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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 14 janvier 1846

(Annales parlementaires de Belgique, session 1845-1846)

(Présidence de M. Liedts.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 390) M. Huveners fait l'appel nominal à 1 heure.

M. de Man d’Attenrode lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Huveners présente l'analyse des pétitions adressées à la chambre.

« Plusieurs fabricants d'armes de Liège prient la chambre de statuer sur leur demande, ayant pour objet une réduction de droits d'entrée sur les pièces d'armes à feu détachées. »

M. Delfosse. - Cette demande avait été renvoyée, il y a déjà longtemps, à la commission permanente d'industrie, à qui on avait demandé un prompt rapport. Je la prierai de nous présenter ce rapport.

M. Desmet. - Elle attendait des renseignements.

- Le renvoi à la commission d'industrie, avec demande d'un prompt rapport, est adopté.


« Le conseil communal de Zonhoven demande qu'on lui accorde la part réservée à cette commune dans le crédit de 2,000,000, voté pour mesures relatives aux subsistances. »

M. Rodenbach. - Messieurs, je saisirai cette occasion pour rappeler que dans notre session extraordinaire il a été voté une somme de 2 millions pour venir au secours de la classe ouvrière et de la classe nécessiteuse.

Il y a environ trois ou quatre semaines que des arrêtés royaux ont été pris en faveur de ces classes malheureuses. Cette mesure a même eu beaucoup de retentissement. Les communes s'attendaient à recevoir immédiatement les fonds qui leur étaient alloués ; cependant jusqu'à présent elles n'ont rien reçu.

(page 391) Messieurs, la situation des populations des Flandres est extrêmement déplorable ; on demande à grands cris de l'argent pour acheter du lin, et pour le faire filer et tisser. Car il ne s'agit pas de donner des aumônes avec cet argent, que le gouvernement n'accorde même qu'à titre de prêts, mais de procurer du travail…

Je n'accuse pas toutefois le ministère d'avoir manqué d'activité. Car, si je suis bien instruit, il en a déployé beaucoup. Mais il paraît que les retards proviennent de la cour des comptes. Il me semble, messieurs, qu'avec un peu de bonne volonté, il ne faudrait pas trois ou quatre semaines pour liquider de pareils arrêtés ; trois ou quatre jours suffiraient. Je prie donc M. le ministre de bien vouloir faire un rappel à la cour des comptes pour qu'elle liquide promptement ces arrêtés.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Je me bornerai à assurer à l'honorable membre que le gouvernement a pris toutes les mesures possibles pour hâter la liquidation des fonds qui ont été alloués.

M. Rodenbach. - Voilà trois à quatre semaines que le gouvernement a pris les arrêtés.

M. de Corswarem. - Je demanderai que la commission des pétitions soit invitée à faire un prompt rapport sur la requête qui vient d'être analysée. Car si elle suit la filière ordinaire, le rapport ne sera présenté que l'année prochaine et alors il ne serait plus de circonstance.

- Le renvoi à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport, est adopté.


« Plusieurs habitants de Gand, propriétaires riverains de l'Escaut et de la Lys, demandent qu'il soit pris des mesures pour empêcher le débordement de ces eaux. »

M. le président. - Je propose le renvoi de cette pétition à la section centrale chargée d'examiner le budget des travaux publics.

M. Desmet. - J'appuie ce renvoi et je demande que la section centrale soit invitée à nous faire un prompt rapport.

Messieurs, il est un fait constant ; c'est que cette année, à cause du peu de débouchés qui sont offerts à l'écoulement des eaux, les inondations ont causé des dégâts considérables, non seulement dans les Flandres, mais dans tout le pays. Aujourd'hui encore, messieurs, il y a dans les Flandres des milliers d’habitants qui se trouvent sous l'eau. Aussi, quoique l'arrière-saison ait été favorable pour faire les semailles, une grande partie des terres ensemencées sont endommagées.

Je regrette, messieurs, que M. le ministre des travaux publics ne soit pas présent. S'il était ici, je crois qu'on lui demanderait des renseignements sur les désastres qui ont eu lieu par suite de la crue des eaux. Nous demanderions plus ; nous le prierions de nous dire si l'on peut espérer qu'il sera fait quelque chose cette année pour l'écoulement des eaux en aval de Gand. Car il est certain que lorsque tous les ans on augmente la masse d'eau qui arrive à Gand et qu'on ne fait rien pour en faciliter l'écoulement en aval, il doit en résulter de grands dommages.

Il est vraiment déplorable que l'écoulement des eaux soit tant négligé dans notre pays, et qu'un objet de si grande importance pour l'agriculture et la production des substances alimentaires soit pour ainsi dire abandonné.

M. Manilius. - Je regrette aussi que M. le ministre des travaux publics ne soit pas présent. S'il était ici, je ne demanderais pas qu'il nous fît un prompt rapport sur les désastres produits par les inondations. Nous les connaissons. Ce sont les mêmes faits qui se produisent tous les ans. Mais je demanderais à M. le ministre qu'il voulût se hâter de nous proposer un projet de loi. Les causes des inondations sont maintenant connues. Une commission d'enquête a achevé un travail qui les fait connaître. Ce travail renferme des conclusions.. Il n'y a plus qu à choisir celles auxquelles on veut s'arrêter.

Messieurs, je le répète, si M. le ministre était présent, je demanderais qu'il nous apportât un projet de loi avant la discussion de son budget. S'il ne le fait pas, nous aurons encore, lorsque nous nous occuperons de ce budget, une discussion très longue et sans fruit. Ce n'est que par la présentation d'un projet de loi que M. le ministre fera cesser toute discussion oiseuse sur cet objet désastreux pour nos provinces.

Messieurs, je ne m'étendrai pas sur la gravité des faits ; ils sont trop connus ; ils ne doivent pas être énumérés. Malheureusement, jusqu'à présent, on n'a pas tenu assez compte de ce qui a été dit. J'espère que le ministre prendra mes observations en considération.

M. Dumortier. - Messieurs, il est certain que l'inondation des bords de l'Escaut dans les circonstances actuelles est un fait excessivement déplorable auquel le gouvernement doit porter toute son attention, non, seulement pour la ville de Gand, mais pour tout le parcours du fleuve. Nous avons entre autres, dans les environs de la ville dont j'ai l'honneur d'être le député, une commune, celle de Laplagne, pour laquelle je réclame tous les ans. Aujourd'hui, encore, cette commune tout entière est inondée ; il y a un pied et demi d'eau dans l'église. Il en est de mêmes tous les ans. Cependant messieurs, avec une très faible dépense, on pourrait apporter un remède à un aussi grand mal.

On a réclamé en faveur des communes des Flandres, et on a eu parfaitement raison. On ne trouvera donc pas mauvais que je réclame en faveur de communes qui souffrent tout autant.

Il y a, d'ailleurs, un moyen extrêmement simple de prévenir le retour de ces désastres, c'est l'endiguement de l'Escaut à cet endroit. Par ce moyen on sauverait la commune.

Messieurs, je désire aussi que le gouvernement nous présente un projet pour prévenir les inondations dans la ville de Gand. Toutefois, je l'engage à faire une sérieuse attention à ce qu'il doit proposer. Car sur plusieurs points la commission s'est trouvée d'opinion très diverses. Certaines personnes ont prétendu que tel projet pouvait être très nuisible à la navigation et même aux communes du bas Escaut, tandis que tel autre projet, sans entraîner des dépenses aussi considérables, répondrait à tous les besoins. Le gouvernement doit donc peser mûrement les divers projets avant de faire une proposition à la chambre. Je l'engage, toutefois, à nous faire cette proposition le plus tôt possible.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Messieurs, il ne s'agit de discuter en ce moment ni les causes des inondations du bas Escaut, ni les remèdes à y apporter. Je puis seulement déclarer, en l'absence de mon honorable collègue, que déjà le gouvernement s'est occupé de cette affaire, et j'ai lieu d'espérer que sous peu de jours la chambre sera saisie d'un projet à l'occasion duquel on pourra discuter celle question très-grave sous plusieurs rapports.

M. le président. - J'avais eu l'honneur de proposer le renvoi de la pétition à la section centrale chargée de l'examen du budget des travaux publics.

M. Manilius. - Si ce que vient de déclarer M. le ministre des finances se réalise bientôt, je proposerai de renvoyer la pétition à la section centrale qui sera chargée d'examiner la question.

M. le président. - On pourra, lorsque le projet sera présenté, prendre une nouvelle décision.

- La pétition est renvoyée à la section centrale chargée d'examiner le budget des travaux publics.


« Plusieurs propriétaires riverains des bords de la Meuse, rive droite, des communes d'Angleur, Ougrée et autres, demandent la révision de l'ordonnance de 1669 et de l'arrêté royal du 3 novembre 1811, sur la police du halage. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget des travaux publics.

M. Lesoinne. - Je demande que cette pétition soit renvoyée à la section centrale chargée d'examiner le budget des travaux publics. Plusieurs requêtes sur le même objet lui ont été renvoyées.

- Cette proposition est adoptée.


M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, hier on vous a présenté l'analyse d'une pétition demandant la construction de la route de Hannut à Landen, qui a été décrétée depuis 1840. Je crois que cette pétition a été renvoyée à la commission des pétitions. Il me paraît qu'il vaudrait mieux la renvoyer à la section centrale chargée d'examiner le budget des travaux publics, qui pourrait la transmettre directement à M. le ministre. Des pétitions précédentes sur le même objet ont déjà été renvoyées à M. le ministre des travaux publics. Il s'agit d'une question urgente. Les populations des localités que cette route doit traverser ont tout aussi besoin de travail pour se procurer du pain, que les populations des Flandres.

M. le président. - On me fait observer que la pétition dont parle M. Eloy de Burdinne a été renvoyée à M. le ministre des travaux publics et non à la commission des pétitions. Cette pétition n'est donc plus entre les mains du bureau.

M. Eloy de Burdinne. - Je veux parler d'une pétition identique à celles qui ont été envoyées à M. le ministre, et qui a été analysée dans la séance d'hier.

M. le président. - Il y a une erreur dans le Moniteur. J'ai dit hier que toutes les pétitions relatives à cette route ayant été renvoyées au ministre des travaux publics celle dont il s'agissait lui serait également renvoyée. Si l'honorable membre le désire, on pourra prier M. le ministre des travaux publics de transmettre la pétition à la section centrale qui est chargée de l'examen de son budget.

M. Eloy de Burdinne. - Je relire mon observation et je me rallie à celle de M. le président.


« Les sieurs Sternberg, Hoeberechts et fils prient la chambre de mettre à son ordre du jour le rapport sur la pétition qui a pour objet une majoration de droits d'entrée sur les pianos étrangers. »

M. Desmet. - Dans le temps, messieurs, la commission d'industrie a soumis à la chambre une proposition tendant à modifier le droit d'entrée sur les pianos étrangers. M. le ministre de l'intérieur d'alors, qui avait le commerce dans ses attributions, a demandé que cette proposition fût ajournée et l'ajournement a été adopté. Je demanderai à M. le ministre des affaires étrangères, qui est aujourd'hui à la tête du commerce, si les motifs qui ont fait prononcer cet ajournement existent toujours ; nous ne pouvons, messieurs, tarder plus longtemps de faire droit aux justes-réclamations des facteurs de pianos, et j'espère que la chambre mettra au plus tôt, à l'ordre du jour, le projet de loi qui vous a été présenté par la commission d'industrie.

M. le président. - M. le ministre des affaires étrangères étant absent, il ne s'agit en ce moment que de statuer sur la pétition. Comme la chambre est saisie d'un projet de loi sur la matière, je propose le dépôt de la requête au bureau des renseignements, afin que les membres de la chambre puissent en prendre connaissance.


« Le sieur Begs, ancien capitaine, demande une pension de retraite. »

M. Dumortier. - Je prierai la chambre de vouloir bien renvoyer cette requête à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport. Le pétitionnaire est un des braves de la révolution, un des hommes qui ont combattu le plus activement pour la cause nationale. Il s'agit d'une question d'humanité et d'une question de reconnaissance nationale.

- La proposition de M. Dumortier est adoptée.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaires au budget du ministère de la guerre, pour travaux militaires et autorisant à aliéner certaines parcelles

Dépôt

(page 392) M. le ministre de la guerre (M. Dupont). - D'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de présenter à la chambre un projet de loi tendant à allouer au département de la guerre un crédit de 455,000 francs, pour des travaux militaires de la plus grande utilité, surtout dans les circonstances présentes. Une grande partie de ce crédit serait couverte par l'aliénation de quelques parcelles de terrains militaires devenus inutiles à leur destination. La valeur de ces terrains peut être portée à environ 253,000 francs. Si la chambre le désire, j'aurai l'honneur de lui lire le projet de loi et l'exposé des motifs. (L'impression ! l'impression !)

- L'impression est ordonnée.

M. Rodenbach. - On pourrait renvoyer ce projet à la section centrale du budget de la guerre.

M. Pirson. - Il conviendrait mieux de nommer une commission spéciale.

M. le ministre de la guerre (M. Dupont). - Il s'agit de procurer du travail aux ouvriers, et sous ce rapport la question présente un caractère d'urgence.

M. de La Coste. - D'après l'observation faite par M. le ministre de la guerre, je crois, sauf meilleur avis, qu'il serait bon de renvoyer ce projet à une commission nommée par le bureau. Il me semble, du reste, que, sur quelques bancs, on a mal interprété l'expression de « circonstances présentes, » employée par M. le ministre. Le département de la guerre a fait droit à une réclamation que je lui ai adressée à cette tribune. J'ai fait observer à la chambre qu'une partie du Brabant se trouve dans une position exceptionnelle et extrêmement fâcheuse, eu égard à la nécessité reconnue de donner du travail aux classes pauvres ; on oppose à diverses routes qui se dirigent vers Aerschot, une fin de non-recevoir, tirée de l'absence de certains travaux de défense ; eh bien ! j'ai posé ce dilemme : Faites ces travaux de défense, s'ils sont nécessaires et ce sera encore une occasion de travail ou permettez la construction des routes dont il s'agit. Les travaux de défense qui font l'objet du projet de loi sont jugés nécessaires en eux-mêmes ; mais les circonstances présentes, c'est-à-dire la nécessité de donner en ce moment du travail aux classes ouvrières, impriment à ce projet un caractère d'urgence.

M. le ministre de la guerre (M. Dupont). - Je crois devoir répéter qu'il s'agit ici de travaux indispensables, de travaux qui, s'ils ne sont pas faits aujourd’hui, devront être faits demain, et qu'il vaut mieux, selon moi, exécuter aujourd'hui, afin de donner de l'occupation aux ouvriers qui en manquent.

M. Rodenbach. - Puisqu'il s'agit de procurer du travail à la classe malheureuse, j'appuierai la demande faite par M. Pirson de renvoyer le projet à une commission spéciale composée d'hommes qui connaissent les localités ; de cette manière le projet pourra être examiné avec plus de promptitude. Je retire donc la proposition que j'avais faite de renvoyer le projet à la section centrale du budget de la guerre.

- La chambre renvoie le projet à une commission spéciale qui sera nommée par le bureau.

Projets de loi portant règlement des exercices 1833, 1834 et 1835

Rapports de la commission

M. de Man d’Attenrode dépose le rapport de la commission des finances, concernant les projets de lois qui tendent à régler les comptes des exercices de 1833, 1834 et 1835.

- Ce rapport sera imprimé et distribué ; la chambre fixera ultérieurement le jour de la discussion.

Projet de loi portant le budget du ministère des finances de l'exercice 1846

Discussion générale

M. Verhaegen. - Messieurs, j'ai présenté hier quelques observations sur l'ensemble du budget des finances ; ces observations concernaient le personnel des diverses branches d'administration et le chiffre des appointements dont on demande encore la majoration. La tâche que nous avons à remplir en pareille circonstance est très désagréable, je le sais, et ce n'est qu'à regret que je la remplis. Mais il faut bien, lorsque les circonstances sont pressantes, ne pas avoir égard aux intérêts individuels, ni même aux affections ; il faut que chacun remplisse son devoir.

En vous présentant mes observations, j'ai eu soin, messieurs, de ne pas prononcer des noms propres ; mais ces observations se rattachent à certains individus qui auront pu se reconnaître dans mon discours, et quelle que soit leur position, je ne recule devant aucune des conséquences de mes paroles ; mais M. le ministre des finances, au lieu de répondre à mes observations, les a, je dois le dire, tournées contre lui-même.

J'ai signalé des abus d'abord quant à l'organisation des différentes branches d'administration ; j'ai comparé l'exercice de 1834 à l'exercice de 1845 et je suis arrivé ainsi à certains résultats que j'ai soumis à votre appréciation. Dans certaines branches d'administration la besogne a diminué, le nombre des employés est augmenté, et l'on demande encore des augmentations de dépense. Voilà un fait que j'ai signalé et qui est resté sans réponse. J'ai parlé aussi de certains abus, de certains actes que j'ai appelés, à juste titre, des actes de népotisme, des actes odieux de népotisme : à cet égard encore on a gardé le silence le plus complet. J'ai parlé de fonctionnaires qui ont été promus à certaines fonctions, en marchant sur le corps à un grand nombre d'ayants droit, et alors qu'ils se trouvaient dans une position d'incompatibilité avec les fonctions qu'on leur conférait. On ne m'a rien répondu ; M. le ministre des finances s'est borné à dire qu'il n'avait pas de parents à placer. J'aime à le croire et ce n'est pas à lui que je me suis adressé ; je me suis fait suffisamment comprendre, mais ceux que la chose concernait ont gardé le silence. Mes observations sont donc restées entières ; la chambre et le pays en jugeront.

Si, à l'occasion du chapitre des dépenser imprévues, j'ai parlé de voyages inutiles, je n'ai nommé personne ; j'ai parlé en thèse générale ; mais M. le ministre a, lui, spécialisé, et je lui dois à cet égard un mot de réponse. Il a dit qu'un fonctionnaire avait fait un voyage à Livourne pour étudier le système des entrepôts francs ; eh bien, messieurs, il n'y a à cela qu'une petite difficulté, c'est qu'à Livourne il n'y a pas d'entrepôts francs. Livourne est un port franc...

M. le ministre des finances (M. Malou). - C'est la même chose.

M. Verhaegen. - Non, ce n'est pas la même chose.

Je n'avais pas fait allusion à ce voyage ; j'avais généralisé ; c'est M. le ministre qui en a parlé et qui a confirmé ainsi mon observation.

J'ai parlé aussi du secrétaire général du ministère des finances et du secrétaire particulier de M. le ministre. A cet égard, j'ai fait des observations qui découlent de la nature même des choses ; j'ai trouvé des précédents dans la conduite d'autres membres du cabinet ; je maintiens tout ce que j'ai dit sous ce rapport aussi bien que sous tous les autres. Toutes mes observations sont restées debout ; on n'y a nullement répondu.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Messieurs, je désire aussi ne pas rouvrir tout entière la discussion qui a occupé la chambre dans la séance d'hier. Contrairement à l'opinion de l'honorable M. Verhaegen, je pense avoir répondu à toutes les observations sur lesquelles un débat parlementaire était possible. Je me suis abstenu, pour des considérations que la chambre appréciera, de discuter individuellement les motifs de la mise à la pension de certains fonctionnaires, et plus encore, les motifs pour lesquels tel ou tel fonctionnaire n'aurait pas été nommé à un emploi désigné.

L'honorable membre avait établi une comparaison entre l'organisation de 1834 et celle de 1845 ; j'ai indiqué quelles étaient les causes principales du changement.

Je m'attacherai maintenant en peu de mots à ce qui concerne l'administration la plus nombreuse, à celle qui a été aussi, de la part de l'honorable député de Bruxelles, l'objet du plus grand nombre de critiques, je veux parler de l'administration centrale des contributions directes.

En 1834, le crédit pour le service de l'administration des contributions directes, n'était pas de 82,000 fr., il faut y ajouter le service du cadastre qui était de 24,000 fr. ; ce qui fait un total de 106,000 fr. Le même chiffre, sauf de très légères différences, s'est maintenu jusqu'en 1841. En 1841,on a fait un changement qui consistait à transférer à l'administration centrale une vérification très compliquée, très étendue de toutes les écritures des receveurs des contributions, vérification qui auparavant se faisait en province. L'on a donc pu simplifier le service des provinces, au moyen d'une aggravation apparente de dépenses pour le service l'administration centrale, et d'une économie réelle sur le service en province.

Dès cette époque, le crédit a été porté à 130,200 fr. Un changement de même nature a eu lieu à raison des perfectionnements de la statistique commerciale, et en 1845, les chambres ont alloué, pour le service de cette administration, une somme de 150,000 fr. Vous voyez donc, messieurs, qu'il ne suffit pas d'opposer à deux époques différentes des chiffres différents portés dans les budgets, mais qu'il faut analyser avec soin, si l'on veut être juste, les causes de ces augmentations, les motifs qui les ont déjà fait admettre par la législature.

L'honorable membre, interprétant mal le mot d'entrepôt franc, persiste à croire qu'un des voyages entrepris par des motifs très sérieux de service, avait été entrepris en quelque sorte par des raisons d'agrément personnel. Eh bien, messieurs, j'ai pris de nouveaux renseignements : ce voyage a été fait en France, à Gênes et à Livourne dans la saison d'hiver ; il a eu lieu avant la présentation du projet de loi sur les entrepôts ; quand j'ai parlé hier des entrepôts francs de Livourne et de Gênes, j'ai entendu parler du système de franchise qui existe dans ces deux villes ; il n'est nullement entré dans ma pensée de dire que la mission s'était bornée à étudier l'entrepôt de Gênes ; cette étude devait s'étendre au port franc de Livourne, pour que le gouvernement pût fixer son opinion sur le système praticable en Belgique. C'est une mission, je le répète, qui a été remplie à l'entière satisfaction du gouvernement, et dont le résultat lui a été très utile.

Quant à l'organisation du secrétariat général, je puis assurer à la chambre que cette organisation aujourd'hui ne diffère pas de celle qui existait auparavant ; que la collaboration d'un secrétaire particulier est indispensable à tout ministre des finances, et cette nécessité est tellement sentie, qu'il y a toujours existé.

Un fonctionnaire ayant les mêmes attributions, existe depuis longtemps dans d'autres départements, où le nombre et le détail des affaires est beaucoup moins considérable qu'au département des finances. Et, pour le dire en passant, je puis encore détruire une autre erreur de l'honorable préopinant ; il pensait que le fonctionnaire nommé à cette position aurait, selon l'expression dont on s'est servi, passé sur le corps à d'autres employés. Je puis déclarer, au contraire, qu'il n'est pas entré dans la hiérarchie de l'administration des finances, qu'il a une position spéciale, pour ainsi dire, à côté de l'administration des finances ; de sorte qu'en réalité, il n'est pas venu s'interposer comme un obstacle à un avancement légitime d'autres fonctionnaires.

- La discussion générale est close.

La chambre passe à la discussion des articles.

Discussion du tableau des crédits (finances)

Chapitre premier. Administration centrale

Article premier

« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »

- Adopté.

Article 2

« Art. 2. Traitements des fonctionnaires et employés. »

La section centrale propose de voter séparément chacun des numéros des développements du budget, sauf à ne faire ensuite qu'un seul article, après le vote de chacune des subdivisions.

« § 1er. Traitement du secrétaire général : fr. 8,400. »

- Adopté.


« § 2 Secrétariat général : fr. 48,000. »

La section centrale propose de réduire ce chiffre à 45,000 fr.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Je ne puis pas me rallier à cette réduction, par les motifs que j'ai déjà indiqués dans la discussion générale.

Les attributions anciennes du secrétariat général se sont étendues ; des attributions nouvelles lui ont été conférées ; il y a encore des travaux très vastes à entreprendre et pour lesquels j'ai besoin de l'augmentation de 3,000 fr. Ainsi, il n'a existé jusqu'ici qu'un contrôle très imparfait du personnel qui ressortit à l'administration des finances. C'est un vaste travail que je me propose de compléter. Le travail des pensions, par suite du changement de législation qui est intervenu en 1844, a considérablement augmenté. Auparavant cette besogne était rétribuée sur les fonds de la caisse de retraite qui était seulement subsidiée par l'Etat. Depuis lors, la pension de tous les fonctionnaires a été portée directement à charge du trésor, et l'on a institué une caisse des veuves ; ces dispositions de la loi réagissent sur le travail, non seulement du secrétariat général, mais de l'administration centrale des contributions directes.

M. de Corswarem. - Messieurs, j'ai fait partie de la majorité de la section centrale qui a refusé les augmentations de crédit. Je n'ai reçu aucun mandat de la part de mes honorables collègues, pour parler en leur nom. Je crois cependant devoir dire à la chambre que la majorité a surtout été déterminée à refuser toutes les augmentations, par cette raison majeure, que les traitements de tous les employés des ministères ne sont pas encore fixés par une mesure générale.

L'année dernière, le ministère avait promis que cette mesure serait prise avant la session actuelle ; mais elle ne l'a pas été. Je crois même que si l'ancien cabinet était resté, plusieurs membres de la section centrale auraient protesté contre l'inexécution de cette promesse, non seulement par le refus de toute augmentation de crédit, mais par le refus même du budget.

Il y a encore une raison spéciale qui nous a déterminés à ne pas allouer cette augmentation, c'est qu'elle n'est pas seulement demandée pour le secrétariat général, mais encore pour le bureau de liquidation. La liquidation des créances anciennes est très avancée ; il y a déjà eu même une réforme dans le personnel du bureau de liquidation ; c'est aussi cette considération qui nous a fait croire que le crédit ancien suffirait.

- Personne ne demandant plus la parole, il est procédé par appel nominal (demandé par plus de 5 membres) sur le chiffre de 48,000 francs qui est le plus élevé.

60 membres répondent à l'appel.

20 répondent oui.

40 répondent non.

En conséquence, le chiffre de 48,000 fr. n'est pas adopté.

Ont répondu oui : MM. Brabant, d'Anethan, Dedecker, de Garcia, de Man d'Attenrode, de Mérode, de Terbecq, d’Hoffschmidt, d'Huart, Donny, Dubus (aîné), Duvivier, Fallon, Goblet, Lejeune, Malou, Mast de Vries, Mercier, Simons et Zoude.

Ont répondu non : MM. de Corswarem, de Foere, de Haerne, de la Coste, Delfosse, d'Elhoungne, de Meer de Moorsel, de Meester, de Renesse, de Smet, de Tornaco, Dumont, Dumortier, Eloy de Burdinne, Fleussu, Huveners, Jonet, Lange, Lesoinne, Loos, Lys, Manilius, Orban, Orts, Osy, Pirson, Rodenbach, Rogier, Scheyven, Sigart, Troye, Veydt, Vilain XIIII, Biebuyck, Cans, Castiau, Clep, de Bonne, de Breyne et Liedts.

- Le chiffre de 45,000 fr. est mis aux voix et adopté.


« § 3. Trésor public : fr. 110,000 fr. »

- Adopté.


« § 4. Contributions directes : fr. 150,000. »

La section centrale propose sur ce chiffre une réduction de 10,000 fr.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Malgré la décision que la chambre vient de prendre à l'égard d'une somme de 3,000 fr., qui m'a paru et me paraît encore nécessaire, j'insisterai également auprès d'elle pour obtenir l'augmentation de 10,000 fr. que j'ai demandée pour le service des contributions directes, douanes et accises. Cette administration est de toutes celles du ministère des finances la plus laborieuse, celle où aujourd'hui l'on travaille le plus et où il reste le plus de travaux à entreprendre.

Ainsi dans l'organisation actuelle, il m'est presque impossible de donner suite au vœu qu'on émet si souvent dans cette enceinte, de voir entreprendre la révision, l'examen, l'étude de nos lois d'impôts. Ce sont là des travaux qu'on ne confie pas à des commis à 1,000 ou 1,500 fr. ; ce sont des travaux de longue haleine qui exigent de l'expérience et de longues études et auxquels on ne peut se livrer qu'en faisant abstraction des affaires courantes. Or, dans l'état actuel de l'organisation du personnel, il est impossible de donner suite au vœu de la chambre, si l'on ne me donne pas des moyens d'organisation qui me permettent de régulariser ces travaux importants.

Il y a un autre motif dont quelques honorables membres, je regrette de devoir le dire, ne paraissent pas reconnaître toute l'importance. Chaque année, dit-on, les ministres allèguent que le travail augmente. Cela peut être dit chaque année et être vrai chaque année. Prenons les contributions directes, la division des douanes. Cette division, dans l'état actuel des relations de la Belgique et dans l'état actuel des travaux que ces relations supposent, est plus que doublé, en comparaison de ce qu'elle était il y a peu d'années.

La loi des droits différentiels la loi sur les sucres ont augmenté dans des proportions très fortes les travaux des employés des contributions directes, et ce n'est que par un travail excessif, un zèle de tous les instants qu'on peut, non pas entreprendre ces travaux dont je parlais tout à l'heure, mais tenir les affaires au courant. On peut demander au ministre de travailler ainsi, mais non à tous les fonctionnaires de l'administration centrale.

On parle souvent de l'état-major ; j'ai sous les yeux un tableau comparatif des traitements en province et à l'administration centrale. Le traitement devrait être plus fort où l'on veut réunir les meilleurs fonctionnaires qu'on oblige à résider à Bruxelles et dans les faubourgs, résidence plus onéreuse que la plupart des résidences en province ; eh bien, le contraire existe.

Un fait prouvera quel est l'inconvénient de cette organisation.

Il m'est arrivé de proposer à un fonctionnaire en province de venir à l'administration centrale avec avancement de grade ; il m'a supplié de ne pas l'y appeler. Voilà l'état dans lequel se trouve l'administration centrale dont le travail doit être actif, bien organisé, mais à qui on doit aussi donner les moyens d'action nécessaires.

M. de Corswarem. - Les seuls motifs qui avaient déterminé la section centrale à ne pas accorder cette augmentation, sont que l'ancien crédit suffisait avant la cession de deux de nos provinces et pendant les travaux du cadastre ; il lui a paru qu'après la cession de deux de nos provinces et l'achèvement des travaux du cadastre, le crédit qui avait suffi précédemment, suffirait encore. M. le ministre dit qu'il a demandé cette augmentation pour se livrer à des études pour améliorer notre système d'impôts ; c'est une circonstance que la section centrale n'a pas connue, et qui aurait peut-être influé sur sa décision.

M. Mercier. - Le raisonnement de l'honorable préopinant ne me paraît pas juste. L'expérience apprend tous les jours qu'un personnel qui était suffisant à une époque ne l'est plus à une autre, par suite de l'extension des affaires. Je joindrai mon témoignage à ce que nous a dit M. le ministre des finances, que des travaux utiles ont dû être retardés à défaut du nombre nécessaire d'employés supérieurs pour traiter les questions importantes ; des études préparatoires de projets de lois ont dû être ajournées par des fonctionnaires, forcés qu'ils ont été de donner tout leur temps aux affaires courantes qui ne permettaient aucun retard.

J'ajouterai que les employés de l'administration centrale des contributions directes passent la plupart leurs soirées au travail ; ils ne sont pas seulement occupés pendant les heures ordinaires de bureau, mais ils ne peuvent suffire à leur lourde tâche qu'en y consacrant leurs veilles. Si le crédit demandé est refusé, ce sera au préjudice de la bonne administration des intérêts du pays et de la prompte expédition des affaires.

Je ferai une autre observation, en réponse à l'honorable M. de Corswarem, qui vous a dit que ce qui a déterminé la section centrale à rejeter les augmentations proposées, c'est le défaut d'une organisation générale.

Si le cabinet était resté composé tel qu'il était, il aurait rempli ses engagements ; mais on comprend que de nouveaux ministres à peine arrivés au pouvoir, ne sont pas à même de s'occuper immédiatement de règlements généraux ; il faut d'abord qu'ils se mettent au courant des affaires et qu'ils traitent celles qui par leur caractère d'urgence ne permettent aucun délai. La chambre doit reconnaître que le retard qu'a éprouvé l'organisation des bureaux ne peut être reproché avec fondement au ministère ; du reste, l'expérience le prouvera, la nouvelle organisation ne différera guère de ce qui existe aujourd'hui.

M. Eloy de Burdinne. - L'honorable préopinant nous signale un des grands inconvénients qu'il y a à changer de ministre. Un homme qui arrive au pouvoir doit nécessairement faire un apprentissage. Par conséquent tous les changements de ministères se font au détriment du pays. Indépendamment de ces observations, je vous avoue que quelque arguments avancés par l'honorable préopinant pourraient m'entraîner jusqu'à certain point si la position financière du pays le permettait. Mais nous ne devons pas perdre de vue que nous avons besoin de la plus stricte économie pour pouvoir entreprendre des travaux publics qui donnent de l'ouvrage à nos populations. Oui, certainement je voterais avec plaisir le crédit demandé, si nous n'étions pas dans la position où nous met la perte de la recolle des pommes de terre.

Ne perdons pas de vue, messieurs, que pour faire des dépenses il faut se créer des ressources. Il faut augmenter, autant qu'il est en nous, nos ressources à charge de l'étranger. Ce n'est qu'en modifiant notre système de douane que nous pourrons atteindre ce résultat.

Je fais mon compliment aux ministres d'être entrés dans cette voie, mais je voudrais que ce fût, non par une disposition particulière à une nation, mais par un système générai admis vis-à-vis de toutes les nations. Vous auriez alors des impôts qui seraient supportés par l'étranger qui introduirait ses produits. Par ces motifs, je ne donnerai pas mon assentiment à l'augmentation demandée, parce que nos moyens ne le permettent pas.

M. Delfosse. - Je pense, comme les honorables préopinants, qu'il y a de l'inconvénient à changer souvent de ministère ; mais je pense aussi qu'il y a un plus grand inconvénient encore à conserver un mauvais ministère ; je serai donc pour le changement tant que nous n'en aurons pas un passable.

Pour bien apprécier l'utilité de l'augmentation réclamée par M. le ministre des finances, il faudrait que la chambre fît une enquête dans les bureaux de l'administration, il faudrait qu'elle recherchât quelle est la quantité de travail que chaque employé devrait produire et quelle est celle qu'il produit ; (page 394) c'est là une chose que la chambre ne peut pas faire, elle est donc en quelque sorte forcée de croire MM. les ministres sur parole.

Je voterai néanmoins contre l'augmentation réclamée par M. le ministre des finances, parce que j'ai la conviction intime que le budget des finances est susceptible de fortes réductions ; j'ai la conviction intime que si M. le ministre des finances le voulait sérieusement, il pourrait économiser plusieurs centaines de mille francs sur son budget et trouver dans ces économies de quoi faire face aux dépenses nouvelles que les circonstances peuvent rendre nécessaires.

M. le ministre des finances n'est pas le seul qui sollicite des augmentations pour le personnel, ses collègues ont formé des demandes de même nature ; la chambre fera bien de rejeter toutes ces demandes, elle fera bien de se montrer fermement résolue à rester ou plutôt à rentrer dans la voie des économies ; l'état de nos finances et les circonstances difficiles dans lesquelles nous nous trouvons lui en imposent le devoir.

En rejetant ces augmentations, la chambre rendra même un véritable service à MM. les ministres. Il ne se passe pas de jour sans que MM. les ministres soient obsédés dans l'intérêt d'employés qui réclament une meilleure position, et qui, pour l'obtenir, usent de leurs moyens d'influence et font agir tous leurs protecteurs.

Ces employés obéissent à une tendance naturelle, mais qu'il faut savoir contenir dans de justes limites ; MM. les ministres n'ont pas toujours assez de fermeté pour résister à ces obsessions, qu'ils doivent trouver fort gênantes, Ces obsessions seront moins fréquentes lorsque MM. les ministres pourront dire aux solliciteurs qu'ils n'obtiendraient pas de la chambre les allocations dont ils auraient besoin si leur demande était accueillie. La facilité de la chambre à voter des augmentations de dépenses est un encouragement pour les solliciteurs et un embarras pour le ministère. Ce sera, je le répète, rendre un véritable service à MM. les ministres que de ne pas leur accorder les augmentations qu'ils réclament pour le personnel.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Je remercie beaucoup l'honorable membre de la sollicitude qu'il me témoigne. Je serais plus reconnaissant encore s'il voulait voter l'augmentation qui me paraît indispensable. La demande de 10,000 fr. est temporaire ; d'après la discussion qui a eu lieu hier, si l'occasion se présentait d'introduire la simplification que j'ai indiquée, je pourrai réduire en tout ou en partie l'augmentation portée à mon budget. J'ajouterai que cette somme n'a pas pour objet d'élever les traitements actuels, mais de régulariser l'administration centrale, afin qu'elle puisse remplir la mission très importante, très essentielle qui lui est confiée.

M. de La Coste. - Je tiens à faire connaître à cette assemblée et à M. le ministre des finances que ce n'est nullement en vue d'apporter quelque entrave à la marche de son administration que, pour ma part, j'ai refusé l'augmentation de 3,000 fr. demandée tout à l'heure. Ce ne sont jamais de telles considérations qui me font agir ni qui déterminent mon vote.

Mais je veux être conséquent avec moi-même et avec une délibération à laquelle je viens de prendre part relativement au budget de l'intérieur. La section centrale chargée de l'examen du budget de l'intérieur a adopté et appuyé l'idée émise dans presque toutes les sections, qu'il importe d'insister sur l'organisation promise par le ministère précédent.

Un des honorables préopinants semble croire que cette organisation ne serait pas un moyen d'économie, et qu'elle ne ferait que consacrer ce qui existe. En se plaçant au même point de vue que cet honorable membre, on ne ferait effectivement que conserver ce qui existe, et lui donner une sanction nouvelle ; peut-être même arriverait-on à des augmentations de dépenses ; car, en pareil cas, on profite quelquefois de l'occasion pour se mettre plus à l'aise. On se dit : C'est une fois pour toutes ; c'est la dernière ; établissons-nous largement. Mais pour nous, nous voulons autre chose qu'une organisation faite sous l'empire de telles idées ; nous voulons que les conditions d'admission, les conditions d'âge et de capacité soient réglées. Ainsi nous espérons purger successivement les bureaux de la haute administration, qui ont une si grande influence sur la gestion des affaires du pays, des employés inutiles. Nous aurons la qualité au lieu de la quantité ; nous aurons des résultats réels au lieu de résultats qui, en partie du moins, ne se traduisent qu'en dépenses toujours croissantes.

M. le ministre, dit-il, n'a pas eu le temps de s'occuper de cette nouvelle organisation ; je le crois, mais comment a-t-il eu le temps de reconnaître qu'il fallait des augmentations de 3,000 fr. dans un précédent article, de 10,000 fr. dans l'article dont nous nous occupons ?

Pour mon compte, ce à quoi je tiens, c'est sans doute à ne pas augmenter sans nécessité les dépenses de l'Etat, c'est à soustraire, MM. les ministres, aux obsessions résultant d'une foule de prétentions souvent mal fondées et auxquelles ils sont pour ainsi dire obligés d'obtempérer, mais surtout c'est à arriver à une organisation conforme aux principes que j'ai Indiqués.

Si M. le ministre des finances est à même de prouver qu'il y a dans cette augmentation de 10,000 fr. un caractère particulier d'urgence, qui ne permette pas d'attendre l'organisation, je me ferai un devoir de la voter ; car je ne veux point créer des embarras à l'administration. C'est à mon grand regret que je refuse au gouvernement du pays, ce qu'il croit nécessaire pour remplir la tâche qui lui est imposée.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Il a été question à la séance d'hier d'organiser le département des finances. Je me suis expliqué, je crois, avec beaucoup de franchise et de netteté. J'ai repoussé l'idée d'organiser par une loi l'administration centrale, mais j'ai ajouté que j'examinerais dans son ensemble et dans ses détails l'organisation actuelle pour en faire l'objet d'un arrêté royal.

Assurément, il eût été de ma part extrêmement téméraire de vouloir refaire l'organisation du jour, pour ainsi dire, de mon entrée au ministère.

J'ai pu reconnaître l'utilité de cette organisation et des moyens qu'elle suppose être à la disposition du gouvernement, sans être fixé de la même manière sur les principes mêmes de l'organisation qu'il faudrait établir.

Je n'exclus pas de l'organisation les principes dont a parlé l'honorable M. de La Coste, la fixation de quelques conditions d'aptitude, d'âge, de surnumérariat. J'ai même été heureux d'avoir pu déjà en faire l'application à l'une des administrations qui ressortissent au ministère des finances.

Je rends grâce de nouveau aux honorables membres qui veulent bien songer à diminuer les obsessions dont ils supposent les ministres accablés. Mais je comprends ainsi mes devoirs qu'il faut y résister, au besoin, et n'écouter que le bien du service.

C'est en appliquant ce principe que j'ai formulé tout mon budget, y compris la somme de 3,000 fr. que la chambre a refusée tout à l'heure.

- Le chiffre de 150,000 fr. est mis aux voix par appel nominal ; voici le résultat du vote.

61 membres sont présents :

1 (M. de La Coste) s'abstient, parce qu'il n'était pas suffisamment éclairé.

Nombre des votants 60.

20 membres votent pour l'adoption.

40 votent contre.

La chambre n'adopte pas.

Ont voté pour l'adoption : MM. de Garcia, de Sécus, Desmaisières, de Terbecq, d'Hoffschmidt, d'Huart, Donny, Dubus (aîné), Dumont, Fallon, Lejeune, Liedts, Malou, Mercier, Orban, Vilain XIIIII, Zoude, Brabant, d'Anethan et de Chimay.

Ont voté contre : MM. de Corswarem, de Foere, de Haerne, Delfosse, d’Elhoungne, de Man d'Attenrode, de Meer de Moorsel, de Meester, de Mérode, de Renesse, de Saegher, Desmet, de Tornaco, Eloy de Burdinne, Fleussu, Huveners, Jonet, Lange, Lesoinne, Loos, Lys, Manilius, Mast de Vries, Orts, Osy, Pirson, Rodenbach, Rogier, Scheyven, Sigart, Simons, Vanden Eynde, Veydt, Biebuyck, Cans, Castiau, Clep, de Baillet, de Bonne et de Breyne.

Le § 4 est adopté avec le chiffre de 140,000 fr.


«§ 5. Enregistrement : fr. 89,800 fr. »

La section centrale propose une réduction de 5,800 fr.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Les motifs de cette augmentation sont les mêmes que pour l'article précédent. Mais je ne ferai pas perdre du temps à la chambre, en provoquant un troisième appel nominal, j'accepte donc le chiffre de 84,000 fr., quoique je considère la somme de 89,800 fr. comme nécessaire.

- Le § 5 est adopté avec le chiffre de 84,000 fr.


« § 6. Commission des monnaies, 42,000-fr. »

M. Rodenbach. - Il y a déjà plusieurs années que j'ai fait au sujet de cet article des observations à M. le ministre des finances. Je trouve que l'administration des monnaies coûte infiniment d'argent au pays. Elle reçoit pour son personnel une somme de 42,000 fr. ; il y a pour cette administration un autre article de 30,000 fr., et enfin un autre article de quelques milliers de francs. Cependant on ne frappe ni monnaie d'or, ni monnaie d'argent.

Je ne viens pas demander qu'on diminue le personnel ; car on parlerait encore de droits acquis, ce sont des mots que les ministres emploient souvent, quand on demande des diminutions.

On dira aussi sans doute que si l'on ne frappe pas de monnaie, c'est parce que la loi est vicieuse. S'il en est ainsi, qu'on présente une nouvelle loi.

Nous sommes saisis d'un projet de loi ; mais la section centrale en propose le rejet. Il est évident qu'il y a quelque chose à faire. Puisqu’en France on frappe de la monnaie d'or et d'argent, et que nous avons la même loi, nous devons pouvoir en frapper également. Si ce n'est pas possible, qu'on modifie la loi. C'est ce qu'on réclame depuis nombre d'années.

Dans une année calamiteuse comme celle-ci, il est regrettable de voir dépenser 80,000 fr. pour frapper seulement de la monnaie de cuivre, sur laquelle, il est vrai, on gagne 33 p. c, mais enfin sans que cette dépense produise tous les résultats qu'on a le droit d'en attendre.

J'insiste pour que le gouvernement présente un projet de loi.

Il est plus que temps que les emplois de l'administration des monnaies cessent d'être des sinécures.

M. Eloy de Burdinne. - Je regrette, comme l'honorable préopinant, que nous n'ayons pas modifié la loi monétaire ; la matière première, l'or, augmente tous les jours. Il est impossible de frapper sans perte de la monnaie d'or qui soit au titre maintenant en usage.

L'honorable M. d'Huart avait présenté un projet de loi pour mettre le gouvernement à même de frapper de la monnaie d'or ; ce projet est resté dans les cartons. (Dénégations.)

Vous voulez dire, messieurs, qu'il y a un rapport sur ce projet de loi. Je le sais ; mais le rapport est dans les cartons.

Je demanderai que la chambre veuille bien s'occuper le plus tôt possible de ce rapport de la section centrale ; car il est vraiment honteux pour la nation belge de n'avoir dans le pays que de l'or étranger. Voyez, messieurs, la Hollande ; elle ne laisse pas ses commissaires de monnaie dans l'inaction. Vous le savez, messieurs, l'oisiveté est la mère de tous les vices. Il ne faut donc pas laisser nos commissaires dans l'inaction. Donnons-leur de la besogne ; nous pourrons en même temps réaliser un bénéfice pour le trésor par la fabrication de l'or, et nous pourrons voir l'effigie de notre souverain sur de l'or, tandis que nous ne le voyons aujourd'hui que sur de l'argent.

(page 395) M. le ministre des finances (M. Malou). - J'ai devancé jusqu'à un certain point les observations qui viennent d'être faites, en étudiant la question, agitée déjà depuis longtemps dans la chambre, s'il est possible, dans les circonstances actuelles, de fabriquer de la monnaie d'or en Belgique, et si la possibilité en est reconnue, quelles sont les mesures législatives qui doivent être prises.

Que la chambre me permette de lui rappeler que le projet relatif à la monnaie d'or, présenté par mon honorable collègue M. d'Huart en 1838, a fait l'objet d'un rapport de l'honorable M. Cogels dans le cours de la dernière session ; et que ce rapport conclut purement et simplement au rejet de la proposition sans y rien substituer.

Lorsque j'ai examiné les rétroactes, il m'a paru évident, messieurs, que la discussion ne pouvait pas être commencée utilement devant la chambre, qu'il fallait la faire marcher ; qu'il fallait chercher (et je me propose de réclamer le concours de l'honorable ancien rapporteur lui-même) à amener autre chose qu'une conclusion négative. Alors, messieurs, mais alors seulement, après avoir obtenu cette conclusion, nous pourrons agiter utilement la question et la résoudre par une loi. Car il faut une loi. Et la difficulté n'est pas petite. Tout le monde reconnaît que le rapport entre les deux valeurs est variable, et que le système qui repose à la fois sur la valeur de l'argent et sur la valeur de l'or est faux en ce sens qu'à une époque donnée, la monnaie d'argent disparaît, et qu'à une autre époque la monnaie d'or peut devenir marchandise ou disparaître au creuset.

Je ne désespère pas cependant, messieurs, d'amener une solution positive, et déjà je m'en suis occupé avec beaucoup de soin.

Je répondrai en même temps à une autre partie des observations de l'honorable député de Roulers.

Je me suis occupé aussi, messieurs, de donner plus d'extension à la fabrication de la monnaie en Belgique, et cette affaire est déjà, je puis le dire, plus avancée que la première.

La commission des monnaies, d'ailleurs, ne s'occupe pas exclusivement du service de la monnaie. Elle a d'autres attributions que l'honorable M. Rodenbach paraît avoir perdues de vue.

M. Rodenbach. - Je les connais très bien.

M. Osy. - Messieurs, j'ai peu de mots à ajouter à ce que vient de dire M. le ministre des finances.

Effectivement le rapport déposé à la fin de la session dernière conclut simplement au rejet du projet de loi présenté par l'honorable M. d'Huart et ne lui en substitue aucun autre. Dès lors, je crois qu'avant que nous nous occupions du projet dont on propose le rejet, le gouvernement ferait bien d'examiner s'il n'existe pas un autre moyen de fabriquer de l'or. Peut-être pourrait-on adopter le système hollandais. Si M. le ministre ne vient pas nous présenter un nouveau moyen, on pourra se livrer à une discussion de plusieurs jours, qui n'amènera aucun résultat.

Messieurs, un grand inconvénient que j'ai déjà signalé depuis plusieurs années, c'est que nous n'avons véritablement pas de directeur des monnaies. En effet, le titulaire actuel dirige un établissement beaucoup plus considérable que celui que nous avons à Bruxelles. Je crois qu'il serait convenable que le gouvernement fît une transaction ou un arrangement avec ce fonctionnaire, pour qu'il se décidât à résider à Bruxelles ou à renoncer à la place de directeur des monnaies. Il faut, messieurs, que le directeur des monnaies reste à Bruxelles, et qu'il soit à même de suggérer continuellement au gouvernement les meilleures mesures à prendre pour arriver à un bon système.

Il est fâcheux, messieurs, que nous n'ayons que de la monnaie étrangère alors qu'à côté de nous la Monnaie de Lille frappe beaucoup de monnaie, et surtout des pièces de 5 fr. Je crois que ce que la Monnaie de Lille fait, celle de Bruxelles pourrait le faire.

Je dois déclarer, messieurs, que dans mes observations en ce qui concerne le directeur de la Monnaie, il n'y a rien de personnel ; je le reconnais comme un homme très capable, mais je crois que l'intérêt du service exige que le directeur puisse résider à Bruxelles, s'occuper exclusivement de la monnaie, et être en contact avec le gouvernement et avec le commerce pour voir s'il y a moyen de se procurer des matières et pour proposer des changements exécutables pour avoir un bon système monétaire.

M. Lejeune. - Messieurs, l'article en discussion donne lieu presque chaque année aux mêmes objections. C'est sans doute par un zèle louable de faire des économies qu'on les reproduit. Si ce but, messieurs, pouvait être atteint, je m'y associerais volontiers. Ce n'est certainement pas une question de personnes que les honorables préopinants ont voulu traiter, et ce n'est pas devant une question de personnes que je m'arrêterais non plus moi-même. La question de personnes est d'ailleurs tout à fait secondaire et doit être mise de côté.

Dans ma conviction, messieurs, le but d'économie qu'on a eu en vue, est déjà atteint. L'économie que l'on a voulu faire, a été réalisée dès le principe. L'administration précédente a été modifiée et a été réduite à sa plus simple expression, tant pour le traitement que pour le nombre des fonctionnaires.

Quelques-unes des objections qui ont été faites puisent peut-être leur origine dans la dénomination même de l'administration. On met en tête du crédit : « commission des monnaies » et l'on dit : Il ne se fabrique presque pas monnaie. De là l'idée de l'inutilité d'une administration. Si l'on nommait cette commission « administration des monnaies et de la garantie des matières d'or et d'argent, » je doute que les mêmes objections se fussent toujours produites.

M. le ministre des finances vient de le dire, il est nécessaire de le répéter : l'administration dont il est question est à la tête d'un double service ; du service des monnaies et du service de la garantie des matières d'or et d'argent. Or, dans l'état actuel de la législation, l'administration, telle qu'elle existe aujourd'hui, est indispensable pour l'un et l'autre de ces deux services, pour l'un comme pour l'autre, et pour l'un sans l'autre ; de sorte que si la monnaie était complétement inactive, il serait impossible de réduire l'administration de la garantie des matières d'or et d'argent existant d'aptes la législation actuelle, comme il serait impossible de modifier ou de réduire cette administration, n'eût-elle que la monnaie dans ses attributions.

Pour changer l'administration qui est à la tête du service de la garantie des matières d'or et d'argent, il faudrait changer la législation, et je ne pense pas qu'on soit disposé à y toucher d'ici à longtemps encore.

Du reste, ces lois sont en quelque sorte d'ordre public ; elles constituent une garantie donnée aux citoyens, en ce qui concerne les matières d'or et d'argent, que sans doute chacun n'est pas en état d'apprécier par lui-même.

Cette administration, d'ailleurs, n'est pas onéreuse au pays. Jamais personne n'a prétendu que les lois sur cette matière fussent des lois fiscales, qu'elles eussent pour but de grossir les revenus du trésor. Cependant après déduction de tous frais quelconques d'administration, y compris la commission des monnaies, ce service présente annuellement un excédant de recette.

En ce qui concerne la monnaie, l'existence de la commission et de toute l'administration, comme je viens de le dire, n'est que secondaire ; elle est la suite nécessaire de l'institution. C'est donc là véritablement le terrain sur lequel on doit discuter. Faut-il qu'il y ait en Belgique une monnaie nationale ? Voilà la question. Si l'institution nationale doit subsister, il faut nécessairement que l'administration subsiste.

L'institution, messieurs, n'est pas seulement légale, elle est constitutionnelle. Vous savez tous que l'article 74 de la Constitution accorde au Roi le droit de battre monnaie en exécution de la loi. Si cet article n'est pas exécuté autant qu'il devrait l'être, ce n'est sans doute pas à l'administration qu'il faut s'en prendre. Je crois, quant à moi, qu'il aurait dû recevoir depuis longtemps une exécution beaucoup plus large.

Messieurs, je ferai remarquer ici que cet article n'a pas passé dans la Constitution sans quelque opposition. Il avait été rédigé tel qu'il a été admis. Lois de la discussion un honorable membre du congrès en a demandé la suppression ; cette suppression a été combattue par plusieurs membres qui siègent encore dans cette enceinte ; un honorable membre qui lui aussi siège encore sur ces bancs, proposa un amendement conçu comme suit : « Il est permis à chacun de battre monnaie à l'effigie du souverain, en se conformant à la loi. »

Ces propositions ont été discutées et rejetées ; l'article a été adopté.

On se plaint et avec raison, selon moi, de ce que l'on ne fabrique pas assez de monnaie. Comme on vient de le voir, cette plainte repose en quelque sorte sur la Constitution même. Quant à la monnaie d'or, il est impossible qu'on en fasse dans l'état actuel de la législation. Pour la monnaie d'argent, il ne m'est nullement démontré qu'il y ait impossibilité d'en faire ; comparée à la France, notre position présente un double désavantage. Il y a d'abord désavantage parce que nous n'avons pas dans notre pays de marché d'argent ; il faut recourir aux marchés étrangers et dès lors le prix de l'argent est augmenté des frais de transport, des frais de commission, il est encore augmenté par le cours du change. Lorsque le cours du change est défavorable, la différence entre le prix de l'argent à Bruxelles et à Paris peut aller jusqu'à 4 pour mille et au-delà, ordinairement elle de 3 pour mille.

C'est là un désavantage auquel le gouvernement ne peut pas remédier, mais qui ne met pas la Belgique dans l'impossibilité complète de faire de la monnaie d'argent. L'autre désavantage, auquel le gouvernement peut remédier, et auquel il remédiera sans doute, c'est que le matériel n'est pas en bon état. Il y aurait là à faire quelques dépenses, qui ne seraient pas excessivement fortes ; on pourrait même les couvrir sans grever le trésor, en les combinant avec une fabrication de monnaie de cuivre, fabrication qui se fait au bénéfice de l'Etat.

Si l'on a fabriqué trop peu de monnaie d'argent et point de monnaie d'or, on ne peut pas dire la même chose pour la monnaie de cuivre. La valeur nominale de la monnaie de cuivre fabriquée jusqu'à ce jour, s'élève à plus de trois millions et demi ; cette fabrication a laissé un bénéfice approximatif de 11 à 120,000 fr., soit à peu près 80,000 fr. par an, depuis 1832.

Je crois inutile d'entrer dans d'autres explications, à moins que la suite de la discussion ne me fournisse l'occasion de donner de nouveaux éclaircissements.

Les quelques observations que je viens de présenter, je les ai faites, messieurs, au point de vue de la question en elle-même, au point de vue de l'intérêt du pays. Je n'ai nullement entendu répondre à un fait personnel.

M. Eloy de Burdinne. - Il n'entre pas, messieurs, dans mon intention de considérer la commission des monnaies comme inutile ; je veux le maintien de cette commission, mais je désirerais au moins qu'on lui donnât de l'occupation, qu'on fabriquât différentes espèces de monnaies, de manière à procurer des bénéfices au trésor.

On vous a dit, messieurs, que la section centrale s'était prononcée pour le rejet du projet de loi présenté par l'honorable M. d’Huart, mais la section centrale n'est pas la chambre, et je pense qu'on devrait aborder la discussion du projet, pour voir si la majorité de la chambre partage l'opinion de la majorité de la section centrale. Je crois qu'on se fait un fantôme quand on dit que le gouvernement belge ne peut pas battre de la monnaie d'or : mais la Hollande n'en fabrique-t-elle pas ? On dira que si la Hollande fabrique de la monnaie d’or, c'est parce qu'elle a une législation monétaire plus favorable que la nôtre. Eh bien, messieurs, nous pouvons modifier notre (page 396) législation ; je ne vois pas pourquoi nous ne verrions pas aussi bien circuler des pièces d'or belges que des pièces d'or hollandaises.

L'honorable membre a dit que la Constitution donne au Roi le droit de battre monnaie ; personne de nous ne conteste ce droit, mais à quoi sert-il lorsque le Roi se trouve dans l'impossibilité d'en faire usage ? Car certes le Roi ne battra pas monnaie au détriment du pays, avec perte pour le trésor public, et c'est ce qui arriverait si l'on fabriquait de la monnaie d'or sous la législation actuelle. Je renouvelle donc la demande que j'ai faite tout à l'heure et qui tend à ce que la chambre discute dans le plus bref délai possible le rapport de la section centrale sur le projet de loi présenté par l'honorable M. d'Huart.

M. de Mérode. - (Nous donnerons son discours.) (Note du webmaster : ce discours n’a finalement pas été intégré dans les Annales parlementaires).

M. Sigart. - Je crois, messieurs, que la chambre acceptera difficilement le projet de loi que le gouvernement lui a soumis ; je le crois par les motifs exprimés dans le rapport de l'honorable M. Cogels, notamment parce qu'il est impossible de maintenir le rapport entre la valeur de l'or et celle de l'argent ; mais il ne s'ensuit pas qu'on ne puisse pas faire de la monnaie d'or. On peut faire de la monnaie d'or de plusieurs manières : d'abord, on peut faire de la bonne monnaie, ce qui ne peut être que des lingots portant l'indication du poids et du titre. Ces lingots peuvent très bien porter sur l'empreinte l'effigie du prince et avoir la forme de nos pièces.

Par ce procédé l'on pourrait obtenir des bénéfices de fabrication assez considérables, et votre monnaie d'or serait alors bien reçue, non seulement dans le pays, mais aussi à l'étranger.

Une pareille monnaie serait utile surtout au commerce sur une grande échelle ; elle faciliterait les échanges, en excitant la confiance au plus haut degré, et augmenterait la richesse publique.

Mais il ne faut pas se dissimuler qu'elle aurait un inconvénient très grave dans les relations usuelles : elle serait incessamment variable. Vous aurez beau inscrire sur une pareille pièce qu'elle a une valeur de 20 fr. ; cela pourra être vrai aujourd'hui, mais ne le sera plus demain. Il est assez incommode de ne pas savoir exactement la somme que l'on possède, et les préjugés viendraient sans doute à l’encontre de ce premier système.

Il y a une autre manière de battre monnaie, c'est de faire de la fausse monnaie ; cependant si l'alliage n'était pas trop considérable, cette monnaie serait acceptée par le public. Si par exemple on faisait des pièces de 25 fr. qui auraient une valeur de 24 fr. 50 cent., il est très probable que le public accepterait ces pièces pour 25 fr., à la condition toutefois qu'on n'en fabriquât pas une quantité considérable, car si on les fabriquait en trop grande abondance, si l'abondance de l'instrument des échanges en diminuait le prix, le public ne les accepterait plus que pour une valeur inférieure à la valeur nominale. D'un autre côté, cette monnaie d'or chasserait la monnaie d'argent qui serait à la fois moins commode et plus précieuse.

Le gouvernement a donc à choisir entre deux systèmes, le système des lingots ou de la bonne monnaie, et le système de la fausse monnaie, et quand je dis système de la fausse monnaie, je n'entends pas le déprécier trop, c'est celui qui existe presque partout, et il offre bien des avantages quand on ne le pousse à l'extrême. Peut-être le gouvernement, comme je l'ai déjà dit, pourrait-il adopter à la fois les deux systèmes, puisqu'ils répondent à des besoins différents, l'un servant particulièrement aux échanges du haut commerce, l'autre aux échanges usuels.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Il me paraît, messieurs, que nous entrons insensiblement dans la discussion du rapport de l'honorable M. Cogels. Cette discussion ne peut pas se rattacher au budget des finances. J'ai déjà déclaré que je continuerais l'élude de la question et que tous mes efforts tendraient à amener une prompte solution ; je m'occuperai en même temps de plusieurs autres points, et notamment de l’organisation de la Monnaie comme établissement et de l'extension de ses travaux. J'espère amener bientôt la solution de ces questions importantes ; quoi que l'honorable député de Waremme ait pu dire, elles présentent de grandes difficultés.

M. Eloy de Burdinne. - La question ne présente pas de difficulté en Hollande.

M. Mercier. - Je crois aussi, messieurs, qu'il serait oiseux d'entrer maintenant dans l'examen de la question du système monétaire qui convient à la Belgique ; cette discussion serait inutile par cela même qu'elle ne peut être approfondie d'une manière incidentelle ; cette question doit d'ailleurs faire l'objet d'un nouveau rapport qui nous est promis par M. le ministre des finances ; j'ai pris la parole pour répondre à une observation de l'honorable M. Osy, concernant le directeur de la Monnaie. Je dois déclarer que jamais aucune partie du service n'a été en souffrance par le fait du directeur, qui n'a cessé de se rendre chaque semaine à Bruxelles pour diriger et surveiller les travaux de la Monnaie ; j'ajouterai que dans mon opinion il serait difficile de le remplacer par une personne aussi éclairée et qui pût rendre les mêmes services ; d'ailleurs le titulaire actuel se tient toujours à la disposition du gouvernement ; jamais il n'a manqué à son appel ; le gouvernement a eu plus d'une fois recours à ses lumières, et notamment lorsqu'il s'est agi du projet de loi présenté par M. d'Huart, qui à cette occasion a créé une commission dont faisait partie le directeur de la Monnaie.

M. le ministre des finances (M. Malou). - J'ai oublié tout à l'heure de dire à la chambre que le directeur actuel de la Monnaie m'a offert sa démission depuis quelque temps ; la démission n'a pas encore été acceptée parce qu'il doit être pourvu à son remplacement.

M. Rodenbach. - Je suis persuadé, messieurs, que si le directeur de la Monnaie a donné sa démission, c'est qu'il a vu lui-même que sa position était fausse. Il est connu comme un homme de talent, et depuis plusieurs années il a réclamé un nouveau projet de loi.

L'honorable M. Lejeune a cru que je voulais faire de cette question une question qui lui fût personnelle. Il n'en est rien, messieurs. L'honorable membre doit se rappeler que depuis plusieurs années, j'ai soulevé annuellement cette question ; je lui ai même dit, avant la séance, que je la soulèverais encore aujourd'hui.

Je sais bien que le personnel actuel s'occupe aussi de la garantie, mais, je le répète, il est intolérable de voir figurer au budget de chaque année une somme de 80,000 fr. et cela uniquement pour faire battre de la monnaie de cuivre. On aurait dù depuis longtemps présenter un projet de loi pour que le pays puisse enfin avoir de la monnaie d'or. Il est à ma connaissance que de la Belgique on transporte hebdomadairement à Lille des lingots d'or et d'argent pour y faire battre de la monnaie belge. Cela ne peut se tolérer davantage. Une loi est indispensable.

M. d'Huart, ministre d’Etat. - L'honorable préopinant insiste pour que le gouvernement présente un projet de loi relativement à la monnaie, il le met en quelque sorte en demeure de déposer ce projet. Cependant l'on vient de rappeler plusieurs fois que la chambre est saisie d'un projet de loi sur cet objet, et que le rapport était même fait ; il ne s'agit donc plus que d'en aborder la discussion. Toutefois, M. le ministre des finances vient d'annoncer qu'il avait examiné la question et qu'incessamment il soumettrait un rapport à la chambre, rapport dont la production sera très utile en présence du travail étendu et très remarquable présenté par la section centrale, qui a été chargée de l'examen du projet de loi de 1838.

On ne peut blâmer la position que le gouvernement prend en cette circonstance. Lorsque M. le ministre des finances aura présenté son rapport, on pourra fixer le jour de la discussion du projet en question, qui me paraît aussi avoir un caractère d'urgence, car je m’associe au vœu exprimé par d'honorables membres, de voir enfin la Belgique dotée d'un système qui lui procure de la monnaie d'or frappée à l'effigie de son souverain ; je ferai remarquer, au surplus, que M. le ministre des finances a déclaré qu'il désirait lui-même vivement qu'on put frapper de la monnaie d'or le plus tôt possible chez nous.

Je ne rencontrerai pas les différentes observations qui ont été présentées, ce serait empiéter sur une discussion qui doit avoir lieu ultérieurement. S'il m'avait été permis d'entrer aujourd'hui dans le débat du fond de la question, j'aurais spécialement fait quelques observations à l'honorable M. Sigart qui a préconisé un système de monnaie de lingot, lequel me paraîtrait d'un usage extrêmement difficile, puisqu'en effet il faudrait que chaque personne fût armée d'un tarif pour calculer, à raison de la valeur du jour de l'or, quelle pourrait être la valeur du lingot qui serait présenté. Je me réserve de faire ces observations, lors de la discussion du projet de loi.

M. Lejeune. - Messieurs, je dois déclarer de nouveau que je n'ai pas voulu voir dans le discours de l'honorable M. Rodenbach un fait personnel ; j'ai eu soin de dire que je ne prenais la parole que pour discuter la question au point de vue de l'intérêt général.

Quant à l'observation faite par l'honorable membre, à savoir que la commission n'aurait rien à faire ; je me bornerai à rappeler ce que je crois avoir prouvé tout à l'heure, que la commission est indispensable, au point de vue seul de la législation sur la garantie des matières d'or et d'argent. Au reste, j'ai déclaré moi-même qu'il était à désirer que le pays eût un hôtel des monnaies en grande activité, et qu'on fît de la monnaie d'or et d'argent ; en cela, je m'associe au désir exprimé par plusieurs honorables membres et l'administration ne se plaindra pas de ce surcroît de travail.

M. Sigart. - Messieurs, si je suis entré dans le fond de la question, c'était parce qu'on avait dit à la chambre qu'il était impossible de faire de la monnaie d'or. J'ai voulu prouver qu'il était possible d'en faire et d'en faire de plusieurs espèces.

- Personne ne demandant plus la parole, le chiffre de 42,000 (service de la commission des monnaies) est mis aux voix et adopté.


« § 7° Huissiers et gens de service : fr. 29,000. »

- Adopté.

L'ensemble de l'article 2, fixé, par suite des réductions successives, à 458,400 fr., est mis aux voix et adopté.

Articles 3 à 9

« Art. 3. Frais de tournées : fr. 8,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Matériel : fr. 40,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Service de la monnaie : fr. 7,200. »

- Adopté.


« Art. 6. Multiplication des coins, : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 7. Achat de matières : fr. 210,000. »

- Adopté.


« Art. 8. Magasin général des papiers : fr. 17,000. »

- Adopté.


« Art. 9. Statistique : fr. 23,000. »

- Adopté.

Chapitre II. Administration du trésor dans les provinces

Articles 1 et 2

« Art. 1er. Traitement des directeurs : fr. 86,550. »

- Adopté.


« Art. 2. Service de la caisse de l'Etat : fr. 250,000. »

- Adopté.

Chapitre III. Administration des contributions directes, cadastre, douanes et accises, de la garantie des matières d’or et d’argent, etc.Article premier

« Art. 1er. Service sédentaire : fr. 872,500. »

M. le ministre des finances (M. Malou). - Messieurs, c'est par erreur que la section centrale a porté la réduction de 12,000 fr. sur l'article 2 du chap. IlI ; c'est à l'article premier que la question se rattache et doit être discutée.

(page 397) Messieurs, à l'article premier, service sédentaire, le gouvernement propose une somme de 872,500 francs. Le motif de la réduction est que la partie de cette somme qui a été affectée jusqu'à présent au payement des indemnités pour leges se serait successivement diminuée.

Il me serait impossible de consentir à cette réduction de 12,000 francs ; que la chambre veuille bien le remarquer, il ne s'agit pas d'une augmentation ; il s'agit du maintien du chiffre voté au budget de l'année dernière.

Ce maintien est indispensable. Déjà l'on a fait connaître à la chambre, lors de la discussion du budget de 1843, qu'un crédit qui lui avait été demandé pour l'organisation de services spéciaux, ne pourrait suffire aux besoins, qu'autant qu'on put appliquer en même temps aux emplois à créer les fonds disponibles, résultant de l'extinction successive des indemnités du chef des leges. La chambre comprendra que, pour assurer un service dont les attributions sont si variables, le gouvernement doit conserver une certaine latitude. Si les cadres étaient fixés pour le service de l'administration des contributions directes de telle manière que les crédits fussent épuisés jusqu'au dernier centime, il arriverait que peut-être tous les 15 jours je devrais venir demander à la chambre un crédit de 1,200, de 1,500 fr. pour créer temporairement tel ou tel emploi que les circonstances pourraient rendre nécessaire.

J'aime donc à espérer que la chambre allouera le chiffre de 872,500 fr.

M. de Corswarem.- Messieurs, la section centrale n'a pas été d'opinion de réduire absolument de 12,000 francs le chiffre demandé au chapitre III. On lit dans le budget, après l'article premier, ce qui suit :

« Les suppléments de traitement pour pertes résultant de la suppression de leges, accordés à des fonctionnaires et employés de l'administration des contributions, ne pourront être imputés sur l'article 1er que jusqu'à concurrence d'une somme totale de 37,000 francs. »

Cette somme totale ne se trouve qu'en tenant inoccupés des emplois qui deviennent vacants : les surnuméraires qui remplissent ces fonctions ne touchent pas le traitement entier des titulaires. Ainsi ces emplois inoccupés laissent tous les ans un excédant disponible de 37,000 francs ; c'est sur cet excédant qu'on prend la somme nécessaire pour payer à ceux qui jouissaient antérieurement d'un supplément de traitement pour leges, une indemnité équivalente à ces leges ; or, d'après un état qui a été fourni par M. le ministre des finances, il ne faut plus annuellement que 21,865 fr.

Il se trouvait donc disponible sur 35,000 fr. une somme de 15,135 fr. La section centrale a voulu laisser au ministre une latitude de 3,135 fr., et n'a réduit le chiffre que de 12,000 fr. Il serait plus rationnelle, je crois, d'allouer la somme entière, en disant qu'on ne pourra allouer d'indemnités du chef de perte de leges, que jusqu'à concurrence de 25,000 fr.

De cette manière les 12,000 fr. que la section centrale proposait de retrancher, resteraient au trésor. Il se peut qu'il n'y ait pas tous les ans un excédant de 12,000 fr., si les emplois sont occupés au fur et à mesure qu'ils deviennent vacants, on pourrait donc maintenir le crédit entier. En posant la limite de 25,000 fr. que j'ai indiquée, le ministre aurait encore 3,000 fr. de plus qu'il ne lui faut d'après son tableau. Le surplus resterait au trésor.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Je me vois obligé de reproduire mon observation. Elle tendait à démontrer que la réduction compromettrait le service, ou que je serais forcé de venir chaque jour demander un crédit de 1,600 fr. pour un vérificateur de douane. Voici ce qui s'est passé : la chambre a voulu que l'indemnité accordée pour perte de leges fût réduite successivement à mesure que les fonctionnaires y ayant droit seraient mis à la retraite ou déplacés. Quand cette disposition a été prise, le chiffre était de 37,000 fr. ; aujourd'hui, en exécution des engagements qui ont été pris, et que l'on a rigoureusement observés, le chiffre est réduit à 21 mille et quelques cents francs.

Je ne m'oppose pas à ce qu'on mette une limite aux indemnités pour perte de leges, mais à ce qu'on réduise le chiffre total, parce que cela m'empêcherait de satisfaire aux nécessités du service. Ainsi pour le service des bateaux à vapeur, je devrai créer une nouvelle place de vérificateur de douane ; si le chiffre est réduit, je serai forcé de laisser des postes dégarnis ou de venir, à chaque mutation, demander la somme nécessaire pour payer des employés inférieurs de l'administration des douanes ; ce qui nuirait à la bonne administration et entraverait les travaux de la chambre.

M. de Corswarem. - Je n'ai pas reçu mission pour parler au nom de la section centrale ; mais si on limite à 25 mille francs la somme à allouer pour indemnité de perte de leges, on peut voter tout le crédit demandé.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Il est indifférent de réduire le chiffre, car dans l'état de la législation il est impossible d'accorder de nouveaux leges ; on doit supprimer ceux qui existent quand le fonctionnaire qui en jouit est mis à la retraite ou changé de position. Ou pourrait limiter à 22,000 fr. les indemnités pour perte de leges, mais la réduction du chiffre ne peut être prononcée sans entraîner les inconvénients que j'ai signalés.

- Le chiffre est adopté.

Article 2

« Art. 2. Remises et indemnités, 1,710,000 fr. »

M. Osy. - Il est un arrêté de 1833 qui règle les remises et indemnités des fonctionnaires. Dans plusieurs occasions, j'ai dit que le gouvernement ne s'en tenait plus à cet arrêté, et qu'il ferait très sagement d'examiner s'il est applicable encore, et de faire paraître un règlement définitif au moyen duquel chacun saurait à quoi s'en tenir ; car, dans l'étal de choses actuel, il y a beaucoup de faveurs pour les uns et de défaveurs pour les autres ; car des personnes dont la recette s'élève à cinq ou six millions, ne reçoivent que 12,000 fr. d'émoluments, tandis que d'autres, dont la recette ne s'élève qu'à cinq ou six cent mille francs, en reçoivent 9,000. Je demande donc que l'arrêté de 1833 soit revu, et que le nouveau règlement soit appliqué d'une manière uniforme.

La somme allouée pour indemnités est répartie d'une manière inexacte ; tantôt des receveurs de douanes n'ont que 200 fr. d'indemnité, tandis que le brigadier peseur en reçoit 600 et des vérificateurs deux mille. Je demande qu'un règlement soit établi pour faire cesser les faveurs qui existent en grand nombre ; car je vous occuperais pendant plus d'une heure, si je vous signalais celles qui sont à ma connaissance.

M. le ministre des finances (M. Malou). - J'ai prévenu le désir de l'honorable membre ; déjà je me suis occupé et très longuement de l'étude du système de rémunération, de cette vaste hiérarchie de fonctionnaires publics. Je reconnais, non qu'il y a quelque chose à faire, mais qu'il y a beaucoup à faire, et je ne désespère pas de régulariser tout ce qui peut paraître anormal, tout en laissant subsister quelques différences relativement à certains principes dont l'application trop absolue ne serait pas sans inconvénients. Ainsi je n'hésite pas à dire que dans toutes les organisations, il devra y avoir des maximum absolus ; et le fonctionnaire dont a parlé l'honorable préopinant, qui n'a que 12 mille francs, n'aura encore que 12 mille francs.

Cette question est très vaste quand il s'agit d'une administration composée de six mille et quelques cents fonctionnaires et employés ; mais l'organisation du personnel et du mode de rémunération a déjà fait l'objet d'un examen, d’une étude très approfondie de ma part.

- L'article 2 est mis aux voix et adopté.

Articles 3 à 8

« Art. 3. Service actif : fr. 501,200. »

- Adopté.


« Art. 4. Douanes : fr. 3,950,200. »

- Adopté.


« Art. 5. Accises : fr. 759,900. »

- Adopté.


« Art. 6. Garantie : fr. 43,860. »

- Adopté.


« Art. 7. Poids et mesures : fr. 52,100. »

- Adopté.


« Art. 8. Avocats de l'administration : fr. 35,670. »

- Adopté.

Article 9

« Art. 9. Frais de tournée : fr. 189,850. »

M. Osy. - Je crois que le gouvernement doit faire paraître un tarif pour frais de tournée. Depuis la création du chemin de fer, les voyages coûtent beaucoup moins, et cependant on paye les frais de tournée sur le même pied qu'avant. (Non ! non !) Cependant nous n'avons pas vu l'arrêté qui fixe le tarif des frais de tournée. Nous avons vu un arrêté du ministre de la justice et un autre du ministre des travaux publics ; j'engage M. le ministre des finances, dont les employés voyagent beaucoup, à porter également un arrêté sur cette matière.

M. le ministre des finances (M. Malou).- Déjà, l'année dernière, la même observation a été faite ; il a été répondu que les arrêtés nouveaux qui avaient pris en considération les nouveaux moyens de transport avaient été adoptés. On a réduit les indemnités de voyage toutes les fois que le chemin de fer a pu être utilisé.

M. Osy. - Cependant le chiffre reste le même pour les frais de tournée.

M. le ministre des finances (M. Malou). - J'explique pourquoi le chiffre reste le même, c'est parce que depuis longtemps il a été fixé d'après les réductions effectuées par le gouvernement.

- L'article 9 est adopté.

Articles 10 à 13

« Art. 10. Indemnités : fr. 291,200. »

- Adopté.


« Art. 11. Matériel : fr. 140,000. »

- Adopté.


« Art. 12. Indemnités pour transcriptions, etc. : fr. 32,000 »

- Adopté,


« Art. 13. Entrepôt d'Anvers : fr. 31,000. »

- Adopté.

Chapitre IV. Administration de l’enregistrement, des domaines et des forêts

Article premier

« Art. 1er. Traitement du personnel de l'enregistrement : fr. 356,290. »

- Adopté.

Article 2

« Art. 2. Employés du timbre : fr. 54,700. »

La section centrale propose sur cet article une réduction de 3,500 fr.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Malgré les rotes de la chambre, comme il existe pour ce crédit des motifs spéciaux, je viens encore les expliquer et, en exécution de ce que je considère comme un devoir, soutenir la proposition primitive que j'ai faite.

Cette demande de 3,500 fr., je le déclare très franchement, a tout entière pour objet des augmentations de traitement ; elle a pour objet de donner cent francs d'augmentation à 35 fonctionnaires du timbre qui jouissent aujourd'hui, dans les résidences principales du royaume, d'un traitement qui varie de 6 à 9 cents francs, fonctionnaires qui sont obligés de consacrer tout leur temps au service de l'Etat.

M. Zoude, rapporteur. - J'ajouterai que c'est à la majorité d'une voix que l'augmentation a été rejetée. Comme c'est une question d'humanité, j'appuie le chiffre proposé par le gouvernement.

- Le chiffre de 54,700 fr. est mis aux voix ; deux épreuves sont douteuses ; ce chiffre est mis aux voix par appel nominal.

Voici le résultat du vote :

(page 398) Nombre des votants 56.

25 membres votent pour l'adoption.

31 votent contre.

La chambre n'adopte pas.

Ont voté pour : MM. de Garcia de la Vega, de La Coste, de Meer de Moorsel, de Meester, de Mérode, de Saegher, de Sécus, Desmaisières, de Terbecq, de Theux, d'Huart, Donny, Dubus aîné, Fallon, Lejeune, Liedts, Malou, Mercier, Orban, Orts, Pirson, Zoude, Brabant, Clep et David.

Ont voté contre : MM.de Corswarem, de Foere, de Haerne, Delfosse, d'Elhoungne, de Man d'Attenrode, de Smet, de Tornaco, Dumont, Eloy de Burdinne, Fleussu, Huveners, Lesoinne, Loos, Lys, Manilius, Mast de Vries, Osy, Rodenbach, Scheyven, Sigart, Simons, Troye, Vanden Eynde, Verhaegen, Veydt, Anspach, Biebuyck, Cans, de Bonne, et de Breyne.

L’article 2 est adopté avec le chiffre de 51,200 fr.

Article 3

« Art. 3. Employés du domaine 79,900 fr. »

La section centrale propose une réduction de 2,700 fr.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Je me rallie à cette réduction..

- L'article est adopté avec le chiffre de 77,200 fr.

Articles 4 à 6

« Art. 4. Agents forestiers: fr. 243,600. »

- Adopté.


« Art. 5. Remises des receveurs : fr. 849,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Remises des greffiers : fr. 41,000. »

- Adopté.

Article 7

« Art. 7. Frais de bureau des directeurs : fr. 22,000. »

- La section centrale propose une réduction de 2,000 fr.

M. le ministre des finances (M. Malou). - Les directeurs en province ont des frais de bureau positivement inférieurs aux dépenses réelles. Cependant par suite des circonstances, tout en déclarant que ce crédit est parfaitement justifié, je m'étais déterminé, avant même le commencement de la discussion, à ajourner cette augmentation jusqu'à l'année prochaine.

- L'article est adopté avec le chiffre de 20,000 fr.

Articles 8 à 11

« Art. 8. Matériel : fr. 32,000. »

- Adopté.


« Art. 9. Frais de poursuites et d'instances : fr. 55,000. »

- Adopté.


« Art. 10. Dépenses du domaine : fr. 78,000. »

- Adopté.


« Art. 11. Palais de Bruxelles et de Tervueren : fr. 23,800. »

- Adopté.

Chapitre V. Pensions et secours

Articles 1 et 2

« Art. 1er. Pensions civiles : fr. 1,175,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Secours à des employés : fr. 5,000. »

- Adopté.

Chapitre VI. Dépenses imprévues

Articles 1 et 2

« Art. 1er. Dépenses imprévues : fr. 14,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Travail extraordinaire : fr. 4,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des crédits

Chapitre premier. Non-valeurs

Articles 1 à 5

« Art. 1er. Non-valeurs sur le foncier : fr. 300,000. »

-Adopté.


« Art. 2. Non-valeurs sur l'impôt personnel : fr. 370,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Non-valeurs sur les patentes : fr. 80,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Décharge ou remise aux bateliers en non-activité : fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Non-valeurs sur les redevances des mines : fr. 16,000. »

- Adopté.

(Les crédits portés au présent chapitre ne sont point limitatifs.)

Chapitre II. Remboursements

Articles 1 à 4

« Art. 1er. Restitutions de droits et amendes et intérêts y relatifs, de frais d'adjudication et de façons d'ouvrages brisés : fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Restitutions d'impôts, péages, capitaux, revenus, remboursements, amendes et payement d'intérêts, frais d'adjudication et charges des successions vacantes ou en déshérence, etc. : fr. 250,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Remboursements de postes aux offices étrangers : fr. 150,000. »

- Adopté.

« Attributions d'amendes forestières »

(Crédit transféré au budget des dépenses pour ordre, chapitre III, art. 1er.)


« Art. 4. Déficit de comptables (anciens et nouveaux) pour mémoire. »

(Les crédits compris au présent chapitre ne sont point limitatifs.)

Chapitre III. Péages

Article unique

« Article unique. Remboursement du péage sur l'Escaut : fr. 800,000. »

- Adopté.

(Le crédit compris au présent chapitre n'est point limitatif.)

Discussion du tableau des crédits (dépenses pour ordre)

Chapitre premier. Trésor public

Articles 1 à 8

« Art. 1er. Cautionnements versés en numéraire dans les caisses du trésor public de la Belgique, par des comptables de l'Etat, par des receveurs communaux, des receveurs de bureaux de bienfaisance, des préposés aux bureaux de station de l'administration du chemin de fer, etc., pour garantie de leur gestion, et cautionnements fournis par des contribuables pour garantie du payement de leurs redevabilités en matière de douanes, d'accises, etc. : fr. 1,000,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Caisse des veuves des fonctionnaires civils : fr. 750,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Caisse des veuves et orphelins des officiers de l'armée : fr. 160,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Caisse de prévoyance des instituteurs primaires : fr. 65,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Commission des secours : fr. 25,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Masse d'habillement et d'équipement de la douane : fr. 300,000. »

- Adopté.


« Art. 7. Subsides offerts pour construction de routes : fr. 400,000. »

- Adopté.


« Art. 8. Parts des communes dans les frais de confection des atlas des chemins vicinaux : fr. 90,000. »

- Adopté.

Chapitre II. Contributions directes, cadastre, douanes et accises

Articles 1 à 8

« Art. 1er. Produit des amendes, saisies et confiscations opérées par l'administration des contributions : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Expertise de la contribution personnelle : fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Produit d'ouverture des entrepôts : fr. 14,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Recouvrement d'impôts en faveur des provinces : fr. 6,734,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Recettes en faveur des communes : fr. 1,950,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Taxe provinciale sur les chiens : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Art. 7. Taxe provinciale sur le bétail : fr. 125,000. »

- Adopté.


« Art. 8. 4 et 5 p. c. au profit des villes de Liège et Verviers, pour pillages : fr. 18,500. »

- Adopté.

Chapitre III. Fonds de tiers. Enregistrement, domaines et forêts

Articles 1 à 3

« Art. 1er. Amendes diverses et autres recettes soumises aux frais de régie : fr. 100,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Amendes de consignations et autres recettes non assujetties aux frais de régie : fr. 600,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Recouvrement de revenus pour compte de provinces : fr. 495,000. »

Chapitre III. Fonds de tiers. Consignations

Articles 4 et 5

« Art. 4. Consignations diverses. (Loi du 26 nivôse an XIII) : fr. 800,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Consignations à titre de dépôt : fr. 1,000. »

- Adopté.

- Le second vote du budget est renvoyé à vendredi.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Les sections seront convoquées demain pour s'occuper du projet présenté hier par M. le ministre des affaires étrangères, et apportant des modifications au tarif des douanes. Ce projet sera distribué ce soir ; d'ailleurs, il se trouve déjà dans le Moniteur.

M. Osy. - Je suis obligé de demander à la chambre un congé de 24 heures. J'ai un devoir à remplir envers un défunt. Si donc la chambre a séance demain, je prierai la section centrale qui a examiné le budget des affaires étrangères, de nommer un autre rapporteur pour soutenir la discussion.

Peut-être pourrait-on ne pas avoir séance publique demain, et les sections pourraient ainsi terminer en une réunion l'examen du projet de loi modifiant le tarif des douanes.

M. de Garcia. - M. le ministre de la guerre nous a aussi présenté un projet urgent ; il s'agit de donner du travail à la classe ouvrière. Si la commission chargée d'examiner ce projet était nommée dès maintenant, (page 399) et si nous n'avions séance que vendredi, peut-être cette commission pourrait-elle se réunir dès demain.

J'appuie donc la proposition de l'honorable M. Osy de ne pas avoir séance demain ; nous gagnerons ainsi du temps.

M. le président. - Le projet présenté par M. le ministre de la guerre ne pourra pas être distribué ce soir. Il me paraît donc inutile de nommer aujourd'hui la commission qui sera chargée de l'examiner.

- La chambre consultée, décide qu'elle n'aura pas séance demain.

M. Cans. - J'avais l'intention d'adresser aujourd'hui une interpellation à M. le ministre de l'intérieur. Comme il n'est pas présent, je le ferai après-demain.

Plusieurs membres. - Sur quel objet ?

M. Cans. - Sur la convention intervenue entre le collège échevinal et l'ordinaire diocésain de Tournay.

- La séance est levée à 4 heures et demie.