(Moniteur belge n°207, du 26 juillet 1833)
(Présidence de M. Raikem)
M. le président occupe le fauteuil à deux heures.
M. de Renesse fait l’appel nominal ; 48 membres seulement répondent à l’appel.
M. de Renesse, après quelques minutes d’attente, et par suite de l’arrivée de quelques membres, déclare que la chambre est en nombre, et la séance est ouverte.
M. Dellafaille, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance qui est adopté sans opposition.
Plusieurs pièces adressées à la chambre sont renvoyées à la commission des pétitions.
Il est fait hommage à MM. les représentants de la deuxième livraison de la « Bibliothèque des antiquités », par M. Edouard Marshall et Félix Bogaerts. -
M. le président. - Je vais donner lecture d’une lettre qui m’a été adressée :
« Bruxelles, 24 juillet 1833.
« Monsieur le président,
« D’après les ordres du Roi, j’ai l’honneur d’annoncer à la chambre des représentants l’heureuse délivrance de S. M. la Reine, qui a donné le jour à un prince, ce matin, à quatre heures et demie.
« Agréez, etc.
« Le ministre de la justice, Lebeau. »
- Cette lecture est suivie d’applaudissements.
M. Ullens. - Je demande qu’une députation soit nommée pour aller féliciter Sa Majesté. (Appuyé ! appuyé !)
- La chambre adopte la proposition de M. Ullens et décide que la députation sera de 12 membres.
M. le président tire au sort les noms des membres de cette députation ; elle sera composée de MM. Dugniolle, Meeus, Helias d’Huddeghem, A. Rodenbach, d’Hoffschmidt, Bekaert, de Terbecq, Vanderbelen, Verdussen, de Sécus, Dumortier et Nothomb.
M. le président. - L’ordre du jour appelle le rapport de la commission des pétitions.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur Rombaut François, de Bruxelles, chevalier de la légion d’honneur, ancien militaire au service français, réclame l’intervention de la chambre pour obtenir un duplicata de son brevet qu’il a égaré. »
La commission propose le renvoi à M. le ministre des affaires étrangères.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « 30 propriétaires du canton d’Anderlecht demandent que les huissiers puissent, malgré la défense des officiers du parquet, continuer à faire les ventes de fruits pendant par racines. »
Voire commission, ayant observé que l’article 27 du décret du 14 juin 1813 permet aux huissiers de faire, concurremment avec les notaires et greffiers, les ventes publiques de meubles et effets mobiliers, et que, d’après un arrêt de la cour de cassation du 2 juillet 1830, les huissiers ont le droit de procéder à la vente des fruits pendant par racines des arbres et autres bois sur pied, considérés abstractivement du fonds sur lequel ils se trouvent, et vendus exclusivement pour en être séparés, m’a chargé de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de la justice.
M. Gendebien. - Je demande qu’on ajoute aux conclusions de la commission avec demande d’explications ; car, messieurs, si je suis bien informé, il paraît que le ministère public, agissait avec ou sans instruction de M. le ministre de la justice
M. de Brouckere. - Avec instruction…
M. Gendebien. - Avec instruction, je le crois ; mais je voudrais entendre M. le ministre lui-même là-dessus. Il paraît dis-je, que le ministère public veut interdire les huissiers dans l’ordre des fonctions qui leur ont été déférées par la loi. Il y aurait donc eu abus à cet égard, puisque c’est aux cours et aux tribunaux qu’il appartient de prononcer sur cette question.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je ne m’oppose en aucune manière ni au renvoi, ni à la demande d’explications. Mais je dois dire, pour justifier les officiers du ministère public dans l’opinion de ceux qui pensent qu’ils ont agi de leur propre autorité, qu’ils n’ont fait que se conformer aux instructions que je me suis cru fondé à leur donner.
Toutefois il ne m’a pas été possible de dissimuler que, dans le cas de conflit entre les huissiers et les notaires, en cas de résistance des premiers, la difficulté ne pouvait pas être levée par le gouvernement.
La prohibition se trouvant dépourvue de sanction pénale, j’ai déclaré que dans le cas où les huissiers viendraient à ne pas se conformer à ces instructions, le conflit devrait être porté devant les tribunaux. Voilà quel a été le sens de mes instructions et de mes réponses aux huissiers qui ont réclamé près de moi contre des ordres que je croyais conformes au texte et à l’esprit de la loi, tels que je les comprenais, et à des monuments respectables de jurisprudence.
M. Gendebien. - Je ne veux pas parler du texte de la loi, car il ne s’agit pas ici de l’interpréter ; il s’agit de savoir s’il est vrai de dire que le gouvernement puisse enjoindre aux huissiers de s’abstenir dans la circonstance qui nous est signalée. On vous a parlé de jurisprudence respectable, mais c’est là une ignorance du fait indépendamment de l’ignorance du droit. Il est vrai que deux cours de France ont jugé dans le sens de M. le ministre, mais la jurisprudence a toujours été contraire en Belgique. Un arrêt de la cour de Liége, un autre arrêt de la cour de Bruxelles jugeant en degré d’appel, ont condamné le système ministériel.
Enfin, un arrêt de la cour de Bruxelles jugeant en cassation a été rendu dans le même sens.
J’ai devant moi les cahiers de la jurisprudence de la Belgique ; je craindrais d’abuser des moments de la chambre, si j’en donnais lecture ici ; mais je ferai observer qu’avant d’alléguer une jurisprudence en sa faveur, on devrait avoir pris la peine d’en consulter le recueil.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je ferai d’abord observer que mon opinion est fondée sur le texte de la loi, indépendamment de la jurisprudence ; cette opinion s’est fortifiée par l’étude des principes et des raisonnements exposés dans divers arrêts. Ceux qu’on a cités ne me sont pas étrangers ; mais, messieurs, j’ai trouvé dans d’autres décisions des motifs qui m’ont parus péremptoires. Ils ont été exposés par M. le procureur-général Dupin, devant la cour de cassation de France, à l’occasion d’un pourvoi contre un arrêt de la cour de Paris. L’arrêt de cassation est solennel ; il a été rendu, sections réunies, par la cour de cassation, conformément au réquisitoire de M. Dupin.
Toutefois mon opinion, je le répète, est surtout puisée dans le texte de la loi.
Je ne pourrais pousser plus loin la discussion sans mettre sous les yeux de la chambre des documents étendus. J’ai seulement voulu montrer que je n’avais agi ni dans l’ignorance des faits, ni dans l’ignorance du droit. Ce n’est pas à la légère qu’on prend de pareilles décisions.
M. Quirini. - La question soulevée par la pétition est extrêmement grave. Les attributions des huissiers sont réglées par une législation encore en vigueur. Aux termes de cette législation, les huissiers ont-ils le droit de faire les ventes des fruits pendant par racines ? Je supposerai que la question n’a jamais été résolue, et je demanderai si c’est à M. le ministre de la justice tout seul à la résoudre ? Le ministre peut-il s’arroger le droit d’appliquer ce droit ? N’est-ce pas aux tribunaux à appliquer la loi ? Mais, messieurs, la question a été résolue ; la jurisprudence constante de la cour de Liège et de la cour de Bruxelles a été que les huissiers pouvaient faire la vente avec les notaires. Nous devons donc prendre en considération la demande des pétitionnaires.
Je vais plus loin : je suppose comme je l’ai déjà dit, que la question n’a pas encore été résolue, qu’il y ait une lacune dans la législation, et je demande à qui appartient le droit de remplir la lacune ; je demande à qui appartient le droit d’interpréter une législation ? L’article 28 de la constitution ne laisse aucun doute à cet égard, c’est au pouvoir législatif.
Je pense donc que la demande de M. Gendebien doit être admise, afin qu’on n’en vienne pas substituer le régime des circulaires ministérielles au pouvoir régulièrement institué.
M. le président. - La parole est à M. de Brouckere.
M. de Brouckere. - Il est inutile de pousser plus loin la discussion ; il a été prouvé jusqu’à l’évidence que M. le ministre n’avait pas le droit qu’il s’est arrogé, et qu’il a avancé une non-vérité en disant qu’il s’était appuyé sur la jurisprudence, puisque la jurisprudence est contraire à sa doctrine. Il est possible que M. Dupin ait parlé dans le sens de M. le ministre, mais j’aurais mieux aimé le voir puiser ses instructions dans la jurisprudence de la Belgique.
Du reste, messieurs, la circulaire de M. le ministre de la justice n’est que pour épouvanter, car l’huissier qui ferait une vente ne serait passible d’aucune peine, et l’affaire devrait être portée devant les tribunaux.
- La chambre ordonne le renvoi de la pétition à M. le ministre de la justice, avec demande d’explications.
M. Milcamps, rapporteur. - « Un grand nombre de propriétaires et cultivateurs de l’arrondissement de Mons forment la même demande. »
La commission propose les mêmes conclusions que pour la précédente.
- La chambre prend la même décision.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur Jos. Van der Hoost, de Leupeghem (Flandre orientale), agent d’affaires, demande à la chambre de faire une loi qui abroge l’arrêté du 18 mars 1831. »
Cet arrêté du 18 mars 1831 est organique de l’administration des finances. Mais c’est particulièrement l’article 36 que le pétitionnaire critique, lequel porte que les hommes qui ont rendu des services à la révolution, et les officiers en retraite, concourront avec les teneurs de livres, les visiteurs, etc., aux places de receveurs.
Votre commission propose l’ordre du jour.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur Frison, artisan à Tournay, se plaint qu’un certificat adressé par lui à la régence de Tournay lui a été soustrait, et demande que la chambre ordonne que cette pièce lui soit restituée. »
Le certificat dont le pétitionnaire parle lui a été délivré par les fabricants de tapis de Tournay ; il constate qu’il est le seul en cette ville qui ait le talent de confectionner les verges en cuivre, nécessaires à la fabrication des tapis, et que le degré de perfection auquel il a su porter ses ouvrages, a affranchi cette branche d’industrie d’un tribut qu’elle payait auparavant à l’étranger.
Votre commission m’a chargé de vous proposer l’ordre du jour.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Trois habitants de Peruwelz s’adressent à la chambre pour qu’elle ordonne que les élections aient lieu pour pourvoir aux vacatures existantes dans leurs régences. »
Ils motivent cette demande sur ce que le sieur Morelle-Bougy, échevin, a donné le 28 février 1831 sa démission, fait avoué par celui-ci, et sur le décès d’un conseiller de régence arrivé en octobre 1830. La régence nie avoir reçu la démission officielle de l’échevin Morelle-Bougy, et elle ne fait pas procéder au remplacement de ces fonctionnaires. Dans ces circonstances, votre commission a cru devoir proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l’intérieur.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur J.-B. de Ghelke, de Kemmel, demande l’appui de la chambre contre un prétendu déni de justice commis à son égard. »
Ce déni de justice est, selon le pétitionnaire, le refus du pro-deo qu’il réclame pour pouvoir faire preuve de son état d’enfant naturel reconnu. Comme cette matière est de compétence des tribunaux, votre commission propose l’ordre du jour.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Huit habitants d’Anvers demandent que la chambre s’occupe avant toute autre de la proposition de M. Liedts, relative aux actions en expulsion des fermiers et locataires. »
C’est la faveur de vouloir faire précéder avant toute autre la discussion de la proposition qu’ils sollicitent de la bienveillance de la chambre.
Votre commission vous propose le renvoi de cette pétition au bureau des renseignements.
M. Legrelle. - On pourrait renvoyer cette pétition à la commission qui s’occupe de la proposition de M. Liedts.
M. Milcamps, rapporteur. - Ce n’est qu’une simple demande.
- La chambre adopte les conclusions de la commission.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur J. Glineur de Wihéries, élu bourgmestre de sa commune, se plaint d’avoir été arbitrairement révoqué de ses fonctions par le gouverneur de sa province. »
Ce n’est pas de sa révocation mais de sa suspension que le pétitionnaire se plaint. L’article 137 de la constitution ayant réservé aux autorités provinciales leurs attributions, et la suspension d’un bourgmestre étant dans les attributions du gouverneur, aux termes de l’article 23 de l’instruction pour les gouverneurs jointe à l’arrêté du 15 décembre 1830, votre commission propose l’ordre du jour.
M. de Brouckere. - Je demande le renvoi de la pétition au ministre de l’intérieur, parce que nous ne pouvons pas admettre les principes énonces par le rapporteur. Nous ne pouvons admettre que le pouvoir exécutif ait le droit de suspendre les bourgmestres car, messieurs, l’arrêté du gouvernement provisoire qui veut qu’ils soient nommés par les électeurs, existe encore aujourd’hui, et s’oppose aux conclusions qui vous sont présentées. Je sais bien que l’administration cherche à faire prévaloir un système tout contraire à la loi, et que l’on fait plus de cas d’un fonctionnaire subalterne nommé par le ministre que d’un pouvoir élu par la nation. Mais je ne crois pas que la nation sanctionne jamais ce système ; je le déclare donc, nous ne pouvons laisser au pouvoir exécutif le droit de suspendre les bourgmestres élus par le peuple, et je propose le renvoi de la pétition à M. le ministre de l’intérieur, avec demande de renseignements.
M. F. de Mérode. - La conséquence que M. de Brouckere a tirée de la disposition adoptée par le gouvernement provisoire, qui confie à certains électeurs le droit de nommer les bourgmestres, ne me paraît pst rigoureuse : cette disposition ne détruit pas le droit conféré au gouvernement par les lois précédentes de suspendre ou de révoquer les bourgmestres. Le gouvernement provisoire a pris la résolution dont il s’agit, parce qu’à l’époque de la révolution un grand nombre de communes se plaignaient de leurs bourgmestres, la plupart hostiles au nouvel ordre de choses. Mais il n’y a rien là qui détruise le droit du gouvernement
M. Gendebien. - Il est évident qu’il faut consulter ici l’origine du pouvoir de bourgmestres pour savoir à qui appartient le droit de les suspendre. Les bourgmestres tiennent leur droit de l’élection populaire ; ce sera donc à un pouvoir populaire à les révoquer, et nullement au pouvoir exécutif. On a parlé d’un arrêté du gouvernement provisoire et je viens d’en demander communication ; mais, si j’ai bonne mémoire, il a été introduit une disposition qui n’admet qu’une seule hypothèse dans laquelle il soit permis au gouvernement de s’ingérer dans les fonctions du bourgmestre : c’est au moment de leur nomination, si des réclamations s’élèvent, s’il y a irrégularité flagrante ; c’est le cas, le seul cas, dans lequel le gouvernement peut ordonner des élections nouvelles.
Nulle part le gouvernement provisoire n’a attribué au pouvoir exécutif le droit de révoquer les bourgmestres, et il ne faut que du bon sens pour voir qu’il ne pouvait pas le faire. Et, en effet, que deviendrait le droit d’élection s’il dépendait du gouvernement de suspendre l’élu ? N’aurait-ce pas été détruire d’une main ce que l’on faisait de l’autre ? Certainement, messieurs, vous n’adopterez pas des conséquences comme celles qu’on vous propose. Vous maintiendrez l’arrêté du mois d’octobre 1830, qui ne laisse au gouvernement que le droit de convoquer les collèges en cas d’irrégularité, et d’irrégularité flagrante, je crois, dans les élections du bourgmestre
M. Milcamps, rapporteur. - Lorsque la pétition a été examinée, on a aussi agité la question de savoir si elle devait être renvoyée au ministre de l’intérieur ; mais la majorité a cru devoir la résoudre négativement, parce qu’une question analogue s’était déjà présentée à l’occasion de la suspension d’un secrétaire de régence. Alors des explications avaient bien été données, mais aucune résolution n’avait été prise. Nous pensons qu’il en arriverait de même aujourd’hui si on adoptait le renvoi au ministre, lorsque ce sont les tribunaux qui doivent décider une question de cette nature.
M. de Brouckere. - L’arrêté-loi du 8 octobre 1830 confère aux électeurs le droit de choisir leur bourgmestre ; cet arrêté existe dans son entier. Qu’il soit bon ou qu’il ne le soit pas, il faut le respecter jusqu’à ce qu’il ait été remplacé. Je ne vois pas comment nous pourrions laisser au pouvoir exécutif le droit de suspendre les bourgmestres, sans détruire par cela même l’arrêté dont j’ai parlé. Si vous ne mettez aucune borne à ce pouvoir, il destituera les bourgmestres quand il en aura besoin, c’est-à-dire chaque fois qu’ils lui déplairont.
On vous a dit que la question s’était déjà présentée pour un secrétaire de régence ; mais les secrétaires n’étant pas nommés par les électeurs, il est tout simple que le mode de révocation ne soit pas le même que pour les bourgmestres.
On a dit aussi que la question était du ressort des tribunaux ; et moi je soutiens que c’est à l’assemblée législative, que c’est à nous à décider s’il y a eu violation de la loi.
M. Milcamps, premier rapporteur, persiste dans les conclusions de la commission.
- Ces conclusions sont mises aux voix et ne sont pas adoptées.
Le renvoi de la pétition au ministre de l’intérieur, avec demande de renseignements, est ordonné.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur Lefebvre adresse à la chambre un exemplaire d’un ouvrage sur la maladie des chevaux, et demande que la chambre lui fasse obtenir une indemnité. »
La commission propose le dépôt au bureau des renseignements.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Les bourgmestre et assesseurs de la commune de Meulebeke demandent l’abrogation de l’arrêté royal du 27 mars 1825, qui impose d’une redevance annuelle de 4 p. c. le revenu de biens immeubles passant en main-morte. »
Cette abrogation a paru à votre commission résulter strictement des article 110 et 113 de la constitution portant : le premier, qu’aucun impôt au profit de l’Etat ne peut être établi que par une loi, et le second, qu’aucune rétribution ne peut être exigée des citoyen qu’à titre d’impôt au profit de l’Etat.
Mais il s’agit de savoir si le roi Guillaume, en attachant, par ses arrêté spéciaux, portant autorisation d’accepter des legs, la charge de payer une redevance annuelle de 4 p. c. sur le revenu des biens légués, a usé d’un droit acquis au trésor belge, et si, par ces autorisations royales et les acceptations qui en ont été la suite, la redevance annuelle constitue un droit acquis au trésor belge pour tout ce qui est échu et dû antérieurement à la promulgation de notre constitution, et pour les échéances postérieures. Votre commission, ayant considéré la gravité de ces questions, m’a chargé de proposer le renvoi de cette pétition au ministre des finances.
M. Dumortier. - Je ne peux concevoir par quels motifs le ministre des finances continue à imposer d’un tribut de 4 p. c. les propriétés passant en main-morte ; la constitution déclare positivement qu’aucun impôt ne peut être levé qu’en vertu d’une loi. L’arrêté en vertu duquel on perçoit cet impôt, violait la constitution sous le roi Guillaume ; il la viole maintenant d’une manière plus flagrante. Je désirerais que le ministre des finances donnât des explications sur ce point. Si l’on présentait un projet de loi tendant à imposer les propriétés qui passent en main-morte, je ne m’y opposerais pas ; mais, jusqu’à ce que la législature ait statué, l’arrêté que l’on met à exécution viole la loi fondamentale.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Le ministère ne s’oppose pas aux conclusions de M. le rapporteur. Consulté par le ministre des finances sur ce point, mon avis a été conforme en tout aux principes exposés par l’honorable préopinant.
- Le renvoi au ministre des finances, avec demande d’explications, est adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « 36 habitants de Bruxelles sollicitent la révision des lois sur la médecine, en faveur de M. Lubin. »
C’est-à-dire, en faveur de la découverte de M. Lubin. Les pétitionnaires ne font pas connaître en quoi consiste cette découverte, ni sous quel rapport les lois sur la médecine seraient vicieuses ou insuffisantes. Quoi qu’il en soit, votre commission vous propose le dépôt de la pétition au bureau des renseignements.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur Desany, demeurant à la porte de Namur, à Bruxelles, réclame le paiement de l’indemnité à laquelle il a droit, du chef des dommages essuyés par lui dans les journées de septembre. »
- Renvoyé à M. le ministre de l’intérieur, sur les conclusions de la commission.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur Jos.-Nap. Heyvaert, de St.-Nicolas, voltigeur au 5ème bataillon du 1er régiment, demande l’intervention de la chambre pour pouvoir s’unir avec la demoiselle Pauline Declerck. »
La commission, considérant que le pétitionnaire doit s’adresser à ses chefs militaires, propose l’ordre du jour.
M. Legrelle. - Messieurs, il est hors de doute que les militaires doivent obtenir la permission de se marier mais, s’il faut croire ce que l’on rapporte, les autorisations sont données par les chefs selon leurs caprices. Il faudrait savoir jusqu’à quel point le pétitionnaire a droit d’obtenir l’autorisation qu’il réclame. M. le ministre de la guerre pourra nous donner des renseignements sur ce point.
M. de Brouckere. - Il y aurait danger à accueillir de semblables pétitions ; c’est aux chefs de corps à décider de la convenance des mariages des militaires. Si l’on admettait la motion de M. Legrelle, vous seriez accablés par le nombre des pétitions que vous adresseraient des soldats qui voudraient se marier.
- L’ordre du jour est adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur A.-J. Tackoen, ancien magistrat à Mons, demande que la chambre lui fasse obtenir le paiement d’une rente annuelle de 140 fr., sur les revenus et biens de la ville de Nivelles. »
Il s’agit, suivant le titre produit, d’une rente affectée sur les chaussées construites par la ville, dont le gouvernement perçoit les droits de barrières, et sur les revenus ordinaires de cette ville. Le pétitionnaire se plaint avec raison de n’avoir pu se faire payer depuis 30 ans des canons de cette rente. Il s’est adressé inutilement à la ville de Nivelles, et à tous les gouvernements qui ont successivement occupé la Belgique. La créance étant légitime, et paraissant subordonnée à une liquidation des créances de cette nature par le gouvernement, votre commission m’a chargé de proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.
M. Verdussen. - Je trouve, dans le feuilleton qui nous a été distribué, trois pétitions de même nature que celle qui nous occupe. Messieurs, ce qui a été dit antérieurement dans cette assemblée touchant les personnes qui ont des droits sur le produit des chaussées, vous fera sentir la nécessité de prendre une décision sur cet objet. Je voudrais provoquer cette décision en réclamant que le renvoi de la pétition au ministre de l’intérieur fût accompagné de la demande d’explications.
M. d’Hoffschmidt. - Il s’agit d’une rente à la charge de la ville de Nivelles et non à la charge de l’Etat ; ainsi il faut que le pétitionnaire s’adresse aux tribunaux.
M. Gendebien. - Le pétitionnaire s’est déjà adressé aux tribunaux par suite d’un ordre du jour du congrès sur une pétition qu’il avait présentée. Il a fait de grands sacrifices pour soutenir sa demande en justice. Maintenant il faut savoir s’il y a lieu d’être juste envers tout le monde. Je crois qu’il faut renvoyer la pétition au ministre de l’intérieur avec demande d’explications. On verra après si nous devons faire usage de notre prérogative d’initiative pour présenter une loi sur la matière.
M. d’Hoffschmidt. - Prenez garde ! nous allons peut-être créer un antécédent dont nous nous repentirons.
M. de Brouckere. - Les tribunaux dans l’affaire dont il s’agit ont fait l’application d’un arrêté inconstitutionnel. Appuyant la proposition de M. Verdussen, nous demandons le renvoi de la pétition au ministre de l’intérieur en réclamant des explications, parce que par ces explications nous pourrons juger s’il n’est pas urgent de porter une loi. Il est injuste qu’un gouvernement, par un arrêté, décide que les villes et les communes ne paieront plus leurs dettes.
- Le renvoi au ministre de l’intérieur, avec demande d’explications, est ordonné.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur J. Colons, d’Anvers, co-intéressé dans une rente de 6,000 fr., hypothéquée sur la chaussée de Wyneghem à Schilde, demande la liquidation de cette créance. »
Les mêmes considérations militent pour le renvoi de la pétition à M. le ministre de l’intérieur, et c’est la conclusion que j’ai l’honneur de proposer.
- Le renvoi au ministre de l’intérieur, avec demande d’explications, est ordonné.
M. Milcamps, rapporteur. - « Sept légionnaires de Mons réclament la pension à laquelle ils ont droit. »
La chambre, dans sa précédente session, a été saisie d’une proposition relative au paiement de la pension des légionnaires. Comme il est à présumer que cette proposition sera reproduite, votre commission propose le dépôt de la pétition au bureau des renseignements.
M. Gendebien. - C’est moins pour m’opposer au dépôt au bureau des renseignements que pour inviter la chambre à nommer une nouvelle commission qui serait chargée d’examiner les droits des légionnaires. Dans la session précédente vous aviez nommé une commission à cet effet ; la dissolution de la chambre a interrompu ses travaux ; il y a lieu, je crois, de nommer une nouvelle commission et d’autoriser le bureau de la chambre à faire cette nomination.
- Après s’être interrompu un moment, l’honorable orateur reprend la parole et dit. - Je retire ma proposition, me réservant de la reproduire d’une manière plus régulière.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
M. Milcamps, rapporteur. - « La dame veuve Ponce, à Longlier (grand-duché), réclame l’exemption du service de la milice pour son fils unique. »
Ou plutôt elle se plaint de ce que son fils n’a pas été exempté par la députation des états, comme fils unique pourvoyant à la subsistance de sa mère veuve. Comme il appartient à la députation des états de prononcer en dernier ressort sur les exemptions en matière de milice, votre commission propose l’ordre du jour.
- L’ordre du jour est adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur E. Bernaert, notaire à Somergem (Flandre orientale), réclame contre la demande qui a été faite à la chambre de modifier l’article 5 de la loi sur le notariat, qui détermine les ressorts dans lesquels les notaires exercent leurs fonctions. »
Votre commission propose le renvoi de cette pétition à M. le ministre de la justice.
- Le renvoi à M. le ministre de la justice est ordonné.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur E.-F. Daninck, notaire à Somergem, demande que la chambre écarte la pétition de quelques notaires de campagne, tendant à ce qu’il soit permis aux notaires des communes rurales d’instrumenter dans toute l’étendue de l’arrondissement. »
La commission propose le renvoi au ministre de la justice.
- Le renvoi est ordonné.
M. Milcamps, rapporteur. - « Les notaires de l’arrondissement d’Audenaerde demandent à la chambre de modifier l’article 5 de la loi du 25 ventôse an II, et de décréter que les notaires de 2ème et 3ème classe pourront exercer leurs fonctions concurremment entre eux, dans toute l’étendue de la province où ils résident. »
La commission conclut au renvoi au ministre de la justice.
M. Desmet. - Messieurs, je viens appuyer les conclusions du renvoi de la pétition au ministre de la justice, et j’en demande en outre le dépôt au bureau des renseignements. Car j’insiste aussi pour que l’article 5 de la loi du 25 ventôse soit modifié, non cependant pas dans le sens que le désirent les pétitionnaires, mais dans celui que tous les notaires, sana distinction de classes, puissent instrumenter dans le ressort de la province où ils ont leur résidence, comme ils en avaient la faculté avant l’époque que ladite loi de ventôse fût mise en vigueur.
Mes motifs sont que je ne trouve point de raison, ni ne vois aucune utilité pour la société, que les notaires soient parqués en catégories de première, de deuxième et de troisième classe, et qu’un privilège soit conservé en faveur de ceux qui habitent des villes principales.
On sait que ces catégories ont été introduites et consacrées dans la loi de ventôse par l’influence des notaires de Paris, et que ceci a eu lieu sous le prétexte aussi faux que dérisoire, que les notaires des campagnes n’avaient ni les talents ni l’expérience pour pouvoir étendre l’exercice de leurs fonctions hors le rayon du canton de leur résidence.
Car je demanderai si le notaire campagnard ne doit pas faire preuve de capacité et de moralité et s’il ne doit pas avoir autant d’instruction que le notaire citadin ? Pourquoi donc conserver cette distinction qui rend l’un plus digne que l’autre, et qui doit faire supposer que celui qui habite un chef-lieu a plus de talents et de probité que son confrère qui demeure au village ; et pourquoi le premier peut-il venir instrumenter dans le ressort du second, tandis que celui-ci ne peut sortir de son canton, et très souvent ne peut gérer les affaires d’un ami qui demeure dans son voisinage, et qui est obligé de courir a quelques lieues de chez lui pour s’adresser à un notaire qui n’a pas sa confiance ? Pourquoi donc, dis-je, conserver une mesure qui gêne les particuliers à un tel point, et qui les oblige en outre d’employer autant de notaires qu’il y a de cantons où des intérêts se trouvent à régler ? Je n’en vois aucune raison ; au contraire, je trouve qu’en laissant rétablir la concurrence, et est rendant la faculté aux notaires d’instrumenter dans toute une province, vous allez derechef consacrer une disposition qui sera à l’avantage du public et au profit des lumières et de l’instruction.
Mais une garantie que nous n’avons plus en Belgique contre les notaires qui gèrent mal les affaires des particuliers et qui divertissent le denier que de confiance on a mis entre leurs mains, c’est le cautionnement que les notaires étaient obligé de donner avant d’entrer en fonction, et qui, sous le régime hollandais, avait été aboli pour être remplacé par une patente. Je saisis la présente occasion pour le faire remarquer à la chambre, ainsi qu’au ministre ; et j’ose me flatter que le public ne sera plus longtemps privé de cette excellente disposition, qui lui garantissait la réparation des erreurs que peuvent commettre les notaires dans l’exercice de leurs fonctions, et même, autant qu’il était possible, celle de leurs prévarications.
C’est un bon moment d'exiger le cautionnement des notaires et de faire renaître la disposition de l’article 33 de la loi de ventôse ; car, tout en faisant droit aux réclamations que les particuliers ne cessent de faire pour mettre en sûreté leurs intérêts les plus précieux, l’Etat trouvera un fonds considérable pour son trésor, dont il pourra faire un excellent usage dans les circonstances actuelles.
Je conclus donc au double renvoi, par le motif que si le gouvernement ne présente point de projet de loi pour porter à la loi de ventôse les modifications qu’on réclame, la chambre puisse prendre l’initiative.
- L’orateur demande le dépôt de la pétition au bureau de renseignements.
Les conclusions de la commission, et celles de l’honorable orateur, sont adoptées.
M. Milcamps, rapporteur. - « La dame H. Gilon, à Liège, épouse de L.-J. Jaminé, sergent à la 2ème compagnie du dépôt du 11ème régiment, demande que son mari obtienne un congé.
Conclusions : ordre du jour.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « La dame veuve Dehoe, à Bruxelles, réclame le paiement du reste de l’indemnité qui lui revient du chef des pertes qu’elle a essuyées dans les journées de septembre. »
Conclusions : renvoi au ministre de l’intérieur.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur Bruyère (Adrien-Joseph), cultivateur à Deux-Acren, demande que le cadet de ses deux fils, milicien de 1826, lui soit renvoyé en vertu de la loi du 8 janvier 1817, article 94. »
La commission propose l’ordre du jour.
M. Legrelle. - C’est à mes yeux, une grave question que celle de savoir si le moment n’est pas encore venu de licencier les miliciens de la classe de 1826. Les circonstances dans lesquelles ils ont été rappelés sous les drapeaux n’existent plus. Je sais bien qu’il serait dangereux de diminuer l’effectif de notre armée ; mais ne pourrait-on pas remplacer la levée des miliciens de 1826, qui a rempli son devoir sans murmurer, par le contingent de 1833 ? Je crois que nous devons fixer l’attention de M. le ministre de la guerre sur cet objet, et c’est pour cela que je propose que la pétition lui soit renvoyée. De pareilles demandes ne doivent pas être accueillies par un dédaigneux ordre du jour.
M. Milcamps, rapporteur. - Il ne paraît pas que le pétitionnaire se soit adressé, ni au ministre de la guerre, ni à toute autre autorité pour obtenir l’objet de sa demande, et il est dans les usages de la chambre, dans ce cas, de prononcer l’ordre du jour. Du reste je ne vois pas d inconvénient à renvoyer la pétition à M. le ministre de la guerre.
M. le ministre de la guerre (M. Evain) - Le gouvernement s’est occupé attentivement de la position des miliciens de la classe de 1826 qui, ayant reçu l’autorisation de rentrer dans leurs foyers au mois de juin 1831 ont été rappelés sous leurs drapeaux au mois de septembre de la même année et qui s’y sont rendus sans retard, avec un zèle digne d’éloges. Au moment où je parle, on a donné des congés aux soldats des troupes de ligne, et on a recommandé d’en distribuer aux miliciens de 1826 et de 1827. Plus des deux tiers de ces miliciens jouissent de congés de trois mois et d’ici à l’expiration de ces congés nous espérons que le gouvernement pourra prendre l’initiative pour le renvoi de ces deux classes, si toutefois le résultat des négociations nous permet de diminuer l’effectif de notre armée. Mais renvoyer en masse aujourd’hui ces miliciens, ce serait désorganiser nos bataillons de ligne.
M. Gendebien. - J’appuie ce que vient de dire M. le ministre de la guerre. Gardons-nous bien de commettre la même faute que celle qu’on a déjà faite et qui nous a été si funeste. Conservons notre armée intacte, je crois que nous en aurons besoin encore. (Oui ! oui !)
M. Legrelle. - D’après les explications de M. le ministre, ma proposition devient inutile.
- L’ordre du jour, proposé par la commission, est mis aux voix et adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur Th. Vreucop, à Geronville,ex-officier des gardes civiques, propose des modifications aux lois sur la garde civique. »
Former un seul ban composé de célibataires âgés de 20 à 40 ans ; n’admettre d’autres exemptions que celles prononcées par les articles 5 et 6 du décret du 31 décembre 1830 ; nommer un général des gardes civiques par province et un colonel inspecteur par district, telles sont les principales modifications proposées par le pétitionnaire aux lois sur la garde civique. Votre commission propose le dépôt de cette pétition au bureau des renseignements.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur de Wautier de Baillamont, à Vresse (Dinant), demande une pension de retraite en qualité d’ancien président de la cour de Bouillon. »
- La chambre passe à l’ordre du jour.
M. Milcamps, rapporteur. - « « Le sieur J. Meuris, à Bruxelles, dont le seul fils est remplacé dans la réserve des 30,000 hommes, demande pour ce remplaçant la faveur d’une permission sans terme. »
Votre commission vous propose l’ordre du jour.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « Même demande de la dame Gertrude Dits, dont le mari est remplaçant au 5ème bataillon du 1er régiment.
- Ordre du jour.
M. Milcamps, rapporteur. - « Trois habitants de Liège faisant partie du 1er ban de la garde civique demandent à jouir pour cette année, comme les précédentes, de l’exemption du service, ayant des frères remplacés dans le même service. »
Comme il appartient à la députation des états de statuer sur les réclamations de la nature de celle dont il s’agit, votre commission propose l’ordre du jour.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « La dame veuve P. Lauwers, à Bruxelles, dont le mari, guichetier à la prison civile de Bruxelles, est mort à la suite des troubles du mois de mars 1831, demande une pension. »
La pétitionnaire expose que son mari a exercé cette place pendant 12 ans à la prison civile et militaire de Bruxelles, qu’il est mort par suite des fatigues et des mauvais traitements qu’il a essuyés dans ce poste pendant les premiers temps de la révolution. Votre commission propose le dépôt de cette pétition au bureau des renseignements.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Milcamps, rapporteur. - « Quatre anciens militaires de Tournay demandent le rétablissement de la caisse de secours par souscription volontaire, pour l’encouragement et le soutien du service militaire. »
Ils recevaient, disent-ils, avant la révolution, des secours sur cette caisse ; actuellement ils en sont privés ; ils se sont adressés au gouvernement sans avoir obtenu de réponse. Votre commission propose le dépôt de leur pétition au bureau des renseignements.
M. Dumortier. - Messieurs, la question dont il s'agit n’est pas seulement relative à quatre anciens militaires, mais à un grand nombre de personnes blessées au service. A la suite de la bataille de Waterloo il fut formé un fonds pour leur assurer une pension, qui était certainement méritée puisqu’elle était le prix du sang, et s’il y a des dettes sacrées, ce sont bien celles-là. Dans l’arrondissement de Courtray seul, messieurs, il existe vingt et une personnes qui ont eu de ces pensions et qui à présent ne reçoivent plus rien. Il en est probablement de même dans les autres localités.
Les pétitionnaires ne réclament pas seulement le rétablissement de cette caisse, mais ils demandent en outre que leur pension leur soit payée d’une manière ou d’autre, et je crois qu’ils y ont des droits ; ils se sont adressés cinq fois au gouvernement, sans pouvoir obtenir de réponse ; c est donc d’une espèce de déni de justice qu’ils se plaignent, et ils sont dignes de toute notre sollicitude. Je conçois tout l’embarras de M. le ministre de la guerre dans cette circonstance, attendu qu’il n’a pas de fonds pour cet objet ; mais puisqu’on s’est emparé de la caisse au profit de l’Etat, sous le gouvernement provisoire, il ne semble qu’il doit examiner sérieusement dans le silence du cabinet, s’il n’y a pas lieu de demander un crédit pour payer ces pensions ; et à cet effet je demande que la pétition lui soit renvoyée.
M. le ministre de la guerre (M. Evain) - J’ai trouvé établi au ministère de la guerre le paiement de pensions à une trentaine de personnes sur le fonds de Waterloo. La régence de Bruxelles a obtenu que le ministre de la guerre fît l’avance de ces pensions pour 1830 et 1831. Il en sera de même pour 1832, et je n ai pas entendu dire que les fonds de cette caisse aient été divertis par le gouvernement provisoire. On m’a assuré qu’ils étaient encore en Hollande et c’est pour cela que le gouvernement a autorisé le ministre de la guerre à payer les pensions sur les dépenses imprévues. Si la régence de Tournay avait suivi la même marche que celle de Bruxelles, je ne fais aucun doute que cela ne lui eût été accordé également.
M. Legrelle. - En effet, messieurs, les fonds de la caisse dont il s’agit sont en Hollande, et le gouvernement ne peut payer que par anticipation. Mais il est des pensionnés qui sont entièrement privés de ce secours. Ils ont adressé un grand nombre de pétitions au département de la guerre. J’en ai présenté moi-même plusieurs, et l’on m’a fait de belles promesses ; mais on m’a dit qu’il faudrait que le ministre prît une disposition générale. Eh bien, c’est précisément cette disposition générale que je réclame.
Je trouve juste que le gouvernement paie à ces militaires ce qu’ils ont reçu avant la révolution. Ces pensions n’ont été accordées qu’à des gens dans la misère. C’est un droit acquis et, s’il est permis de donner des traitements d’attente à des hommes qui sont dans l’aisance, à plus forte raison faut-il payer le denier du pauvre pour fournir du pain à des malheureux qui en manquent. Si vous agissiez autrement, serait-ce le moyen, je vous le demande, de les attacher à notre nouvel ordre de choses ?
J’appuie la demande de renvoi à M. le ministre de la guerre.
M. Donny. - Il me paraît que le préopinant est dans l’erreur sur la caisse dont il s’agit. Il semble la considérer comme étant dans les mains du gouvernement hollandais, et il croit que, lors de la liquidation qui aura lieu entre les deux pays, on pourra réclamer le remboursement des avances qu’il propose de faire. Mais cette caisse n’est, si je ne me trompe, qu’une institution privée qui n’a rien de commun avec l’Etat. Lorsqu’un jour nous en viendrons à une liquidation, le gouvernement hollandais nous dira probablement qu’il n’a rien à démêler avec nous de ce chef, et que ceux qui ont des droits à faire valoir sur cette institution doivent s’adresser à ceux qui l’administrent.
Je pense que l’honorable préopinant est encore tombé dans l’erreur quand il a dit que les pensions dues par cette caisse n’avaient été données qu’à des malheureux qui se trouvaient dans le besoin. Sans doute, il y a de ces pensions qui ont été accordées à des nécessiteux ; mais si j’ai bonne mémoire, il en est d’autres qui ont été données à des personnes ayant de la fortune, et celles-là sont les plus fortes, puisque, s’il faut en croire certains bruits, elles s’élèveraient jusqu’à 4 ou 5,000 fr.
M. Dumortier. - J’ai en main une liste qui comprend 31 pensions sur le fonds dont il s’agit, et je vois que ces pensions ne s’élèvent que de 30 à 40 fl. La plus forte et de 48 fl. 30 c. Eh bien, messieurs, lorsque nous votons de millions pour des pensions de toute espèce, lorsque nous laissons à la disposition de la caisse de retraite une somme considérable, refuserons-nous le plus mince secours à ceux qui ont versé leur sang pour la patrie ?
M. le ministre de la guerre a dit que les pensionnés résidant à Bruxelles avaient été payés. Je demande que ceux qui résident dans les autres parties du royaume le soient aussi, afin qu’il y ait justice pour tous, justice distributive. S’il est besoin d un crédit spécial pour cela, M. le ministre peut être assuré que la chambre l’accordera. J’insiste pour que la pétition lui soit renvoyée.
M. Legrelle. - L’honorable M. Donny a été effrayé parce qu’il a cru qu’il s’agissait de pensions de milliers de florins ; mais il n’en est point ainsi. Les personnes qui ont pétitionné ne réclament que de très faibles sommes. D'ailleurs, on sait que cette caisse a été le produit de l’aumône, de cotisations.
M. Gendebien. - Je crois que M. le ministre de la guerre ne peut rien faire sans un crédit spécial voté par la chambre ; mais, en nous demandant ce crédit, il pourra nous dire s’il est vrai qu’il y ait des pensions de 3 et 4,000 florins sur un fonds destiné au malheur. Dans le cas affirmatif, il y aura lieu déposer une limite, comme de dire, par exemple, qu’elles ne dépasseront pas 300 francs.
M. le ministre de la guerre (M. Evain) - J’ai demandé à l’autorité provinciale l’état de toutes les catégories de ces pensions, et, autant que ma mémoire peut me servir, je n’ai rien vu qui s’élevassent au-dessus de 56 fl.
- Le dépôt au bureau des renseignements et le renvoi au ministre de la guerre sont successivement mis aux voix et ordonnés.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur G.-F.-L. Morant, ex-officier au 10ème bataillon de tirailleurs francs se plaint de n’avoir pas eu sa part dans 1’indemnité de 60,000 fl. »
La commission conclut au renvoi au ministre de la guerre.
M. Gendebien. - Je recommande spécialement la réclamation du sieur Morant à M. le ministre de la guerre. Je sais que M. le ministre a pour les militaires qui se trouvent dans ce cas des dispositions très bienveillantes, mais qu’il manque de fonds. J’espère qu’il demandera un supplément de crédit pour ceux qui n’ont encore rien reçu.
M. le ministre de la guerre (M. Evain) - Il est très vrai que, depuis le vote des 60,000 fl. fait par la chambre, des réclamations tardives me sont parvenues, lesquelles s’élèvent au nombre de 20 et à un total de 3 a 4,000 fl. Le sieur Morant figure parmi ces réclamants. Si je reconnais qu’il en existe qui aient des droits à être relevés de la déchéance, je proposerai un crédit supplémentaire.
- Le renvoi au ministre de la guerre est ordonné.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur N.-J. Michaux, propriétaire à Charleroy, demande que la chambre ordonne la liquidation de la créance qui lui revient du chef de prestations et avances de toute nature faites dans les premiers jours de la révolution. »
Le pétitionnaire élève sa créance à 8,400 fr. pour avances faites, dit-il, tant en armes qu’en munitions, chevaux, voitures, et pour la paie des volontaires qu’il conduisit au champ d’honneur. Votre commission propose le renvoi de cette pétition à M. le ministre de la guerre.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Milcamps, rapporteur. - « Le sieur F. Favella, de Lucques en Toscane, demeurant à Bruxelles, ex-caporal pensionné avec 150 fl. pour cause de cécité par ophtalmie, désirant retourner en Italie, s’adresse à la chambre pour obtenir la vente de sa pension. »
Votre commission vous propose l’ordre du jour.
- Adopté.
M. Milcamps, rapporteur. - « La dame Mathieu et le sieur Gelcart (Théodore) réclament contre une exemption du service dans la milice, accordée aux sieurs Xayier Lépine et Julien Ernotte, qui oblige leurs fils respectifs à marcher pour eux. »
Votre commission vous propose également l’ordre du jour.
- Adopté.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) demande la parole, et présente un projet de loi sur l’extradition.
- La chambre lui donne acte de cette présentation, ordonne l’impression et la distribution de ce projet, et le renvoie en sections.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) présente un autre projet de loi relatif à la dépense des dépôts de mendicité.
- La chambre en ordonne l’impression et la distribution, et le renvoie en sections.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je dois faire observer à la chambre que l’examen de ce dernier projet de loi est assez urgent en ce qu’il est lié au budget général des dépenses de l’Etat. La chambre comprendra qu’il m’eût été agréable de le lui présenter plus tôt, mais j’ai cru que sur une matière aussi importante j’avais besoin des lumières des administrations provinciales. Je les ai consultées, et ce n’est que dans ces derniers jours que j’ai reçu leurs avis. Ainsi, le retard qui a eu lieu dans la présentation de la loi n’a pas dépendu du gouvernement.
- La séance est levée à 4 heures et demie.