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d’intention
Chambre
des représentants de Belgique
Séance du vendredi 15 mars 1844
Sommaire
1)
Pièces adressées à la chambre, notamment pétition relative aux droits d’octroi
communaux sur les genièvres (Rodenbach, Desmet, Nothomb), à l’impôt sur le
tabac (de Haerne, Rodenbach,
de Haerne, Rodenbach), à
l’industrie cotonnière (Desmaisières, Delehaye, Rodenbach), à
l’instruction communale (Pirson)
2)
Projet de loi contenant un mode définitif de nomination des jurys
universitaires (Nothomb, Malou, Nothomb, Devaux, Nothomb)
3)
Projet de loi relatif aux pensions civiles et ecclésiastiques. (A :
Conditions d’admission à une pension à charge de l’Etat (âge, infirmités,
fortune personnelle, durée du service presté pour l’Etat…) ; B :
Pensions de fonctionnaires publics non rémunérés par l’Etat (notamment
commissaire de police) ; C : Pensions du personnel des finances
(surnumérariat) ; D : Pensions du personnel diplomatique ; E :
pensions du personnel enseignant universitaire) ; F : calcul de la pension
(notamment différence entre agents et comptables) ; G : maximum de la
pension) (A et B (Malou), Jadot,
(D, E, école militaire, B) (Malou), (B, conservatoires,
E), D (Goblet d’Alviella), B (Donny),
(D, B) (Malou), D (Nothomb), (C,
B) (Orts), (B, D) (Malou), (D, C,
pensions militaires) (Dumortier), (D, B) (d’Hoffschmidt), D (Goblet
d’Alviella), (B, pensions du personnel de tribunaux de première instance) (de Saegher), D (de Muelenaere),
(D, C, pensions militaires) (Malou), (D, B) (Orts), pensions militaires (de Garcia),
F (Osy, Mercier, Osy,
Mercier, de Mérode, Mercier, Dumortier, de Muelenaere, Malou), (F, C) (Orts, Mercier, Malou,
Verhaegen, Malou), F (de Garcia, Malou))
(Moniteur belge n°76, du 16 mars 1844)
(Présidence de M. Liedts.)
M. Huveners procède à l’appel nominal à 1
heure.
M. de Renesse lit le procès-verbal de la
séance précédente, la rédaction en est adoptée.
M. Huveners présente l’analyse des pièces
adressées à la chambre :
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
« Les conseils communaux des cantons d’Erezée
demandent que la dépense à résulter de la construction d’une route de
Salm-Châte à Weiswempach ne soit pas imputée sur les fonds votés en faveur du
Luxembourg par la loi du 19 décembre 1842. »
Renvoi la commission des
pétitions.
« Quelques distillateurs
de la Flandre occidentale présentent des observations contre les droits
d’octroi dont sont frappés les genièvres à l’entrée des villes, et demandent
qu’il soit interdit aux administrations communales d’élever ces droits d’une
manière exagérée. »
M.
Rodenbach. - Messieurs, les distillateurs du
plat pays de la Flandre occidentale signalent à la chambre combien leur
industrie souffre par suite de l’élévation exagérée des droits d’octroi dont
sont frappés les genièvres à l’entrée des villes.
Les
pétitionnaires démontrent par des chiffres que l’économie de la loi de l’Etat
sur les distilleries est dérangée par le système de perception des taxes
municipales : Ils citent, entre autres, qu’à Anvers où le droit de fabrication
est de 30 centimes, l’hectolitre de genièvre revient à 5 fr. et à 9 fr. à
l’importation ; à Bruges, droit de fabrication, 5 fr. 50, droit d’importation,
9 fr. ; à Gand, droit de fabrication, 5 fr. 50 ; droit d’importation, 15 fr. ;
à Tournay, fabrication, fr. 3 33, importation, 20 fr. ; et qu’outre cet immense
droit différentiel dont ces diverses villes sont dotées, elles accordent encore
une décharge au draw-back qui constitue une vraie prime d’importation, prime
qui est d’autant plus nuisible aux distillateurs des campagnes, qu’elle leur
enlève la consommation du plat pays, en ce qu’elle permet aux distillateurs des
villes d’y livrer leur genièvre à un prix inférieur au leur. Enfin, les
distillateurs du plat pays prétendent que cet état de choses est un droit qui
consacre un acte que notre pacte fondamental ne permet point. Cette pétition,
messieurs, me paraît très importante et je la crois digne d’être examinée par
la législature pour ce motif. Je demande son impression dans le Moniteur ainsi qu’un prompt rapport de
la part de la commission des pétitions.
M. Desmet. -
A cette occasion, je demanderai à M. le ministre de l’intérieur s’il se propose
de nous présenter dans peu de temps la loi sur les octrois des villes.
Puisque j’ai la parole, je me
permettrai de dire deux mots en faveur des distillateurs. Je prie le gouvernement
de vouloir bien retirer l’arrêté sur le transit du bétail ; ce qu’a dit
l’honorable M. Delehaye dans une séance précédente est bien vrai : les
distillateurs n’osent pas acheter du bétail en ce moment pour l’engraisser.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) -
Messieurs, je ne suis pas encore à même de déterminer l’époque où le projet de
loi sur les octrois municipaux pourra être présenté. Lors de la discussion de
mon budget, je n’ai émis qu’une idée, je me suis fait une question, il est
vrai, publiquement : Ne faudrait-il pas sur les octrois municipaux une loi
déterminant certaines bases, fixant certaines limites ? Je rassemble, en ce
moment, les matériaux nécessaires pour étudier la question. Ces matériaux
consistent dans le recueil de tous les tarifs d’octroi et des règlements
municipaux. On ne s’est pas assez occupé des règlements municipaux. (C’est très vrai.) Ce recueil est à peu
près achevé, et il est probable que je le ferai imprimer.
- La chambre consultée décide
que la pétition des distillateurs de la Flandre occidentale sera renvoyée à la
commission des pétitions, avec demande d’un prompt rapport, et qu’elle sera, en
outre, insérée au Moniteur.
« Plusieurs cultivateurs du
canton de Vervicq prient la chambre de mettre à son ordre du jour le projet de
loi sur les tabacs. »
M. de Haerne. -
Messieurs, à l’occasion d’une pétition du même genre qui a été analysée dans
une séance précédente, j’ai déjà eu l’honneur de faire observer à la chambre
que cet objet est de la dernière urgence, à cause des intérêts qui y sont
engagés. Les cultivateurs doivent semer au mois de mars, et plutôt dans la
première quinzaine que dans la seconde. Tout retard qui serait apporté à la
discussion de la loi sur les tabacs serait funeste à l’agriculture.
Les fermiers, signataires de
la pétition, se plaignent qu’eu égard à l’effet qu’a produit la présentation de
la loi sur la culture et la fabrication, ils éprouvent une grande difficulté à
se défaire de la récolte précédente. Les prix baissent, et par conséquent les
cultivateurs sont moins tentés de semer de nouveau.
Ils
ne savent s’ils doivent se livrer à la culture du tabac, ou remplacer le tabac
par un autre produit ; il est donc urgent qu’une décision intervienne. L’on
sait que la culture du tabac est la culture essentielle dans une partie de
l’arrondissement de Courtray et de celui d’Ypres ; cette culture entre dans la
rotation des produits, elle est nécessaire à l’assolement, et, par conséquent,
on ne peut remplacer ce produit par un autre, sans s’exposer à des pertes.
Je
demande donc que la section centrale soit invitée à faire son rapport le plus
tôt possible sur le projet de loi. J’ai appris que quelques membres de la
section centrale sont en ce moment absents pour des motifs très légitimes. Je
demande qu’il soit pourvu à leur remplacement. Je ne puis assez le répéter,
l’objet est de la dernière urgence : il s’agit de l’intérêt d’un grand nombre
de fermiers, dont quelques-uns seraient gravement lésés, si une décision
n’était pas prise immédiatement ; ils seraient dans l’impossibilité de payer
leur bail.
M.
Rodenbach. - Je ne pense pas que les
pétitionnaires aient des motifs de s’effrayer. Rien ne les empêche
d’ensemencer. Il n’entre sans doute dans la pensée de personne de donner un
effet rétroactif à la loi ; ce n’est pas dans nos mœurs administratives. Loin
donc de jeter l’alarme, loin de décourager les cultivateurs, il est de notre
devoir de leur donner de la confiance, de les encourager.
M. de Haerne. -
Il y a une observation que n’a pas saisie l’honorable M. Rodenbach : c’est la
liaison qui existe entre la culture et la fabrication. Si la fabrication est
frappée, la culture doit souffrir aussi. Par conséquent, jusqu’à ce qu’on
connaisse le sort que la loi fera à la fabrication, on ne peut plus se rassurer
sur la culture. En ce moment, les prix sont en baisse, comme je viens de le
dire, les fermiers ne peuvent se défaire des produits de la récolte de l’année
dernière. Jusqu’à ce que cet état de choses change, ils n’osent semer.
D’après la nouvelle que je
viens de recevoir, les Français importent actuellement des tabacs sur votre
territoire ; ils font des approvisionnements à Herzeaux, à Mouscron, à Reckem.
C’est là un fait qui va se prolonger, si l’on ne prend pas une prompte mesure.
Il faut donc, si l’on ne veut exposer le cultivateur à des pertes
considérables, que la question soit tranchée au plus tôt et pour la culture et
pour la fabrication.
M. le président. -
La section centrale du projet de loi sur les tabacs ne s’est pas réunie pendant
deux jours, en l’absence du rapporteur qui est retenu chez lui par la maladie
de son frère. Il a paru dès lors inutile de convoquer la section centrale pour
prendre des résolutions.
M. de Haerne. -
Ne pourrait-on pas pourvoir au remplacement du membre absent ?
M.
Rodenbach. - Je ne puis assez le répéter, la
loi ne doit pas avoir d’effet rétroactif. Les cultivateurs peuvent en toute
confiance planter le tabac. Il n’y a donc pas aussi grand péril en la demeure.
- Le renvoi de la pétition à
la section centrale est ordonné.
La chambre consulté décide
ensuite qu’il n’y a pas lieu à pour voir au remplacement du membre absent de la
section centrale.
« Plusieurs fabricants de Gand réclament des
mesures de protection pour l’industrie cotonnière. »
M. Desmaisières. - Je demanderai que cette
pétition soit insérée au Moniteur et
déposée sur le bureau pendant la discussion de l’enquête commerciale et
industrielle.
M.
Rodenbach. - N’y aurait-il pas lieu à la
renvoyer à la commission d’industrie ?
M. Delehaye. - C’est inutile ; la
commission d’industrie a déjà statué à cet égard.
- Le dépôt de la pétition sur
le bureau pendant la discussion de l’enquête est ordonné.
La pétition sera, en outre,
insérée au Moniteur.
_________________________
« Les candidats en droit de l’université de
Liége demandent que la disposition transitoire de l’art. 68 de la loi sur
l’enseignement supérieur soit prorogée jusqu’à la fin de la session de
1846. »
« Même demande des
étudiants en droit de l’université de Louvain. »
- Dépôt sur le bureau pendant
la discussion du projet de loi sur le jury universitaire.
« Le collège des bourgmestre et échevins de
Dorinne demandent une interprétation l’art. 23 de la loi du 23 septembre 1842,
quant à la charge qui incombe à la commune en faveur de l’instruction
primaire. »
M. Pirson. - L’interprétation
que demandent les pétitionnaires intéresse toutes les communes du royaume ; je
propose à la chambre d’inviter la commission des pétitions à faire un prompt
rapport.
- Cette proposition est
adoptée.
_________________________
M. Fallon, retenu à Namur par la
maladie de sa belle-fille et de ses enfants, demande un congé.
- Accordé.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) -
J’ai l’honneur de proposer à la chambre de fixer à jeudi prochain la discussion
de la loi sur le jury universitaire. Le rapport sera distribué ce soir. On a
bien voulu m’en envoyer un exemplaire, mais la distribution n’a pas encore eu
lieu. Je tiens en main la pétition des candidats en droit des universités de
Liège et de Louvain, qui demandent que l’art. 68 de la loi actuelle soit
prorogé jusqu’à la fin de la première session de 1846. Je pense qu’on ferait
bien d’insérer ces pétitions au Moniteur.
M. d’Elhoungne. -
Les pétitionnaires sont-ils majeurs ?
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) -
Qu’on insère la pétition sans insérer les noms. Au reste, il y au moins un des
signataires qui soit majeur, cela suffit.
M. Delehaye. - Et si la loi des pensions
n’est pas terminée ?
M. Malou. -
Il n’est pas probable que la loi des pensions soit finie jeudi. En 1841, on n’a
pas trouvé d’inconvénient à interrompre plusieurs fois la loi sur les pensions,
pour s’occuper de lois urgentes. Le sénat doit être assemblé en ce moment. La
loi sur le jury est urgente ; si on n’interrompait pas la discussion de la loi
sur les pensions, il serait possible qu’on ne pût pas voter la loi sur le jury
en temps utile. Je regrette même qu’on ne puisse pas fixer un jour plus
rapproché pour cette discussion. La distribution du rapport aura lieu ce soir,
ne pourrait-on pas fixer la discussion à lundi ou mardi ?
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je désire que la discussion n’ait
pas lieu avant jeudi. J’attends des renseignements dont j’ai besoin et que je
recevrai lundi. La distribution du rapport aura lieu ce soir ; cette
distribution est la publicité pour nous, mais la grande publicité est
l’insertion du rapport au Moniteur.
J’espère que cette insertion pourra avoir lieu demain. C’est à la chambre à
décider s’il y a lieu de fixer définitivement à jeudi la discussion de la loi
sur le jury, ou de subordonner cette fixation au vote de la loi sur les
pensions.
M. Devaux. -
Je crois que la discussion de la loi sur les pensions sera très avancée jeudi ;
s’il ne s’en fallait que d’un jour ou deux pour la terminer, je pense qu’il
serait très fâcheux de remettre cette discussion, car toute la discussion que
vous avez maintenant, s’il y a un grand
intervalle, reviendra aux dispositions générales, car vous aurez pu remarquer
que l’honorable rapporteur et d’autres membres ont dit souvent, à propos de
questions soulevées : Cette discussion reviendra aux dispositions générales.
Ces dispositions générales se rapportent en effet, d’une manière très intime, à
ce que nous discutons dans ce moment. Si vous mettiez un long intervalle entre
la suspension et la reprise des délibérations, vous vous exposeriez à
renouveler toute la discussion. Ce sera la troisième fois que vous discuterez
cette question. Je pense qu’on pourrait ne pas préjuger si la loi sur les
pensions sera renvoyée, car il n’y aurait aucun inconvénient à retarder d’un
jour ou deux la discussion de la loi sur le jury. Le sénat a assez de travail
pour quelque temps, et il pourrait au reste attendre un jour ou deux avant de
s’ajourner. L’inconvénient serait moins grand que celui de recommencer toute la
discussion à laquelle nous nous livrons en ce moment ; car, comme je l’ai fait
observer, les mêmes questions se présentent au commencement et à la fin de la
loi.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb)
- Je crois qu’on peut fixer à jeudi la
discussion de la loi sur le jury ; la loi sur les pensions sera probablement
terminée ; si elle ne l’était pas, on pourrait voir mercredi s’il y a
inconvénient à maintenir la fixation à jeudi. Peut-être cela ne présentera-t-il
pas d’inconvénient, car il se peut que si la loi sur les pensions n’est pas
achevée, une seule question spéciale reste à résoudre, par exemple, celle des
pensions des professeurs ; il n’y aurait pas d’inconvénient à remettre cette
question spéciale qui ne tient pas à l’ensemble de la loi sur les pensions.
Fixons donc à jeudi la discussion de la loi sur le jury ; nous serons libres
mercredi de décider si cette fixation est définitive ou non.
- La chambre fixe à jeudi la
discussion de la loi sur le jury.
Rapport sur diverses pétitions et sur les amendements du gouvernement
aux articles 6 et 21
M. Malou, rapporteur. - La chambre a renvoyé à la
section centrale diverses pétitions et deux amendements relatifs à la loi des
pensions. La section centrale s’en est occupée ce matin. Je rendrai compte de
ses délibérations, dans l’ordre des articles du projet.
Une pétition vous a été
adressée par le sieur Huyghe, commissaire de police à Ostende. Il demande que
les commissaires de police soient pensionnés par l’Etat. La section centrale,
pense qu’il n’y a pas lieu d’accueillir cette demande. Les commissaires de
police sont des agents communaux rétribués par la commune. Les admettre à la
pension, serait une exception à l’art 1er qui a été adopté à la séance d’hier
et cette exception ne me paraît pas admissible.
Une autre pétition, adressée à
la chambre par les fonctionnaires et employés civils du ministère de la guerre,
se rattache à l’art. 6 du projet.
D’après cet article, on ne compterait les services de ces fonctionnaires
et employés qu’à partir de l’âge de 21 ans. Il faut remarquer que sous le
régime de l’arrêté de 1814, cette condition n’était pas exigée. Ils prétendent
que l’exiger à l’avenir serait porter atteinte à un droit acquis. La section
centrale n’a pu partager cette opinion. Sans doute, la loi qui intervient sur
les pensions doit respecter les droits acquis antérieurement à son émanation,
mais il s’agit de savoir où est la limite du droit acquis en matière de
pension.
Si la législation actuelle devait être prise à
l’avenir pour règle, quant à la pension et aux diverses conditions
d’admissibilité, en ce qui concerne les fonctionnaires en exercice, la loi que
nous faisons ne pourrait recevoir son application que dans 30 ans. La loi
nouvelle dispose pour l’avenir, en ce sens qu’elle règle comment seront
rémunérés les services qui seront reconnus comme titres d’admissibilité à la
pension, soit que ces services soient antérieurs à la loi, soit qu’ils doivent
être rendus à l’avenir.
On ne porte pas atteinte aux
droits acquis en exigeant que les services admissibles désormais ne comptent
qu’à partir de 21 ans. S’il en est autrement pour les employés du département
des finances, c’est à cause des retenues qu’ils ont subies depuis 1822. La
section centrale estime, en conséquence, qu’il y a lieu de maintenir l’art. 6
du projet ; elle propose le dépôt de la pétition sur le bureau pendant la
discussion.
- Ce dépôt est ordonné.
M. Jadot. - L’honorable rapporteur de
la section centrale vient de vous dire qu’on ne pouvait maintenir la
législation existante que jusqu’à l’époque de la promulgation de la loi nouvelle.
Je n’ai pas sous les yeux le projet de loi qui a été présenté en France, je ne
puis pas vous donner le texte de la disposition qu’il contient, mais il porte
que les lois actuellement existantes continueront d’être appliquées à tous les
employés en fonctions et que la loi proposée ne recevra exécution qu’à l’égard
des employés qui seront nommés à dater de sa promulgation.
M. Malou, rapporteur. - A la fin de la séance
d’hier, M. le ministre des finances a proposé à l’article que nous allons
discuter tout à l’heure, un amendement ainsi conçu :
« Les surnuméraires dûment
commissionnés ne sont pas soumis à cette dernière condition. Il en est de même
des seconds secrétaires et des attachés de légation, pour le temps pendant
lequel ils seront employés soit à l’étranger, soit à l’intérieur, près du
département des affaires étrangères. »
La question soulevée par cet
amendement est celle de savoir si les deuxièmes secrétaires de légation et les
attachés peuvent être assimilés aux surnuméraires. La section centrale n’a pas
pensé que cette assimilation fût possible. On compte les services rendus par
les surnuméraires, parce qu’ils remplissent des fonctions continues qui, à leur
défaut, devraient être remplies par des employés rétribués.
Les attachés de légation et
les secrétaires dé légation sont en quelque sorte des surnuméraires
diplomatiques ; cependant leurs fonctions ne sont pas de même nature. Quant aux
employés du département des affaires étrangères, ceux qui ont réellement le
caractère de surnuméraires, rentrent dans le principe du projet. A leur égard,
une disposition serait donc inutile. La section centrale, à l’unanimité des
membres présents, s’est prononcée contre l’amendement de M. le ministre des
finances.
Les professeurs civils de
l’école militaire demandent à être assimilés, quant au règlement de la pension,
aux professeurs des universités. Cette pétition se rattache à l’art. 21 du
projet du gouvernement. L’examen, qui en a été fait par la section centrale a
donné lieu à un partage de voix : deux membres ont admis l’assimilation, les
deux autres ne l’ont pas admise. Il a paru aux premiers que les études étaient
de la même nature, que la loi de 1838 exigeait les mêmes connaissances, qu’elle
supposait même que, si l’école militaire avait été établie dans une ville où il
existait une université de l’Etat, les cours auraient pu être communs. Ces
membres ont d’ailleurs fait remarquer que si les fonctions étaient de même
nature, quant à leur caractère scientifique, il y avait désavantage pour les
professeurs de l’école militaire, en ce sens qu’ils n’ont pas des minervales
comme les professeurs des universités. Les deux membres qui n’ont pas admis
l’assimilation, ont surtout insisté sur cette considération que les professeurs
des universités ne sont placés dans une position exceptionnelle qu’à raison
même des minervales qui sont un supplément réel de traitement et qui n’entrent
pas en compte pour règle de la pension.
La section centrale propose le
dépôt de la pétition sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
Au sujet de l’art. 21, j’ai
encore à rendre compte, messieurs, de l’examen qu’a fait la section centrale
des amendements présentés par MM. les ministres des finances et de l’intérieur.
La section centrale a changé
le projet du gouvernement, sous deux rapports ; elle a divisé la disposition de
l’art. 21 en quatre articles distincts, le premier relatif à la pension de
l’éméritat, le second, aux pensions pour cause d’infirmités, le troisième, à
l’admissibilité d’autres services, enfin le quatrième, aux maximum. Le nouvel
amendement, est copié en quelque sorte, sauf une légère modification, sur
l’article du projet primitif. Or, il est un point sur lequel la section
centrale a insiste et dont l’amendement n’a pas tenu compte, c’est que la
disposition relative aux maximum doit dans tous les cas être étendue à toutes
les pensions des professeurs des universités. Pour l’éméritat, d’après le
projet du gouvernement et d’après le nouvel amendement, le maximum absolu de
6,000 fr. est posé, mais il n’est point établi de maximum pour les pensions
accordées aux professeurs, par suite d’infirmités. Cependant, une limite est
nécessaire, d’après l’esprit général du projet. Les professeurs dont le
traitement serait de 9,000 fr. auraient, après 25 années de service, déjà droit
à une pension de plus de 6,600 fr. Si l’on veut rester fidèle aux principes du
projet, il faut que le maximum soit rendu commun aux pensions accordées du chef
de l’éméritat et aux pensions accordées aux professeurs atteints d’infirmités.
L’amendement maintient, comme
base du traitement moyen, les trois dernières années. C’est un point secondaire
et qui sera résolu déjà en principe, lorsque nous arriverons à l’art. 21. La
section centrale a proposé d’établir ce traitement sur les cinq dernières
années. Il n’y a pas d’autre différence, quant aux pensions accordées pour
cause d’infirmités, mais il y en a quant aux pensions d’éméritat.
Le projet primitif n’accordait
pas l’éméritat, à raison de l’âge seulement, et c’était là une modification de
l’arrêté de 1816. L’amendement au contraire permet de déclarer émérite le
professeur âgé de 70 ans, quel que soit le nombre de ses années de service,
pourvu que ces années ne soient pas inférieures à 25 ans, ou après 30 années
dans l’enseignement académique, quel que soit son âge.
La section centrale s’est
demandé d’abord comment il était possible de distinguer ainsi entre les
services admissibles aux termes de la loi et les services académiques.
Probablement telle n’a pas été l’intention du gouvernement, mais il résulterait
du paragraphe premier de l’amendement qu’un professeur à l’âge de 70 ans
pourrait être déclaré émérite, c’est-à-dire avoir le traitement entier, bien que
n’ayant rendu des services dans l’enseignement académique que pendant un petit
nombre d’années. Ce serait une étrange anomalie, car l’éméritat est attaché,
comme faveur spéciale, à de longs services rendus dans l’enseignement
académique.
La section centrale n’a pas
pensé qu’il fallût modifier les dispositions qu’elle vous a proposées. Déjà
dans son rapport elle a indiqué les motifs pour lesquels, d’accord sur ce point
avec les propositions primitives du gouvernement, elle n’admettait pas
l’éméritat à raison de l’âge seulement
Supposons, messieurs, qu’un
professeur âgé de 70 ans n’ait consacré qu’un certain nombre d’années à
l’enseignement académique ; déjà ces années pourront lui être comptées à raison
d’un 35ème, et les autres services à raison d’un 60ème. Cette faveur et les
autres qui sont consacrées par le projet, ont paru suffisantes. La section
centrale maintient, en conséquence, les articles 16 et suivants de son projet.
Il me reste, messieurs, à
rendre compte de l’examen que la section centrale a fait d’une pétition de MM.
les bourgmestre et échevins de la ville d’Anvers demandant que les pensions des
professeurs de l’académie royale soient mises à la charge de l’Etat.
L’académie d’Anvers porte le
titre d’Académie royale. Il paraît, d’après les indications fournies, que la
moitié de ses dépenses est couverte par un subside de l’Etat, et l’autre moitié
par un subside de la ville d’Anvers. Les professeurs sont nommés par le
gouvernement et il paraît même que l’administration communale reste étrangère à
ces nominations. Dans ces circonstances, messieurs, et d’après la discussion
même qui a eu lieu dans la séance d’hier, au sujet de l’art. 1er, il paraît
évident qu’une exception au principe général de cet article devrait être, pour
déclarer les professeurs de l’académie d’Anvers admissibles à la pension à la
charge de l’Etat.
Cette exception n’a cependant
pas été admise par la section centrale, et déjà les motifs vous en ont été
indiqués.
Les exceptions de cette
espèce, par leur nombre, par leur importance, compromettraient entièrement le
principe de la loi ; si on les considère séparément, l’équité peut les
justifier, mais réunies, elles vicient en quelque sorte toute la loi des
pensions. La section centrale se borne donc à proposer le dépôt de la pétition
sur le bureau, pendant la discussion du projet de loi.
Amendements du gouvernement
M.
le ministre des finances (M. Mercier) -
Messieurs, la réclamation dont vient de parler l’honorable rapporteur de la
section centrale, est aussi parvenue au gouvernement. Le collège des
bourgmestre et échevins de la ville d’Anvers nous a signalé la lacune qui
existe dans le projet, en ce qui concerne l’académie royale des beaux-arts.
D’un autre côté, le collège
des bourgmestre et échevins de la ville de Liége a signalé une autre lacune, en
ce qui concerne le conservatoire de musique de cette ville.
Nous avons pensé, messieurs,
qu’il était juste de comprendre les professeurs de l’Académie royale des
beaux-arts, ainsi que ceux des conservatoires de musique dans la catégorie des
membres du corps enseignant ayant des titres à la pension. Nous nous sommes
donc concertés, M. le ministre de l’intérieur et moi, pour former une nouvelle rédaction
des articles 23 et 24 du projet de loi.
Cette rédaction est ainsi
conçue :
« Art. 23. Les professeurs
nommés par le gouvernement et dont le traitement est payé par le trésor public
; les directeurs et professeurs des conservatoires royaux de musique de
Bruxelles et de Liége, ceux de l’école royale de gravure de Bruxelles, ainsi
que les directeurs et professeurs des écoles primaires supérieures, seront
admis à la pension, et leur pension sera liquidée conformément au chapitre
premier de la présente loi. »
« Art. 24. Le directeur
et les professeurs de l’académie royale des beaux-arts d’Anvers seront admis à
la pension, et cette pension sera liquidée conformément au chapitre premier de
la présente loi ; la moitié en sera à la charge du trésor public, et l’autre
moitié à la charge de la commune.
« Les professeurs dont le
traitement n’est pas payé par le trésor public, mais qui sont nommés par le
gouvernement ou dont la nomination est soumise à son agréation, seront admis à
la pension, et leur pension sera liquidée conformément au chapitre premier de
la présente loi ; le tiers de leur pension sera à la charge du trésor public.
« Les pensions des
instituteurs communaux primaires continueront à être régies par les
dispositions prises ou à prendre en vertu de l’art. 27 de la loi du 23
septembre 1842. »
- Ces amendements seront
imprimés et distribués.
Discussion des articles
M. le président. - Nous en revenons à la
discussion des articles du projet de loi.
Titre
Ier. - Des pensions de retraite
Chapitre
Ier. Des pensions de retraite en général
Section premier. Admission à la pension
Article 6
M. le président. - La chambre en est restée à
l’art. 6, ainsi conçu :
« Art. 6. Sont
susceptibles de conférer des droits à la pension :
« A. Les services civils
ou judiciaires, rendus depuis l’âge de 21 ans, par suite de nominations faites
en exécution des lois ou émanées du gouvernement et rétribuées par le trésor
public. Le surnumérariat dûment commissionné n’est pas soumis à cette dernière
condition. »
La section centrale propose de
rédiger ainsi le § B :
« B. Les services militaires
effectifs, à partir de l’âge de 16 ans révolus. »
M. le ministre des finances a
proposé, par amendement, de terminer l’art. 6 par la disposition suivante :
« Les surnuméraires dûment
commissionnés ne sont pas soumis à cette dernière condition. Il en est de même
des seconds secrétaires et des attachés de légation, pour le temps pendant
lequel ils seront employés soit à l’étranger, soit à l’intérieur près du
département des affaires étrangères. »
M. le
ministre des affaires étrangères (M. Goblet d’Alviella) -
Messieurs, je suis très étonné que l’on n’ait pas reconnu la justice et la
convenance de l’amendement présenté par mon collègue M. le ministre des
finances en faveur des seconds secrétaires et des attachés de légation. Non
seulement ces fonctionnaires ne sont pas rétribués, mais encore ils sont
forcés, dans la position qu’ils occupent, à des dépenses extraordinaires.
Pour ces fonctionnaires, les
années de désintéressement sont fort nombreuses : on est ordinairement
plusieurs années attaché de légation avant d’obtenir le rang de secrétaire de
2ème classe, et quand on y est parvenu, ou n’obtient pas encore
d’appointements. Pour être rétribué, il faut être secrétaire de 1ère classe, et
on ne le peut devenir qu’après avoir occupé la 2ème classe pendant trois
années, Il est évident d’après cela, messieurs, que tout homme qui entrera dans
la diplomatie comme attaché atteindra désormais sa trentième année avant
d’obtenir aucun traitement.
En présence de tels
désavantages, il serait de toute injustice qu’arrivés à l’âge de 65 ans, après
avoir traverse les vicissitudes d’une carrière de 30 années de service actif,
il ne leur fût pas tenu compte des années où ils ont montre le plus de
désintéressement, le plus d’abnégation personnelle. Je ne puis donc croire que
si la question est bien envisagée, on puisse repousser la proposition qui vous
est faite par le gouvernement.
M. Donny. - Messieurs, l’art. 6, au §
A, pose en principe qu’aucune pension ne sera accordée en vertu de la loi en
discussion, que pour autant que la personne à pensionner ait été rétribuée par
le trésor public. Voilà le principe général. Mais en posant ce principe, on a
senti qu’il était trop absolu, qu’il fallait nécessairement y apporter des
exceptions, et dans le projet de loi de même on en a fait une première en
faveur des surnuméraires dûment commissionnés. Cette exception, messieurs, me
paraît extrêmement rationnelle, et je l’adopte sans aucune difficulté.
Dans la séance de hier, M. le
ministre des finances vous a proposé une seconde exception, en faveur des
seconds secrétaires et des attachés de légation pour le temps pendant lequel
ils sont employés, soit à l’étranger, soit à l’intérieur, auprès du département
des affaires étrangères.
Il me semble, messieurs, que
cette seconde exception est aussi rationnelle que la première. Je dirai même
qu’il me semble qu’elle est mieux fondée encore que l’autre.
L’exception proposée par M. le
ministre s’applique à deux cas : au cas où l’attaché se trouve employé au
département des affaires étrangères et au cas où il se trouve à l’étranger.
Quant au premier cas, je ne
puis pas, je l’avoue, voir la moindre différence entre un attaché diplomatique
travaillant gratuitement dans les bureaux de M. le ministre des affaires
étrangères et un surnuméraire travaillant également dans les mêmes bureaux, sans
recevoir de salaire. Il n’y a pas, selon moi, la moindre différence entra les
deux positions, et si l’on a accepté l’exception pour les surnuméraires
ordinaires, il faut, me semble-t-il, pour être conséquent, l’accepter aussi
pour les attachés qui se trouvent dans la même position.
Quant aux attachés qui se
trouvent à l’étranger, mais, messieurs, ils rendent dans les chancelleries à
l’étranger les mêmes services qu’ils rendraient au département des affaires
étrangères, s’ils se trouvaient dans le pays. Il y a de plus en leur faveur,
qu’ils sont obligés, par la position qu’ils ont à l’étranger, de faire beaucoup
plus de dépenses, beaucoup plus de sacrifices que s’ils se trouvaient simples
surnuméraires.
J’accepte donc avec
empressement la seconde exception qui vous est proposée.
Mais il en est une troisième
qui me paraît également de nature à devoir être adopté par la chambre, c’est
celle que j’aurai l’honneur de proposer en faveur des commissaires de police.
Les commissaires de police,
messieurs, sont des fonctionnaires qui rendent des services d’une part aux
communes, et d’autre part au ministère public ; ils se trouvent à la fois à la
disposition des régences et des officiers du parquet ; il y a plus, messieurs,
ils sont appelés à remplir les fonctions du ministère public devant les
tribunaux de simple police. Ce sont donc bien réellement des fonctionnaires de
l’Etat, au moins pour une partie de leurs attributions.
D’après cela, l’équité et la
raison sembleraient exiger que leur traitement fût payé en partie par les
communes et en partie par le trésor. Messieurs, il n’en est pas ainsi, non pas
par suite de quelque considération d’équité ou de bonne administration, mais
simplement parce qu’on a voulu maintenir ce qui existe depuis longtemps.
Aujourd’hui,
l’Etat a donc dans les commissaires de police des fonctionnaires qu’il ne
rétribue pas, mais qui sont payés pour lui par les communes. Je pense,
messieurs, que l’Etat devrait tenir compte de cet état de choses, et que tout
en laissant les traitements de commissaires de police à la charge des communes,
il devrait se charger de leur pension. De cette manière, les charges provenant
de ces fonctionnaires seraient partagées entre l’Etat et les communes, et ce ne
serait pas le premier, qui serait lésé dans cette espèce de partage.
Je proposerai donc, par
sous-amendement, à l’amendement qu’a déposé, dans la séance d’hier, M. le
ministre des finances, de rédiger ainsi la dernière partie de l’art. 6 :
« Ne sont pas soumis à
ces dernières conditions ; 1° les commissaires de police ; 2° les surnuméraires
dûment commissionnés ; 3° les deuxièmes secrétaires et les attachés de légation
pour le temps pendant lequel ils sont employés, soit à l’étranger, soit à
l’intérieur près du département des affaires étrangères. »
- L’amendement de M. Donny est
appuyé.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, j’ai déjà
indiqué les motifs pour lesquels la section centrale n’avait pas admis
l’assimilation proposée entre le surnumérariat et la position d’attaché ou de
second secrétaire de légation.
On compte au surnumérariat
quelques années de stage administratif, parce que ce stage impose des devoirs
continus, et de tous les jours, qu’il s’agit enfin de véritables fonctions.
Mais nous savons tous quels peuvent être les devoirs journaliers d’un second
secrétaire de légation, d’un attaché de légation. C’est un stage diplomatique,
si l’on veut, mais ce stage diplomatique, l’expérience est là pour le prouver,
n’est pas bien pénible.
Les années sont fort
nombreuses, nous dit M. le ministre des affaires étrangères ; messieurs, c’est
une raison pour ne pas les compter. Vous admettez quelques années de
surnumérariat à celui qui va ensuite consacrer au pays presque toute son
existence. Mais qu’une personne ait été pendant dix ou douze ans
diplomate-amateur, c’est-à-dire, attaché ou second secrétaire de légation,
qu’ensuite pendant quelques années elle ait un traitement qui sera
nécessairement assez élevé, elle serait en droit de réclamer une très forte
pension.
Il y
a une différence notable entre le surnuméraire obligé à un service régulier et
le deuxième secrétaire ou l’attaché de légation, et il n’y a aucune injustice à
ne pas accorder à ces derniers les mêmes faveurs qu’au premier.
Quant aux commissaires de
police, il me paraît évident que l’exception proposée n’est nullement
admissible.
Le commissaire de police est
un fonctionnaire communal, rétribué par la commune. On ne peut déroger au
principe qui a été voté hier, sans ouvrir la porte à des réclamations
incessantes de tous les fonctionnaires mixtes. Le commissaire de police a des
devoirs de plusieurs ordres ; il rend, dans le sens le plus étendu, des
services à l’Etat.
Mais, messieurs, cette
distinction que nous faisons sans cesse entre l’Etat, les provinces et les
communes, n’est autre chose qu’une sorte de fusion administrative. L’employé
provincial, l’employé communal, dans le sens le plus étendu, rend des services
publics. Mais la question que soulève la loi des pensions est celle de savoir
si des services rendus à l’Etat d’une manière indirecte, c’est-à-dire, à la
province, à la commune, doivent être rémunérés par l’Etat.
L’on pourrait même considérer
l’amendement de l’honorable M. Donny comme déjà rejeté par l’adoption de l’art.
1er.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) -
Messieurs, il existe dans la diplomatie belge, comme dans toutes les
diplomaties, des secrétaires et des attaches de légation. Les secrétaires de
légation sont ordinairement partagés en deux classes. En Belgique, il n’y a de
traitements affectés qu’à la première classe ; les seconds secrétaires de
légation ne sont pas rétribués, et il en est de même des attachés de légation.
C’est là, messieurs, une
position tout exceptionnelle dans laquelle on a placé, par des motifs
d’économie, les seconds secrétaires et les attachés de légation. Dans les
autres diplomaties les seconds secrétaires de légation ont des traitements, et
de plus, en France, par exemple, on fait une distinction entre les attachés payés
et les attachés non payés.
Vous voyez donc, messieurs,
que dans la diplomatie belge on a déjà placé dans une position plus défavorable
les seconds secrétaires de légation et les attachés indistinctement ; les uns
et les autres ne jouissent d’aucun traitement. La question qui se présente
maintenant est véritablement celle-ci : Faut-il rendre cette position plus
défavorable encore ; faut-il (je vous prie, messieurs, de bien apprécier ces
faits), faut-il, parce que, par des motifs d’économie, on a placé les seconds
secrétaires de légation et les attachés indistinctement dans une position plus
défavorable, faut-il rendre cette position plus mauvaise encore en ne comptant
pas comme années de service le temps pendant lequel ils ont rempli gratuitement
des fonctions utiles ?
On suppose que ces employés ne
font rien, qu’ils ne sont adjoints au corps diplomatique que par une espèce de
luxe ; c’est encore là commettre une erreur, c’est même être injuste ; si les
seconds secrétaires de légation, si les attachés ne sont point payés, ce n’est
pas parce qu’ils ne rendent point de services, c’est uniquement par des motifs
d’économie ; dans beaucoup de résidences, ce sont eux qui remplissent les
fonctions de secrétaires ; prenez le budget les affaires étrangères, et vous verrez
qu’il est peu de secrétaires de légation qui reçoivent un traitement. (Interruption.)
Je vois, messieurs, que les
faits ne sont pas assez connus : je crois devoir insister. On croit
généralement qu’il s’agit de donner une extension au principe de la loi. C’est
une erreur : dans la diplomatie belge, il n’est alloué de traitement qu’aux
premiers secrétaires de légation, il n’y a point de traitement
pour les seconds secrétaires, ni pour les attachés ; dans les autres pays, au
contraire, il y a des traitements pour les seconds secrétaires et pour ce qu’on
appelle la première classe des attachés, c’est pour des motifs d’économie que
le gouvernement ne vous demande point de traitement, ni pour les seconds
secrétaires, ni pour les attachés. Voilà donc une position défavorable faite à
ces membres du corps diplomatique belge ; faut-il maintenant aller plus loin ;
et, parce que ces fonctionnaires, par exception en Belgique, ne reçoivent point
de traitement, faut-il encore ne pas compter pour la liquidation de la pension
qui pourra leur être due plus tard, ne pas compter les années pendant
lesquelles ils auront été secrétaires non payés, attachés non payés ?
Je dois supposer, messieurs,
que c’est par un véritable oubli que ces membres du corps diplomatique n’ont
pas été compris dans le premier projet de loi sur les pensions.
Nous posons en fait,
messieurs, que ces membres du corps diplomatique belge sont nécessaires, que
dans beaucoup de résidences, ils remplissent les fonctions de secrétaire
auxiliaire collaborateur du ministre ou du chargé d’affaires, que ce n’est pas
du tout par une espèce de luxe qu’ils sont attachés au corps diplomatique,
uniquement pour faire je ne sais quelle escorte au ministre ou au chargé
d’affaires. Ces employés sont nécessaires, j’en appelle à tous ceux qui ont
appartenu au corps diplomatique belge ; ils sont nécessaires, mais ils sont
placés dans une position tout à fait défavorable ; on les prive de tout
traitement aussi longtemps qu’ils sont seulement seconds secrétaires ou
attachés.
M. Orts. - Messieurs, à la fin de la séance
d’hier, j’ai demandé la parole pour présenter à l’art. 6 un amendement qui
rentre dans le sens de la deuxième des pétitions dont l’honorable rapporteur
nous a entretenus. L’art. 6 dit que pour les fonctionnaires civils ou de
l’ordre judiciaire, le temps de service ne sera compté qu’à partir de 21 ans,
tandis que pour les militaires, le service effectif est compté depuis l’âge de
16 ans. Je me suis demandé, messieurs, s’il ne fallait pas éviter d’enlever une
espèce de droit acquis aux fonctionnaires qui seront en exercice au moment de
la promulgation de la loi et qui ont rempli des fonctions même rétribuées avant
leur 21ème année. Pour ce qui concerne l’ordre judiciaire, je crois que la
chose est impossible, car il faut être majeur pour remplir des fonctions
judiciaires ; pour les militaires, on exige l’âge de 16 ans, et je pense
qu’avant 16 ans, il n’est guère de militaires qui aient rendu des services ; un
de mes honorables collègues, que j’ai consulté à cet égard, m’a dit qu’il est
même très rare qu’on en rende à cet âge ; ma sollicitude ne porte donc que sur
des fonctionnaires qui n’appartiennent ni à l’ordre judiciaire, ni à l’armée.
La classe en est nombreuse ; cependant l’exception que je propose d’établir
n’aura pas un effet bien large, car elle s’appliquera seulement aux
fonctionnaires qui auraient eu le bonheur d’être placés avant l’âge de 21 ans,
là où la loi n’exige pas la majorité.
Il se présente ici une
question de rétroactivité, de droits acquis à enlever, et cette question est
très délicate, Enlève-t-on un droit acquis à celui qui est entré en fonctions
avant l’âge de 21 ans et sous le régime de l’arrêté-loi de 1814 ? D’après cet
arrêté-loi, les services rendus avant la majorité étaient comptés pour le
règlement de la pension ; les fonctionnaires qui ont rendu des services avant
l’âge de 21 ans sons l’empire de l’arrêté-loi de 1814 ont donc une espèce de
droit à voir compter ces services lorsqu’il s’agira de liquider leur pension.
Je ferai observer, messieurs,
que ces premières années sont souvent les plus dures pour les fonctionnaires ;
alors d’une part, les administrations exigent d’eux, et avec raison, plus
d’assiduité, plus de zèle ; d’un autre côté, les employés stimulés par un sentiment
d’émulation, par l’espoir de parvenir, se donnent plus de peine. Il me semble
donc, messieurs, que ces premières années devraient entrer en ligne de compte.
Je n’invoquerai pas le droit acquis, car on le conteste formellement. M. le
rapporteur nous dit que le taux des pensions, les conditions d’âge, que tout
peut être changé par la loi ; on a même discuté ici, pendant deux jours, la
question de savoir si l’on ne supprimerait pas toutes les pensions.
Si, donc dans la rigueur des
principes, il n’est pas exact de dire qu’on enlèverait un droit acquis aux
fonctionnaires dont il s’agit, pas plus qu’on n’enlève un droit acquis à ceux
qui devaient être pensionnés à 60 ans d’âge et qui ne le seront plus qu’à 65
ans, je dis qu’il y a au moins des motifs d’équité pour admettre une exception
en faveur des fonctionnaires dont il s’agit. D’un autre côté, les résultats
financiers de cette exception seraient très peu importants.
D’après ces considérations, je
proposerai de placer après le litt. a, un paragraphe additionnel ainsi conçu :
« Néanmoins les fonctionnaires
ou employés en exercice au moment de la promulgation de la loi, pourront
compter leurs services pour la pension à partir de leur entrée en
fonctions. »
Puisque j’ai la parole,
messieurs, je dirai un mot sur l’exception que veut introduire notre honorable
collègue, M. Donny, en faveur des commissaires de police. Je ne puis aucunement
appuyer cette proposition, car si elle devait être admise, il y aurait des
raisons bien plus puissantes à faire valoir pour une autre classe de
fonctionnaires qui, sous le double rapport administratif et judiciaire, sont
placés sur la même ligne que les commissaires de police ; ce sont tous les
bourgmestres et tous les échevins du royaume ; c’est ainsi, messieurs, que nous
arriverions aux conséquences que vous avez déjà appréciées.
Je
dirai deux mots seulement pour prouver que les bourgmestres et les échevins
auraient plus de droits à être pensionnés que les commissaires de police.
Vous savez, messieurs, que les
bourgmestres et les échevins remplissent, dans certaines circonstances, les
fonctions d’officiers de police judiciaire. La police est exercée par les
bourgmestres et échevins et par les commissaires de police. Les bourgmestres et
échevins et les commissaires de police exercent aussi une partie des
attributions judiciaires. En matière répressive, les contraventions de simple
police doivent, dans le cercle d’une certaine compétence, être jugées par le
juge de paix, et dans ce cas le commissaire de police remplit les fonctions de
ministère public ; mais il est certaines catégories de contraventions
déterminées par le code d’instruction criminelle, qui ne peuvent être jugées
par le juge de paix que concurremment avec le bourgmestre, et dans ce cas ce
sont les échevins qui remplissent les fonctions de ministère public.
Vous voyez donc, messieurs,
qu’il est impossible de faire une exception pour les commissaires de police,
sans en faire une au même instant pour tous les bourgmestres et échevins du
royaume. Maintenant, que l’on soit sans sollicitude à l’égard de la plupart de
ces fonctionnaires ; l’indemnité accordée aux bourgmestres et échevins est
payée par les communes ; ils ne sont donc pas rétribués par l’Etat. D’un autre
côté, il existe dans beaucoup de grandes villes des caisses de pension
auxquelles prennent part les commissaires de police et leurs adjoints. Cela
n’est pas général, aussi je ne donne pas cette raison comme péremptoire.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, ce que j’avais
craint se réalise ; la brèche est ouverte, toute la loi va peut-être y passer ;
il ne s’agissait d’abord que de quelques surnuméraires diplomatiques, si l’on
veut bien me pardonner l’expression ; maintenant, il s’agit de la classe
beaucoup plus nombreuse des commissaires de police ; je croyais un instant
qu’il allait être question des bourgmestres et échevins, peut-être de toute la
population de la Belgique, avant que la chambre arrivât à la fin de l’art. 6.
Messieurs, je pense remplir un
devoir en résistant à toutes ces exceptions.
La première, celle qui
concerne les agents diplomatiques, je l’ai déjà combattue par plusieurs motifs
qui n’ont point été réfutés et sur lesquels je ne reviendrai pas. Que vous a
dit, en effet, M. le ministre de l’intérieur ? Que c’est par une raison
d’économie qu’on ne rétribue pas ces fonctionnaires, que leur position étant
déjà défavorable, il ne faut pas créer une seconde défaveur.
Mais, messieurs, si ces
fonctionnaires sont nécessaires dans la diplomatie, il faut les rétribuer, et
s’ils sont inutiles, il ne faut pas leur conférer des titres à la pension.
Veuillez remarquer la relation
qui existe, d’une part, entre le principe qu’on rémunère seulement les services
rétribués, et, d’autre part, les conséquences financières de la loi.
Lorsque vous déclarez
admissibles à la pension des fonctionnaires rétribués, comme vous êtes appelés
à voter des crédits, vous avez en mains chaque année un moyen de contrôle, pour
qu’on ne crée pas, en dehors des nécessités reconnues, des droits à la pension.
Il en est autrement pour ces surnuméraires diplomatiques.
J’admets que jusqu’à présent
le désir d’être second secrétaire ou attaché de légation, d’avoir un titre
diplomatique dans une capitale de l’Europe, n’est pas très développé ; mais
s’il se développait, où serait la limite aux nominations du gouvernement ? S’il
n’y a pas de limite, si le gouvernement peut créer un grand nombre de ces
agents secondaires investis d’un simple titre honorifique, qui peut être fort
flatteur pour eux, mais fort inutile au pays, ne crée-t-on pas une charge pour
le trésor, une charge parfaitement injustifiable ?
Il m’est impossible, sans
doute, de définir en quoi consistent ces fonctions. J’admets que dans une ou
deux légations il peut y avoir un travail réel pour le deuxième secrétaire, ou
pour un attaché ; mais ceux qui passeront par ces postes, qui rempliront
convenablement ces devoirs, non par nominaux, mais réels, conquerront
promptement un titre à l’obtention d’un traitement ; ce traitement sera
d’emblée très élevé, la pension qui est relative au traitement sera également
considérable. Ainsi, pour ceux qui rendent des services, le motif d’exception
disparaît, et quant aux autres l’exception est inadmissible.
Les
commissaires de police, les bourgmestres, tous les autres fonctionnaires mixtes
ne peuvent avoir des droits à la charge de l’Etat. Déjà, dans la séance d’hier,
j’ai fait remarquer que leur refuser des droits à la charge de l’Etat, ce n’est
pas les livrer au besoin dans leurs vieux jours ; ainsi, dans les grandes
villes, comme l’a dit l’honorable M. Orts, il existe des caisses de pensions,
ou des règlements sur la pension.
Ne peut-on pas faire pour les
commissaires de police ce qu’on a fait dans une province, dans plusieurs
provinces peut-être pour les secrétaires communaux ? On peut établir des
retenues, des caisses de secours ou de pension. Le principe que je défends
consiste seulement à ne pas rémunérer à la charge du trésor public les
fonctionnaires qui rendent indirectement des services à l’Etat ; tous les
autres moyens de rémunération, analogues à la position de ces fonctionnaires,
aux services qu’ils rendent, continuent à exister ; le gouvernement pourra
seconder l’action des autorités communales et provinciales ; il pourra même, au
besoin, donner l’impulsion.
L’honorable M. Orts, en
assimilant, quant aux attributions, les bourgmestres et les échevins aux
commissaires de police, a commis une erreur que je crois devoir signaler. Les
articles du code d’instruction criminelle que l’honorable membre a cités ont été
reconnus contraires à la constitution ; il y avait là, comme l’a dit un arrêt
du 29 mars 1833, confusion du pouvoir administratif et du pouvoir judiciaire.
Aussi, un bourgmestre qui s’était érigé en juge, a-t-il vu sa justice renversée
par arrêt de la cour de cassation.
M. Dumortier. - Messieurs, je ne puis
partager l’opinion de l’honorable préopinant, en ce qui concerne les seconds
secrétaires de légation. Il confond les seconds secrétaires de légation avec
les attachés. Les attachés sont de véritables surnuméraires, mais les seconds
secrétaires sont des agents réels ; ils exercent des fonctions, seulement ils
ne sont pas rétribués sur le trésor public.
Maintenant, on nous dit : Si
ces agents sont nécessaires, qu’on les rétribue. Pour éviter un mal, on veut en
créer un second, cela ne me paraît pas logique. Dès l’instant qu’il est reconnu
que c’est seulement par économie que les seconds secrétaires n’ont pas été
rétribués jusqu’ici et puisqu’ils rendent des services réels, on ne peut
contester leurs droits à la pension ; mais il me paraît singulier que, pour
établir ces droits, qui me paraissent incontestables, on veuille créer une
nouvelle charge pour le trésor public, on veuille faire rétribuer les seconds
secrétaires.
Je dis, messieurs, que les
seconds secrétaires rendent des services réels, il faut ignorer complètement
l’organisation de nos légations, pour prétendre le contraire. Les seconds
secrétaires sont employés du matin au soir, surtout dans les capitales avec
lesquelles la Belgique a de fréquents rapports. Il y a plus, lorsque le
ministre plénipotentiaire est absent, le premier secrétaire devient chef de
légation, et le second secrétaire remplit les fonctions de premier secrétaire.
Cette organisation est indispensable. Il faut être juste envers tout le monde,
et, dans l’espèce, ce serait aller trop loin que de ne pas adopter l’amendement
de M. le ministre des affaires étrangères.
En est-il de même des commissaires
de police ? Je ne le pense pas :
Les commissaires de police
sont des agents exclusivement locaux rétribués par la localité, et dès lors
l’Etat ne doit pas intervenir dans les pensions accordées à ces fonctionnaires.
L’honorable M. Orts, par son
amendement, veut qu’aux fonctionnaires, actuellement en fonctions, on compte
les années de surnumérariat et toutes les années antérieures à l’âge de 21 ans.
Je ferai remarquer à
l’honorable membre qu’il y a une disproportion considérable dans la situation
des fonctionnaires publics, selon qu’ils dépendent de tel ou tel ministère.
Ainsi les fonctionnaires de l’administration des finances entrent souvent comme
surnuméraires à l’âge de 20, de 18 ans, et même à un âge inférieur à 18 ans.
Quand ils ont atteint l’âge de 46 ans ou de 48 ans, ils ont accompli leurs 30
années de service, et alors avec un certificat de maladie, on se fait accorder
une pension à charge du trésor, tandis que les conditions sont bien
différentes, par exemple, dans l’ordre judiciaire où l’on ne peut entrer
qu’après avoir parfait ses études, obtenu le diplôme de docteur en droit et
fait un stage pendant quelques années. Lorsque nous nous sommes occupés de la
loi des pensions en 1841, j’ai fait remarquer cette énorme différence à l’assemblée,
et c’est pour égaliser en quelque sorte les positions qu’on a admis qu’il
fallait avoir 21 ans révolus pour avoir droit à la pension.
J’insiste donc pour que la
chambre adopte purement et simplement le § A du projet du gouvernement, auquel
la section centrale s’est ralliée.
Mais j’ai un doute,
relativement au litt. B ; il s’agit, dans ce paragraphe, de compter, dans le
calcul de la pension, les services militaires, à partir de l’âge de 16 ans.
Si
nous faisions la loi des pensions militaires, je concevrais qu’on fît compter
les services à partir de l’âge de 16 ans, mais nous faisons ici la loi des
pensions civiles. Il résulterait de la disposition, si elle était adoptée, qu’à
46 ans un fonctionnaire qui aurait passé ses premières années sous les drapeaux
aurait atteint ses 30 années de service et pourrait obtenir sa pension au moyen
d’un certificat de complaisance, comme cela est arrivé souvent. Je vous le
demande, est-ce là une bonne chose ? Je voudrais savoir sur quoi repose cette
idée de faire remonter jusqu’à l’âge de 16 ans les services militaires comptés
pour la pension civile. Je le répète, s’il s’agissait de pensions militaires,
je serais le premier à proposer une disposition semblable, mais il s’agit de
pensions civiles, et je ne vois pas pourquoi on dérogerait au principe admis,
de ne compter les services civils qu’à partir de l’âge de 21 ans.
Je désirerais avoir une
explication sur ce point ; si on ne m’en donnait pas une satisfaisante, je
voterais contre le 2ème § de l’article qui me paraît détruire le principe posé
dans la loi. Il me paraît que ce principe, de ne compter les services qu’à
partir de 21 ans, n’est que le rétablissement du principe d’égalité qui doit
régler la loi des pensions. Mais dit-on, les employés ont des droits acquis. Je
ne reconnais pas de droits acquis en matière de pensions. Les lois de pensions
n’établissent pas des droits, mais des faveurs. Si vous n’examinez que la
question du droit, le fonctionnaire, comme le particulier, doit faire des
économies pour vivre plus tard. La loi des pensions est une loi de faveur et de
générosité, Quels sont ces droits acquis qu’on invoque des droits de
surnumérariat qui reposaient sur un abus, le plus souvent ? Il est peu de
surnuméraires admis avant l’âge de 21 ans ; ceux qu’on admet avant cet âge sont
plutôt admis par faveur qu’en vertu d’un droit. La loi pourra créer un droit
quand elle sera votée, mais il n’est pas de droits acquis qu’on puisse lui
opposer.
M. d’Hoffschmidt. -
Messieurs, il m’est impossible aussi d’admettre l’opinion de l’honorable
rapporteur de la section centrale sur l’amendement de M. le ministre des
affaires étrangères. Et effet, il admet l’exception pour les surnuméraires du
ministère des finances, mais il ne l’admet pas pour les deuxièmes secrétaires
de légation et pour les attachés. Cependant, quoique je l’aie écouté
attentivement, il m’a été impossible de saisir la différence qui existait entre
les fonctions des premiers et celles des seconds, entre le droit des uns, à
l’exclusion des autres, à l’exception qu’on réclame. Le surnuméraire des
finances travaille dans les bureaux de ce département, les deuxièmes
secrétaires et les attachés, s’ils sont à l’intérieur, travaillent dans les
bureaux du département des affaires étrangères, et s’ils sont à l’extérieur
dans les bureaux soit du ministre plénipotentiaire soit du chargé d’affaires ;
et s’il y a une différence, elle me semble toute en faveur de ces derniers, car
ils doivent faire les dépenses considérables, abandonner leur patrie et
quelquefois traverser les mers et courir ainsi des dangers auxquels ne sont pas
exposés les surnuméraires des autres départements. La différence est donc en
faveur des fonctionnaires qu’a en vue l’amendement de M. le ministre des
affaires étrangères.
On a dit que si ces
fonctionnaires sont utiles, il faut les rétribuer, que s’ils sont inutiles, il
n’est pas nécessaire de leur accorder des pensions. Cet argument peut
s’appliquer aux surnuméraires, tout aussi bien qu’aux deuxièmes secrétaires et
attachés de légation ; il n’y a pas la moindre différence. Ainsi, si vous voulez être justes, il faut ou supprimer l’exception
pour tout le monde, pour les surnuméraires comme pour les autres ; ou si vous
admettez cette exception en faveur de ces derniers, il faut l’admettre aussi en
faveur des deuxièmes secrétaires de légation ; sans cela, vous aurez deux poids
et deux mesures.
Quant aux commissaires de
police, je crois que la proposition de l’honorable M. Donny n’a pas grande
chance d’être adoptée ; elle serait en contradiction avec l’opinion qui a
semblé dominer hier En effet, hier un honorable membre avait parlé d’employés
qui mériteraient aussi d’être admis à la pension, des employés des
commissariats d’arrondissement.
On n’a pas adopté la
proposition à la section centrale, et elle n’a pas trouvé plus de faveur dans
la chambre, parce que ces employés ne sont pas rétribués directement sur le
trésor public. Cette condition manque également aux commissaires de police ;
pourquoi ferait-on une exception en faveur de ces derniers, quand on refuse de
la faire en faveur d’employés qui sont dans des conditions plus avantageuses ?
En effet, les employés des commissariats d’arrondissement ne peuvent attendre
de pension ni de l’Etat, ni de la province, ni de la commune, tandis que les
commissaires de police peuvent en espérer une de l’administration communale. Je
crois que, quant aux commissaires de police, si vous admettiez l’exception
qu’on vous propose, vous devriez l’étendre à beaucoup de fonctionnaires, et déjà
on vous cité les bourgmestres et les échevins. Quant aux deuxièmes secrétaires
de légation, nous n’avons pas à redouter qu’il en résulte une grande charge
pour le trésor. Je crois donc que nous devons adopter l’amendement qui les
concerne et nous borner à cela.
M. le
ministre des affaires étrangères (M. Goblet d’Alviella) -
Je demande la parole pour répondre quelques mots à l’honorable rapporteur de la
section centrale. Il vous a dit que si les attachés et les seconds secrétaires
étaient nécessaires et travaillaient, il fallait les payer. On sait bien
quelles difficultés éprouverait le gouvernement s’il demandait une augmentation
d’allocation pour les missions à l’étranger.
On sait que déjà, bien qu’il
ait réduit au strict nécessaire les allocations pour les légations, combien il
a de peine, chaque année, pour les obtenir.
Il ne faut pas perdre de vue
que, dans une nation comme la nôtre, qui ne compte pas de longues années
d’existence, les fonctionnaires ne sont pas échelonnés sur tous les âges de la
vie. Le personnel de notre diplomatie est, si je puis m’exprimer ainsi, jeune
de la tête à la queue. Nécessairement il ne s’y fait pas de vide, comme il s’en
fait naturellement dans les administrations, depuis longtemps organisées, des
vieilles nations.
Voilà, messieurs, ce qui rend
impossible de donner à certains sujets très capables la position rétribuée
qu’ils méritent. Si je voulais apporter ici des noms propres, je pourrais citer
des employés qui, depuis six à sept ans, remplissent avec zèle et intelligence
les fonctions qui leur sont confiées et à qui il ne m’a pas été permis de
donner le moindre traitement,
Je pense que ces
considérations pourront vous déterminer à adopter l’amendement.
M. de Saegher. -
Messieurs, l’art. 1er du projet de loi que nous avons adopté hier exige, comme
condition d’admissibilité à la pension, que les fonctionnaires soient rétribués
par le trésor public. Faut-il dévier de cette règle générale ? Faut-il poser
une exception quelconque à la règle ? Je dois dire que ma première opinion
était, d’après tout ce que j’avais entendu dans cette enceinte, qu’il ne
fallait dévier, sous aucun rapport, de la règle générale que nous avions posée
; qu’ainsi on ne devait pas même admettre d’exception pour les surnuméraires.
Cependant, d’après ce que je viens d’entendre dans cette séance, ma conviction
se trouve un peu ébranlée.
Les honorables préopinants ont
fait valoir, en faveur des deuxièmes secrétaires de légation, des arguments qui,
je dois le reconnaître, ne sont pas sans importance. Mais s’il en est ainsi, il
est une autre classe de fonctionnaires qui se trouvent absolument dans les
mêmes conditions et auxquels tous les arguments qu’on a fait valoir en faveur
des deuxièmes secrétaires peuvent s’appliquer. Ce sont les juges suppléants des
tribunaux de première instance. Ces magistrats exercent des fonctions non
rétribuées, et cependant il en est parmi eux qui, dans certains tribunaux,
notamment dans les tribunaux de troisième et quatrième classe, siègent presque
aussi souvent que les juges titulaires eux-mêmes.
Pour
ma part, j’en connais un qui, depuis 12 ans, siège presque constamment et qui
n’a pas pu être placé, parce qu’à cause de certaines circonstances ; il ne
pouvait pas quitter la localité qu’il habitait. Eh bien, j’applique à ces
magistrats les arguments qu’a fait valoir M. le ministre de l’intérieur.
Faut-il, parce que, par raison d’économie, on n’a pas jugé à propos de
rétribuer ces magistrats, faut-il rendre leur position plus défavorable ?
Est-il possible de rencontrer une position qui mérite davantage d’être l’objet
d’une exception que celle des juges suppléants ? Je ne le pense pas ; car
remarquez que, pour être nommé juge suppléant, il faut avoir atteint l’âge de 25
ans accomplis. Presque toujours ceux qui sollicitent les places de juges
suppléants se destinent à la magistrature. C’est une espèce de noviciat.
Pendant cinq ou six ans ils exercent les fonctions de juges suppléants, dans
l’espoir de devenir juges effectifs. Ils ont donc le plus souvent atteint l’âge
de 30 à 35 ans avant de pouvoir obtenir une place de juge titulaire. Faut-il
maintenant priver ces magistrats de la légère faveur qu’on peut leur accorder
en comptant les années de noviciat pour la pension de retraite, afin de
subvenir, dans certains cas, à leurs besoins dans leurs vieux jours ?
Je pense, moi, que quand même
l’exception proposée pour les secrétaires de légation qui, pour la plupart,
appartiennent à la classe riche de la société, ne serait pas admise, il
faudrait dans tous les cas admettre l’exception pour les juges suppléants près
les tribunaux de première instance.
En conséquence, je propose de
sons-amender l’amendement de M. le ministre des finances en y ajoutant :
« et des juges suppléants près les tribunaux de première instance. »
M. de Muelenaere. -
Lorsqu’on a discuté l’art. 1er, j’étais d’avis qu’il y aurait justice et équité
à récompenser par une pension les services rendus a la société. Mais s’il y a
justice de la part de l’Etat, il ne faut pas qu’il y ait prodigalité dans la
collation des pensions. Les pensions ne doivent s’accorder que pour des
services réels.
Je ne dirai rien de
l’amendement proposé par l’honorable M. Donny. Je crois que nous sommes tous
d’accord que cet amendement ne peut être admis.
Quant aux surnuméraires des
administrations des finances, cette question a été examinée par la section
centrale. Quant à moi, je le déclare, je ne connais pas assez les règlements
sur cette matière pour exprimer une opinion a cet égard.
Je me bornerai donc à vous
présenter quelques observations sur l’amendement présenté par M. le ministre
des finances, d’après lequel on compterait, pour la pension aux attachés et aux
seconds secrétaires tout le temps qu’ils ont passé en cette qualité.
D’abord, si l’on entre dans la
voie de compter aux fonctionnaires, pour la liquidation de leurs pensions,
leurs services gratuits, je ne sais où ce système nous conduira ; car, pour
être juste, il faudra récompenser tous les services quelconques.
Evidemment, quelque importants
que puissent être les services des attachés, il y en a d’une plus haute
importance pour la société. On vous a cité tout à l’heure les juges suppléants.
Je suis d’avis que les juges suppléants ont au moins autant de droits que tout
autre fonctionnaire non rétribué. D’abord les inconvénients qui se produisent
ailleurs ne peuvent se produire à l’égard des juges suppléants. Le nombre des
juges suppléants est déterminé par la loi. On sait combien il peut y en avoir
dans chaque ville où siège un tribunal de première instance. Leurs fonctions
sont réelles ; ils doivent résider dans la ville où réside le tribunal.
Quant aux autres fonctions
gratuites, vous savez avec quelle facilité on procède à ces nominations. Ce
sont des faveurs qu’on sollicite du gouvernement comme elles s’accordent
facilement, comme elles ne coûtent rien au trésor, le gouvernement ne s’en
montre pas avare. C’est une objection réelle contre l’amendement. Dans l’état
actuel des choses, l’amendement ne peut être admis tel qu’il est rédigé. Mais
je crois qu’il y a une distinction à faire, que l’on ne peut compter les années
de service des attachés. La première raison, c’est que le nombre des attaches
est illimité, que le gouvernement peut en nommer tant qu’il veut.
Indépendamment
de cela, on nous dit qu’on ne leur compterait que le temps passé en pays
étranger, et leur temps de surnumérariat au département des affaires
étrangères. Quant au temps passé à l’étranger, il serait extrêmement difficile
de le déterminer. Vous savez qu’un attaché se rend à son poste, revient en
Belgique, où il passe 2 ou 3 ans, après quoi il a une autre destination. Il
faudrait, chaque fois qu’il quitte son poste, le constater par une pièce
officielle et authentique et constater l’époque à laquelle il y retourne ; cela
me paraît impossible, d’autant plus que ce sont des faits qu’il faudra
constater dans 25 ou 30 ans. Il y a des attaches nommés en 1831 qui sont encore
en fonctions, ils auraient ainsi à compter 13 ou 14 ans pour leur pension.
C’est impossible dans la pratique, il en résulterait les plus graves
inconvénients.
Je reconnais cependant que,
d’après ce qu’a dit M. le ministre des affaires étrangères, les seconds
secrétaires se trouvent aujourd’hui dans une position difficile. Ils ne sont
nommés qu’après des examens ; le nombre en est plus ou moins limité ; dès lors,
je crois qu’il y aurait possibilité de leur compter, pour la liquidation de
leur pension, le temps qu’ils passent en cette qualité ; mais cela à deux
conditions essentielles, d’abord que le nombre des seconds secrétaires fût
limite par un règlement d’administration générale ; ensuite qu’on ne leur
comptât qu’un certain nombre d’années, soit 3, 4 ou 5 ans, afin d’éviter qu’un
second secrétaire qui, après avoir quitté son poste et passé plusieurs années
en Belgique, retourne à un autre poste et puisse compter toutes les années
écoulées depuis sa nomination primitive.
Je dis donc que si
l’amendement était proposé pour les seconds secrétaires seulement, je serais
disposé à l’adopter.
M. Malou, rapporteur. - Il m’a été très difficile
de comprendre quelle influence peut avoir sur le résultat de la discussion le
point de savoir si le corps diplomatique est entièrement jeune de la tête aux
pieds.
La question est exclusivement
de savoir s’il faut comprendre dans les années qui comptent pour la pension des
services qui, d’après l’explication de l’honorable M. de Muelenaere, ne sont
pas des services effectifs, continuels, comme le sont, d’après les explications
qui nous ont été données, les services rendus par les surnuméraires dont
s’occupe l’art. 6 de la section centrale.
Il résulte, en effet, de ces
explications que les personnes qu’on appelle attachés, quittent leur légation
et viennent passer plusieurs années en Belgique ; je ne sais même pourquoi on
les appelle attachés.
J’insiste peu sur ce point,
puisque les attachés me paraissent être condamnés.
Reste les secrétaires : les
seconds secrétaires de légation peuvent être nommés à discrétion comme les
attachés ; ils peuvent, comme eux, venir passer plusieurs années en Belgique,
rester amateurs diplomates pendant nombre d’années, se créer des droits à la
pension sans avoir rendu des services continuels et pénibles. Une telle
disposition ne peut trouver place dans une loi sur les pensions.
On vous a cité des
fonctionnaires qui remplissent, à l’intérieur du pays, des fonctions
quelquefois continuelles ; ce sont les juges suppléants.
Evidemment, si vous voulez
sortir de la règle générale, des exceptions sans nombre bien mieux justifiées
que celles des seconds secrétaires se présenteront. Du moment que vous
abandonnerez la règle, rien ne vous arrêtera, car l’équité et la justice
comparative peuvent vous mener très loin dans cette matière.
J’avais négligé tout à l’heure
de dire quelques mots de l’amendement de l’honorable M. Orts. La loi nouvelle
déclare que, pour les pensions qui seront liquidées à l’avenir, on ne comptera
pas les services rendus avant l’âge de 21 ans. Comme l’a fait observer
l’honorable M. Dumortier, on rétablira ainsi, jusqu’à un certain point,
l’égalité dans les conditions d’admission maintenant si différentes dans les
diverses administrations.
Les services rendus avant la
majorité sont, en général, plutôt fictifs que réels. Il n’y a enlèvement ni
d’un droit acquis, ni d’une espèce de droit acquis, lorsqu’on se refuse à
reconnaître, pour le règlement des pensions, les services rendus avant l’âge de
21 ans. J’insiste sur ce point, que la loi nouvelle peut supprimer les
pensions. Dès lors, elle peut subordonner à des conditions nouvelles
l’obtention de la pension. Une des conditions, c’est l’admissibilité des
services, qui fait l’objet de l’art. 6.
Si
nous ne nous plaçons pas à ce point de vue, nous ne pouvons faire une loi, car
il n’y a pas un article qui n’enlève ce qu’on appelle un droit acquis.
L’honorable M. Dumortier a
demandé des explications sur le § littera B. Le § littera A est relatif aux
services civils ou judiciaires rendus depuis l’âge de 21 ans. Le littera B est
relatif aux services militaires effectifs à partir de l’âge de 16 ans révolus.
Pourquoi fixe-t-on un âge différent dans ces deux dispositions ? C’est à raison
de la diversité des services ; parce que nos lois supposent qu’on peut, avant
la majorité, rendre des services militaires effectifs, puisqu’elle appelle à
les rendre. La loi nouvelle doit d’ailleurs être mise en harmonie avec la loi
des pensions militaires ; c’est à quoi nous nous sommes attachés.
Les services militaires sont
rendus à l’Etat ; l’Etat les rémunère, il n’y a donc aucune difficulté à les
compter à dater de l’âge de 16 ans révolus et à fixer, quant à l’admissibilité,
un âge différent pour les services civils ou judiciaires.
M. Orts. - Je ferai observer, avec
l’honorable rapporteur, à l’honorable M. de Saegher que s’il faut admettre,
pour la liquidation à la pension, les années de service des juges suppléants,
quoiqu’ils ne soient pas, au vœu de l’art. 1er, rétribués par la loi, il est
une classe en faveur de laquelle je déposerai un amendement. Je veux parler des
juges consulaires nommés par le Roi et non rétribués par l’Etat. Ils rendent
des services plus importants que les juges suppléants, car leurs services sont
permanents, et les juges suppléants ne siègent que quand les titulaires ne
peuvent remplir leurs fonctions. Cela nous démontre combien il faut s’attacher
strictement aux deux règles de l’article 1er ; sans cela je ne sais où l’on
s’arrêtera. Un grand nombre de fonctionnaires qui rendent des services, qui
méritent bien de la patrie auraient droit à la pension.
Relativement
à l’amendement, je ferai observer que je n’ai pas dit qu’on enlevât un droit
acquis. Je n’ai pas invoqué l’art. 2 du code civil, parce que je sais qu’il n’y
a pas là de contrat. La question que vous aurez à examiner, lorsqu’il s’agira
du ministère des finances, de la caisse des retraites, ne se présente pas ici ;
mais j’ai fait valoir des motifs d équité. Il me semble que des jeunes gens qui
ont rendu des services à l’Etat avant l’âge de 21 ans, sous l’empire d’une
législation qui leur comptait ces années de service pour la pension, ne doivent
pas être déçus dans leur attente. C’est sous ce rapport que j’ai présenté mon
amendement.
Plusieurs membres. -
La clôture.
M. de Garcia. -
Je demande la parole contre la clôture. Je désire demander une explication a M.
le ministre des finances, explication nécessitée par les attaques dirigées
contre le § A par l’honorable M. Dumortier. Si la disposition doit être
entendue comme l’interprète l’honorable M. Dumortier, je ne pourrais voter le §
; je suis persuadé que M. le ministre ne l’entend pas ainsi.
- La clôture est mise aux voix
; l’épreuve est douteuse ; elle est renouvelée, la clôture est prononcée.
Pendant le vote, M. le ministre des finances (M. Mercier) se
rend auprès M. de Garcia et semble lui donner l’explication qu’il demandait.
M. de Chimay. - Je demande la division.
- L’amendement restreint aux
seconds secrétaires de légation est mis aux voix ; deux épreuves sont
douteuses.
M. de Muelenaere. -
Est-il entendu que le nombre seconds secrétaires sera déterminé par un règlement
?
M. le président. - On ne peut parler entre
deux votes.
M. le ministre des affaires étrangères
(M. Goblet d’Alviella) - On pourra régler cela ; dans
l’état actuel il n’y a que 4 seconds secrétaires.
- Il est procédé au vote par
appel nominal. En voici le résultat :
65 membres répondent à l’appel
nominal.
32 votent pour l’amendement.
31 votent contre,
2 s’abstiennent.
Ont voté l’adoption : MM.
Smits, Van Cutsem, Vandensteen, Van Volxem, Vilain XIIII, Coghen, d’Anethan, de
Chimay, de Garcia de la Vega, de Haerne, de Muelenaere, de Nef, de Renesse, de
Saegher, de Sécus, Devaux, de Villegas, d’Hoffschmidt, Dolez, Donny, Dumont,
Dumortier, Duvivier, Goblet, Kervyn, Lesoinne, Liedts, Lys, Meeus, Mercier,
Nothomb et Pirson.
On voté le rejet : MM.
Thienpont, Thyrion, Troye, Van den Eynde, Verhaegen, Verwilghen, Castiau,
Coppieters, David, de Baillet, de Corswarem, de La Coste, Delehaye, de Meer de
Moorsel, de Meester, de Mérode, Deprey, de Terbecq, de Tornaco, Eloy de
Burdinne, Huveners, Jadot, Jonet, Lange, Malou, Morel-Danheel, Ors, Osy,
Pirmez, Sigart et Simons.
Se sont abstenus : MM.
Wallaert et Lejeune.
En conséquence, l’exception,
en ce qui concerne les seconds secrétaires de légation, est admise.
Les membres qui se sont
abstenus sont invités à en faire connaître les motifs.
M. Wallaert. -
J’aurais voté pour l’amendement, si l’on avait admis certaines conditions qui
ont été définies par de Muelenaere. M. le ministre ne s’étant pas expliqué à
cet égard, j’ai dû m’abstenir.
M. Lejeune. - J’aurais voulu voter
l’amendement dans la limite indiquée dans la discussion, c’est-à-dire, si le nombre
des seconds secrétaires et le nombre des années de service que l’on compterait
pour la liquidation des pensions, eussent été limités. Comme M. le ministre n’a
pas donné d’explications à cet égard, je me suis abstenu.
M.
le ministre des finances (M. Mercier)
déclare retirer la partie de l’amendement qui concerne les attachés.
- L’amendement de M. Donny est
mis aux voix ; il n’est pas adopté.
L’amendement de M. de Saegher
est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
L’amendement de M. Orts est
mis aux voix ; il n’est pas adopté.
M.
le ministre des finances (M. Mercier)
déclare se rallier à l’addition du mot révolus
proposé au § B par la section centrale,
- Cette addition est mise aux
voix et adoptée.
M. Malou, rapporteur. - Par suite de l’adoption de
l’amendement relatif aux secrétaires de légation, il y a lieu de changer la
rédaction de la dernière partie du § A. Il faut changer les mots : « Le
surnumérariat dûment commissionné n’est pas soumis à cette dernière
condition, » et dire : « Les surnuméraires dûment commissionnés ne sont
pas soumis, etc. »
- Ce changement de rédaction
est adopté.
L’article est ensuite adopté
dans son ensemble.
Article 7
« Art. 7. Tout magistrat,
fonctionnaire ou employé, qui aura bien mérité dans l’exercice de ses
fonctions, pourra, à sa retraite, être autorisé par le gouvernement à conserver
le titre honorifique de son emploi. »
- Adopté.
Section II. Liquidation des pensions
M. le président. « Art. 8. Les pensions
de retraite seront liquidées, sauf les exceptions indiquées au chapitre II du
présent titre, à raison, pour chaque année de service, de 1/60 de la moyenne du
traitement dont l’intéressé aura joui pendant les trois dernières années.
« Chaque année passée en
service actif, dans l’un des emplois désignés au tableau annexé à la présente
loi, comptera, dans la liquidation, pour 1/50 de la moyenne de ce
traitement. »
La section centrale a proposé de
remplacer le mot trois par le mot cinq.
M. Osy a proposé de substituer
le mot dix au mot trois.
M.
le ministre des finances (M. Mercier)
déclare se rallier à l’amendement de la section centrale.
M. Osy. -
Messieurs, les observations qui ont été faites dans la discussion générale ont
démontré quels grands inconvénients il y a à liquider la pension sur la moyenne
des trois dernières années de traitement. Vous savez, messieurs, que, pour
obtenir une pension aussi élevée que possible, des fonctionnaires se sont très
souvent fait nommer à la fin de leur carrière, à des emplois plus lucratifs,
quoique moins élevés en rang, que ceux qu’ils remplissaient. Je crois que
l’amendement de la section centrale ne suffit pas pour faire cesser cet abus,
et qu’il faut admettre le chiffre de 10 années. Alors il n’y aura plus aucun
abus à craindre.
M.
le ministre des finances (M. Mercier) -
Messieurs, le mal auquel on veut porter remède est tout à fait atténué ; il
disparaîtra même, en quelque sorte, par suite des dispositions de la loi qui
est actuellement soumise à la chambre. Cependant, pour des motifs d’économie,
j’ai cru pouvoir me rallier à l’amendement de la section centrale, d’après
lequel les pensions seront liquidées sur la moyenne des 5 dernières années de
traitement, au lieu de l’être sur la moyenne des 3 dernières années, comme cela
s’est fait jusqu’à présent.
Messieurs,
le mal auquel on veut remédier consiste en ce que des fonctionnaires supérieurs
acceptaient, à la fin de leur carrière, des recettes, de simples places de
receveurs et obtenaient ainsi une pension de 6, 7 et 8,000 francs. Je dois
faire observer en premier lieu que depuis cinq ou six ans, aucune pension
supérieure à 6,000 fr. n’a été accordée ; ensuite, d’après le projet actuel les
pensions des receveurs seront limitées à un maximum de 4,000 francs.
L’inconvénient dont il s’agit ne se rencontrera donc plus.
Je ne puis admettre,
messieurs, l’amendement de l’honorable M. Osy. Les fonctionnaires ne
parviennent que très lentement à des grades supérieurs, et il ne faut pas que
leur pension soit liquidée sur le traitement minime qu’ils ont eu pendant un
grand nombre d’années. Je crois donc qu’en proposant de faire liquider les pensions
sur la moyenne des 5 dernières années de traitement, on a été assez loin pour
l’intérêt du trésor ; si on allait au-delà, on ne serait pas équitable envers
les fonctionnaires. En admettant le chiffre de cinq ans, vous frapperez déjà
les fonctionnaires doublement : d’abord nous réduisons les pensions par leur
base ; ensuite la loi que nous discutons ne permet plus de liquider celles des
comptables que sur les trois quarts du montant de leurs remises, et nous fixons
pour cette catégorie de fonctionnaires un maximum spécial. Enfin, nous ferons
liquider les pensions sur la moyenne des cinq dernières années de traitement,
tandis que jusqu’à présent elles l’ont été sur la moyenne des 3 dernières
années. Je pense, messieurs, que si nous allions plus loin, nous commettrons
une véritable injustice.
M.
Osy. - Messieurs, je dois ajouter à ce que j’ai eu
l’honneur de dire tout à l’heure, que le projet de loi présenté en France, en
1841, admet le principe que je propose. Je crois qu’en effet il n’y a pas grand
inconvénient pour la généralité des fonctionnaires à ce que nous admettions le
chiffre de 10 ans ; et pour la caisse de retraite, la chose est absolument
nécessaire. Vous savez, messieurs, que la caisse de retraite qui, avant la
révolution ne recevait qu’un subside dont le maximum était fixé à 30,000
florins, vous savez que cette caisse de retraite se trouvait en 1830 dans une
position telle que le traité avec la Hollande nous a fait récupérer de ce chef
450,000 florins ; eh bien dans les premières années qui ont suivi la
révolution, nous avons dû porter au budget une somme de 200,000 francs pour la
caisse de retraite, et l’année dernière nous avons dû lui accorder près de
950,000 francs. Si nous n’admettons pas le chiffre de 10 ans, nous ne pourrons
jamais en venir à un taux normal pour les pensions. Je crois que nous devons
suivre l’exemple que la France vient de nous donner à cet égard.
M. le ministre des finances (M. Mercier) -
L’honorable M. Osy argumente toujours sur les effets de la législation
actuelle. Mais je dois faire remarquer qu’il n’a pas dépendu du gouvernement
que cette législation ne fût modifiée déjà depuis plusieurs années. La loi que
nous discutons doit précisément avoir pour effet de réduire considérablement
toutes les pensions et surtout celles des fonctionnaires du département des
finances. Il ne faut donc pas argumenter des abus auxquels la législation
actuelle peut avoir donné lieu.
M. de Mérode. -
Je pense, messieurs comme on l’a déjà fait observer plusieurs fois, que l’Etat
n’est pas obligé de pensionner les fonctionnaires. Souvent l’avancement est
donné à la faveur, et il doit nécessairement en être ainsi, car entre plusieurs
concurrents, à mérite égal ou à peu près égal, il faut bien que le ministre
choisisse. Or, celui qui a déjà obtenu de l’avancement ne doit pas avoir
encore, sous le rapport de la pension, un avantage si grand sur ses concurrents
qui ont été moins heureux que lui. Si nous voulons que la loi des pensions soit
bien accueillie tant par l’opinion publique que par la chambre, il ne faut pas
la rendre trop onéreuse pour le trésor. Je pense donc, messieurs, que
l’amendement de M. Osy, qui n’est que la reproduction d’une disposition
proposée en France, peut très bien être adopté, et quant à moi, je voterai cet
amendement.
M.
le ministre des finances (M. Mercier) -
Je dois protester contre l’assertion de l’honorable comte de Mérode, que les
emplois seraient donnés à la faveur ; si le gouvernement donnait les emplois à
la faveur, il ne ferait pas son devoir.
Je déclare que les emplois
sont donnés au mérite, et l’avancement aux services rendus ; nous ne pouvons
pas envisager ici autrement les positions acquises.
M. de Mérode
(pour un fait personnel). - Je n’ai pas dit qu’il y eût dans la manière dont on
distribue les emplois, une faveur injuste ; j’ai dit que souvent pour un emploi
il y avait 5 ou 6 concurrents qui avaient des droits à peu près égaux, ou même
égaux, et le ministre est obligé de choisir. Il faut bien qu’il nomme
quelqu’un. Or, si vous donnez des pensions, d’après les dernières années
calculées d’une manière restreinte, vous accordez un double avantage à celui
qui obtient la préférence dans l’avancement.
M. Dumortier. - Messieurs, deux questions
ont été soulevées dans le débat actuel par M. le ministre des finances. La
première, c’est celle du nombre d’années qui devra être compté pour le
fonctionnaire qui sera admis à la pension. La seconde question, c’est celle de
l’abus qui s’est présenté et qui consiste en ce que les fonctionnaires prennent
un grade inférieur, pour obtenir une plus forte pension.
Quant à la première question,
je suis aussi d’avis qu’il serait à désirer qu’on insérât dans la loi une
disposition d’après laquelle on pût arriver à donner au fonctionnaire qui se
retire une pension proportionné non pas à l’existence qu’il a eue pendant les
dernières années, mais à l’existence moyenne qu’il a eue pendant toute la durée
de l’exercice de ses fonctions.
Il existe certaines
administrations où les avancements sont beaucoup plus rapides que dans d’autres
; par exemple, on avance bien plus vite dans l’administration financière que
dans l’ordre judiciaire. Dans l’ordre judiciaire, vous voyez un juge rester
juge pendant toute sa vie ; s’il peut arriver à la cour d’appel, c’est un
immense avancement. Dans l’administration financière, au contraire, on avance
beaucoup plus promptement, parce que le nombre des emplois y est beaucoup plus
considérable et les traitements plus élevés ; les pensions finissent par s’en
ressentir.
Il faudrait donc admettre un
plus grand nombre d’années, pour fixer le dividende la pension.
Je ne terminerai pas sans
rencontrer l’observation de M. le ministre des finances, Il s’agit de certains
employés qui prennent un grade inferieur, pour pouvoir toucher une pension plus
forte. C’est là un véritable abus qui est de nature à désorganiser
l’administration.
Or, cet abus a souvent lieu
dans l’administration des finances, Il y arrive parfois qu’un contrôleur, un
inspecteur, et peut-être même un directeur, demande à être nommé receveur, afin
d’avoir une plus forte pension ; messieurs, il y a là quelque chose de
véritablement immoral, qui rompt les liens de l’administration. Lorsqu’un
employé supérieur demande à descendre de son grade, pour obtenir une pension
plus forte, il faut convenir que l’administration est exposée à se priver des
lumières des fonctionnaires souvent les plus capables. Il faut donc porter
remède à un si grand mal. Je sais qu’il est peut-être difficile d’y porter un
remède absolu.
Dans
le projet de l’honorable M. d’Huart, il existait un tableau en vertu duquel les
maxima de pension étaient échelonnés de telle manière que jamais un receveur ne
pouvait avoir plus qu’un contrôleur, un contrôleur plus qu’un inspecteur, un
inspecteur plus qu’un directeur, et ainsi du reste. Or l’expérience a prouvé
que des contrôleurs, des inspecteurs, ont obtenu des pensions beaucoup plus
fortes que celles d’employés d’un grade supérieur. Je ne trouve pas un remède à
cet abus dans le projet de loi.
On dit : Il y a un maximum
pour les receveurs, mais ce maximum n’empêchera pas que le receveur qui a une
très grande recette n’ait une pension supérieure à celle qu’obtiendra son
supérieur en grade.
C’est là un véritable abus, et
il est à désirer qu’on introduise dans la loi une disposition tendant à
empêcher qu’un fonctionnaire, quel qu’il soit, n’obtienne une pension plus
élevée que son supérieur en grade. Ce serait rendre à la fois un service au
trésor et à la moralité publique.
M. de
Muelenaere. - Messieurs, d’après l’art. 13 du projet, le maximum
de la pension pour les fonctionnaires et les employés comptables sera désormais
fixée à la somme de 4,000 francs. C’est là une grande amélioration dans le
système des pensions, mais nous n’avons pas la certitude que cet article sera
adopté ; s’il ne l’était pas, peut-être même que le terme de dix années serait
insuffisant.
Dès lors il me semble que,
pour pouvait se fixer sur l’amendement que l’honorable M. Osy a présenté
aujourd’hui, il conviendrait d’attendre la discussion de l’art. 13 ; cet
amendement est en rapport intime avec cet article ; car si l’art. 13 était
adopté, il en résulterait que le maximum des pensions auxquelles on a fait
allusion, et qui s’élevait à des sommes plus ou moins considérables, ne pourra
plus être que de 4,000 francs. Dès lors, M. le ministre des finances a consenti
aussi à ce que le terme de trois ans fût fixé à 5 ans. Voilà des dispositions
qui peuvent avoir une certaine influence sur le vote que nous sommes appelés à
émettre en ce moment.
Je demande donc que la chambre
veuille bien postposer la discussion de l’art. 8 à l’art. 10 et à l’art. 13 du
projet.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, mon intention
n’est pas de m’opposer à la proposition de l’honorable M. de Muelenaere ;
cependant, s’il est vrai, comme je le pense, que ces dispositions soient
connexes, qu’il me soit permis de rencontrer en ce moment les observations des
honorables MM. Dumortier et Osy, en ce qui concerne les maximum établis par
l’art. 13.
Quel est l’abus qui a été
signalé ? Comment peut-on le couper à sa racine ?
L’abus consistait en ce que
des fonctionnaires descendaient d’un grade pour acquérir en peu de temps des
droits à une augmentation de pension. Or, cet abus est rendu impossible par la
combinaison de l’article que nous discutons avec les art. 10 et 13.
D’abord le gouvernement
propose, d’accord en ce point avec la section centrale, d’exiger 5 années pour
établir la moyenne. C’est déjà une amélioration : l’espérance d’obtenir une
pension supérieure au chiffre réel qu’elle aurait dû atteindre est diminuée par
la prolongation du terme. D’après l’art. 10, on ne peut plus tenir compte aux
fonctionnaires et employés comptables que des trois quarts de leurs remises,
lorsqu’elles excédent 2,000 francs. L’art. 13 donne pour limite à toutes les
pensions des fonctionnaires et magistrats les trois quarts du traitement qui a
servi de base à la liquidation. Mais un 2ème § fixe à 4,000 francs le maximum
pour les fonctionnaires et employés comptables.
L’honorable M. Dumortier a
cité les projets précédents, le projet de l’honorable M. d’Huart et le projet
que la chambre avait provisoirement adopté en 1841. Dans le projet de 1838,
l’on distinguait aussi les fonctionnaires, et l’on proportionnait les maximum
au traitement ; pour les fonctionnaires à remises, on établissait un maximum
absolu, invariable, et la chambre avait provisoirement adopté le même système.
Il peut bien résulter de là
qu’un fonctionnaire d’un grade inférieur en administration aura une pension
excédant celle de son supérieur hiérarchique, qui a un traitement moindre, mais
il ne peut en résulter que des fonctionnaires supérieurs ambitionnent un grade
inférieur, pour avoir droit à une pension plus forte que celle à laquelle leur
traitement réel leur donnerait droit.
Il est à remarquer encore que
l’art. 8 et le terme de cinq années se trouvent en corrélation avec d’autres
articles du projet. Dans certains cas, et notamment dans le cas de l’art. 4,
déjà adopté, il suffit d’avoir 5 années de fonctions pour être admissible à la
pension. Si vous fixez un terme plus étendu pour établir la moyenne, vous devez
modifier toutes les dispositions de la loi qui autorisent à pensionner un
fonctionnaire qui n’a que 5 années.
Si
l’on étend trop cette moyenne, on réduit considérablement les pensions et on le
fait au-delà des nécessités reconnues d’après l’expérience.
L’honorable M. Osy a parlé
d’un projet de loi présenté en France. Mais ce projet n’a pas été converti en
loi. Les projets se sont succédé avec une grande rapidité depuis 1830 et on
n’est pas encore arrivé à la solution de l’importante question des pensions.
Aujourd’hui, c’est sur la
moyenne des quatre dernières années qu’on base la liquidation des pensions.
M. le président. - M. Orts propose de
postposer les art. 7, 10 et 13 à l’art. 64.
M. Orts. - Messieurs, je crois qu’en faisant
cette postposition nous faciliterons la discussion, car il y a connexité entre
ces dispositions, je crois pouvoir l’établir par le rapprochement des articles
10, 13 et 64.
L’art. 10 porte :
« Sont compris dans
l’évaluation de la moyenne du traitement, le casuel et les autres émoluments
tenant lieu de supplément de traitement.
« Toutefois, pour les
fonctionnaires et employés de l’administration des finances, auxquels des
remises tiennent lien de traitement, la moyenne ne s’établira que sur les 3/4
de ces remises, sans qu’elles puissent être réduites au-dessous de 2,000
fr. »
L’article maintenant fixe le
maximum pour les fonctionnaires de l’administration des finances. Il porte que
le maximum sera de 6 mille francs pour les fonctionnaires et de 4 mille francs
pour les comptables.
Vient l’art. 64 qui est plus
important.
Il
est ainsi conçu : « Les fonctionnaires et employés ressortissant au
ministère des finances ou à l’administration des postes, actuellement en
fonctions, conservent la faculté de faire liquider éventuellement leur pension
d’après les bases de l’arrêté royal du 29 mai 1822. »
Voici le paragraphe sur lequel
j’appelle l’attention de la chambre :
« Toutefois, les services
postérieurs à la présente loi ne seront pas pris en considération pour dépasser
les limites établies par l’art. 13 ci-dessus. »
Maintenant comment faut-il
comprendre cet article, faut-il entendre qu’un fonctionnaire du ministère des
finances qui aujourd’hui aurait droit à sept mille francs de pension (je prends
ce chiffre parce qu’il excède le maximum posé par la loi), je suppose que ce
fonctionnaire ne fait pas liquider sa pension et continue à exercer ses
fonctions pendant dix ans encore, il n’aura jamais que sept mille francs. Voilà
comment je comprends l’article. Quand on sera arrivé là, je me propose de le
combattre. Il faudrait qu’on lui comptât le temps qu’il aura servi et qu’on lui
donnât une augmentation à raison du nombre d’années au-delà de l’époque
actuelle. Vous voyez que dans l’opinion de ceux qui ne partagent pas celle du
ministre, relativement à l’art. 64, il y aurait avantage à postposer les art.
7, 10 et 13.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Les
articles 7, 10 et 13 établissent des règles générales, et l’art. 64 une
exception. Or la règle générale n’empêche pas que l’exception soit modifiée.
Dans mon opinion, il faut maintenir l’art. 64 tel qu’il est. L’honorable M.
Orts fait une proposition dont la conséquence serait de supprimer la deuxième
partie du premier paragraphe de l’art. 64. Mais cet article n’empêche nullement
de votes les règles établies par les articles 7, 10 et 13. L’adoption de ces
articles n’empêchera pas, quand nous en viendrons à l’art. 64, de proposer à
celui-ci telles modification qu’on jugera convenables. Je suppose que
l’honorable M. Orts ne veuille pas de cette disposition ; rien ne l’empêchera
de proposer de fixer la limite qu’il voudra. Mais on doit voter la règle générale
avant de s’occuper des exceptions.
Je
ne vois rien de corrélatif entre les articles 7, 10 et 13 et l’article 64. La
proposition faite n’aurait d’autre résultat que de rendre la discussion confuse
et sans utilité.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, j’ai reconnu
que les articles 7, 10 et 13 sont connexes. Dans la première, il s’agit de la
base de la liquidation des pensions, dans la deuxième de déterminer les
éléments et dans la troisième des maximums. Ce sont là les règles générales que
nous posons pour l’avenir ; ces règles se lient entre elles. Mais il n’y a
aucun rapport entre les articles que je viens de citer et l’art. 64. Le texte
de cet article et la rubrique sous laquelle il se trouve le démontrent. C’est
une disposition transitoire rendue nécessaire à raison de l’existence de la
caisse de retraite et des versements qui ont été faits à cette caisse ; on sera
libre encore, après avoir arrêté des règles générales pour l’avenir, d’adopter,
de modifier ou de rejeter l’art. 64. Si nous mêlons l’examen des questions
transitoires relatives à la cause des retraites à l’examen des questions de
principe, la discussion sera confuse et sans issue.
C’est pour diviser la question
que j’ai négligé des observations relatives à la caisse des retraites qui ont
été faites par plusieurs membres, et notamment par l’honorable M. Osy. Laissons
donc de côté pour le moment les dispositions transitoires et discutons les
articles 7, 10 et 13.
M.
Verhaegen. - Il me semble qu’on n’a pas voulu
comprendre mon honorable ami M. Orts. Il a demandé que la question restât
entière, et pour cela qu’on postposât les articles 7, 10 et 13 à l’art. 64 ; on
a donné de très bonnes raisons pour cela. M. Orts avait aussi de très bons
motifs pour demander de postposer ces articles à l’art. 64. L’article lui-même
en contient une, c’est le renvoi à l’art. 13. En effet, l’art. 64 dit :
« Les fonctionnaires et
employés ressortissant au ministère des finances ou à l’administration des
postes, actuellement en fonctions, conservent la faculté de faire liquider
éventuellement leur pension d’après les bases de l’arrêté royal du 29 mai 1322.
Toutefois, les services postérieurs à la présente loi ne seront pas pris en considération
pour dépasser les limites établies par l’art. 13.
Puisque l’art. 6 renvoie à
l’art. 13, il y a lieu de coordonner ces articles. Il est vrai que les
articles. 7, 10 et 13 renferment la règle générale, le principe ; mais le
principe exercera aussi son influence sur l’exception. Le principe, c’est que
le maximum pour les fonctionnaires des finances ne peut pas excéder 6 mille
francs, et s’ils sont comptables, il ne peut pas dépasser 4 mille fr. Je vous
avoue que cette disposition m’étonne. Pourquoi un comptable est-il moins bien
traité qu’un autre fonctionnaire du même département. S’il y avait lieu de
faire une différence…
Plusieurs membres. -
Ce n’est pas la question.
M.
Verhaegen. - Je réserve cela pour la
discussion. Mais je voulais démontrer l’importance de la question, en demandant
pourquoi on établissait une différence...
M. Malou, rapporteur. - C’est l’art. 13.
M.
Verhaegen. - C’est pour cela qu’il faut renvoyer
la discussion de tous ces articles après l’art. 64, sur lequel ils pourraient
exercer de l’influence s’ils étaient adoptés. Quand nous arriverions à l’art.
64, on dirait que le principe est posé. C’est pour laisser la question intacte
que nous demandons que la discussion soit postposée.
M. Malou, rapporteur. - Je regrette de devoir
insister. Le premier paragraphe de l’art. 64 s’applique à la caisse de retraite
exclusivement. Il décidé que les services antérieurs à la présente loi seront
rémunérés conformément au règlement de 1822, mais que les services postérieurs
ne seront pas pris en considération pour dépasser les maximum à établir pour
l’avenir. Tel est le sens de l’art 64.
Il
n’y a donc aucune connexité entre cette disposition et celles des articles 7,
10 et 13, quels que soient les principes posés par ces articles. Quand nous
serons à l’art. 64, nous verrons s’il y a lieu d’adopter cette règle ou de la
modifier, et dans quel sens.
Le but des honorables membres
est de ne rien préjuger. Il suffit dès lors d’admettre que la question est
réservée.
J’insiste sur ce point, parce
qu’il est impossible que nous discutions les questions relatives à la caisse de
retraite, en même temps que la règle générale posée pour l’avenir. (Adhésion.)
- La
chambre consultée déclare qu’en délibérant sur l’art. 8, elle réserve l’art.
64.
M. de Garcia. -
L’honorable M. de Muelenaere a demandé que l’on postposât la discussion de
l’art. 8 du projet du gouvernement après avoir statué sur l’art. 13.
L’honorable rapporteur, si je l’ai bien compris, voudrait qu’on discutât
simultanément les articles 8, 10 et 13. Ce dernier mode, s’il était adopté,
apporterait de la confusion dans nos débats, et je crains que, si l’on s’occupe
à la fois des trois articles, cela n’amène le plus grand désordre dans la
discussion. Je pense donc qu’il faut se rallier à la proposition de M. de
Muelenaere, et se borner à discuter l’art. 14 avant d’aborder l’art. 8 en
discussion.
Au surplus, tous ces articles,
pour être connexes, pour converger vers un but d’économie, sont essentiellement
différents, ils doivent avoir un résultat différent, au moins quant aux
propositions d’économies qu’ils sont appelés à introduire en faveur du trésor.
M. Malou. - Je me rallie à la
proposition de l’honorable M. de Muelenaere, surtout pour ne pas discuter plus
longtemps sur ce qu’on discutera.
- La chambre consultée ajourne
la discussion de l’art. 8 après la discussion de l’art. 13.
La séance est levée à 4 heures
et demie.