontaire. Et, en outre, si l’auteur de la cession a pleinement satisfait à ses créanciers, il n’y a pas lieu à l’exclure des listes électorales. A cet égard donc, l’article peut rencontrer des difficultés dans son exécution.
Je crois que la disposition ne doit pas rester absolument telle qu’elle est ; si on présentait des amendements qui rentreraient dans le sens de mes observations, je m’empresserais de m’y rallier.
M. Ernst. - Si, comme je l’entends dire autour de moi, on n’a point distingué les maisons de débauche des maisons de prostitution, si l’article suppose que dans le cas dont il s’agit un individu ne sera exclu qu’autant qu’il tienne une maison de débauche et de prostitution, la première partie de mon observation reste sans objet.
Relativement à la notoriété, je pense que la chose n’est pas aussi bien éclaircie. L’honorable rapporteur a dit que dans certaines dispositions du code civil il est parlé de l’inconduite notoire ; il a cité l’article 444 où l’inconduite du tuteur devient une cause de destitution de ses fonctions. Vous savez, messieurs, que dans un conseil de famille il ne peut y avoir de scandale : tout le monde s’entend pour conserver intact l’honneur d’un des membres de la famille ; mais, je le demande, en sera-t-il de même pour le cas où celui qui tiendra une maison de la nature de celles dont il s’agit, n’aurait pas fait de déclaration, n’aurait pas pris de patente ?
On parle de notoriété ; mais la notoriété consiste dans une opinion générale sur des faits, dans une opinion incontestée sur ces faits : or, je vous avoue que je vois là matière à difficulté, car comment pourrait-on constater cette opinion générale ? Je pense qu’il faut déterminer d’une manière plus précise comment la disposition pourra être exécutée.
M. A. Rodenbach. - Les maisons dont il s’agit ne peuvent exister sans que préalablement elles aient demandé à l’autorité une permission ; donc il existe une pièce écrite ; cette pièce qui se trouve dans les mains du bourgmestre peut remplacer la notoriété publique, ainsi il est très facile de connaître les maisons ; le dernier des agents de police les connaît.
Je ne vois pas de difficulté à adopter l’amendement de la section centrale.
M. Ernst. - S’il existe une déclaration écrite, il serait inutile de parler de notoriété ; mais l’article suppose qu’à défaut de déclaration, l’exclusion pourra être établie par la notoriété.
M. Milcamps. - Il n’est personne qui ignore que l’on distingue deux sortes de cession de biens, la cession volontaire et la cession judiciaire. La cession de biens judiciaire doit se faire par une déclaration au greffe du tribunal ; dès lors il est facile de savoir qu’il y a abandon de biens judiciaire, mais la cession volontaire ne résulte que de conventions du débiteur avec ses créanciers et cette cession n’a d’effet que ce qui résulte de ces conventions elles-mêmes.
D’après la proposition de la section centrale, on pourrait soutenir que l’abandon de biens, soit volontaire, soit judiciaire, sera une cause d’exclusion. Je propose en conséquence de restreindre l’exclusion à l’abandon de biens judiciaire.
M. Dumortier, rapporteur. - Je ne répondrai que quelques mots sur les objections faites par M. Ernst sur la notoriété. Je ne pense pas qu’il soit plus difficile de constater la notoriété dans le cas dont il s’agit que dans le cas de tutelle : si la notoriété n’est pas établie, la personne ne sera pas privée des droits électoraux ; si la personne prétend que la notoriété est mal fondée, elle en appellera devant les états provinciaux.
La notoriété n’est pas difficile à constater, parce que la police municipale a droit de visite et a des renseignements sur toutes les maisons que les particuliers ouvrent au public. Il importe beaucoup, dans l’intérêt de la morale, de ne pas s’arrêter aux observations faites par l’honorable député de Liège. Si vous écartiez la notoriété, il faudrait repousser l’article 92 du projet de loi proposé par la section centrale. Dans cet article nous vous proposons au bourgmestre et aux échevins la surveillance des personnes et des lieux notoirement livrés à la débauche. On prend maintenant des mesures contre ces personnes et ces lieux, mais on en conteste la légalité ; il faut faire cesser ces doutes : mais comment les faire cesser si vous ne vous en rapportez pas à la notoriété.
Il ne faut pas attendre, pour prendre des mesures contre des personnes qui tiennent des lieux de débauche, qu’elles viennent prendre une patente ; car souvent elles se dispensent de la patente : au reste l’administration communale jugera dans cette affaire comme jury, d’après les faits à sa connaissance, et la discussion de ces faits ne pourra occasionner du scandale. (Aux voix ! aux voix !)
J’aurais quelque chose à dire sur la disposition relative à l’abandon des biens. M. Raikem a attaqué cette disposition ; je crois devoir la défendre. Dans la législation de 89 sur les droits électoraux et d’éligibilité, législation portée par la constituante, on avait rayé des listes électorales ceux qui avaient fait abandon de leurs biens, et ceux qui n’avaient pas payé les dettes de leur père. Je rappellerai à cet égard ce qui se pratique habituellement en France et ce qui commence à se pratiquer en Belgique. Une foule de débiteurs, au lieu de faire faillite, réunissent leurs créanciers et font abandon de leurs biens ; c’est un moyen assez commode de ruiner ses créanciers et de s’enrichir sans encourir le déshonneur ou la sévérité des lois ; dans l’intérêt de la morale, dans l’intérêt du commerce, il faut effacer des listes électorales les noms de tels individus. Dans les Flandres, on commence à en rencontrer un assez grand nombre.
M. Jullien. - J’appuie les observations faites par MM. Raikem et Milcamps. Il faut distinguer la cession judiciaire des biens, dite la cession misérable, d’avec l’abandon volontaire de ses biens.
La cession judiciaire est la cession forcée du débiteur qui ne peut satisfaire ses créanciers. Quant à l’abandon volontaire, c’est un contrat comme un autre ; c’est un contrat passé entre le débiteur et ses créanciers ; c’est un acte de libération du débiteur accepté par le créancier ; et je ne vois pas pourquoi on exclurait des droits électoraux un citoyen qui aurait fait un pareil acte. L’amendement de M. Milcamps doit satisfaire puisqu’il dit que ce sont ceux qui ont fait cession judiciaire qui seront exclus.
Relativement aux observations faites par M. Ernst sur une autre disposition de l’article, je ne suis pas plus qu’un autre en état de vous dire ce que c’est qu’une maison de débauche ou de prostitution ; mais on peut s’entendre sur cela. Le mot débauche a bien des significations selon les sentiments dont on est animé, selon les idées religieuses qu’on admet. D’après certaines idées religieuses on entendra par maison de débauche un cabaret où l’on danse le dimanche.
Il est des gens qui regardent une salle de spectacle comme la maison du diable ; je n’ai pas ces idées ; cependant je ne voudrais pas me trouver côte à côte dans une chambre électorale, avec un homme qui tient une maison de débauche. Il me semble qu’il y a un moyen d’éviter les contestations.
La notoriété publique est une chose assez capricieuse. Dans une ville elle ne peut exister sans une connaissance parfaite de la police ; la police est obligée de prendre sur ses registres des notions certaines sur l’existence de ces maisons ; si une maison n’est pas inscrite sur les registres de la police, c’est qu’il n’y a pas notoriété à son égard. D’après cette observation je crois qu’on pourrait rédiger ainsi la disposition : « Ceux qui, d’après les registres de la police et la notoriété publique, sont connus comme tenant des maisons de débauche et de prostitution ; » de cette manière il n’y aurait plus moyen de douter. Les registres de la police peuvent être consultés par tout le monde. Si une inscription n’était pas fondée, celui qui en serait l’objet pourrait réclamer.
M. Raikem. - Nous sommes tous d’accord sur un point ; nous voulons tous exclure les personnes qui tiennent des maisons de débauche ; il n’y a de difficulté que sur les moyens de constater le fait.
Je ne me propose de parler que sur l’amendement de M. Milcamps. On nous a cité les lois de l’assemblée constituante. Les dispositions qu’on a rappelées sont renfermées dans les articles 5 et 6 de la loi de 89 :
« Art. 5. Aucun banqueroutier, failli ou débiteur insolvable ne pourra être admis dans les assemblées primaires ni devenir ou rester membre, soit de l’assemblée nationale, soit des assemblées administratives, soit des municipalités.
« Art. 6. Il en sera de même des enfants qui auront reçu et qui retiendront, à quelque titre que ce soit, une portion des biens de leur père, sans payer leur part virile de ses dettes ; excepté seulement les enfants mariés, et qui auront reçu des dots avant la faillite de leur père, ou avant son insolvabilité entièrement connue. »
Quant aux banqueroutiers ou aux faillis, il n’y a pas de difficulté ; quant aux débiteurs insolvables, si je consulte la législation postérieure, il me semble que l’on s’est un peu écarté de la loi de l’assemblée constituante. Sans parler de la constitution de l’an 3, j’en trouve la preuve dans la constitution de l’an 8 :
« L’exercice des droits de citoyen français est suspendu par l’état de débiteur failli, ou d’héritier immédiat détenteur à titre gratuit de la succession totale ou partielle d’un failli. »
Quant à la banqueroute, il n’y a pas de difficulté ; je ne trouverais pas encore de difficulté à ce qu’on écartât de la liste des électeurs les débiteurs insolvables. On peut encore écarter ceux qui ont fait des cessions judiciaires, car la preuve de la cession se trouve dans le jugement. Mais pour ceux qui feraient une cession volontaire, qui auraient fait des arrangements avec leurs créanciers, faut-il aussi les exclure ?
Je le concevrais, si on pouvait distinguer le débiteur de mauvaise foi et le débiteur de bonne foi, si on pouvait faire toutes ces distinctions et arriver à un résultat précis et sûr ; j’adopterais la proposition de la section centrale. Elle remplira l’objet que chacun de nous se propose. On peut être insolvable et de plus mauvaise foi que celui qui aurait fait cession judiciaire de ses biens. Je crois donc qu’il y a lieu d’adopter la proposition de M. Milcamps. Si on pouvait présenter une rédaction telle que l’insolvable de mauvaise foi fût privé du droit électoral, je m’y rallierais volontiers, mais je n’ai pas encore rencontré cette rédaction.
M. Quirini. - J’avais demandé la parole pour faire les observations qui ont été présentées par les honorables préopinants ; je ne les répéterai pas. Cependant je pense que l’article peut soulever quelques doutes. Je suppose une personne qui aurait fait cession judiciaire de ses biens et qui, par la suite, aurait soldé le montant de ses dettes. Dans ce cas l’abandon est constaté par jugement. Je demande si cette personne rentre dans l’exercice de ses droits d’électeur. C’est une difficulté qui n’est pas prévue par la loi.
M. Dumortier, rapporteur. - J’avais compris l’objection faite par l’honorable M. Quirini ; je me proposais même de présenter un amendement qui faisait cesser l’inconvénient signalé. Cet amendement est ainsi conçu.
« Ceux qui ont fait abandon de leurs biens, aussi longtemps qu’ils n’ont pas payé intégralement leurs créanciers. »
J’ajouterai maintenant quelques mots pour répondre à ce qu’a dit l’honorable M. Raikem. Il ne voit pas de difficulté, quand le non-paiement résulte d’une autorité judiciaire, mais il en trouve quand cette action n’a pas eu lieu. Je ferai observer que dans les deux cas il est également facile de démontrer à la magistrature communale qu’une personne portée sur la liste ne peut pas y figurer, parce qu’elle n’a pas payé ses créanciers. Que le titre soit judiciaire ou privé, la preuve sera toujours réelle.
Et comme nous avons admis que toute opposition relative à l’exercice des droits électoraux doit être communiquée à la personne qu’elle concerne, si cette personne a quelques objections à faire, il lui sera aussi facile de les présenter, soit que la cession ait été judiciaire ou volontaire.
Il peut y avoir faillite déclarée avec la meilleure foi du monde, pour des défauts très minimes dans la rédaction des livres de commerce. Eh bien, vous les excluriez, tandis que vous ne stipuleriez rien contre des hommes de mauvaise foi qui se débarrassent de leurs créanciers par des transactions qui sont très nuisibles au commerce. C’est moins dans l’intérêt des électeurs que dans l’intérêt du commerce que cette disposition a été proposée ; c’est pour mettre un terme à ce scandale de personnes qui s’enrichissent en abandonnant leurs biens à leurs créanciers. C’est un manège dont les exemples sont de jour en jour plus fréquents.
M. Milcamps. - L’amendement de M. Dumortier tel qu’il est rédigé ne peut être admis, car il ne fait aucune distinction entre l’abandon judiciaire et l’abandon sous seing privé. Si vous ne faites pas cette distinction, ceux qui auront fait un abandon sous seing privé comme ceux qui auront fait un abandon authentique, deviendront l’objet de recherches de la part de l’administration. Tandis que si vous n’admettez que la cession judiciaire, comme elle résulte du dépôt du bilan et de la comparution du cessionnaire, elle ne présente aucune difficulté. Alors la restriction de M. Dumortier devrait être une addition à l’amendement que j’ai déposé.
M. Dubus. - Je ne vois pas de raison pour faire une distinction entre la cession judiciaire et celle qui ne l’est pas. Qu’est-ce que la cession ? C’est l’abandon qu’un débiteur fait de ses biens à ses créanciers, quand il se trouve hors d’état de payer ses dettes. Elle est volontaire ou judiciaire. Mais, dans l’un et l’autre cas, elle a le même caractère, puisque le débiteur est insolvable.
Vous ne voulez pas que celui qui a fait une cession judiciaire puisse jouir du droit d’électeur, pourquoi accorder ce droit à celui qui a fait une cession volontaire ? Quand la cession est volontaire, c’est qu’on a fait valoir aux créanciers que s’ils ont recours à la justice, dame justice dévorera tout et qu’il ne leur restera rien à partager. Cette considération leur fait donner les mains à une cession volontaire afin d’éviter les frais de justice. La plus grande partie des insolvables échapperont à la disposition, avec la distinction de M. Milcamps.
Quand les dettes sont intégralement payées, d’après la rédaction même, il n’y a plus lieu à l’application de la loi.
Mais, dit-on, comment reconnaîtra-t-on la cession volontaire ? La cession volontaire ne se fait pas qu’il n’y ait un acte. Si cet acte demeure secret, on ne pourra pas appliquer la disposition, et il ne sera secret qu’autant que tous les créanciers le voudront ainsi.
Il suffira qu’un seul créancier vienne produire le titre à l’administration municipale qui, armée de ce titre, raiera l’électeur. Il ne faut pas se faire illusion sur ces cessions volontaires, presque toujours le consentement des créanciers est arraché par la crainte des frais de justice. Ceux qui auront subi une perte considérable ne manqueront pas d’employer les moyens qui seront à leur disposition pour témoigner à leur débiteur l’estime qu’ils ont pour lui, ils ne manqueront pas de produire le titre de leur créance, pour lui interdire le droit électoral. Je pense donc qu’il y a lieu de maintenir la disposition avec l’amendement de M. Dumortier.
M. Pollénus. - L’amendement de M. Jullien suppose l’existence de livres de police sur lesquels seraient inscrites les maisons de prostitution. Je crois pouvoir assurer qu’il n’existe pas de loi exigeant la tenue de semblables registres ; par conséquent, il est impossible d’admettre un amendement qui suppose l’existence de ces registres. Je pense que dans les grandes villes il existe des registres semblables ; mais ils existent en vertu de règlements locaux et non en vertu des lois. Je crois être certain que dans beaucoup de grandes villes de la Belgique, ces règlements n’existent pas. Ainsi l’amendement de M. Jullien ne peut être admis puisqu’il suppose un moyen de preuve qui n’est pas légalement reconnu.
M. Raikem. - Je demande pardon à la chambre de prendre de nouveau la parole. Je commencerai par dire que, quant aux motifs, je suis d’accord avec les préopinants que la cession volontaire peut dans certains cas avoir le même caractère que la cession judiciaire. Quant à la preuve qu’on en peut fournir, il me semble qu’il serait singulier que l’admission ou le retranchement d’un électeur dépendît de ce qu’une personne ferait ou ne ferait pas usage d’une pièce. Il n’en est pas de même de la cession judiciaire. Les registres où elle est inscrite sont ouverts à toutes les autorités administratives ; on peut se convaincre du fait, et écarter celui qui dans ce cas se présenterait pour être électeur.
Pour ce qui est de la cession volontaire, l’article 1266 du code civil porte : « La cession de biens est volontaire ou judiciaire. »
« Article 1267. La cession de biens volontaire est celle que les créanciers acceptent volontairement, et qui n’a d’effet que celui résultant des stipulations mêmes du contrat passé entre eux et le débiteur. »
La loi n’exige donc pas un acte authentique. Ainsi, l’acte pourrait être fait sous seing privé. Il dépendrait donc du détenteur de l’acte de cession volontaire de le produire ou de ne pas le produire. Il serait maître de décider de la capacité d’électeur de son débiteur.
D’un autre côté je n’ai pas sous les yeux la loi du 25 ventôse an XI, qui prescrit de ne délivrer copie des actes notariés qu’aux personnes intéressées, aux créanciers, ou à leurs héritiers, sauf le cas où il y aurait compulsoire. Je suis particulièrement frappé de l’inconvénient qu’il y aurait à ce que le retrait de la qualité d’électeur ne dépendît pas de l’autorité publique, mais fût à la discrétion du créancier. Je voudrais que les listes électorales pussent être toujours complétées sans le secours de personne.
Dans l’article en discussion, tous les motifs d’exclusion, à l’exception de celui de la cession de biens, sont constatés par des actes publics. Je voudrais que cette exception disparût. Jusqu’à ce que l’on m’ait démontré que je suis dans l’erreur, je croirai que l’exclusion ne devrait s’appliquer qu’à la cession judiciaire.
M. Dumortier, rapporteur. - Je ne m’oppose pas à ce que le mot abandon soit remplacé par celui de cession qui est plus légal.
- L’amendement de M. Dumortier est mis aux voix et adopté.
L’amendement de, M. Milcamps est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
M. Jullien. déclare retirer son amendement.
- L’ensemble de l’article 24 est mis aux voix et adopté.
M. le président. - L’article 29 du gouvernement est ainsi conçu :
« Du 1er au 31 décembre de chaque année, le collège des bourgmestre et échevins dresse dans chaque commune une liste des citoyens ayant droit de concourir à l’élection des membres
« Cette liste est d’abord formée sur les rôles du receveur des contributions payées dans la commune : elle indique la quotité du cens requis pour être électeur. »
La section centrale propose (art. 25)
« Du 1er au 15 avril de chaque année, le collège des bourgmestre et échevins procède à la révision de la liste des citoyens qui, d’après la présent loi, réunissent les conditions requises pour concourir à l’élection des membres du conseil communal.
« Cette liste est d’abord formée sur les rôles du receveur des contributions payées dans la commune : elle indique la quotité du cens requis pour être électeur. »
- M. le ministre de l'intérieur se ralliant à l’amendement de la section centrale, cet amendement est mis aux voix et adopté.
M. le président. - L’article 30 du gouvernement est ainsi conçu :
« Le collège arrête la liste des électeurs et la fait afficher aux lieux ordinaires pour le premier dimanche du mois de janvier ; la liste reste affichée pendant 15 jours, et contient en regard du nom de chaque individu inscrit, ses prénoms, la date de sa naissance et la nature de ses contributions, jusqu’à concurrence du cens requis pour être électeur. »
La section centrale propose (article 26) :
« Le collège susdit arrête la liste et la fait afficher aux lieux ordinaires, le premier dimanche suivant ; elle reste affichée pendant dix jours et contient, en regard du nom de chaque individu inscrit, ses prénoms, le lieu et la date de sa naissance, la date de sa naturalisation s’il n’est pas né Belge, et le montant des contributions par lui payées dans la commune.
« La liste contient en outre invitation aux citoyens qui croiraient avoir des réclamations à former, de s’adresser à cet effet à l’autorité locale dans le délai de quinze jours, à partir de la date de l’affiche qui doit indiquée le jour où ce délai expire.
« Un double de la liste est déposé au secrétariat de la commune, et doit être communiquée à tout requérant. »
- M. le ministre de l'intérieur se ralliant à l’article proposé par la section centrale, cet article est mis aux voix et adopté.
Articles 31 et 32 (du projet du gouvernement) et article 27 (du projet de la section centrale)
M. le président. - Les articles 31 et 32 du gouvernement sont ainsi conçus :
« Toute réclamation contre la composition des listes doit être, avant le 1er février, présentée, sous peine de déchéance, au conseil municipal, qui prononcera dans le délai de dix jours, et fera notifier dans le même délai sa décision aux parties intéressées.
« La notification se fait par un officier de police, ou garde-champêtre, au moyen de cette simple formule mise au bas de la décision :
« Soit notifié à …
« Fait à …, le …
« Et signé… »
« Art. 32. Tout individu indûment inscrit, omis, rayé, ou autrement lésé, dont la réclamation n’aurait pas été admise par l’administration communale, peut en appeler à la députation permanente du conseil provincial, en joignant les pièces à l’appui de sa réclamation.
« De même, tout individu jouissant des droits civils et politiques peut réclamer dans le même délai contre chaque inscription indue, le réclamant joindra à sa réclamation la preuve qu’elle a été par lui notifiée à la partie intéressée, laquelle aura dix jours pour y répondre, à partir de celui de la notification.
La section centrale propose l’article 27 suivant :
« Tout habitant de la commune jouissant des droits civils et politiques peut réclamer contre la formation de la liste. Cette réclamation doit, à peine de déchéance, être présentée au conseil de régence avant l’expiration du délai fixé par l’article précédent ; elle sera faite par requête à laquelle devront être jointes les pièces à l’appui. Il en sera donné récépissé par un membre de l’administration communale ou par le secrétaire.
« Si la réclamation porte sur une inscription indue, l’autorité communale la fera notifier dans les trois jours au plus tard à la partie intéressée qui aura dix jours pour y répondre.
« Le conseil de régence prononce dans les dix jours, à compter de celui où la requête aura été déposée s’il s’agit d’une inscription indue ou d’une radiation, et de la réponse ou du délai pour répondre s’il s’agit d’une inscription indue. La décision intervenue sera notifiée dans les trois jours aux parties intéressées.
« La notification sera faite à la requête du bourgmestre et par le ministère d’un agent de la police locale ; elle indiquera les jour, mois et an, les nom et qualité de l’agent chargé de la signifier, et mentionnera la personne à laquelle elle sera laissée.
« La décision notifiée, les pièces déposées devront, dans les 24 heures, à partir de la demande, être remises contre récépissé à ceux qui en auront fait le dépôt.
- M. le ministre de l'intérieur se ralliant à la rédaction de la section centrale, l’article 27 est mis aux voix et adopté.
M. le président. - L’article 28 du projet de la section centrale est ainsi conçu :
« Les noms des électeurs qui auront été admis par les administrations communales, lors de la clôture définitive de la liste, sans avoir été portés sur la liste affichée, seront publiés par de nouvelles affiches, dans le délai de 48 heures à dater de cette clôture. »
- Cet article est mis aux voix et adopté.
M. le président. - L’article 33 du projet du gouvernement est ainsi conçu :
« La députation permanente du conseil provincial statuera sur ces demandes, dans les cinq jours après leur réception, ou dans les cinq jours après l’expiration du délai d’opposition à la réclamation ; si la demande est faite contre un tiers, les décisions seront motivées.
« La communication de toutes pièces sera donnée sans déplacement aux parties intéressées qui le requerront ou à leurs fondés de pouvoirs.
« Les décisions seront immédiatement notifiées aux parties intéressées, et au commissaire du district pour faire les rectifications nécessaires.
« Toutes les réclamations et tous les actes y relatifs pourront être sur papier libre et seront dispensés de l’enregistrement ou enregistrés gratis. »
La section centrale propose l’article 29, ainsi conçu :
« La partie qui se croira lésée par la décision du conseil de régence pourra, dans le délai de dix jours, à partir de celui de la notification, se pourvoir en appel devant la députation permanente du conseil provincial.
« Le pourvoi se fera par requête présentée à la députation et préalablement notifiée à la partie intéressée s’il en existe ; le fonctionnaire qui reçoit la requête sera tenu d’en donner récépissé.
« La députation provinciale statuera sur la pourvoi dans le délai de dix jours, à dater de la réception de la requête ; la décision sera motivée.
« Il sera donné, sans déplacement, communication de toutes pièces, soit aux parties intéressées, soit à leurs fondés de pouvoir.
« Les décisions seront immédiatement notifiées aux parties intéressées, et à l’autorité communale, pour qu’il soit procédé, s’il y a lieu, aux rectifications nécessaires.
« Toutes les réclamations et tous les actes y relatifs, pourront être sur papier libre, et seront dispensés de l’enregistrement ou enregistrés gratis. »
- M. le ministre de l'intérieur se ralliant à la rédaction de la section centrale l’article 29 est mis aux voix et adopté.
L’article 30 de la section centrale, auquel le gouvernement se rallie, est adopté en ces termes :
« Le recours en cassation sera ouvert contre les décisions de la députation permanente du conseil provincial.
« Les parties intéressées devront se pourvoir dans les cinq jours, à partir de celui de la notification.
« La déclaration sera faite en personne ou par fondé de pouvoir au greffe du conseil provincial. Le greffier recevra la déclaration du recours, et en dressera immédiatement acte, lequel sera signé pas la partie et le greffier. Si la partie ne peut signer, il en sera fait mention.
« Dans le cas où la déclaration serait faite par un fondé de pouvoir spécial, la procuration demeurera annexée à cette déclaration, qui sera inscrite, par le greffier sur un registre à ce destiné ; ce registre sera publié, et toute personne aura le droit de s’en faire délivrer des extraits.
« Le greffier enverra immédiatement la déclaration et les pièces à l’appui au procureur général près la cour de cassation, en y joignant un inventaire.
« Le pourvoi sera par le déclarant, et sous peine de déchéance, notifié dans les cinq jours à celui contre lequel il est dirigé.
« Il sera procédé sommairement, et toutes affaires cessantes, avec exemption des frais de timbre, d’enregistrement et d’amende ; si la cassation est prononcée, l’affaire sera renvoyée à une autre députation provinciale. »
M. le président. - La chambre passe à la section II.
M. le président. - « Art. 31 du projet de la section centrale (auquel le gouvernement se rallie) :
« La réunion ordinaire des électeurs, à l’effet de procéder au remplacement des conseillers sortants, aura lieu de plein droit, de trois en trois ans, le dernier mardi d’octobre, à dix heures du matin.
« Néanmoins, si, dans l’intervalle, le conseil se trouve réduit aux deux tiers de ses membres, une convocation extraordinaire aura lieu dans le délai de quinzaine. »
M. H. Dellafaille - Si on adoptait cet article tel qu’il est proposé par la section centrale, il en résulterait, ce me semble, des inconvénients réels.
Par un précédent article, vous avez décidé que les membres du conseil qui donneraient leur démission devraient continuer leurs fonctions jusqu’à ce qu’il eût été procédé à leur remplacement. Dès lors, si comme on le propose dans cet article, les élections n’ont lieu que tous les trois ans, il faudra qu’un conseiller qui aura donné sa démission au bout d’une année de ses fonctions, les conserve encore pendant deux ans. Je pense qu’il faudrait rétablir le deuxième paragraphe de l’article du gouvernement afin que tous les ans l’assemblée des électeurs pourvût aux vacatures survenues par suite de démissions ou autres causes.
M. Dumortier, rapporteur. - Je ne pense pas qu’il y ait de difficulté à adopter cet article tel qu’il est proposé par la section centrale ; et je ne crois pas qu’on doive rétablir le deuxième paragraphe du projet du gouvernement.
Le but que la section centrale s’est proposé dans cet article a été d’empêcher des élections trop fréquentes qui finiraient par fatiguer les électeurs. Les élections de la chambre ont lieu tous les deux ans, puisque tous les deux ans la chambre est renouvelée par moitié, indépendamment des élections partielles pour promotion d’un membre à des emplois publics ou pour toute autre cause. Les élections du conseil provincial se font tous les deux ans. Il y a en outre les élections des régences et de la garde civique.
S’il y a toujours élections sur élections, les électeurs se dégoûteront, ils n’y prendront plus part ; et assurément ce sera un inconvénient bien plus fâcheux que celui signalé par l’honorable préopinant. Dans certaines localités les élections resteront abandonnées à quelque coterie ; or, lorsqu’il y a des élections, il faut qu’elles représentent l’opinion publique.
Tels sont les motifs qui ont déterminé la section centrale à vous proposer que les élections n’aient pas lieu hors du terme habituel de 3 années. Nous avons cependant admis une exception, c’est le cas où le conseil communal se trouverait réduit aux 2/3 de ses membres. Tant qu’il ne sera pas réduit à ce nombre, nous avons considéré les élections comme inutiles, comme dangereuses en ce que leur fréquence fatiguerait, dégoûterait les électeurs.
M. de Theux. - Les observations qui viennent d’être faites par les deux honorables préopinants, me paraissent fondées de part et d’autre ; il s’agit de chercher à les concilier.
L’honorable M. Dumortier craint que des élections trop fréquentes ne fatiguent les électeurs, je crois que cette crainte est fondée ; mais il y a une autre circonstance qu’il faut prévoir. D’après la décision de la chambre, les bourgmestre et échevins doivent être pris dans le conseil. Eh bien, supposez que le bourgmestre et les échevins donnent leur démission après un an de fonctions ; malgré cela, avant 3 ans, c’est-à-dire de 2 ans encore à dater de la démission, les élections ne pourront avoir lieu d’après la proposition de la section centrale.
Je crois que dans ce cas le gouvernement pourrait être très embarrassé pour choisir des successeurs à ces bourgmestre et échevins démissionnaires. Je pense qu’il faut prévoir ce cas de convocation extraordinaire et ajouter au projet de la section centrale une disposition par laquelle on autoriserait le gouvernement à convoquer le collège électoral lorsqu’il serait nécessaire de pourvoir à des places vacantes.
M. H. Dellafaille - Vous avez dit dans l’article 18 : « Les membres sortants ou démissionnaires continuent leurs fonctions jusqu’à ce que les pouvoirs de leurs successeurs aient été vérifiés. » Et dans l’article 19 : « Lorsqu’une place de membre du conseil vient à vaquer, il y est pourvu à la plus prochaine réunion des électeurs. »
Si maintenant vous décidez que les élections n’auront lieu que tous les trois ans, évidemment vous forcez un membre qui a donné sa démission au bout d’un an de fonctions à siéger dans le conseil pendant deux ans encore après sa démission.
Hier, vous avez décidé que les membres du collège communal n’avaient besoin de l’autorisation de personne pour donner leur démission. L’article proposé est en contradiction formelle avec cette décision.
Je ne pense pas que la proposition du gouvernement multiplie trop les élections ; je ferai remarquer qu’il ne s’agit pas de réunions au chef-lieu de district, comme pour des membres des deux chambres, qu’il ne s’agit pas même de réunions au chef-lieu de canton pour l’élection des membres du conseil provincial, mais de simples réunions dans la commune ; lesquelles n’occasionneront pour ainsi dire aucun déplacement aux électeurs, Je ne crois pas que ce soit les rendre trop fréquentes que de décider qu’elles auront lieu tous les ans.
M. Dumortier, rapporteur. - Je ne comprends pas la contradiction qu’on prétend établir entre cet article et ceux déjà votés. Il est vrai que vous avez admis que les membres du conseil communal resteraient en fonctions jusqu’à ce qu’ils aient été remplacés ; mais qu’est-ce que cela prouve ? s’agit-il de démissions de bourgmestres et échevins ; comme ils sont nommés par le Roi, l’élection n’y fait rien. S’agit-il de démission de conseil communal : il n’y a pas de sanction dans votre loi ; vous ne pouvez pas forcer le membre démissionnaire à prendre part aux délibérations du conseil, votre décision est donc de nul effet. La proposition du gouvernement ne remédie donc à aucun inconvénient et a celui très grand de multiplier beaucoup les élections.
L’honorable M. de Theux, qui sans doute va présenter un amendement, prétend que si le bourgmestre et les échevins donnent leur démission, il sera souvent impossible au gouvernement de les remplacer. Mais ce lui sera très facile ; car la démission de bourgmestre et d’échevins ne diminue pas d’un seul membre le conseil communal. Il n’y a pas, par suite de ces démissions, de vacatures dans le sein du conseil communal. La proposition de l’honorable M. de Theux repose donc sur une erreur, il voudrait que le gouvernement fût autorisé à convoquer extraordinairement le collège électoral, quand il le jugerait nécessaire ; or, c’est là ce que je repousse. Il ne faut pas que le gouvernement puisse à son gré et suivant ses intérêts faire faire des élections.
Je crois que la proposition de la section centrale suffit à tous les besoins, et qu’elle offre bien moins d’inconvénients que les deux amendements proposés par MM. H. Dellafaille et de Theux.
M. de Theux. - Voici l’amendement que je proposerai :
Supprimer le mot « néanmoins » qui se trouve au commencement du deuxième alinéa de l’article de la section centrale, et ajouter un troisième alinéa ainsi conçu :
« Néanmoins, l’assemblée des électeurs pourra être convoquée extraordinairement par décision du gouvernement, lorsque, dans l’intervalle, le bourgmestre et ses échevins auront donné la démission de leurs fonctions. »
J’ajouterai quelques développements à ceux que j’ai déjà donnés. L’honorable M. Dumortier a dit que la démission des bourgmestre et échevins ne créait pas de vacatures dans le conseil ; cela est juste ; mais il y a les places de bourgmestre et d’échevins qui sont vacantes et auxquelles il est nécessaire de pourvoir. Comme on l’a dit, il pourra se rencontrer dans le conseil des membres (et peut-être sera-ce le plus grand nombre), ou qui ne voudront pas remplir ces fonctions ou qui ne réuniront pas les qualités nécessaires. Dès lors vous devez donner au gouvernement la faculté de convoquer le collège échevinal.
M. Dumortier, rapporteur. - Il n’y aura pas des vacances.
M. de Theux. - Il résulte des termes mêmes de l’article qu’il y aura des places vacantes, puisque le conseil sera convoqué pour pourvoir à ces vacances.
M. H. Dellafaille propose l’amendement suivant : « L’assemblée des électeurs pourra être convoquée extraordinairement, afin de pouvoir aux places vacantes. »
M. Jullien. - Je m’opposerai à tous les amendements pour en revenir à la rédaction du gouvernement. Il me semble que cette rédaction satisfait à toutes les opinions qu’on a émises. Remarquez que, dans les deux rédactions du gouvernement et de la section centrale, les deux premiers paragraphes sont les mêmes. On est d’accord que, tous les 3 ans, il y aura réunion obligatoire du collège des électeurs.
D’après le deuxième paragraphe de l’article du gouvernement, on pourra convoquer l’assemblée des électeurs pour pourvoir aux places de conseiller devenues vacantes par démission, décès ou autre cause ; cela est seulement facultatif. Ainsi si le service n’en souffre pas, les administrations communales, qui sentent comme l’honorable rapporteur l’inconvénient de multiplier les réunions des collèges communaux, ne s’assembleront pas ; si le service en souffre par des considérations senties par les autorités communales ou provinciales, on provoquera à une réunion des électeurs pour pourvoir aux places vacantes. Maintenant voyez dans quelle position on mettrait le gouvernement en cas de démission d’un bourgmestre si on adoptait le deuxième paragraphe de l’article de la section centrale.
D’après ce paragraphe il faudrait attendre que le conseil se trouve réduit aux deux tiers de ses membres, pour pourvoir aux vacances qui surviendraient dans l’intervalle de trois années ; si le bourgmestre donne sa démission le choix du Roi se trouve restreint aux deux tiers des conseillers, et par conséquent il y a un tiers du conseil dans lequel le choix du Roi ne peut s’exercer.
Lorsque vous avez voulu que le bourgmestre fût choisi dans le sein du conseil, vous avez voulu que le conseil fût aussi complet que possible, afin que le Roi pût choisir le membre qui lui conviendrait le mieux ; il y a donc inconvénient à ce que le Roi ne puisse choisir que dans les deux tiers du conseil.
M. Dubus. - Je ne vois pas les graves inconvénients qui ont été signalés par la section centrale et par son rapporteur sur la fréquence des élections municipales.
Remarquez que la proposition du gouvernement rend assez rares les élections ordinaires, qui auraient lieu tout au plus d’année en année : de sorte que même s’il y a beaucoup de décès, de démissions, ou d’autres causes de vacatures, vous n’aurez jamais qu’une seule élection municipale par année. Je demande si cela est si fort à craindre, si cela présente un si grave inconvénient.
Il est des élections qui ne peuvent être rendues trop fréquentes sans inconvénient ; mais ce ne sont pas les élections municipales.
Les élections pour la chambre des représentants ou le sénat obligent les électeurs du district à se déplacer. Il y a pour cela des élections ordinaires tous les 4 ans, et il peut y avoir des élections extraordinaires à toutes époques de l’année. Tous les électeurs dans ce cas de réunion doivent faire le voyage de leur domicile au chef-lieu du district ; à cela il y a un inconvénient qui cependant a dû céder devant des considérations plus importantes.
De même pour remplir les vacatures aux conseils provinciaux, les électeurs doivent se transporter au chef-lieu de canton ; l’inconvénient est moindre, mais il y a toujours inconvénient. Mais lorsqu’il s’agit d’élections municipales, on ne dérange personne : chacun est sur le lieu même de la réunion, chacun domicilié dans l’endroit n’a pas plus de chemin à faire que pour aller à l’hôtel-de-ville ou à la maison commune.
Ce que je regarderais comme un événement beaucoup plus grave, ce serait d’obliger un démissionnaire à continuer l’exercice de ses fonctions municipales pendant 2 ans, pendant près de 3 ans ; on dit que ce démissionnaire n’est plus au conseil, mais alors le conseil sera incomplet, et c’est aussi un grave inconvénient pour les intérêts de la commune.
Vous n’avez établi pour le conseil communal que le nombre de membres nécessaire pour le composer. Il faut que les places qui y deviendraient vacantes soient remplies dans un moindre intervalle que celui qui pourrait se présenter.
Quant à l’amendement de M. de Theux, je le comprends, mais je ne le trouve pas juste. M. de Theux ne considère pour rien les intérêts de la commune et semble ne voir que l’intérêt du gouvernement auquel seul il accorde le droit de faire compléter le conseil, s’il le juge convenable, afin de procéder ensuite au choix d’un membre du collège. Je crois que cette disposition est trop étrange pour qu’elle obtienne la faveur de la chambre.
M. Devaux. - Je crois qu’on ne peut admettre la proposition de la section centrale sans modification.
Si la disposition de la section centrale se rapportait seulement au cas de décès des conseillers, elle présenterait peu d'inconvénient. Je crois que, pour quelque temps, il n’est pas d’une grande importance que le conseil soit compose de 28 ou de 30 membres ; mais le paragraphe se rapporte aussi au cas de décès du bourgmestre, et cela est d’une plus haute importance.
On dit que si les bourgmestres ou les échevins donnent leur démission, ils rentreront dans le conseil comme simples conseillers, et qu’ainsi le conseil sera complet ; mais, en cas de décès, le conseil sera incomplet, et remarquez que les bourgmestres et les échevins sont les hommes les plus éclairés du conseil. Ensuite, s’il y a lieu à une nomination, vous ne mettez pas le conseil dans la position où il doit être ; s’il y a lieu à une nomination du bourgmestre ou si le conseil doit désigner les candidats aux places vacantes d’échevin, il faut que le conseil soit complété, et cela dans l’intérêt d’une bonne administration, dans l’intérêt de la commune, comme dans l’intérêt du gouvernement.
Je crois qu’on pourrait modifier la proposition de la section centrale de la manière suivante :
« Le conseil pourra toujours être complété avant que le gouvernement procède à la nomination du bourgmestre et avant que le conseil désigne les candidats aux places vacantes d’échevin. »
Quant à la proposition du gouvernement je ne la trouve pas bonne ; je ne sais pas pourquoi on attendrait, pour la réunion extraordinaire des électeurs, la même époque que pour la réunion ordinaire : il peut y avoir ainsi près d’une année entre la réunion et la vacance ; je crois au contraire que l’époque de la convocation doit être le plus rapprochée possible de la vacance. J’ajouterai qu’il ne faut pas laisser au gouvernement le droit d’ordonner les élections dans tel ou tel endroit, et de ne pas les ordonner dans d’autres localités. Car il peut y avoir négligence de la part du gouvernement.
M. Dumortier, rapporteur. - Messieurs, j’ai demandé la parole pour soutenir le texte proposé par la section centrale ; cependant je me réunirai volontiers à la proposition faite par M. Devaux.
Cet honorable membre vous a fait observer qu’il fallait compléter le conseil communal afin que le Roi pût choisir le bourgmestre et les échevins ; il ne fait pas en effet que le Roi choisisse dans un demi ou un tiers de conseil. Quant à l’amendement présenté par M. de Theux, je le combats. Par la démission du bourgmestre et des échevins, il n’y a pas pour cela vacature dans le conseil ; l’amendement de cet honorable membre est donc sans effet puisque le conseil est toujours complet... On me dit que l’amendement de M. de Theux a été modifié ; je n’ai pu parler que sur la proposition dont j’ai entendu la lecture.
M. le président. - Voici le nouvel amendement présenté par M. de Theux : « Néanmoins l’assemblée des électeurs pourra être convoquée extraordinairement en vertu d’une décision du conseil de régence ou du gouvernement, à l’effet de pourvoir aux places de conseillers devenues vacantes. »
M. Dumortier, rapporteur. - L’amendement de M. Devaux me paraît plus simple. Il faut compléter le conseil afin que le Roi puisse choisir.
Il importe peu à une commune que quelques conseillers manquent ; mais ce qui lui importe, c’est qu’on ne fasse pas plusieurs élections chaque année. Si on abuse du pouvoir électoral, on l’anéantira.
Je vois qu’on demande la convocation de l’assemblée électorale ; mais qui la convoquerai ?
M. Jullien. - Le bourgmestre.
M. Dumortier, rapporteur. - Ainsi le bourgmestre décidera quand il sera convenable de convoquer le conseil ; cela ne se peut pas.
M. de Theux. - C’est bien gratuitement que M. Dubus a supposé que je proposais mon amendement dans l’intérêt du pouvoir ; j’ai montré que c’était aussi dans l’intérêt de la commune : en effet il est de son intérêt qu’elle puisse présenter les candidats les plus dignes de remplir les fonctions de bourgmestre et d’échevins. Par mon amendement qui est ainsi conçu :
« Néanmoins des électeurs pourra être convoquée extraordinairement en vertu d’une décision du conseil de régence, ou du gouvernement, à l’effet de pourvoir aux places de conseillers devenues vacantes, »
Par cet amendement, dis-je, vous assurez le double intérêt de la commune et du gouvernement ; l’un et l’autre peuvent avoir intérêt à ce qu’il n’y ait aucune place vacante, et pour le choix du bourgmestre et des échevins, et pour ne pas déplacer la majorité du conseil. Je crois que mon amendement prévient tous les inconvénients.
M. H. Dellafaille - Je retire mon amendement et me réuni à la proposition faite par M. de Theux.
M. Verdussen. - Je me réunis également à la proposition de M. de Theux ; dans la rédaction de la section centrale, il y a beaucoup à désirer... (Aux voix ! aux voix !)
M. Dubus. - Je crains que la chambre ne soit plus en nombre.
M. le président. - On vient de compter le nombre des membres présents ; nous sommes en nombre.
- L’amendement de M. de Theux mis aux voix est adopté.
L’article 31 amendé est adopté dans son ensemble.
M. le président. - Les articles 36 et 37 du projet du gouvernement sont ainsi conçus :
« Art. 36. Dans les cas prévus par l’article précédent, les électeurs seront convoqués par le bourgmestre de la manière suivante :
« Art. 37. La convocation sera faite à domicile et par écrit six jours au moins avant celui de l’assemblée ; elle indiquera le lieu, l’heure et le motif de la réunion. La convocation sera faite en outre un jour de dimanche, selon les formes usitées, et à l’heure ordinaire des publications. »
La section centrale propose un seul article (32), pour remplacer les articles 36 et 37.
« Le collège des bourgmestres et échevins convoque les électeurs à domicile et par écrit, six jours au moins avant celui de l’assemblée ; la convocation est en outre publiée selon les formes usitées et à l’heure ordinaire des publications.
« Les lettres de convocation sont envoyées aux électeurs sous récépissé ; elles indiquent le nom, l’heure et le local où l’élection aura lieu, ainsi que le nombre de conseillers à élire. »
- Cet article est adopté sans discussion.
M. le président. - « Article 38 (du projet du gouvernement). Les électeurs se réunissent en une seule assemblée, si leur nombre n’excède pas 400.
« Lorsqu’il y a plus de 400 électeurs, le collège se divise en sections dont chacune ne peut être moindre de 200 et sera formée par les sections de la commune les plus voisines entre elles.
« La division des électeurs en sections sera faite par le collège des bourgmestre et échevins qui en donnera connaissance par des billets de convocation.
« Chaque section concourt directement à la nomination des conseillers que le collège doit élire. Les électeurs ne peuvent se faire remplacer. »
La section centrale propose de remplacer cet article par le suivant :
« Art. 33. Les électeurs se réunissent en une seule assemblée, si leur nombre n’excède pas 400.
« Lorsqu’il y a plus de 400 électeurs, le collège se divise en sections dont chacune ne peut être moindre de 200, et sera formée par les sections ou fractions de section de la commune les plus voisines entre elles.
« La division des électeurs en sections se fait par le collège des bourgmestre et échevins qui en donne connaissance dans les lettres de convocation.
« Chaque section concourt directement à la nomination des conseillers que le collège doit élire.
« Les électeurs ne peuvent se faire remplacer. »
- Cet article de la section centrale est adopté sans discussion.
M. le président. - « Art 34. Les collèges électoraux ne peuvent s’occuper que de l’élection des conseillers. »
- Adopté.
M. le président. « Art. 35 (remplaçant les articles 39, 40, 41, 42 et 43 du gouvernement). Le bourgmestre, ou, à son défaut, l’un des échevins suivant l’ordre de leurs nominations, et, à défaut de bourgmestre et échevins, l’un des conseillers des régences, suivant leur rang d’inscription au tableau, préside le bureau principal ; les quatre membres du conseil de régence les moins âgés remplissant les fonctions de scrutateurs ; si le nombre prescrit de scrutateurs ne peut être rempli au moyen des conseillers, il est complété par l’appel des plus imposés des électeurs présents sachant lire et écrire.
« S’il y a plusieurs sections, la deuxième et les suivantes sont présidées par l’un des échevins suivant leur rang d’ancienneté, ou, à défaut des échevins, par l’un des conseillers de régence suivant leur ordre d’inscription au tableau. Les quatre plus imposés des électeurs présents sachant lire et écrire sont scrutateurs.
« Chaque bureau nomme son secrétaire, soit dans le collège électoral, soit en dehors ; le secrétaire n’a point voix délibérative.
« Toute réclamation contre l’appel d’un électeur désigné à raison de son âge ou de la quotité de ses impositions pour remplir les fonctions de scrutateur, doit être présentée avant le commencement des opérations ; le bureau en décide sur-le-champ et sans appel.
« Dans aucun cas, les membres sortants du conseil de régence ne pourront faire partie du bureau, à quelque titre que ce soit. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 36. La députation du conseil provincial pourra, dans des circonstances extraordinaires dont il sera fait mention au procès-verbal d’élection, commettre une ou plusieurs personnes pour présider les bureaux, ainsi que pour diriger et faire exécuter les opérations préliminaires aux élections. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 37. Le président du collège ou de la section a seul la police de l’assemblée ; les électeurs du collège y sont seuls admis sur l’exhibition de leurs lettres de convocation, ou d’un billet d’entrée délivré par le président du collège ou de la section ; en cas de réclamation le bureau décide. Ils ne peuvent s’y présenter en armes.
« Nulle force armée ne peut être placée, sans la réquisition du président, dans la salle des séances ni aux abords du lieu où se tient l’assemblée.
« Les autorités civiles et les commandants militaires sont tenus d’obéir à ses réquisitions. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 38. La liste officielle des électeurs du collège ou de la section sera affichée dans la salle de réunion.
« Le premier paragraphe de l’article 37, les articles 38, 40, 44, 45, 48, 51 et 52 de la présente loi et les articles 111, 112 et 113 du code pénal, seront affichés à la porte de chaque salle en gros caractères.
« A l’ouverture de la séance, le secrétaire, ou l’un des scrutateurs donnera lecture à haute voix des articles 111,112 et 113 du code pénal, et des articles 41 à 45 inclus de la présente loi, dont un exemplaire demeurera déposé sur le bureau.
« Le bureau prononce provisoirement sur les opération du collège ou de la section.
« Toutes les réclamations seront insérées au procès-verbal, ainsi que la décision motivée du bureau.
« Les pièces ou bulletins relatifs aux réclamations sont paraphés par les membres du bureau, ainsi que par le réclamant, et sont annexés au procès-verbal. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 39. Le président informe l’assemblée du nombre des conseillers à élire, et des noms des conseillers à remplacer. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 40. Nul ne pourra être admis à voter, s’il n’est inscrit sur la liste officielle affichée dans la salle ; toutefois, le bureau sera tenu d’admettre ceux qui se présenteraient munis d’une décision rendue sur appel par la députation du conseil provincial. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 41. L’appel nominal est fait par ordre alphabétique.
« Chaque électeur, après avoir été appelé, remet son bulletin écrit et fermé au président qui le dépose dans une boîte à deux serrures, dont les clefs sont remises, l’une au président et l’autre au plus âgé des scrutateurs.
« Le président refusera de recevoir les bulletins qui ne sont pas écrite sur papier blanc et non colorié ; en cas de contestation, le bureau décidera. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 42. La table placée devant le président et les scrutateurs sera disposée de telle sorte que les électeurs puissent circuler à l’entour, ou du moins y avoir accès pendant le dépouillement du scrutin. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 43. Le nom de chaque votant sera inscrit sur deux listes ; l’une tenue par l’un des scrutateurs et l’autre par le secrétaire ; ces listes seront signées par le président du bureau, le scrutateur et le secrétaire. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 44. Il sera fait un réappel des électeurs qui n’étaient pas présents.
« Le réappel terminé, le président demandera à l’assemblée s’il y a des électeurs présents qui n’ont pas voté ; ceux qui se présenteront immédiatement seront admis à voter.
« Ces opérations achevées, le scrutin sera déclaré fermé. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 45. Le nombre des bulletins sera vérifié avant le dépouillement ; s’il est plus grand ou moindre que celui des votants, il en sera fait mention au procès-verbal.
« Après le dépouillement général, si la différence rend la majorité douteuse au premier tour de scrutin, le bureau principal fait procéder à un scrutin de ballottage à l’égard de ceux dont l’élection est incertaine.
« Si ce doute existe lors d’un scrutin de ballottage, la députation provinciale décide. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 46. Lors du dépouillement, un des scrutateurs prend successivement chaque bulletin, le déplie et le remet au président qui en fait lecture à haute voix et le passe à un autre scrutateur.
« Le résultat de chaque scrutin est immédiatement rendu public. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 47. Dans les collèges divisés en plusieurs sections, le dépouillement du scrutin se fait dans chaque section.
« Le résultat en est arrêté, signé et proclamé par chaque bureau.
« Il est immédiatement porté par les membres du bureau de chaque section au bureau principal, qui fait en présence de l’assemblée le recensement général des votes. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 48. Sont nuls les bulletins qui ne contiennent aucun suffrage valable, ceux dans lesquels le votant se fait connaître, ainsi que ceux qui ne sont pas écrits à la main. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 49. Les bulletins nuls n’entrent point en compte pour déterminer la majorité absolue ou relative. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 50. Sont valides les bulletins contenant plus ou moins de noms qu’il n’est prescrit ; les derniers noms formant l’excédant ne comptent pas. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 51. Sont nuls tous les suffrages qui ne portent pas une désignation suffisante : le bureau en décide comme dans tous les autres cas, sauf recours à la députation permanente du conseil provincial. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 52. Nul n’est élu au premier tour du scrutin s’il ne réunit plus de la moitié des voix. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 53. Si tous les conseillers à élire dans le collège n’ont pas été nommés au premier tour de scrutin, le bureau fait une liste des personnes qui ont obtenu le plus de voix.
« Cette liste contient deux fois autant de noms qu’il y a de conseillers à élire.
« Les suffrages ne peuvent être donnés qu’à ces candidats.
« La nomination a lieu à la pluralité des votes.
« S’il y a parité de votes, le plus âgé est préféré. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 54. Le procès-verbal de l’élection, rédigé et signé, séance tenante, par les membres du bureau principal ; les procès-verbaux des sections, ainsi que les listes des votants, signées comme par l’article 43, et les listes des électeurs sont adressés, dans le délai de huitaine, à la députation permanente du conseil provincial ; un double du procès-verbal, rédigé et signé par le bureau principal, sera déposé au secrétariat de la commune, où chacun pourra en prendre inspection. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 55. Après le dépouillement, les bulletins qui n’auront pas donné lieu à contestation seront brûlés en présence de l’assemblée »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 56. Toute réclamation contre l’élection devra, à peine de déchéance, être formée dans les dix jours de la date du procès-verbal.
« Elle sera remise par écrit, soit au greffier du conseil provincial, soit au bourgmestre, à charge par ce dernier de la transmettre dans les trois jours à la députation provinciale.
« Le fonctionnaire qui reçoit la réclamation est tenu d’en donner récépissé.
« Il est défendu d’antidater ce récépissé, à peine d’un emprisonnement d’un mois à deux ans et d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité pendant deux ans au moins et cinq au plus. »
- Adopté.
M. le président. - « Art. 57. La députation permanente du conseil provincial peut, dans les 30 jours à dater de l’élection, soit sur réclamation, soit d’office, annuler l’élection pour irrégularité grave. Passé ce délai, l’élection est réputée valide.
« En cas de réclamation de la part des intéressés ou d’opposition de la part du gouverneur, la députation est tenue de prononcer dans le même délai de trente jours.
« Le gouverneur peut, dans les huit jours qui suivront celui de la décision, prendre son recours auprès du Roi, qui statuera dans le délai de quinzaine à dater du pourvoi.
L’arrêté royal, ou s’il n’y a point eu de pourvoi, la décision de la députation sera immédiatement notifiée, par les soins du gouverneur, à la régence intéressée qui, en cas d’annulation, convoquera les électeurs dans les quinze jours à l’effet de procéder à de nouvelles élections. »
- Adopté.
M. Devaux. - Si je ne me trompe, nous avons terminé la presque totalité des dispositions relatives au personnel de l’administration communale. Le chapitre III rentre dans les attributions. Cependant il renferme encore quelques dispositions relatives au personnel, aux receveurs, et secrétaires. Je fais donc la motion de compléter le personnel, de diviser la loi communale en deux parties et de faire une loi spéciale concernant le personnel. C’est le seul moyen de mettre cette année à exécution cette partie de la loi communale. J’ai déjà entendu alléguer des objections contre cette proposition ; mais comme elles ont été très vagues, j’attendrai qu’on les précise. S’il y avait des inconvénients réels, je retirerais ma motion ; mais je crois qu’il n’y en a pas. De cette manière le pays sera constitué beaucoup plus tôt. Il y a dans les attributions des articles qui donneront lieu à de longues discussions et qui vous conduiraient trop loin.
Le chapitre III contient quelques articles qui touchent aux attributions des membres de l’administration communale. Je propose à la chambre de le renvoyer à la section centrale, afin qu’il soit refondu et que les dispositions qui ne sont pas relatives au personnel en soient éloignées.
M. Dumortier, rapporteur. - C’est préjuger la question
M. Devaux. - Ce n’est pas la préjuger. Car je ne fais cette proposition que dans la supposition que la chambre adopte ma motion.
M. de Theux. - Il me semble qu’il n’y aurait lieu de renvoyer le chapitre III à la section centrale que si pendant la discussion de ce chapitre la chambre jugeait convenable d’en reporter des articles au titre qui est relatif aux attributions communales. Ce chapitre contient des dispositions très importantes, notamment celles qui sont relatives à la publicité des séances. Je crois que l’honorable M. Devaux devrait ajourner sa motion jusqu’au moment où la chambre sera en mesure d’aborder le titre II.
M. Devaux. - Je déclare retirer ma motion.
M. le président. - La discussion est ouverte sur le chapitre III, article 58.
M. le président. - « Art. 58. Les membres élus lors du renouvellement triennal entrent en fonctions le 1er janvier. Ceux qui auraient été élus dans une élection extraordinaire prennent séance aussitôt que leur élection aura été reconnue valide. »
M. Devaux. - Je crois cette disposition vicieuse. Elle contient le même défaut qui existe déjà dans la loi électorale. Les élections se font en octobre, et les membres élus n’entreront au conseil qu’au mois de janvier. Je ne vois pas pourquoi ce mandat ne commencerait pas immédiatement à dater de l’élection. C’est un vice radical de la loi électorale, qui serait perpétué dans celle-ci ; je ne vois pas pourquoi un conseiller remplacé continuerait à siéger tandis que les électeurs ont déjà choisi son successeur.
Je suppose que le membre remplacé donne sa démission ou vienne à décéder, faudra-t-il que l’on procède à une élection nouvelle ?
M. H. Dellafaille - L’inconvénient que signale l’honorable M. Devaux existe déjà à l’égard de la formation de la chambre des représentants. Les membres de cette assemblée sont remplacés au mois de juin et siègent cependant jusqu’au mois de novembre.
Il a fallu que les choses fussent ainsi, pour éviter l’inconvénient plus grave encore où l’élection ne se trouverait pas valide et où le membre déjà entré en fonctions se verrait obligé de se retirer. C’est ce qui a eu lieu en 1830 à Gand. Le conseil de régence nommé en vertu de l’arrêté du gouvernement provisoire fut obligé, par suite de la cassation de son élection, de se retirer pour céder la place à l’ancienne régence nommée sous le roi Guillaume.
- L’article 58 est mis aux voix et adopté.
M. le président. - L’article 59 est ainsi conçu :
« Art. 59. Avant d’entrer en fonctions, les conseillers de régence prêtent, entre les mains du bourgmestre et en séance publique, le serment suivant :
« Je jure d’observer la constitution et la loi communale.
« Avant la prestation du serment, le président rappellera que le décret d’exclusion à perpétuité des membres de la famille d’Orange-Nassau de tout pouvoir en Belgique fait partie de la constitution. »
- Cet article est mis aux voix et adopté.
M. le président. - La discussion est ouverte sur l’article 60, ainsi conçu :
« Le conseil s’assemble toutes les fois que l’exigent les affaires comprises dans ses attributions. Il est convoqué par le bourgmestre.
« Sur la demande d’un tiers des membres en fonctions, il est tenu de le convoquer aux jour et heure indiquée. »
M. Dumortier, rapporteur. - Je demande que cet article porte que le conseil est convoqué par le collège de régence et non pas par le bourgmestre. Telle était à cet égard la disposition des premiers règlements. Il est certain que la convocation du conseil est une affaire entièrement communale, qui ne doit pas être faite selon le bon plaisir du bourgmestre, c’est-à-dire de l’agent du gouvernement.
M. de Theux. - Je crois qu’il faut laisser au bourgmestre le soin de convoquer le conseil de régence. Dans beaucoup de circonstances le conseil est appelé à délibérer sur les propositions qui lui sont soumises par le gouvernement. Il faut donc bien que son agent soumette au conseil les points sur lesquels l’autorité supérieure veut consulter le conseil. Je dois faire remarquer que la convocation du conseil par le bourgmestre ne préjudicie en rien aux droits des communes, puisqu’il est toujours facultatif au tiers de la représentation communale d’exiger une convocation extraordinaire.
M. Dumortier, rapporteur. - Il est vrai que le tiers des conseillers communaux peut exiger une convocation extraordinaire. Mais c’est là un de ces moyens extrêmes qui compromet beaucoup l’autorité qui les emploie et dont il ne faut pas faire un trop fréquent usage. Il m’a paru qu’il était plus convenable que la convocation se fît par le bourgmestre de concert avec les échevins.
L’article 10, paragraphe 2, du règlement des villes était formel à cet égard. Qu’arrivera-t-il dans les communes où le collège de régence ne comprend que deux échevins ou que si le bourgmestre se refuse à une convocation que ceux-ci jugeront nécessaire ? Il faudra qu’ils aient recours à un moyen extrême et qu’en leur qualité de conseillers ils se réunissent au tiers de leurs collègues pour obtenir une réunion du conseil.
Je ferai remarquer que le fait que je signale n’est pas sans exemple. Mes honorables collègues se rappelleront que dans une grande ville du royaume le bourgmestre s’est constamment refusé dans une circonstance à réunir le collège de régence. Il ne faut pas qu’un semblable abus se renouvelle.
- L’amendement de M. Dumortier, consistant à ajouter « et par le conseil de régence » est mis aux voix et adopté.
L’article 60 est adopté.
M. le président. - L’article 61 est ainsi conçu :
« Sauf les cas d’urgence, la convocation se fait par écrit et à domicile, au moins deux jours francs avant celui de la réunion ; elle contient l’ordre du jour.
« Aucun objet étranger à l’ordre du jour ne peut être mis en discussion, sauf le cas d’urgence où le moindre retard pourrait occasionner du danger.
« L’urgence sera déclarée par les deux tiers au moins des membres présents ; leurs noms seront insérés au procès-verbal.
« Toute proposition étrangère à l’ordre du jour devra être remise au bourgmestre ou à celui qui le remplace, au moins deux jours avant l’assemblée. »
- L’article est mis aux voix et adopté.
Articles 62 et 63 (du projet de la section centrale)
- Les articles 62 et 63 de la section centrale, auxquels le gouvernement se rallie, sont adoptés en ces termes :
« Art. 62. Le conseil ne peut prendre de résolution si la majorité de ses membres en fonctions n’est présente.
« Cependant, si l’assemblée a été convoquée deux fois sans s’être trouvée en nombre compétent, elle pourra, après une nouvelle et dernière convocation, délibérer, quel que soit le nombre des membres présents, sur les objets mis pour la troisième fois à l’ordre du jour.
« Les deuxième et troisième convocations se feront conformément aux règles prescrites par l’article précédent ; et il sera fait mention si c’est pour la deuxième ou pour la troisième fois que la convocation a lieu ; en outre, la troisième convocation rappellera textuellement les deux premières dispositions du présent article. »
« Art. 63. Le bourgmestre ou celui qui le remplace préside le conseil.
« La séance est ouverte et close par le président qui a la police de l’assemblée.
« Les résolutions sont pris à la majorité absolue des membres présents ; en cas de partage, la proposition est rejetée. »
M. le président. - « Art. 64 (auquel le gouvernement se rallie). Les membres du conseil votent à haute voix, excepté lorsqu’il s’agit de la présentation de candidats, nominations aux emplois, révocations ou suspensions, lesquels se font au scrutin secret et à la majorité absolue.
« Le président vote le dernier. »
M. Dumortier, rapporteur. - Je crois qu’il faut retrancher de cet article les mots « à la majorité absolue. » Ce serait faire supposer que certaines décisions du conseil peuvent être prises à la majorité relative. Puisque dans l’article précédent vous avez exigé la majorité absolue pour toutes les résolutions du conseil, il est inutile d’en parler ici.
M. de Muelenaere. - Il est vrai que dans l’artucle 63 vous avez décidé que les résolutions du conseil seraient prises à la majorité absolue ; mais si maintenant vous ne répétez pas ces mots, il y aura doute, si les présentations de candidats, nominations aux emplois, révocations ou suspensions doivent avoir lieu à la majorité absolue comme les autres résolutions du conseil. Lorsqu’il s’est agi de résolutions du conseil, dira-t-on, on a exigé la majorité absolue ; si on l’avait voulu également pour les nominations et révocations, on l’aurait mis dans la loi. C’est ainsi que du silence du législateur on tirera la conséquence que les nominations peuvent avoir lieu à la majorité relative. Mieux vaut répéter les mêmes mots que de vous exposer à une interprétation contraire à vos intentions.
M. Dumortier, rapporteur. - Si on croit que ces mots ne sont pas de trop, je retire mon amendement.
M. de Muelenaere. - On pourrait dire : « également à la majorité absolue. »
- Cette proposition, est adoptée.
L’article 64 de la section centrale, ainsi modifié, est adopté.
M. le président. - « Art. 65. A l’ouverture de chaque séance il est donné lecture du procès-verbal de la séance précédente ; après approbation, il est signé par le bourgmestre et le secrétaire. Toutes les fois cependant que le conseil le juge convenable, le procès-verbal est rédigé séance tenante en tout ou en partie et signé par les membres présents. »
M. Dumortier, rapporteur. - Cet article est très grave en ce que, de la manière dont il est rédigé, un bourgmestre pourrait signer et approuver une résolution qui n’aurait pas été réellement prise par le conseil ; je ne dis pas qu’il le ferait, mais il pourrait le faire. Et même, d’après ce qui a été dit dans le sein de la section centrale, il paraît qu’il y a des villes où cela est arrivé.
Je demande qu’après la lecture du procès-verbal il soit signé par les membres présents. Ainsi on ne pourra y insérer des résolutions autres que celles prises par l’assemblée. Cela n’aura aucun inconvénient et ce sera une garantie pour le conseil communal.
M. d’Huart. - Je crois que les scrupules de l’honorable préopinant ne sont pas fondés. En effet, le procès-verbal n’est signé par le bourgmestre et le secrétaire qu’après que le conseil l’a approuvé et a décidé qu’il était une image fidèle de la séance précédente. D’ailleurs, lorsque le conseil le juge convenable, il peut rédiger le procès-verbal séance tenante. Ainsi l’article n’a pas besoin d’être modifié.
M. Dumortier, rapporteur. - Je modifie ma proposition et je demande que le procès-verbal soit signé par le collège des échevins. J’espère que la chambre le décidera ainsi, vu les abus qui ont résulté du droit donné au bourgmestre et au secrétaire de signer seuls le procès verbal. Toutes les personnes qui savent ce que c’est que l’administration communale doivent le reconnaître. Il faut qu’il soit impossible au bourgmestre de dénaturer les volontés du conseil.
- Un membre. - Ce serait un faux.
M. Dumortier, rapporteur. - Sans doute c’est un faux, et un faux qui a été trop souvent commis.
Les faits que j’ai signalés ne sont que trop vrais. Je demande qu’après que le procès-verbal aura été approuvé par le conseil, il soit signé par le bourgmestre et les échevins. C’est une garantie dans l’intérêt de la commune.
M. Raikem. - Je dirai d’abord, relativement à ce qu’a dit l’honorable préopinant, qu’il n’est pas à ma connaissance que des bourgmestres auraient attesté par leur signature des délibérations qui n’auraient pas existé ou auraient signé un procès-verbal différent de celui qui aurait été approuvé. Le fait dont il a parlé serait un véritable faux.
Si un procès-verbal autre que celui approuvé par une assemblée était signé par le président et le secrétaire, ce serait un véritable faux, et s’il y avait mauvaise intention, il pourrait conduire ceux qui l’auraient commis devant la cour d’assises.
Quant à moi, il n’est pas à ma connaissance et je n’ai pas ouï dire qu’on ait jamais commis un faux de ce genre.
Je crois qu’il est inutile d’exiger d’autres signatures que celles du président et du secrétaire. Le procès-verbal de chaque séance est lu dans la séance suivante. Chacun peut faire des observations s’il trouve quelque chose d’inexact.
D’ailleurs, exiger d’autre signature que celle du président et du secrétaire, ce serait vous écarter de tous les usages reçus. Dans les cours et tribunaux en matière civile, les feuilles d’audience sont signées par le président et le greffier. Partout les procès-verbaux sont signés par le président et le secrétaire ou greffier.
Ce serait une superfluité qu’exiger la signature du collège des échevins ; ils signeront de confiance, et si un faux était commis par le bourgmestre, ce que je suis loin de supposer, ces signatures y donneraient plus de poids ; il serait impossible de découvrir le faux, tandis que le bourgmestre serait bien plus exposé aux poursuites de la vindicte publique s’il avait signé seul.
M. de Muelenaere. - Je ferai remarquer seulement que dans tous les jugements en matière civile la minute du jugement n’est signée que du président et du greffier ; ce n’est que dans les matières criminelles que le jugement est signé de tous les juges.
M. Dumortier, rapporteur. - Le projet du gouvernement demandait que les procès-verbaux fussent signer de tous les membres du conseil qui se trouvaient présents à la séance ; c’était dans mon opinion une disposition très sage, qui rencontrait seulement dans son exécution quelques difficultés ; ce sont ces difficultés qui l’ont fait écarter par la section centrale.
On dit que dans les jugements en matière civile, il n’y a que le président et le greffier qui signent ; mais je ferai remarquer que les juges n’ont aucun intérêt dans l’objet en délibération, tandis que dans les conseils de régence il arrive souvent que c’est la proposition faite par le bourgmestre qui se trouve amendée et modifiée. Il n’est que trop vrai qu’il ya eu des abus à cet égard.
Si on exige seulement dans les chambres que les procès-verbaux soient signés seulement du président, c’est que nous sommes placés dans une sphère trop élevée pour que cette garantie ne suffise pas ; mais il n’en est pas de même dans un conseil communal, où il s’agit de petits intérêts locaux.
Le bourgmestre, je le répète, est l’agent exclusif du gouvernement (du moins c’est comme cela qu’on a voulu le comprendre, bien que je ne l’admette pas.) Eh bien, si le bourgmestre est l’agent du gouvernement, pourquoi voulez-vous qu’il signe seul des procès-verbaux relatifs à des actes d’administration communale ?
M. d’Huart. - Il suffit de jeter les yeux sur les articles 106 et 108 de la section centrale pour être convaincu qu’il ne peut jamais y avoir de faux dans les cas dont il s’agit.
Ces articles sont ainsi conçus :
« Art. 106. En cas d’absence momentanée, le secrétaire est remplacé, suivant les circonstances, soit par un membre du conseil municipal choisi par ce conseil, soit par un membre du collège de régence choisi par ce collège.
« Hors le cas de maladie ou de service public non salarié, lorsque l’absence durera plus d’un mois, celui qui aura rempli les fonctions de secrétaire jouira du traitement. »
« Art. 108. Le secrétaire assiste à toutes les séances du conseil communal et du collège des bourgmestre et échevins. Il est spécialement chargé de la rédaction des procès-verbaux et de la transcription de toutes les délibérations. Il tient à cet effet deux registres sans blanc ni interligne, cotés et paraphés par le bourgmestre.
« Les procès-verbaux transcrits sont signés par le bourgmestre et par le secrétaire. »
Ainsi, messieurs, les procès-verbaux sont inscrits sur un registre ; il faudrait donc arracher les feuillets de ce registre pour modifier le procès-verbal. D’ailleurs, il y a des peines tellement sévères pour le faux, qu’on doit penser qu’on ne s’y exposerait pas dans cette occasion. (Aux voix ! aux voix !)
M. Dumortier, rapporteur. - Je ferai remarquer que la même autorité qui signe les procès-verbaux, signera les registres dont il est parlé dans les articles qu’on a cités. Il n’y a point de nouvelles garanties.
J’ajouterai que je ne sais si beaucoup de personnes regarderont comme un faux le fait que je veux éviter par mon amendement.
- L’amendement de M. Dumortier est mis aux voix et non adopté.
L’article est adopté.
M. le président donne lecture de l’article suivant, mais la chambre n’étant plus en nombre, la séance est levée.