(Moniteur belge n°82, du 22 mars 1832)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est ouverte à midi.
Après l’appel nominal, le procès-verbal est lu et adopté.
M. Lebègue analyse ensuite quelques pétitions, qui sont renvoyées à la commission.
L’ordre du jour est la suite de la discussion sur la dette publique.
« Art. 6. Traitement d’attente, complément du crédit alloué pour 1831 : fl. 35,000.
« Allocation nécessaire pour 1832 : fl. 65,000.
« Total : fl. 100,000. »
La commission propose de n’allouer que 30,000 fl. Pour les plus nécessiteux, en attendant la révision.
M. Tiecken de Terhove propose de supprimer toute l’allocation, et il développe ainsi son amendement. - Messieurs, une somme de 100,000 fl. est destinée en traitement d’attente. Je le répèterai encore, je ne conçois pas de traitement d’attente. Ou vous pouvez utiliser ces employés, ou vous ne le pouvez pas : si vous le pouvez, placez-les ; si vous ne le pouvez pas, renvoyez-les ; car, certes, l’Etat ne s’est pas engagé à les conserver, quand même il n’aurait plus d’emplois pour eux.
Sous le gouvernement précédent, on a fait un abus criant, en multipliant des employés inutiles ; ne pouvant s’en servir, il leur accordait des traitements d’attente, et nourrissait aussi, aux dépens du trésor, des créatures qui lui étaient servilement dévouées ; tel, sans doute, ne peut être ne n’est pas le but du gouvernement. L’Etat ne doit payer que ceux dont il retire de l’utilité : tout ce qui est inutile doit être supprimé. D’ailleurs, je ne pense pas que nous ayons besoin d’une réserve d’employés ; ils ne manqueront dans aucun temps. S’il y en a dans le nombre qui, par leurs longs services et leur âge, ont droit à une pension, qu’on la leur accorde ; mais il me paraît absurde d’accorder des traitements d’attente, et, si je dois en croire ce qu’on m’a dit, il y a dans le nombre qui sont fonctionnaires bien neufs. Que d’abus ne pourraient pas résulter de cette faculté d’accorder de pareils traitements, si nous l’admettions ? Coupons une fois pour toute racine à tous ces abus, qui nous ont été légués par l’ancien gouvernement, et ne soyons pas toujours la dupe des fautes des gouvernants et de leurs protégés. Déblayons donc le budget de toute sinécure, de tout emploi et de tout employé inutiles.
M. Jamme. - La question des traitements d’attente est, à mon avis, beaucoup plus importante que le chiffre du crédit demandé au budget ne semble l’indiquer.
Cette question est complexe : le traitement d’attente se range dans la catégorie des pensions, dont la révision a été décidée par l’article 139 de la constitution.
On alléguera probablement que le titre du titulaire du traitement d’attente et des autres gratifications du même genre, connues sous le noms de toelage et de secours annuels, n’a pas la même force, n’est pas un droit aussi réellement acquis que celui du pensionnaire civil et militaire. Je le pense moi-même, messieurs, et je crois que, parmi ceux qui jouissent du traitement d’attente, sous quelques dénominations que ce soit, il s’en trouve un bon nombre qui n’y ont guère des titres mérités.
Mais, messieurs, l’article 22 du traité de Londres garantit les droits des titulaires de pensions civiles et militaires, de traitements d’attente et autres gratifications, accordés par l’ancien gouvernement. Cet article est tellement clair, tellement précis, qu’il doit être grandement pris en considération dans la discussion qui nous occupe, et sans doute il servira de règle à la commission qui sera chargée de la révision de la liste des pensions. Vous allez, messieurs, en juger.
Article 22 du traité de Londres : « Les pensions et traitements d’attente et de réforme seront acquittés, à l’avenir, de part et d’autre, à tous les titulaires, tant civils que militaires, qui y ont droit, conformément aux lois en vigueur avant le 1er novembre 1830. »
Il me semble, messieurs, que par cet article d’un traité que nous avons signé, dont nous demandons l’exécution, nous avons pris l’engagement de payer les pensions tant civiles que militaires et les traitements d’attente, sous quelque dénomination que ce soit, accordés par l’ancien gouvernement.
Cet article du traité de Londres vient paralyser l’article 139 de la constitution, qui décide de la révision des pensions (sauf toutefois celles accordées depuis la révolution). On peut même dire que cet article 22 du traité ne peut recevoir une stricte exécution sans nous faire déroger à l’esprit et aux effets attendus et prévus par l’article de la constitution qui prescrit la révision des pensions ; car quel est le but de cet article ? De faire des économies à l’aide de réductions à opérer sur les pensions trop élevées et par la réforme de celles non méritées : or, le traité de Londres s’oppose, je crois, à ce que nous puissions atteindre ce but.
Je reviens cependant un moment sur les titulaires du traitement d’attente ; je les trouve divisés en trois séries : le traitement d’attente proprement dit ; la gratification désignée sous le nom hollandais de toelage, et celle sous le nom de secours annuels.
Si on veut juger des droits plus ou moins mérités de ces divers titulaires, on peut les ranger dans l’ordre que je viens de les désigner : le traitement d’attente, la gratification sous le nom de toelage et celle sous le nom de secours annuels. Cette classification est tellement exacte, que vous trouverez par l’examen que le secours annuel, que je place en dernière ligne, était accordé à ceux qui n’avaient pas de droits à la pension, mais seulement avaient des titres pour des services rendus quelconques.
Ainsi, messieurs, peu de titulaires ont des titres bien mérités, selon moi, au traitement d’attente ; mais la question, si je ne me trompe, n’est plus là ; elle se renferme toute dans ce peu de mots : Ne sommes-nous pas liés par l’article 22 du traité de Londres ?
Dans cet état de la question, je ne vois rien qui s’oppose à ce que nous allouions un crédit pour faire un paiement provisoire aux plus nécessiteux des titulaires, sans rien préjuger sur les droits.
M. d’Elhoungne appuie l’amendement de M. Tiecken de Terhove, par le motif que la disposition qui consacre les traitements dont il s’agit n’a pas d’existence légale. Il faut remarquer, d’ailleurs, que la chambre ne préjugera rien sur la question qui sera résolue lors de la révision des pensions.
M. H. de Brouckere. - Chacun de vous, messieurs, a sans doute fait la réflexion que je me suis faite moi-même sur nos délibérations, c’est qu’à chaque instant on soulève des questions de la plus haute importance, sur lesquelles on discute pendant un ou deux jours sans prendre à la fin de décision. L’objet qui nous occupe en est une preuve, car il a été mis en discussion l’année dernière. M. Destouvelles et moi avons soutenu que les traitements d’attente devaient être payés ; d’autres ont prétendu le contraire. Or, aujourd’hui la question reste encore à résoudre.
Elle consiste à savoir si ces pensions d’attente ont été données en vertu d’une loi. Messieurs, elles reposent sur un arrêté de septembre 1814, et cet arrêté a le caractère d’une loi ; car il a été pris par le prince Guillaume qui, alors, avait entre les mains le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, attendu que la loi fondamentale n’était pas encore établie. Il se trouve, à la fin de cet arrêté, une disposition singulière qui réserve au roi la faculté de donner à telle personne qu’il lui plaira des marques particulières de sa bienveillance pour des services éminents ou pour « d’autres causes. » Je conviens que cette disposition avait une grande élasticité ; mais il n’en est pas moins vrai que l’arrêté est revêtu du caractère légal, et qu’il est resté en vigueur et y restera jusqu’à ce qu’il soit révoqué par une loi.
On a dit que nous ne préjugions rien en adoptant la suppression proposée par un de nos collègues, en attendant la révision. Je répondrai comme le faisait hier M. Gendebien : « Ce serait un moyen fort commode que de pouvoir payer ses dettes par l’ajournement. » Il n’en peut être ainsi, messieurs. Si la dette existe légalement, payons-la ; refuser le paiement serait consacrer une injustice. J’ignore quelle sera votre décision ; mais il faut convenir que c’est une singulière manière de procéder que de dire au gouvernement, qui vous demande une allocation pour remplir une dette sacrée : « Nous ne voulons pas non décider, mais nous ajournons. »
(Moniteur belge n°83, du 23 mars 1832) M. le ministre des finances (M. Coghen). - Messieurs, la section centrale, dans son rapport sur le budget de la dette publique, a proposé la suppression des 35,000 fl. reportés au budget de 1832, comme complément de celle qui a été provisoirement allouée par la législature pour 1831, du chef des traitements d’attente, et de pareille somme de 35,000 fl., sur la somme demandée pour pourvoir aux paiements à faire du même chef pendant 1831.
Dans les notes et développements qui accompagnent le budget dont j’ai l’honneur d’entretenir la chambre, il a été exposé déjà (n°13 des chapitres législatifs) que, sous le titre de « traitements d’attente, » sont aussi comprises les sommes à payer pour supplément de traitements ou de pensions, et pour « gratifications » ou « secours annuels ; » mais il n’est peut-être pas inutile de faire remarquer en ce moment que, dans les 65,000 fl. demandés pour cet article de dépenses pour chacun des exercices de 1831 et 1832, les traitements d’attente ne montant pas à 30,000 fl.
Le surplus de l’allocation demandée est destiné au paiement des suppléments de traitements ou de pensions et des secours annuels, accordés par le gouvernement précédent, sous la dénomination de « toelagen », et de « jaarlyksche onderstanden. »
Il ne m’est pas donné, ni permis, messieurs, de préjuger en rien les opérations de la commission qui sera chargée de la révision des traitements d’attente, gratifications ou secours annuels ; mais il n’a été donné jusqu’à ce jour aucune suite à l’arrêté du gouvernement provisoire, en date du 27 décembre 1830 ; aucune disposition législative n’a prononcé une réduction sur la somme accordée à telle ou telle personne par le gouvernement précédent, et il résulte de là, me paraît-il, que les droits sont et demeureront acquis aux intéressés, pour les termes échus, jusqu’à l’époque à laquelle la législature aura prononcé la privation de ces droits à la jouissance de ce qui leur a été accordé par un titre d’une date antérieure au 1er octobre 1830. Vouloir le décider autrement, ne serait-ce pas blesser les principes les plus sacrés de la justice ? Et vous tous, messieurs, tout en cherchant à alléger les charges des contribuables, vous tous, repousseriez comme moi une opinion aussi contraire au caractère de la nation belge.
J’ai cru qu’il était de mon devoir de consulter les conseils de l’administration sur le point de droit de la légalité ou de la non-légalité des traitements d’attente, et de l’arrêté-loi de 1814, en vertu duquel ils ont été accordés.
Les conseils de l’administration reconnaissent que l’arrêté du gouvernement provisoire, du 27 décembre 1830, n’a pas suspendu le droit des titulaires à ce qui peut leur être dû pour les termes échus, aussi longtemps que la révision n’a pas eu lieu.
Il s’ensuivrait que les 35,000 fl. pour complément de la somme déjà allouée pour 1831 devraient être payés aux ayants-droit pour 1831, et qu’ainsi elle ne peut être l’objet d’une réduction sur le budget de 1832, sur lequel ce complément se trouve reporté.
S’il demeurait encore quelque chose à désirer pour achever votre conviction sur les droits des titulaires au paiement des traitements d’attente, je vous citerai, messieurs, la loi du 27 décembre 1822, par laquelle les traitements d’attente ont été reconnus par la législature, puisqu’elle a chargé le syndicat d’amortissement de les payer régulièrement ; je vous citerai les lois les plus sacrées en matière de finances, celles qui ont arrêté le budget des dépenses de l’Etat pour chaque année successive, et, dans la loi du 24 décembre 1829 (Journal officiel, n°78), relative aux moyens de faire face aux dépenses qui appartiennent à la seconde partie du budget de 1830, vous trouverez encore :
« Art. 3. Pour effectuer en 1830 le paiement des pensions extraordinaires, rentes viagères et autres dépenses qui s’éteignent successivement … seront employés … »
« b. Une somme de sept cent mille florins à fournir au trésor par le syndicat d’amortissement, d’après l’article premier de la loi du 5 juin 1824 (Journal officiel, n° 38). »
Or, que dit cet article ? Après un exposé des motifs très détaillés, et dont l’application est toute spéciale à l’objet qui nous occupe, l’article premier est ainsi conçu :
« A commencer du 1er janvier 1825, le syndicat d’amortissement devra, tous les six mois, au 1er janvier et au 1er juillet, entre le trésor à même de faire le paiement des nouvelles pensions extraordinaires, des traitements personnels, temporaires ou de non-activité, et autres dépenses qui s’éteignent successivement, résultant des mesures d’économie, suppression de places, autres arrangements pris et à prendre dans l’intérêt de l’Etat, jusqu’à l’extinction finale de toutes les pensions, traitements personnels, temporaires et autres dépenses, dont le maximum est fixé à 900,000 fl. »
L’article 2 ajoute ensuite :
« Le montant de la somme à fournir par le syndicat d’amortissement, à l’effet précité, sera porté annuellement à la seconde subdivision du budget extraordinaire de l’Etat. »
D’après tout ce qui vient d’être dit, je le répète, messieurs, l’Etat ne pourrait, je crois, se refuser plus longtemps à faire payer les arriérés dus sur les traitements d’attente pour 1831, quels qu’aient été les motifs pour lesquels ils ont été obtenus, quelle que soit la proportion dans laquelle ils ont été accordés.
Quant à l’exercice 1832, j’ai dû demander l’allocation de la somme réclamée en vertu de titres produits, et dont la validité a été reconnue, parce que je n’ai pu prévoir les réductions que cet article de dépenses serait dans le cas de subir, ni quels seraient les réclamants que ces réductions pourraient atteindre, et encore moins à partir de quelle époque, jusqu’à quel point, et dans quelle proportion, elles les atteindraient.
Et, dans la supposition que la révision des pensions, des traitements d’attente et suppléments puisse avoir lieu pendant le courant de cette année, la disposition législative qui prononcera les réductions ne pourra, il me semble, avoir un effet rétroactif. Déjà une grande partie de l’année étant écoulée, les titulaires auront droit à toucher les termes échus sur l’ancien pied.
Il me reste plus que deux mots à ajouter sur les traitements d’attente.
Comme chaque jour encore il arrive des réclamations de la part de personnes qui auraient négligé jusqu’ici de faire valoir leurs droits, j’ai dû porter à 65,000 fl. l’allocation demandée, quoique les besoins réels et connus jusqu’à ce jour ne soient que de 62,417 fl. 72 c., afin de pouvoir satisfaire aux prétentions qui, pour être présentées tardivement, n’en seraient pas moins reconnues régulières.
(Moniteur belge n°82, du 22 mars 1832) M. le ministre des finances (M. Coghen) lit une note explicative où les droits de ceux qui sont portés sur la liste des pensions d’attente sont établis. Il insiste pour que l’on accorde l’allocation.
M. Pirmez. - Je pense que l’arrêté qu’on invoque n’a pu survivre à la loi fondamentale de 1815.
M. Jullien. - Les opinions sont partagées sur la nature des traitements d’attente ; les uns croient qu’il faut les considérer comme de pures faveurs, et les autres les envisagent comme ayant été acquis à titre onéreux. Si la question était aujourd’hui entre ces deux opinions, je n’hésiterais pas à me prononcer en faveur de la seconde : c’est-à-dire que ces traitements ont été acquis à titre onéreux. Et en effet, vous ne pouvez vous dissimuler que ceux qui en ont été gratifiés ont fait le sacrifice de leur place, à condition qu’on leur accorderait une somme de … (L’orateur cite ensuite le traité du 15 novembre de la conférence, qui impose à la Belgique l’obligation de payer ces pensions, et il ajoute :)
Il n’est pas probable, messieurs, que les cinq grands diplomates qui se sont occupés, avec tant de soin de nos intérêts (on rit) aient pris cette décision sans motif, et ne se soient pas appuyés sur des arrêtés et des lois encore en vigueur. Je ne pense pas qu’on puisse retrancher un cents de l’allocation, et je voterai pour l’intégralité.
M. Pirson fait observer que plusieurs employés, gratifiés de traitements d’attente, se sont plaints de n’avoir pas été replacés, et d’en avoir vu nommer d’autres à l’emploi qui leur était dû. Il cite les noms de deux de ces employés.
M. Destouvelles. - M. H. de Brouckere avait dit que, lorsque l’arrêté fut publié, le prince avait alors le pouvoir exécutif et législatif. M. Pirmez a objecté que cet ordre de choses avait cessé avec la loi fondamentale de 1815. J’en conviens, mais cette loi fondamentale n’a pas pour cela porté atteinte à l’arrêté.
Quant à l’argument qui consiste à dire que les anciens fonctionnaires gratifiés de traitements d’attente n’ont pas été replacés, il me semble qu’il n’est pas difficile d’y répondre ; car ce n’est pas la faute de ces employés si le gouvernement ne les a pas replacés, et l’on ne peut leur imputer un fait qui n’es pas le leur.
Tant que l’article 139 de la constitution n’aura pas reçu son exécution, on devra laisser subsister l’ordre de choses actuellement existant, et payer les traitements d’attente établis en vertu d’une loi qui n’a pas été modifiée, mais confirmée par les lois postérieures.
M. Dumortier. - La question est de savoir si les traitements d’attente sont un droit acquis. La section centrale ne l’a pas pensé, messieurs.
L’orateur, discutant l’arrêté de 1814, pense que la disposition arbitraire qui se trouve à la fin constituait un droit en faveur du gouvernement seul. Il y avait deux moyens de parvenir à des traitements d’attente, l’un légitime et l’autre illégitime. Par exemple, quand on supprimait un emploi, on donnait un traitement d’attente à celui qui le remplissait, et cela était juste ; mais d’autres traitements ont été, en outre, accordés illégitimement par le pouvoir à ses favoris. Il croit que, si la chambre ne peut toucher aux pensions, elle peut bien toucher aux traitements d’attente. C’est dans ce sens qu’a été proposé l’amendement de la section centrale.
M. H. de Brouckere. - Un des préopinants a révoqué en doute que l’arrêté de 1814 fût encore en vigueur. Cependant, nul ne peut nier qu’il n’ait le caractère de la loi. Or, comme il n’a été abrogé par aucune loi postérieure, il s’ensuit qu’il existe toujours et conserve sa force. On a dit, messieurs, que d’anciens employés, à qui l’on a donné des traitements d’attente, n’ont pas été replacés ; mais, si le gouvernement a été injuste à leur égard, ne comblons pas cette injustice en leur refusant le traitement dont ils jouissent.
Je suis d’avis avec M. Dumortier que si nous ne pouvons toucher aux pensions, il n’en est pas de même pour les traitements qui ont été accordés par le roi des Pays-Bas comme des marques particulières de bienveillance. Je suis d’accord avec lui sur ce point, mais je n’en tire pas la même conséquence que lui. Je dis en effet que ces traitements peuvent être révoqués, mais que, jusqu’à la révocation légale, nous ne pouvons nous dispenser de les payer.
M. Gendebien soutient que le traitement d’attente n’était qu’un don annuel qu’on accordait la plupart du temps à des hommes serviles, et que, si le roi de Hollande avait le droit de les révoquer au bout d’un an, la chambre le peut bien aussi. Il pense qu’il faut une loi pour continuer ces gratifications, et cette continuation, ou la cessation absolue, est dans le domaine de la législature. Il termine en disant que la chambre ne doit pas avoir deux poids et deux mesures, et que, si hier elle s’est montrée parcimonieuse envers de braves militaires qui avaient des droits comme propriétaires au point de leur ajourner, eux pour qui un ajournement peut être mortel, à plus forte raison peut-elle le faire ici qu’il s’agit de personnes qui sont déjà très riches.
M. Duvivier. dit que les anciens employés titulaires n’ont pas été replacés, d’une part, parce qu’il se présentait peu d’emplois analogues à ceux qu’ils avaient quittés, et de l’autre, parce qu’ils préféraient toucher leur traitement d’attente, qui était supérieur aux émoluments de la place qu’on leur aurait donnée. Il pense que ces traitements sont une charge qui doit être maintenue.
M. Ch. de Brouckere explique qu’il y a trois espèces de traitement : les uns intitulés « secours, » les autres « suppléments de traitements, » et les troisièmes « traitements d’attente. »
Quant aux secours, il ne s’agit que de sommes modiques, et il pense qu’on doit les continuer à des personnes qui en ont vraiment besoin pour substituer.
Pour les suppléments de traitements, il ne faut pas examiner si les titulaires sont nécessiteux ou riches ; il suffit qu’ils aient servi l’Etat, pour avoir droit à une pension. L’orateur explique que ces suppléments de traitement se percevaient ainsi : le gouvernement des Pays-Bas jetait de la poudre aux yeux, en n’attachant que des traitements très modiques aux emplois, et voulait faire croire qu’il en résultait un grand profit pour l’Etat, tandis qu’un supplément considérable était affecté aux fonctionnaires sur le syndicat. Ceux qui étaient autrefois à l’administration du trésor y sont restés, à la condition que ce supplément leur serait continué. L’orateur rappelle, en outre, qu’avant 1815 le service des ponts et chaussées se faisait par régie, et que tous les fonctionnaires ont été supprimés sans traitements, à l’exception de quelques-uns qui ont été replacés.
Relativement aux traitements d’attente, il pense qu’on devrait se borner à payer ceux des personnes qui ont servi l’Etat comme fonctionnaires, et que ceux des autres titulaires qui n’ont pas été employés ne doivent pas continuer plus longtemps. Il demande, sans se rallier à l’amendement de la section centrale, que l’on porte une somme de 20,000 fl. au lieu de 35 pour complément de crédit de 1831, et 50 fl. au lieu de 65,000 pour 1832, en tout 70,000 fl. au lieu de 100,000.
M. A. Rodenbach. - Le roi de Hollande lui-même, ne regardait pas son arrêté comme une loi, et la preuve c’est qu’il a retiré un traitement à M. de Stassart. J’appuie l’amendement de M. Tiecken de Terhove.
M. H. de Brouckere. - Ce que vient de dire M. A. Rodenbach vient à l’appui de ce que j’avais dit moi-même, que, bien que nous n’eussions pas le droit de toucher aux pensions, nous pouvions retirer les traitements d’attente.
M. d’Elhoungne. - M. Ch. de Brouckere a cru que les fonctionnaires, par cela qu’ils avaient servi l’Etat, avaient un droit acquis à une pension. Ce n’est pas mon opinion, messieurs : je ferai observer que l’employé a droit à un salaire tant qu’il sert le pays, mais ce salaire cesse avec sa fonction. Il me semble, du reste, que toutes les opinions sont conciliées par l’amendement de la section centrale, et je l’appuie.
- La discussion est close.
L’amendement de la section centrale tendant à n’accorder, au lieu des 100,000 fl., qu’une allocation de 30,000 fl. pour les titulaires nécessiteux, est mis aux voix et adopté. Il remplacera l’article 6.
M. le ministre des finances (M. Coghen). - On est bien entendu que c’est sans préjuger les droits des titulaires, qui seront examinés lors de la révision. (Oui ! oui !)
« Art. unique. Subvention à la caisse de retraite : fl. 93,636. »
Cet article est adopté.
« Art. 1er. Liste civile (pour mémoire).
« Art. 2. Arriérés de la liste civile. »
M. le président se dispose à mettre le premier article aux voix
M. Lebeau. - Je ne crois pas qu’on doive voter cette somme, qui a été votée par une loi perpétuelle jusqu’à la fin du règne de Léopold. Remarquez bien, messieurs, que si l’on met aux voix cet article, la chambre aurait le droit de voter contre, ce qui serait contraire à la constitution.
M. H. de Brouckere. - Mais personne ne votera contre.
M. Leclercq. - Il me semble que, pour la régularité, l’allocation de la liste civile doit être votée avec le budget ; car il faut que nous soyons à même de vérifier si elle est exactement conforme à la loi.
M. Destouvelles. - Le budget est voté annuellement, tandis que la liste civile l’est pour tout le règne. Si l’on mettait aux voix cet article, on pourrait voter contre, et ce serait contraire à la loi fondamentale qui porte qu’une loi spéciale fixera la liste civile pour toute la durée du règne.
M. Lebeau. - Je tiens assez peu au fond de la discussion ; mais le principe a quelque importance. Je ferai remarquer que l’allocation n’est portée ici que pour mémoire, puisque la liste civile a été votée par une loi spéciale rendue en vertu de la constitution. Or, il est certain que, si elle est mise aux voix, on peut voter contre. Sans cela ce serait un vote puéril qui, selon moi, compromettrait la dignité de la chambre.
Je vous soumettrai encore une autre considération, c’est que vous mettriez par là la législature dans l’impossibilité de refuser le budget, ce qui est une garantie constitutionnelle ; car, comme on ne voudra pas refuser la liste civile, on sera obligé de voter pour le budget malgré l'intention qu’on pourrait avoir de voter contre. Je demande que l’on passe outre.
M. Brabant. - La question sera tranchée par la question affirmative à cette question : La liste civile est-elle une dépense du pays ? Personne, je pense, ne voudra soutenir la négative. Or, l’article 115 de la constitution porte que toutes les recettes et dépenses de l’Etat seront portées au budget, et, par conséquent, votées. Il s’ensuit donc que l’allocation de la liste civile doit être votée ainsi que toutes les autres, bien qu’elles soient fixées par une loi, et, par exemple, les traitements de l’ordre judiciaire.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Il n’y a aucune analogie entre la liste civile et les traitements de l’ordre judiciaire ; car la loi qui fixe ces traitements peut être modifiée chaque année, lors du budget, tandis qu’il n’en est pas de même pour la liste civile, qui est votée pour tout le règne. Le taux de la liste civile, une fois fixé, devient en quelque sorte constitutionnel, puisque la loi qui le fixe est rendue en conformité de la constitution. Dès lors il ne peut plus être augmenté ou diminué ; par conséquent, il est inutile de voter.
M. d’Elhoungne. - Il me semble que cette discussion est assez oiseuse ; mais je pense, comme M. Brabant, que d’après l’article 115 de la constitution, la liste civile doit être votée avec le budget comme dette de l’Etat. D’ailleurs, on pourrait rétorquer l’argument de M. le ministre des affaires étrangères ; car la liste civile n’est fixée que pour la vie d’un seul homme, tandis que les traitements de l’ordre judiciaire sont perpétuels.
M. Destouvelles. - Je persiste à croire que le vote de la liste civile pourrait avoir des conséquences très graves. On dit que personne ne s’y opposera dans cette enceinte ; mais l’on sait que la chambre est renouvelée par moitié tous les deux ans, et ce qui ne se ferait pas aujourd’hui pourrait se faire plus tard. Je ne pense pas, du reste, comme M. d’Elhoungne, que les traitements de l’ordre judiciaire soient perpétuels. Ils ne sont que temporaires, et peuvent être modifiés par une disposition légale.
M. H. de Brouckere. - Je crois que nous ne pouvons nous dispenser de voter l’allocation de la liste civile. Je ne suis pas de l’avis de M. le ministre des affaires étrangères, et je ne puis admettre qu’on ait le droit de modifier les traitements de l’ordre judiciaire, ainsi que tous ceux qui reposent sur une loi, par un amendement au budget. Ils ne peuvent l’être que par une autre loi spéciale.
M. Ch. de Brouckere. - Pour qu’une chambre émît un vote négatif sur la liste civile, il faudrait qu’elle fût en rébellion contre la loi, et cela ne peut pas se supposer. Je crois que nous devons voter l’allocation de la liste civile avec le budget, parce que le budget doit présenter la balance des recettes et dépenses. Je ferai remarquer que, sous le gouvernement des Pays-Bas, la liste civile n’était pas seulement établie pour la durée d’un règne, mais pour toujours, et cependant elle figurait chaque année au budget. Quant aux traitements fixés par des lois, je soutiens aussi qu’ils ne peuvent être changés que par d’autres lois, et non point par des amendements au budget.
M. Delehaye. - L’article 41 du règlement porte : « Un projet de loi ne peut être adopté par l’une des chambres qu’après avoir été voté article par article. » Ainsi nous ne pouvons nous dispenser de voter celui qui est en discussion.
M. Fallon. - Je demanderai à MM. les ministres qui forme la demande de paiement de la liste civile ?
M. le ministre des finances (M. Coghen). - C’est moi.
M. Fallon. - Alors il faut bien que nous vous accordions un crédit pour cet objet, afin que la cour des comptes vous paie régulièrement.
M. Dumortier fait remarquer qu’en France on ne votait jamais l’allocation de la liste civile, mais qu’on la portait seulement au budget pour mémoire.
M. A. Rodenbach. - S’il y avait un ministère qui ne méritât pas la confiance de la chambre, on pourrait lui refuser le budget ; mais, si l’on vote en même temps la liste civile, il s’ensuivra qu’elle sera également refusée, bien qu’on n’en ait pas l’intention.
M. Leclercq. - Je ferai observer que ce n’est pas la liste civique que nous votons, mais seulement l’allocation, le crédit, et nous vérifions en même temps si la somme n’est pas augmentée ou diminuée.
M. Lebeau. - Je ferai observer que plusieurs dispositions de la constitution sont nécessairement inapplicable en ce qui concerne la liste civile En effet, M. Delehaye a cité l’article 43 qui dit qu’un projet de loi ne peut être adopté par une chambre qu’après avoir été voté article par article ; mais l’article 42 porte aussi que les chambres ont le droit d’amender et de diviser les articles et les amendements proposés. Or, si l’on pense que la constitution doit être exécutée d’une manière absolue, il s’en suivrait qu’on pourrait la violer en introduisant dans la liste civile, fixée pour tout un règne, des amendements qui tendraient nécessairement à en majorer ou diminuer le taux. La liste civile est un crédit perpétuel et n’a pas besoin d’être votée ; je pense que, rejetât-on même les budgets, la cour des comptes ne pourrait se dispenser de s’acquitter.
M. Ch. de Brouckere. - Je ne conçois pas que l’on veuille tirer un argument de l’article 42 de la constitution quand j’ai dit tout à l’heure que, pour qu’une chambre refusât de voter l’allocation de la liste civile telle qu’elle a été fixée, il faudrait qu’elle fût en rébellion contre la loi. Au reste, si la liste civile ne devait pas être votée avec le budget, tous les traitements irrévocablement fixés par des lois ne devraient pas l’être non plus. Quant au refus du budget, si c’est un seul ministre qui n’a pas votre confiance, vous voterez contre son budget ; si c’est tout le ministère, vous refuserez tous les budgets, à l’exception de la liste civile.
M. H. de Brouckere. - Je vais prouver que M. Lebeau est dans l’erreur quand il dit qu’on pourrait aussi voter des amendements à la liste civile : je dis, moi, que l’on ne pourrait voter de semblables amendements ; car, s’il s’en présentait, ils seraient écartés par la question préalable comme contraires à la loi. (Aux voix ! aux voix !)
- La discussion est close.
La question est de savoir si l’on votera sur les articles 1 et 2 de la liste civile : une assez forte majorité se prononce sur l’affirmative ; en conséquence, l’article premier est mis aux voix et adopté.
Un léger débat s’élève ensuite sur la question de savoir si les arrérages de la liste civile seront portés dans les dépenses de 1831 ou dans celles de 1832.
La chambre, consultée, supprime du budget de 1832 les arrérages de la liste civile, qui seront portés aux comptes de 1831.
« Art. unique. Sénat : fl. 10,000. »
Cet article est adopté sans discussion, ainsi que les suivants, en ces termes.
« Art. unique. Chambre des représentants : fl. 159,026 20 c. »
« Art. 1er. Personnel de la cour : fl. 20,500. »
« Art. 2. Personnel des bureaux : fl. 26,700. »
« Art. 3. Matériel : fl. 8,000. »
La discussion est ouverte sur le budget du ministère de la justice.
M. d’Elhoungne prononce un discours pour établir que, lorsque la loi sur l’organisation judiciaire sera rendue, il sera inutile d’avoir un ministre de la justice. Selon l’honorable membre, ces fonctions pourront être remplies par le procureur-général près la cour de cassation. Il combat l’adjonction, qu'il appelle « hétéroclite », de l’administration des prisons et de la sûreté publique au ministère de la justice, et il termine en proposant un amendement pour supprimer le traitement du ministre de la justice, un mois après la promulgation de la loi sur l’organisation judiciaire.
M. H. de Brouckere. - Messieurs, l’honorable préopinant vient de soulever une question d’une très haute importance et que nous ne saurions traiter ex abrupto. C’est la question de savoir s’il faut ôter à l’administration de la justice le chef suprême qui la dirige, et, après avoir soutenu l’affirmative, le préopinant reconnaît la nécessité de conserver, pour le moment encore, le ministère de la justice. Il reconnaît par là même l’inutilité d’agiter la question actuellement, et je ne trouve aucun inconvénient, par conséquent, à l’ajourner jusqu’à la discussion du budget prochain.
L’orateur soutient, en terminant, que l’on a eu raison d’adjoindre les administrations de la sûreté publique et des prisons au ministère de la justice.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, la place d’un ministre de la justice n’est pas une place inutile ; elle est, au contraire, très essentielle. D’abord je repousse l’idée que le procureur-général près la cour de cassation puisse remplir ces fonctions ; d’un autre côté, tout département doit avoir un chef responsable de son administration… La réunion de ce ministère est incompatible, selon moi, avec celui des affaires étrangères. Le ministre de la justice est responsable de l’inexécution des lois ; de plus, il est chargé de préparer celles destinées à améliorer la législation civile et criminelle et, sous ces rapports, on conviendra qu’il est impossible que ce travail soit bien fait par un autre que par un ministre et un ministre responsable.
Quant à l’adjonction de l’administration de la sûreté publique au ministère de la justice, elle était tout naturelle ; car, entre ces administrations, il y a et il doit y avoir unité de vues et unité d’action. Pour ce qui concerne l’administrateur des prisons, que M. H. de Brouckere ne voudrait pas voir ressortir du ministère de la justice pour les prisons, et de celui de l’intérieur pour les établissements de charité, je dirai à l’honorable membre que cette critique est purement nominale. S’il ressortissait de deux ministres différents pour les mêmes fonctions, je concevrais qu’on pût y trouver à redire ; mais, remplissant deux fonctions d’espèce différente, il est naturel qu’il ressortisse des deux ministres sous lesquels sont placées les deux administrations.
M. d’Huart trouve que ce n’est pas trop de cinq ministres dans le conseil du Roi, surtout n’y ayant pas de conseil d’Etat ; il repousse, en conséquence, l’amendement de M. d’Elhoungne.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - M. d’Elhoungne est d’accord avec nous que, dans l’état actuel, le ministère de la justice doit être conservé ; mais il pense que plus tard, et notamment un mois après la loi sur l’organisation judiciaire, ces fonctions peuvent être supprimées : je vous avoue, messieurs, que je ne puis partager l’opinion du préopinant. Pourra-t-on, plus tard, supprimer le ministère de la justice ? Je pense que non. D’autres peuvent penser le contraire ; mais il est incontestable que vous êtes hors d’état aujourd’hui de décider cette question. Sa solution dépendra nécessairement des principes que vous consacrerez dans la loi d’organisation judiciaire : ce n’est qu’alors que vous pourrez tout au plus examiner la question ; aujourd’hui elle est évidemment prématurée.
- De toutes parts. - Appuyé ! appuyé !
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - J’aurai fort peu de chose à dire, messieurs, après ce que vous venez d’entendre. Déjà on vous a prouvé que la question était prématurée, et que ce n’est qu’après la loi d’organisation judiciaire que vous pourrez voir s’il y a lieu de faire les économies qu’on vous propose. Relativement aux réunions des attributions données récemment au ministre de la justice, on se rappellera que déjà au congrès on avait émis l’opinion de réunir à ce ministère l’administration des prisons et celle de la sureté publique. Postérieurement, et à ce propos, je crois, des crédits provisoires, la commission a émis la même opinion ; ainsi, cette réunion était justifié d’avance. Quant à l’administrateur chargé des prisons et des établissements de bienfaisance, c’est un objet à régulariser dans l’intérieur des ministères.
- De toutes parts. - Aux voix ! aux voix ! la clôture !
M. Jamme veut parler ; les cris : Aux voix ! la clôture ! l’en empêchent. Il insiste et il dit. - Je pense, messieurs, que la question que l’on vient de soulever est assez grave pour que l’on ne puisse refuser à qui que ce soit de manifester son opinion. Je rends éminemment justice aux vues d’économie qui ont porté l’honorable M. d’Elhoungne à faire la proposition qu’il vient de déposer sur le bureau. Mais je vous avoue, messieurs, qu’elle m’a étrangement surpris. Je conçois difficilement comment, au moment où le plus pressant besoin d’une bonne administration régulière se faire sentir, au moment où nous essayons en vain de nous constituer, on puisse penser à établir dans le gouvernement une lacune aussi nuisible que celle qui résulterait de la suppression du ministère de la justice. Je ne conçois pas comment il serait possible de se passer d’avoir à la tête de ce département un ministre responsable des actes de son administration. Que l’on se garde bien, au reste, de croire que de la suppression du ministre (je dis du ministre, car le personnel du ministère devra toujours exister) il puisse résulter de l’économie. Non, messieurs, ce département important, ainsi mutilé, occasionnera autant de dépenses qu’il en occasionne aujourd’hui ; car chacun connaît les réformes que le ministre a faites lui-même dans le personnel et le matériel de l’administration, et vous y trouverez alors en moins la garantie qu’il vous offre, et la régularité et l’unité dans le service.
Je m’oppose donc à l’adoption de la proposition de M. d’Elhoungne.
M. d’Elhoungne. - Je suis satisfait d’avoir appelé l’attention de la chambre sur cette question, que les ministres eux-mêmes conviennent être grave, et je crois que je puis retirer mon amendement, sauf à le représenter plus tard.
- La discussion est close.
L’article premier est adopté sans discussion. Il est ainsi conçu :
« Art. 1er. Traitement du ministre : fl. 10,000. »
« Art. 2. Traitement des employés : fl. 12,650. »
La commission a proposé sur cet article la réduction de 500 fl.
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - Dans le projet ministériel, le traitement du secrétaire-général était porté à 3,000 florins, et je crois que ce n’était pas trop ; c’est là dessus que la section centrale a voulu faire porter la réduction de 500 florins. Or, même depuis que le budget a été présenté, les adjonctions dont nous parlions tout à l’heure ont été opérées ; d’où il est résulté un surcroît de travail. Je demande le maintien de l’article du projet.
M. H. de Brouckere, M. Jamme, M. d’Elhoungne et M. Dumortier appuient cette opinion.
- La réduction proposée par la commission est rejetée.
L’article 3, portant 7,600 florins pour le matériel du ministère, est adopté sans discussion. Cette somme n’est portée à un chiffre si élevé que parce qu’on y a compris les dépenses de premier établissement dans le nouveau local que va occuper le ministère.
On passe au chapitre II, intitulé « Ordre judiciaire. » Les deux premiers articles sont adoptés sans discussion, en ces termes :
« Art. 1er. Cours de Bruxelles et de Liége, personnel : fl. 242,911 25 c. »
« Art. 2. Cours de Bruxelles et de Liége, matériel : fl. 7,075. »
« Art. 3. Traitement des tribunaux de première instance : fl. 306,815 65 c. »
M. Jaminé. - Messieurs, vous savez que, depuis la suppression des procureurs criminels, les procureurs du roi des tribunaux de chef-lieu de province, où ne siège pas une cour supérieure, en ont rempli les fonctions. On leur a accordé, pour ce surcroît de travail, une gratification de 600 à 1,000 fl., suivant les localités. Le procureur du roi de Tongres, qui est censé tribunal de chef-lieu depuis qu’il ne peut plus siéger à Maestricht, a été privé de cette gratification contre toute justice. Je demande qu’on ajoute 600 fl. à l’article en discussion, pour que cette gratification soit payée.
M. le ministre de la justice (M. Raikem) appuie cette proposition, et propose lui-même une augmentation de 400 fl. pour être attribuée au procureur du roi d’Anvers, qui ne jouit que d’une gratification de 600 fl., tandis que ceux de Mons et de Bruges en ont une de 1,000 fl., quoique, vu les circonstances, le travail du procureur du roi à Anvers soit bien plus considérable.
- Après un léger débat, ces deux amendements sont adoptés.
Les articles 4, 5 et 6 sont ensuite adoptés en ces termes et sans discussion :
« Art. 4. Traitement des justices de paix et tribunaux de police : fl. 144,755 10 c. »
« Art. 5. Tribunaux de commerce, traitement des greffiers : fl. 3,742 20 c. »
« Art. 6. Présidence des assises : fl. 11,907. »
La séance est levée à 4 heures et demie.
Nom des membres absents lors de l’appel nominal fait à la séance du 20 mars : MM. Angillis, Bourgeois, Coppens, Corbisier, Dams, Davignon, Ch. De Brouckere, H. de Brouckere, de Foere, de Haerne, Delehaye, de Meer de Moorsel, F. de Mérode, de Robaulx, de Sécus, Desmanet de Biesme, Desmet, de Terbecq, de Woelmont, d’Hoffschmidt, d’Huart, Dugniolle, Dumont, Duvivier, Gelders, Gendebien, Goblet, Jacques, Lebeau, Legrelle, Mary, Nothomb, Pirmez, Polfvliet, Poschet, Raymaeckers, C. Rodenbach, Rogier, Rouppe, Van Meenen, Verhaegen, H. Vilain XIIII, Watlet, Zoude.