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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 13 janvier 1846

(Annales parlementaires de Belgique, session 1845-1846)

(Présidence de M. Liedts.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 381) M. Huveners fait l'appel nominal à 2 heures et 1/4.

M. de Man d’Attenrode lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Huveners présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le sieur Jean-Antoine Clœser, sergent à la première compagnie du dépôt du 4e régiment d'infanterie, né à Smari (Tyrol), demande la naturalisation ordinaire. »

« Même demande du sieur Heere Arendt, capitaine de navire à Anvers, né à l’île de Juist (Hanovre). »

« Du sieur Adolphe Legrand, ancien instituteur communal à Templeuve, né à Ennevelin (France). »

« Du sieur Wagner, demeurant à Bruxelles, né à Ixite (grand-duché de Luxembourg). »

« Du sieur Eugène-Pierre-Joseph Midon, employé au gouvernement provincial du Brabant, né à Gondreville (France). »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Plusieurs négociants de Wavre demandent la révision de la législation des faillites et des sursis, »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« La dame Bolbaert, ancien receveur de la loterie royale de Bruxelles, demande une augmentation de pension. »

- Même renvoi.


« Le sieur Sotteau, major pensionné, prie la chambre de lui faire restituer la retenue qui a été opérée sur sa solde depuis le 1er janvier 1840 jusqu'au 1er novembre 1841. »

- Même renvoi.


« La chambre de commerce et des fabriques de Tournay présente des observations concernant (es modifications demandées à la loi sur les sucres. »

- Même renvoi.


« Le conseil communal de Gand prie la chambre de modifier la loi sur les sucres, et de décréter, en attendant, des mesures de protection en faveur du sucre exotique. »

- Même renvoi.


« La dame Livine Nolerman, cultivatrice à Eenaeme, réclame l'intervention de la chambre pour faire revenir en Belgique les orphelins de Donder, laissés momentanément à New York par leur père, son beau-fils, à son retour de Guatemala. »

- Même renvoi.


« Des maîtres bottiers, selliers et tailleurs établis à Bruges et à Gand, réclament l'intervention de la chambre pour que le département de la guerre ne donne pas suite à une résolution récente en vertu de laquelle les effets nécessaires à l'équipement de la gendarmerie nationale devraient être exclusivement confectionnés à Bruxelles. »

- Même renvoi.


« Plusieurs habitants des communes de Ville Handleman et de St-Pancré, département de la Moselle, propriétaires de terrains enclavés dans les territoires de Signeulx et de St-Remy, sections de la commune de Bleid, canton de Virton, demandent que ces deux sections soient érigées en une commune dont le chef-lieu serait à Signeulx. »

- Même renvoi.


« Plusieurs commerçants de la ville de Peruwelz demandent la réforme postale, basée sur la taxe uniforme de dix centimes. »

« Même demande de plusieurs habitants de Marche et de St-Hubert. «

- Renvoi à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport.


« Les porteurs du Moniteur réclament l'intervention de la chambre pour que leur traitement soit maintenu. »

- Renvoi à la section centrale du budget de la justice.


« Les sieurs Deconinck, Charles et Emmanuel Van Autreve et Laroy, ouvriers attachés à la station du chemin de fer à Deynze, demandent qu'on améliore leur position. »

- Renvoi à la section centrale du budget des travaux publics.


« Plusieurs propriétaires de biens situés dans le bassin de Deynze, demandent la construction d'un canal de dégorgement de la Lys à Deynze, au canal de Gand à Bruges. »

- Même renvoi.


« La veuve du sieur Jacques-François Loos, docteur en médecine, décoré de la Croix de Fer, prie la chambre de lui accorder la pension civique de 400 francs. »

- Renvoi a la section centrale du budget de l'intérieur.


« Plusieurs habitants de Petit Halle demandent la prompte construction de la route de Hannut à Landen par Lincent. »

« Même demande des habitants de Wanzin et de Grand-Hallet. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Par divers messages le sénat informe la chambre qu'il a adopté :

« 1° Divers projets de loi de crédits provisoires et de crédits supplémentaires ;

« 2° Le budget des voies et moyens pour 1846 ;

« 3° Le projet de loi fixant le contingent de l'armée pour 1846 ;

« 4° Le projet de loi prorogeant la loi relative à la réduction des péages sur les canaux et rivières ;

« 5° Le projet de loi concernant le traité conclu avec les Etats-Unis ;

« 6° Le projet de loi prorogeant la loi qui autorise le gouvernement à modifier le régime d'importation en transit direct et en transit par entrepôt ;

« 7° Le budget de la dette publique et des dotations pour 1846. »

- Pris pour notification.


« Par dépêche en date du 23 décembre, M. le ministre de la justice transmet à la chambre 97 exemplaires de l'enquête sur la situation des monts-de-piété du royaume. »

- Dépôt à la bibliothèque et distribution à MM. les membres de la chambre.


« Par dépêche en date du 27 décembre, M. le ministre des finances transmet à la chambre 110 exemplaires du tableau général du commerce de la Belgique avec les pays étrangers pendant l'année 1844. »

- Même décision.


« Le sieur Coppé, auditeur militaire de la Flandre occidentale, soumet à la chambre le fruit de ses réflexions sur la révision de l'organisation des tribunaux militaires et celle de la législation militaire. »

« Il est fait hommage à la chambre, par M. Jobard, de deux exemplaires du Bulletin du Musée de l'Industrie (3 livraisons de 1845). »

- Dépôt à la bibliothèque.


M. de Villegas informe la chambre qu'il est retenu chez lui par une indisposition.

- Pris pour information.

Projet de loi modifiant le tarif des douanes, à l'égard des Pays-Bas

Dépôt

M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - Messieurs, je suis chargé par le Roi de présenter à la chambre un projet de loi modifiant le tarif des douanes. La chambre me permettra sans doute de lire l'exposé des motifs de ce projet de loi. (Oui ! oui !)

Messieurs, dans le rapport que mon prédécesseur au ministère des affaires étrangères a présenté aux chambres, dans le comité général du 24 avril1844, il a fait connaître les difficultés qui entouraient la négociation commencée avec le gouvernement des Pays-Bas.

Ces difficultés que les circonstances nous avaient léguées et dont nous ne nous dissimulions pas la gravité, n'auraient pu être heureusement résolues que par beaucoup de modération dans les prétentions réciproques et par un vif désir de rapprochement.

Le gouvernement belge avait ce désir ; et l'exposé des faits que je suis chargé de vous présenter, messieurs, vous dira s'il était possible d'user de plus de modération que nous ne l'avons fait, sans compromettre notre dignité et nos intérêts.

Les actes d'hostilité commerciale que le gouvernement des Pays-Bas vient de poser contre la Belgique ne vous paraîtront justifiés, ni par l'arrêté du 29 décembre dernier qui, de fait, a consacré le maintien partiel des faveurs exceptionnelles, ni par le principe que nous avons tâché de faire prévaloir dans la dernière négociation.

Ces actes d'une rigueur inattendue ont entraîné le gouvernement belge, malgré lui, à suivre le gouvernement des Pays-Bas sur un terrain dangereux sans doute, mais sur lequel nous devions nous placer pour ne pas compromettre les résultats de la négociation et pour abréger la durée même de ce dissentiment.

La pensée qui a dirigé la conduite du cabinet de La Haye a été rendue publique ; celle qui a dirigé la nôtre doit l'être aussi, non que nous sentions le besoin d’une justification dont nous pouvions remettre le soin à l'avenir, mais dans l'intérêt même des négociations que cette explication calme et publique sur les intentions conciliantes du gouvernement belge peut faire renouer plus tôt. C'est notre espérance et notre but.

Pour faire apprécier exactement l'état dans lequel le ministère actuel a trouvé la négociation engagée avec les Pays-Bas, je crois utile de jeter un coup d'œil rapide sur le passé.

Les actes de représailles qui viennent d'être adoptés contre la Belgique n'ont pas pour cause, on l'a clairement reconnu, un fait isolé comme le seraient l'arrêté du 29 décembre ou même la loi du 21 juillet ; mais ils servent de protestation contre ce qu'on a appelé la politique commerciale de la Belgique depuis quinze ans.

Cette politique que vous avez sanctionnée par des votes, nous vous la rappellerons brièvement, et l'on s'étonnera que les plaintes soient soulevées contre elle par le pays qui possédait sur le marché belge des privilèges importants et sans compensations, et dont les échanges avec la Belgique se balancent par un chiffre en moyenne de 8 à 10 millions de francs en sa faveur.

Après les événements de 1830, les produits belges furent frappés en Hollande de surtaxes et de prohibitions. Les colonies néerlandaises furent fermées aux marchandises et au pavillon belges.

Cette situation violente fut maintenue jusqu'au traité de paix de 1830.

(page 382) La Belgique pouvait légitimement prendre des mesures analogues ; elle s'en abstint cependant, et le marché belge resta l'un des débouchés les plus importants pour la Hollande et pour ses colonies dont l'accès était interdit aux produits de la Belgique.

Si j'insiste sur ce fait, c'est parce qu'il prouve, d'abord, de quel esprit de conciliation le gouvernement belge a été animé alors que les circonstances semblaient lui conseiller une autre conduite, et en second lieu, parce que ce fait détruit la supposition trop souvent reproduite que la Belgique, dans les divers changements apportés à sa législation, avait spécialement en vue de nuire au commerce des Pays-Bas.

La Belgique constituée en Etat indépendant avait à satisfaire aux exigences de son existence nouvelle. Or, le système commercial établi avant les événements de 1830 en vue d'autres intérêts, ne répondait pas à ces exigences.

Le gouvernement des Pays-Bas avait même reconnu que le tarif de 1822 approprié plus spécialement aux besoins du commerce, ne pouvait suffire aux intérêts industriels des provinces méridionales du royaume ; on eut recours, comme compensation, à l'établissement de primes et de subsides pour protéger l'industrie.

Nous n'avons pas à juger ce système et l'application qui en a été faite, mais son adoption prouve que le gouvernement des Pays-Bas avait compris, en 1822, la nécessité d'admettre le principe de protection industrielle qu'il semble reprocher, cependant, au gouvernement belge d'avoir mis en pratique dans des circonstances plus impérieuses.

La pensée qui a présidé à la réforme lente et modérée de notre législation commerciale, est puisée uniquement dans l'intérêt du pays, comme cet intérêt a été le seul guide de la Néerlande dans la politique commerciale qu'elle a adoptée. Les comparaisons ne peuvent être rationnellement établies entre les systèmes de douane des différents pays, puisque ces systèmes sont destinés à satisfaire à des intérêts distincts. Chaque nation règle sa législation intérieure selon les nécessités et les convenances de sa position ; et les autres nations doivent respecter l'usage de ce droit d'indépendance législative, jusqu'au moment où des mesures prises auraient un caractère d'hostilité particulière contre elles.

C'est ce que le gouvernement des Pays-Bas paraît avoir méconnu.

L'ouverture de la session des chambres belges de 1843-1844 allait avoir lieu, et celles-ci devaient discuter les résultats de l'enquête commerciale et le projet de loi des droits différentiels qui en était la conséquence.

Dans l'intervalle des deux sessions législatives, un arrêté royal fut pris le 14 juillet qui élevait le tarif reconnu insuffisant sur les fils et les tissus de laine, sur les tapis et autres objets.

Le gouvernement néerlandais présenta des réclamations contre le droit nouveau sur les tapis. Il se montra, en outre, préoccupé de l'établissement éventuel des droits différentiels en Belgique. Il semblait avoir la pensée qu'à la suite des arrangements intervenus entre les deux pays, par les traités de 1839 et de 1842, la Belgique s'était interdit de modifier sa législation commerciale dans ses rapports avec les Pays-Bas.

C'est dans ce sens que fut conçue une note remise par le ministre des Pays-Bas, sous la date du 19 novembre 1843. M. Rochussen déclarait en même temps que, si le principe des droits différentiels était admis en Belgique, son gouvernement se verrait obligé de frapper, à son tour, les produits belges à leur importation dans les Pays-Bas, de même que dans ses colonies, de certains droits différentiels. Cette note du 19 novembre fut communiquée à la chambre par mon prédécesseur, et déposée sur le bureau à l'appui de l'exposé qu'il a présenté dans le comité général qui a précédé la discussion de la loi du 21 juillet.

Dans cette note du 19 novembre 1843, le cabinet de fa Haye se borne à demander le maintien du statu quo commercial tel qu'il existait lorsque les traités de 1839 et de 1842 furent conclus ; et c'est parce que l'arrêté du 14 juillet et le projet de loi relatif aux droits différentiels devaient avoir pour effet, selon lui, d'altérer ce statu quo, qu'il éleva des réclamations.

Vous remarquerez, messieurs, que plus tard, après que les satisfactions demandées sur ces deux points furent données, en grande partie du moins, la thèse changea ; et dans sa note du 16 août 1844, M. Rochussen fait remonter les griefs bien au-delà du traité de paix, pour atteindre les lois de 1834 et de 1835.

Des pourparlers eurent lieu après la remise au cabinet belge de la note du 19 novembre 1843 ; ils eurent surtout pour objets l'arrêté du 14 juillet et le projet de loi concernant les droits différentiels.

Le gouvernement belge s'engagea à proposer aux chambres de rétablir le droit antérieur à l'arrêté du 14 juillet pour les tapis de poil de vache qui constituent une branche importante de l'industrie néerlandaise. Cette promesse a été remplie depuis.

Le ministère belge fit connaître aussi à M. Rochussen, dans plusieurs conférences, son intention d'atténuer les effets qui pourraient résulter pour le commerce hollandais de l'établissement des droits différentiels.

Pour réaliser cette intention, le cabinet belge maintint les droits existants sur plusieurs articles de provenance néerlandaise, comme l'étain et l'indigo ; il établit un régime de transition de 4 ans pour l'augmentation des droits sur les sucres et il se réserva de comprendre dans un traité l'exception plus importante relative au café de Java.

Le gouvernement du Roi avait consenti à ces concessions, non pas, comme on l'a publié, pour donner à la Hollande un commencement de réparation de griefs anciens, ressuscités depuis, mais il l'avait fait en vue des bonnes relations à entretenir entre les deux pays, relations qu'il voulait consolider, et avec la pensée sans cesse exprimée d'obtenir en retour des compensations équivalentes.

Le ministère belge, en mai 1844, fit un pas de plus dans la voie des concessions. Il renonça au projet de réserver l'exception relative au café Java pour le traité à conclure ; il se décida à introduire cette exception dans la loi même.

Un article de la loi du 21 juillet permit l'importation d'une quantité limitée de café des Indes néerlandaises, aux droits fixés pour l'importation faite des pays de production sous pavillon belge.

Une autre disposition de la loi consacra une exception analogue pour l'introduction d'une certaine quantité de tabac importée des Pays-Bas par la Meuse.

Seulement on ne donna à ces dispositions qu'une durée temporaire de un ou de deux ans, afin de bien constater que ces faveurs n'étaient accordées que dans le but d'amener le cabinet de La Haye à négocier, pour en obtenir le maintien par un traité.

La loi différentielle rédigée dans un esprit de ménagement à l'égard du commerce des Pays-Bas et consacrant le régime exceptionnel dont je viens de parler, bien loin de nuire aux intérêts néerlandais, leur créait une position meilleure sur le marché belge.

En effet, par suite de ces dispositions, le commerce des Pays-Bas se trouvait, non seulement désintéressé, mais il était associé, en quelque sorte, aux avantages que le régime des droits différentiels avait pour but d'établir en faveur du commerce national.

D'abord, le café Java importé des entrepôts des Pays-Bas était soumis à des droits moindres que le café brésilien importé directement du Brésil même par navire de ce pays de production, tandis que sous la législation ancienne le même droit frappait les cafés de ces deux provenances. En second lieu, les entrepôts néerlandais étaient garantis, par l'exception admise, contre la concurrence des entrepôts de l'Angleterre, de la France et des villes hanséatiques, concurrence qui existait avant la loi du 21 juillet.

En examinant impartialement les faits, on devra donc reconnaître que le gouvernement belge a accordé, par la loi de 1844, une position bien préférable au statu quo antérieur à la loi dont le cabinet de La Haye se bornait à réclamer le maintien.

Le gouvernement du Roi pouvait donc croire que sa position à l'égard de la Hollande était régularisée et que les concessions dont il venait de prendre l'initiative formeraient la base d'une convention internationale que l'on négociait.

Cette espérance ne fut pas réalisée. Le 16 août 1844, M. Rochussen remit à M. le comte Goblet, ministre des affaires étrangères, une note qui changea complétement la situation des choses.

Nous avons vu plus haut que M. Rochussen, dans sa note du 19 novembre 1843, invoquait le traité de La Haye du 5 novembre 1842, pour demander que le gouvernement belge ne changeât point dans leur essence, par des dispositions nouvelles du tarif des douanes, les relations qui existent, entre les deux pays. Il ne réclamait dans cette note que contre deux actes, l'un posé et l'autre à poser, et qui altéraient, selon lui, ces relations.

Lorsqu'une satisfaction presque entière eut été donnée à ces réclamations, le cabinet de La Haye, par sa note du 16 août, éleva sur les concessions que nous venions de faire, des prétentions d'une toute autre nature.

Ce ne fut plus le statu quo de 1842 qu'on voulut conserver, ce ne fut plus un acte isolé dont le gouvernement des Pays-Bas se plaignit ; mais il comprit dans ses représentations l'ensemble de notre tarif de douane et spécialement notre législation de 1834 à 1843 sur les céréales, sur le bétail, sur le transit du bétail, sur la pêche, en renouvelant encore ses réserves sur la loi du 21 juillet 1844.

M. Rochussen terminait sa note en déclarant « que le gouvernement néerlandais, avant de prendre des mesures de représailles, avait jugé convenable d'inviter le gouvernement belge à faire connaître ses intentions à l'égard des droits sur les bestiaux, les grains, les tapis et le poisson de mer ou de rivière ; ensuite, en combien il serait disposé à faire droit aux réclamations concernant les droits différentiels lorsqu'il s'agirait de modifier cette loi, comme déjà il en avait manifesté l'intention. »

Ainsi, le régime exceptionnel introduit dans la loi du 21 juillet, en faveur des Pays-Bas, et qui devait non seulement faire cesser le grief que le cabinet de La Haye avait élevé contre cette loi, mais nous servir de moyen de négociation, n'était plus considéré par ce cabinet que comme une mesure incomplète et insuffisante.

Comme si les procédés de modération employés par la Belgique devaient avoir pour effet d'accroître les prétentions de la Néerlande, ce n'est plus seulement contre la loi des droits différentiels que le gouvernement des Pays-Bas s'élève ; il fait remonter ses griefs aux lois de 1834, de 1835, de 1842, et il ne demande rien moins que le renversement de notre politique commerciale tout entière, telle que l'ont créée les besoins de notre situation nouvelle.

Le gouvernement belge répondit à la communication du ministre néerlandais par une note en date du 17 septembre 1844. A chaque allégation, il opposait un ensemble de fails qui la détruisaient. A l'assertion que la législation des douanes avait porté préjudice aux intérêts des Pays-Bas et qu'elle avait eu directement ce but, on opposait des faits qui établissaient clairement la nécessité, au point de vue intérieur, des modifications introduites, et l'on se prévalait avec raison de la conduite tenue par la Belgique, s'abstenant de répondre par des représailles aux hostilités commerciales des Pays-Bas.

Le fait de l'augmentation toujours croissante des importations des Pays-Bas en Belgique, renversait, d'ailleurs, par sa base, la thèse qui était soutenue par le cabinet de La Haye.

De 1838 à 1845, la valeur de ces importations s'était élevée de 27,945,000 fr. à 33,750,000 fr., et elle avait dépassé, chaque année, de (page 383) 8 à 10 millions de fr. la valeur des importations de Belgique dans les Pays-Bas. Les faits étaient encore bien plus significatifs, lorsqu'on s'occupait, en détail, des points qui avaient spécialement donné lieu aux réclamations du cabinet de La Haye. Ainsi, malgré le régime créé pour l'importation du bétail étranger par la loi du 31 décembre 1835. il était entré en 1843, 45,560 têtes de bétail des Pays-Bas, tandis que de 1836 à 1840, la moyenne de l'importation annuelle n'avait pas été de plus de 20,000 têtes. L'importation avait donc doublé.

Un résultat analogue était constaté quant à l'importation des produits de la pêche néerlandaise. Elle représentait en 1837, une valeur de 564,000 fr. seulement ; en 1845 cette valeur s'élevait à 782,000 fr.

Le poisson de mer frais, seule espèce de poisson à l'égard de laquelle la loi du 25 février 1842 avait augmenté les droits d'entrée, avait aussi participé à ce mouvement progressif. Le même résultat eut lieu pour les céréales. Nonobstant la loi du 31 juillet 1834, l'importation s'était élevée depuis 1835 de 14,000,000 kil. à 45,870,000 kil.

Mais, sans tenir compte de ces considérations de fait qui dominaient tout autre moyen d'appréciation, quel était le caractère de ces lois qui provoquaient les réclamations du cabinet de La Haye ? La loi belge sur le bétail était plus modérée que la loi néerlandaise ; la moyenne des droits établis par la première n'excède pas 10 p. c. L'importation du bétail dans les Pays-Bas est soumise à des droits qui s'élèvent de 15 à 20 p. c. Relativement à la pêche, le tarif néerlandais est aussi infiniment plus rigoureux que le tarif belge, puisque, sauf quelques exceptions, il frappe indistinctement de prohibition tout poisson de mer provenant de la pêche étrangère. La loi du 25 février 1842, dont on s'était armé comme d'un grief, n'avait fait que rendre uniforme, dans un but de répression de fraude, les droits d'entrée sur le poisson de mer frais, en prenant pour base la moyenne des droits existants.

La note belge s'occupait aussi du principe des lois sur les céréales dans les deux pays, en rappelant le régime exceptionnel introduit dans nos lois en faveur d'une quantité limitée de céréales d'importation hollandaise. Le cabinet belge revenait sur les considérations qui devaient faire apprécier l'importance des concessions que la loi des droits différentiels a consacrées en faveur du commerce néerlandais. Il terminait en manifestant le vœu d'arriver à la prochaine conclusion d'un arrangement international si désirable dans l'intérêt des deux pays.

Ce désir, exprimé par mon prédécesseur, ne reçut pas l'accueil qu'on pouvait attendre. Après la remise de la note du 17 septembre, le but que l'on cherchait à atteindre sembla reculer de nouveau devant les négociateurs. Toutefois, les pourparlers restèrent engagés.

Le gouvernement des Pays-Bas avait insisté, dans les derniers temps, sur la nécessité de faire disparaître la différence de traitement qui existait entre la frontière hollandaise et les autres frontières pour l'importation du bétail. Une loi fut présentée dans le but de satisfaire à cette demande.

La disposition exceptionnelle pour les céréales du duché de Limbourg fut mise en vigueur par la loi du 31 décembre 1844.

L'énonciation de ces faits suggère une observation qui n'aura pas échappé à la chambre.

Avant l'adoption de mesures récentes, le commerce des Pays-Bas jouissait de privilèges importants sur le marché belge. La loi du 21 juillet 1844, celle du 31 décembre 1844, et la loi présentée le 8 mai 1844 avaient admis un régime exceptionnel pour le café et le tabac importés des Pays-Bas, pour les céréales provenant du duché de Limbourg et pour les tapis de Hollande.

Tandis que la Hollande, en absence même d'un traité de commerce, était en possession d'un traitement différentiel de faveur sur notre marché, nous ne jouissions d'aucun privilège sur le sien ; et d'autres nations, comme l'Angleterre et la France, possèdent en Hollande, en vertu de traités, des avantages spéciaux dont le commerce belge est exclu.

Et cependant, le gouvernement des Pays-Bas, qui a considéré notre tarif de douane et nos droits différentiels comme un obstacle au succès des négociations engagées, n'a pas rencontré ces entraves dans les tarifs prohibitifs de l'Angleterre et de la France et dans le système absolu de protection différentielle en faveur des pavillons de ces nations. Je vous le demande, messieurs, une nation qui voyait écrits dans les chiffres de ses échanges commerciaux avec la Belgique les résultats favorables que nous avons constatés tout à l'heure, et qui jouissait sur notre marché d'un régime d'exception et de faveur pour plusieurs de ses produits les plus importants, cette nation était-elle en droit de se plaindre de notre politique commerciale et pouvait-elle surtout accuser nos lois d'être le résultat d'un système hostile dirigé, en matière de commerce et d'industrie, contre le royaume des Pays-Bas ?

Le 21 juillet 1845, le terme d'une année assigné, comme premier délai, à la durée de la disposition relative aux cafés et au tabac importés des Pays-Bas, était atteint, sans que la négociation eût été suivie de quelques résultats.

C'est ici que vient se placer un fait qui a exercé quelque influence dans la suite de la négociation. Le 19 juin 1845, le gouvernement des Pays-Bas, usant de son droit de modifier sa législation intérieure par mesure d'application générale à tous les pays, comme nous l'avions fait nous-mêmes par la loi du 21 juillet 1844, fil subir des remaniements partiels à son tarif de douane.

Quel était le caractère des dispositions nouvelles en ce qui concerne la Belgique ?

S'il est vrai que quelques-uns de nos produits se trouvèrent favorisés par le nouveau tarif, d'autres, d'une importance plus considérable, furent frappés de droits plus élevés. Les objets placés dans cette seconde catégorie, sont les tissus de coton, de lin et de soie, les fil de lin, le fer et les ouvrages en fer, la clouterie, la cristallerie, les verreries, les meubles, les bières, etc.

En résumé, les produits belges à l'égard desquels le tarif du 19 juin 1845 a opéré des réductions de droits, ne donne lieu qu'à une importation annuelle d'environ 4 millions de francs, tandis que les transactions qui s'effectuent sur ceux de ces produits qui ont été soumis à des droits plus élevés représentent par an une somme de près de 12 millions.

Les réductions admises l’ont été uniquement en vue de l'intérêt même de la Néerlande et en conformité du système général qui y a prévalu ; ce n'était pas une faveur faite à la Belgique. Mais les augmentations de droits dont nos produits furent atteints, lésèrent nos intérêts, modifièrent le statu quo et justifièrent nos réclamations.

Dans cet état des choses, le gouvernement avait à choisir entre deux systèmes.

Il pouvait ou bien prolonger la disposition exceptionnelle, afin de donner à la négociation le temps d'aboutir à un résultat ; ou bien replacer le commerce néerlandais dans le droit commun. Les augmentations de droits introduites par le tarif néerlandais du 19 juin, relatives à divers produits belges, auraient légitimé une décision dans ce sens.

Toutefois le gouvernement belge n'avait pas, à cette époque, perdu l'espoir de voir cette situation s'améliorer ; il pensait même faire servir les changements introduits dans le tarif, le 19 juin, au succès de la négociation. Fidèle à sa politique de modération, il voulut s'assurer, par une nouvelle épreuve, si le cabinet de La Haye ne répondrait pas, par ses actes, à cette politique. Il fut décidé, en conséquence, que l'exception serait maintenue pendant six mois encore.

La décision du gouvernement du Roi à cet égard fut notifiée au gouvernement néerlandais par une note que M. le comte Goblet adressa à M. de Bentinck, le 16 juillet 1845.

Telle était la situation des choses au moment où le ministère actuel prit la direction des affaires.

Sous la date du 4 août 1845, le nouveau ministre des Pays-Bas à Bruxelles répondit à la note du général Goblet du 16 juillet.

Dans cette réponse se trouvaient reproduites toutes les allégations déjà présentées antérieurement et qui avaient été longuement débattues.

Les raisons si concluantes exposées dans la note belge du 16 septembre 1844, et toutes celles développées depuis pour prouver le caractère inoffensif des diverses lois que le gouvernement néerlandais présentait comme hostiles, avaient peu touché le cabinet de La Haye.

La position des deux parties restait donc toujours la même. Le gouvernement belge essaya, dans les pourparlers qui furent repris, de ramener le cabinet de La Haye à des idées plus justes que celles qui avaient été émises dans des communications précédentes.

Lorsque le nouveau cabinet fut convaincu que ses efforts pour faire prévaloir le principe que mon prédécesseur avait considéré comme devant servir de point de départ à un arrangement équitable, ne pouvaient vaincre la résistance du cabinet de La Haye, il jugea nécessaire de présenter une note qui, en servant de réponse à celle de M. le baron de Bentinck, résumait les faits de la négociation au point où elle était parvenue et offrait une base nouvelle sur laquelle cette négociation pouvait être assise.

Deux thèmes opposés avaient été jusque-là défendus par les deux gouvernements.

Le gouvernement belge, en accordant à la Néerlande les exceptions relatives au café Java et au tabac importé par la Meuse, n'avait fait ces concessions qu'en vue de la négociation qui allait se renouer et des compensations à obtenir. Le caractère provisoire des exceptions l'indiquait assez.

Le gouvernement des Pays-Bas ne voulait considérer ces exceptions que comme des faveurs gratuites constituant un commencement de réparation insuffisante, à l'égard des griefs que le cabinet de La Haye avait élevés contre la législation belge.

Il y avait, dans cette manière de voir des deux parties, une divergence radicale ; si chacune d'elle persistait, la controverse pouvait se prolonger indéfiniment.

Pour sortir de ce cercle vicieux, il fallait trouver une base nouvelle de négociation : c'est cette base nouvelle que le gouvernement belge indiqua, dans la note du 25 octobre, prenant encore, cette fois, l'initiative d'une proposition de rapprochement.

Cette base de négociation, il la trouva dans la note de M. le baron de Bentinck du 4 août 1845 et dans le tarif même du 19 juin.

M. le baron de Bentinck avait établi, dans cette note, que « les augmentations de droits dans le tarif du 19 juin étaient d'une application générale et nullement dirigée exclusivement contre la Belgique ; il demandait si les Pays-Bas n'avaient pas le même droit que la Belgique de modifier, d'après leur convenance et leur manière de voir, la législation commerciale du royaume. »

Ce principe, ce n'est pas la Belgique qui en avait contesté l'application, mais bien la Hollande elle-même, dans la note remise au gouvernement belge par M. Rochussen, le 16 août 1844.

Le cabinet belge reconnaissait donc que le gouvernement néerlandais avait eu le même droit que lui de modifier sa législation commerciale ; mais une position bien différente avait été prise par les deux gouvernements : la Belgique avait consacré dans la loi du 21 juillet 1844 une exception importante en faveur des Pays-Bas ; les Pays-Bas n'avaient admis aucune exception en faveur de la Belgique dans le régime du tarif du 19 juin 1845.

(page 384) Dans cette absence de réciprocité se trouvait le point de départ de la négociation. Le gouvernement belge fit toute réserve en ce qui concernait les compensations à obtenir en retour de l'exception accordée pour le café et le tabac d'importation néerlandaise ; mais il porta la négociation sur un autre terrain, où les deux pays pouvaient se rencontrer sans abandonner les prétentions qu'on n'avait pu concilier.

Le gouvernement du Roi n'exigea plus de la Hollande des concessions préalables directement en compensation des faveurs exceptionnelles résultant de la loi du 21 juillet ; il se borna à demander que le cabinet de La Haye, usant des mêmes procédés que la Belgique, admît un traitement exceptionnel pour quelques-uns des produits belges soumis à une aggravation de droits par le tarif du 19 juin 1845.

Ce que le cabinet belge demandait, c'était moins que le statu quo tel qu'il existait avant cette loi du 19 juin.

Le gouvernement belge n'ignorait pas que l'exception que les Pays-Bas consentiraient à établir en faveur de quelques produits belges, n'avait pas une importance équivalente à celle de l'exception concédée provisoirement par la Belgique. Il savait d'avance que de sérieuses objections lui seraient faites en Belgique sur le défaut de réciprocité et de compensation qu'un tel traité renfermerait. Mais, tenant compte des difficultés que cette négociation avait rencontrées et voulant établir sur une base durable nos relations commerciales avec les Pays-Bas, il lui avait paru que les faveurs exceptionnelles qui lui seraient concédées sur quelques articles du tarif du 19 juin, et les réductions d'une application générale dont quelques autres produits belges jouiraient, pouvaient suffire à former le point de départ d'une négociation dont le cadre aurait pu être élargi par des concessions réciproques.

Le gouvernement du Roi avait pensé que le cabinet de La Haye se serait empressé d'accepter une proposition qui lui permettait de s'assurer, pendant la durée du traité, le maintien de l'exception temporaire relative au café et au tabac, sans accorder d'autre compensation que le rétablissement des droits antérieurs au tarif du 19 juin 1845, pour un petit nombre de nos articles frappés par ce tarif.

Le gouvernement insistait de nouveau auprès du cabinet de La Haye sur le terme prochain de la durée de l'exception concernant les cafés et sur l'impossibilité de proroger ce délai en présence de l'élévation des droits d'entrée en Hollande sur la verrerie, les clous et d'autres objets de notre fabrication, et il rappelait, à ce sujet, les dispositions très formelles du dernier paragraphe de l'article 5 de la loi du 21 juillet.

Mais toutes nos communications restèrent sans résultat. Dans une note récente, M. le ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, continuant à se retrancher dans les mêmes arguments, repoussa les propositions faites dans la note belge du 25 octobre, en n'admettant la possibilité d'un arrangement que pour autant que les négociations eussent pour point de départ, soit l'état actuel des choses, soit le tarif qui, en 1830, régissait la matière aussi bien en Belgique que dans les Pays-Bas.

Je n'ai pas besoin de faire remarquer à la chambre que cette proposition nous enfermait dans un cercle d'impossibilités.

Cependant, le gouvernement ne voulut pas qu'on pût lui reprocher d'avoir négligé aucun moyen de diminuer au moins la distance qui séparait sa manière de voir de celle du gouvernement néerlandais.

Comprenant qu'il serait très difficile d'obtenir un résultat positif avant le 31 décembre, et ayant lieu de croire que la fixation d'un terme précis assigné à la solution attendue pouvait exercer une influence défavorable sur l'esprit du cabinet de La Haye, il décida que l'arrêté du 31 juillet serait renouvelé provisoirement pour un certain laps de temps, s'il obtenait, avant le terme fixé par l'arrêté du 21 juillet 1845, une garantie suffisante des intentions du gouvernement des Pays Bas, c'est-à-dire si ce dernier se montrait positivement disposé à régler, par une convention, et la question des sept millions de café de Java, et celle des changements apportés au tarif des douanes néerlandaises par la loi du 19 juin 1845, en adoptant la base du principe de parfaite réciprocité et d'exception commune.

Il s'agissait seulement d'obtenir une manifestation quelconque propre à constater la possibilité d'un accord commun sur le principe engagé dans la négociation

Dans la note qui exprimait notre désir, assurément très modéré, il était dit :

« Il n'entre nullement, d'ailleurs, dans les vues du gouvernement belge qu'un acte tel que celui dont il s'agit impliquât une décision sur les propositions faites, ni sur les limites dans lesquelles la négociation ultérieurs devrait être renfermée, le gouvernement belge étant prêt, au contraire, à suivre le cabinet de La Haye dans un cadre plus large, aussitôt que la question de temps étant résolue, le champ sera libre pour une discussion étendue et approfondie. »

Le gouvernement belge laissait au cabinet de La Haye le soin de choisir la forme que celui-ci croirait la plus propre à nous donner la garantie de ses intentions.

Le gouvernement néerlandais rejeta encore cette proposition ; il déclara de nouveau que, pour conduire les négociations à bonne fin, il fallait y comprendre les concessions du tarif concernant le poisson, le bétail, le transit du bétail, en même temps que des exceptions plus étendues au système des droits différentiels.

Tel est, messieurs, le sens de la dernière communication officielle du cabinet de La Haye.

Nous étions au 22 décembre, le cabinet de La Haye avait successivement repoussé toutes les propositions que le gouvernement belge lui avait faites depuis 1844. La Belgique avait, d'abord, exigé d'une manière absolue des compensations spéciales en retour des exceptions consacrées par la loi du 21 juillet. Elle se borna plus tard à demander qu'une faible partie des augmentations de droits dont plusieurs de ses produits avaient été frappés par la loi du 19 juin 1845, ne lui fussent pas appliquées. Elle alla, pour avoir un motif légitime de proroger l'arrêté du 21 juillet 1845 pendant sept mois, jusqu'à ne réclamer qu'une manifestation rassurante quant an principe de la négociation. Tout cela lui fut refusé, et nous nous trouvions placés devant cette loi du 19 juin qui avait altéré la position d'une manière préjudiciable à l'industrie belge. La Belgique avait pris depuis un an l'initiative de toutes les propositions livrées à l'examen des deux gouvernements. La Hollande s'était bornée à les rejeter toutes, sans en substituer aucune qui fût bien précise. C'est dans cette position que le gouvernement belge s'est trouvé placé au moment où l'arrêté du 21 juillet 1845 expirait.

Le gouvernement belge pouvait faire cesser entièrement ces privilèges ou les restreindre, soit quant à la durée, soit quant au montant du droit, soit pour les quantités admissibles au traitement de faveur ; il pouvait enfin proroger l'exception jusqu'au 1er août 1846, date fixée par la loi des droits différentiels.

Dans sa pensée, la suppression immédiate de l'exception, le rétablissement de la Hollande dans le droit commun aurait pu rendre plus difficile la continuation de la négociation dont il n'avait pas désespéré. Il était à craindre que cette mesure eût été mal interprétée et considérée comme une cause de rupture. Résolu de persévérer dans le système de modération qu'il avait toujours suivi, le gouvernement belge, dans l'intérêt de la négociation, ne voulut pas résoudre au préjudice des Pays-Bas la question de légalité, douteuse peut-être, que pouvaient soulever les augmentations de droits établies par le nouveau tarif hollandais.

La prorogation pure et simple des privilèges accordés par nos lois offrait des inconvénients non moins graves.

Le cabinet de La Haye persistait à soutenir que ces privilèges n'étaient qu'un commencement de réparation de ses griefs contre le système commercial de la Belgique ; il voulait faire accepter, comme base des négociations, le statu quo de 1830 ou l'état actuel des tarifs dans les deux pays ; il demandait enfin que, pour la troisième fois, la Belgique prit seule l'initiative de propositions qui eussent altéré plusieurs de ses lois les plus importantes. Dans ces circonstances, la prorogation pure et simple était impossible. L'on eût paru admettre implicitement que la faveur gratuite accordée par la loi du 21 juillet 1844, en vue de négociations futures, ne pouvait plus exercer sur ces négociations aucune influence : le principe d'une sorte de droit acquis par la Hollande eût été pour ainsi dire sanctionné en fait, sinon expressément reconnu. Le terrain de la négociation que le gouvernement du Roi voulait poursuivre et terminer d'une manière conforme aux intérêts du pays se trouvait changé à son préjudice et sans que l'espoir d'une solution favorable pût encore exister.

Le gouvernement crut devoir se borner à restreindre, par une légère modification, l'étendue du privilège accordé au commerce des Pays-Bas.

L'arrêté du 29 décembre 1845 autorisa, pour les sept premiers mois de l'année courante, l'admission au droit réduit d'une quantité de tabac proportionnelle à la quantité annuelle fixée par la loi, et au droit des provenances directes sous pavillon belge. Pour les cafés, il ne réduisit pas, non plus, les quantités ; mais le droit fut porté de 9 fr. 99 à 11 fr. 50. Cette augmentation d'un centime et demi par kilogramme laissait subsister encore temporairement une réduction de 4 fr. par 100 kil. Les provenances des entrepôts hollandais se trouvaient assimilées aux importations directes sous pavillon étranger.

La chambre n'oubliera pas que le terme fatal assigné à la durée des exceptions concernant le café et le tabac importés de la Hollande était fixé au mois d'août 1846. Par la prorogation pure et simple, nous pouvions peut-être ajourner les difficultés pour quelques mois ; mais était-ce le moyen de les résoudre, et n'était-ce pas renoncer à toute chance de réussite dans la négociation pour laquelle il fallait, de part et d'autre, chercher une autre base ? Les faits qui viennent d'être exposés serviront de réponse à ces questions.

L'on était autorisé à croire que cet acte, inspiré par l'esprit de modération qui n'a cessé d'animer le gouvernement belge, serait apprécié comme il devait l'être ; il ne lésait pas essentiellement les intérêts hollandais ; le traitement privilégié subsistait pour la plus grande partie ; le gouvernement du Roi témoignait, par le fait même, du sincère désir de continuer la négociation commencée.

Cet espoir, fondé sur la nature et la portée de l'acte posé et sur la saine appréciation des intérêts des deux pays, ne s'est pas réalisé. Par arrêté du 5 janvier, le gouvernement des Pays-Bas a augmenté les droits de douanes sur un grand nombre de produits belges ; la plupart des droits sont doublés, quelques-uns sont même portés à un taux beaucoup plus élevé.

La loi du 21 juillet 1844 sur les droits différentiels avait elle-même prévu et déterminé les conséquences légales de mesures de ce genre prises à l'étranger. D'après l'article 3 de cette loi, les faveurs accordées au commerce hollandais devaient cesser de plein droit. Le gouvernement belge, en adoptant l'arrêté du 8 janvier courant, ne fit qu'une application de la loi existante.

Il lui restait à examiner encore si, en présence de la surtaxe énorme et si peu justifiée, établie en Hollande sur la plupart des produits belges, le rétablissement de cet Etat dans le droit commun suffirait aux intérêts actuels et surtout aux intérêts d'avenir du pays.

Sans se dissimuler combien est fâcheuse la nécessité de prendre des mesures de représailles, il a pensé que les droits de la Belgique seraient compromis et que ses intérêts seraient blessés si le commerce et l'industrie des Pays-Bas pouvaient continuer de jouir ici du droit commun, alors que, sans motif, les produits belges se trouveraient en Hollande, par application (page 385) de l'arrêté du 5 janvier, soumis à un régime exceptionnel exorbitant.

Convaincu de la nécessité de ces mesures, il n'a, cependant, pas voulu aller aussi loin que le cabinet de La Haye. L'arrêté du 12 de ce mois a établi sur un plus petit nombre d'articles, faisant l'objet de transactions moins importantes que celles auxquelles donnent lieu les produits compris dans l'arrêté néerlandais du 5 janvier, des augmentations de droits qui ne s'élèvent, en général, qu'à la moitié des surtaxes établies sur les produits belges dans les Pays-Bas.

Cet arrêté du 12 janvier que le gouvernement soumet à votre ratification a été pris en vertu de la loi du 26 août 1822. Si, dans quelques esprits, des doutes pouvaient s'élever sur la légitimité de l'application de cette loi pendant la durée de la session législative, le gouvernement s'empresserait de vous expliquer les motifs qui l'ont porté à poser cet acte et de vous en demander, au besoin, la ratification, comme s'il avait été pris en dehors des pouvoirs qui lui appartiennent. Il est convaincu que des mesures devaient immédiatement être adoptées et mises en vigueur et, qu'en décrétant celles qui sont soumises à votre approbation, il a concilié autant qu'il est possible, les besoins intérieurs de l'industrie et du commerce avec les exigences d'une politique commerciale digne et conforme aux vrais intérêts du pays.

Nous avons l'espoir que les négociations mettront bientôt un terme à des mesures d'un caractère provisoire ; le gouvernement du Roi ne négligera aucune tentative de conciliation pour rétablir avec la Néerlande les relations commerciales réciproquement avantageuses.

(Suit, dans les Annales parlementaires, le texte du projet de loi. Ce texte n’est pas repris dans la présente version numérisée.)

- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ce projet et Je renvoie à l'examen des sections.

M. Delfosse. - Messieurs, ce projet présente un caractère d'urgence ; je demanderai que les sections soient convoquées pour l'examiner aussitôt qu'il aura été distribué.

M. le président. - Les sections seront convoquées aussitôt que le projet aura été distribué.

Projet de loin portant le budget du ministère des finances de l'exercice 1846

Discussion générale

M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du budget du département des finances pour l'exercice de 1846. M. le ministre se rallie-t-il aux propositions de la section centrale ?

M. le ministre des finances (M. Malou). - J’admets deux de ces propositions, l'une en partie, l'autre entièrement ; mais je ne puis me radier aux autres réductions proposées. Je justifierai les chiffres du gouvernement à mesure que les articles seront mis en discussion.

M. le président. - En conséquence, la discussion s'ouvrira sur le projet du gouvernement.

La discussion générale est ouverte.

(page 389) M. Verhaegen. - Messieurs, on nous parle constamment de la nécessité de faire des économies, et voilà que M. le ministre des finances vient nous demander, sur son seul budget, une augmentation de 18,800 fr.

Comme je l'ai dit déjà l'année dernière, je sais qu'à l'administration des finances il y a des employés dont la santé souffre par suite des nombreux travaux dont ils sont chargés, mais c'est précisément pour cela qu'il faut empêcher qu'il n'y ait de sinécures, et que de hauts fonctionnaires, en conservant, dans l'administration centrale, une qualité et un rang tout à fait inutiles, ne viennent prendre une partie des appointements de ceux qui travaillent.

Si le nombre des employés subalternes est insuffisant, que M. le ministre nous présente le cadre de tous les fonctionnaires qu'd croit indispensables à son administration ; nous examinerons ce cadre, nous ferons droit aux réclamations que nous croirons justes ; mais en rayant les noms de certains employés qui ne viennent au ministère que pour toucher leurs appointements, et surtout en supprimant certains emplois qui ne constituent que d'odieuses sinécures, il nous sera permis de rendre justice aux employés subalternes et même d'en augmenter le nombre, sauf à être obligés d'augmenter le chiffre des dépenses.

Chose vraiment extraordinaire, depuis quelques années, il y a eu, surtout en ce qui concerne l'administration des finances, augmentation dans le nombre des employés supérieurs et quelquefois diminution dans le nombre des employés subalternes.

J'ai comparé l'organisation du ministère des finances de 1834 (Moniteur du 18 mai 1834, n° 138), avec l'organisation actuelle, et je me suis convaincu que l'état-major de cette administration n'était pas en rapport avec le cadre de ses officiers et surtout avec sa milice.

Je vais, messieurs, vous soumettre les résultats de mes observations sur les différentes branches de l'administration, et je commence par le secrétariat général :

1° Secrétariat général.

Personnel en 1834.

1 secrétaire général, à fr. 9,000 ;

3 chefs de bureau de fr. 2,800 à 3,200 ;

10 employés expéditionnaires de fr. 600 à 2,200 ;

Personnel en 1845.

1 secrétaire général, à fr. 8,100 ;

1 inspecteur en chef chef de division, à fr. 5,250 ;

1 chef de division, à fr. 5,250 ;

1 inspecteur, à fr. 3,600 ;

1 secrétaire particulier du ministre, à fr. 5,000 ;

7 premiers commis de fr. 1,800 à 2,600 ;

8 deuxièmes commis de fr. 1,100 à 1,900 ;

6 adjoints commis de fr. 600 à 1,000 ;

Il est à remarquer que, depuis 1831, on a réuni au secrétariat général le bureau de la statistique commerciale, composé de dix employés et dirigé par un inspecteur, faisant tous partie de l’administration des contributions directes, douanes et cadastre. Cet inspecteur est devenu inspecteur en chef, chef de division ; pourquoi ce luxe ? Certes, on devra reconnaître qu'il n'y avait aucune nécessité de mettre à la tête du bureau de la statistique un inspecteur en chef et de lui donner un traitement aussi élevé.

Il y a ensuite au secrétariat un chef de division dont les attributions se réduisent à bien peu de choses, car, si mes renseignements sont exacts, il n'est chargé que des budgets et des pensions. Or, tout ce qui concerne les budgets constitue un travail purement matériel, et, quant au bureau des pensions dépendant du secrétariat, c'est un double emploi, puisqu'il y a un bureau des pensions à la dette publique (administration du trésor public), et que tout ce qui concerne les pensions entre dans les attributions de ce bureau.

Je n'entrerai pas dans d'autres détails sur le nombreux personnel du secrétariat général ; la comparaison des personnels de 1834 et 1845 en dit plus que je ne pourrais en dire moi-même : toutefois, je ne puis pas me dispenser de faire remarquer à M. le ministre qu'il est inutile d’avoir un secrétaire général à 8,400 fr. et un secrétaire particulier à 3,000 fr., car l'un ou l'autre constitue un double emploi.

D'ailleurs, les fonctions de secrétaire particulier nous rappellent de trop mauvais souvenirs pour que la chambre soit disposée à les légaliser par son vote. Il y avait aussi naguère au ministère de l'intérieur un secrétaire particulier, mais l'honorable M. Van de Weyer, voulant que dorénavant les affaires de son département se traitassent au grand jour, s'empressa de supprimer cette charge aux applaudissements de la presse tout entière. Pourquoi l'honorable M. Malou veut-il adopter une marche tout à fait différente de celle qui lui avait été tracée par son collègue de l'intérieur ?

2° Administration du trésor public.

Personnel en 1834.

1 directeur d'administration, à fr. 10,500 ;

1 inspecteur du trésor, à fr. 4,000 ;

2 chefs de division, chacun à fr. 5,250 ;

36 chefs de bureau, employés et expéditionnaires de fr. 500 à 3,800.

Personnel en 1845.

1 directeur d'administration, à fr. 10,500 ;

1 directeur, à fr. 7,000 ;

1 chef de division, à fr. 6,000 ;

1 inspecteur en chef, à fr. 5,600 ;

3 inspecteurs de fr. 4,000 à 4,200 ;

8 chef de bureau de fr. 2,600 à 3,600 ;

10 premiers commis de fr. 1,500 à 3,000 ;

11 seconds commis de fr. 1,000 à 2,000 ;

15 adjoints commis de fr. 500 à 900 ;

3 surnuméraires ;

4 employés qui jouissent d'une indemnité par jour.

Cette augmentation de personnel est frappante : je sais que depuis 1834 le gouvernement a contracté des emprunts ; mais ces emprunts n'ont pas pu donner lieu à une augmentation de personnel aussi considérable. Si à chaque emprunt, il y a eu augmentation de travail consistant en confection de titres provisoires et numérotage des titres définitifs, ces travaux ont été exécutés hors des heures de bureau et ont été payés extraordinairement ; il n'y avait donc pas besoin d'augmenter de dix-huit employés le personnel de cette administration.

D'un autre côté, quelle nécessité y avait-il de créer un directeur pour la dette publique, puisque l'administration avait toujours marché, et bien marché, avec un chef de division ? Pourquoi créer un inspecteur en chef, plus trois inspecteurs ? Qu'y a-t-il, en définitive, à inspecter ? D'après l'organisation actuelle, absolument rien.

Les inspections des bureaux des directeurs du trésor en province sont parfaitement inutiles, ce sont des frais de route et de séjour dépensés en pure perte, car les directeurs du trésor envoient mensuellement la copie de leur journal à l'administration centrale ; et en admettant qu'il y eût plus de sûreté pour l'Etat de faire vérifier la comptabilité des agents provinciaux sur les lieux, alors un ou tout au plus deux inspecteurs suffiraient pour les neuf directeurs du trésor.

Enfin parmi les chefs de bureau, il y en a qui n'ont pas de bureau à diriger ; c'est ainsi qu'on forme des états-majors très coûteux au détriment à la fois du pays et des employés subalternes !

Mais indépendamment de ces observations de détails, je crois de mon devoir d'en faire une autre que je crois capitale, puisqu'elle se rattache au mode de recette et de payement des fonds de l'Etat.

Messieurs, nous avons un caissier général, et ce caissier général n'est soumis à aucun contrôle ; il nous donne une situation sur papier et voilà tout.

Nous avons ensuite dans les provinces des directeurs du trésor, dont les fonctions se bornent à délivrer des assignations sur les agents de la banque et sur les receveurs des contributions ; et cette complication des rouages administratifs doublent les frais, sans aucune utilité.

Il est temps d'apporter un remède à cet état de choses.

3° Administration des contributions, douanes et accises.

Personnel en 1834.

1 directeur d'administration, à fr. 9,000 ;

1 inspecteur général, à fr. 8,400 ;

2 inspecteurs chefs de division, à fr. 5,250 ;

32 contrôleurs, employés et expéditionnaires, de fr. 500 à 3,300 ;

Cadastre :

1 inspecteur général, à fr. 8,400 ;

1 inspecteur, à fr. 4,200 ;

6 employés de fr. 1,200 à 3,600.

Personnel en 1845.

1 directeur d'administration, fr. 9,000 ;

2 inspecteurs généraux, chacun, fr. 8,000 ;

1 directeur, fr. 7,000 ;

1 inspecteur en chef, fr. 7,500 ;

2 inspecteurs en chef, fr. 6,000 ;

2 inspecteurs, à fr. 4,500 ;

14 premiers commis de fr. 2.000 à 2,800 ;

19 seconds commis de fr. 1,400 à 2,000 ;

20 adjoints de fr. 800 à 1,500 ;

Surnuméraires ;

Plus quelques employés de la douane et qu'on paye en province.

Il est à remarquer que la statistique commerciale qui dépendait naguère de cette administration, a été réunie au secrétariat général et qu'elle occupe neuf employés ; cependant nonobstant la diminution de besogne d'un côté, et de l'autre, l'augmentation de personnel que rien ne justifie, M. le ministre vient encore nous demander une augmentation de 10,000 fr., sous le prétexte de salarier le travail résultant de l'exécution des lois et du bureau des pensions.

Je dis « sous le prétexte de salarier, » car les dix mille francs sont dans la réalité destinés à donner un traitement à un chef de division des contributions directes, et à un premier commis qui, depuis longtemps, ont été payés des fonds alloués pour la confection du cadastre. M. le ministre n'ose, sans doute, pas avouer qu'il a été fait un usage illégal de ces fonds ; mais aujourd'hui que le travail de la confection du cadastre est terminé et qu'il n'est plus alloué de fonds à cette fin, il a bien fallu demander une augmentation de crédit pour payer ces deux fonctionnaires, attendu que la somme, qui, dans le temps, leur a servi de traitement, avait été distribuée pour accorder des augmentations d'appointements à des protégés fonctionnaires supérieurs. Il en est toujours ainsi : la presque totalité d'augmentations de traitements est donnée aux chefs.

Messieurs, depuis 1842, je me suis opposé au chiffre porté pour deux inspecteurs généraux, et l'honorable M. Mercier reconnaissait déjà alors la justesse de mes observations, car ces observations, il les avait faites avant moi ; seulement il trouvait des inconvénients à toucher à des droits acquis.

Ainsi en 1843, il s'exprimait en ces termes :

« Messieurs, en effet, j'ai différé d'opinion avec mon honorable prédécesseur, sur la nécessité d'avoir au département des finances, pour l'administration des contributions directes, douanes et accises, deux inspecteurs généraux. Cette opinion, je la conserve aujourd'hui ; mais j'ai trouvé deux positions occupées, et il ne m'a paru ni opportun, ni convenable de proposer immédiatement la suppression de l'une d'elles ; toutefois jai fait tout ce qui dépendait de moi pour rendre aussi utiles que possible les deux titulaires, etc. »

(page 390) Deux occasions se sont présentées récemment pour supprimer, sans toucher à aucune position, les fonctions del'un des deux inspecteurs généraux, c'était :

1° La retraite de M. Vandevyver, directeur des contributions directes à Anvers, pensionné le 31 décembre 1844 ; il jouissait d'un traitement de 9,616 francs.

2° Le déplacement de M. Greindl, secrétaire général au département des finances, jouissant d'un traitement de 8,400 fr. ; il a été nommé directeur du trésor à Mons, en décembre 1845, et pour pouvoir faire cette nomination, on a mis à la pension M. Marbais Dugraty.

Les inspecteurs généraux ont 8,000 francs d'appointement, il y avait donc avantage pour chacun de ces messieurs a être nommé directeur à Anvers ou secrétaire général au ministère des finances ; mais M. le ministre a préféré ne pas satisfaire au vœu exprimé par la chambre : il a gardé les deux inspecteurs généraux.

4° Administration de l’enregistrement et des domaines.

Personnel de 1834.

1 directeur d'administration, fr. 10,500 ;

1 inspecteur général, fr. 9,000 ;

2 directeur et inspecteur, chefs de division de fr. 6,500 à 8,000 :

3 vérificateurs de fr. 3,600 à 4,500 ;

20 emplois et expéditionnaires de fr. 550 à 3,000 ;

Personnel de 1845.

1 directeur, fr. 10,500 ;

1 inspecteur général, fr. 9,000 ;

1 directeur, fr. 8,500 ;

1 inspecteur, fr. 6,000 ;

1 inspecteur, fr. 5,000 ;

4 vérificateurs de fr. 3,000 à 4,500 ;

2 premiers commis de fr. 2,400 à 3,000 ;

7 seconds commis de fr. 1,500 à 2,600 ;

4 adjoints commis de fr. 900 à 1,200 ;

4 expéditionnaires de fr. 1,000 à 1,200 ;

Surnuméraires.

Ici, comme dans les autres branches de l'administration, il y a augmentation dans le personnel des employés supérieurs, et il y a diminution dans le personnel des employés subalternes ; en effet, il y a un inspecteur et un vérificateur de plus qu'en 1834, mais il y a trois employés subalternes de moins.

El c'est dans cet état de choses que M. le ministre demande deux augmentations de crédit, l'une de 5,800, l'autre de 3,600, sous prétexte d'augmentation de travail, alors qu'il est constant que le personnel de l'administration centrale de l'enregistrement et des domaines dépasse de beaucoup les besoins réels du service et qu'une bonne partie des employés pourrait être employée en province.

Après avoir examiné tout ce qui est relatif au personnel de l'administration centrale des finances, il me reste quelques mots à dire sur deux autres chapitres du budget ; l'un concerne les dépenses imprévues et extraordinaires, l'autre se rattache aux pensions accordées à certains fonctionnaires dans le courant de l'année qui vient de s'écouler.

L'allocation demandée en 1845, pour dépenses imprévues, a été distribuée, en grande partie, aux privilégiés du ministre et des directeurs de l'administration. Les voyages faits en pays étrangers sont des parties de plaisir, des prétextes pour déguiser les gratifications qu'on donne à certains privilégiés qui se promènent aux frais du trésor sans s'occuper de leur prétendue mission ; il en sera de même en 1846.

Quant aux pensions, c'est une source d'abus à laquelle tous les ministères ont puisé. C'est au moyen de la mise à la retraite qu'on ouvre des places au grand détriment du trésor et qu'on satisfait soit à des engagements contractés pour services électoraux, soit à des affections de famille.

A la page 30 du rapport de la section centrale, je trouve le relevé des fonctionnaires et employés des finances admis à la retraite depuis le 1er octobre 1844 jusqu'au 30 septembre 1845. Le chiffre de ces pensions est vraiment effrayant. Si nous continuons à marcher dans cette voie, il nous deviendra bientôt impossible de faire face à nos dépenses et la perte du crédit public en sera la conséquence.

J'ai extrait de ce relevé les pensions les plus fortes et vous aurez, comme moi, la conviction que quelques-unes sont injustifiables.

Voici cet extrait (dates des arrêtés de démission et montant de la pension) :

31 décembre 1844. Latour (Jean-François), receveur des contributions, à Bruxelles, fr. 6,000

31 décembre 1844. Stevens (George-L.), receveur des contributions, à Bruxelles, fr. 4,690

31 décembre 1844. Van de Vyver (Mathieu), directeur des contributions, fr. 5,250

2 janvier 1845. Criquillon (Joseph-Ernest), inspecteur d'arrondissement, fr. 3,150

6 février 1845. Dehem (Charles), receveur des contributions, fr. 3,914

7 juillet 1845. Hecq (Nicolas), receveur de l'enregistrement, fr. 4,023

10 septembre 1845. Delongre (Nicolas-Joseph), receveur des contributions, à Anvers, fr. 5,248

Et tout récemment encore, M. Marbais Dugraty, directeur du trésor à Mons, vient d'être mis à la retraite. Sa pension n'est pas encore liquidée, mais elle atteindra le chiffre du maximum fixé par la loi, car les appointements du directeur du trésor à Mons s'élèvent à 11,000 fr.

Parmi ces fonctionnaires mis à la retraite, il en est plusieurs que nous connaissons personnellement et qui sont très aptes à remplir des fonctions pendant plusieurs années encore ; mais il fallait au ministère des vacatures pour pouvoir placer ses privilégiés.

Ainsi, M. Stevens, receveur des troisième et quatrième sections de la ville de Bruxelles, jouissant d'une santé parfaite, fut mis à la retraite, malgré lui, au grand détriment du trésor, et sa recette fut divisée en deux recettes distinctes, dont l'une, la plus lucrative (celle de la troisième section), fut donnée à un homme qui n'a jamais rempli aucune fonction sous le gouvernement actuel et qui n'a pour tout titre à invoquer que sa qualité de frère d'un ministre.

Quelques mois plus tard, comme si on prenait à cœur de braver l'opinion publique, malgré les réclamations qui surgirent de toutes parts, M. Auguste d'Anethan passa de la troisième à la cinquième section, la plus importante de toutes, et ainsi furent méconnus les droits à l'avancement de plusieurs anciens receveurs, de plusieurs contrôleurs même, parmi lesquels il s'en trouvait un qui comptait 31 années de bons et loyaux services. Une pareille injustice n'est-elle pas de nature à jeter le découragement dans l'administration ?

Ce n'est pas tout : le frère du ministre était et est encore aujourd'hui secrétaire de la société de la Mutualité, dépendante de la société générale, fonctions incompatibles avec celles de receveur des contributions ; il est patenté comme tel sur pied de 5,000 fr. d'appointements ; il était en outre membre d'une commission de liquidation, et touchait de ce chef 3,000 fr. d'indemnité ; indépendamment de tout cela il fut nommé, à peu près à la même époque, conseiller honoraire des mines.

Il y a plus : les occupations nombreuses de M. A. d'Anethan l'éloignent pendant plusieurs jours de la semaine de sa recette des contributions de la cinquième section, on lui permit, contrairement à tous les précédents de l'administration, contrairement à la disposition formelle de l'article 6 de l'instruction ministérielle du 15 août 1831 (Recueil administratif, 1er vol, 1830-1851, n° 54 A.), on lui permit de faire usage, en certaines circonstances, de l'intermédiaire d'un clerc agréé.

Où donc s'arrêteront ces actes de népotisme ?

Quant à M. Marbais Dugraty, il a été mis à la pension, toujours au grand détriment du trésor, pour pouvoir caser un secrétaire général dont la place avait été promise à un proche parent d'un personnage haut placé.

Il est temps, messieurs, de mettre fin à tous ces abus, et surtout d'apporter un remède au mal que j'ai signalé au commencement de mon discours. Il est urgent que le cadre des fonctionnaires dans toutes les administrations, le chiffre des appointements et les droits à l'avancement soient fixés par une loi.

L'année dernière, j'ai pris l'engagement d'user de mon droit d'initiative pour le cas où le ministère restât en défaut de présenter un projet de loi. Eh bien ! si le ministère actuel persiste à maintenir le statu quo, quelles que soient les difficultés attachées au droit d'initiative dans une matière si importante et si difficile, je déposerai ma proposition. J'ose espérer que dans cette circonstance la chambre me donnera son concours.

(page 389) M. le ministre des finances (M. Malou). - Messieurs, le budget des finances qui vous est soumis cette année s'élève en total à une somme de 12,850,000 francs. Ce budget, comparé à celui de l'année dernière, présente une augmentation de 44,000 francs. Il y a, d'un autre côté, au budget des finances, une somme en plus de 50,000 francs pour les pensions, et une somme en plus de 210,000 francs pour fabriquer de la monnaie de cuivre, deux dépenses que j'appelle forcées, par des motifs différents.

Vous voyez donc, messieurs, que si une idée économique se trouve quelque part, c'est bien dans la budget qui vous est soumis aujourd'hui. Désireux, comme l'honorable préopinant, de voir appliquer l'économie partout où elle est compatible avec l'intérêt public, je ne me suis pas borné à la théorie, mais en formulant le budget, j'ai fait tous les efforts possibles pour donner au principe de l'économie une application réelle, immédiate.

La section centrale vous propose, messieurs, de rejeter quelques faibles augmentations qui vous ont été demandées et que je croyais, je n'hésite pas à le dire, avoir justifiées par les explications que j'ai eu l'honneur de lui transmettre. Je pourrais ajouter que la section centrale elle-même ne conteste pas ces explications, au moins pour la plus grande partie. Elle propose le rejet des augmentations par des motifs qui ne sont pas puisés dans l'inutilité ou dans l'exagération de la dépense ; le rejet est motivé sur les (page 386) circonstances que le pays traverse en ce moment, et sur l'absence d'arrêtés royaux organiques du ministère des finances.

Quant au premier motif, messieurs, les circonstances actuelles, quelles qu'elles soient, ne doivent pas cependant dominer tellement l'examen des budgets, que nous puissions y sacrifier les intérêts du service dans toutes les branches de l'administration. Je reconnais moi-même qu'il faut faire la part des circonstances, et je le répète encore, en rédigeant le projet de budget, je me suis efforcé de faire aux circonstances la part la plus large possible, la seule qui fût compatible avec les véritables intérêts de l'administration ; je ne m'arrêterai donc pas plus longtemps à ce premier motif.

Le second motif est puisé dans l'absence d'une organisation du ministère des finances. Messieurs, ce motif n'est nullement fondé : l'organisation du ministère des finances a été faite et a été modifiée sur quelques points par des arrêtés royaux ; il n'y a plus d'arbitraire ; il y a même bien des années que cette organisation a été introduite.

Je ne dis pas que cette organisation soit parfaite en tout point, mais c'est précisément pour pouvoir l'améliorer que je demande à la chambre quelques légères augmentations de crédit. Or, si la chambre me permet cette comparaison, l'on me dit de marcher, et en même temps l'on m'arrête. Pour améliorer l'organisation du département des finances, il faut que l'on m'en donne les moyens.

L'honorable préopinant a reconnu lui-même qu'une œuvre de ce genre ne peut pas être entreprise au début d'un ministère nouveau. C'eût été de ma part une mesure très imprudente de vouloir refaire immédiatement une organisation aussi vaste que celle de l'administration des finances, avant de m'être bien pénétré des nécessités de chaque branche de service, je dirai plus, avant d'avoir apprécié l'aptitude spéciale de chaque employé.

Je tiens à détruire aussi une idée erronée qui sert de point de départ à la plupart des observations que vous venez d'entendre. Il paraîtrait que les améliorations dans le recouvrement des impôts, que les changements de législation peuvent ne pas réagir sur le travail des employés de l'administration centrale. Eh bien, messieurs, c'est précisément le contraire. Une administration ne peut guère obtenir de résultats meilleurs que par des moyens nouveaux : il ne faut pas se faire d'illusions ; depuis 1830, tous les progrès qui ont été réalisés n'ont pu être consolidés que par des augmentations dans les dépenses, qui produisent ces résultats.

Croire qu'on améliore, en simplifiant et en faisant des économies dans les administrations centrales qui, comme celle des finances surtout, doivent vivifier les sources du revenu public, c'est se faire illusion, c'est méconnaître la nature des fonctions et le but de l'administration centrale elle-même.

Oui, messieurs, le nombre des fonctionnaires supérieurs a été augmenté au ministère des finances, et si des améliorations dans l'organisation actuelle sont introduites, les mêmes faits se reproduiront. C'est une conséquence même des améliorations administratives. Il me sera facile de le démontrer à la chambre.

L'honorable M. Verhaegen établit une distinction entre l'état-major de l'administration centrale et les employés inférieurs. Pour être dans le vrai, il faut considérer une administration centrale comme étant tout entière un état-major ; elle doit donner l'impulsion, commander à tous les services en province, les surveiller incessamment. La troupe est en province, dans les ministères sont les états-majors.

Ainsi, il y a dans le ministère des finances, comme dans d'autres départements, je pense, des simplifications à faire, il y a des détails à supprimer. Ces détails sont l'œuvre des employés inférieurs, et cette œuvre embarrasse la mission sérieuse de l'administration centrale et de son chef. Les progrès qui pourront se réaliser, tendront nécessairement à écarter de l'administration centrale les affaires de détails. Dès lors, les questions réellement importantes, les questions d'organisation, tenant seules, l'on conçoit que c'est principalement aux employés d'un grade supérieur que les attributions de l'administration centrale doivent être confiées.

L'honorable préopinant a passé en revue le personnel de chaque division. Je dirai peu de mots à cet égard.

En ce qui concerne le secrétariat, il y a depuis 1834 une augmentation de personnel, il est vrai ; mais il y a aussi une augmentation beaucoup plus forte dans les attributions du secrétariat et dans l'étendue de chacune de ces attributions.

Ainsi, la statistique commerciale, dont l'importance est quelquefois méconnue, s'est successivement perfectionnée, et en se perfectionnant, elle a exigé un travail bien plus considérable. Je dis qu'on méconnaît quelquefois l'importance de cette statistique ; car déjà j'ai pu apprécier quel instrument utile, nécessaire est dans les mains du gouvernement une bonne organisation de la statistique commerciale. Cette organisation a été obtenue, elle n'a pu l'être que par l'augmentation du personnel et par la rémunération convenable des fonctionnaires qui s'occupent de ce travail difficile et ingrat, travail qui suppose, chez ceux qui s'y livrent, une grande intelligence de notre législation.

Le bureau des pensions, dit l'honorable préopinant, forme double emploi avec le bureau qui existe à l'administration du trésor public.

Nullement, messieurs ; il y a pensions à liquider, contrôle à exercer ; et il y a pensions à payer, grand livre des pensions à tenir. L'on conçoit fort bien que les fonctionnaires de la trésorerie s'occupent du payement des pensions liquidées, mais l'on ne concevrait guère que ce contrôle difficile, incessant, qui doit être exercé sur les demandes de pension, sur les bases de liquidation, fût confié à l'administration de la trésorerie. Cela n'est pas, et ne peut pas même être.

La liquidation des pensions exige souvent un examen très approfondi ; elle nécessite la solution de questions de droit et de questions de fait : elle donne lieu à une instruction minutieuse. C’est un grand travail, une besogne incessante.

L'honorable M. Verhaegen pense que la création d'un secrétaire du cabinet est une innovation. Messieurs, il n'en est rien : ces fonctions ont toujours existé au ministère des finances, et je n'hésite pas à dire que, dans l'organisation actuelle, le ministre des finances a une telle quantité de détails à voir, d'affaires à examiner que l'auxiliaire que je me suis donné, à l'exemple de tous mes prédécesseurs, m'est indispensable, pour ne pas succomber sous le faix du travail. La seule différence qui existe entre l'état actuel des choses et l'état antérieur, c'est que le secrétaire particulier, avant mon entrée aux affaires, était un employé détaché d'une administration. Je pense que si l'honorable préopinant était à la tête du ministère des finances, il se donnerait immédiatement à lui-même un secrétaire particulier dont il reconnaîtrait avoir le plus grand besoin.

Examinant le personnel de la direction du trésor public, l'honorable député de Bruxelles a continué sa comparaison. Je ferai remarquer d'abord que, pour l'administration du trésor public, je ne fais aucune demande nouvelle, et que dans l'état actuel de notre dette publique, de notre comptabilité, de tous les services enfin qui ressortissent à l'administration du trésor public, le personnel existant est indispensable, je pourrais même dire qu'il est insuffisant.

A cette occasion, l'honorable préopinant a traité la question du caissier général. Je crois qu'il serait prématuré d'entrer aujourd'hui dans cette discussion ; elle se présentera naturellement lors de l'examen de la loi de comptabilité, que la chambre a déjà mise à son ordre du jour.

L'administration des contributions a moins que toute autre trouvé grâce devant l'honorable préopinant. Je reconnais, avec mon honorable prédécesseur, que dans cette administration, la suppression d'un des deux inspecteurs généraux est possible, sans nuire a l'intérêt du service, mais je dirai avec mon honorable prédécesseur que lorsqu'il s'agit de la position d'hommes qui ont rendu de longs et honorables services à l'Etat, il y a une autre question à examiner que celle d'une économie immédiate ; il y a des égards, des ménagements à garder. C'est ainsi que j'entends mes devoirs.

Du reste, je saisirai toutes les occasions, j'ai même déjà cherché à en faire naître, pour introduire dans l'administration des contributions directes cette simplification que je reconnais être possible.

L’honorable préopinant a dit qu'on aurait pu confier à l'un des deux inspecteurs généraux le poste de directeur à Anvers, ou celui de secrétaire général au département des finances.

Je n'entrerai pas dans ce système de discussion. Ni l'honorable préopinant, ni personne ne peut demander que le gouvernement vienne dire ici : : « II existe tel motif pour lequel je n'ai pas nommé tel fonctionnaire à un emploi déterminé. » Des motifs de service m'ont empêché de profiter de la récente vacature des fonctions de secrétaire général, pour introduire une simplification dans l'administration des contributions directes. J'ignore les motifs, quant à la position que mon honorable prédécesseur a conférée.

Quant à l'administration de l'enregistrement, l'honorable préopinant s'est borné à dire que le personnel dépasse les besoins du service. Il est très facile de s'énoncer ainsi ; mais pour moi qui vois chaque jour le travail de cette administration, qui suis témoin des efforts que doivent faire incessamment tous les employés qui la composent, je puis affirmer que l'honorable préopinant est complétement dans l'erreur à cet égard.

Deux dispositions du budget ont été encore l'objet des critiques de l'honorable préopinant. Il a blâmé d'abord l'emploi du crédit affecté aux dépenses imprévues. L'honorable membre, s'emparant des faits mentionnés dans un tableau joint au rapport de la section centrale, a cru qu'on faisait faire à certains employés des finances des voyages à l'étranger pour leur agrément personnel.

Chacun des voyages auxquels l'honorable membre a fait allusion avait pour objet une nécessité de service. C'est ainsi qu'il y a plusieurs inspecteurs du trésor qui ont été souvent à l'étranger. On indique même pour quelques-uns de ces voyages quels en ont été les motifs. Pour les voyages où on ne les indique pas, je puis déclarer qu'ils ont tous eu lieu dans l'intérêt du service.

Le gouvernement peut avoir à faire à l'étranger des remises considérables de valeurs, ou des échanges de titres, ou d'autres opérations ; l'envoi d'un fonctionnaire du département des finances est parfois nécessaire dans ces circonstances. Je crois ne pas me tromper en disant que la personne à laquelle l'honorable membre a surtout fait allusion est le fonctionnaire supérieur de l'administration des finances qui a fait un voyage en France et en Italie.

Le but de ce voyage était de recueillir pour le gouvernement des renseignements circonstanciés sur l'organisation douanière. Quant à l’Italie, le voyage avait principalement pour objet d'étudier le mode d'existence et d'organisation des entrepôts francs de Gênes et de Livourne. Cette mission a été remplie à l'entière satisfaction du gouvernement, elle a eu pour résultat de l'éclairer pour la préparation du projet de loi qui vous a été soumis.

Les rapports faits à mon prédécesseur sur cette mission, m'ont été extrêmement utiles à moi-même.

Quant à la mise à la pension, plusieurs fois depuis mon entrée aux affaires, j'ai résisté aux demandes faites par des fonctionnaires. Quand il existe dans mon esprit le moindre doute sur la possibilité d'utiliser encore les services du fonctionnaire, soit dans une position active, soit dans une position sédentaire, je fais faire une nouvelle instruction ; et ce n'est que quand j'ai la conviction complète qu'il est nécessaire d'admettre à la pension, que je prends cette mesure,

(page 387) Il m'est difficile d'ajouter encore au tableau joint au rapport de la section centrale, des explications plus détaillées sur les causes de l'admission à la retraite de quelques-uns des fonctionnaires que l'honorable membre a cités ; il en est, je parle de ceux mis à la retraite avant mon entrée aux affaires, il en est, dis-je, qui avaient les motifs les plus graves, les plus impérieux pour demander leur admission à la retraite. Ce n'est donc pas, messieurs, pour satisfaire à des engagements pris ou à des affections de famille ou autres que les places seraient devenues vacantes, par suite d'admissions à la pension. Quant à ma famille, je n'ai personne à placer : quant aux affections, je ne les écouterai jamais au préjudice des intérêts du service.

Quant aux engagements, je me suis abstenu systématiquement d' n prendre envers qui que ce soit. Ainsi dans le remaniement qui a eu lieu au secrétariat général, ce sont tellement les considérations de service qui m'ont guidé, que la mesure était arrêtée, alors que je n'avais pas encore de vue sur le choix du successeur.

En terminant les observations qu'il a faites, l'honorable membre est revenu sur la discussion de l'année dernière touchant l'organisation du personnel des ministères par une loi.

Aujourd'hui, comme alors, je combattrai cette idée qui me paraît contraire à l'intérêt bien entendu de l'administration. Il appartient au gouvernement de porter ces actes d'organisation ; il peut seul concilier la fixité nécessaire pour une bonne administration avec les changements dont le temps et l'expérience des affaires peuvent démontrer la nécessité. Si l'honorable membre ne partage pas cette opinion, il pourra, comme il l'a annoncé, introduire la question dans la chambre en la saisissant d'un projet de loi.

Pour éviter tout malentendu, je déclare que je ne proposerai pas de projet de loi ; mais j'examinerai de nouveau, dans son ensemble et dans ses détails, l'organisation du département des finances pour en faire l'objet d'un arrêté organique que je soumettrai au Roi.

Projet de loi approuvant la vente des terrains et bâtiments de l'hôtel du gouvernement provincial, à Liège

Rapport de la section centrale

M. Delfosse. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la commission spéciale que vous avez chargée d'examiner le projet de loi relatif à la vente de la main à la main, au 1er novembre, de l'ancien hôtel du gouvernement provincial de Liège.

- Ce rapport sera imprimé et distribué. La mise à l'ordre du jour sera ultérieurement fixée.

La séance est levée à 4 1/2 heures.