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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 12 mars 1833

(Moniteur belge n°73, du 14 mars 1833)

(Présidence de M. Raikem.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse fait l’appel nominal à une heure.

M. Dellafaille donne lecture du procès-verbal ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Lehon écrit à la chambre qu’il n’a touché aucune indemnité pendant la présente session, qu’il n’a donné à personne le pouvoir de toucher, et qu’il ne croira avoir droit à l’indemnité que lorsqu’il prendra part aux travaux de ses honorables collègues.

Projet de loi relatif aux droits sur les céréales

Rapport de la section centrale

M. Fleussu, rapporteur de la section centrale, qui a été chargée de l’examen du projet de loi concernant les céréales, est appelé à la tribune. Il s’exprime en ces termes. - Messieurs, votre section centrale m’a chargé de vous présenter le rapport de son travail sur le projet que vous ont présenté MM. les ministres de l’intérieur et des finances, concernant l’exportation, l’importation et le transit des céréales.

Toutes vos sections ont compris la nécessité et reconnu l’urgence d’aviser aux moyens de venir au secours de l’agriculture, dont la prospérité s’altère chaque jour. Sous ce rapport, le projet ministériel a été accueilli avec empressement ; toutefois, messieurs, les mesures que le gouvernement voudrait faire convertir en loi, n’ont point obtenu faveur. Dans presque toutes vos sections, en effet, on s’est s’élevé contre le tarif dont le tableau est joint au projet ; quelques-unes ont fait la demande de rétablir les tarifs en vigueur au mois d’octobre 1830.

L’article 3 du projet a été également l’objet des observations de vos sections. il a été fait remarquer, et avec fondement, croyons-nous, que la législature ne pouvait déléguer au pouvoir exécutif la faculté d’élever à discrétion le taux des droits d’exportation, parce que ces droits et les augmentations dont on aurait voulu les rendre susceptibles au gré du gouvernement, constituent un véritable impôt ; d’où il suit que le concours de la législature est indispensable pour statuer sur la convenance des augmentations, parce qu’aux termes de l’article 110 de la constitution, aucun impôt au profit de l’Etat ne peut être établi que par une loi. Une section a encore fait observer qu’il ne serait peut-être pas sans danger de laisser le pouvoir exécutif seul arbitre des circonstances et de l’intérêt général, qui pourraient exiger des modifications dans l’exécution de la loi.

Enfin, messieurs, les sections ont trouvé que, dans les bornes étroites où il est renfermé, le projet ne pourrait être regardé que comme une mesure transitoire. Toutes ont chargé votre section centrale d’éveiller la sollicitude du ministère, en lui exprimant le vœu de voir présenter le plus tôt possible un système complet de législation sur cette intéressante matière.

Telles sont, messieurs, les observations de vos sections, reproduites aussi succinctement que me l’ont permis les quelques moments qui m’ont été donnés pour préparer mon rapport.

Résumant le travail des sections, votre section centrale s’est proposé tout d’abord la question de savoir si l’on rétablirait les tarifs en vigueur en 1830.

Cinq membres se sont prononcés pour 1’affirmative ; la négative n’a obtenu qu’un suffrage.

La majorité de la section a paru se décider par la considération que, pour rendre la mesure efficace, il fallait non seulement favoriser l’exportation, mais encore assurer à l’intérieur la consommation de nos denrées. Or, pour atteindre ce but, il faut établir de faibles droits à l’exportation, et il faut frapper l’importation d’un impôt tel que nos produits puissent soutenir avantageusement la concurrence avec les céréales étrangères. Sous ce rapport, les anciens tarifs ont obtenu la préférence. Vous remarquerez du reste, messieurs, que relativement au transit, les droits que nous vous proposons de remettre en vigueur sont, à quelques exceptions près, dans les mêmes proportions que ceux du tarif qui accompagne le projet en discussion.

La section centrale a été, comme quelques-unes de vos sections, frappée de l’insuffisance du projet comme législation définitive ; elle a été unanime pour ne le regarder que comme loi transitoire, et conséquemment elle s’est demandé jusques à quelle époque cette loi serait obligatoire ? On a été unanimement d’avis qu’elle devait cesser ses effets au 31 décembre de cette année.

Deux observations principales ont fait impression sur votre section centrale, et l’ont déterminée à rapprocher le terme de l’expiration de la loi. On a pensé que par là on placerait le ministère dans la nécessité de satisfaire au vœu général de la chambre, en lui présentant, dans un bref délai, un système complet de législation. En second lieu, on a craint qu’en lui fixant une plus longue durée, la loi ne pût pas répondre aux besoins éventuels de l’industrie agricole et à l’intérêt des consommateurs indigènes.

Quant à la disposition finale du projet, qui tendrait à autoriser le gouvernement à augmenter le taux des droits d’exportation, elle a été supprimée sans contradiction ; indépendamment des motifs donnés par quelques-unes de vos sections, et rappelés plus haut, on a fait valoir, en faveur de la suppression, qu’il ne s’agissait en ce moment que d’une loi transitoire, dont la force obligatoire est resserrée dans un très court espace de temps, et qu’il y a certitude que le pays est tellement abondamment pourvu de céréales, qu’aucune crise n’est à craindre dans l’intervalle.

En conséquence des réflexions qui précèdent, nous avons l’honneur de vous présenter le projet dont la teneur suit :

« Art. 1er. Les arrêtés du gouvernement provisoire des 21 octobre et 16 novembre 1830 (Bulletin officiel, n°’ 15 et 33), ainsi que les dispositions du tarif arrêté le 7 novembre 1830 (Bulletin officiel, n°36), relativement aux grains et céréales, sont abrogés. »

« Art. 2. L’importation et l’exportation des grains et céréales, ainsi que le transit de ces denrées rétabli par la loi du 1er mai 1832, n°316 (Bulletin officiel, n°31), sont soumis au paiement des droits de douanes fixés dans les tarifs en vigueur au mois d’octobre 1830. »

« Art. 3. La présente loi cessera ses effets au 31 décembre prochain. »

M. Osy demande la parole pour une motion d’ordre. - Messieurs, dit l’honorable membre, si M. le rapporteur du budget de la guerre avait terminé son travail, je proposerais de commencer la discussion de ce budget, après quoi on discuterait la loi sur les céréales. Cette dernière loi est importante ; les chambres de commerce devraient être consultées. M. le ministre de l'intérieur a dit qu’il avait écrit à la chambre de commerce d’Anvers ; mais je ne sais s’il a écrit aux autres chambres de commerce.

La section centrale, d’après ce que vous venez d’entendre, n’est pas d’accord avec le ministre de l’intérieur ; la section centrale propose d’imposer un droit ; le ministre n’en demande presque pas. L’avis des chambres de commerce peut être très utile.

M. de Brouckere. - Qu’on remette la discussion de la loi sur les céréales, à la bonne heure ; mais qu’on ne dise pas que la discussion n’en commencera qu’après le vote sur le budget de la guerre ; c’est à quoi je m’opposerai. On ne sait pas quand le budget de la guerre sera voté.

Au reste, je m’oppose à ce qu’on vote séparément sur les budgets. Dans un gouvernement constitutionnel, il doit y avoir une discussion préalable sue tous les budgets ministériels ; cette discussion doit tomber sur la marche du gouvernement et sur l’ensemble des lois de finance.

M. A. Rodenbach. - Je partage l’opinion de M. de Brouckere. Il se pourrait que la discussion des budgets dût se prolonger pendant plusieurs semaines, et des spéculateurs fort adroits pourraient tirer parti de cet ajournement en introduisant des masses énormes de grains étrangers dans notre pays. Il n’y en a déjà que trop d’introduits ; c’est à ce point que le seigle ne vaut que 9 fr. et le froment 15 fr. Que la discussion de la loi sur les céréales soit remise à quelques jours seulement, j’y consens.

M. Osy. - Je proposerai une remise à huitaine.

M. Tiecken de Terhove. - La chambre ne peut revenir sur une décision qu’elle a prise. Elle a décidé qu’immédiatement après la loi sur les barrières, elle s’occuperait de la loi sur les céréales. Depuis longtemps le gouvernement aurait dû prendre des mesures pour venir au secours de l’industrie agricole. Je demande que l’on maintienne la décision de la chambre, et qu’on s’occupe demain de la loi sur laquelle on vient de faire un rapport.

M. Osy. - L’année passée, en proposant, au mois de mai, la loi sur le transit, j’ai demandé que le gouvernement s’occupât de l’exportation et de l’importation des céréales. Je savais alors que des mesures sur cet objet étaient importantes ; je n’ai pas changé d’opinion ; mais c’est à cause de leur importance que je demande que les chambres de commerce soient consultées. Huit jours ne peuvent occasionner aucun inconvénient.

M. A. Rodenbach. - Messieurs, Guillaume était assez grand partisan de la liberté du commerce des grains. Il était tout à fait pour le système de liberté illimitée. La section centrale propose un droit très faible de 11 florins et demi sur 1,000 kilog. de grains importés ; le ministre ne propose qu’un droit de 2 francs et demi sur 1,000 kilog. de froment importé ; c’est évidemment un droit illusoire. Le projet ministériel est un projet de liberté illimitée de commerce des grains, il y a de grands intérêts à consulter sur cette matière.

M. Dumortier. - Si l’assemblée remet la discussion de la loi sur les céréales à huitaine, et si l’on demande qu’avant la discussion l’avis des chambres de commerce soit accueilli, ce que je trouverais très raisonnable et très juste, je demanderai alors qu’on permette la lecture d’une proposition que j’ai faite dans la sixième section.

Voici les faits :

Vous savez qu’hier, dans les sections, nous avons examiné le projet du ministère. Dans la sixième section on a été unanime pour adopter le projet du gouvernement. Mais en même temps on a exprimé unanimement le regret que ce projet ne fût que temporaire et qu’il provoquât une discussion aussi longue qu’un projet définitif.

D’après d’excellents documents, j’ai rédigé un projet de loi de maximum et de minimum d’importation, et je l’ai remis ce matin à la sixième section, et elle en a autorisé la lecture. La sixième section, en agissant ainsi, croyait que la section centrale n’avait pas terminé son travail ; que ma proposition pouvait encore être examinée par cette section centrale et être soumise au ministre. Aujourd’hui on vient de vous faire le rapport sur la loi des céréales ; si on la discute immédiatement, ma proposition pourra faire l’objet d’un amendement ; si la discussion est remise à huitaine je demande la permission de lire mon projet afin qu’on puisse en faire usage.

M. Osy. - Nous ne pouvons pas empêcher M. Dumortier de présenter un projet de loi ; mais si c’est un projet complet qu’il propose, il ne favoriserait pas notre commerce : nos ports doivent être ouverts promptement, et pour atteindre ce but, il faut une loi d’urgence, une loi temporaire.

M. Berger. - Si, dans un projet, le ministre se fût borné à statuer sur la libre exportation des grains, la loi n’aurait, sans doute, rencontré aucune opposition ; mais il a, en même temps, proposé des droits d’entrée sur les grains étrangers ; alors nous avons une discussion de principes à soulever : faut-il frapper les grains étrangers à l’entrée, faut-il leur laisser l’entrée libre ? Voilà ce que nous aurons à décider. On aurait pu mettre de côté cette seconde partie de la loi, car elle pourrait nous arrêter huit jours.

M. de Brouckere. - La question est maintenant de savoir quand nous discuterons le projet de loi sur les céréales : voulez-vous qu’on discute dans huit jours ?

M. Tiecken de Terhove. - Il y a décision ; il faut le discuter demain.

M. de Brouckere. - La chambre peut revenir sur ses décisions quand elle a entendu un rapport.

On vient nous dire que la sixième section autorise la lecture d’une proposition qui lui a été soumise ; mais ce n’est pas ainsi que les propositions doivent parvenir à la chambre.

Il y a déjà un projet de loi sur la matière, dont la chambre est saisie ; un second projet ne pourrait que jeter de la confusion dans la discussion. On pourrait, avec l’autorisation des sections, vous faire discuter à la fois sur cinq ou six projets. Que M. Dumortier remette son projet au ministre, et le ministre verra s’il peut le prendre en considération ; ou bien, que M. Dumortier conserve son projet pour en faire un amendement pendant la discussion.

M. Dumortier. - Messieurs, on propose d’accorder au Roi la faculté d’augmenter ou de diminuer les droits sur l’exportation et l’entrée des céréales pendant l’intervalle des sessions, quand les circonstances le permettront ou l’exigeront. Il est vraisemblable que cette proposition occasionnera quelques débats. Pendant ces débats, j’aurai sans doute le droit de présenter ma proposition comme amendement ; mais ne vaudrait-il pas mieux qu’elle fût dès à présent déposée sur le bureau, afin que chacun pût en prendre connaissance et l’examiner mûrement ?

La sixième section a cru ma proposition assez importante pour qu’il fût convenable que j’en donnasse lecture à l’assemblée ; je l’ai en main, et si la chambre le désire, la lecture en sera bientôt faite.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - A huitaine !

M. Deleeuw. - Deux lois sont maintenant à l’ordre du jour, la loi sur les naturalisations et la loi sur les céréales. La dernière est la plus urgente : il ne s’agit pas sur les céréales d’une loi fondamentale, il s’agit d‘une loi provisoire ; discutons-la promptement. (A demain ! à demain ! à demain ! A huitaine ! à huitaine ! à huitaine !)

M. de Haerne. - On ne pourra pas, dans 8 jours, avoir l’avis des chambres de commerce.

M. A. Rodenbach. - Je propose à lundi.

M. Osy. - Lundi ou mardi, je n’y tiens pas. Je me rallie à la proposition de M. Rodenbach.

- La chambre, consultée, décide que le projet de loi sur les céréales sera discuté demain.

Rapports sur des pétitions

L’ordre du jour est le rapport de la commission des pétitions.

M. de Brouckere, rapporteur. - Messieurs, j’ai déjà eu l’honneur de vous faire le rapport de la première pétition du feuilleton n°6, adressée à la chambre par les états députés de la province de Liège, et contenant des observations relativement au droit des barrières sur les routes de deuxième classe. Vous avez ordonné le dépôt de cette pétition au bureau des renseignements ; je passe donc à la deuxième, ainsi conçue :

« Les bourgmestres des communes qui composaient l’ancien canton de Grey, arrondissement de Louvain, demandent le rétablissement de ce canton. »

La commission propose le renvoi au ministre de la justice et le dépôt au bureau des renseignements.

Messieurs, cette pétition porte un assez grand nombre de signatures, et comme les réclamants paraissent y attacher une grande importance, je me suis procuré des renseignements dont l’exposé vous démontrera sans doute que c’est un objet digne de toute votre attention et de celle du gouvernement.

Voici ces documents : (note du webmaster : ces documents, insérés dans le Moniteur, ne sont pas repris dans cette version numérisée.)

- Le double renvoi proposé par la commission est adopté.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Le sieur Furdelle, boulanger à Dinant, réclame l’intervention de la chambre pour obtenir le paiement de 1,200 rations de pain, dont il était adjudicataire, et qu’après avoir confectionnées il n’a pu livrer. »

Le dommage, dont se plaint le pétitionnaire, ne s’élève qu’à 36 fl. Il a déjà adressé une semblable demande à la chambre, qui en ordonné le renvoi au ministre de la guerre. Si M. le ministre n’y pas eu égard, c’est que probablement elle n’était pas de nature à avoir aucune suite. La commission a jugé qu’un second renvoi était inutile, et elle vous propose en conséquence l’ordre du jour.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. de Brouckere, rapporteur. - « La dame veuve Verdick, à St-Josse-ten-Noode, réclame le paiement du reste de l’indemnité à laquelle elle prétend avoir droit pour pertes essuyées dans les journées de septembre. »

Le dommage, du chef duquel réclame la pétitionnaire, monte à 254 fr. ; elle a reçu sur cette somme un à-compte de 30 fl. de Hollande, et elle demande le reste de ce qu’elle dit lui être dû.

Il paraît, messieurs, que cette femme est vraiment dans une position très malheureuse. Elle a perdu son mari le 25 août 1831, et elle a une nombreuse famille à soutenir. La commission propose le renvoi au ministre de l’intérieur, pour qu’il puisse la prendre en considération, s’il a en main des fonds disponibles.

- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Le sieur E. Libbrecht, cultivateur à Tieghem, renouvelle sa demande de paiement d’une somme de 200 fr. pour la perte d’un chariot de transport à la suite de l’armée anglaise en 1815. »

Le pétitionnaire a déjà adressé une requête de la même nature à la chambre, qui en a ordonné le dépôt au bureau des renseignements. Comme celle-ci ne contient aucune explication nouvelle, il est fort inutile de l’envoyer rejoindre son aînée ; et la commission propose l’ordre du jour.

- L’ordre du jour est adopté.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Le sieur A. Brogniet, peigneur de laine, à Sivry (Hainaut), se plaint de ce que son fils ait dû marcher comme milicien, par suite du refus fait par le bourgmestre de sa commune de signer un certificat d’indigence pour lui, et demande que la chambre ordonne une enquête judiciaire pour obliger le bourgmestre, à lui délivrer un semblable certificat. »

Messieurs, il paraît que le pétitionnaire se serait adressé au bourgmestre de sa commune pour obtenir un certificat d’indigence, et que celui-ci, n’ayant pas trouvé cette indigence bien constatée, le lui aurait refusé. Le sieur Brogniet prétend que M. le bourgmestre l’a fait « sous le vain prétexte de blesser sa conscience » (c’est ainsi que la pétition s’exprime). Cependant ce pétitionnaire, d’après son propre aveu, ne se trouve pas dans un état d’indigence complet, et vous savez que la législation existante sur la milice exige qu’il en soit ainsi. Cela est si vrai, que nous aurons bientôt à discuter un projet de loi qui a pour but de revenir sur cette rigueur de la loi ; mais, tant que cette loi reste en vigueur, elle doit être exécutée. On ne peut donc reprocher à M. le bourgmestre de Sivry de s’y être conformé.

Par ces motifs la commission vous propose l’ordre du jour.

M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Le bourgmestre seul s’est-il refusé à la délivrance du certificat ?

M. de Brouckere, rapporteur. - Si la chambre le désire, je vais donner lecture de la pétition ; elle est assez singulièrement rédigée. Voici comment elle est conçue :

« A M. le président et MM. les membres de la chambre des représentants.

« Messieurs,

« Je soussigné André Brogniet, peigneur de laine, demeurant à Sivry, district de Thuin (Hainaut), prends la respectueuse confiance de supplier la chambre de lui faire droit pour le fait suivant :

« Laurent Brogniet, mon fils unique, ayant tombé au sort au tirage de la milice de 1831, je me suis adressé à mon administration communale afin de solliciter un certificat d’indigence pour faire exempter mon fils.

« M. Maximilien Sauveur, bourgmestre, sous le vain prétexte de blesser sa conscience, me l’a refusé, et voilà que la conscience de M. Sauveur limite la loi et la paralyse à mon préjudice, puisque par cette fatalité mon fils est soldat.

« Messieurs, je devrais vous dévoiler ici quels sont les motifs cupides qui blessent cette conscience ; mais je ne veux pas dénoncer, je veux seulement porter aux pieds de la chambre l’injustice dont je suis victime.

« Pour vous prouver, messieurs, les tolérances de M. le maire, je vous affirmerai et m’engagerai de vous prouver que je ne possède aucun bien ni rente ; que je n’ai d’autre ressource pour exister que le fruit du travail de mes bras, qui consiste en 4 à 5 francs par semaine ; et c’est tout ce qu’un vieillard de 66 ans peut gagner dans mon état, et encore n’a-t-on pas toujours de l’ouvrage, et pourtant dans cette situation je ne suis pas indigent aux yeux de M. Sauveur et pour cause.

« Je supplie donc la chambre d’ordonner une enquête sur la véracité de ma plainte, ou de m’autoriser à faire assigner gratuitement le maire et des gens indépendants par-devant un tribunal compétent, afin de prouver judiciairement que je suis indigent et que le maire doit me délivrer le certificat que la loi exige et qu’il me refuse arbitrairement.

« J’ose espérer, M. le président et MM. les membres, que vous daignerez jeter un coup d’œil charitable sur ma pétition, et que vous ferez rendre la justice que je suis en droit d’attendre de l’indépendance de la chambre.

« J’ai l’honneur d’être, messieurs, votre très humble et dévoué serviteur.

« Sivry, le 9 février 1833.

« André Brogniet. »

M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Je trouve cette réclamation très inconvenante.

M. de Brouckere, rapporteur. - Je crois que M. le ministre ne m’a pas bien compris, car j’ai proposé l’ordre du jour.

M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Je n’ai demandé la parole que pour faire sentir l’inconvenance d’une pareille réclamation contre un bourgmestre, puisqu’il ne dépend pas de lui seul de délivrer le certificat d’indigence et que ce certificat doit être signé par d’autres personnes, sous leur responsabilité personnelle.

M. Poschet. - J’ai l’avantage de connaître le bourgmestre dont il s’agit, et je puis assurer que c’est un très honnête homme. S’il parle de sa conscience, c’est qu’il en a une et qu’il a cru devoir en suivre l’impulsion.

M. Dubus. - Je ne viens pas parler en faveur du pétitionnaire, car il a tort dans l’espèce dont il s’agit. Cependant c’est une question qui mériterait d’être examinée. Il arrive souvent, j’aime à le croire, que les bourgmestres et les échevins font un bon usage du pouvoir arbitraire qui leur est conféré par la loi à l’égard des certificats ; mais cela n’arrive pas toujours. Je crois que M. le ministre de l’intérieur pourrait attester, s’il le voulait, que des plaintes graves lui ont été déférées en pareille matière. Il m’a été signalé un cas particulier, dans lequel un bourgmestre aurait refusé un certificat d’indigence tel qu’il devait être accordé, et cela parce qu’un de ses proches aurait été obligé de partir à la place de l’exempté. C’est un cas d’une espèce particulière, qui est arrivé récemment dans le district de Tournay. Le bourgmestre a attendu, pour accorder le certificat, que l’ordre de départ fût expédié, et c’est seulement lorsqu’il a jugé que son parent n’avait plus rien à craindre qu’il a délivré ce certificat, et encore était-il tel qu’on pouvait dire qu’il ne remplissait pas les formalités de la loi.

Il me semble qu’il devrait y avoir moyen de redresser une erreur du bourgmestre et des échevins, que cette erreur fût volontaire ou involontaire. C’est sous ce rapport que la pétition me paraît mériter l’examen de la chambre, et je propose de la déposer au bureau des renseignements.

M. de Brouckere, rapporteur. - Je ne m’oppose pas au dépôt au bureau des renseignements. Je ferai seulement deux observations à l’assemblée. La première, c’est que la pétition ne contient pas un seul renseignement utile ; et la seconde, c’est que bientôt nous aurons à nous occuper de la question à propos du projet qui nous a été présenté sur la matière per M. le ministre de l’intérieur.

M. Dubus. - Je n’insiste pas sur ma proposition ; je ne l’avais faite que pour qu’on eût les yeux fixés sur l’espèce d’abus dont parle la pétition, lorsqu’on discuterait une loi nouvelle.

M. de Muelenaere. - Je ferai remarquer que l’on serait dans l’erreur si l’on croyait que les certificats d’indigence sont délivrés par les bourgmestres seuls. Ce sont des pères de famille qui les signent sous leur responsabilité personnelle.

- L’ordre du jour est mis aux voix et adopté.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Le sieur Gill. Maus, à Freylange, se plaint de ce que le bourgmestre de sa commune lui a refusé l’attestation donc il avait besoin pour faire exempter son fils unique de la levée de la milice de 1832. »

La commission propose également l’ordre du jour sur cette pétition qui est de même nature que la première.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Le sieur Lambert Jacob, manouvrier à Rulles (Grand-Duché), réclame contre une décision du ministre de l’intérieur qui le désigne pour le service, quoique marié. »

Il suffit de lire la réponse qu’a faite M. le ministre de l’intérieur à une requête que le sieur Jacob lui a adressée, pour justifier l’ordre du jour proposé par la commission. Voici cette réponse :

« Vu la requête par laquelle le nommé Louis-Lambert Jacob, de Rulles, demande d’être libéré du service de la milice, du chef de son mariage contracté le 28 mars 1832 ;

« Vu le rapport de M. le gouverneur de la province de Luxembourg ;

« Considérant que ce mariage, contracté postérieurement à l’inscription sur les listes de la milice, n’est point un motif d’exemption reconnu par les lois sur cette institution ;

« Informe le pétitionnaire que sa demande ne peut être accueillie.

« Signé, Ch. Rogier. »

Cette décision est eh tout conforme à la loi, et c’est à tort que le pétitionnaire a réclamé.

- L’ordre du jour est mis aux voix et adopté.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Le sieur Brunfaut, intendant militaire en inactivité, transmet à la chambre un arrêt qui le disculpe des accusations lancées contre lui par le ministre de la guerre à la séance du 28 septembre 1831, et demande que lecture en soit donnée. »

La commission propose le dépôt au bureau des renseignements.

Messieurs, vous avez peut-être encore présente à la mémoire l’espèce d’accusation qui a été lancée, dans une séance de la session dernière, contre le sieur Brunfaut. Il paraît que cette accusation était la suite de renseignements tout à fait inexacts. Le pétitionnaire en a la preuve irrécusable, et il tient à ce que la chambre en ait connaissance. Je demande donc la permission à la chambre de lui lire la réclamation du sieur Brunfaut, ainsi que le passage d’un arrêt de la cour supérieure de justice de Bruxelles. Voici la pétition :

« A MM. les membres de la chambre des représentants.

« Messieurs,

« Dans votre séance du 28 septembre 1831, M. le ministre de la guerre, de Brouckere, a dirigé contre moi de graves accusations. Il a dit « qu’il résultait du rapport d’un auditeur militaire que j’aurais transgressé tous mes devoirs, que de nombreux indices de fraude existent contre moi, que je n’aurais fait que le simulacre d’adjudications, au lieu de faire des adjudications sérieuses ; il n’y a pas assez de preuves, a ajouté le ministre, pour faire un procès criminel à cet individu ; mais il y en a de reste pour lui refuser toute confiance. »

« Je vous adressai, lorsque j’ai eu connaissance de ces faits qu’on me reprochait, un mémoire justificatif, en vous déclarant que j’allais demander d’être traduit devant la justice militaire, confiant que j’étais que l’arrêt qu’elle prononcerait serait la meilleure et la plus éclatante des justifications.

« Je ne pus obtenir cette faveur, et je restais accablé sous le poids des paroles que M. le ministre avait laissé tomber sur moi.

« Je pus cependant, plus tard, obtenir une audience de M. de Brouckere, et il me fut facile alors, en réfutant les pièces qui avaient faussé son opinion à mon égard, de me justifier assez complétement auprès de lui, pour qu’il comprît que j’étais la victime d’une intrigue, et qu’il me déclarât qu’il réparerait à tout prix l’injustice qu’il m’avait faite involontairement. Ses bonnes intentions furent manifestées par le rapport on ne peut plus favorable qu’il fît sur mon compte à M. le général Evain, qui lui succéda au ministère de la guerre ; et, auprès de ce dernier, je pense être aussi complétement justifié.

« Mais mon honneur ne peut être satisfait par le retour de la considération des deux ministres ; l’effet des paroles accusatrices de M. de Brouckere subsiste toujours ; il m’importe que je sois enfin publiquement justifié.

« Le procès intenté par M. Pieton contre le gouvernement pour l’exécution des marchés d’urgence qu’il avait contractés avec moi, m’en fournit l’occasion.

« Je vous adresse une copie du dispositif de l’arrêt rendu dans cette affaire, par la cour supérieure de Bruxelles, qui témoigne d’autant mieux contre le rapport de l’auditeur militaire, que je suis resté complétement étranger au procès.

« Le mémoire que je vous ai envoyé dans le temps, ayant été renvoyé au bureau des renseignements, je vous prie, messieurs, de vouloir permettre qu’il soit donné lecture à la chambre de l’arrêt rendu dans l’affaire de l’adjudication de l’approvisionnement de siège de la place de Namur, et de le joindre ensuite à mon mémoire en forme de pétition.

« J’ai l’honneur d’être, avec le plus profond respect, messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur.

« Brunfaut, intendant militaire en non-activité.

« Bruxelles, le 24 février 1833. »

Je vais donner maintenant lecture du passage de l’arrêt dont j’ai parlé :

« Attendu que dans l’espèce, non seulement on n’a articulé contre la convention aucun fait de dol, mais qu’il est même évident au procès que Brunfaut a rempli son mandat de bonne foi et avec autant de prudence et d’exactitude que les circonstances le permettaient, etc., etc. »

- La chambre, consultée, ordonne le dépôt au bureau des renseignements.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Le sieur C. Pettens, à Louvain, demande une loi qui admette à la liquidation toutes les rentes à charge de la nation, non liquidées jusqu’à ce jour. »

La commission propose le dépôt au bureau des renseignements, qui est ordonné.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Les époux Van Elder, cultivateurs à Lovenjoul, demandent que leur quatrième fils, dont les trois aînés ont satisfait à la milice, et qui est retenu sous les drapeaux illégalement, selon eux, soit rendu à sa famille. »

La commission propose l’ordre du jour, par le motif que les pétitionnaires n’ont pas réclamé devant l’autorité compétente. »

- La chambre passe à l’ordre du jour.


M. de Brouckere, rapporteur. - « La dame Marie-Anne Neutelaers, veuve de Daniel Nevens et épouse en secondes noces du sieur A. Verhagen, demande l’exemption du service pour l’un de ses deux fils retenu illégalement, selon elle, sous les drapeaux de la garde civique mobilisée. »

Voici, messieurs, la décision de M. le ministre de la guerre à la requête qui lui avait été adressée par le premier mari de la pétitionnaire :

« Vu la requête de Daniel Nevens, tendant à obtenir l’exemption du service du premier ban ;

« Vu le rapport du gouverneur de la province de Brabant ; considérant que le nombre de fils composant la famille du pétitionnaire, et que la loi permet d’appeler au service de l’Etat, n’étant pas outrepassé, il n’a pas droit à l’exemption ;

« Informe le réclamant qu’il n’y a pas lieu de prendre sa demande en considérations. »

Par le même motif, la commission propose l’ordre du jour.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Vingt-cinq raffineurs de sucre, à Anvers, se plaignent de la fraude qui s’exerce sur cet article et demandent des mesures répressives. »

La commission propose, le renvoi au ministre des finances, et dépôt au bureau des renseignements.

Je dois faire observer à la chambre que les nombreux signataires de la pétition, tout en se plaignant de l’état actuel de leur industrie, et en demandant qu’on vienne à leur secours par l’adoption d’une mesure répressive contre la fraude, ne signalent aucun moyen d’empêcher cette fraude. J’ai donc dû prendre des renseignements ailleurs, et je suis parvenu à me procurer copie d’une requête des raffineurs de la ville de Gand, adressée à M. le ministre des finances, et qui, à ce qu’il paraît, est actuellement l’objet d’un examen tout spécial de ce département. Si la chambre veut se borner à ordonner le double renvoi proposé par la commission, je crois qu’elle aura fait ce qui est le plus convenable.

Si, au contraire, elle veut qu’une discussion s’établisse sur cette pétition, alors je lui demanderai si elle désire que je lui donne connaissance de celle adressée à M. le ministre des finances par les raffineurs de la ville de Gand. C’est une pièce très bien rédigée et fondée sur des calculs très exacts. Je pourrais en appeler à cet égard à plusieurs de mes honorables collègues qui l’ont vue et qui ont su l’apprécier.

M. Osy. - Messieurs, j’ai eu de très longs entretiens avec des raffineurs d’Anvers et de Gand, et je sais que la requête dont parle M. de Brouckere n’était pas du tout destinée à la chambre, mais à M. le ministre des finances. Elle contient des choses qu’on peut bien révéler à un ministre, mais qui ne doivent pas retentir à la tribune. Je ne m’opposerai pas, cependant, à ce qu’on en donne lecture, si l’on en supprime certains passages.

M. de Brouckere, rapporteur. - Mon intention était aussi de ne pas lire la pièce tout entière ; mais je crois que ce que nous aurions de mieux à faire, ce serait de renvoyer la pétition des raffineurs d’Anvers à M. le ministre des finances, avec demande d’explication.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - J’appuie les conclusions de M. le rapporteur de la commission des pétitions. Je ne sais pas, d’ailleurs, jusqu’à quel point il serait permis de donner lecture d’une pétition qui n’est pas adressée à la chambre. Le ministre a bien pu consentir à laisser voir, par quelques membres, cette pièce, qui lui a été adressée confidentiellement, mais il ne voudrait pas sans doute, qu’on en donnât publiquement lecture. Toutefois, si l’on en décidait autrement, je demanderais qu’elle fût faite tout entière, parce qu’on pourrait croire, d’après ce qui vient d’être dit, qu’elle contient quelque chose contre M. le ministre des finances.

M. de Brouckere. - Je suis vraiment étonné du langage de M. le ministre de la justice ; je n’ai rien entendu dire contre M. le ministre des finances : j’ai seulement demandé à la chambre, dans le cas où une discussion s’ouvrît, si je pouvais lui donner lecture de la pétition des raffineurs de Gand, que je ne tiens pas du ministre, mais des pétitionnaires eux-mêmes, et ils m’ont laissé la liberté d’en disposer comme je le jugerais à propos.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Je déclare que je rends toute justice aux intentions de M. le rapporteur. Je croyais, et plusieurs de mes honorables collègues l’ont sans doute cru comme moi, que la pétition sortait des mains de M. le ministre des finances, de sorte que j’avais raison de dire qu’il y aurait au moins de la légèreté à en donner lecture. Mais il serait absurde de penser que j’ai en aucune manière attaqué les intentions de M. le rapporteur, qui d’ailleurs n’a rien dit d’hostile à l’administration.

M. Hye-Hoys. - Je demande la parole. J’appuie les conclusions de la commission.

M. Osy. - Mais la discussion n’est pas ouverte ; sans cela c’est moi qui aurais la parole, car je suis le premier inscrit. Il ne s’agit maintenant que de savoir si l’on entendra la lecture de la pétition des raffineurs de Gand.

M. de Brouckere, rapporteur. - J’ai proposé, à la vérité, de lire la pétition des raffineurs de Gand dans le cas où la chambre voudrait avoir des renseignements sur la question ; mais j’ai ajouté qu’il serait beaucoup plus prudent de ne pas discuter aujourd’hui et d’attendre la décision de M. le ministre des finances, qui ne tarderait pas à être rendue, d’autant plus qu’en lui renvoyant la réclamation des raffineurs d’Anvers, nous lui demanderions des explications.

M. Hye-Hoys. - Je désirais seulement appuyer les conclusions de la commission sur la demande des raffineurs d’Anvers, et dire que ceux de la ville de Gand se trouvaient dans le même cas.

M. Dumortier. - Si l’on veut renvoyer la pétition au ministre des finances avec demande d’explications, je n’ai rien à dire ; mais s’il en était autrement, je demanderais la parole pour constater un fait. Lorsqu’on est venu, l’année dernière, nous parler des mesures qu’on voulait mettre à exécution comme devant empêcher la fraude, nous avons dit, M. Dubus et moi, qu’il en résulterait tout le contraire, et nous en avons la preuve aujourd’hui par les réclamations des raffineurs de Gand et d’Anvers. Mais si l’on veut renvoyer la pétition avec demande d’explications, je n’insisterai pas. (Aux voix ! aux voix !)

M. de Brouckere, rapporteur. - Pour que la chambre ne se trompe pas sur mes intentions, je dois déclarer que la lecture que je voulais lui faire devait porter seulement sur les calculs de la pétition des raffineurs de Gand.

- Le dépôt au bureau des renseignements et le renvoi au ministre des finances, avec demande d’explications, proposés par la commission, sont mis aux voix et adoptés.


M. de Brouckere, rapporteur. - « Trois ex-officiers au bataillon namurois demandent à être réintégrés dans leur grade. »

- La commission conclut à l’ordre du jour, qui est adopté.


M. Poschet, deuxième rapporteur. - « Le sieur C. Boon, ex-garde-forestier à Notre-Dame-aux-Bois, réitère sa demande de pension. »

Conclusion : ordre du jour.

- Adopté.


M. Poschet, rapporteur. - « Plusieurs cultivateurs de la commune de Becelaere demandent la libre circulation des tourteaux. »

On propose le renvoi à la commission d’industrie.

La commission d’industrie, dit M. le rapporteur, s’est beaucoup occupée de cette affaire ; maintenant on sait que l’on peut circuler dans le rayon défendu avec un simple passe-avant.

M. A. Rodenbach. - Je demande le renvoi à M. le ministre des finances. Je n’ai pas connaissance qu’on circule avec des passe-avant. Pour la circulation des tourteaux on s’est adressé aux ministres, au souverain, à la chambre, et il n’y a pas eu de décision prise. J’ai signalé plusieurs fois les grands inconvénients qui résultent de l’empêchement de circulation, empêchement illégal, car la loi du 22 août 1822 permet leur circulation ; il n’y a pas longtemps qu’on l’a entravée. Je demande le renvoi au ministre des finances, avec demande d’explications. L’administration devrait s’occuper plus qu’elle ne le fait des intérêts matériels du pays.

M. Poschet. - Ce sont mes collègues qui m’ont assuré que l’administration leur avait déclaré que les tourteaux circulaient maintenant avec un passe-avant. Je suis fort aise que M. le ministre des finances soit présent ; il pourra, à cet égard, donner les renseignements désirables.

Au reste, M. A. Rodenbach se trompe quand il affirme que, selon la législation, les tourteaux peuvent circuler dans le rayon défendu, sans acquit à caution ; car les tourteaux sont soumis à un droit, et sont par conséquent compris dans les mesures générales.

M. le ministre des finances (M. Duvivier). - Je ne puis que confirmer les observations faites par l’honorable rapporteur. La circulation des tourteaux exige la formalité des acquits à caution et des passe-avant. Sur les dernières plaintes arrivées au ministère, des ordres ont été donnés pour qu’il ne soit exigé, à l’avenir, d’autre formalité que celle des passe-avant.

M. A. Rodenbach. - Il n’y a que deux ans que les employés exigent que les acquits à caution et les passe-avant. La législation ne les exigeait pas, et il n’y a pas eu depuis cette époque de loi nouvelle portée. Cependant je suis satisfait des renseignements donnés par M. le ministre des finances.

M. le ministre des finances (M. Duvivier). - L’administration n’a jamais exigé que les formalités voulues par la loi ; on ne s’est jamais plaint que les acquits à caution fussent illégalement demandés par les employés.

Les pétitionnaires ont toujours reconnu qu’il leur fallait un acquit à caution pour pouvoir circuler ; ce qu’ils ont demandé, c’est d’être dispensé de cette formalité. Or, il vient d’être fait droit à leur demande. Je le répète, la loi générale est positive et voulait l’acquit à caution.

M. A. Rodenbach. - Sous le gouvernement hollandais, cette vexation n’avait pas lieu ; il n’y a que deux ans qu’on l’a établie.

- Plusieurs membres. - C’est la loi qui l’a établie ! C’est la loi !

M. le président. - La commission propose le renvoi à la commission d’industrie.

M. d’Huart. - L’ordre du jour !

M. A. Rodenbach. - J’appuie l’ordre du jour, puisqu’on a fait droit aux réclamations des pétitionnaires.

- L’ordre du jour, mis aux voix, est adopté.


M. Poschet, rapporteur. - « Cent soixante habitants de Grammont demandent que la chambre intervienne pour obtenir la réintégration du général Niellon dans le commandement des Flandres. »

La chambre ayant déjà passé à l’ordre du jour sur une pétition qui avait le même but, la commission a cru devoir proposer les mêmes conclusions.

- L’ordre du jour est adopté.


M. Poschet, rapporteur. - « Le sieur N. Welter demande pour la cinquième fois : 1° que le tribunal de Termonde donne copie du procès-verbal d’accusation à sa charge, et 2° que le tribunal de Namur lève copie du jugement.»

- Ordre du jour, sur les conclusions de la commission.


M. Poschet, rapporteur. - « Un grand nombre de fermiers-cultivateurs des communes de Wervicq, Gheluwe et Paschendaele, demandent la libre circulation des tourteaux de graines oléagineuses. »

La commission conclut à l’ordre du jour.

M. Angillis. - Si vous passez à l’ordre du jour ; je vous prierai d’en exprimer les motifs au procès-verbal ; ainsi je demande qu’on insère au procès-verbal que le ministre a déclaré qu’il avait été fait droit à cette demande, laquelle est maintenant sans objet.

- La proposition de M. Angillis est adoptée.


M. Poschet, rapporteur. - « Le sieur C.-L. Bary, à Wavre, signale diverses infractions à l’arrêté du gouvernement provisoire, du 8 octobre 1830, relatif à la recomposition des régences. »

Le pétitionnaire cite un bourgmestre qui occupe en même temps plusieurs emplois administratifs, d’où il résulte qu’il ne peut en remplir aucun, et que quand on va s’adresser à lui pour une fonction, on le trouve absorbé par les soins qu’il doit à une autre fonction.

La commission propose le renvoi de la pétition au ministre de l’intérieur.

- Le renvoi est ordonné.


M. Poschet, rapporteur. - « Cinq officiers ou ex-officiers de Bruxelles demandent que la chambre intervienne auprès du Roi pour obtenir la réintégration du général Niellon dans le commandement des Flandres. »

- La chambre passe à l’ordre du jour, sur les conclusions de la commission.


M. Poschet, rapporteur. - « Le sieur J. De Lie, saunier à Warneton, demande que la chambre intervienne pour obtenir le désistement de l’instance dirigée contre lui, du chef de prétendue fraude de 9994 1/4 livres de sel raffiné. »

- Le pétitionnaire, désirant s’arranger avec le ministre des finances, retiré son mémoire.


M. Poschet, rapporteur. - « Le sieur C. Ghyselinck, à Gavere, réitère sa demande que le lin soit prohibé à la sortie. »

Le pétitionnaire se plaint que les cultivateurs emploient de mauvaises graines ; il voudrait que l’on se servît de graisses venant de Riga.

- La pétition est renvoyée à la commission d’industrie.


M. Poschet, rapporteur. - « Le sieur C. Berré, à Malines, adresse 66 exemplaires de son dernier mémoire, tendant à supprimer les accises. »

- Renvoyé au bureau des renseignements.


M. Poschet, rapporteur. - « Plusieurs habitants notables des cantons de Paliseul et St-Hubert demandent que la route projetée de Bouillon à Dinant ait lieu par la route de Selle, au moyen d’une dérivation de cette route, au point des baraques de Fransenne sur Maissin et Paliseul. »

- Renvoyé au ministre de l’intérieur.


M. Poschet, rapporteur. - « Trois fabricants de noir animal s’opposent à ce que la prohibition soit levée sur les os à la sortie. »

La commission d’industrie a recueilli beaucoup de renseignements sur cet objet ; elle en attend encore d’autres au retour de MM. Davignon et Corbisier, elle pourra proposer quelque mesure utile.

- Renvoi à la commission d’industrie.


M. Poschet, rapporteur. - « Quatre fermiers de barrière dans la province d’Anvers réclament une remise du chef des événements politiques. »

Ils exposent, dit M. le rapporteur, qu’à la suite de l’invasion de l’armée hollandaise les communications ont été interceptées ; ils prétendent de plus qu’ils aient pu percevoir le droit de barrière sur des chariots qui transportaient des vivres à notre armée, et ils prouvent cette dernière assertion en produisant une lettre du receveur-général qui leur dit de laisser passer les chariots en tenant note.

La commission propose le renvoi à M. le ministre des finances.

M. Osy. - C’est moi qui ai remis la pétition sur le bureau. Je l’ai examinée avec beaucoup d’attention, et j’ai trouvé que dans cette affaire il y avait eu erreur de la part du ministre de l’intérieur ou du ministre des finances.

Lors de la campagne de 1831, au mois d’août, on a fait beaucoup de réquisitions dans la province d’Anvers comme ailleurs. Les tenants de barrière ont voulu faire payer les voitures ; les militaires ont refusé et ont passé outre ; les tenants ont réclamé, et le receveur de l’enregistrement a décidé que les voitures de transport passeraient sans payer. C’est sur ce chef qu’ils réclament une indemnité. Les transports militaires n’étaient pas exempts du droit ; ce n’est que dans la loi votée hier qu’on les a exemptés. Il est sûr que le ministre des finances doit une indemnité aux tenants des barrières. Je demande que la pétition soit renvoyée à ce ministre.

M. Poschet. - Le receveur de l’enregistrement a dit qu’il fallait, par raison de prudence, suspendre la recette et tenir note des voitures qui passeraient. On s’est adressé au ministre des finances qui n’a conclu à rien. Les pétitionnaires prétendent qu’ils ont droit à une indemnité, parce que la chose louée a été en partie détruite.

M. de Brouckere. - Mais les ministres des finances ou de l’intérieur ont-ils le droit de donner une indemnité ? Si les adjudicataires de barrière ont, à se plaindre, qu’ils s’adressent aux tribunaux. La chambre ne peut intervenir dans de pareilles demandes, Je propose l’ordre du jour.

M. Poschet. - Il y a dans les cahiers des charges des clauses qui occasionnent la remise du fermage en certains cas. (Non pas ! non pas !) Ceux qui réclament ont déjà obtenu une indemnité.

M. Osy. - Les réclamations des pétitionnaires sont fondées sur deux points. Le gouvernement avait destiné une certaine somme pour indemniser les fermiers des barrières après les événements politiques, et les tenants se plaignent de n’avoir pas été compris pour ce fait dans la répartition de la somme. En second lieu l’administration a décidé qu’on laisserait passer sans payer les transports des vivres militaires. Je crois avec M. de Brouckere que l’affaire doit aller devant les tribunaux relativement à cette seconde partie de la demande. Il s’agit de savoir si, d’après la loi, les transports militaires ne devaient pas payer.

M. de Muelenaere. - Je ne puis partager l’avis de M. Osy. Il s’agit d’une décision relative à l’interprétation d’un contrat ; il s’agit de savoir si les chariots qui n’ont pas payé étaient soumis au droit de barrière. Les pétitionnaires prétendent qu’ils y étaient soumis. Il me semble que les tribunaux doivent décider d’après l’interprétation de la loi.

M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Si le directeur de l’enregistrement a dit aux fermiers de ne pas recevoir le droit sur les transports militaires, il est évident qu’il a eu tort s’il a voulu par là les priver de ce droit. D’après les règlements de marche, le chef de corps, avant son départ, dépose entre les mains du bourgmestre de la commune qu’il quitte, le montant du prix des barrières qui sont à parcourir jusqu’à la commune où de nouveaux moyens de transports lui seront fournis. Les fermiers des barrières doivent prendre note des voitures qui passent, sauf à se faire payer ensuite par le bourgmestre de la commune qui doit payer le montant du droit. Je ne sais si les pétitionnaires se sont adressés au bourgmestre.

S’adresser aux ministres de l’intérieur et des finances serait inutile. Avant la loi adoptée hier, c’était au ministre de la guerre à payer le droit de barrière.

M. Poschet. - Lors des événements politiques de 1831, les employés des barrières demandaient le droit pour des voitures qui transportaient des vivres à notre armée ; les militaires repoussèrent cette demande, et c’est pour éviter de graves désordres que le receveur écrivit de tenir note de ce qui passerait.

M. Osy. - La lettre du receveur est conçue dans d’autres termes. Le receveur dit qu’il serait injuste de faire payer le droit de barrière aux convois de vivres destinés à des militaires qui faisaient un service gratuit. (M. Osy donne lecture de la lettre, et conclut au renvoi de la pétition à M. le ministre de l’intérieur.)

M. de Brouckere. - Dans quel but demande-t-on le renvoi au ministre de l’intérieur ? La décision prise par l’administration de l’enregistrement a été prise indûment. Le renvoi au ministre n’aura pour résultat que de faire approuver la conduite de l’administration.

Qu’est-ce que je vois ici ? Je vois une discussion entre les tenants de barrière d’un côté, et l’administration de l’autre. Eh bien ! toute discussion qui s’élève pour les barrières est du ressort des tribunaux, et il suffit, pour s’en assurer, de jeter les yeux sur les lois relatives aux barrières : elles décident que les contestations sont du ressort des tribunaux ; laissez donc juger les tribunaux.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Je ne puis être de l’avis de l’honorable préopinant ; je ne pense pas qu’il s’agisse ici d’interprétation de contrat ; je ne pense pas qu’il s’agisse d’une contestation de nature à être portée devant les tribunaux. Il y a eu décision administrative ; mais cette décision doit être soumise au ministre de la guerre.

Il n’y a pas de contestation sur le sens du contrat : les tenants de barrière ne disent pas que le gouvernement conteste en rien leurs droits ; le gouvernement ne dit pas qu’on ne doit pas payer ; mais il a prescrit un mode particulier de perception ; il a dit : L’administration de l’Etat sera créditée du droit résultant des convois qui ont circulé sur les routes des tenants de barrière,

Voilà la véritable situation des choses. L’administration ne nie pas qu’il soit dû. La preuve que le préposé de l’enregistrement n’a pas nié la dette, c’est qu’il a recommandé de prendre note de la quantité et de la qualité des transports qui se feraient sur la route.

La véritable marche que les tenants de barrière ont à suivre, c’est de s’adresser au ministre de la guerre. Si ce ministre écartait leur demande, alors les pétitionnaires pourraient s’adresser aux chambres pour déni de justice.

M. Dubois. - Je ne vois pas qu’il s’agisse d’une contestation à soumettre aux tribunaux. C’est simplement une difficulté que l’administration a rencontrée dans l’interprétation d’un article du cahier des charges. L’article 8 n’était pas assez clair. Le tenant de barrière croit pouvoir réclamer pour les transports militaires, et les militaires croient pouvoir refuser. Le préposé de l’administration dit : Notez ce qui passera et on statuera après. Il reste encore à décider si le paiement sera fait. Cette décision ne peut venir que du ministre de la guerre ou du ministre de l’intérieur.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Ce n’est pas cela.

M. le ministre des finances (M. Duvivier). - Je pense d’abord que si les réclamants ne sont pas dans une catégorie particulière, dans quelque cas exceptionnel, le droit leur est dû. Un règlement exigeait que le montant du droit fût mis en quelque sorte en débet, attendu que c’était pour transports militaires et pour des objets de la dernière urgence, des vivres.

Il est incontestable que le droit de barrière est dû ; mais il faut que les tenants de barrière s’adressent à celui qui doit payer. Un ministre quelconque, celui des finances surtout, ne peut se reconnaître autorisé à exempter du droit de barrière ceux que la loi elle-même n’aurait pas exemptés ; c’est contraire à un article de la constitution, à l’article 112.

M. A. Rodenbach. - Je suis assez porté à croire que M. de Brouckere a raison ; que la question est de la compétence des tribunaux. Au mois d’août, on a pris une centaine de chariots à Termonde ; on les faisait marcher gratis. Les conducteurs étaient porteurs d’une espèce de feuille de route pour transporter des vivres. Les collecteurs des barrières demandent le droit, on refusa le paiement. Les collecteurs ont cité les conducteurs devant le tribunal de Termonde et les ont fait condamner à payer. Telle a été la récompense du patriotisme de ces malheureux voituriers qui transportaient des vivres.

Il est fâcheux que la condamnation ait eu lieu ; elle a produit un bien mauvais effet. Quoi qu’il en soit, ce fait prouve que les questions de barrière sont du ressort des tribunaux.

M. de Brouckere. - S’il n’y a pas contestations, pourquoi nous mêler de cette affaire ? S’il y a contestation, cela ne nous regarde pas ; cela ne regarde que les tribunaux. Personne ne peut partager l’opinion de M. Dubois, qui a soutenu que, dans le cas de contestation, c’était au ministre à décider.

M. de Robiano de Borsbeek. - Le droit de barrière n’est pas liquide et clair. Dans le cahier des charges leur a-t-il été permis de recevoir le droit de barrière sur les convois militaires en cas de guerre ? Les ministres pourraient faire valoir que le cas de guerre n’a pas été prévu, et je pense que dans cette circonstance le droit ne saurait être adjugé aux tenants de barrière. De pauvres paysans, par un mouvement de patriotisme, transportent des vivres, et on les condamne à payer ! C’est un malheur.

M. de Muelenaere. - Le dilemme de M. de Brouckere est fort de justesse : ou il y a contestation, et c’est aux tribunaux à décider, ou il n’y a pas contestation, et notre intervention est inutile. Si les pétitionnaires ne se sont pas encore adressés au ministre compétent, ils n’ont pas suivi la marche qu’ils devaient prendre. C’est après s’être adressés au ministre qu’ils pourront s’adresser aux tribunaux. S’ils n’obtenaient pas justice, alors ils pourraient s’adresser aux chambres.

M. Dubois. - La question est tout administrative ; elle ne serait de ressort des tribunaux que s’il y avait contestation.

M. Osy. - Les pétitionnaires demandent deux choses ; il faut un double renvoi.

- L’ordre du jour, ayant la priorité, est mis aux voix et adopté.


M. Poschet, rapporteur. - « Plusieurs négociants en toiles, d’Alost, adressent des observations relatives au commerce des toiles, et prient la chambre de prendre des mesures propres à le tirer de la crise où il se trouve. »

Ils voudraient qu’on mît un droit sur les toiles étrangères ; ils croient que ce droit pourrait s’élever à 12 p. c., comme il a lieu sur les cotonnades. Ils pensent que les toiles que l’on fabrique dans les prisons nuisent aux ouvriers des campagnes, parce qu’on les fabrique à meilleur marché. Ils reconnaissent pourtant la nécessité d’occuper les prisonniers ; mais ils disent qu’on devrait les occuper à faire des baptistes, des flanelles de santé et d’autres tissus pour lesquels nous sommes tributaires de l’étranger.

La commission des pétitions conclut au renvoi du mémoire à la commission d’industrie.

M. Desmet. - Outre le renvoi à la commission d’industrie, proposé par la commission des pétitions, je dois, messieurs, demander le renvoi au ministre des finances et à celui des affaires étrangères de la pétition des négociants en toiles d’Alost. Je demande le renvoi au ministre des finances, afin qu’il veuille prendre en considération, quand il nous présentera la loi sur les douanes, les réclamations des négociants de la ville d’Alost, ainsi que celles nous sont arrivées de toutes les parties de la Belgique, et particulièrement de nos Flandres, pour qu’à la sortie le lin cru et les étoupes de lin soient prohibés ou du moins fortement imposés, et que les toiles étrangères soient de même imposées d’un certain droit à leur entrée.

Car si nos voisins agissent de la sorte et emploient des moyens de prohibition à l’égard de nos productions, je ne vois pas pourquoi nous devons pousser notre bonassité à ne pas user de représailles ; et dans ces cas-ci, messieurs, veuillez m’en croire, nous devons suivre l’exemple des Anglais, qui tiennent chez eux la matière première de la laine pour en tirer tout le profit possible de la fabrication des draps et conserver la main-d’œuvre qui nourrit la population, et qui, pour les productions étrangères, ont consacré une législation de douanes qui accrédite la prohibition dans toute son étendue.

Je demande le renvoi au ministre des affaires étrangères, parce que le commerce demande avec instance de rouvrir nos relations commerciales avec la France, l’Espagne, l’Amérique méridionale, etc. Je sais bien que dans ce moment des négociations sont commencées pour obtenir un traité de commerce avec la France, qui est réellement celui qui nous intéresse le plus sous bien des rapports ; mais je demande pourquoi le gouvernement ne songe pas à envoyer des agents diplomatiques en Espagne, au Brésil et dans plusieurs parties de l’Amérique méridionale ?

J’ignore si déjà la Belgique est reconnue comme nation indépendante dans ces pays et si on y refuse de rouvrir des relations commerciales avec nous ; je présume cependant que si le gouvernement voulait faire quelques démarches et tant soit peu soigner les intérêts de notre commerce et de notre industrie, nous pourrions bientôt commercer avec ces peuples et faire avec eux des échanges avantageux, qui, de leur côté, seront très satisfaits de renouveler avec nous le commerce et prendre de préférence de la Belgique les tissus de lin, qu’ils ne peuvent nulle part avoir de meilleure qualité.

C’est pour ces motifs, messieurs, que j’ai l’honneur de vous proposer le triple renvoi. L’objet doit vous paraître assez important pour ne pas repousser ma demande ; car il vous est connu que la fabrication des toiles est le principal élément de notre prospérité et de nos richesses, et que les deux tiers de nos populations trouvent leurs subsistances dans ces manufactures ; car, dans nos campagnes, chaque ménage est une fabrique qui occupe depuis l’enfant de 5 ans jusqu’au vieillard, et l’infirme y trouve aussi bien son travail pour apprêter le fil que l’ouvrier robuste pour confectionner le tissu.

Je ne puis trop faire sentir combien cette industrie domestique mérite d’attirer l’attention du gouvernement. Tous les encouragements qui tendront à augmenter les commodités et le bonheur de notre nombreuse population des campagnes tourneront au profit des autres classes de la société : quand le commerce de toiles est prospère, tout le monde est dans l’aisance en Flandre ; quand il est en souffrance, la mendicité s’y propage sans proportion.

M. Dewitte. - J’appuie le triple renvoi demandé. Cette pétition intéresse une industrie importante qui est dans la stagnation. Les rédacteurs du mémoire signalent les causes de cette stagnation ; ils proposent des moyens pour y remédier. Je demande que les ministres avisent aux mesures à prendre pour ranimer cette industrie qui fait la richesse de certaines contrées.

- Le renvoi à la commission d’industrie et aux ministres des finances et des affaires étrangères, est mis aux voix et adopté.


M. Berger, troisième rapporteur, monte à la tribune. - « Un grand nombre de rouliers demandent une diminution sur le droit de barrière et la fixation d’un maximum plus élevé pour le poids des voitures. »

Par l’adoption de la loi sur les barrières, vous avez porté jugement sur cette question. La commission propose le dépôt de la pétition au bureau des renseignements, attendu que la loi n’est que temporaire et que le mémoire contient des détails qui pourront devenir utiles.

- Le dépôt est ordonné.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur H. Lejeune, tailleur, habitant la Belgique depuis 1796 demande la naturalisation. »

Il produit de bons certificats.

- Renvoyé à la commission de naturalisation.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur J.-J. Lissens adresse un supplément à son mémoire sur l’usage du système décimal des poids et mesures. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur van dan Broeck, domestique à Bruxelles, demande le paiement du reste de l’indemnité qui lui revient pour les pertes qu’il a essuyées dans les journées de septembre 1830 de la part des Hollandais. »

Dépôt au bureau des renseignements, renvoi au ministre de l’intérieur.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur Geeraerts, fermier de barrière, demande : 1° que le cautionnement soit diminué de moitié, quand il consiste en biens-fonds, et 2° qu’on établisse les pénalités de telle manière qu’elles puissent être appliquées à tous les contrevenants. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur J.-J. Picard, ancien juge, adresse des observations relatives aux monnaies. »

- La pétition, ou plutôt ce mémoire, paraît présenter des observations utiles à l’intérêt public, et la commission propose en conséquence le dépôt au bureau des renseignements.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur J.-B. Vanderlinden, instituteur communal à St-Gilles, demande la naturalisation. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.


M. Berger, rapporteur. - « Trente-quatre médecins d’Anvers demandent que les médecins ne soient plus soumis à la patente. »

- Dépôt au bureau des renseignements et renvoi au ministre des finances.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur P. de Poover, pêcheur à Oude-Capelle, plongé dans la misère, supplie la chambre de vouloir intervenir près de S. M., afin qu’elle daigne lui accorder un secours. »

- Ordre du jour.


M. Berger, rapporteur. - « Cinq ex-officiers des volontaires demandent de l’emploi ou la demi-solde. »

- Ordre du jour.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur Jobard demande l’exemption des droits d’entrée sur les machines-modèles.

La commission propose le renvoi au ministre des finances et le dépôt au bureau des renseignements.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur Pelserberensberg, bourgmestre de Vaals, demande que la chambre prenne une décision sur la pétition du conseil communal de Vaals, adressée le 24 mai 1832, tendant à annuler une décision de la députation provinciale qui déclare cette commune domicile de secours de la famille Hanauer. »

La commission conclut au renvoi au ministre de l’intérieur.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau) fait observer que c’est un objet qui rentre dans les attributions du ministre de la justice.

- La chambre ordonne le renvoi de la pétition au ministre de la justice.


M. Berger, rapporteur. - « Neuf propriétaires de Bruxelles, dont les biens ont été dévastés dans les journées de septembre 1830, demandent que la chambre provoque les mesures qui doivent réparer leurs désastres. »

Conclusion : renvoi au ministre de l’intérieur et dépôt au bureau des renseignements.

- Adopté.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur P. Gortebeck, ancien soldat à Molembeek, réclame le paiement de l’arriéré qui lui est dû sur les fonds dits de Waterloo. »

Conclusion : renvoi au ministre de la guerre.

- Adopté.


M. Berger, rapporteur. - « Le baron de Haverkerke appuie le projet d’assujettir les avocats à la patente. »

- La commission propose l’ordre du jour qui est adopté.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur A.-E.-E. Homan, instituteur à Nivelles, renouvelle sa demande en naturalisation. »

Conclusion : renvoi à la commission des naturalisations.

- Ce renvoi est ordonné.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur Doussaint demande une commission d’enquête à l’effet de vérifier des dilapidations qu’il signale. »

Conclusion : ordre du jour sur le premier chef de la pétition. Renvoi au ministre des finances avec demande d’explications sur les deux derniers chefs de ses réclamations.

Le sieur Doussaint n’est pas l’ami des employés du ministère des finances. Dans des écrits qu’il publia, il attaque vivement les fonctionnaires de ce département. Ceux-ci de lui répondre et de lui reproche qu’il ne jette les hauts cris que parce qu’il n’a pas de part au gâteau. Jusque-là, c’est une affaire particulière, et la chambre n’y a que faire ; mais ici l’affaire se complique.

Le sieur Doussaint découvre que le papier dont on s’est servi pour lui répondre est absolument le pareil de celui dont on se sert au ministère des finances et aux frais de l’Etat, pour l’impression d’un bulletin d’instructions adressées aux employés de cette administration. Il en tire la conséquence que c’est également du papier payé par l’Etat, et il s’empresse de signaler cet abus à MM. les représentants de la nation et demande une enquête là-dessus. Votre commission a cru que deux feuilles de papier peuvent très bien se ressembler sans être payées par la même personne ; que, partant, il serait par trop difficile de parvenir à la découverte de la vérité dans cette circonstance, et elle vous propose l’ordre du jour de ce chef.

Le pétitionnaire signale encore deux autres faits dont le premier serait que M. Jadot, secrétaire-général, percevrait un traitement de 5,000 florins par an au lieu de 4,000 qui lui sont alloués par le budget ; le second fait consisterait en ce que le ministre des finances aurait nommé un receveur au traitement de 1,500 fl. pour un territoire hollandais. Et dans l’intérêt de l’administration, et dans l’intérêt de la vérité, votre commission croit devoir vous proposer le renvoi au ministre des finances, avec demande d’explications du chef de ces dernières réclamations.

M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Il me semble, messieurs, que la première partie de la pétition du sieur Doussaint pourrait faire apprécier l’importance de la dernière, sur laquelle la commission n’a pas cru devoir proposer l’ordre du jour.

Quant à la question de savoir si le secrétaire-général des finances touche 5,000 florins de traitement ait lieu de 4,000 fl., je demande qu’on en remette l’examen jusqu’à la délibération du budget. Je ne crois pas qu’il soit de la dignité de la chambre de renvoyer à M. le ministre des finances une pareille pièce, sur la simple allégation d’un homme qui paraît évidemment inspiré par des sentiments d’animosité et par des passions haineuses.

Relativement à l’employé qui aurait été nommé pour exercer sur le territoire hollandais, il me semble qu’il y a, dans l’exposé seul de ce fait, deux choses qui s’excluent tellement que je ne pense pas encore que la chambre puisse ordonner de ce chef le renvoi au ministre des finances. Le renvoi ne doit avoir lieu que pour un objet qui en vaille la peine, et dont la véracité ne soit pas contestée.

Je demanderai donc l’ordre du jour sur toute la pétition. Je regrette que mon collègue, M. le ministre des finances, ne soit pas présent ; je sais qu’il connaît personnellement le pétitionnaire, qui semble embrasser dans une haine générale tout le département des finances.

M. Dumortier. - Je ne partage pas l’opinion de M. le ministre de l’intérieur. Je regarde la question comme étant d’une extrême importance, car il s’agit de savoir si M. le ministre peut opérer le transfert d’un article au budget à un autre et éluder ainsi la loi. De pareils abus sont signalés trop rarement et les actes sont trop faciles pour que nous ne demandions pas aujourd’hui des explications. Il faut même que les explications nous soient données avant la discussion du budget, afin que nous sachions ce que nous avons à faire ; il faut que nous sachions si les ministres se considèrent comme liés par les décisions de la législature.

L’année dernière, notre honorable collègue, M. Coghen, qui était alors ministre des finances, nous a déclaré à plusieurs reprises qu’il se regardait comme lié par les résolutions de la chambre. Eh bien, au lieu de 5,000 fl. porté à son budget pour le traitement du secrétaire-général de son département, la chambre n’en a voulu accorder que 4,000. Et cependant, voilà qu’aujourd’hui l’on vient dire que ce secrétaire touche au-delà de la somme limitée. Cela ne peut se faire qu’au moyen d’un transfert, et il est nécessaire que nous ayons des éclaircissements à cet égard avant la discussion du budget.

M. de Brouckere. - M. le ministre de l'intérieur propose de passer à l’ordre du jour sur les deux derniers chefs de la pétition aussi bien que sur la première partie, et il fonde particulièrement sa demande sur la qualité du réclamant et sur sa prétendue animosité.

Messieurs, je ne sais jusqu’à quel point le sieur Doussaint est animé par la haine contre le ministère des finances ; mais quand bien même ce serait une haine invétérée, ce ne serait pas un motif pour lui refuser le droit de pétition qui appartient à chaque citoyen. Or, ce serait le lui refuser que de décider l’ordre du jour sur sa pétition par telle ou telle considération personnelle. Je n’admets pas de semblables doctrines, et je crois qu’aucun des membres de cette chambre ne les adopte plus que moi, à l’exception de ceux qui siègent au banc des ministres.

On aurait bien fait de ne pas taxer autant d’invraisemblance le point de la pétition qui est relatif au secrétaire-général du ministère des finances. Je sais ce qu’il en est à cet égard. M. Dumortier a tranché la question, en disant qu’on avait opéré un transfert. Quant à moi, je ne me prononce pas maintenant, et je pense qu’il faut attendre le budget pour discuter cette question. Alors la chambre aura à examiner, non pas si le ministre des finances a violé la loi du budget, car je ne crois pas qu’elle ait été violée, mais s’il n’est pas tombé dans une inconvenance impardonnable en présence de l’opinion, formellement manifestée, des membres de cette chambre. Le fait signalé par le pétitionnaire ne peut être contesté, et c’est pourquoi je m’étonne qu’on le traite d’invraisemblable.

Maintenant, pour ce qui concerne les conclusions de la commission, j’attache très peu d’importance à ce qu’elles soient adoptées, parce qu’elles ne peuvent avoir qu’un but, la constatation du fait. Il me semble que toute discussion sur ce point doit être ajournée jusqu’au budget. Qu’on passe à l’ordre du jour, ou qu’on ordonne le renvoi à M. le ministre des finances, il est positif que, lors de la discussion du budget, ce ministre sera interpellé sur ce point.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Messieurs, je suis tout à fait de l’avis de l’honorable préopinant. Quand il s’agit du droit de pétition, nous n’avons pas à faire acception des personnes. Nous devons examiner, non pas les intentions des individus qui réclament, mais les faits qu’ils nous signalent. Cependant je dis que, s’il était démontré qu’un pétitionnaire n’a été guidé que par des motifs d’animosité ou de haine personnelle, et non par des vues de bien public, je dis qu’alors la chambre ne devrait pas sanctionner de pareils motifs, qui ne méritent aucune considération. C’est dans ce sens que M. le ministre de l’intérieur a proposé l’ordre du jour, et il vous a fait remarquer qu’on pouvait apprécier les intentions du pétitionnaire par la première partie de sa demande, qui a excité l’hilarité générale par le cachet de ridicule dont elle est empreinte.

Je ne vois pas le but d’un renvoi avec demande d’explications.

En effet, que signale le pétitionnaire ? Deux faits. Le premier, c’est que le secrétaire du département des finances a touché 5,000 fl. de traitement au lieu de 4,000. Eh bien à quoi servirait de renvoyer la pétition au ministre des finances, pour qu’il vous donne connaissance de ce fait, lorsqu’on dit qu’il est de notoriété publique ? Cela serait tout à fait oiseux.

Le second fait que signale le pétitionnaire, c’est la nomination en Hollande d’un préposé de l’administration des finances. Mais cela est de toute absurdité ; et il ne suffit pas qu’un individu dise que le ministre des finances ait nommé un employé pour exercer sur un territoire hors de notre juridiction, pour qu’on renvoie sa pétition à ce ministre. Je crois que la chambre manquerait à sa dignité en le faisant, et, sous ce rapport, M. le ministre de l’intérieur a eu raison de demander l’ordre du jour.

M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - M. de Brouckere m’a prêté une doctrine qui ne m’appartient pas, et j’espère que mes paroles auront été interprétées tout différemment par mes autres collègues. Je n’ai pas dit qu’il fallût repousser la pétition à cause des sentiments d’animosité et de haine de son auteur, mais j’ai dit que la première partie de cette pétition pouvait faire apprécier le reste.

Je n’ai pas dit qu’il fût invraisemblable que le secrétaire-général des finances touchât 5,000 florins au lieu de 4,000 ; mais j’ai dit qu’il était invraisemblable qu’on eût nommé un receveur pour exercer sur le territoire hollandais.

- Plusieurs voix. - C’est vrai, cependant ; c’est à Lillo.

M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Si cet abus existe, c’est à la chambre de le signaler à M. le ministre des finances ; mais il me semble qu’elle ne doit pas se servir de l’intermédiaire du sieur Doussaint.

M. Coghen. - J’aurais désiré répondre à l’égard du secrétaire-général des finances ; mais comme on paraît vouloir remettre ces explications jusqu’à la discussion du budget, j’y consens volontiers. (Non ! non ! parlez !) Je crois que le budget a été arrêté au mois de mai dernier, de sorte qu’il y avait déjà quatre mois que le traitement du secrétaire-général dont il s’agit était payé sur le pied de 5,000 fl., et cela d’après un arrêté du mois de janvier, si je ne me trompe.

Pendant les quatre autres mois que je suis resté au département des finances, il a continué à être payé à ce taux. J’ignore ce qui a eu lieu ensuite, mais je ferai remarquer à la chambre que, pour le secrétariat des finances, il faut un homme de grand mérite et qui ait des connaissances spéciales, et que celui qui réunit ces conditions ne voudra pas se contenter de 4,000 florins par an.

M. Osy. - Je voulais faire remarquer aussi que ce n’est pas d’un transfert qu’il s’agit ici ; mais veuillez vous rappeler, messieurs, que, lors de la délibération des budgets, vous avez voté les traitements article par article, et qu’ensuite vous avez réuni ces articles en chapitres, de sorte que si aujourd’hui on augmente un secrétaire-général de 1,000 fl., ce ne peut être qu’au détriment des petits employés.

Du reste, il y aura à examiner, lors du budget, un objet plus important encore. Lorsque nous avons discuté le budget des affaires étrangères, nous avons voté les allocations des ambassadeurs et ministres, non pas en masse, mais par articles séparés. Eh bien ! il est arrivé qu’il restait un excédant de fonds sur l’ambassade de Prusse, et notre ministre plénipotentiaire en France a prétendu que cet excédant pouvait lui être appliqué. La cour des comptes, comme c’était son devoir, n’a pas voulu consentir à sanctionner une pareille chose. Mais je reviendrai sur cette question, lors de la délibération du budget.

En ce qui concerne Lillo, j’ai entendu dire effectivement qu’on a nommé un percepteur pour un territoire qui n’est pas en notre possession. Je crois que quand une pétition nous signale de pareils abus, nous ne devons pas la rejeter.

M. de Muelenaere. - J’ai demandé la parole parce que j’ai regardé ce qu’a dit en dernier lieu l’honorable préopinant comme une question personnelle, puisqu’il a parlé du ministère des affaires étrangères. Je pense, messieurs, que lorsqu’on ne fait pas le transfert d’un article à un autre, on reste dans les termes de la loi, et il me semble que le transfert d’un paragraphe à un autre paragraphe, d’un numéro à un autre numéro, peut s’opérer sous la responsabilité des ministres. Quant à moi, cependant, je déclare que je me suis cru lié par les décisions que la chambre avait prises l’année dernière, la loi du budget. Aussi le fait signalé par M. Osy ne me concerne en rien. Notre ministre plénipotentiaire à Paris jouissait, avant le vote du budget, d’un traitement supérieur à celui qui lui fut accordé, et quoique ce vote ait eu lieu dans les deux mois de l’exercice courant, je n’ai pas voulu accorder une obole de plus que la somme allouée.

Sans violer la loi, on aurait pu transférer une partie des fonds de l’ambassade de Prusse à celle de France ; mais je répète que je me suis cru lié. Quant à ce qui a eu lieu ensuite, j’y suis complétement étranger. Je ne connais pas les réclamations qu’on a pu élever, les démarches qu’on a pu faire près la cour des comptes. Tout ce qui s’est passé ne me regarde en rien. J’ai cru qu’il était de mon devoir de faire cette déclaration.

M. Dumortier. - Je rends toute justice à la conduite de notre honorable collègue M. de Muelenaere, pendant qu’il tenait le portefeuille des affaires étrangères. Il a montré dans l’administration des deniers publics une économie que je regrette de ne plus trouver aujourd’hui. Mais je ne puis m’empêcher de combattre une doctrine qu’il vient d’émettre, doctrine subversive de tout principe de comptabilité, et de nature à détruire l’article 116 de la constitution elle-même. Il a dit que, sans violer la loi, on pouvait faire le transfert d’un crédit à l’autre dans l’espèce dont il s’agit, bien que lui n’ait pas voulu le faire. Mais il faut se méprendre étrangement sur le texte et sur l’esprit de la constitution pour soutenir un pareil système, car voici ce que porte l’article 116 dont je viens de parler tout à l’heure :

« Les membres de la cour des comptes sont nommés par la chambre des représentants, et pour le terme fixé par la loi.

« Cette cour est chargée de l’examen et de la liquidation des comptes de l’administration générale et de tous comptables envers le trésor public. Elle veille à ce qu’aucun article des dépenses du budget ne soit dépassé, et qu’aucun transfert n’ait lieu. »

Vous voyez donc, messieurs, que la constitution ne fait aucune distinction entre les paragraphes, les numéros et les articles ; elle défend expressément « qu’aucun article de dépenses soit dépassé et qu’aucun transfert ait lieu. » J’ai déjà dit que je rendais hommage à la sage économie de l’ancien ministre des affaires étrangères, mais je sais que d’autres ne sont pas aussi avares des deniers du peuple, et je ne puis assez m’élever contre un pareil abus.

Quant à la pétition, elle signale des faits qu’il est nécessaire d’examiner.

L’honorable M. Coghen, lors de la discussion du budget de 1832, a déclaré dans cette enceinte qu’il se croyait lié par les votes de la chambre sur chaque spécialité, votes qui ont été consignés au procès-verbal, Eh bien ! par un de ces votes, messieurs, vous avez écarté la demande de 5,000 florins qu’on vous faisait pour le traitement du secrétaire-général des finances, et cela pour d’excellentes raisons. Donc il ne fallait pas le payer sur ce taux.

M. Coghen vient de vous dire que 4 mois de l’année s’étaient déjà écoulés lorsqu’on a adopté le budget, et qu’il avait été convenable de fournir à cet employé son traitement tel qu’il avait été fixé par l’arrêté du gouvernement. D’abord je ferai remarquer que c’est aux environs de Pâques qu’on a discuté les budgets, et j’y ai travaillé assez pour le savoir. Ensuite je dirai que je ne connais pas d’arrêté qui dispose des fonds de l’Etat, aussi longtemps qu’il n’est pas sanctionné par la chambre ; mais je connais la loi qui prescrivait au ministre de ne pas augmenter de traitements et de ne pas dépasser la limite posée.

On a dit qu’il fallait une notabilité, une illustration pour être secrétaire des finances. Mais quand je regarde au département des finances, j’y vois tout autre chose. D’ailleurs le secrétaire-général de ce ministère ne doit à aucun titre être plus rétribué que ceux des autres ministères. J’ai déjà fait remarquer l’année dernière que le secrétaire-général des finance, pour le royaume entier des Pays -Bas, n’avait que 4,000 florins de traitement, et qu’encore il était tenu de résider à La Haye où la vie coûte beaucoup plus cher qu’à Bruxelles ; et l’on voudrait donner à celui de la Belgique, qui n’est que la moitié de l’ancien royaume, 5,000 florins ! Cela est incompréhensible.

Vous voyez, messieurs, que vous ne pouvez vous dispenser de demander des explications, quand les faits sont aussi graves, ne fût-ce que parce qu’ils ont soulevé une discussion aussi importante. (Aux voix ! aux voix !)

M. de Brouckere. - Je voulais précisément faire une motion d’ordre tendant à ce que la discussion fût remise jusqu’au budget. La question relative au secrétaire-général des finances est très importante ; elle doit partager les opinions, et ce n’est pas maintenant qu’on peut la résoudre.

Pour celle qui concerne la nomination d’un receveur pour Lillo, M. le ministre de l’intérieur assure que cela n’est pas, tandis que beaucoup de monde dit que cela est. Mais c’est inutile d’insister sur ce point, parce que c’est encore lors du budget qu’il devra être examiné.

M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Qu’il y ait un receveur à Lillo, c’est ce que confirme M. de Brouckere. Je ne sais pas d’où il tient ce fait, mais il ne serait pas étonnant qu’il fût exact ; car la commune du Lillo ne se compose pas seulement du fait ; j’apprends même qu’il y a aussi un bourgmestre. Il ne serait donc pas surprenant qu’on y eût nommé un receveur ; et je ne vois pas pourquoi on renverrait de ce chef la pétition au ministre des finances, puisque ce fait ne constitue pas un abus.

M. Coghen. - M. de Muelenaere a très bien expliqué quels sont les devoirs des ministres à l’égard des imputations de crédits. Quant à moi, j’avoue que j’ai pris l’engagement, lors du budget, de ne pas opérer de transfert et de ne pas dépasser les allocations ; j’avoue aussi que, pendant le reste de mon séjour au ministère, M. Jadot secrétaire-général des finances, a continué à toucher son traitement sur le pied de 5,000 fl. ; mais je déclare que c’est la seule dérogation que j’aie faite aux décisions de la chambre. Quant aux autres, je les ai scrupuleusement observées.

M. Dumortier. - Mais c’était M. Lion qui était alors secrétaire-général des finances.

M. Dubus. - Je n’ai pris la parole que pour rectifier une assertion de l’honorable M. Coghen. Il a allégué que le premier trimestre du traitement du secrétaire-général des finances lui avait été déjà payé sur le pied de 5,000 fl. par an. Cela me paraît impossible ; car, d’après la loi des crédits provisoires pour le premier trimestre de 1832, les traitements qui excédaient le chiffre de 5,000 fl. par an ne pouvaient être payés que jusqu’à concurrence des trois quarts. Je crois donc que la mémoire de M. Coghen est en défaut sur ce point.

- L’ordre du jour proposé par la commission sur la première partie de la pétition est adopté.

L’ordre du jour proposé par M. le ministre de l’intérieur sur les derniers points de cette pétition est écarté.

Les conclusions de la commission sont adoptées.


La parole est continuée à M. le rapporteur, qui présente encore le rapport des trois pétitions suivantes :

M. Berger, rapporteur. - « Le sieur A.-J. Alexandre, ex-principal et régent de rhétorique à Marche, demande qu’une somme plus considérable soit allouée cette année au budget pour indemniser les professeurs révoqués de leurs fonctions. »

Conclusion : dépôt au bureau des renseignements et renvoi au ministre de l’intérieur.

- Adopté.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur Devos, à Anvers, réclame 340 florins pour solde des dommages qu’il a éprouvés par le bombardement du 27 octobre 1830. »

- Les mêmes conclusions que la pétition ci-dessus sont proposées par la commission et adoptées.


M. Berger, rapporteur. - « Le sieur Sobard, au nom de deux ingénieurs français, demande qu’il leur soit accordé des brevets d’importation pour 15 années sans condition, et en conformité de la loi du 25 janvier 1817, pour diverses inventions nouvelles. »

- La commission conclut à l’ordre du jour : 1° parce que l’objet rentre dans les attributions du ministre de l’intérieur ; 2° parce que le pétitionnaire ne paraît pas avoir qualité suffisante pour réclamer, puisqu’il le fait au nom de deux ingénieurs français.

L’ordre du jour est mis aux voix et adopté.

Le feuilleton des pétitions est épuisé.

Projet de loi relatif au droit sur les céréales

Rapport d'une section

Voici le projet de loi que M. Dumortier a annoncé dans la séance de ce jour.

« Art. 1er. Hors les cas déterminés par les articles suivants, l’introduction et l’exportation des céréales sont autorisées et soumises au paiement des droits de douanes fixés par le tarif annexé à la présente loi. »

« Art. 2. Pour déterminer la prohibition des grains à l’entrée et à la sortie, il sera fixé chaque mois un taux moyen des céréales dans le royaume, d’après les mercuriales des marchés régulateurs de Louvain, Gand, Tournay, Liége et Arlon. »

« Art.3. Lorsque le prix moyen du froment dépassera le maximum de 28 francs l’hectolitre, et le seigle celui de 18 fr., l’exportation des céréales et farines est prohibée. »

« Art. 4. Lorsque le prix moyen de froment descendra au-dessous du minimum de 19 fr. l’hectolitre, et le seigle de 11 fr., toute introduction de céréales et farines est prohibée.

« Art. 5. Si le maximum ou le minimum n’est atteint que par l’une des espèces de céréales indiquées aux articles précédents, cette espèce sera passible de prohibition. »

« Art. 6. Un arrêté royal déterminera l’application de la prohibition ou introduction des céréales, d’après les bases fixées par la présente loi. »

« Art. 7. Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables au transit des grains, qui est toujours autorisé moyennant les droits fixés dans le tarif joint à la présente loi. »

« Art. 8. Toutes les dispositions contraires à la présente loi sont abrogées. »

- La séance est levée à 5 heures moins un quart.

Demain séance à midi.