Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 16 janvier 1845

(Annales parlementaires de Belgique, session 1844-1845)

(page 513) (Présidence de M. Liedts)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse procède à l’appel nominal à une heure.

M. Scheyven donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Renesse communique l’analyse des pièces adressées à la chambre.

« Plusieurs membres de la Légion d’honneur demandent le paiement de l’arriéré de leur pension comme légionnaire de l’Empire. »

M. Delehaye – Je demande que cette pétition soit renvoyée à la commission des pétitions, avec invitation de faire un prompt rapport.

- Ce renvoi est ordonné.


« Les sieurs Anceau, Stoffe, Libert et les dames Piret, propriétaires d’une ferme morcelée par le traité d’échange de 1772, réclament l’intervention de la chambre pour être maintenus dans la faculté d’importer, en France, avec exemption de droits, les récoltes provenant de cette ferme.

M. de Baillet-Latour – La pétition qu’on vient d’analyser est de plusieurs propriétaires dont les biens sont situés partie en France, partie en Belgique ; une fausse interprétation de l’ordonnance de 1814 et du traité de 1820 a placé ces propriétaires dans une situation intolérable, on leur impose des droits énormes en Belgique pour y rentrer les grains de la partie française de leurs propriétés, et c’est précisément ce qu’on a voulu empêcher par le traité de 1820. Je demande qu’un très-prompt rapport soit fait sur cette question.

- Le renvoi avec demande d’un prompt rapport est ordonné.


« Les raffineries de sucre de Gand demandent l’égalité de l’impôt sur le sucre de betterave et sur le sucre de canne.

M. Desmaisières – La pétition dont on vient de faire l’analyse a été déposée par moi au nom des raffineurs de sucre de Gand. Cette industrie est souffrante, vous lui avez donné une marque d’intérêt hier en ordonnant le renvoi d’une pétition, ayant le même objet, à la commission d’industrie avec invitation de faire un prompt rapport. Je demande à la chambre de prendre la même décision à l’égard de la pétition des raffineurs de Gand.

- Cette proposition est acceptée.


« Plusieurs fabricants de noir animal demandent la révision de la loi sur les sucres. »

M. Cogels – Je demande également le renvoi de cette pétition à la commission d’industrie, qui pourra faire un rapport simultanément et sur cette pétition et sur celle qui lui a été renvoyée hier, rapport qui pourra être présenté bientôt.

- Ce renvoi est ordonné.


« Les sieurs Quanonne, Goudman et fils rectifient une erreur commise dans leur pétition relative au droit d’entrée sur la cire jaune non ouvrée en France, en présentent des observations concernant le rapport auquel cette pétition a donné lieu. »

- Renvoi à la commission d’industrie.


« Plusieurs médecins vétérinaires demandent une loi sur l’exercice de la médecine vétérinaire. »

M. de Renesse – Je demande que cette pétition soit renvoyée à la commission des pétitions avec invitation de faire un rapport avant la discussion du budget de l’intérieur.

M. le président – Je pense qu’il vaudrait mieux la renvoyer à la section centrale qui a été chargée d’examiner le budget de l’intérieur.

M. de Renesse – Je me rallie à cette proposition.

- Le renvoi au budget de l’intérieur est ordonné.


« Plusieurs laitiers des environs de Gand demandent une interprétation du § 15 à l’art. 7 de la loi du 18 mars 1833, sur la perception du droit de barrière. »

(page 514) M. Delehaye – Messieurs, par la loi de 1833, concernant la perception des droits de barrière, on avait exempté du droit à la barrière la plus rapprochée de la ville les voitures et les animaux transportant les légumes, le laitage et les divers autres produits des fermes. Jusqu’en 1843 aucun droit n’avait été perçu aux barrières sir les moyens de transport de ces objets. Mais depuis lors un préposé de barrière de la province d’Anvers ayant exigé le payement du droit, son exemple fut suivi, et aujourd’hui ce droit est perçu partout. Si le texte de la loi peut présenter quelque doute sur la légitimité des prétentions des fermiers aux barrières, il ne peut y en avoir sur son esprit. En effet, si on recourt aux discussions qui ont eu lieu dans les deux chambres, on verra qu’il a été entendu que le transport du laitage et des légumes à domicile devait être considéré comme transport au marché. Malgré cela le droit s’exige, au grand préjudice de l’agriculture qui en éprouve une charge très-lourde. Je demande que la commission a laquelle cette pétition sera renvoyée soit invitée à faire un prompt rapport et que la requête soit insérer au Moniteur. La lecture de cette pétition suffira pour convaincre tout le monde de la nécessité de porter remède au préjudice qu’éprouve l’agriculture.

M. Rodenbach – J’appuie également le renvoi de cette pétition avec demande d’un prompt rapport. J’ai appris que ce que vient de dire l’honorable M. Delehaye, qu’on exigeait le droit de barrière pour le transport du beurre, du fromage et du fourrage vert. C’est un moyen de chasser les campagnards des marchés. Si pendant dix ans la fiscalité n’a pas exigé d’argent de ceux qui viennent approvisionner nos marchés, je trouve étonnant qu’on en exige maintenant.

Je me joins donc à l’honorable M. Delehaye pour demander le renvoi avec invitation de faire un prompt rapport ; car la chose me paraît très-importante.

M. de Saegher – J’ai demandé la parole pour faire une simple observation. Je crois que la loi relative aux droits de barrière est assez claire, quant au point dont il s’agit. Si les fermiers des barrières se permettaient de percevoir des droits qui ne sont pas dus, les tribunaux sont là pour en faire justice. Si je ne me trompe, chaque fois que des cas semblables ont été déférés aux tribunaux, pour des droits qu’on voulait percevoir sur le transport du laitage, les fermiers des barrières ont été condamnés aux frais d’instance. Je pense donc que les pétitionnaires devraient s’adresser aux tribunaux, et qu’il n’y a pas lieu jusqu’ici de provoquer une loi interprétative.

Toutefois, je ne m’oppose pas au renvoi demandé.

M. Delehaye – Si l’honorable membre avait lu la pétition, il aurait vu qu’il y a eu jugement qui donnait gain de cause aux fermiers des barrières ; mais ce jugement a été cassé. J’admets qu’ils avaient tort, que la loi ne soumet pas les cultivateurs au droit de barrière pour le transport des produits de leur ferme ; mais il n’en est pas moins vrai que dans les Flandres ce droit est payé et qu’il s’élève jusqu’à 70 fr. par an pour des petits fermiers. Voulez-vous que de petits cultivateurs soient obligés de payer un pareil droit ? Si la loi présente des doutes à cet égard, je demande qu’elle soit modifiée. Je pense que, dans l’opinion de l’honorable M. de Saegher, l’agriculture ne doit pas être frappée de cet impôt.

Je persiste dans la demande d’insertion au Moniteur et de renvoi à la commission avec invitation de faire un prompt rapport.

- Le renvoi avec demande d’un prompt rapport est ordonné. L’insertion au Moniteur n’est pas adoptée.


« Le conseil communal de Tongres demandent la construction d’un chemin de fer d’Ans à Hasselt par Tongres dont la concession a été sollicitée par les sieurs Blyckaerts et Detiege. »

« Même demande du conseil communal de Koninxheim, arrondissement de Tongres. »

M. de Renesse – Je demande le renvoi de ces pétitions à la commission avec demande d’un prompt rapport et surtout avant qu’on discute dans les sections un projet relatif à certains projets de travaux publics.

M. Lys – Je ferai observer que cette discussion est déjà commencée dans les sections.

Ordre des travaux de la chambre

M. Rodenbach – Je viens d’apprendre que déjà on s’occupe dans les sections du projet de loi de travaux publics dont la dépense doit s’élever à la bagatelle de 12 millions. Il me semble qu’il eût été plus rationnel de ne s’occuper d’un projet aussi énorme qu’après la discussion des budgets des travaux publics et de l’intérieur. Je crois que cela eût été d’autant plus nécessaire que des pétitions viennent d’arriver du Limbourg et qu’il faut qu’on ait eu le temps d’en faire le rapport pour que la chambre en apprécie le mérite.

Au lieu de cet empressement à augmenter encore notre budget des dépenses de 12 millions, on aurait pu attendre qu’on eût examiné le budget des travaux publics.

M. de Renesse – Messieurs, ce n’est pas sans un certain étonnement que j’ai appris, hier, par le billet de convocation de la première section, dont je fais partie, que l’on avait mis à l’ordre du jour, dans les sections, le projet de loi de crédits et de concessions pour l’exécution de divers travaux publics ; il paraît que l’on a hâte d’emporter d’assaut ce projet de coalition des différents intérêts de travaux publics et que l’on ne veut pas même laisser le temps aux membres de la chambre d’examiner sérieusement les graves questions que soulève ce projet de loi ; car ce n’est que dans la journée d’hier que l’on nous a distribué un cahier d’au moins 132 pages d’impression ; certes, l’on ne peut prétendre que l’on n’examine qu’à la légère un projet aussi important, qui demande l’ouverture d’un crédit de 7,960,000 fr. pour les travaux complémentaires du chemin de fer ; une somme de 3,500,000 francs pour la continuation d’un canal latéral à la Meuse, de Liége à Maestricht ; 1,040,000 pour le canal de Turnhout, puis qui propose la concession des chemins de fer de Tournai à Jurbise, de St-Trond à Hasselt, et d’approuver la convention conclue avec MM. William Parry, Richards et consorts, pour le chemin de fer d’Entre-Sambre-et-Meuse, moyennant la garantie d’un minimum d’intérêt. Ce n’est pas dans un moment où beaucoup de membres de la chambre s’occupent de l’examen de différentes questions qui seront traitées lors de la discussion du budget de l ’intérieur, que l’on peut examiner avec maturité un projet de loi aussi important. Je crois devoir, en conséquence, proposer à la chambre d’ajourner l’examen dans les sections du projet de loi relatif à des crédits pour travaux publics après la discussion du budget des travaux publics qui aura lieu, je pense, immédiatement après celle du budget de l’intérieur.

Si la chambre n’adoptait pas la proposition que je crois devoir faire, je demanderais formellement et subsidiairement que du moins l’examen de la seconde partie de l’art. 2 du projet de loi relatif au chemin de fer de St-Trond à Hasselt soit ajourné ; j’insiste sur ce point parce qu’une demande en concession a été adressée à M. le ministre des travaux publics pour la construction d’une voie ferrée d’Ans près de Liége, par Tongres à Hasselt, en remplacement de la direction proposée par le gouvernement ; cette demande en concession est réellement sérieuse, puisque les sieurs Blyckaerts et Detiege se sont adressés à M. le ministre des travaux publics pour qu’il veuille bien leur adjoindre des ingénieurs de l’Etat pour commencer immédiatement les études du tracé d’Ans à Hasselt. Je n’y donnerais certes pas la main, si j’avais la conviction que cette demande en concession n’était pas sérieuse, si elle n’était pas exécutable ; car j’aime, dans toute circonstance, d’agir franchement. Je ne vois, avant tout, que les véritables intérêts de ma province. D’ailleurs, l’ajournement que je demande n’est pas indéfini, je demande, au contraire, que M. le ministre de travaux publics presse, autant qu’il dépend de lui, l’instruction de la demande en concession, que MM. les ingénieurs activent les études sur le terrain. Ces études pourront être achevées dans un assez bref délai, si le département des travaux publics et MM. les ingénieurs montrent de bonnes dispositions, comme je l’espère, en faveur d’un railway qui serait d’une importance majeure pour tout le Limbourg, car il relierait, au lieu d’un seul, deux arrondissements par une voie directe et économique aux provinces de Liége, de Namur et de Luxembourg, où se trouvent les principales relations commerciales de la province de Limbourg, et il offrirait, en outre, un grand avantage à cette province, puisque sa partie la plus populeuse pourrait jouir des bénéfices d’un chemin de fer qu’elle n’aurait pas, si la proposition du gouvernement était admise. Il me semble, lorsque l’on établit des chemins de fer, qu’il faut, autant que possible, consulter tous les intérêts d’une province avant que la chambre puisse prendre une décision en connaissance de cause.

J’ai donc l’honneur de proposer de n’examiner le projet de loi relatif à certains travaux publics qu’après la discussion du budget des travaux publics. Si cette proposition n’était pas admise, je demanderais que l’art. 2 relatif au chemin de fer de St-Trond à Hasselt fût ajournée, jusqu’à ce que tous les renseignements sur le projet de chemin de fer d’Ans à Hasselt par Tongres soient fournis par le gouvernement.

M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Je ne puis accepter en aucune façon la motion qui vient d’être faire. Le gouvernement a présenté un projet de loi qui a été renvoyé à l’examen des sections. Ce n’est pas là, comme dit l’honorable préopinant, vouloir emporter d’assaut une discussion. Quand on renvoie aux sections, c’est pour obtenir un examen fait avec maturité et une discussion approfondie, et non pour arriver à précipiter une discussion.

Il ne faut pas perdre de vue que, bien que le projet contienne plusieurs objets différents, la chambre aura à examiner, comme je l’ai déclaré, s’il faut comprendre ces objets dans une seule discussion d’ensemble ou bien si une discussion spéciale sur chacun de ces objets doit avoir lieu.

Il ne faut pas oublier qu’il y a urgence de discuter au moins plusieurs de ces objets. Ainsi, pour la construction des doubles voies, le complément du matériel et l’achèvement des stations, il serait impossible d’exploiter utilement le chemin de fer, sans l’obtention des crédits demandés pour faire face à ces dépenses. Ensuite, il y a des concessions demandées, pour lesquelles il y a un délai fatal, après lequel les concessionnaires auraient le droit de retirer leurs propositions. Il ne faut pas perdre de vue, non plus, que pour certaines concessions, les compagnies ne demandent pas le concours de l’Etat. Ce sont des travaux publics qui seront exécutés sans grever le trésor.

M. Rodenbach – Mais aussi sans bénéfice pour l’Etat.

M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) – Pour certaines parties du projet de loi qui forme un ensemble au point de vue de la pensée qui a présidé à sa rédaction, il y a urgence de s’en occuper le plus tôt possible. Il y a une haute utilité à presser la discussion de toutes les parties du projet de loi.

Ainsi je ne puis accepter la proposition qui est faite.

L’honorable comte de Renesse demande qu’on ajourne tout au moins le projet de loi concernant la concession d’un chemin de fer destiné à relier St-Trond à Hasselt jusqu’au moment où les études seront complétées à l’égard d’une proposition soumise en dernier lieu et tendant à ce que le chemin de fer vers Hasselt ait pour point de départ Ans au lieu de St-Trond. Mais jusqu’à présent ce n’est pas là un projet complet, ce n’est qu’une proposition. Ses auteurs n’ont produit ni plans, ni profils, ni évaluations. Ils ont demandé qu’on fît des études nouvelles. Je ne sais combien de temps elles exigeront. Il est déplorable que les demandeurs en concession aient (page 515) attendu la présentation du projet de loi pour faire une proposition nouvelle, que le gouvernement n’a pu examiner et qui se trouve en contradiction avec les études longues et consciencieuses faites par les ingénieurs.

Le gouvernement maintient son projet de loi. Il en demande l’examen dans les sections, parc qu’il a un caractère d’urgence, et il espère que la discussion pourra s’ouvrir après celle sur le budget des travaux publics.

M. de La Coste – Je ne m’oppose pas à ce que l’examen du projet de loi dont il est question, ait lieu dans les sections avec le degré de célérité dont il sera jugé susceptible et mis à l’ordre du jour des sections à une époque plus ou moins rapprochée ; c’est là un point qui doit être réglé, selon l’usage, entre les présidents des sections et M. le président de la chambre. Mais ce projet ne peut être considéré que comme le complément du budget des travaux publics. Je ne concevrais donc pas que l’on fît marcher ce projet de loi avant ce budget.

On allègue qu’un terme fatal a été stipulé par les compagnies. Mais je compte trop sur le respect du gouvernement pour les droits de la chambre, sur la loyauté, si je puis m’exprimer ainsi, que j’aime à reconnaître à M. le ministre des travaux publics, pour ne pas croire que lorsqu’il s’agit d’une proposition aussi importante, on ne nous poussera pas l’épée dans les reins, à raison d’un terme fatal déjà expiré pour l’une des concessions. Si la demande en concession est sérieuse, non-seulement le terme, j’en suis convaincu, mais peut-être d’importantes modifications seront introduites dans les conditions de certaines concessions.

La question est très-importante, non-seulement par les objets qu’on traite dans le projet, mais encore par ceux qu’on omet.

Il ne faut pas se dissimuler que, quand on s’occupe de certaines parties du royaume, et qu’on en laisse d’autres dans l’oubli, on fait tort à ces parties, non-seulement parce qu’elles contribuent aux charges sans avoir part aux avantages, mais encore, parce qu’on les condamne à l’isolement, le mouvement se portant vers les parties favorisées.

Je demanderai à M. le ministre des travaux publics, lorsqu’il en sera temps, ce qu’il fera pour satisfaire aux réclamations que j’ai souvent appuyées, réclamations aussi fondées que celles qui l’emportent maintenant, réclamations qui deviendront d’autant plus vives, qu’on aura fait droit à d’autres et pas à celles-ci.

Je rends justice à M. le ministre des travaux publics : il est le premier qui se soit aperçu que l’eau qui nous inonde, mouille dans nos contrées, comme ailleurs ; il est le premier qui se soit montré prêt à faire ce qui lui est possible pour empêcher les inondations qui ruinent une partie de l’arrondissement de Louvain. Mais il ne fait rien pour la navigation, pour les communications de cet arrondissement.

M. le président – Ceci est en dehors de l’objet du débat.

M. de La Coste – Je n’allègue ce fait que comme preuve de la gravité de la question, comme preuve qu’elle se lie au budget des travaux publics ; car s’il est pourvu à une partie des besoins par le budget des travaux publics, on admettra peut-être plus facilement ce qui sera demandé comme complément.

En résumé, je désirerais que la discussion de ces crédits complémentaires suivît celle du budget des travaux publics.

M. le président – Je prie les orateurs de se restreindre dans la motion d’ordre, qui est de postposer l’examen du projet relatif à certains travaux publics, à la discussion du budget des travaux publics.

M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) – Je crois que je serai facilement d’accord avec l’honorable préopinant.

L’honorable membre demande que la discussion du projet de loi qui est soumis à la chambre, ne vienne qu’après celle du budget des travaux publics. Mais, messieurs, il s’agit d’une tout autre question dans la motion qui vient d’être faite. Il s’agit de savoir si l’on examinera ce projet de loi immédiatement dans les sections. Or, si les sections veulent bien s’occuper immédiatement de cet examen, il est probable qu’avant d’avoir terminé leur travail, avant que la section centrale ne soit réunie et n’ait présenté son rapport à la chambre, il est probable, dis-je, que le budget des travaux publics sera discuté. Mais si l’on se refuse à l’examen immédiat dans les sections, non seulement on ne discutera pas, après le budget des travaux publics, ce projet qui a un caractère d’urgence, comme je l’ai démontré, mais il est évident qu’on ne le discutera pas dans cette session, et c’est contre cette éventualité que je m’élève.

M. de Theux – Messieurs, je propose de suivre, en cette circonstance, la marche que la chambre suit ordinairement pour l’examen des projets qui lui sont présentés ; que M. le président de la chambre convoque les présidents des sections pour déterminer l’ordre d’examen de ces projets ; j’aurais même désiré que M. le ministre des travaux publics fût invité à se rendre à la réunion des présidents des sections, pour examiner la possibilité de diviser le projet qu’il nous a soumis en divers projets de loi, ainsi que l’on en a exprimé le désir dans cette enceinte.

Messieurs, en ce qui concerne l’ajournement demandé par l’honorable M. de Renesse, les sections examineront les observations qu’il vient de présenter, et la section centrale présentera des conclusions ; c’est alors seulement que nous pourrons nous exprimer sur l’opportunité de l’ajournement qu’il propose. Mais on ne peut, aujourd’hui, avant aucun examen du projet présenté, se prononcer sur une semblable motion.

On a dit aussi que ce projet de loi ne devait être examiné dans les sections qu’après la discussion du budget des travaux publics, parce qu’il y avait connexité. Je m’emparer précisément de ce motif pour demander que l’examen ait lieu dans les sections et que cet examen, s’il est possible, soit terminé lorsque l’on discutera le budget des travaux publics.

Au surplus, messieurs, il est à remarquer que les objets pour lesquels M. le ministre des travaux publics a demandé des crédits dans son projet de loi, ne pourraient être portés au budget qu’après que les lois de principe seraient adoptées. Il ne s’agit pas ici de travaux ordinaires ; il s’agit de travaux extraordinaires pour lesquels une loi spéciale est nécessaire. C’est la marche qui a été constamment suivie en semblable matière.

On a fait observer que, par l’adoption de ce projet de loi, on réduirait certaines localités à l’isolement. Mais c’est l’objection qui peut se faire à tous les projets d’utilité publique, et les localités qu’il s’agit de satisfaire, par le projet qui vous est soumis, se plaignent d’être restées dans l’isolement, par suite des projets antérieurs qui ont déjà été sanctionnés.

Ainsi, vous voyez que tous les motifs se réunissent, pur qu’il n’y ait pas de retard extraordinaire. Je ne demande pas de précipitation. Je désire, au contraire, que chaque partie de ce projet soit examinée avec maturité ; mais je demande qu’on n’accueille pas une motion d’ajournement, qui me paraît dénuée de tout fondement.

M. Dubus (aîné) – Messieurs, je viens également combattre la motion d’ordre ; j’invoque les précédents et même une résolution de la chambre. Remarquez, messieurs, que le projet dont on signale l’examen en section comme précipité, que ce projet nous est soumis depuis plus d’un mois. Lorsque ce projet nous a été présenté par M. le ministre des travaux publics, la chambre a été consultée sur la manière dont elle voulait qu’il fût examiné. La chambre l’a renvoyé aux sections. C’est alors qu’il aurait fallu demander que les sections n’en fussent pas saisies, mais qu’on ajournât l’examen jusqu’à ce qu’on eut reçu communication des développements et des pièces qui viennent d’être distribuées maintenant. Eh bien, alors les honorables orateurs de la motion ne l’ont pas faite. C’est cependant à ce moment qu’ils auraient dû la faire. La chambre a décidé que le projet serait examiné en sections ; conséquemment les sections en ont été saisies. Si la chambre le leur a renvoyé, c’est probablement pour qu’elles s’en occupassent aussitôt qu’elles le pourraient. Il y a donc décision de la chambre.

Il y a plus, messieurs. Conformément à ce qui se pratique pour régler l’examen des autres projets, il y a eu au bureau de M. le président une réunion de tous les présidents de sections, dans laquelle on a décidé que ce projet serait examiné par les sections immédiatement après deux autres projets dont l’examen est maintenant réglé.

Ainsi le moment est venu d’examiner le projet dont il s’agit ; et c’est précisément ce moment que l’on choisit pour en demander l’ajournement.

Et quel motif donne-t-on à l’appui de cette demande d’ajournement ? On a dit que l’exécution du projet entraînera beaucoup de dépenses. Mais, messieurs, ou bien la demande du gouvernement sera justifiée ou elle ne le sera pas. Si elle est justifiée, il faudra bien voter les fonds nécessaires. Si elle ne l’est pas, ceux qui seront de cet avis voteront contre le projet. Ce n’est donc pas là une raison qui s’oppose à l’examen. Ce sera seulement une raison à faire valoir au fond lorsque le projet sera discuté à la chambre. Alors ceux qui pensent qu’on demande trop d’argent ou qu’on demande de l’argent qu’on ne doit pas demander, repousseront le projet.

On a dit qu’on vient seulement de distribuer certains développements. Il est vrai qu’une partie seulement des développements ont été distribués, il y a environ un mois et que le reste n’a été distribué qu’avant-hier. Mais remarquez, messieurs, que dans les développements distribués, il y a un mois, se trouve l’exposé des motifs qui résume les raisons d’adoption de chacune des propositions de M. le ministre. Les développements qui viennent d’être distribués sont de ces pièces que ne réclament ordinairement que les sections centrales pour pouvoir se livrer à l’examen approfondi des projets dont elles sont saisies. Il est impossible aux sections particulières de se livrer à cet examen approfondi. Les sections particulières ne sont qu’un examen préparatoire qui se termine par la nomination des rapporteurs, et ce sont ces rapporteurs qui, réunis en section centrale, examinent les projets plus à fond. Il n’y a avait donc pas nécessité que tous les documents fussent communiqués à la chambre avant l’examen en sections. Mais enfin la chambre est maintenant saisie de toutes les pièces avant cet examen. Rien ne s’oppose donc à ce que les sections continuent leur travail.

On a dit que la discussion du budget des travaux publics devait précéder celle du projet de loi dont il s’agit. Je vous ferai observer, messieurs, que précisément les sections ont déjà terminé depuis longtemps l’examen du budget des travaux publics, et que, par conséquent, il est tout naturel qu’elles s’occupent maintenant de cette espèce de supplément à ce budget. La section centrale aura également terminé le budget des travaux publics avant qu’elle ne puisse s’occuper du projet dont il s’agit. Il en sera de même pour la discussion publique.

Je ferai remarquer en outre, messieurs, que les motifs présentés contre l’examen immédiat du projet, ne s’appliqueraient, dans aucune supposition, au projet tout entier. Le projet comprend un grand nombre de propositions qui peuvent former des lois spéciales, et où l’on ne demande point d’argent. Ce sont des concessions sur lesquelles la chambre aura à se prononcer. Si ces concessions sont approuvées par la chambre, des travaux importants seront exécutés sans qu’il en coûte un sou au trésor de l’Etat. Il est extrêmement important que l’on se prononce avant peu sur ces concessions, afin que l’on puisse mettre la main à l’œuvre. Je citerai la concession relative au chemin de fer de Tournay à Jurbise. D’après cette concession, les travaux doivent être exécutés dans un délai de trois ans. Mais on suppose qu’ils seront commencés dès cette année. Or, pour cela, il faut que les chambres se prononcent immédiatement. Il est donc indispensable que l’examen en section ait lieu de suite ; que la section centrale s’occupe le plus tôt possible de ce projet et que la chambre puisse également se prononcer dans peu.

On vous a dit, messieurs, que si la compagnie qui a fait cette offre est sérieuse, elle consentira à une prorogation du terme ; de manière que l’on (page 516) fait apercevoir le but de la motion. Le but de la motion, c’est que vous ne discutiez pas le projet dans cette session. (Interruption.) Cela est évident, puisqu’on dit que la compagnie consentira à une prorogation du terme. Une convention est faite entre le gouvernement et une compagnie, et dès l’abord on déclare qu’il faudra prolonger le terme dans lequel la convention doit être approuvée ; mais pour quel motif, messieurs, ne se prononcerait-il pas de suite sur une concession de cette nature ? Jusqu’à présent quelle objection a-t-on mise en avant chaque fois qu’il s’agissait de la construction de l’embranchement de Tournay à Jurbise ? Nous avions beau dire que la construction de cet embranchement serait très-avantageux à l’Etat, que ce serait de l’argent bien placé. On répondait pas des dénégations ; on soutenait que cette compagnie serait onéreuse à l’Etat. Maintenant, il se présente une compagnie qui veut faire cet embranchement à ses frais et sans demander un centime à l’Etat…

Un membre – C’est le fond.

M. Dubus (aîné) – Je réponds à une objection faire par l’honorable M. Rodenbach. M. Rodenbach, interrompant tout à l’heure un orateur, s’est écrié que cette concession enlevait à l’Etat son bénéfice. Jusqu’à présent, on prétendait qu’il n’y avait pas de bénéfice. C’est ce que l’on disait chaque fois que nous demandions la construction de cet embranchement aux frais de l’Etat. On nous répondait que cette construction serait onéreuse. Maintenant une compagnie veut la faire et l’on répond que cette compagnie enlève à l’Etat son bénéfice. Vous conviendrez, messieurs, qu’avec un pareil système jamais l’embranchement ne serait exécuté. Lorsque la discussion sera ouverte dans la chambre, si un honorable membre prétend que l’exécution de ce travail serait trop avantageuse pour que l’Etat l’abandonne à une compagnie, celui qui soutiendra cette opinion, sera obligé de proposer formellement que l’embranchement soit exécuté aux frais de l’Etat. Ce n’est que moyennant l’adoption d’une pareille disposition que l’on pourrait rejeter la concession.

Je n’admets pas de fin de non recevoir ; je veux que le projet soit examiné. Qu’on fasse exécuter l’embranchement par l’Etat ou par une compagnie, mais au moins que l’on le fasse exécuter. Il est évident que maintenant on ne peut plus reculer, puisqu’il se présente une compagnie qui veut faire cet embranchement sans demander un centime à l’Etat.

Il y a une autre proposition comprise dans le même projet de loi, et qui est susceptible également d’un examen immédiat. Le principe de cette proposition a déjà été examiné par la chambre. La question est même assez mûre pour pouvoir être discutée immédiatement, sans même que les sections s’en soient occupées : je veux parler de l’embranchement du canal de la Campine depuis Desschel jusqu’à Turnhout.

En effet, messieurs, cet embranchement était compris dans le premier projet de canalisation de la Campine dont la chambre s’est occupée à plusieurs reprises. Sur ce point donc personne ne sera pris au dépourvu. Plusieurs discours ont déjà été prononcés à cet égard dans cette enceinte. Tous les avantages de ce projet ont été signalés à la chambre. Les devis ont également été mis sous ses yeux. Les développements qu’on vient de distribuer ne nous apprendront absolument rien de nouveau à cet égard. On pourra soutenir qu’il ne faut pas faire cet embranchement. Ceux qui partagent cette opinion viendront la soutenir ; mais je ne comprends pas que l’on vienne dire : Nous ne sommes pas prêts à aborder la discussion même dans les sections. Je crois que ce serait abuser du droit de faire des motions, du droit d’ajourner, que de demander l’ajournement dans de pareilles circonstances.

M. de La Coste – Messieurs, je n’ai pas appuyé la motion. Je me suis borné à demander que les crédits complémentaires dont il s’agit, ne fussent discutés qu’après le budget des travaux publics ; ce qui me paraît être également maintenant l’opinion de M. le ministre des travaux publics. Si l’honorable M. Dubus a fait allusion à mes paroles, il m’a prêté une intention, que certes je n’ai pas, et je le remercie de ce qu’il me fournit l’occasion de dire que je ne suis, en aucune manière, hostile aux travaux auxquels il s’intéresse. Tout ce que je demande, c’est que l’examen du projet soit conduit avec toute la maturité qu’exigent l’intérêt du pays et la dignité de la chambre.

M. Savart-Martel – Je crois, messieurs, que nous sommes tous d’accord sur ce point que le projet ne sera discuté qu’après le budget des travaux publics. Mais je pense que les raisons données par MM. de Theux et Dubus démontrent à l’évidence que les sections doivent s’occuper immédiatement de ce projet. J’ai convoqué aujourd’hui ma section pour l’examiner, et nous avons été tous d’accord pour remettre la discussion de quelques jours, afin de pouvoir nous y livrer avec plus de soin et plus de maturité. Cela n’a présenté aucune espèce de difficulté, et je n’y vois aucun inconvénient. Mais renvoyer l’examen des sections après le vote du budget des travaux publics, ce serait dire qu’on ne veut pas discuter le projet dans la session actuelle. Cela me parait si évident que je croirais abuser des moments de la chambre en insistant sur ce point.

- La clôture est demandée.

M. Desmet – Je demande à pouvoir répondre aux observations présentées par l’honorable M. Dubus.

M. Simons – Je désirerais également faire connaître mon opinion sur la motion d’ordre. Je pense que, dans l’intérêt du trésor autant que dans celui de la province du Limbourg, et même du district de Hasselt en particulier, il convient que l’on ajourne la discussion ; il y a maintenant deux projets en présence : les considérations que je me propose de faire valoir, prouveront que le projet de MM. Detiege et Blyckaerts méritent, sous tous les rapports, la préférence.

L’instruction n’est pas achevée ; ce n’est que quand de nouvelles études l’auront complétée, que nous pourrons émettre une opinion en pleine connaissance de cause.

- La clôture de la discussion est mise aux voix et prononcée.

M. le président – M. de Renesse a proposé l’ajournement de l’examen en sections après le vote du budget des travaux publics.

M. Dubus (aîné) – Je crois que cette proposition s’applique seulement à la deuxième partie de l’art. 2.

M. le président – Ceci est une proposition subsidiaire.

M. Rodenbach – C’est moi qui le premier ait demandé ce qu’a formulé l’honorable M. de Renesse. S’il renonce à sa proposition, pour maintenir seulement sa proposition subsidiaire, je déclare que je la reprends.

M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Je crois que la deuxième partie de la motion de l’honorable M. de Renesse ne peut être accueillie.

La convention qui concerne le chemin de fer du Limbourg, concerne également celui de Tournay à Jurbise. La disjonction n’est pas possible. L’ajournement sur un point emporterait ajournement sur l’autre. Ainsi la proposition me paraît inacceptable.

M. de Renesse – Sans doute, il y a connexité. Il y aurait donc ajournement de la discussion relative à ces deux projets de chemin de fer.

M. Desmet – Je voudrais sous-amender la proposition de l’honorable M. de Renesse.

M. le président – Ce n’est plus possible ; il y a clôture.

M. Simons – Je crois que la proposition de l’honorable comte de Renesse peut être adoptée sans contradiction. Je sais, en effet, que la société Mackenzie…

M. le président – Je ferai remarquer à l’honorable membre que ceci est le fond.

M. de Theux – Cette motion ne peut être examinée que dans les sections. Il n’y a pas de débat possible ici sur ce point.

M. Dumortier – Il faut simplement adopter la proposition de l’honorable M. de Theux, laisser aux présidents des sections le soin de régler les travaux préparatoires de la chambre.

M. de Renesse – Ce n’est pas la première fois qu’on règle en séance publique l’ordre du jour des sections. J’avais d’autant plus le droit de réclamer l’intervention de la chambre que le jour même où le projet de loi était mis à l’ordre du jour des sections, on distribuait une annexe relative à ce projet.

- La proposition de M. de Renesse tendant à ajourner après le vote du budget des travaux publics, l’examen en section du projet de loi relatif à l’exécution de certains travaux publics est mise aux voix ; elle n’est pas adoptée.

La proposition subsidiaire de M. de Renesse tendant à ajourner après le vote du budget des travaux publics l’examen en sections de la deuxième partie de l’art. 2 du projet de loi relatif à l’ exécution de certains travaux publics (chemin de fer de St-Trond à Hasselt) est mise aux voix ; elle n’est pas adoptée.

M. le président – L’examen du projet de loi restera soumis aux règles ordinaires.

Pièces adressées à la chambre

M. Huveners – M. de Villegas informe la chambre qu’une indisposition l’empêche d’assister aux séances de la chambre.

- Pris pour notification.


M. Vandensteen demande une prolongation de congé, pour cause d’indisposition.

- Accordé.

Rapport sur une pétition

M. Zoude, au nom de la commission d’industrie, fait rapport sur une pétition des cultivateurs de houblon.

La chambre ordonne l’impression et la distribution de ce rapport.

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l'exercice 1845

Rapport de la section centrale

M. Mast de Vries, au nom de la section centrale chargée de l’examen du projet de loi du budget du département des travaux publics, dépose le rapport sur ce budget.

La chambre ordonne l’impression et la distribution de ce rapport et met ce budget à l’ordre du jour après le budget de l’intérieur.

Formation du comité secret

La chambre se forme en comité secret à 2 heures et demie, elle se sépare à 4 heures et demie.