(Moniteur belge n°95, du 5 avril 1833 et Moniteur belge n°96, du 6 avril 1833)
(Présidence de M. Raikem.)
(Moniteur belge n°95, du 5 avril 1833) M. de Renesse fait l’appel nominal à midi et demi.
M. Dellafaille donne lecture du procès-verbal ; la rédaction en est adoptée.
Les pièces adressées à la chambre sont renvoyées à la commission des pétitions.
M. le président. - La parole est à M. Brabant, rapporteur de la section centrale.
M. Brabant monte à la tribune. L’honorable rapporteur s’exprime en ces termes. - Messieurs, la section centrale vous propose les articles suivants pour le budget de la guerre sur le pied de guerre :
« Art. 1er. Les dépenses du ministère de la guerre sont fixées sur le pied de guerre pour l’année 1833, conformément au tableau joint à la présente loi, à un total de …
« Art. 2. Les dépenses sont réglées par douzièmes et pour chaque mois ; jusqu’à autorisation nouvelle, le gouvernement ne pourra disposer que de six douzièmes.
« Art. 3. Aucun transfert ne peut avoir lieu d’un article à un autre du tableau ci-annexé. Néanmoins, les dépenses par douzièmes seront réglées sur la totalité du budget et non sur les spécialités des différents chapitres.
« Art. 4. Le montant du chapitre 6 (matériel de l’artillerie et du génie) n’est point compris dans les réserves énoncées aux deux articles précédents. »
Messieurs, la section centrale vous propose de ne mettre à la disposition du gouvernement que la moitié du montant total du budget de la guerre, pour le terme de six mois. Elle a cru devoir faire exception à cet égard pour le matériel de l’artillerie et du génie.
Pour qu’on ne puisse pas prendre le change sur les sentiments et les intentions de la chambre des représentants, elle a cru s’en rendre l’interprète fidèle en expliquant ici les motifs de cette restriction.
La nation est impatiente des lenteurs des négociations diplomatiques ; elle veut le dénouement de nos difficultés avec la Hollande. Pour arriver à cette fin, elle souscrira encore à de nouveaux sacrifices. Ce n’est donc point pour la soulager des dépenses qu’occasionne l’armée sur le pied de guerre, ce n’est point pour réduire cette belle armée, que nous avons organisée à grands frais, que nous vous proposons de n’allouer des subsides que pour six mois ; notre but unique (et qu’on le sache très bien) n’est autre que, les six mois écoules sans espoir d’une conclusion prochaine, de presser le gouvernement de recourir à des mesures énergiques propres à assurer l’indépendance de la Belgique. Dans ce cas, loin de nous opposer à des demandes de crédits, nous augmenterons, s’il en est besoin, nos moyens de coercition, et ne négligerons rien pour assurer le triomphe de nos armes. (Bien ! très bien !)
Le projet, messieurs, est à l’impression ; il vous sera distribué tout à l’heure.
M. le président. - Dans votre précédente séance, vous avez renvoyé à la séance de ce jour la discussion de l’article unique du chapitre 8 du budget de la guerre sur le pied de guerre.
« Article unique. Vivres de campagne et fourrages : fr. 7,880,000. »
Telle est la proposition de la section centrale.
La réduction sur la proposition du gouvernement est de 1,120,819 fr.
M. le ministre de la guerre propose une réduction plus considérable encore que celle de la section centrale ; il propose de porter le chiffre à 6,903.000 fr. ; la diminution est alors de 2,028,000 fr.
Mais M. le ministre de la guerre demande en même temps des suppléments de crédit pour les articles 6, 7, 8, 9 et 11 du chapitre 2, suppléments qui absorbent à peu près la diminution du chapitre 8.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Le chapitre 8 primitif se montait, d’après le gouvernement, à 8,931,819 fr. ; d’accord avec la section centrale sur les réduction à faire, mais en partant de bases différentes, je ne demande maintenant pour le chapitre 8 que 6,903,000 fr. La réduction que je propose est de 2,028,000 fr. La réduction de la section centrale n’est que de 1,120,000 fr.
J’ai vu que la section centrale, pour arranger son travail, avait rejeté sur le chapitre 8 les vivres de campagne, et tout ce que les corps de l’armée doivent payer pour l’indemnité de nourriture quand ils sont cantonnés chez les habitants. J’avais porté le paiement de cette nourriture dans le chapitre 2.
La différence entre mes calculs et ceux de la commission n’est qu’apparente. Le résultat est le même à une très légère somme près. Je demande pour plus de régularisation, et afin que les corps aient de quoi payer les habitants pour frais de nourriture, que la réduction que je propose sur l’article 8 soit portée aux articles du chapitre 2. C’est une mesure d’ordre et d’administration. La section centrale en a reconnu la nécessité. Ce n’est qu’un transfert qui n’augmente en rien la dépense. La répartition est faite entre les troupes de l’artillerie, du génie, l’infanterie, la cavalerie et la garde civique.
M. Brabant, rapporteur. - Il me serait impossible maintenant d’apprécier le transfert opéré par M. le ministre de la guerre. La section centrale a reconnu nécessaire d’allouer, à titre de supplément, des crédits pour acquitter les indemnités dues dans le cas où les troupes recevraient les vivres de campagne et seraient logées chez l’habitant.
Je crois qu’on peut opérer sans inconvénient le transfert proposé par M. le ministre de la guerre.
M. Jullien. - Malgré les réductions proposées, il y a encore dans ce chapitre 8 beaucoup de profusions, ainsi que dans beaucoup d’autres. La profusion que je veux signaler ici tient à ce qu’on délivre les rations de vivres de campagne au-delà des besoins, et au-delà de ce qui se pratique dans les premières puissances de l’Europe.
En France on sait ce qui doit revenir à un officier supérieur. Le colonel reçoit pour vivres de campagne 4 rations ; un général de brigade reçoit 6 rations ; un général de division en reçoit 8.
Chez nous le colonel en reçoit 6, le général de brigade en reçoit 18, et on donne encore à celui-ci des rations, pour un fourgonnier et pour un domestique, ce qui fait 20 rations. A 50 centimes la ration, un général de division a 10 fr. par jour, indépendamment de ses appointements et de ses frais de table.
Il y a là véritablement profusion d’autant plus que je ne peux pas concevoir comment on peut donner à la fois des vivres de campagne et des frais de table.
Les fonctionnaires publics doivent se borner à leurs appointements ; leurs appointements doivent leur suffire. Eh ! messieurs, ayez pitié des contribuables qui n’ont pas toujours de quoi dîner, tandis que vous donnez de quoi dîner trois fois à un officier-général : c’est la pure vérité.
Ma proposition a pour but de ne donner des vivres de campagne que quand on est en campagne ; mais quand même elle ne serait pas adoptée, on peut encore faire des économies sur la quotité même des vivres de campagne.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’ai fait faire le relevé de ce que reçoivent en France, les officiers-généraux, pour les vivres de campagne. Relativement aux officiers subalternes, ils reçoivent en Belgique les mêmes indemnités de campagne qu’en France ; mais pour les officiers supérieurs, la répartition est dans un ordre inverse. Comme je l’ai dit, je m’occupe d’un tarif où l’on diminuera les rations de vivres et celles de fourrages, et on ramènera les choses à peu près à ce qui se pratique en France.
M. Jullien. - L’économie qu’on se propose de faire, nous pouvons le faire dans la loi, à moins que la section centrale n’ait pris les réductions en considération dans les diminutions qu’elle propose.
M. Brabant, rapporteur. - Dans le tableau primitif qui nous avait été présenté à l’appui du chapitre, les officiers supérieurs étaient portés à 50,000 rations de vivres de campagne ; dans le tableau qui nous a été distribué hier soir il est encore question du chiffre de 50,000 rations il m’a été impossible d’apprécier ce chiffre.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Le chiffre de 50,000 fr. est fixé d’après le budget de l’année dernière. Ce chiffre sera réduit par le nouveau tarif ; ce sera une affaire de quelques milliers de francs.
M. Desmaisières. - Puisque nous en sommes à l’article fourrages, je demanderai à M. le ministre qu’il veuille faire connaître à la chambre s’il y a nécessité de maintenir le tarif fixé par l’arrêté du 18 septembre 1831, quant aux rations de fourrages allouées aux officiers des compagnies de cavalerie, d’artillerie de campagne et du train des équipages. Conformément à cet arrêté, il est porté au budget, pour chacun de ces officiers, trois rations de fourrages, et l’arrêté du 17 novembre 1814 n’allouait que deux rations par officier sur pied de guerre. Cet arrêté subsiste encore en Hollande, à ce qu’il paraît, et je pense que nous pourrions faire en cela comme les Hollandais. Il en résulterait une économie de 142,623 fr. 73 c. si l’on se bornait à retrancher le troisième cheval aux lieutenants et sous-lieutenants, pour lesquels cela me paraît d’ailleurs une charge ruineuse quant à l’achat, eu égard à leurs traitements. L’économie serait de 191,890 fr. 50 c., dans le cas où le troisième cheval serait retranché aussi bien aux capitaines qu’aux lieutenants et sous-lieutenants.
Je désire aussi savoir si, dans le calcul des fourrages pour les officiers d’état-major, M. le ministre a compris les 4,380 journées de chevaux, dont il a fait le calcul au tableau litt. F, et dont le prix n’est pas ensuite porté dans l’évaluation des sommes de ce tableau. Si ces 4.380 journées y étaient comprises, alors je demande une réduction de ce chef, car on ne peut donner trois chevaux à chaque officier de la compagnie des pontonniers. L’arrêté du 18 septembre 1831 se tait à cet égard, et pour une bonne raison : c’est qu’il n’était pas question encore des pontonniers en 1831. Prétendre que, parce qu’on a considéré la compagnie de pontonniers comme troupe d’artillerie, il faut accorder aux officiers de cette compagnie le même nombre de rations qu’aux officiers d’artillerie vu le silence à leur égard de l’arrêté du 18 septembre, serait mal raisonner.
Car d’abord je dirai qu’il est des pays où les pontonniers forment une troupe du génie, qu’il faut avant tout examiner s’il y a nécessité d’allouer autant de rations, et que, dans le cas où un arrêté ultérieur se tait, il faut alors suivre les dispositions de l’arrêté qui précède. Or, ici l’arrêté antérieur, c’est celui du 17 novembre 1814, qui n’alloue aux officiers de la compagnie des pontonniers aucune ration de fourrages, tant sur le pied de guerre que sur le pied de paix.
Je termine en déclarant que je me réglerai sur les explications du ministre, selon qu’elles me paraîtront plus ou moins fondées, pour déposer sur le bureau des amendements en conséquence.
M. Jullien. - Pour pouvoir fixer le chiffre de la réduction, je prie M. le général, ministre de la guerre, de vouloir bien dire quelle est la différence qui résulte du tarif français comparé au tarif belge.
M. le ministre de la guerre (M. Evain) présente les éléments des calculs et il indique par quelles opérations on peut arriver au résultat demandé par l’honorable préopinant.
M. Osy. - Nous pouvons allouer sans rien changer ; on trouvera la différence par le nouveau règlement, par les nouveaux tarifs.
M. A. Rodenbach. - Messieurs, nous devons avoir assez de confiance dans M. le ministre de la guerre pour adopter la réduction qu’il a proposée, sans admettre l’amendement de M. Jullien.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je crois qu’il est effectivement dans l’ordre de voter le chapitre 8 qui clora les chapitres du budget de la guerre ; nous discuterons ensuite la proposition de M. Jullien qui a son application sur ce chapitre et sur les chapitres 2 et 9.
M. Brabant, rapporteur. - Je ne crois pas qu’un ministre en qui nous n’aurions pas confiance se trouvât gêné par la réduction proposée par M. Jullien. Il n’y a pas de spécialité dans le budget ; on peut retrancher sur le soldat pour ajouter à l’officier supérieur. Qu’on alloue les vivres de campagne aux officiers qui sont réellement en campagne ; et l’on doit considérer dans cette situation ceux qui vivent dans les camps et dans les cantonnements sur une zone que détermine mon amendement.
- Le chapitre 8 avec le chiffre de 6,903,000 fr., proposé par le ministre de la guerre, est mis aux voix et adopté.
M. le président. - M. le ministre demande ensuite les augmentations suivantes sur les articles du chapitre 2 :
Art. 6. Troupes d’artillerie, fr. 117,368 15
Art. 7. Troupes du génie, fr. 12,453 37
Art. 8. Infanterie, fr. 624,812 00
Art. 9. Troupes de cavalerie, fr. 96,075 75
Art. 11. Garde civique, fr. 123,631 74
- Toutes ces augmentations mises successivement aux voix sont adoptées.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je crois que maintenant on doit délibérer sur la proposition de M. Jullien, comme étant la plus large.
M. Osy. - Je demande que M. le ministre de la guerre abandonne les frais de table.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je dois observer qu’à l’occasion de l’amendement de M. Julien je rentrerai dans la question principale et que je proposerai un article au budget.
M. le président. - Voici les propositions de MM. Brabant et Jullien :
Amendement de M. Brabant : « Hors les cas d’hostilité, les frais de représentation et les vivres de campagne ne seront accordés aux officiers-généraux et supérieurs que pour le temps qu’ils passeront dans les camps, ou que les troupes sous leurs ordres seront cantonnées dans une zone de cinq lieues de la frontière ennemie. »
Amendement de M. Jullien :
« Les sommes suivantes, savoir :
« Sur les divers articles du chapitre 2 (fourrages), celle de fr. 456,250 00
« Sur l’article 1er du chapitre 3, celle de fr. 74,350 00
« Sur le chapitre 8, celle de fr. 661,780 00
« Sur le chapitre 9, celle de fr. 101,940 00
« Ensemble fr. 1,215,320 00 ne seront disponibles qu’en cas d’hostilités et d’entrée en campagne.
« La présente disposition n’est point applicable aux dépenses déjà faites sur ces mêmes sommes pendant le premier trimestre de l’année. »
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Messieurs, si les considérations que j’ai eu l’honneur de vous exposer lundi dernier sur les conséquences fâcheuses qui résulteraient de l’adoption de la proposition de l’honorable M. Jullien, n’ont pas produit l’effet que j’en attendais, permettez-moi d’entrer dans quelques nouvelles explications, aujourd’hui que cette proposition a été, de générale qu’elle était, formulée en chiffres qui en fixent mieux toute la portée et toutes les conséquences.
Sur la somme totale de ces réductions proposées, dont le montant, pour l’année entière, est de 1,297,000 fr., et qui se réduit à celle de 969,000 fr., défalcation faite du quart pour le premier trimestre écoulé, se présente d’abord la somme de 566.000 francs pour la valeur des vivres de campagne alloués aux officiers de l’armée, dont les troupes sont campées ou cantonnées chez l’habitant.
L’effet de cette première réduction serait de priver tous ces officiers des vivres de campagne, quand leurs troupes les reçoivent : aussi, messieurs, dans les huit régiments d’infanterie qui doivent être réunis dans les quatre camps projetés, du 20 au 30 de ce mois, mesure qui doit procurer une véritable économie par la suppression de l’indemnité de logement chez l’habitant et la diminution de la dépense pour la fourniture des vivres des campagne ; dans ces huit régiments, dis-je, les soldats recevront nécessairement leurs vivres de campagne, car il est impossible de les faire vivre autrement, et les officiers en seraient privés.
Où voulez-vous, messieurs, qu’ils se procurent leur nourriture, au milieu des bruyères, où ces camps vont être établis ? Il faudrait nécessairement qu’ils quittassent le camp pour aller dans les communes voisines se procurer leurs aliments, qu’ils fussent une partie de la journée hors du camp ; et que deviendrait la discipline pendant leur absence ?
Ce serait, je vous l’avoue, une anomalie sans exemple que de voir des troupes campées, dont les sous-officiers et soldats recevraient les vivres de campagne et dont les officiers en seraient privés.
Ce que je dis ici des camps s’applique également aux cantonnements sur la frontière, où les troupes sont agglomérées dans quelques villages qui souvent ne présentent que peu de ressource, et où les officiers ne trouvent à vivre qu’au moyen des rations qui leur sont distribuées.
Je crois donc devoir insister pour que là où les sous-officiers et soldats reçoivent leurs vivres de campagne, là aussi les officiers n’en soient pas privés.
Il en est de même de l’indemnité représentative de ces rations, quand les sous-officiers et soldats sont nourris chez l’habitant. C’est un bien faible dédommagement du surcroît de dépenses que les officiers sont tenus de faire pour leur nourriture dans ces villages, où ils ne peuvent trouver de pensions ou ils se réussissent comme en garnison.
Je vous rappellerai, messieurs, que cette indemnité représentative des rations de vivres est de 42 centimes par jour, c’est-à-dire de 12 fr. 60 c. par mois, pour tous les grades indistinctement, depuis le général de division jusqu’au sous-lieutenant, et quel que soit le nombre des rations qui d’après les règlements leur soient allouées en nature.
Il résulterait, messieurs, de la suppression de ces deux allocations que les officiers faisant partie de l’armée active seraient moins bien traités sur le pied de guerre que ceux qui sont tranquillement en garnison, où ils trouvent facilement des pensions à bon compte pour leur nourriture ; et ce serait ainsi qu’on dédommagerait les premiers des fatigues qu’ils essuient, des privations qu’ils éprouvent et de la détérioration nécessairement plus prompte de leurs effets d’habillement et d’équipement !
C’est, je vous l’avoue, le renversement le plus complet des idées généralement admises jusqu’ici sur l’indispensable nécessité d’accorder quelque supplément de traitement aux officiers d’une armée sur le pied de guerre.
Et, pour qu’une armée soit mise sur le pied de guerre, il ne faut certainement pas attendre que les hostilités soient déclarées, lorsqu’elles peuvent surgir du moindre événement politique, ou de la volonté d’un ennemi qui a déjà pris l’initiative de l’attaque lorsqu’il y avait armistice, et qui, à plus forte raison, peut la prendre aujourd’hui que l’armistice n’existe plus.
Je crois donc, messieurs, vous avoir démontré l’impossibilité d’admettre la suspension de ces allocations jusqu’à la prise réelle des hostilités.
La seconde réduction consiste à supprimer, le jour même que la loi sera promulguée, les raisons de fourrages accordées aux officiers-généraux et aux officiers d’état-major, aux officiers de cavalerie et d’artillerie de tout grade et aux officiers supérieurs d’infanterie, en sus du nombre de ces rations qui leur sont accordées en temps de la paix la plus profonde.
Le général de division ne devra conserver que 4 chevaux, le général de brigade 2 seulement, etc. Le résultat d’une telle mesure serait d’obliger tous les officiers de l’armée, ayant droit à avoir le nombre de chevaux fixé pour le pied de guerre, à vendre de suite les chevaux qui ont toujours été reconnus nécessaires pour faire la campagne, ou bien de les nourrir à leurs frais, s’ils sentent, comme je n’en doute pas, le besoin de les conserver pour remplir leur devoir devant l’ennemi et parer aux pertes qui résultent de l’état de guerre.
J’avais évalué cette allocation à une dépense de 456,000 fr., et je suis en mesure aujourd’hui d’en fixer le chiffre exact.
Le nombre de rations de fourrages allouées par le budget, en sus du nombre de celles qui le seraient sur le pied de paix, est de 1,526. D’après le relevé que j’ai fait faire du nombre des chevaux d’officiers réellement existant au 16 mars dernier, ce nombre est de 2,207.
Sur le pied de paix il devrait être réduit à 1,416.
Différence en plus, 791
Ainsi ce sont 791 chevaux que les officiers de l’armée devraient vendre de suite ou nourrir à leurs frais s’ils veulent, comme je le suppose, les conserver, du moins en partie, pour assurer leur service : c’est une dépense de 1,000 fr. par jour pour les rations de ces 791 chevaux, ce qui fait 365,000 fr, pour l’année ; je l’avais évaluée à 456,000 fr. dans son éventualité.
Le règlement qui va paraître sur cette partie du service réduit le supplément de chevaux sur le pied de guerre à 800 chevaux, au lieu de 1,526, chiffre résultant des règlements actuels, et cette réduction sera motivée : c’est là où nous trouverons une véritable économie ; mais, messieurs, ne forçons pas les officiers à vendre leurs chevaux, ou à les nourrir à leurs frais, s’ils désirent les conserver pour pouvoir s’en servir quand il en sera besoin.
Ainsi, messieurs, ces deux allocations de vivres et de fourrages doivent nécessairement être maintenues, si vous voulez avoir une armée réellement organisée, et elles se montent ensemble, pour les officiers de l’armée, à la somme totale de fr. 1,023,000.
Ce que je viens d’exposer s’applique naturellement aux vivres et aux fourrages alloués aux officiers-généraux, et qui figurent pour une somme de fr. 94,000.
Total, fr. 1,117,000.
La suspension proposée des allocations sur le pied de guerre ne peut donc réellement plus peser que sur les trois articles suivants :
Indemnité de frais de bureau, fr. 74,000.
Entretien des fourgons, fr. 12,000.
Traitement extraordinaire pour frais de table, etc., fr. 92,000.
Total, fr. 178,000.
Je ferai observer sur le premier article que la chambre a positivement manifesté son intention sur le montant de ces dépenses en retranchant 14,500 fr. sur la somme demandée, et en reconnaissant que, tant que l’armée restera organisée en divisions et brigades, il faudra un chef d’état-major général, des chefs d’état-major des divisions, des commandants d’artillerie et du génie, des intendants et des sous-intendants militaires, et qu’il est de toute justice de leur allouer des frais de bureau, qu’on tire ou non des coups de fusil ; et à ce sujet, je vous dirai franchement que l’on fait moins d’écritures quand on se bat, que lorsqu’on reste l’arme au bras, Que ces indemnités soient plus ou moins fortes. c’est au gouvernement à les régler d’après les fonds accordés par la loi du budget.
Je passe au second article de 12,000 fr. pour entretien de fourgons, et je me fais un plaisir d’annoncer que cette sorte de dépenses va cesser d’après le nouveau règlement, qui substitue des chevaux de bât aux fourgonnettes. Cette mesure procurera en outre économie dans le nombre de chevaux.
Reste donc l’article du supplément de traitement pour frais de représentation et de table, et qui se monte à 92,000 fr. pour l’année. Cet article est le seul et le véritable objet de tout le débat.
Mais, avant d’exposer de nouveaux moyens à l’appui de mon opinion, qu’il me soit permis, messieurs, de revenir sur le fait de clandestinité qu’on a semblé me reprocher, en faisant porter cette dépense sur le chapitre des dépenses imprévues de 1832.
Je suis heureux de pouvoir vous déclarer que, sur les trois millions de florins dont j’ai fait remise pleine et entière sur le budget de 1832, la somme de 123.000 florins est restée disponible sur celle de 410,000 qui était allouée au budget pour la solde et les traitements des officiers-généraux et d’état-major. Certes, si je n’avais pas été conduit par un esprit d’ordre et raisonné sur l’allocation à faire des dépenses, je pouvais porter ces 27,000 florins, objet de tout le litige, sur l’article premier du chapitre 2, où j’aurais encore laissé disponible une somme de 96,000 florins.
Mais non, je ne voulus pas, et cela bien sciemment et par le raison que cet article premier du chapitre 2 ne portait pas d’allocations de ce genre, et qu’il fallait ne porter de dépenses que celles de la nature qui y était prévue.
Je ne pouvais donc porter cette dépense qu’au chapitre des dépenses imprévues, et c’est ce que j’ai fait pour être conséquent à la lettre et à l’esprit de la loi du budget.
Il résulterait de la suppression proposée, et je le prouve d’une manière tout à fait incontestable, que les officiers-généraux seraient moins bien traités sur le pied de guerre que sur le pied de paix, et cela est encore une anomalie qui ne s’est jamais produite chez aucun peuple et dans aucun temps.
Je le prouve par les assertions que je vais exposer et qu’il me paraît difficile de rétorquer :
1° La solde, proprement dite, est la même sur le pied de paix et sur le pied de guerre. C’est évidemment parce que les officiers-généraux ont droit, conformément aux règlements existants, à un traitement supplémentaire sur le pied de guerre.
2° En temps de paix, l’officier-général ne bouge pas$ qu’il n’ait droit à des frais de poste et à des indemnités de séjour, trop considérables peut-être d’après les règlements existants.
Sur le pied de guerre, il n’a droit à aucune espèce d’indemnité, parce qu’il doit avoir ses chevaux de selle et de calèche.
Ainsi, sur le pied de guerre, le général est évidemment moins bien traité.
3° Mais, dira-t-on, le gouvernement lui donne des rations de fourrages pour 12 chevaux ? Eh ! messieurs, n’est-ce pas déjà une grande charge pour un officier-général d’acheter, sans gratification d’entrée en campagne, 6 et 8 chevaux de prix, dont le capital dépérit chaque jour, et qui l’oblige à solder et nourrir plusieurs domestiques dont il se passerait en temps de paix ?
4° Enfin, messieurs, cet officier-général, séparé de sa famille et de son ménage, est nécessairement astreint à un excès de dépenses, de ce fait seulement, et qui n’a pas lieu en temps de paix.
Voilà, messieurs, le véritable état des choses, et je vous laisse à prononcer.
C’est par ces considérations et d’autres qui se rapportent à la proposition, plus restreinte à la vérité, de l’honorable M. Brabant, que je crois devoir m’opposer également à son adoption.
M. Gendebien. - Lorsque je me suis plaint des allocations faites aux officiers-généraux, je n’ai pas entendu dire qu’ils n’avaient pas besoin ou qu’ils avaient besoin de ces sommes. J’ai fait remarquer que le ministre de la guerre avait dû prendre sur les dépenses imprévues de 1832 les allocations accordées à titre de frais de bureau et de frais de représentation, et j’ai ajouté que pour l’année dernière il n’y avait pas d’inconvénient, puisque la dépense n’avait pas été prévue, mais que c’était inconstitutionnel que, pour 1833, le ministre ne présentant pas de crédit spécial pour cet objet, allait donc encore prendre ces dépenses sur les fonds imprévus, quoique la dépense fût très bien connue ; que pour tout régulariser, et pour se conformer à la constitution, il fallait porter au budget la somme rigoureusement nécessaire, et au chapitre que la chose concerne.
J’ai même ajouté que si l’on croyait nécessaire d’augmenter les traitements des officiers-généraux et en particulier du chef d’état-major, j’étais prêt à voter une majoration de ce chef, et au lieu de 16,900 fr., d’en accorder 25, 30, et même 35,000 ; mais avant tout j’ai demandé de la régularité et du respect pour la constitution, qui est, pour la chambre comme pour le ministre une règle invariable de conduite. J’ai dit que si on s’écartait, sous un prétexte quelconque, de cette voie, il n’y avait plus de sécurité dans nos votes, et que nous ne pouvions savoir si, en votant le strict nécessaire, nous ne laissions pas au ministre la faculté de faire des prodigalités.
Il est exact de dire qu’en général les officiers ont plus de dépenses à faire en état de guerre qu’en état de paix ; mais ce n’est pas une raison pour accorder aux supérieurs 12 rations de fourrages, 13 rations de vivres et des frais de représentation. Les autres officiers doivent aussi avoir plus de chevaux quand ils entrent en campagne. Eh bien, vous ne leur accordez de fourrages que proportionnellement au nombre de leurs chevaux, et vous ne les indemnisez ni pendant, ni après la guerre.
Maintenant je conviens qu’il y aurait peut-être de l’inconvénient à soumettre à un intendant, et même à l’intendant en chef de l’armée, qui est général de brigade, le contrôle des vivres d’un général de division. Mais il est un moyen bien simple de tout concilier : qu’on exige que les officiers-généraux aient dans leurs écuries un nombre fixe et déterminé de chevaux, et qu’on donne des fourrages pour les chevaux. Alors il est certain que ces officiers auront le nombre de chevaux nécessaire au service au moment d’entrer en campagne ; tandis qu’en leur allouant des rations de fourrages en sus du nombre effectif de chevaux, vous n’êtes pas certains qu’ils auront le strict nécessaire au moment d’entrer en campagne Ainsi, nombre fixe de chevaux sans contrôle. De cette manière, et d’après la promesse le M. le ministre de la guerre, d’après la confiance que nous avons tous en lui, nous pouvons voter le chiffre, sauf à y revenir à la fin de juillet si, contre mon attente, le ministre manquait à la parole. J’aime à croire, et je suis même convaincu qu’il n’y manquera pas.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Eclairé par la discussion des chambres sur quelques-uns des abus qui règnent dans l’administration de la guerre, mon premier devoir sera d’y parer et d’y mettre fin. Déjà, quoique les délibérations de la chambre prennent une grande partie de mon temps, je me suis occupé de divers règlements, et j’espère que dans la quinzaine on verra l’accomplissement de tout ce que j’ai promis. Maintenant je conviens franchement qu’il serait bon que les officiers supérieurs n’eussent pas autant de latitude sur le nombre de leurs chevaux, et qu’ils fussent forcés d’en avoir un nombre déterminé. C’est dans les prévisions de mes règlements sur les vivres et les fourrages que sera fixé un chiffre également juste, en égard aux exigences du service et au besoin des économies.
J’en reviens au traitement des officiers-généraux, et en cela je crois soutenir une cause juste. Lorsque j’ai fait mon contre-rapport, il fallait rendre compte de la manière dont les premiers mois ont été payés. En conséquence, je proposais de majorer le chapitre relatif à cet objet de 14,000 fr., déjà dépensés. Mais, d’après des comptes exacts, je puis maintenant réduire le chiffre à 72.000 fr., et je le proposerai lorsque nous en serons venus aux amendements de MM. Brabant et Jullien.
M. Osy. - Les observations de M. le ministre de la guerre m’ont frappé, pour ce qui regarde les vivres de campagne. Quand ils seront dans les camps, je conçois bien que les officiers aient besoin de ces vivres. Je crois donc qu’il faut sous-amender la proposition de M. Jullien, et dire : « Ne seront disponibles qu’en cas de campement, d’hostilité et d’entrée en campagne, etc. » Il me semble que, de l’adoption de cette proposition ainsi amendée, résulterait une grande économie.
Pour ce qui regarde les chevaux des officiers supérieurs, puisque M. le ministre de la guerre nous a dit qu’il allait faire un règlement, je crois que ce règlement pourrait disposer pour le pied de guerre, pour le pied de paix et pour le pied de rassemblement. Le pied de rassemblement est celui qui existe aujourd’hui, et les officiers n’auraient besoin que d’une très petite augmentation de chevaux lors de l’entrée en campagne.
Quant aux frais de table, je crois que le tarif actuel est trop considérable, et si M. le ministre de la guerre veut le diminuer, cela rentre encore dans la proposition de M. Jullien.
M. Brabant. - Je répéterai de nouveau que je ne crois pas qu’on puisse déraciner les abus par des réductions. Pour cela il faut des lois et de bons règlements, qui soient franchement exécutés. J’allouerai volontiers des frais de représentation aux officiers supérieurs, mais sous la condition qu’il en soit fait un bon usage, et dans les cas d’hostilités, de campement et de cantonnement dans une zone de cinq lieues de la frontière ennemie. Je crois que l’adoption de mon amendement déracinerait tous les abus, et de cette manière il deviendrait inutile de s’occuper de l’amendement de M. Jullien.
M. Jullien. - On ne peut pas déraciner les abus avec des réductions, a dit le préopinant. Eh bien moi je soutiens la proposition contraire. C’est avec les réductions qu’on déracine les abus, et il n’y a pas d’autre moyen d’y parvenir ; car si vous ne faites pas de réductions alors que les abus résultent de règlements et d’arrêtés qui sont à la disposition du pouvoir exécutif, comment arriverez-vous à les déraciner ?
Maintenant, quant à ma proposition, elle a été, dans la discussion, suffisamment développée, et je n’y reviendrai pas, parce que je crois que la chambre est bien instruite sur cette matière. Mais, dit-on, cette proposition peut s’appliquer à tel article de dépense sans qu’elle puisse s’appliquer à tel autre. J’ai l’honneur de faire observer à la chambre que les sommes qui y sont portées ont été prises dans la note que M. le ministre de la guerre a eu la complaisance de me fournir ; j’y ai relevé tout ce qui consistait en indemnité et en frais divers, comme conséquence du pied de guerre.
On a demandé : Comment fera-t-on pour ne pas accorder de vivres de campagne si l’armée est sur le pied de rassemblement ? Mais faites attention que voilà deux ans qu’on nous parle de l’imminence des hostilités et qu’on nous répète la même chose : c’est toujours la nécessité de mettre l’armée sur le pied de guerre et de fournir des fonds considérables, et nous sommes encore dans la même position qu’il y a 18 mois. Chez aucune puissance militaire les vivres de campagne ne se donnent à une armée en état de rassemblement ; on accorde seulement une légère indemnité aux officiers. En effet, il y a une espèce de contre-sens à délivrer des vivres de campagne quand on n’est pas en campagne.
Dans tous les cas, je vous prie de faire bien attention à ce point, qu’il n’y a pas moyen de concilier les frais de table avec les vivres de campagne : ce sont deux fois des frais de table, non compris le traitement. Je défie qu’on me cite l’exemple que chez aucune puissance militaire on donne en même temps des vivres de campagne et des frais de table, parce que les vivres de campagne sont eux-mêmes des frais de table.
Pour les fourrages, on nous a fait craindre encore des dangers qui me semblent chimériques. Les officiers, dit-on, seront obligés de disloquer leurs équipages, de vendre leur chevaux. Je ne crois pas qu’il y ait un seul général de division qui ait 12 chevaux, et je ne crois pas non plus qu’un seul général de brigade ait le nombre de chevaux voulu pour entrer en campagne : donc, s’ils ne les ont pas, ils ne seront pas forcés de les vendre. Du reste, les sommes comprises dans ma proposition sont au nombre de 4. La chambre pourra la rejeter pour les fourrages et la maintenir quant aux autres articles, selon qu’elle jugera à propos de le faire dans sa sagesse.
Je n’ai pas trop bien compris les calculs qu’a établis l’honorable général, ministre de la guerre, pour prouver que les officiers-généraux sont moins bien traités sur le pied de guerre que sur le pied de paix. Tout ce que je puis dire, c’est que, s’ils sont traités sur le pied de guerre comme ils le sont sur le pied de paix, je crois qu’ils n’ont pas à se plaindre. Quand j’additionne toutes les sommes portées au tableau de la cour des comptes, et que je trouve plus de 60,000 fr. pour un seul officier-général, cela me semble bien assez, surtout pour une puissance de troisième ordre comme la nôtre.
Je ferai une autre observation à la chambre. On va mettre aux voix ma proposition et celle de M. Brabant ; mais si on les rejette, M. le ministre de la guerre va encore vous proposer, au lieu de diminutions, des majorations. Dès lors, il faut se régler là-dessus. Quant à moi, j’ai présenté ma proposition dans l’intention non pas, je le répète de nouveau, de rien ôter aux militaires de ce qui leur est légitimement dû, mais de supprimer les profusions qui font crier. On me dit : Ne craignez-vous pas les plaintes de l’armée ? D’abord, je répondrai que ma proposition ne frappe que les officiers-généraux ; ensuite, l’armée est nationale, elle se compose des fils de la nation. Par conséquent, si vous mécontentez la nation, vous mécontentez l’armée.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je regrette que la cour des comptes ait jeté dans l’erreur les honorables représentants qui ont dû s’en rapporter à ses tableaux, qui sont fort inexacts. Un général de division a 16,900 francs de traitement, et il reçoit pour frais de représentation 7,600 fr., ce qui fait 24,500 fr. il reçoit aussi des fourrages et des vivres, mais c’est pour ses chevaux et ses domestiques.
La cour des comptes a ajouté les 10,000 fr qui sont payés au chef d’état-major-général, et les 2,500 qui reviennent aux colonels de divisions ; puis elle a encore mis en ligne de compte 6,000 fr. pour loyer de l’hôtel que le gouvernement a pris à sa charge pour loger l’état-major de l’armée. Ainsi, le lieutenant-général a 24,500 fr. sur le pied de guerre, et non pas 60,000 fr.
M. de Robiano de Borsbeek. - Nous sommes tous capables de faire des chiffres ; mais nous ne sommes pas aussi en état de bien calculer tout ce qui est nécessaire pour former une bonne armée. M. le ministre de la guerre, en qui nous avons confiance, vient nous dire que l’armée doit être prête à tout événement.
Dans le temps d’hostilités réelles, il n’y aurait pas lieu à établir de distinction comme le propose M. Brabant. Je crois que nous devons consentir au petit sacrifice qu’on nous demande, surtout quand nous en avons fait tant d’autres. Il faut passer sur les frais de table dans les circonstances où nous sommes. Il peut résulter un grand bien pour le pays des relations qu’entretiendra le général avec ses officiers, en les recevant à sa table. Je sais qu’en général les traitements dans notre armée sont considérables ; mais ce n’est pas le moment de les réduire. Si l’on supprimait les frais de table, nos officiers se rappelleraient qu’ils étaient payés sous l’ancien régime, comme ils sont encore payés en France et en Hollande.
Je ferai remarquer que quand nous avons voté les dépenses imprévues, le ministre a consenti à une diminution. Nous devons viser maintenant, plutôt à avoir une bonne armée, qu’à faire des économies de chevaux.
M. A. Rodenbach. - J’appuierai l’amendement de M. Brabant tendant à n’allouer des frais de représentation et des vivres de campagne aux officiers-généraux et supérieurs que pour le cas d’hostilités et pour le cas où les troupes sous leurs ordres seraient cantonnées dans une zone de 5 lieues de la frontière ennemie. Mais quant aux frais de table dont a parlé le préopinant, je ne saurais les accorder aux généraux amphitryons. (On rit.) Car on en a vu qui, au lieu de faire des dépenses, avaient des goûts extrêmement modestes, et qui dînaient aux tables d’hôte à 1 fr. 50 c. Or, si l’on veut resserrer les liens d’amitié du supérieur et de ses officiers, il faudrait que la somme donnée pour frais de table fût dépensée.
On m’a cité les noms de généraux qui poussaient la parcimonie si loin qu’ils acceptaient souvent des repas dans leur logement. Dès lors, je crois qu’on peut faire une diminution de ce chef. Il restera encore aux généraux, non compris les vivres de campagne et les fourrages, 17 à 18 fr. de traitement.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Comme il sera effectivement possible dans les règlements que je ferai sur les différentes branches du service, de réduire au strict nécessaire et de renfermer dans de justes limites les allocations pour frais de représentation et de table, je ne demande pas la totalité de la somme, quoique trois mois soient déjà écoulés, pour continuer ce qui a été commencé. Je demanderai que l’article premier du chapitre 2 soit majoré de 72,000 francs, qui seront diminués sur le chapitre 9. Ainsi ce ne sera qu’un simple transfert.
M. Angillis. - Je conçois, messieurs, toute la difficulté qu’il y a de discuter un budget de la guerre dans les circonstances particulières où se trouve le pays, mais je dirai avec l’honorable M. Jullien qu’il y a une espèce de contradiction, un double emploi à donner des vivres de campagne et des frais de table. Il m’est impossible de passer là-dessus.
Quant aux fourrages, je n’ai rien à dire ; je conçois qu’un officier-général doit toujours se tenir prêt à entrer en campagne. Mais, pour les frais de table, je me crois obligé de répéter encore qu’un haut fonctionnaire doit pouvoir dîner à ses frais.
L’amendement de M. Jullien est juste et rationnel, parce qu’il rentre dans les véritables principes, principes qui nous imposent l’obligation de ne pas être prodigues des deniers de l’Etat. Il n’est personne de nous qui veuille retrancher à l’armée ce qui lui est nécessaire. Nous voulons même lui donner plus que le nécessaire. Depuis que l’armée est devenue citoyenne, elle ne peut pas nous être indifférente. Mais il ne faut pas faire de profusions. J’appuierai donc la proposition de M. Jullien.
M. le général Nypels, commissaire du Roi. - Messieurs, pour éclairer autant que possible la discussion et motiver ce qui a été fait et ce qui a été demandé par M. le ministre, j’ai fait quelques recherches dans les anciens règlements ; je vais vous les communiquer. Ce qui est relatif aux frais de bureau n’a plus d’à-propos direct puisque vous avez pris une décision, mais servira à prouver que cette allocation est entièrement distincte de la solde et des suppléments de solde.
Pour l’intérieur, les arrêtés du 18 vendémiaire an X et 20 vendémiaire an XI accordaient aux généraux commandant les divisions territoriales un supplément de traitement de 500 fr. par mois.
Ce supplément a éprouvé diverses fixations ; elles se trouvent réglées par le décret de l’empereur du 1er avril 1808, savoir :
Le commandant de la 23ème division, 2,000 fr. par mois ;
Les commandants de 14 divisions désignées par leur numéro, 1,000 fr. par mois ;
Les commandants des autres divisions, 500 fr. ;
Les généraux de brigade commandants dans les départements, 250 fr.
Les fonctions de chef d’état-major dans les divisions territoriales étaient remplies par des adjudants-commandants, et les frais de bureau qui leur étaient alloués, fixes à 300 fr. par mois.
Des indemnités de logement sont payés aux officiers lorsqu’ils ne sont ni campés, ni baraqués, ni logés dans les bâtiments militaires.
Le tarif fixe cette indemnité à 6,000 fr. par an pour un commandant en chef d’une armée ou corps d’armée, soit à l’intérieur, soit à l’extérieur ; à 1,800 fr. pour les généraux de division, et à 1,200 fr. pour les généraux de brigade.
Aux termes de l’article 9, titre III de l’arrêté du 16 vendémiaire an IX, les généraux jouissaient du moment où ils étaient arrivés à l’armée d’un supplément d’appointements.
Ce traitement extraordinaire tenait lieu d’indemnité de frais de représentation ; il était pour les généraux de division de 12,000 fr. par an, pour les généraux de brigade de 4,200 fr.
Ceux des généraux qui remplissaient les fonctions de chef d’état-major aux armées, avaient des traitements particuliers réglés par des décisions spéciales.
Les généraux avaient en outre droit à des frais de bureau réglés par le ministre ; et on trouve au tarif n°3 :
Chef d’état-major général d’une armée ou d’un corps d’armée commandé par un général en chef, 6,000 fr. par mois.
Il est également accordé des frais de bureau aux adjudants-commandants chargés du détail des divisions dans les camps ou armées ; la décision du premier consul, du 22 frimaire an XII, les fixe à 300 fr. par mois.
Une décision ministérielle du 31 décembre 1806 porte : « Ce n’est pas à l’officier-général, mais bien à l’officier particulier qui exerce, que les frais de bureau doivent être alloués ; ils ne peuvent être considérés comme faisant partie du traitement, ils ne sont dus que pendant les fonctions qui y donnent droit. »
Le règlement du 23 germinal an VI, et l’arrêté du 19 germinal an X, ont réglé le nombre des rations de vivres et de fourrages dues à chaque grade.
Le tarif n° 36 fixe le nombre des rations allouées à chaque grade en campagne et dans les rassemblements, savoir :
Lieutenants-généraux, 10 de vivres, 10 de fourrages.
Généraux de division, 8 de vivres, 8 de fourrages.
Généraux de brigade, 6 de vivres, 6 de fourrages.
Quant aux fourgons, voici ce que porte le tarif n°3 :
« Lorsque les chefs d’état-major des divisions actives sont autorisés à avoir, pour le transport des papiers et archives, un fourgon pour lequel ils reçoivent des fonds de première mise, ils ont droit à une indemnité de 50 francs par mois ; cette indemnité est destinée à l’entretien des chevaux et du fourgon, et à la solde du charretier.
« Le fourgon peut être attelé de 4 chevaux pour lesquels les fourrages doivent être fournis en nature. »
Ainsi, joignant ces rations à celles allouées aux généraux qui sont tenus de pourvoir à la nourriture des chevaux de fourgon, on trouve le nombre alloué aujourd’hui.
Dans les précédentes séances, le ministre de la guerre vous a prouvé la légalité de l’allocation du supplément de solde d’après l’arrêté du 29 mars 1815. Il vous a dit combien les différentes allocations accordées aux généraux belges sont au-dessous de ce qui est alloué aux officiers-généraux des autres armées, et notamment de l’armée ennemie, et combien il serait fâcheux de les priver du supplément de solde qu’il demande pour eux, de les priver de ce que les règlements leur accordent et dont ils jouiraient s’ils servaient partout ailleurs que dans l’armée belge.
Prouver matériellement la nécessité de faire l’allocation d’un supplément de solde est chose impossible ; et à quoi pourrait servir de dire qu’il est destiné à tel ou tel emploi ? On peut répondre : C’est inutile, ou les appointements doivent y pourvoir. Ce n’est donc que dans la conviction que cette inutilité peut être trouvée ; et pour justifier ce qui a été fait, il faut citer ce qui s’est fait partout et de tout temps, en exécution des règlements en vigueur.
Je pense que vous approuverez la demande faite par le ministre, en lui abandonnant le soin de ne les accorder qu’à ceux qu’il croira en position de devoir en jouir, en modifiant, s’il y a lieu, à cet égard les règlements en vigueur.
L’honorable M. Jullien a dit qu’il ne pense pas qu’il y a un seul officier-général dans l’armée qui ait le nombre de chevaux voulu ; je déclare, messieurs, que je connais plus d’un officier-général qui a ce nombre de chevaux.
- Plusieurs voix. - Nous en connaissons un grand nombre qui n’ont pas le nombre voulu.
M. Gendebien. - Tous les extraits des règlements que vous venez d’entendre, messieurs, peuvent être fort bons pour la France ; mais notre pays n’est pas dans la même position que cette nation. La France est très étendue, et l’armée peut faire 300 lieues sans sortir des frontières. Là d’ailleurs l’armée a été organisée pour aller à 600 lieues des frontières, et je ne pense pas que nous veuillons aller si loin. (On rit.) Sous l’empire, tous les bagages des officiers-généraux restaient en arrière. Je félicite M. le ministre de la guerre d’avoir compris le vœu de notre pays et de la chambre, et de faire disparaître les caissons qui sont onéreux et même nuisibles.
M. de Robaulx. - J’appuierai l’amendement de M. Brabant et le sous-amendement ayant pour but de diminuer les frais de table et de représentation. Si dans le budget de la guerre les appointements n’étaient pas déjà aussi élevés, je concevrais qu’on accordât quelque indemnité aux officiers ; mais je m’aperçois qu’un général, qui mérite sans doute d’être bien payé, car on n’arrive pas ordinairement à ce grade sans avoir fait preuve de talent et de patriotisme, quoique cela se soit vu cependant (on rit) ; je m’aperçois, dis-je, qu’un général a un traitement considérable.
D’un autre côté, je vous prie, messieurs, de remarquer qu’un ministre, d’après l’ordre hiérarchique, devrait être plus payé qu’un simple général, et cependant si l’on demandait pour le premier ce que l’on demande pour le dernier, vous ne l’accorderiez pas. Pour tous les autres fonctionnaires publics, vous retranchez de leurs appointements autant que vous pouvez. C’est à peine, par exemple, si l’on veut accorder de frais de route aux ingénieurs des ponts et chaussées. Les généraux, outre leurs traitements de 16 à 18,000 francs, ont des rations de fourrages pour leurs chevaux, puis le logement, puis des frais de route, puis encore des frais de table.
Eh bien, passons-leur tout de suite des remises et des habits$ et ne leur donnons pas de traitement, car c’est se moquer du monde que de fournir en détail ce qu’on a déjà fourni en gros ; c’est véritablement une abomination. Nous avons un petit pays qui ne rétribue pas trop ses fonctionnaires. Vous citez toujours la France ; mais en France un ministre a 100,000 francs, tandis qu’ici un ministre n’a que 10,000 fr. de traitement. Ici un gouverneur n’a que 7,200 fr., et en France un préfet qui est la même chose a de 60 à 80,000 francs. Ici on a voulu faire un gouvernement à bon marché, mais on ne l’a pas fait. Vous citez toujours la France ; mais de cette manière on pillera l’Etat$.
Si cela continue, je ne demanderai pas autre chose qu’au budget de la guerre, pour prouver qu’il n’a pas d’administration plus ruineuse que l’armée : nous avons des officiers supérieurs en quantité, et il arrivera bientôt que notre armée dépensera deux fois autant que le reste du budget. Que ferons-nous plus tard de tout ce personnel ? Je ne conçois pas toutes les profusions que l’on fait. Je voterai pour l’amendement de M. Brabant, mais je refuserai d’étendre la mesure aux officiers sans troupes ; j’adopterai aussi le sous-amendement de M. Desmaisières, tendant à réduire les frais de représentation, surtout pour les généraux de brigade. Si on accorde une allocation de ce chef aux généraux de division, le ministre tiendra la main à ce qu’ils n’en fassent pas un objet de lucre.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Un vieil axiome dit que, pour se préparer à la guerre, il faut de l’argent, beaucoup d’argent, et encore de l’argent. C’est malheureusement trop vrai, surtout quand un pays comme le nôtre est obligé d’entretenir une armée considérable ; mais cet état de choses est commandé par la nécessité.
Je ferai remarquer que j’ai réduit dans mon budget normal toutes les dépenses à 25 millions pour l’entretien d’une armée de 30.000 hommes sur le pied de paix. Cette dépense n’est pas trop considérable relativement aux ressources du pays. En conséquence, l’armée belge ne sera pas une charge trop forte quand une fois nous serons en paix.
Je conviens que les officiers-généraux sont pour la plupart mieux traités que les ministres, mais cela tient aux règlements existants. Le gouvernement ne peut pas encore modifier ce qui tient à la solde, que les officiers regardent comme une sorte de patrimoine. Quant aux vivres et aux fourrages, on pourra y apporter de l’économie.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Je conviens avec l’honorable M. de Robaulx que nous ne pouvons pas prendre la France pour terme de comparaison ; mais un autre terme de comparaison que, je pense, il ne récusera pas, c’est celui de la Hollande qui me semble beaucoup plus applicable sous le rapport du territoire et de la population. Eh bien ! messieurs, le budget de 1833 voté par les états-généraux, s’élève, si je ne me trompe, à 45,000,000 de fl, ; et si vous tenez compte de la population de la Hollande eu égard à celle de notre pays, ce budget est presque double du nôtre tel qu’il a été réduit par la section centrale de concert avec le ministre de ce département.
Que les fonctionnaires de l’ordre administratif soient rétribués avec modération, je dirai même avec parcimonie, je le conçois. Mais je ferai remarquer que cet état de choses a été regardé par ces fonctionnaires comme essentiellement transitoire, et qu’ils n’entendent pas toujours rester dans la position subalterne où les placent leurs traitements.
Si vous mainteniez les traitements des hautes fonctions politiques et administratives à un pareil taux, vous stipuleriez, comme on l’a déjà dit, au profit de l’aristocratie financière et nobiliaire. Tel n’est pas le vœu des institutions de la Belgique.
Il y a d’ailleurs une différence entre la position d’un fonctionnaire de l’armée et celle d’un fonctionnaire civil. Ce dernier, quand il a rempli sa tâche, rentre chez lui et ne court pas de dangers ; tandis qu’un militaire est fréquemment exposé à se faire casser la tête.
Sous le rapport politique je demanderai s’il est bien prudent de laisser notre armée reporter ses souvenirs sur le régime antérieur à la révolution, de lui offrir dans la position bien plus avantageuse d’une armée rivale le terme d’une comparaison peu encourageante. Je crois que des motifs de haute politique, que la prudence m’empêche de développer et que la chambre appréciera, s’opposent à ce qu’on fasse subir à l’armée des réductions auxquelles elle n’a pas dû s’attendre, d’après les règlements existants et exécutés jusqu’ici.
Je répète que sans prendre, comme l’a dit l’honorable M. de Robaulx, la France pour terme de comparaison, mais en m’arrêtant à un pays dont le territoire et la population sont plus restreints, et qui a peut-être moins de ressources réelles et durables que le nôtre, je trouve que les dépenses nécessitées par l’armée ne sont pas exagérées, et doivent être, sans réductions nouvelles, mises à la disposition de M. le ministre de la guerre.
M. de Robaulx. - Je veux bien admettre que dans certaines administrations les fonctionnaires ne sont pas bien rétribués, surtout les petits fonctionnaires. Je suis aussi l’ennemi de l’aristocratie, et même plus que l’orateur, quoique je m’en rapproche un peu d’une manière qui ne dépend pas de moi. (On rit.) On a dit que j’avais commis une erreur en croyant qu’on prenait pour point de comparaison la France, et on a cité la Hollande, dont le territoire est plus petit que le nôtre, et où le budget s’élevait de 40 à 45 millions de florins. D’abord, je ne sais pas si la marine ne s’y trouve point comprise...
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Non, la marine ne figure point dans ce budget ; un fonds séparé de 6 millions y est affecté.
M. de Robaulx. - Quoi qu’il en soit, je dirai que la Hollande ne peut pas être prise pour terme de comparaison. Vous savez que là on paie 1 fl. ce que l’on a ici pour 1 fr. Or, les traitements de nos officiers ne sont si élevés que parce qu’ils ont été fixés du temps de la réunion ; mais aujourd’hui notre armée n’est plus hollandaise, elle est belge.
On a semblé trouver mauvais le rapprochement que j’avais fait de la vie militaire avec la vie civile, et on a dit que les fonctionnaires civils, après avoir rempli leur tâche, rentraient tranquillement chez eux, tandis que les militaires étaient exposés à se faire casser la tête. Mais certainement nos officiers sont entrés au corps sous la condition de s’exposer, en temps de guerre, à se faire casser la tête et non pas pour être des officiers de parade, et pour jouer au billard. (On rit.) Du reste, je suis sûr que nos soldats désirent bien plus se faire casser la tête que le ministère n’est disposé à leur en donner l’occasion. (Aux voix ! aux voix !)
M. le président consulte la chambre pour savoir à laquelle des propositions elle entend donner la priorité.
- La priorité est accordée à celle de M. Brabant.
Plusieurs membres font remarquer que la disposition relative aux cantonnements des troupes dans une zone de 5 lieues offrirait beaucoup de difficultés dans son application.
M. Brabant insiste pour que cette disposition soit conservée.
M. Gendebien. - Je crois que nous nous attachons ici à des futilités, car le ministre, pour peu qu’il se trouvât gêné, pourrait facilement éluder, s’il le voulait, votre disposition, en faisant passer dans la zone de 5 lieues de la frontière ennemie les officiers à qui il voudrait accorder des indemnités. Du reste, nous ne voterons le budget que pour jusqu’à la fin de juillet, et M. le ministre nous a promis de nouveaux règlements. Si à cette époque il n’a pas rempli ses engagements, alors nous pourrons lui refuser le budget ; mais j’ai la confiance qu’il les remplira. Chacun de nous rend justice à sa bonne foi et à sa loyauté. L’amendement de M. Brabant me paraît donc inutile.
M. de Robaulx. - Je regrette de me trouver en opposition avec M. Gendebien ; mais je ne regarde pas l’objet en délibération comme une futilité. Il s’agit d’améliorations qui me touchent beaucoup. Je crois qu’il faut maintenir l’amendement de M. Brabant car, dès que nous avons confiance dans la bonne foi de M. le ministre de la guerre, nous ne devons pas présumer qu’il envoie tout exprès les officiers supérieurs dans la zone. (On rit.)
- Quelques voix. - Dans quelle zone ? Est-ce la zone torride ou la zone tempérée ?
M. de Robaulx. - Ce n’est pas dans la zone torride qu’on envoie notre armée. (Nouveau rire.) Messieurs, si c’est la zone qui vous gêne, supprimons la zone. Je ferai la proposition de retrancher de l’amendement de M. Brabant ces mots : « Dans une zone de 5 lieues de la frontière ennemie. »
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je me rallie à l’amendement de M. de Robaulx ; mais, pour qu’il y ait quelque chose de fixe, je demande qu’on adopte le chiffre de 72,000 fr. (Aux voix ! aux voix !)
- La suppression proposée par M. de Robaulx est adoptée.
La proposition de M. Brabant ainsi modifiée est aussi adoptée.
M. le ministre de la guerre (M. Evain) propose de prélever la somme de 72,000 fr. sur le chapitre 9, et de la transférer à l’article premier du chapitre 2.
M. Desmaisières présente un amendement tendant à n’accorder que 42,000 fr., et il le développe en ces termes. - Messieurs, M. le ministre de la guerre ayant reconnu la justesse de l’observation que j’ai eu l’honneur de lui faire, qu’une dépense prévue par un arrêté de 1815 ne pouvait être comprise dans les frais imprévus du budget de 1833, vous a proposé l’allocation d’une somme de 72,000 francs à l’effet de subvenir au paiement des indemnités de table aux officiers-généraux.
Il a appuyé sa proposition de ce qui se passe en France à cet égard ; mais il n’a pas pensé à ce qu’en France les vivres sont généralement, et surtout dans les campagnes, plus chers qu’en Belgique. Il est vraiment étrange, messieurs, que lorsqu’il s’agit de majoration de dépense, on vient toujours citer ce que l’on fait en France, tandis que, lorsqu’il arrive que la France dépense moins que nous, on a bien soin de ne pas en parler. Dans ce pays, il y a, j’en conviens, beaucoup à imiter, mais on n’y est pas encore revenu du système qui consiste à donner trop aux grands et trop peu aux petits. Comparez, messieurs, comme vous l’a très bien dit l’honorable M. Berger, les soldes que l’on donne en France et en Belgique aux officiers de grades inférieurs et aux sous-officiers, caporaux et soldats, et vous aurez bientôt vu combien nous sommes à cet égard en avant de la France en fait de justice distributive.
Je suis obligé cependant d’avouer que les autres motifs donnés par M. le ministre à l’appui de sa demande sont beaucoup plus fondés que celui puisé dans l’exemple de la France, où d’ailleurs la chambre des députés a diminué l’année dernière de 200,000 francs l’allocation demandée pour frais de représentation des généraux, et où la commission de cette même chambre chargée d’examiner le budget de la guerre vient encore de proposer il y a peu de jours une diminution de 120,000 francs sur le même objet pour 1833. Je le répète, je trouve les autres motifs donnés par M. le ministre beaucoup plus fondés, et j’ajouterai même que lorsque l’armée est réellement en campagne, il faut bien que l’officier-général soit mis à même d’économiser le temps, toujours précieux à la guerre, des officiers que leur service appelle près de lui, et de suppléer en même temps au peu de ressources en vivres que présente souvent le point où est établi le quartier-général aux officiers qui y arrivent, et dont la station en est souvent aussi éloignée de plusieurs lieues.
Je reconnais donc la nécessité des frais de table ; mais comme l’on donne en même temps aux généraux plus de 3,000 francs pour vivres de campagne, que dans leurs traitements on doit nécessairement avoir compris leurs frais de table ordinaires, je pense qu’il y a lieu à diminuer les chiffres des indemnités allouées par l’arrêté du 29 mars 1815, et que cet arrêté doit en outre être modifié par une définition beaucoup plus restreinte du pied de guerre qui donne lieu à ces indemnités. C’est dans le but de provoquer et de rendre nécessaires ces modifications, et aussi parce que nous sommes déjà assez avancés dans l’année pour pouvoir prévoir qu’il n’y aura véritablement de pied de guerre que pendant très peu de mois de l’année, que je propose de réduire l’allocation demandée par M. le ministre à 42,000 francs.
Je suis persuadé, messieurs, que l’exemple de désintéressement donné à cet égard par le ministre lui-même sera suivi par les autres officiers-généraux de l’armée. Nos généraux belges ont trop de patriotisme, et les généraux français employés dans notre armée se sont trop sincèrement voués à la défense des intérêts du peuple belge, pour continuer à recevoir des allocations de guerre pendant qu’il n’y a pas de guerre, et que nous sommes au contraire placés dans une espèce de juste-milieu, entre la guerre et la paix, qui permet aux généraux le séjour des villes et ne leur occasionne aucune des dépenses pour lesquelles ces allocations ont lieu.
Je termine par une dernière observation, messieurs, c’est que M. le ministre de la guerre nous ayant demandé l’allocation pour six généraux de division et douze généraux de brigade, la somme de 42,000 fr., que je propose pour le cas de guerre réelle, laisse encore la latitude au ministre d’accorder à chaque général de division 3,000 fr., et à chaque général de brigade 2,000 fr., sommes qui me paraissent plus que suffisantes pour frais de table à la guerre, pendant tout au plus six mois de l’année 1833.
- Cet amendement est appuyé, mais il est rejeté.
La proposition de M. le ministre de la guerre est mise aux voix et rejetée.
M. le président. - Nous avons à discuter les articles présentés par la section centrale.
M. Osy. - Je crois qu’avant de discuter le projet de loi on doit donner lecture du rapport de la section centrale. Plusieurs membres n’étaient pas présents quand ce rapport a été fait.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Nous sommes arrivés à un résultat final pour le budget de mon département. Il nous reste un seul point à régulariser : c’est encore un transfert que je vous proposerai. Je vous ai parlé de la nécessité de faire une remonte de chevaux pour l’artillerie et pour la cavalerie. Je demande que les articles de l’artillerie et de la cavalerie soient majorés de 588.000 fr., pris sur l’article de l’infanterie. Ainsi, au chapitre 2 sur l’article 6 (artillerie), on ferait une augmentation de 168.000 fr., et sur l’article 9 du même chapitre (cavalerie), on ferait une augmentation de 420,000 fr. La diminution sur l’article 8 (infanterie, même chapitre) serait de 558,000 fr.
M. de Brouckere. - Comment se fait-il que depuis six jours M. le ministre ait pu faire une économie de 588,000 fr. sur l’infanterie ? Quand nous avons discuté ce chiffre, je me suis élevé sur la somme énorme que l’on demandait ; on a répondu que des économies étaient impossibles.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - L’orateur est dans l’erreur. J’ai lu mon rapport, et dans ce rapport j’ai annoncé la nécessité de faire des remontes. On n’a pas pris garde à ce que j’ai dit. Ma meilleure réponse, c’est de relire mon rapport. (M. le ministre donne en effet lecture de la partie de son rapport où il est parlé de la nécessité de faire des remontes. Cette lecture prouve que le transfert qu’il propose aujourd’hui était prévu.)
M. Desmanet de Biesme. - Je ne m’oppose pas au transfert. Il me semble que la perte des chevaux est énorme, depuis l’organisation de l’armée ; je l’ai dit dans la discussion générale. Je demande qu’on apporte plus de soin à la santé des chevaux ; il y a là quelque abus.
M. Donny. - Il y a encore une diminution à faire sur l’article 8 (infanterie) du chapitre 2. Le ministre de la guerre vient de dire qu’il s’était aperçu qu’on pouvait faire encore une réduction de 10,000 fr. Je demande que cette réduction ait lieu.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je me rallie à la proposition de M. Donny : comme nous voulons tout discuter avec rigueur, je ne m’oppose à la diminution de 160,000 fr. La rédaction totale sera alors, sur l’article 8, de 748.000 fr.
- La majoration de 168,000 fr. pour l’article 6, mise aux voix, est adoptée.
La majoration de 420,000 fr. pour l’article 9, mise aux voix, est adoptée.
La diminution de 748,000 fr. sur l’article 8, mise aux voix, est adoptée.
M. le ministre de la guerre (M. Evain) (en riant) - Voilà le budget fixé. (On rit.) Cependant, messieurs, permettez que je mette le complément au travail du budget. De concert avec l’honorable rapporteur, et pour ne pas compliquer les chiffres, je consens que toutes les sommes des articles et des chapitres soient mises en nombres ronds de mille francs, et qu’on retranche les ordres d’unités inférieures aux mille. Cela fera encore une économie. (Hilarité générale et marques de satisfaction.)
- La proposition est adoptée.
M. le président donne lecture du rapport fait par M. Brabant au commencement de la séance.
M. Pirson. - Il faudrait, pour bien faire, que cette proposition fut votée sans discussion et à l’unanimité.
M. le président donne lecture de l’article premier du projet présenté par M. Brabant, au nom de la section centrale.
« Art. 1er. Les dépenses du ministère de la guerre sont fixées sur le pied de guerre pour l’année 1833, conformément au tableau joint à la présente loi, à un total de …
M. Legrelle. - Il faudrait savoir si le ministère se rallie à cet article.
- Plusieurs membres. - Cela est inutile.
- L’article premier, moins le chiffre, est mis aux voix et adopté. On calculera le chiffre ou le total du budget pour mettre la somme dans ce premier article.
M. le président donne lecture de l’article 2 du projet de la section centrale.
« Art. 2. Les dépenses sont réglées par douzièmes et pour chaque mois ; jusqu’à autorisation nouvelle, le gouvernement ne pourra disposer que de six douzièmes. »
M. Legrelle. - C’est ici que l’on doit savoir si le ministère se rallie à l’article 2. (Murmures.)
M. d’Huart. - La proposition de M. de Robaulx et celle de M. Pirson présentaient des inconvénients. Je n’en trouve aucun dans la proposition présentée par M. Brabant. Je voterai donc pour la proposition de l’honorable rapporteur de la section centrale.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Messieurs, les opinions différentes qui ont été énoncées dans cette enceinte, à l’occasion de la discussion du budget de la guerre, mettent le gouvernement dans la nécessité d’apprendre de la chambre si l’amendement, tel qu’il est proposé par la section centrale, a, ou non, un caractère de défiance, un caractère d’hostilité contre le ministère.
Le ministère ne pourrait se rallier à cet amendement, qu’autant qu’il aurait la conviction bien établie que l’amendement ne cache pas une arrière-pensée contre lui.
Le ministère demande donc que la chambre s’explique d’une manière franche et catégorique à cet égard. Si elle s’y refusait, il proposerait lui-même un amendement qui amènerait la chambre à donner les explications qu’il désire.
M. de Brouckere. - C’est une singulière interpellation que celle qui vient d’être adressée, non pas à un membre de la chambre, mais à la chambre tout entière. Je ne sais pas comment la chambre s’y prendrait pour répondre.
Que veut le ministère ? La section centrale elle-même demande de ne voter les subsides que pour un laps de temps de six mois.
Le ministère, qui s’était prononcé contre cette proposition dans les séances précédentes, aura aujourd’hui la bonté d’y consentir si vous avez, vous, la bonté de ne rien faire d’hostile contre lui.
Il faut se trouver dans un pays comme le nôtre, pour être en butte à de semblables conditions, à de semblables interpellations.
Que la chambre fasse des interpellations aux ministres, cela est dans l’ordre : mais qu’un ministère en fasse à la chambre, dans quel pays et dans quel temps avez-vous eu l’exemple d’une pareille conduite ?
La chambre n’a pas à expliquer ses intentions. Chaque membre vote en sa conscience et sans motiver son vote. Si la chambre adopte la proposition de la section centrale, le ministère interprétera le vote comme il voudra. Si maintenant vous voulez vous retirer, libre à vous ; mais nous avons déjà un exemple que vous n’avez pas l’intention de vous retirer. (Bruit.)
Je répéterai ce que j’ai dit, et ce que j’ai dit est la pure vérité ; vous avez voulu déjà faire peur à la chambre ; vous avez fait le simulacre d’une retraite, et trois semaines après vous avez repris vos portefeuilles. Personne ne vous a dit : Vous avez tort, vous avez raison. Faites comme vous voudrez aujourd’hui ; vous avez votre volonté libre et la chambre aussi, et vous n’avez pas le droit de faire des interpellations.
M. le président. - Voici l’amendement présenté par M. le ministre de l'intérieur :
« Considérant qu’il est dans l’esprit de la constitution que les budgets des divers départements ne forment qu’une seule et même loi de dépense ;
« Vu la nécessité de soumettre à une révision les diverses allocations dont se compose le budget de la guerre en discussion ;
« J’ai l’honneur de présenter l’amendement suivant :
« Le budget de la guerre pour 1833 sera soumis à une révision lors du vote définitif du budget général des dépenses de l’Etat, et fera partie de la même loi. »
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - On conteste aux ministres le droit d’adresser des interpellations à la chambre. Je passe volontiers sur l’expression d’interpellation, mais on ne leur contestera pas au moins le droit de consulter la chambre sur l’opinion qu’elle a de leur administration : c’est un droit que tous les ministres ont dans tous les pays.
Il nous importe de savoir si la majorité de la chambre interprète la proposition de la section centrale dans le même esprit que M. de Brouckere, lequel ne peut être favorable à un ministère qu’il a taxé d’incapacité, d’ineptie. Cet honorable membre partagerait la solidarité d’incapacité, d’ineptie, s’il soutenait le ministère qu’il a attaqué de cette sorte.
M. de Brouckere fait des signes de dénégation.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - En adoptant l’amendement que je propose, la chambre aura ses garanties contre les dépenses qui ont été votées plus ou moins rapidement dans le budget de la guerre ; elle conserve tous ses droits saufs jusqu’à la discussion des budgets généraux qui seront réunis en une seule loi ; jusque-là le ministère ne peut admettre un vote dans lequel il ne verrait qu’une preuve de défiance et d’hostilité.
M. de Brouckere. - Je n’ai jamais dit qu’un ministre fût inepte. J’ai trop connaissance des usages parlementaires pour me servir de ces expressions. Parlant de certaines affaires dans lesquelles le ministère avait apporté peu d’attention, je me suis écrié : « Avec quelle incurie ces affaires ont été administrées ! » Le ministre ne doit pas inventer des paroles aussi inconvenantes pour les mettre dans ma bouche.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Je prends la parole pour un fait personnel. Je ne crois pas avoir reproché à M. de Brouckere d’avoir dit : Tel ministre est inepte. Il n’est personne au banc des ministres qui souffrît une imputation aussi directe ; ce serait un langage tout à fait extra-parlementaire.
- Plusieurs membres. - A la question ! à la question !
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Dans cette assemblée il est des membres qui reprochent au ministère son peu d’énergie, son ineptie. Le ministère a besoin, je le répète, de savoir si la majorité partage cette opinion. Placé sous une telle prévention, il ne peut diriger les affaires intérieures ou extérieures du pays avec la fermeté et la dignité convenables.
(Moniteur belge n°96, du 6 avril 1833) M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je vais considérer la proposition sous le rapport administratif ; je dois vous faire quelques observations à cet égard.
Messieurs, j’ai pris connaissance des quatre articles qu’a proposés la section centrale au commencement de cette séance, et je conçois d’abord très bien que les causes qui nécessitent les dépenses extraordinaires de l’armée venant à cesser, ces mêmes dépenses extraordinaires doivent prendre fin, et qu’une disposition de la loi doit la prononcer.
En combinant cette disposition avec l’objet de l’amendement qui vient de vous être soumis, je conçois encore mieux que, conformément à notre acte constitutionnel, les budgets de dépenses de tous les départements ministériels devant faire partie d’une seule et même loi portant la totalité des dépenses de l’Etat, le budget de la guerre, voté par anticipation, doit nécessairement faire partie de cette loi générale à intervenir, et dont la conséquence voulue est de coordonner, également par une nouvelle loi, les voies et moyens au montant total des dépenses de l’Etat.
Je me rallie d’autant plus à cette opinion que, le projet de budget que j’avais présenté ayant subi, dans presque tous ses détails, de nombreuses changements, je regarde comme indispensable de le refondre en entier, et d’y ajouter les développements nécessaires, pour le soumettre, dans l’état où il sera rétabli, à la révision des chambres, en même temps que les budgets des autres ministères et pour que son montant soit compris dans la loi générale des dépenses, qui présentera aussi la totalité de celles de l’Etat. Il doit en être nécessairement de même pour la révision de la loi des recettes, qui, votée à la fin de l’année dernière, est loin de présenter les voies et moyens nécessaires pour faire face à toutes les dépenses de l’Etat.
C’est par ce seul et unique motif que j’accepterai les limites des dépenses et du crédit jusqu’au vote du budget général des dépenses de l’Etat.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - L’honorable préopinant a protesté contre les sentiments d’hostilité qu’on lui suppose envers le ministère, et dans ce moment même il venait d’accuser le ministère d’avoir joué une comédie que je ne craindrais pas de qualifier d’ignoble si l’imputation était fondée.
Messieurs, un des plus grands sacrifices que nous ayons fait à notre pays, c’est, j’ose le dire, d’être rentrés aux affaires après le vote de l’adresse. Nous n’avons consulté dans cette circonstance que notre patriotisme ; nous avons fait abnégation de tout amour-propre, et nous nous sommes résignés, c’est le mot, à venir nous replacer au banc des ministres, où personne ne voulait venir s’asseoir.
Une telle épreuve ne sera pas renouvelée ; la patience a ses bornes, même pour les ministres.
Eh ! quoi, messieurs, d’après la théorie de l’honorable député, nous n’avons pas droit de demander à la chambre si nous méritons sa défiance ! Les votes de la chambre doivent-ils donc être pour le ministère des logogriphes, de véritables énigmes ? Vous penserez ce que vous voudrez de notre vote, a-t-il dit ; vous n’avez pas le droit de nous en demander le sens.
Je soutiens qu’un ministère qui se dévoue à traiter les affaires publiques, dans un moment où l’opposition elle-même se montre peu disposée à prendre sa place, a le droit de dire à la chambre : Expliquez-vous sur le ministère ; déclarez au pays, à l’étranger s’il a ou non votre confiance ; protestez contre les calomnies dont il est abreuvé chaque jour, et faites connaître s’il est encore à vos yeux digne d’appui dans les chambres.
Si l’opinion de M. de Brouckere triomphe, vous verrez si nous savons jouer la comédie ; il n’y a pas de ministère possible quand les membres du cabinet en sont perpétuellement réduits à ignorer s’ils ont ou n’ont pas l’assentiment de la majorité, qui est censée représenter le pays.
L’amendement du ministre de l’intérieur fait du vote actuel un vote purement administratif. Le ministère connaîtra son sort, d’après les règles constitutionnelles, lorsque bientôt vous aurez à statuer sur la loi générale des budgets. Alors il sera impossible au ministère de se méprendre sur le sens du vote que vous aurez à émettre.
Actuellement, comment allez-vous voter ? Est-ce administrativement, est-ce politiquement ? Vous allez délibérer de manière qu’il sera impossible aux ministres, au pays, à l’étranger de saisir le sens de ce vote : ce n’est pas là de la franchise ; ce n’est pas là de la dignité, et s’il en faut dans le ministère, il en faut aussi dans les chambres.
M. Poschet. - Après qu’on a poussé les accusations jusqu’à dire que les ministres ont déshonoré l’armée, je ne crois pas qu’on puisse trouver mauvais que le ministère demande s’il a encore la confiance de la chambre et de la nation. Si j’avais envie de servir les ennemis du pays, si je voulais servir Guillaume, je ne prendrais pas d’autre voie que celle que l’on suit. Ce n’est pas en disant que les ministres sont incapables, que nous nous donnerons de la considération et que nous pourrons calmer les inquiétudes de la nation. Vous ôtez au gouvernement toute confiance à l’extérieur, et éloignez toute envie de nous seconder.
Guillaume dira encore que nous sommes des brouillons, des turbulents. Nous devrions imiter le noble exemple que donnent les Hollandais : nous devrions dire à nos ennemis : Vous faites des sacrifices, nous en ferons autant et plus que vous ; vous ne désespérez pas de la prospérité de votre nation, nous ne désespérons pas de la prospérité de la nôtre ; vous donnez des preuves de confiance à votre roi, nous en donnerons de plus éclatantes encore au nôtre, et rien ne nous coûtera pour seconder ses efforts. (Sensation.)
M. Fleussu. - En moins d’un mois tous les rôles sont intervertis. Aujourd’hui, le ministère vient combattre ce qu’il a demandé il y a peut-être trois semaines. Lorsqu’il s’est agi de fixer la discussion du budget de la guerre sur le pied de guerre, quelques honorables membres faisant appel à l’esprit des dispositions constitutionnelles, ont soutenu qu’il ne pouvait y avoir qu’un vote sur tous les budgets et qu’une seule loi devait les renfermer tous ; mais M. le ministre de la justice s’est levé et a dit : Le budget de la guerre sur le pied de guerre est un budget spécial, tout spécial ; il doit être voté séparément. Ce système a prévalu, malgré l’opposition dont a été l’objet. Aujourd’hui, on veut que la chambre se donne un démenti ; car quel est l’amendement du ministre de l’intérieur ? Il veut que vous déclariez que, quand vous voterez les autres budgets, vous révisiez le budget de la guerre.
Et sur quoi se fonde-t-il ? Sur ce que cette révision est constitutionnelle.
Nous, par respect pour les décisions de la chambre, nous maintenons la détermination qu’elle a prise, et nous vous répondons : C’est vous qui l’avez engagée à voter, il faut qu’elle persiste.
Je regrette, messieurs, d’avoir entendu, dans la bouche de l’honorable général qui est chargé du département de la guerre, un langage contraire à celui qu’il a tenu il y a quelques jours. Un honorable collègue vous a proposé d’accorder des crédits provisoires pour deux ou trois mois : qu’a répondu le général ?
Il a répondu : Je ne peux accepter une telle responsabilité. Je demande que toutes les allocations soient déterminées.
Eh bien, si vous adoptez l’amendement du ministre de l’intérieur, il en résultera que la responsabilité, dont le général voulait se débarrasser, pèsera tout entière sur son administration ; car si le budget de la guerre doit être soumis à une révision, les sommes allouées ne forment plus que des créances provisoires.
Mais pourquoi le ministère a-t-il fait, de l’amendement présenté par la section centrale, une question personnelle ? C’est sur l’étranger que nous voulions faire effet. Nos paroles devaient être entendues au-delà de nos frontières ; mais voilà que MM. les ministres les arrêtent au passage et veulent s’en faire l’application, soutenant, bon gré mal gré, qu’elles sont la critique de leur conduite. Nous ne comprenons pas par quel motif le ministère fait dépendre son existence politique de l’adoption de l’amendement de la section centrale : cet amendement est rédigé en termes qui ne peuvent avoir trait au ministère.
Je vous avoue, du reste, que cette considération n’est point de nature à faire sur moi la plus légère impression et que je n’en voterai pas moins en faveur de cet amendement ; surtout que je sais qu’on voulait vous laisser en quelque sorte en-dehors de cette discussion.
Vous voulez que la chambre s’explique sur votre compte ; qu’elle vous déclare si vous jouissez de sa confiance.
Mais je vous ferai remarquer, avec M. de Brouckere, que la chambre ne doit et ne peut vous donner l’explication demandée ; que le moment n’est pas venu pour elle de vous donner ou de vous refuser des marques de confiance.
Quoi ! c’est lorsque nous sommes à la veille de nous livrer à l’examen de vos budgets, de faire l’investigation de votre administration, que vous nous sommez d’applaudir d’avance à votre gestion.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Si vous êtes mécontents, rejetez les budgets.
M. Fleussu. - Refuser les budgets est un coup d’Etat parlementaire. Pour s’y décider, pour donner une telle secousse à l’Etat, il faut des motifs graves. Quoique nous n’ayons pas lieu de nous féliciter toujours de votre administration, il ne s’ensuit pas que nous soyons d’intention de vous refuser les crédits nécessaires aux divers services. Ce que vous ferez d’ici là pourra influer sur notre manière de voir.
Mais, dit-on : Ou le ministère a la confiance de la chambre, ou elle l’en croit indigne. Dans le premier cas, pourquoi limiter à six mois les crédits du budget de la guerre ?
Si, d’un autre côté, la chambre ne se confie point aux ministres elle doit s’en expliquer autrement que par un vote équivoque.
Messieurs, il y a des degrés dans la confiance. Nous tenons compte des difficultés de votre position ; nous savons que vous n’êtes pas maîtres des événements, et nous voulons vous donner le temps de faire reconnaître vos services. Pour avoir droit à notre confiance, montrez-nous donc ce que vous avez tenté pour secourir le pays. Depuis la prise de la citadelle d’Anvers, qu’avez-vous fait pour presser les négociations ? Vous nous disiez alors que la prise de la citadelle était le premier pas dans l’exécution des 24 articles. A vous entendre, chacun de ces articles allait être exécuté contre le roi Guillaume par la force des baïonnettes. Quand donc se fera le deuxième pas ?
Si d’ici au mois de juillet vous faites preuve de bonne volonté, si vous justifiez de quelques efforts capables de calmer l’impatience de la nation, vous pouvez compter sur les intentions de la représentation, et le budget sera continué par un simple vote ; mais si vous restez dans une quiétude fatale au pays, alors nous montrerons ce que nous voulons. L’armée, loin d’être réduite, sera augmentée s’il le faut ; nous la maintiendrons dans tous les cas ; mais alors nous ferons tout ce que nous pourrons pour vous culbuter, et il n’y aura plus de ministère possible que pour celui qui ouvrira le chemin de l’honneur à notre armée.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Messieurs, en admettant qu’il ne soit pas ici question de personnes, il s’agit au moins de système ; et, il faut bien en convenir, notre système politique ne convient pas à une certaine partie de cette chambre : aussi trouvons-nous très logique qu’elle nous attaque. Il est même probable que, si cette fraction de la chambre venait au pouvoir, nous ferions contre elle de l’opposition, et de l’opposition systématique.
Si le ministère tenait à ses portefeuilles, s’il voulait du pouvoir à tout prix, il se serait contenté de cette position mixte, de cette position énigmatique dont, suivant un honorable préopinant, il ne nous est pas permis de chercher le mot. Une pareille théorie n’est pas à notre usage ; une telle position nous répugne, le ministère n’en veut pas.
On nous reproche d’être inconséquents, de soutenir le pour et le contre à quinze jours de distance. Mais qui ne voit, messieurs, que les choses ont changé de face, et que le ministère, en n’accédant point à la proposition faite de ne voter le budget que pour six mois, combat une motion toute nouvelle, dont, il y a quinze jours, personne ne parlait ?
Lorsque la chambre voulut s’occuper des budgets, nous en demandâmes la division ; nous demandâmes que le budget de la guerre fût discuté et voté à part, parce que, formant une loi séparée, il eût été porté au sénat, et par là cette partie importante de l’administration eût été régularisée. Aujourd’hui, au contraire, on propose de n’accorder que des crédits provisoires, et on veut rattacher ce vote restrictif à la motion de M. de Robaulx, qui entraîne évidemment un vote politique, un vote de défiance : c’est du moins ainsi que nous le jugeons et qu’on le jugera à l’étranger.
L’amendement proposé par M. le ministre de l’intérieur ne préjuge rien quant au fond, mais il modifie la forme ; il nous fera sortir d’une position équivoque, position que le ministère n’acceptera point, et que, dans aucune hypothèse, il ne peut accepter.
Remarquez bien, messieurs, que nous ne vous demandons point précisément un vote de confiance, comme on l’a dit, nous reconnaissons, comme l’honorable préopinant, que la confiance a ses degrés, mais la défiance n’en a pas : en fait de défiance, il n’y a pas de terme moyen sur lequel nous puissions transiger ; et il nous est impossible de ne pas voir dans la proposition faite une motion de défiance, un vote hostile au ministère. Nous demandons si peu en ce moment un vote politique, qu’en adoptant notre proposition vous ne préjugez rien ; la question reste entière, elle se représentera lors de la rentrée de la chambre, lors de la discussion du budget général ; le vote que vous émettrez alors sera formel, le ministère ne pourra s’y méprendre ; il verra s’il a dans cette chambre une majorité qui lui permette de rester au pouvoir.
Le ministère ne veut pas voir se renouveler aujourd’hui ce qui s’est passé après la discussion de l’adresse, où des députes sont venus protester de leurs intentions bienveillantes pour des ministres contre lesquels ils avaient cependant voté, tandis que dans le pays, dans les journaux, à l’étranger, on n’a pu voir dans ce vote qu’une déclaration hostile aux ministres.
Nous vous demandons donc de remettre votre décision au budget général ; toute autre résolution ne pourrait être acceptée par nous.
M. de Robaulx. - Messieurs, on a bien eu raison de dire que les rôles sont intervertis. On me reproche quelquefois l’énergie avec laquelle je m’exprimais à la chambre, et à ce sujet le ministère, M. Lebeau lui-même, disait que bien mieux qu’une opposition généreuse sans doute, mais exaltée, la diplomatie pouvait juger les choses et les événements avec la froide raison d’Etat. Aujourd’hui, c’est ce ministère froid, flegmatique, qui s’emporte, et c’est moi qui vais parler raison. (On rit.)
Au milieu d’une discussion sur un article qui aurait dû être adopté à l’unanimité, le ministère nous lance un cartel auquel nous ne pouvons répondre ; en effet cet amendement est rédigé ab irato. (Dénégations au banc des ministres.)
M. le ministre des affaires étrangères (M. Goblet). - Il a été délibéré en conseil.
M. de Robaulx. - Vous l’avez préparé à l’avance, soit ; mais vous ne l’avez déposé que quand vous avez compris mon amendement qui allait passer avec l’appui de la section centrale, et vous avez voulu le faire écarter.
Le but de cet amendement n’était point de renvoyer le ministère ; j’ai, je crois, assez prouvé que dans les discussions je ne m’attachais pas aux individus ; mon but était de nous faire sortir de l’ornière embourbée où nous sommes, et où nous nous noyons ; nous n’y sommes pas encore assez pour y périr, mais nous y sommes jusqu’au cou, attendant que la famine nous achève.
On nous demande un budget de la guerre dont personne ne se dissimule l’importance et la hauteur du chiffre, avec notre amendement à ce budget ; mais en même temps nous voulons dire au ministère : La nation est lasse de l’état d’incertitude dans lequel elle est ; nous vous donnons les moyens de l’en faire sortir, c’est à vous nous tirer de cette fausse position ; avec cela, il vous est facile de montrer aux puissances que la nation et les chambres sont fatiguées des sacrifices qu’elles ont faits à l’Europe pour le maintien de la paix générale, et qu’on peut voir l’intention où nous sommes, si on n’en finit promptement, de sortir par nous-mêmes d’une position qui n’est pas tenable.
Y-a-t-il là une menace formelle ? Non, messieurs, c’est de la force que nous voulons donner au ministère ; et si j’étais à sa place (ce que je n’envie nullement), j’aurais accepté avec empressement un amendement dont on a méconnu toute la portée.
Dans les relations diplomatiques, le ministère pourrait dire aux puissances : Vous avez trompé la Belgique (et vous pourriez le dire, parce qu’on nous a dupés depuis deux ans), vous avez épuisé la patience de ce pays ; aujourd’hui il donne un signe de vie ; il annonce que, forcé dans ses derniers retranchements, après avoir subi avec résignation les traitements les plus injustes, il déclare qu’il ne permettra pas qu’on attaque son existence, et qu’il fera lui-même usage de tous ses moyens pour sa légitime défense.
Il n’y a rien de personnel dans cette proposition, rien d’hostile au ministère dans l’amendement dont on vous propose l’adoption.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - C’est au ministère à le savoir.
M. de Robaulx. - Si c’est à vous à le savoir, ce n’est pas à vous à méconnaître les intentions de la chambre ; elle vous juge par vos actes, comme vous devez la juger par les siens. Cependant, plus à même que nous de connaître votre véritable tendance (car vous ne nous avez pas tout dit), vous devez savoir, il est vrai, si vos engagements, votre système, vous permettent ou non de faire un quart de conversion vers l’énergie.
Le ministère nous demande s’il a encore notre confiance : eh bien ! que répondrait-il si nous lui disions aujourd’hui : Non, vous n’avez plus notre confiance ?
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Nous nous retirerions.
M. de Robaulx. - Vous vous retireriez ! Il n’y aurait pas assez de journaux ministériels, payés ou soudoyés par je ne sais qui, pour dire que nous sommes des révolutionnaires, que nous faisons une petite convention nationale. (C’est vrai !)
Si vous nous dites que votre intention est de réclamer avec plus de force que jamais l’emploi des mesures coercitives, ou qu’à défaut de cela on recourra aux armes, alors nous sommes d’accord et nous marchons ensemble.
Notre intention n’est point de vous renverser, mais de vous imprimer un peu plus d’énergie. Si vous nous répondez que vous en avez assez, et que vous êtes prêts à en faire preuve, dans ce cas nous sommes d’accord, et vous n’avez plus à vous retirer. Mais alors, je vous le demande, à quoi bon nous lancer le brûlot de M. Rogier ?
Remarquez, messieurs, quelle serait la portée de cet amendement ministériel, si, à chaque projet de loi, je venais vous demander une décision formelle, par oui ou non, sur la confiance que vous accordez au ministère. Vous me rappelleriez à l’ordre ; et vous auriez raison, parce que j’empiéterais sur la prérogative royale.
Ce n’est point dans l’idée de vous renverser que mon amendement a été présenté ; je ne suis point l’organe d’une coterie ; c’est pour amener une solution de nos affaires. Il ne s’agit point d’individus, mais d’un système énergique où la force de la nation nous pousse malgré nous. Adoptez-le, ce système, et moi aussi je serai ministériel, et je vous défendrai. Je le soutiendrai, et je ne craindrais pas la presse, parce que, quand elle est la véritable expression de l’opinion du pays, elle ne peut être injuste.
Vous connaissez nos intentions, vous voyez que l’amendement n’a pas pour but d’attaquer les hommes, il consiste à vous appuyer ; vous devez savoir que, sans votre opposition intempestive, la chambre eût été unanime dans l’adoption d’une mesure qui doit vous faire insister près de nos alliés pour l’exécution d’un traité qui nous a été imposé comme un malheur. Vous pourrez facilement démontrer à l’étranger que nous ne consentirons pas à rester plus longtemps dans la position où on veut nous tenir.
Je viens maintenant à la question constitutionnelle soulevée par MM. Lebeau et Rogier. Aujourd’hui, comme l’a parfaitement fait remarquer M. Fleussu, le ministère vient contester ce qu’il a demandé lui-même, et c’est à tort qu’il s’appuie sur la constitution, parce qu’elle dit que le budget des dépenses sera voté chaque année (article 115) ; ainsi elle ne défend pas de le voter pour un mois ou pour six mois, surtout lorsque c’est un budget tout à fait extraordinaire. L’année dernière le budget de la guerre fut aussi voté par douzièmes, et j’interpelle l’honorable rapporteur de dire si je me trompe.
M. Brabant. - La disposition étant expresse, le budget extraordinaire cessait ses effets un mois après la paix ; ainsi il ne pouvait avoir que trois ou quatre mois de durée.
M. de Robaulx, continuant. - M. Lebeau doit reconnaître que si quelquefois mes paroles sont acerbes, au moins elles sont dictées par la bonne foi ; je désirerais donc qu’il nous expliquât ce qu’il a voulu dire en s’écriant que « la patience avait des bornes, même chez les ministres ; » cette exclamation est extra-parlementaire, et je suis sûr qu’il la désavouera.
Une chose assez singulière, messieurs, c’est la susceptibilité de M. le ministre de l’intérieur qui a cru voir une voie hostile dans notre proposition, tandis que le ministre de la justice n’y a vu rien de semblable ; et comment en serait-il ainsi ? Auteur de l’amendement, je ne crains point que l’on me suppose le désir de vous succéder : soyez tranquilles, je ne veux point de votre place. (Hilarité.)
Je ne puis croire davantage que M. Raikem, président de la section centrale, ait envie de revenir au ministère et de vous renverser pour ramener aux affaires la précédente administration ; car si je pouvais le soupçonner, je retirerais à l’instant ma proposition bien décidé que je suis à faire de l’opposition au précédent ministère comme à celui-ci.
Ainsi, ministres, s’il est vrai que vous vouliez montrer de l’énergie, nous sommes d’accord, et nous vous votons des fonds jusqu’au 1er juillet, afin que vous soyez prêts à faire la guerre ; et je vous adjure, dans l’intérêt du pays, de retirer votre amendement.
Je me résume en ceci : C’est que nous ne voulons émettre ni un voie de confiance ni de défiance ; la chambre veut de l’énergie, et elle se réserve au 1er juillet de voir si vous, MM. les ministres, ne serez pas en opposition avec le système que vous proclamez être le vôtre ; nous sommes unanimes pour ne pas prolonger la position actuelle du pays, et nous désirons que le vote qui suivra cette discussion, amène enfin un résultat définitif si nécessaire au développement de notre prospérité.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Le ministère demande à la chambre de ne pas adopter la proposition de M. de Robaulx, reproduite par la section centrale, qui, à ses yeux, d’après les développements qui l’ont précédée, cache une arrière-pensée de défiance. Il vous demande, non pas un vote explicite, solennel de confiance, mais de reporter à l’époque où le budget général des dépenses sera voté, l’expression de votre jugement sur son système.
Dès aujourd’hui, un grand nombre de membres de cette chambre voudraient imprimer à ce système un caractère qu’il n’a pas ; ils voudraient faire marcher le gouvernement beaucoup plus vite qu’il ne le croit en ce moment utile aux intérêts du pays. Tel est le but de l’amendement de M. de Robaulx. Il l’a déclaré ; et c’est à cette impulsion nouvelle que le ministère ne croit pas pouvoir s’associer.
M. de Robaulx. - Je n’ai pas dit cela ; on m’a mal compris.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier), continuant. - Enfin, j’admets qu’il y ait doute, au moins dans une partie de cette chambre, et c’est à cause de ce doute que le ministère demande que vous reportiez votre décision à une époque où votre vote sera significatif, où personne ne pourra s’y méprendre, ni lui, ni les chambres.
Messieurs, je ne pense pas que l’honorable M. de Robaulx attache une portée sérieuse à l’assertion qu’il a émise, que le ministère, voulant sortir des embarras de sa position vis-à-vis-du pays, chercherait un prétexte pour quitter la partie maintenant qu’elle serait perdue. (Non ! non !)
M. de Robaulx. - Je demande la parole pour m’expliquer ; je n’ai pas dit tout dit cela.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Vous l’avez donné à entendre ; mais si vous n’insistez pas sur l’allégation, je renonce de mon côte à la réfuter.
M. le président. - Voici un amendement qui vient d’être déposé par M. Mary :
« Je propose de remplacer l’article 2 du projet de la section centrale par l’ancien article 2 de la loi du 29 mars 1832, conçu comme suit :
« Les dépenses sont réglées par douzièmes pour chaque mois et se feront sur le même pied jusqu’à un mois après la paix. » (La clôture ! la clôture !)
M. Mary. - Je demande à développer mon amendement. (Aux voix ! aux voix !)
M. le président. - La parole est à M. Mary pour développer son amendement.
M. Mary. - Messieurs, le budget que nous allons voter ne peut être un budget politique ; il doit rester le même, quel que soit le ministère qui serait au pouvoir, parce que l’armée doit toujours être dans un état respectable. Il me semble que, sans vouloir repousser l’article 2, quant au terme du crédit, tous les scrupules seront satisfaits par mon amendement, qui, en le remplaçant, ne vote le budget actuel que pendant la guerre.
- L’amendement est appuyé.
M. le président. - La parole est à M. Osy.
M. Osy. - J’y renonce. (A demain ! à demain ! Non ! non ! Continuons !)
M. Pirson. - Premier auteur, il y a neuf jours, de la proposition, je me suis rallié volontiers à la proposition rédigée par la section centrale ; j’aurais voulu que le vote en eût été unanime, pour produire tout l’effet que nous en attendions ; aussi je regrette beaucoup que le ministère ait cru y voir une question de personnes, et soit venu s’y opposer. (Aux voix !)
J’avais quelques observations à faire que je vais vous soumettre. (Non ! non ! Aux voix ! aux voix !)
Messieurs, il me semble que, comme premier auteur de la proposition, j’aurais le droit d’être entendu. (Non ! non ! La clôture !)
M. le président. - Messieurs, avant de mettre la clôture aux voix, je vous ferai remarquer que le rapporteur de la section centrale est inscrit, et qu’ordinairement il doit être entendu.
M. de Brouckere. - Je demande la parole, je n’ai que quelques mots à dire. (Aux voix ! aux voix !)
M. Dumortier. - Beaucoup de membres se proposent encore de prendre la parole ; on devrait en entendre quelques-uns. (La clôture ! la clôture ! Agitation.)
M. de Brouckere. - Je n’ai que quelques mots à répondre à ce qu’ont dit les ministres.
M. le ministre de la justice demande que nous ne l’accusions point d’inconséquence ; mais il est impossible que nous ne le fassions pas, car je ne crois pas que l’on puisse pousser l’inconséquence plus loin que le ministère l’a fait depuis une heure ; il en est maintenant venu à tel point qu’il ne sait plus lui-même ce qu’il veut.
D’un côté, le ministre de l’intérieur nous dit qu’il ne sollicite point de la chambre une marque de confiance, mais qu’il ne veut pas qu’elle lui témoigne un sentiment contraire ; de l’autre, le ministre de la justice reconnaît qu’on ne peut voir une marque de défiance dans la proposition de la section centrale ; que cette proposition n’a rien d’hostile, qu’elle ne préjuge rien : eh ! que voulez-vous donc si vous déclarez n’avoir pas besoin d’une marque de confiance, et que vous trouvez vous-même qu’il n’y a rien d’hostile contre vous dans le vote que nous émettons ? Ne vous plaignez pas ; vous aurez lieu d’être satisfaits, d’après votre propre aveu.
Mais le ministre de l’intérieur s’explique. Il ne veut pas, dit-il, recevoir d’impulsion de la chambre ; ce sont ses propres paroles, dont j’ai tenu note ; c’est pourtant un devoir pour le ministère de suivre l’impulsion de la chambre, il ne peut s’y soustraire. Celle que nous voulions vous donner, et j’ose dire que la majorité voulait vous donner, tendait uniquement à vous inspirer plus de fermeté et d’énergie que vous n’en avez encore montré jusqu’ici. Si vous consentez à vous conformer aux intentions qui ont été manifestées si généralement, nous voterons plus tard le budget de la guerre pour les six derniers mois de l’année ; si vous vous y refusez, nous vous refuserons tout subside, et nous serons dans notre droit.
L’amendement du ministère est anticonstitutionnel, il est de plus inconvenant. Il a pour but d’engager la chambre à déclarer d’une manière formelle et directe si elle veut que le ministère reste aux affaires, si elle veut qu’il se retire. La chambre ne peut et ne doit jamais faire une semblable déclaration ; ses intentions doivent s’interpréter d’après ses votes, et le ministère interprétera celui que nous émettrons sur la proposition de la section centrale comme il le jurera à propos. Nous lui avons assez répété que nous n’avions rien d’hostile aux individus ; nous voulons un système plus franc, plus énergique, plus conforme aux intérêts du pays, et c’est tout ce que nous demandons.
Mais, je dois le dire, le ministère a, par sa conduite inconsidérée, commis une haute imprudence, qui doit compromettre le pays. S’appuyant sur tout ce qui a été dit dans la discussion, il pouvait prendre un langage plus ferme à l’étranger, et surtout, vis-à-vis des deux puissances amies dont il nous parle si souvent ; il pouvait invoquer la volonté de la nation : tel était notre but ; on ne l’obtiendra plus maintenant, tous nos efforts resteront stériles.
Puisque l’on a agité des questions de personnes, qu’on a eu l’air de me supposer des insinuations personnelles, je dirai à M. le ministre de l’intérieur que, s’il avait voulu avoir un peu plus de mémoire, il se serait rappelé quel est celui qui, quand lui et ses collègues sont arrivés au pouvoir, a le premier en Belgique pris la plume pour écrire en leur faveur ; oui, j’ai le premier pris leur défense dans les journaux, et comme j’ai l’habitude de dire toutes mes pensées, de ne rien cacher, j’ajouterai que je préfère le ministère d’aujourd’hui à celui qui l’a précédé ; et si ce dernier devait revenir aux affaires, je montrerai que je sais faire une opposition plus énergique que je n’ai fait jusqu’ici.
Après cela, que les ministres calomnient mes intentions s’ils le veulent ; cela m’importe peu.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Messieurs, quand on nous attaque, il doit nous être permis de nous défendre ; nous sommes cinq contre cent. (Interruption.)
- Une voix. - Vous n’avez pas la majorité.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Messieurs, nous sommes matériellement cinq contre cent, la constitution le veut ainsi. Ne jouons pas sur les mots.
Le ministère n’a pas dit qu’il ne voyait rien d’hostile dans la proposition de la section centrale : prise en elle-même sans doute, elle paraît inoffensive ; mais, d’après les développements dont on l’a appuyée, il a dû y voir une arrière-pensée de défiance ; or, le ministère ne peut rester au pouvoir si, à tort ou à raison, il croit voir dans le vote que vous allez émettre un vote de défiance et d’hostilité.
Je ne répondrai pas à ce qu’a dit le préopinant de ses sentiments personnels envers le ministère. Il ne s’agit pas ici de sentiments personnels mais de système politique. C’est notre adversaire politique que je vois en lui. En se constituant tel, il est dans son droit, et je suis bien loin de le lui contester.
Nous ne voulons pas, dit-on, recevoir d’impulsion de la chambre. C’est une erreur. Le ministère n’est que l’émanation des chambres ; un roi constitutionnel, quels que soient les droits que lui donnent les institutions, n’a en réalité que l’investiture du cabinet ; car, dans les Etats représentatifs, ce sont les majorités parlementaires qui font les ministres. Nous avons dit seulement qu’en présence des faits accomplis dernièrement, de l’intervention de novembre, de l’évacuation de la citadelle d’Anvers, de l’embargo toujours subsistant ; en présence des efforts que le ministère a faits et qu’il fait encore aujourd’hui près des puissances pour le maintien et pour le redoublement des mesures coercitives, il ne croit pas avoir besoin d’une impulsion nouvelle.
Cette déclaration n’est pas d’aujourd’hui ; notre système est connu, nous l’avons déclaré à notre arrivée au pouvoir, nous l’avons notifié aux puissances en y entrant, Ce que nous voulons, c’est l’emploi des mesures coercitives, et, si elles sont inefficaces, la guerre par nous-mêmes. (Interruption.)
- Plusieurs voix. - Alors nous sommes d’accord.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Voilà comment le gouvernement comprend sa position, comment il se conduit. Et si vous émettiez un vote politique, un vote qui trahit de la défiance, si vous adoptiez la proposition de la section centrale, le ministère y verrait le reproche de manquer d’énergie ; et le pays et l’étranger n’y verraient pas autre chose. Il ne dépend pas de nous de prendre pour règle de nos convictions celles de tel ou tel député ; nous devons examiner la décision de la chambre en elle-même, et nous ne pouvons l’admettre quand, à nos yeux, elle nous place dans un état de suspicion permanente. (La clôture ! la clôture !)
M. de Robaulx. - Je demande la parole pour une motion d’ordre. Il me semble qu’avant de clore ce débat, nous devons entendre M. le rapporteur de la section centrale. (Oui ! oui !)
M. Brabant, rapporteur. - Messieurs, je suis encore à m’expliquer les motifs des débats qui viennent d’avoir lieu.
La section centrale vous présente un projet de loi que le ministre avait oublié. Dans ce projet de loi, elle fait entrer une disposition proposée par deux honorables membres et dont la discussion avait été ajournée. Je lis cet article et je n’y vois rien que de la franchise, je n’y vois rien d’hostile pour le ministère ; de sorte que si je m’en tiens formellement à la lettre du projet que nous avons soumis à la chambre, il m’est impossible de ne pas dire que le ministère a grand tort de s’en alarmer.
Remontons aux développements. M. le ministre de la justice a prétendu que ces développements montreraient à l’étranger que, dans cette chambre il y avait une forte fraction qui se présentait avec un caractère de défiance contre le ministère. Mais je ne conçois pas cela. Le langage de la section centrale a prouvé seulement qu’il y a encore du patriotisme et de l’honneur en Belgique. (Bravo ! bravo !)
M. Gendebien. - Relisez encore une fois le rapport ; il n’y a pas un seul Belge qui puisse renier un pareil langage.
M. Brabant monte à la tribune et donne de nouveau lecture des développements de la section centrale. (Des applaudissements se font entendre après les derniers mots.)
Eh bien ! (poursuit l’orateur) je vous le demande, messieurs, y a-t-il dans ces paroles de la section centrale rien d’hostile au ministère ? Et, dans cette chambre, les membres qui votent le plus constamment avec l’opposition ont dit au ministère : Nous tenons compte de votre position, nous savons bien que vous n’êtes pas maîtres de faire aller nos affaires plus vite. Mais nous voulons que vous montriez de l’énergie.
Maintenant que je vous ai démontré que dans les termes et dans l’esprit, dans les motifs de la proposition qui vous est faite par la section centrale, il n’y a rien d’hostile aux ministres, je me permettrai de vous dire quels membres composaient cette section centrale.
M. Poschet. - Non, non, cela n’est pas parlementaire.
M. Brabant, rapporteur. - Cela est si bien parlementaire, M. Poschet, que l’on imprime au bas des rapports les noms des membres qui font partie des commissions ou des sections. Je dis donc que si l’on considère les personnes qui ont fait le projet, on n’y aperçoit encore rien d’hostile au ministère. Nous étions quatre qui nous tenons ordinairement en dehors des débats politiques. C’était d’abord un ancien ministre qui, je pense, n’est pas du tout tenté de reprendre le portefeuille qu’il a tenu un an et demi ; c’était ensuite un homme qui a été ministre pendant 8 jours, et qui a préféré s’en retirer pour se renfermer dans des fonctions spéciales où il déploie autant de zèle que de connaissance ; puis c’était un homme à qui l’on a proposé d’être ministre, et qui l’a refusé ; enfin, c’était un autre membre qui, malgré ses biens et sa capacité, n’a pas non plus, je crois, envie de l’être.
Ainsi, après avoir examiné l’acte en lui-même, ses motifs, les personnes de qui il émane, je ne vois pas encore que ce soit un acte d’opposition contre le ministère, et je pense que MM. les ministres n’auraient pas pris aussi chaudement la parole, si un honorable membre dans cette circonstance n’avait été plus ministériel que le ministère lui-même. (Nombreuses marques d’adhésion. La clôture ! la clôture !)
M. Poschet. - Je demande la parole. (Non ! non ! La clôture !) Je la réclame pour un fait personnel. Messieurs, j’ai dit qu’il n’était pas parlementaire de nommer à la tribune les membres d’une commission ou d’une section quelconque. M. Brabant a lui-même justifié mon allégué…
- Plusieurs voix. - Ce n’est pas là un fait personnel.
M. Poschet. - J’ai le droit de rectifier un fait avancé. Je dis que l’on ne peut pas venir désigner les membres qui ont pris part à une proposition, en citant leurs noms à la tribune… (Violents murmures et interruption.)
- Un grand nombre de voix. - Il n’y a rien là de personnel. La clôture ! la clôture !
M. Marcellis. - Je demande la parole contre la clôture. Messieurs, il s’agit ici d’une question de constitution et de haute politique, et certainement nous agirions avec une grande imprudence si nous la demandions précipitamment. Je crois qu’il est convenable, dans l’intérêt du pays bien plus que dans l’intérêt du ministère, de la méditer mûrement. En conséquence je demande le renvoi de la discussion à demain. (Non ! non ! Aux voix !)
M. Verdussen. - D’après les explications que nous avons entendues, tout consiste à se bien pénétrer du rapport. Or il est dit dans ce rapport : « La nation veut ; » ces mots ne me conviennent pas, et je demande le renvoi à une autre séance pour avoir le temps de l’examiner. (Aux voix ! aux voix !)
M. Dumortier. - En vérité, je m’étonne que l’on reproche à la section centrale de s’être servie de ces expressions : « La nation veut. »
Messieurs, n’êtes-vous pas la représentation nationale ? Quand vous votez, soit pour, sont contre, c’est toujours la nation qui veut. La nation, messieurs, a bien le droit d’avoir une volonté quand, depuis trois ans d’attente et d’inquiétude, elle se voit dupée par la conférence. (Les cris : La clôture ! deviennent plus répétés.)
- La clôture est mise aux voix et prononcée.
L’amendement de M. Mary est rejeté pas assis et levé à une forte majorité.
M. le président. - Je vais maintenant mettre aux voix l’amendement présenté par M. le ministre de l'intérieur.
- Plusieurs membres. - L’appel nominal ! l’appel nominal !
M. de Robaulx. - Je demande la priorité pour l’amendement de la section centrale,
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Ce serait à tort qu’on représenterait la proposition de la section centrale comme un amendement ; c’est un véritable projet de loi.
M. Gendebien. - Je propose la question préalable sur l’amendement de M. le ministre de l’intérieur. C’est à la demande du ministère lui-même qu’il a été décidé que le budget de la guerre serait voté séparément des autres budgets. Eh bien, messieurs, à moins que vous ne veuillez vous constituer solidaires de l’inconséquence des ministres, nous devons passer à l’ordre du jour par la question préalable. (Appuyé ! appuyé ! Aux voix !)
M. Dumont. - Je déclare que j’ai l’intention de voter pour la proposition ministérielle. (Il y a clôture !)
Je parle sur la question préalable. Il m’est bien permis, je crois, de repousser le reproche d’inconséquence que l’on fait peser d’avance sur mon vote. Je soutiens, moi, que ce vote n’aura rien d’inconséquent, par la raison que quand on a décidé que le budget de la guerre serait discuté séparément, on était dans l’opinion que ce budget ne pouvait pas amener un vote politique. Mais depuis, on en a fait une question politique ; et, malgré les motifs de la section centrale, je ne pense pas que cette section puisse se dire l’interprète de la chambre. Chacun a le droit de voter comme il l’entend, sans qu’on puisse lui adresser le reproche d’inconséquence. (Aux voix ! aux voix !)
M. Dumortier. - J’appuie la question préalable. C’est le seul moyen. (Aux voix ! aux voix !)
- Au milieu du bruit, les paroles de l’orateur n’arrivent pas jusqu’à nous.
M. le président se dispose à mettre aux voix la question préalable.
- On demande l’appel nominal.
Un des secrétaires fait l’appel nominal dont voici le résultat :
Sur 73 membres, 45 se prononcent pour, et 28 contre.
En conséquence la question préalable est adoptée.
Ont voté pour : MM. Angillis, Brabant, Coppens, Corbisier, Dams, de Brouckere, de Haerne, de Laminne, Dellafaille, de Meer de Moorsel, W. de Mérode, de Renesse, de Robaulx, de Sécus, Desmaisières, Desmanet, Desmet, d’Huart, Dubus, Dumortier, Ernst, Fallon, Fleussu, Fortamps, Gendebien, Hye-Hoys, Jullien, Lardinois, Levae, Liedts, Meeus, Osy, Pirson, Raymaeckers, A. Rodenbach, C. Rodenbach, Speelmann, Teichmann, Thienpont, M. Vanderbelen, Vergauwen, Verhagen, H. Vilain XIIII, Watlet et Vuylsteke.
Ont voté contre : MM. Coghen ; Cols, de Bousies, de Robiano de Borsbeek, de Terbecq, de Theux, Dewitte, de Stembier, Domis, Donny, Dumont, Duvivier, Goblet, Lebeau, Legrelle, Marcellis, Mary, Milcamps Morel-Danheel, Nothomb Olislagers, Polfvliet, Poschet, Rogier, Ullens, Vandenhove, Verdussen et Raikem.
- La proposition de la section centrale est ensuite mise aux voix et adoptée par assis et levé.
Les transferts concernant l’article 2, et proposés par M. le ministre de la guerre, sont successivement mis aux voix et adoptés.
L’assemblée déclare ensuite l’urgence du budget de la guerre sur le pied de guerre, et décide qu’il sera voté demain sur l’ensemble.
La séance est levée à 6 heures moins un quart.