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d’intention
Chambre des représentants de Belgique
Séance du mercredi 13
décembre 1843
Sommaire
1)
Pièces adressées à la chambre, notamment pétition relative à l’impôt sur le sel
et à l’industrie des tabacs (Henot), à la loi sur les
fraudes électorales (Malou)
2) Demandes en naturalisation ordinaire et en grande naturalisation
3)
Projet de loi portant le budget des voies et moyens
pour l’exercice 1844. Discussion des articles. Convention postale avec
l’Angleterre et tarifs des postes (Osy, Dechamps),
coût, tarifs et/ou rentabilité du chemin de fer (David, Dechamps, David, Dechamps, David, d’Hoffschmidt, David, (+cour
des comptes) (Fleussu, Dechamps,
David, Fleussu), utilisation du
palais du prince d’Orange à des fins caritatives (Osy, Mercier, Verhaegen,
(+enseignement primaire et question politique) (Mercier,
d’Hoffschmidt), Osy, Mercier, Verhaegen,
(+enseignement primaire) de Mérode, Mercier),
aliénation de biens domaniaux et notamment de forêts) (Malou,
Mercier, Malou, Pirmez),
servitudes militaires autour de Hasselt (de Corswarem),
gestion de la dette publique (et encaisse auprès de la société générale) (Osy, Cogels, Mercier,
Malou, Mercier, Cogels,
Mercier, Osy, Mercier,
Devaux, Mercier, Dumortier, Mercier, Delfosse), système monétaire (Sigart),
droits de navigation au port d’Ostende (Donny), banque
nationale et société générale (Zoude, Meeus,
Liedts, Zoude), banque de Belgique
(Malou, Mercier, Rogier, Mercier, Rogier,
Dumortier, de La Coste, Delfosse, Pirmez, Cogels, Malou, Duvivier),
reprise par l’Etat de l’administration du canal de Mons à Condé (Malou, Mercier, Verhaegen, Mercier, Verhaegen, Nothomb, Verhaegen)
4)
Projet de loi portant le budget du département de la justice pour l’exercice
1844
(Moniteur
belge n°348, du 14 décembre 1843)
(Présidence de M. Liedts)
M. Huveners procède à l’appel nominal à midi et 1/4.
- La séance est ouverte.
M. Scheyven donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en
est adoptée.
M. Huveners communique les pièces de la correspondance :
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
« Le sieur Vanderhelst,
cordonnier à Vilvorde, se plaint de la décision du conseil de milice qui a
rejeté sa réclamation tendant à être exempté du service militaire. »
« Le sieur de Sadeleer, cultivateur à
Haeltert, demande d’augmenter d’un tiers les droits sur les distilleries, afin
d’abolir l’impôt de consommation sur les boissons distillées. »
« Plusieurs propriétaires, herbagers
et cultivateurs de Dixmude demandent que l’arrêté qui accorde le transit des
bestiaux hollandais, soit rapportés ou tout au moins modifié. »
- Ces trois pétitions sont renvoyées
à la commission des pétitions.
« Les sieurs Ketelaars et Herbosch,
fabricants de tabac, à Malines, présentent des observations contre la
disposition du projet de loi sur le sel, tendant à interdire au gouvernement la
faculté d’exempter des droits d’accise le sel employé dans la fabrication des
tabacs. »
M. Henot. - Les pétitionnaires se plaignent de ce qu’en retirant l’exemption de
l’accise sur le sel nécessaire à la fabrication du tabac, ils pourront d’autant
moins soutenir la concurrence redoutable que leur fait la Hollande, qu’on jouit
déjà dans ce pays de la faveur de payer des droits d’accise moins élevés et
sous ce rapport leur réclamation mérite toute l’attention de la chambre ; elle
la mérite encore parce qu’il est question d’imposer le tabac même, et qu’on
porterait conséquemment à la fois deux coups bien funestes à cette fabrication
qui constitue une des plus considérables industries du pays. Comme la section
centrale qui a examiné le projet de loi sur le sel a déjà fait son rapport, je
demande que la pétition qui vient d’être analysée soit déposée sur le bureau
pendant la discussion de cette loi.
- Cette proposition est adoptée.
M. Huveners, lit l’analyse de la pétition suivante :
« Les receveurs des
contributions directes, dans l’arrondissement de Courtray, demandent une
indemnité pour la confection du double des rôles des contributions qu’ils
doivent délivrer sans frais, aux termes de l’art. 4 de la loi du 1er avril
1843. »
M. Malou. - Je ferai remarquer qu’un crédit se trouve porté au budget des
finances pour cet objet. Peut-être vaudrait-il mieux renvoyer la pétition à la
section centrale chargée de l’examen du budget des finances.
- Cette proposition est adoptée.
Demandes en naturalisation ordinaire et en grande
naturalisation
M. Lejeune, M. Henot, et M. Delehaye, au nom de la commission des naturalisations, déposent des rapports sur
plusieurs demandes de naturalisation ordinaire.
M. Delehaye dépose le rapport sur une demande de grande naturalisation.
- La chambre ordonne l’impression et
la distribution de ces rapports.
PROJET
DE LOI PORTANT LE BUDGET DES VOIES ET MOYENS POUR L’EXERCICE 1844
Discussion
des articles
Péages
(Travaux publics. Postes)
« Taxe des lettres et
affranchissements : fr. 2,800,000 »
« Port des journaux et imprimés : fr.
115,000 »
« Droit de 5 p.c. sur les articles d'argent
: fr. 25,000 »
« Remboursements d'offices
étrangers : fr. 75,000 »
« Service rural : fr. 180,000 »
« Emoluments perçus en vertu de la loi du 19
juin 1842 : fr. 50,000 »
« Total : fr. 3,245,000 »
M. Osy. - La section dont je faisais partie a demandé au gouvernement où en
étaient les négociations entamées au sujet des arrangements postaux avec
l’étranger, et notamment avec l’Angleterre.
Il y a deux ans, la ville de Hambourg
a fait un arrangement très avantageux avec l’Angleterre. Le gouvernement
hollandais vient de faire un arrangement qui prendra cours au premier janvier
prochain. La situation de la Belgique, avec son chemin de fer, est telle que
toute la correspondance entre le Nord et le Midi, et toute la correspondance de
la Russie, de la Suède et du Danemarck avec le reste de l’Europe, devraient
passer par ce pays. Nous retardons ces négociations, et par suite nous sommes
mis tout à fait à l’écart.
Je demanderai à M. le ministre
des affaires étrangères si les négociations ont quelque chance de succès ; car
je commence à craindre que ces négociations n’aient le même sort que les
négociations commerciales.
Je demanderai à M. le ministre des
travaux publics s’il ne serait pas possible d’établir une taxe uniforme pour le
transport des lettres dans le pays. Je suis convaincu qu’il en résulterait une
augmentation dans le produit des ports de lettres, et que cela faciliterait les
relations. On n’aurait plus recours à des voies détournées pour obtenir une
économie ou une accélération dans le transport des lettres. Sans doute, M. le
ministre a fait tout ce qu’il était possible pour les relations avec
l’Allemagne ; mais je pense que, pour l’intérieur, il y a encore beaucoup à
faire.
M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Je crois pouvoir répondre aux deux interpellations faites par
l’honorable M. Osy.
Le gouvernement comprend toute
l’importance de la convention postale avec l’Angleterre. Ces négociations sont
entamées déjà depuis un certain temps ; elles continuent ; je fais tous mes
efforts pour les activer. D’après la correspondance, j’ai lieu d’espérer que
ces négociations seront couronnées d’un prompt succès. Je ne puis cependant,
l’honorable membre le comprendra, fixer l’époque à laquelle ces négociations
seront terminées.
La question de la taxe uniforme à
l’intérieur est très grave et préoccupe tous les gouvernements. Je pense que sa
discussion trouvera mieux sa place dans la discussion du budget des travaux
publics.
- L’article Postes est mis aux voix
et adopté.
Chemin de fer
M. le président. - La chambre passe à l’art. Chemin
de fer, fr. 10,600,000
M. David. - Je sais que ce n’est pas le moment d’aborder la discussion de la
question du chemin de fer. Cependant, je me permettrai de faire une
interpellation à M. le ministre des travaux publics relativement au moment où
il sera prêt à déposer le compte rendu de 1843, en tant qu’il puisse présenter
un certain nombre de mois. Dernièrement, M. le ministre des travaux publies m’a
dit qu’il comptait déposer bientôt ce compte rendu. Il serait à désirer que ce
fût le plus tôt possible, afin que nous puissions examiner ce volumineux
document, qui devra renfermer une très grande quantité de détails. Si ce
document ne nous était pas distribué avant que la section centrale du budget
des travaux publics se réunît pour l’examen du chapitre chemin de fer, nous éprouverions de très grandes difficultés ;
cette section centrale ne pourra utilement délibérer. Nous ne possédons jusqu’à
présent que le compte-rendu de 1842, qui ne nous offre, pour ainsi dire, aucun
intérêt, C’est déjà de l’histoire ancienne.
Je prie donc M. le ministre des
travaux publics de faire accélérer la présentation de son rapport.
M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Effectivement, messieurs, dans la conversation que j’ai eu l’honneur
d’avoir avec l’honorable membre, je lui ai communiqué l’intention où j’étais de
fournir à la section centrale, avant qu’elle fût assemblée, des renseignements
très détaillés et de nature à éclairer complètement la discussion du budget des
travaux publics ; mais, messieurs, je pense qu’il y a eu entre nous un
malentendu que je désire ne pas voir subsister. J’ai dit à l’honorable M. David
que je donnerais, avant la discussion du budget des travaux publics, des
renseignements plus complets qu’on n’en a fourni jusqu’ici et qui suffiront à
la justification du budget ; mais ces renseignements ne constitueront pas un
compte-rendu dans le sens que l’on attache à ce mot. L’honorable membre
comprend très bien que le compte-rendu de 1842 venant de paraître très
récemment, il m’est impossible de fournir, quelques jours après, le
compte-rendu de 1843 avant même que l’année 1843 ne soit écoulée. Lorsque
l’exercice de 1843 sera expiré, il faudra encore un certain temps avant que
tous les documents puissent être recueillis. Les documents que je fournirai à
la section centrale seront d’une nature particulière ; mon intention est
d’abord de demander à la section centrale de subdiviser le crédit du chemin de
fer non pas en 4 articles, comme on l’a fait précédemment, comme moi-même
j’avais cru devoir le faire d’abord, mais en 11 articles, ce qui permettra à la
chambre de discuter d’une manière plus approfondie chacune de ces subdivisions,
ce qui donnera des garanties nouvelles à l’appréciation de la législature. Je
me propose de fournir à la chambre en regard de chacune des subdivisions du
budget des travaux publics, l’histoire, si je puis me servir de ce mot, de
chacune des ces subdivisions. Ainsi, pour le personnel, par exemple, je
donnerai le tableau du personnel depuis le directeur jusqu’au dernier ouvrier,
sauf les noms propres, qu’il est impossible de mentionner dans un travail de ce
genre. Il y aura un tableau correspondant à chaque subdivision ; la chambre
aura ainsi, pour ainsi dire, le chemin de fer sous les yeux. Je pense que c’est
là la meilleure manière de justifier les crédits que le gouvernement demande.
J’ajouterai, messieurs, à ces tableaux certains renseignements qu’il est
nécessaire que la chambre ait entre les mains pour discuter mûrement cet objet
important.
Je crois, messieurs, que le
gouvernement a le plus grand intérêt à ce que la plus grande lumière soit
répandue sur l’administration du chemin de fer, et mon intention formelle est
de fournir à la chambre tous les documents dans toute leur sincérité. Je le
répète, le compte-rendu que le gouvernement doit fournir aux chambres, en vertu
de la loi du 1er mai 1834, ce compte-rendu, il m’est impossible de le présenter
de sitôt pour 1843, alors que celui de l’année précédente vient seulement
d’être déposé, mais je pense que les renseignements que j’ai l’intention de
fournir à la chambre, lui seront, pour la discussion spéciale du budget et
l’appréciation des crédits demandés, d’une utilité au moins aussi grande que le
compte-rendu lui-même.
M. David. - Je reconnais, messieurs, les bonnes intentions de M. le ministre des
travaux publics, je reconnais aussi toute la sincérité de ce qu’il m’a dit dans
la conversation que j’ai eu l’honneur d’avoir avec lui. J’avais, en effet,
compris qu’il entendait nous fournir un compte rendu complet pour la partie de
l’année dont les résultats sont susceptibles d’être publiés en ce moment, par
exemple, pour les dix premiers mois de 1843, je pense que ce ne serait pas là
une chose impossible, d’autant plus que nous avons déjà des antécédents de
l’espèce.
Si j’ai bonne mémoire, je
crois que l’honorable M. Rogier, que l’honorable M. Nothomb, ont présenté dans
le temps des comptes-rendus qui ne portaient que sur un semestre ou sur les neuf
premiers mois de l’année. Vous sentez que de pareils renseignements seraient
très utiles pour la section centrale. Ainsi, si nous pouvions établir le seul
chiffre du coût de parcours d’une lieue de chemin de fer, ce serait pour nous
un document important. Nous verrions ainsi si l’administration du chemin de fer
a reculé ou fait des progrès.
M. le ministre des travaux
publics (M. Dechamps) - Messieurs, je ne sais si
l’honorable membre m’a bien compris. Il y a deux genres de renseignements à
donner ; il y a les renseignements que j’appelle positifs et réels, il y a les
renseignements que j’appellerai hypothétiques. Enumérer les faits tels qu’ils
existent au chemin de fer dans chacune des branches de l’administration,
établir le chiffre demandé pour 1844 sur ces faits, c’est amener la discussion
sur un terrain positif et administratif et ne pas le laisser égarer sur celui
des hypothèses, les uns évaluant la dépense présumée d’après le nombre de
lieues exploitées, les autres d’après le nombre de lieues parcourues.
J’ajouterai que, quant aux
renseignements que demande l’honorable M. David, je fournirai tous ceux qu’il
sera en mon pouvoir de donner
Toutefois il me sera difficile de
recueillir ceux pour l’exercice entier qui sera à peine terminé lorsque le
budget sera soumis à vos délibérations.
M. David. - M. le président, pour résumer la question, voici les conclusions que
je tire de ce léger incident : c’est que je désirerais que vous, M. le
président, vous ne convoquassiez la section centrale du budget des travaux
publics, pour examiner le chapitre chemin
de fer, que lorsque M. le ministre nous aura soumis le travail qu’il nous a
promis.
M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Il sera imprimé sous peu de jour.
M. David. - Je suis satisfait des explications de M. le ministre.
M.
d’Hoffschmidt. - Je pense qu’il n’est pas
nécessaire d’attendre les nouveaux développements que vient d’annoncer M. le
ministre des travaux publics, pour convoquer la section centrale chargée de
l’examen de son budget, Nous avons déjà les développements nécessaires pour
l’examen de la première partie du budget, celle qui concerne les canaux et les
routes ; par conséquent, la section centrale peut se livrer à cet examen sans
attendre les développements qui concernent le chemin de fer. Je fais cette
observation parce que, comme je suis chargé, en ma qualité de vice-président, de
présider la section centrale du budget des travaux publics, je me propose de la
convoquer demain pour l’examen de la première partie de ce budget.
M. David. - Je ne m’oppose pas à ce que la section centrale examine tout de suite
la première partie du budget des travaux publics. Je demande seulement qu’il
n’examine le chapitre du chemin de fer que huit ou dix jours après la
distribution des documents annoncés par M. le ministre.
M. Fleussu. - Messieurs, je ne viens pas non plus présenter des observations sur
l’administration du chemin de fer ; je crois qu’une semblable discussion aura
plus d’opportunité dans un autre moment.
Je me propose d’adresser à M. le
ministre des travaux publics deux interpellations qui, je crois, seront utiles
même pour la discussion de son budget en section centrale.
Messieurs, vous avez vu, par les
observations de la cour des comptes, et ces observations ont été répétées dans
plusieurs cahiers de cette cour, que, pour l’unité et la régularité dans
l’administration des finances, elle désirerait que les recettes du chemin de
fer se fissent par les agents de l’administration des finances. Messieurs, dans
d’autres parties qui sont également du ressort de M. le ministre des travaux publics,
l’administration des finances intervient pour les recettes. C’est ce qui a lieu
pour les péages ; c’est ce qui a lieu encore pour les barrières. Il n’y a donc
pas d’obstacle à ce qu’il soit fait droit aux observations de la cour des
comptes.
J’ai vu quelque part qu’il avait été
institué une commission mixte composée de fonctionnaires de l’administration
des travaux publics, d’une part, et de fonctionnaires de l’administration des
finances. Je désirerais savoir de M. le ministre, avant la discussion de son
budget, d’autre part, pour régler la question financière du chemin de fer, à
quoi en est arrivé le travail de cette commission.
Messieurs, vous savez qu’autrefois
des plaintes se sont élevées dans cette enceinte sur la distribution de
certaines cartes de faveur pour le chemin de fer. Le ministre qui était alors à
la tête du département des travaux publics s’était engagé à retirer ces cartes
de faveur. Mais j’ai appris, et ces renseignements se trouvent confirmés par
les observations de la cour des comptes, que maintenant, au lieu de cartes de
faveur, ce sont des bulletins de faveur que l’on distribue, de manière qu’il
n’y a pas moyen de les distinguer. Ce sont des bulletins tout à fait conformes
à ceux qui sont distribués dans les bureaux. On en envoie un certain nombre à
des fonctionnaires du chemin de fer, et lorsqu’ils les ont employés, ils
réclament, et on leur en envoie d’autres. La cour des comptes affirme ce fait
et de plus elle affirme que non seulement certains fonctionnaires ont des
coupons de faveur, mais qu’ils ont encore des frais de route.
Il faut avouer que c’est là un
véritable abus. Si comme on me l’a assuré, on délivre des coupons de faveur à
certains fonctionnaires, mais il est évident que ceux-ci peuvent battre monnaie
avec ces coupons, puisqu’on ne peut les distinguer de ceux qui sont livrés aux
voyageurs.
La cour des comptes avait fait, à cet
égard, à M. le ministre une demande qui est restée sans réponse. Elle a demandé
si c’était au bureau de sortie ou au bureau d’arrivée que ceux qui étaient
gratifiés de ces coupons en déboursaient le prix. Aucune réponse ne lui a été
donnée. Je voudrais que M. le ministre des travaux publics nous donnât
satisfaction sur ce point.
M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Messieurs, mon attention a été portée sur la question très grave de
l’influence à conférer au département des finances sur la recette du chemin de
fer. J’ai eu à cet égard plusieurs conférences avec mon collègue M. le ministre
des finances et nous sommes tombés d’accord sur un principe fondamental qui
consisterait à donner au département des finances un contrôle efficace et
sérieux sur les recettes du chemin de fer, mais de manière à ne pas
compromettre et désorganiser le service de l’exploitation du chemin de fer.
Cette question difficile a déjà été traitée plusieurs fois dans cette
assemblée. Le département des travaux publics a intérêt, je pense, à ce qu’un
contrôle de ce genre soit exercé. Mais il doit désirer aussi que l’exploitation
du chemin de fer ne soit pas entravée en y introduisant un élément
désorganisateur.
Le travail de la commission mixte
dont a parlé l’honorable M. Fleussu, n’est pas complètement terminé. Cependant
j’ai lieu d’espérer qu’il sera bientôt soumis à l’approbation de mon honorable
collègue M. le ministre des finances et à la mienne.
Quant au second point de
l’interpellation de l’honorable M. Fleussu, effectivement des abus ont été
signalés. Je pense cependant qu’il y a eu beaucoup d’exagérations dans les
plaintes qui ont été exprimées, et qu’on a donné au fait auquel la cour des
comptes a fait allusion, plus d’importance qu’elle-même lui a attribuée. Mais
quand l’arrêté sur le contrôle à donner sur les recettes au département des
finances, aura paru, je dois dire que les abus du genre de ceux dont on vient
de parler deviendront désormais impossibles, puisque l’administration du timbre
rentrera dans les attributions du ministère des finances. Du reste, mon
attention est portée sur ce point. Si des abus sont constatés, je saurai les
réprimer ; mais je pense qu’on les a singulièrement exagérés.
On a supprimé les cartes de
service, mais pour faciliter l’exercice des fonctions des employés ayant un
service actif, on a, bien avant mon arrivée an ministère, substitué aux cartes des
coupons d’abonnement. Je ne sais si on a abusé de ce mode, mais on avait pris
des mesures telles que les abus devaient être une rare exception.
J’ai, du reste, porté une sévère
investigation sur ce point, et j’étudierai s’il est besoin de recourir à une
autre mesure que celle dont je viens de parler, et qui est relative au contrôle
à accorder au département des finances.
M. David. - Ce que vient de dire l’honorable M. Fleussu, relativement aux
bulletins de faveur, me suggère l’idée de prévenir M. le ministre des travaux
publics qu’à l’occasion de la discussion du chemin de fer, je ferai la
proposition de faire payer les cartes de circulation sur le chemin de fer. Je
crois que cela peut très bien se faire. Vous trouverez toujours des personnes
qui seront amateurs de ces cartes, que vous pouvez imposer tout aussi bien
qu’un passeport ou qu’un port d’armes.
M. Fleussu. - Il est un point essentiel sur lequel je n’ai pas reçu satisfaction
de M. le ministre des travaux publics. C’est celui relatif à la question posée
par la cour des comptes ; à quel bureau ceux qui obtiennent des coupons de
faveur en déboursent-ils le prix ?
J’aurai l’honneur de faire observer
que ce que M. le ministre nomme un abonnement est une véritable
inconstitutionnalité ; car les péages sur le chemin de fer forment un impôt
pour l’Etat, et on ne peut en affranchir qui que ce soit. Cependant comme
l’attention de M. le ministre a été portée sur ce point, je n’insisterai pas.
Je dirai seulement qu’il me paraît qu’on devrait honorer la cour des comptes
d’une réponse, quand elle fait une demande.
Enregistrement, domaines et forêts
« Rachat et transfert de rentes,
y compris l’aliénation des rentes constituées : fr. 375,000 »
« Capitaux du fonds de
l’industrie : fr. 120,000 »
« Capitaux de créances
ordinaires : fr. 50,000 »
« Prix de vente d’objets
mobiliers ; transactions en matière domaniale ; dommage et intérêts ; successions
en déshérence ; épaves : fr. 330,000 »
« Prix de vente de domaines, en
vertu de la loi du 27 décembre 1822, payés en numéraire, ensuite de la loi du
28 décembre 1835 pour l’exécution de celle du 27 décembre 1822 et de la loi du
30 juin 1840 : fr. 650,000 »
« Prix à provenir de la vente de
petites parties de biens domaniaux : fr. 100,000 »
« Prix de coupes de bois,
d’arbres et de plantations ; vente d’herbes ; extraction de terre et de sable :
fr. 680,000 »
« Fermages de biens-fonds et
bâtiments de chasse et de pêches ; arrérage de rentes ; revenus des domaines du
département de la guerre : fr. 352,000 »
« Intérêts de créances du fonds
de l’industrie, de créances ordinaires fr. 45,000 »
« Restitutions et
dommages-intérêts en matière forestière : fr. 4,000 »
« Restitutions volontaires : fr.
500 »
« Abonnements au Moniteur et au
Bulletin officiel : fr. 51,000. »
M. Osy. - Messieurs, Je vois dans le rapport de la section centrale que le
gouvernement n’a pas encore pris de parti au sujet des domaines achetés de S.
M. Guillaume II, à l’exception de l’hôtel de la Place Royale, dont nous aurons
à parler lors de la discussion du budget des travaux publics.
Cependant l’honorable M. Lys, ainsi
que d’autres membres de la chambre, vous ont parlé du palais du prince
d’Orange.
Je pense que plus tard vous le
donnerez à la liste civile pour l’héritier du trône ; je vous demanderai donc,
messieurs, s’il est convenable de le donner dès aujourd’hui, pour y donner des
bals, des concerts, comme nous le voyons, par une annonce insérée dans le Moniteur, et de donner en outre huit
salons pour y établir des boutiques. J’approuve beaucoup tout ce qu’on veut
faire pour la charité publique et pour les établissements pour l’instruction de
la jeunesse, mais je ne puis approuver qu’un aussi beau palais, et qui doit
avoir une destination royale, soit ainsi livré au public. Si les autres années
on vous demande le palais pour des emplois pareils, vous ne pourrez pas le
refuser, si vous ne voulez être partial, et si d’ici à dix ans vous voulez le
faire habiter par un jeune prince, je suis persuadé qu’on vous demandera
peut-être un million pour des réparations et embellissements. Je ne puis donc
consentir à l’emploi qu’on en veut faire, et le gouvernement doit, par une loi,
fixer la destination de tous les domaines achetés du roi des Pays-Bas et de la
ville de Bruxelles. Ce que je dis du palais, s’applique aussi aux autres
bâtiments, car je vois aujourd’hui une annonce dans les journaux, que le grand
bâtiment formant les écuries et remises sont à louer, pour y former des
magasins de grains ou de bières, ou pour établir des bureaux, des écoles,
sociétés ou réunions ; et je vous demande si le léger loyer que nous recevrons,
compensera les fortes dépenses à faire plus tard.
Lorsque nous avons voté la
liste civile, nous avons désigné les domaines que nous y affections. Par une
loi de 1839, vous avez cédé les campagnes du roi Guillaume Ier et les terrains
autour de Laeken, ce n’est donc que par une loi que vous pouvez affecter à la
liste civile les écuries et le terrain vague au boulevard.
Je le répète, tout doit être fixé par
des lois et non par la volonté du gouvernement, qui, suivant moi, ne sait pas
résister à des sollicitations, que j’appellerai même, pour le palais du prince
d’Orange, indiscrètes.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, des personnes animées de sentiments charitables ont
demandé momentanément, c’est-à-dire pour un mois ou six semaines environ,
l’usage de ce palais, ce que j’ai accordé après m’être assuré que toutes les
précautions seraient prises pour qu’aucune détérioration ne soit à craindre. Je
crois, en prenant cette mesure, ne m’être écarté en aucune manière de la loi.
Si j’avais donné au palais une destination permanente, sans que le trésor dût
en retirer aucun revenu, j’aurais excédé mes pouvoirs ; mais il ne s’agit ici
que d’une destination momentanée. Un loyer, d’ailleurs, a été offert au
gouvernement, qui ne croit pas devoir l’accepter. J’ai pensé que, comme il
s’agissait d’une œuvre de bienfaisance, la chambre ne voudrait pas qu’une
rétribution fût prélevée sur le denier du pauvre. Du reste, je le répète, j’ai
pris les plus minutieuses précautions pour qu’aucun dommage ne pût avoir lieu.
J’ai consulté deux architectes qui m’ont garanti que les moyens de conservation
nécessaires seraient pris par leurs soins. Entrer dans le détail de ces mesures
serait chose peu convenable dans cette assemblée ; mais chaque membre pourra
s’assurer qu’elles sont complètement satisfaisantes. Quant à moi, j’ai la
conviction que le palais ne subira pas la moindre dégradation et que, par
conséquent, il ne faudra pas, comme le pense l’honorable préopinant, dépenser
des millions, ou un million, pour le réparer.
Je terminerai en faisant
remarquer à l’honorable M. Osy, que le gouvernement étant chargé d’administrer
les domaines de l’Etat, il peut louer les écuries comme toute autre propriété
nationale. C’est là un acte que j’ai évidemment le droit de poser, sauf à en
rendre compte comme je dois le faire pour tous les autres actes de mon
administration.
M. Verhaegen. - J’appuie d’autant plus volontiers les observations de l’honorable M.
Osy, que, dans une précédente séance, j’avais adressé à M. le ministre des
finances une interpellation à laquelle il n’avait pas cru devoir répondre. M.
le ministre rompt aujourd’hui le silence et vient nous dire que des personnes
animées de sentiments de charité et de bienfaisance ont demandé la jouissance
momentanée de l’ancien palais du prince d’orange et qu’il n’a pas cru pouvoir
se refuser à cette demande. Mais d’autres personnes, également animées de
sentiments charitables, avaient depuis longtemps adressé une semblable demande
à l’honorable M. Mercier, qui n’a pas daigné seulement les honorer d’une
réponse ; j’entends parler des personnes qui sont à la tête de la Société
philanthropique, proprement dite, laquelle rend des services réels à l’humanité
souffrante, alors que des sociétés rivales se bornent à offrir aux malheureux
qui meurent de faim des secours purement spirituels.
Je ne sais pas si M. le ministre des
finances a parlé sérieusement lorsqu’il a prétendu que, par cela seul qu’il
administre les biens de l’Etat, il lui est permis d’accorder gratuitement la
jouissance d’un palais qui fait partie du domaine public.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Je n’ai pas dit cela. J’ai dit que la chambre ne voudrait sans doute
pas que l’on exigeât un loyer qui devrait être prélevé sur le denier du pauvre.
M. Verhaegen. - Mais les observations qui surgissent de toute part démontrent assez
que ce que vous avez fait dans cette occurrence n’obtient pas l’approbation de
l’assemblée.
Quoi qu’il en soit, je prie M. le
ministre des finances de nous dire pourquoi ces autres personnes dont j’ai
parlé et qui étaient aussi animées de sentiments de charité et de bienfaisance,
n’ont pas obtenu ce qui semble n’avoir été accorde qu’à une classe privilégiée
?
M. le ministre des finances (M. Mercier) - La société philanthropique a le temple des Augustins.
M. Verhaegen. - Le temple des Augustins a une destination fixe. Vous pouviez en
concéder la jouissance à la fois à l’une et à l’autre société et personne
n’aurait eu à se plaindre.
Si vous tenez absolument à un
bazar, vous pouvez disposer encore du palais de l’industrie, avant de toucher
au palais du prince d’Orange, qui ne comporte pas une pareille destination.
D’ailleurs qu’on ne s’y trompe pas,
on veut imiter à Bruxelles ce qui naguères s’est fait à Paris, mais ce ne sera
jamais qu’une misérable parodie. A Paris les fashionables, ou, pour me servir
de l’expression du jour, les lions
sont tenus de venir payer aux échoppes des dames de haut parage leur tribut de
l’hiver ; c’est à ce prix qu’ils sont admis aux bals et aux fêtes ; mais le
caractère belge, quelle que soit d’ailleurs sa complaisance pour le beau sexe,
n’admet ni cette espèce de sujétion ni les contributions forcées qui en sont la
suite, et je ne pense pas que beaucoup de nos dames, tout en descendant au rôle
de détaillantes, parviennent à faire fortune.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Il est certain qu’on est toujours disposé à prêter de mauvaises
intentions quand on juge avec prévention. Mais je prie l’honorable membre de
croire qu’il n’y a pour le gouvernement aucune classe privilégiée en Belgique ;
je n’ai eu nullement égard à la qualité des personnes qui voulaient faire le
bien ; je n’ai eu en vue que les malheureux auxquels elles se proposaient de
venir en aide.
La destination donnée au palais dont
il est question, bien loin de l’avilir, ne peut que le relever pour sa
destination future. La reine des Français, dont les nobles inspirations sont
connues de tous, n’a pas cru déroger en consacrant son palais à un semblable
usage. C’est donc à tort qu’on a voulu blâmer la destination momentanée que
j’ai consenti à donner au palais de la rue Ducale ; je crois qu’un édifice,
quel qu’il soit, ne peut qu’être anobli en servant à une œuvre de bienfaisance
et de moralité ; ces sentiments, croyez-le, monsieur, sont plus libéraux que
les vôtres.
M.
Verhaegen. - C’est une concurrence aux écoles
de la ville.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Voilà une intention à laquelle je n’avais certes nullement pensé. On
peut, quand on le veut absolument, trouver dans tout des questions de parti.
Pour moi, je n’ai vu dans ce qui a effarouché l’honorable membre qu’une
question d’humanité ; le fait est fort simple. On a exposé qu’il y avait à
Bruxelles un très grand nombre d’enfants pauvres qui ne recevaient aucun
enseignement. Au moyen d’expositions, de collectes, de ventes, on a espéré
pouvoir recueillir un certain capital, et parvenir ainsi à faire donner quelque
instruction et à inspirer des sentiments de morale et de religion à une classe
malheureuse. Voilà le fait dans sa simplicité, voilà ce que l’honorable M.
Verhaegen trouve si détestable.
M.
d’Hoffschmidt. - Ce n’est point, je l’avoue, sans
éprouver quelque surprise, que j’ai entendu un honorable préopinant parler
plusieurs fois, avec une certaine animation d’une classe privilégiée. Eh quoi,
messieurs, n’est-ce pas assez que la Belgique soit déjà divisée en catholiques
et libéraux, sans qu’on cherche encore à y établir une espèce d’antagonisme
entre les différentes classes de la société ? Voudrait-on ressusciter par
hasard cette vieille querelle, bonne au temps de la féodalité, mais qui ne
serait plus qu’un non-sens, une espèce d’anachronisme à l’époque actuelle et
sous une constitution qui a établi pour tous le niveau de l’égalité devant la
loi ? Certes, si sous notre régime parlementaire, il y a une classe qui exerce
une grande part d’influence, c’est bien celle à laquelle appartient l’honorable
M. Verhaegen ! Je vois avec peine, je dois le dire, l’honorable préopinant se
placer sur un semblable terrain. Je ne sais quel avantage peut en résulter pour
le pays.
Quand bien même, messieurs,
l’occupation momentanée du palais dont il s’agit appartiendrait à une certaine
classe de la société je n’y verrais pas grand mal, puisqu’il n’est question ici
que d’une œuvre de bienfaisance.
J’entends parler beaucoup de
l’association dont on a fait mention. Eh bien, il n’est pas exact de dire
qu’une seule classe y soit admise ; un appel est fait, au contraire, à toutes
les personnes aisées, sans tenir compte de la classe de la société à laquelle
elles appartiennent.
On a eu tort de dire que c’était prétendument un acte de bienfaisance.
L’occupation du palais de la rue Ducale pendant un mois, a pour but de venir au
secours de l’instruction de la classe pauvre. On m’a assuré que, dans la ville
de Bruxelles, il y avait plus de 12,000 enfants pauvres qui ont besoin de
recevoir l’instruction primaire, et que, malgré tous les efforts que fait
l’administration locale, malgré sa bonne volonté, malgré sa ponctualité à
exécuter la loi du 23 septembre 1842, 3,000 de ces enfants tout au plus
recevaient cette instruction.
Dès-lors, je ne vois pas pourquoi on
vient parler d’écoles destinées à faire concurrence aux écoles de la ville, il
s’agit bien plutôt d’écoles qui viennent en aide à la ville pour l’exécution de
la loi de l’instruction primaire.
Les écoles qu’il est question
d’établir maintenant (et même plusieurs de ces établissements sont déjà en
activité), sont dirigés par des frères de la doctrine chrétienne. Eh bien, tout
esprit non prévenu doit reconnaître l’heureuse influence de ces instituteurs
sur l’éducation et l’instruction des enfants de la classe pauvre. Si j’avais
besoin d’autorités pour le démontrer, je pourrais m’appuyer sur une autorité
imposante prise dans l’opinion libérale ; je citerais, par exemple, les paroles
prononcées dans la discussion de la loi sur l’instruction primaire par l’un de
nos plus illustres orateurs, par l’honorable M. Lebeau, qui a rendu justice à
l’institution des frères de la doctrine chrétienne, qui en a reconnu l’heureuse
influence, influence qu’il a été à même d’apprécier dans la ville de Namur
qu’il a longtemps habitée.
Je ne pense pas non plus qu’il faille
faire de cette question une question de parti. Je pense que l’instruction des
enfants de la classe pauvre doit convenir à toutes les opinions et à tous les
partis. Il ne s’agit pas, et, effet, de leur inculquer des principes
politiques, mais de leur enseigner des principes de morale et de religion, ce
qui doit convenir à tout le monde. A cette question ne se rattache donc aucune
influence politique quelconque, et c’est ainsi que, quant à moi, je la
considère.
Quant à l’occupation du palais
de la rue Ducale, je ne vois pas, si le palais ne souffre pas de cette
occupation, quel tort elle fait à l’Etat, au trésor public ? On a pris les plus
minutieuses précautions pour garantir le palais contre toute dégradation. Si,
du reste, il devait résulter de l’occupation quelques légères détériorations,
elles seraient réparées aux frais de la société et sans que le trésor public en
souffrît le moins du monde, Dès lors, je ne comprends pas la persistance que
l’on met à reprocher au gouvernement un acte fort simple, fort naturel, dont personne
ne souffrira et pour lequel il ne fait que prêter son concours à une œuvre
toute de bienfaisance.
M. Osy. - Messieurs, on faisait une interpellation, j’étais persuadé que M. le
ministre des finances, en accordant le palais du prince d’Orange pour une
exposition, n’avait pas eu de mauvaises intentions. Ce n’est certainement pas
par esprit de parti que j’ai présenté mon observation. J’ai considéré la
question de plus haut. J’ai trouvé qu’un palais destiné à l’héritier du trône,
ne doit servir ni à une exposition, ni à des concerts et à des bals ; car, je
le répète, si on consacre le palais à cet usage cette année, vous ne pourrez,
jusqu’à la majorité du prince, refuser le palais pour la même destination ; et
à la majorité du prince, on viendra vous demander une forte somme pour les
réparations et embellissements.
M. le ministre des finances
m’a répondu assez cavalièrement en ce qui touche les écuries du prince
d’Orange.
M. le ministre a dit : « Nous
pouvons faire ce que nous voulons. » Pouvons-nous, messieurs, permettre qu’on
établisse dans ce local des magasins de pierre, de grains, etc. ? Car c’est ce
qu’on se propose d’y établir, d’après une annonce que j’ai sous les yeux ?
N’est-ce pas avilir la destination future de ce bâtiment ? Je ne pense pas que
M. le ministre des finances devait répondre comme il l’a fait. Je ne pense pas
que le gouvernement, sans notre consentement, puisse disposer d’aucun des
bâtiments acquis du roi des Pays-Bas ou de la ville de Bruxelles.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, je crois que l’honorable préopinant n’a pas saisi mes
paroles. Si elles étaient telles qu’il les a présentées, elles seraient tout à
fait contraires à mes intentions. Je ferai toujours beaucoup de cas de toutes
les observations qui sont faites dans cette enceinte et de celles de
l’honorable membre en particulier, mais, en principe, je ne puis admettre que
le gouvernement n’ait pas le droit de disposer, non par aliénation, mais par
mise en location ou fermage, sous sa responsabilité, de tous les domaines
publics.
Ainsi, en ce qui concerne la
destination qui a été donnée aux écuries du palais de la rue Ducale, elle est
conforme à celle qui a été affectée à cet immeuble depuis dix ans. Je suis
persuadé que si je n’en avais pas tiré parti, d’autres membres m’auraient fait
de ce chef de graves reproches. L’Etat, comme tout propriétaire, doit retirer
quelque revenu de ses propriétés. Du reste, il ne s’agit pas ici du palais
même, il n’est question que des écuries. Or, elles sont très solidement
construites ; et l’usage auquel on les destine n’y apportera aucune
dégradation.
L’honorable M. Verhaegen nie
demandait encore, il y a un instant, pourquoi on avait refusé le palais à une
société, tandis qu’on l’avait accordé à une autre. Ma réponse est bien simple.
D’abord il aurait été impossible d’accéder à la fois à la demande des deux
sociétés. Ensuite, je déclare de la manière la plus formelle que la demande
dont a parlé l’honorable M. Verhaegen ne m’a pas été présentée. Je dirai même
qu’un fonctionnaire m’ayant fait part d’un entretien que l’honorable M.
Verhaegen avait eu avec lui à ce sujet, j’ai cru que la demande en question
émanait de cet honorable membre, et j’ai fait demander s’il y avait au ministère
une requête présentée par lui ; et on m’a assuré qu’il n’y en avait pas. Ainsi,
lorsque j’ai accordé l’usage du palais à la société à laquelle l’honorable M.
Verhaegen a fait allusion, je ne savais même pas qu’il existât une demande
faite par d’autres personnes ; ce n’était donc pas une préférence dont la
première société était l’objet de ma part. Dans tous les cas, la demande de la
seconde société ayant été adressée seulement il y a six semaines, d’après
l’honorable M. Verhaegen, elle est arrivée trop tard, puisque ma décision à
cette époque était déjà prise depuis quelque temps. De plus, la société dont
parle l’honorable M. Verhaegen a pu disposer du local des Augustins. Je pense
qu’il peut suffire à la destination que l’on a pu avoir en vue.
M. Verhaegen. - Messieurs, pour justifier un acte que je regarde comme injustifiable
(je réponds à l’honorable M. d’Hoffschmidt), on veut soulever des questions de
parti, c’est un moyen, je le sais, de se faire quelques adhérents, mais moi, je
le déclare tout d’abord, je ne veux pas me placer sur ce terrain.
L’honorable M. d’Hoffschmidt, qui
m’accuse de diviser la société en différentes classes, soutient que la
constitution a aboli tous les privilèges et qu’il n’y a plus de classes privilégiées.
Eh, mon Dieu ! ces idées sont bien les miennes, et je déclare les partager de
toute la force de mon âme.
Plus que personne je désire que
chacun reste dans les limites que la constitution lui assigne. L’honorable
membre auquel je réponds ne m’a pas compris et n’a pas voulu me comprendre. Mes
paroles n’ont pas la portée qu’il leur a donnée. J’appelle tout bonnement
classe privilégiée celle qui obtient ce qu’on refuse à d’autres ; c’est dans ce
sens que j’ai dit qu’il y avait, dans l’espèce, une classe privilégiée puisque
cette classe avait obtenu de M. le ministre l’usage du palais du prince
d’Orange qu’il n’avait pas voulu accorder à une autre classe. Croyez-le bien,
messieurs, je n’ai pas eu le moins du monde l’intention de soulever une question
de parti.
M.
d’Hoffschmidt. - J’en suis charmé !
M. Verhaegen. - Maintenant, messieurs, ne confondons pas (et ici je réponds a M. le
ministre des finances) la question des écuries avec celle du palais ; quant aux
écuries, M. le ministre a fait acte d’administration, en les louant, soit ; il
a pu faire un mauvais acte, en les louant de telle manière plutôt que de telle
autre, il nous sera libre de le critiquer en temps et lieu.
Mais pour le palais, a-t-il fait acte
d’administration ? Non, d’après moi, il a fait acte de propriété, il aurait
fait simplement acte d’administration, s’il avait loué, mais il n’a pas loué,
il a concédé à titre gratuit la jouissance d’immeubles qui ont coûté à l’Etat
des sommes considérables, encore une fois il a fait acte de propriété, je puis
même dire abus de propriété, et c’est de cet abus dont nous nous plaignons.
Messieurs, il me reste un dernier mot
à dire : M. le ministre des finances a prononcé mon nom... (interruption) par erreur, dites-vous ;
non pas tout à fait par erreur. Certes, vous auriez eu tort de prononcer mon
nom en l’accolant à l’une des sociétés philanthropiques qui ont été mises en
jeu, et auxquelles je suis complètement étranger, mais vous auriez pu parler de
moi en disant que j’avais été chargé, au nom de la société du grand concert,
dont la composition ne laisse rien à désirer, de vous offrir six mille francs
par an, pour ce même local qui aujourd’hui ne rapporte rien à l’Etat, puisque
vous le cédez à titre gratuit.
J’ai parlé de concurrence et
n’ai-je pas eu raison ? en créant un bazar où certaines dames de la capitale
vendront des marchandises de toute espèce, ne fait-on pas de la concurrence à
notre commerce de détail déjà trop en souffrance ? En destinant le produit de
cette opération à l’établissement d’écoles qui seront dirigées par des petits
frères, ne fait-on pas de la concurrence à nos écoles municipales qui sont
assez nombreuses pour recevoir tous les enfants pauvres, et qui d’ailleurs
présentent toutes les garanties ? Je regrette de ne pas voir ici mon honorable
ami M. Orts, il pourrait, comme échevin de la ville de Bruxelles, vous dire
quelle est la sollicitude de l’administration communale pour l’instruction
primaire et combien sera nuisible la concurrence à laquelle l’acte illégal du
gouvernement va donner lieu. Il ne s’agit pas ici d’une question de parti ;
loin de moi d’attaquer la liberté d’instruction, je ne me plains point du mal
que certaines personnes peuvent faire aux écoles communales en créant des
écoles libres, elles sont dans leur droit, ce dont je me plains, c’est de
l’appui que le gouvernement donne en leur fournissant les moyens de la
concurrence alors que le gouvernement devrait rester neutre.
M. de Mérode. - Messieurs, à tout instant l’administration communale de Bruxelles
dispose de la salle gothique de l’Hôtel-de-Ville ou d’autres salles pour
différentes réunions, et je ne sache pas qu’elle perçoive toujours un loyer
pour la concession qu’elle fait dans ces cas-là ; cependant on ne dit pas que
la ville fait acte de propriété, qu’elle ne fait pas acte d’administration. Or,
il me semble qu’un palais qui n’a maintenant aucune destination, qui n’est
employé à aucun usage, quand on prend toutes les précautions convenables pour
empêcher qu’il ne s’y fasse aucune dégradation, peut très bien être prêté par
le gouvernement, comme la ville prête ses locaux, pour des réunions qu’elle
considère comme utiles, comme méritant la concession qu’elle leur fait.
Quant aux écuries, il est évident que
M. le ministre des finances a fait acte de bonne administration en en tirant
parti. Je prétends que des écuries dans lesquelles on séjourne de temps en
temps, dans lesquelles des personnes entrent, se détériorent moins que des
locaux constamment inhabités. Rien ne nuit plus à une habitation que d’être
constamment inhabitée.
Quant à la dignité du palais,
destiné, comme on peut le supposer, à un prince de la maison royale, sans avoir
aucun droit de lui donner cette destination, on peut prévoir qu’il en sera
ainsi, je ne vois rien de contraire a cette dignité en accordant la permission
d’y établir des réunions dans le but de procurer, pour l’instruction primaire
d’une foule d’enfants qui n’en reçoivent pas, malgré tout ce qu’on a dit, les
moyens de construire des locaux et de payer des maîtres.
Malgré tout ce qu’on a pu vous dire,
des efforts de la ville de Bruxelles pour donner l’instruction dans ces écoles,
un grand nombre d’enfants ne la reçoivent pas, soit par un motif, soit par un
autre ; et si des personnes se réunissent pour aider à former des écoles qui
suppléent à celles de la ville, je ne vois là qu’une bonne action et tout le
monde doit penser comme moi sur ce point.
Les frères des écoles chrétiennes
sont admis dans la ville de Paris non seulement par des souscriptions, mais par
la ville qui en paie douze ; et la ville de Bruxelles ne donne rien pour ces
établissements. Des parents d’enfants pauvres préfèrent les écoles des frères
aux autres, sans trouver pour cela qu’elles ne soient pas bonnes. C’est donner
au peuple une faculté de choix ; c’est quelque chose que le choix, pour nous
qui vivons sous un régime de liberté. Moi, si j’étais pauvre, je les
préférerais aussi, sans vouloir dire pour cela que je considère les autres
comme mauvaises. Sous le rapport de la dignité du palais, des personnes
pourraient s’y intéresser plus que nous, ces personnes, qui sont dans une
position plus élevée, ne se plaignent pas, elles ne regardent pas comme
dérogeant à l’emploi qui peut recevoir la destination qu’on lui a donnée
momentanément.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Je disais tout à l’heure qu’il était loin de ma pensée d’accorder un
avantage à une société plutôt qu’à une autre. On me faisait un énorme grief
d’avoir rejeté la demande formée par une autre société ; j’ai dit que je ne me
rappelais pas que cette demande fût parvenue au département des finances ; je
pouvais me tromper, j’ajoutais que du moins elle ne m’avait pas été mise sous
les yeux. Au moment même où l’honorable M. Verhaegen parlait, j’ai envoyé une
note au ministère pour savoir si pareille demande y avait été adressée ; on me
répond qu’on n’en a aucune trace. Voilà certes la meilleure réponse au reproche
qui m’a été adressé d’avoir montré plus de prédilections pour une société que
pour une autre.
Pourquoi ne fait-on pas également un
grief au gouvernement de disposer du temple des Augustins ?
Le gouvernement, avec l’approbation de
tout le monde, en dispose en faveur de personnes qui donnent des concerts ou
font des expositions la plupart du temps dans un but de philanthropie. C’est un
acte de même nature qui a été posé en ce qui concerne le palais de la rue
Ducale. Si la demande dont l’honorable membre a parlé et qui avait pour objet
l’obtention du palais moyennant un loyer, mais uniquement dans un but de
plaisir et non de philanthropie, si une telle demande, dis-je, avait été
accueillie, une pareille destination donnée au palais eût été peu convenable et
on aurait été en droit de m’adresser des reproches mérités.
Puisqu’on a parlé de l’administration
communale de la ville de Bruxelles, je dirai que personne n’apprécie mieux que
moi les efforts qu’elle fait dans l’intérêt de l’instruction publique et sa
sollicitude pour l’instruction des classes pauvres en particulier ; il n’en est
pas moins vrai qu’il m’a été exposé que beaucoup d’enfants pauvres ne
recevaient ni instruction, ni éducation ; les établissements qu’on se propose
de créer contribueront à propager la morale et l’instruction dans cette classe.
Il a été parlé des écuries du
Roi. Depuis longtemps rien n’a été changé en ce qui les concerne, et quant au
terrain vague, il n’en a pas été disposé, il est sans destination jusqu’à
présent. (C’est assez ! c’est assez !)
M. le président. - M. Malou a la parole sur l’article.
M. Malou. - Messieurs, dans la discussion générale, M. le ministre des finances,
répondant à l’interpellation de l’honorable M. Osy, nous a fait connaître qu’il
avait l’intention de soumettre prochainement à la chambre un projet de loi
tendant à autoriser l’aliénation des biens domaniaux de la valeur d’un dixième
de la somme à laquelle il a été décidé que celte mesure serait appliquée dans
l’espace de dix ans.
Je pense que ce mode d’exécution de
la loi du 3 février 1843 ne serait conforme ni à l’esprit ni au texte de
l’amendement adopté sur la proposition de l’honorable M. Rogier. Voici ce que
porte l’article 2 de la loi du 3 février 1843 :
« Il sera procédé, dans un terme
de dix ans, à l’aliénation de biens domaniaux, jusqu’à concurrence de la somme
de 10 millions. Cette vente sera réglée par une loi. Les fonds à en provenir
seront employés à l’amortissement de la dette publique. »
Si j’ai bien compris les paroles de
M. le ministre, il s’agirait, non pas de régler par une loi l’exécution de cet
article de la loi du 3 février 1843, mais de présenter successivement des
propositions pour l’aliénation de chaque dixième de la somme totale, à
concurrence de laquelle la vente de domaines a été décrétée. Mais il ne peut
pas en être ainsi ; la chambre a voulu qu’il y eût une répartition de cette
vente de domaines faite par une seule loi.
On avait considéré comme très
préjudiciable à certaines provinces l’aliénation des forêts. On ne peut pas,
chaque année, faire une loi déterminant dans quelle province et quelle portion
d’aliénation devra avoir lieu. Il faut de toute nécessité proposer une seule
loi décrétant l’exécution complète et simultanée de cette vente jusqu’à
concurrence de dix millions. Il est bien entendu que l’aliénation ne serait pas
faite en une seule année, mais que les immeubles à aliéner seraient désignés
par une seule loi. Il serait presque impossible que la répartition équitable
qui a été dans la pensée de la chambre se réalisât à travers neuf ou dix
discussions.
J’ai cru devoir faire ces
observations, parce que j’ai remarqué, d’après les développements du budget de
1844, que les prévisions formées par la majorité de la section centrale qui a
examiné le traité du 20 novembre, ne se réalisent que trop. La forêt de Soignes
devait donner pendant plusieurs années un produit extraordinaire, parce que la
Société générale avait ménagé des coupes considérables qu’on appelle, en style
forestier, des coupes usées. Il se trouve que dans ces circonstances si
favorables, qui devaient amener une augmentation de revenu, la forêt de Soignes
produira en 1844 seulement 252,000 francs, d’après le discours de M. le
ministre des finances ; ce qui fait, en prenant la forêt seule, un intérêt de 1
43 centièmes p.c.
Je défalque les frais
d’administration tels qu’ils sont portés au budget du ministère des finances,
c’est-à-dire l’augmentation de dépenses résultant de l’acquisition de la forêt
de Soignes. Je suis donc très peu touché d’une observation produite à plusieurs
reprises et reproduite dans la discussion générale, observation consistant à
dire que nous avons considérablement augmenté le domaine public.
Qu’il me soit permis de faire
remarquer que dans cette augmentation on calcule la créance du comte de Nassau,
admise transactionnellement en vertu de l’art. 61 du traité du 5 novembre.
Cette clause a été et doit être considérée comme une des clauses onéreuses du
traité ; et quant à l’acquisition réelle, celle de la forêt de Soignes, je
viens, je pense, de démontrer combien cette augmentation du domaine public
enrichit peu le pays.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Je ne pense pas que le moment soit arrivé de discuter le mode qu’on
suivra dans l’exécution de la loi dont a parlé l’honorable membre. Il argumente
sur le mot une, sur ce que la loi
porte : le mode sera réglé par une loi.
Il en conclut que le gouvernement ne peut présenter différentes lois. Je ne
partage pas cet avis. Je crois qu’il est préférable de proposer successivement
non pas dix lois, mais plusieurs lois. Je crois, du reste, que la discussion de
ces objets sera plus opportune quand ces lois seront soumises à la chambre.
L’honorable membre vient de
prouver combien il serait dangereux d’entamer prématurément cette discussion ;
déjà il a supputé le revenu de tel ou tel bien domanial, sans se demander si
c’était bien un revenu annal, s’il ne pouvait être plus considérable dans
d’autres années, s’il n’y avait pas une moyenne plus favorable à prendre.
Je le répète, il ne serait pas
convenable de discuter maintenant toutes ces questions. Quand je présenterai le
projet de loi d’aliénation des domaines, j’indiquerai les motifs qui pourront
me porter à ne pas suivre le mode d’aliénation dont a parlé l’honorable
préopinant.
M. Malou, rapporteur. - Je devais attirer l’attention du gouvernement sur l’exécution à
donner à la loi du 3 février 1843. Sans doute, le moment n’est pas venu de
discuter ces questions. Aussi ne les ai-je pas voulu discuter ; mais il a paru
nécessaire de signaler à M. le ministre des finances le véritable sens de la
loi.
M. Pirmez. - Je crois qu’il y aura de très longs débats pour décider quelles
forêts il conviendra d’aliéner ; il y aura en quelque sorte à ce sujet une
querelle de province à province. Je crois donc qu’il conviendrait de présenter
une seule loi.
M. de Corswarem. - Parmi les revenus du domaine concernant le département de la guerre,
il en est un dont je désire vous entretenir. La chambre me permettra d’en faire
l’historique.
Après les événements de 1831, le
génie militaire prit, aux environs d’Hasselt quelques jardins pour y établir
des forts. La constitution dit qu’on ne disposera des propriétés que pour cause
d’utilité publique, et après indemnité préalable. Comme le cas était urgent,
qu’il s’agissait de la défense de la patrie, personne ne réclama. Le ministère
de la guerre disposa des jardins et paya aux propriétaires un fermage. Quelque
temps après, les ouvrages étendus furent détruits ; on préféra des ouvrages
plus restreints. Dès lors un grand espace de terrain ne fut plus occupé. Les
propriétaires ont alors réclamé l’usage de ces terrains ; mais on leur dit
qu’ils étaient toujours nécessaires pour former le glacis de la place.
Cela a duré pendant quelques années.
Mais cette année, le département de la guerre a fait louer ces terrains. Les
propriétaires ont demandé à pouvoir rentrer dans leurs propriétés, ce ne leur a
pas été accordé. On a laissé ces terrains à d’autres personnes à qui l’on fait
payer un loyer. Comme ce sont des jardins d’agrément, d’affection pour les
habitants de la ville, je demanderai qu’on en rende l’usage aux propriétaires.
On épargnera ainsi les frais d’administration.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - J’ai pris note des observations de l’honorable préopinant ; j’examinerai
cet objet.
- L’article Enregistrement, domaines et forêts est mis aux voix et adopté.
Trésor public
« Produits divers des
prisons (pistoles, cantines, ventes de vieux effets) : fr. 50,000 »
« Intérêts de 2,264 obligations
de l’emprunt de 30,000,000 de francs à 4 p. c. acquises par le fonds
d’amortissement de l’emprunt de 1840 : fr. 90,560 »
« Intérêt de 11,174 obligations
de l’emprunt de 30,000,000 fr., à 4 p. c., provenant de l’empoi de l’encaisse
de l’ancien caissier général, sans préjudice aux droits envers le même
caissier, dont il est fait réserve expresse : fr. 446,960 »
« Produits de l’emploi des fonds
de cautionnements et consignation : fr. 550,000 »
« Produits de l’école
vétérinaire et d’agriculture : fr. 60,000 »
« Produits des actes des commissariats
maritimes : fr. 30,000 »
« Produits de la fabrication de
pièces de 1 et de 2 centimes : fr. 300,000 »
« Produits du droit de pilotage
: fr. 350,000 »
M. le président. - M. Osy vient de déposer l’amendement suivant à cet article :
« Je propose à l’article Trésor
public :
« 1° De supprimer l’art. Intérêts de
2264 obligations de l’emprunt de 30,000,000 fr. à 4 p. c. : fr. 90,560.
« 2° De dire à l’article suivant
« Intérêts de 13,438 obligations de 30,000,000 fr. 4 p. c. provenant de
l’encaisse, etc., 537,520 fr. au lieu de 446,900 fr. »
M. Osy. - Vous avez vu par le discours de M. le ministre des finances qu’il a
trouvé convenable de distraire de l’encaisse de l’ancien caissier général,
2,264 obligations, formant 2 millions environ, pour être affectés à
l’amortissement. Comme je suis d’opinion que l’emploi de l’encaisse doit être
fixé par une loi, je ne crois pas pouvoir adopter la proposition de la section
centrale. Je propose l’amendement dont il vient d’être donné lecture.
M. Cogels. - Il sera difficile de discuter l’amendement de l’honorable M. Osy,
sans entrer en même temps dans l’examen d’une question qui est restée depuis
longtemps indécise, celle relative à l’amortissement des derniers emprunts, et
surtout à l’emploi des fonds tenus en réserve.
Déjà plusieurs sections vous ont
demandé que cette question reçût une solution finale. Je suis du nombre de ceux
qui ont appuyé cette proposition ; car, ainsi que l’a dit M. le ministre des
finances, il y a dans le contrat de l’emprunt de 8 millions une illégalité ;
illégalité commise, il est vrai, dans l’intérêt du trésor, du crédit public, et
sanctionnée ensuite tacitement par les chambres. Mais il n’en est pas moins
vrai que, dans la loi d’emprunt, il a été posé un principe, et que ce principe
a été violé.
Il se trouve dans toutes les lois
d’emprunt une clause relative à l’amortissement ; voici comment elle est
libellée : « Il sera consacré à l’amortissement une dotation d’au moins 1 p. c.
du capital nominal, indépendamment de l’intérêt des obligations
amorties. » Ainsi l’intention de la législature a été non seulement que
l’emprunt fût amorti, au moyen de 1 p. c. du capital nominal, mais encore que le
montant de ces rachats produisît un intérêt composé, enfin que l’emprunt fût
racheté au bout d’un certain nombre d’années, c’est-à-dire, en 36 ans et une
fraction, pour un emprunt à 5 p. c.
Qu’a-t-on fait ? En vertu des
contrats passés avec la Société générale et avec la maison Rothschild, et en
vertu du texte des obligations même, nous avons suspendu pour 6 ans l’action de
l’amortissement. Dans les clauses des contrats, il y a eu de grandes
différences ; c’est-à-dire que, dans l’un des contrats, il avait été stipulé
qu’il y aurait un fonds réservé, et que ce fonds porterait intérêt a 5 p. c. au
profit de l’amortissement ; dans un autre contrat la clause relative à
l’intérêt n’a pas été insérée.
Ainsi les conditions de la loi n’ont
pas été remplies. Voilà une question à examiner, mais qui trouvera mieux sa
solution l’occasion du budget de la dette publique.
Aujourd’hui il y a une seule question
à examiner : convient-il d’appliquer au fonds d’amortissement une portion de
l’encaisse et notamment les 2,264 obligations de l’emprunt de 30 millions
distraits de cet encaisse. Si nous nous prononçons sur la proposition de la
section centrale ou sur l’amendement de l’honorable M. Osy nous pouvons
résoudre cette question.
Quant à moi, je trouve que l’emploi
du fonds de l’amortissement pour l’achat des 2,264 obligations, de l’encaisse,
n’atteindrait aucunement le but qu’on s’est proposé. D’abord, ce serait une
dérogation à la loi même car ces obligations ne produiraient pas l’intérêt
stipulé dans la loi, c’est-à-dire 5 p. c. Ensuite, dans un cas donné, le but
sera encore moins atteint ; c’est-à-dire qu’en cas de baisse des obligations 5
p. c. au-dessous du pair, tous les fonds en réserve devront être employés à
faire des rachats. Pour cela, il faudra qu’ils soient disponibles. Pour les
rendre disponibles, il faudra réaliser les valeurs qui les représentent. Où
serait l’avantage d’une telle opération ? car dans un moment de crise (et ce
n’est que dans un moment de crise que le 5 p. c. baisserait au-dessous du pair)
on sera obligé de vendre un fonds très peu courant, pour racheter onéreusement
un fonds mieux casé. En cela on perdra nécessairement ; car si le 5 p. c. est
au-dessous du pair, le 4 p. c. descendra au-dessous de 90 ; si vous devez
vendre dans un tel moment deux millions, vous ferez descendre, peut-être, le
cours au-dessous de 80 ; vous ferez donc une opération désastreuse. Si vous
employez le fonds d’amortissement, vous ne pourrez le faire en rentes que vous
seriez obligés de vendre pour rendre ce fonds disponible.
Il est certain encore que de
tous ces fonds qui composent ce livre d’échantillons de notre dette, le 4 p. c.
est celui qui présente le moins d’avantages pour l’emploi du fonds
d’amortissement.
J’admets donc l’amendement de
l’honorable M. Osy, sauf à résoudre au budget de la dette publique la question
même de l’amortissement.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Jusqu’au mois de juin de cette année, aucune destination n’avait été
donnée au fonds d’amortissement de l’emprunt de 1840, plus de deux millions
étaient donc en caisse, provenant de cet amortissement. Le gouvernement s’est
demandé si cet état de choses pouvait être maintenu, si ce fonds de 2 millions
devait rester improductif, s’il n’augmentait pas inutilement l’encaisse de
l’Etat. La réponse n’était pas douteuse. Certes, il ne fallait pas laisser
inactif un capital de deux millions.
Deux moyens de l’utiliser se
présentaient : le placer en obligations d’un emprunt belge à 3, 4 ou 5 p. c ;
ou bien réduire l’encaisse de pareille somme par la diminution du chiffre
d’émission des bons du trésor ; c’est ce dernier parti que je crus devoir
prendre.
2,264 obligations de l’emprunt de 30
millions, provenant de l’ancien encaisse ont été transférées au compte de
l’amortissement de l’emprunt de 1840 ; ces obligations produisent un intérêt de
4 p. c.
L’honorable membre pense qu’on aurait
pu donner une autre destination à ces obligations, par exemple les convertir en
bons du trésor. Mais l’intérêt des bons du trésor est bien moindre que celui de
l’emprunt à 4 p. c., qu’il ne trouve pas assez élevé pour cette destination ;
il n’est que de 4 p. c. Qu’arriverait-il dans un moment de crise si une
pareille mesure était prise ? Que l’Etat devrait se rembourser à lui-même,
alors que dans de telles circonstances, il aurait besoin de toutes ses
ressources ; les fonds que l’honorable M. Cogels voudrait consacrer à
l’amortissement sortiraient de la caisse publique ; en diminuant l’encaisse, on
augmenterait sa gêne. Il n’en sera pas de même s’il place les capitaux réservés
de toute autre manière.
J’ai été surpris d’entendre
l’honorable membre dire qu’il ne voulait pas préjuger la question. Il est
évident que la question est préjugée dans tous ses raisonnements, car son point
de départ est que le fonds d’amortissement doit s’accumuler pour être employé,
quand les obligations de l’emprunt sont au-dessous du pair. C’est précisément
la question qui doit être résolue et sur laquelle je ne crois pas être d’accord
avec l’honorable membre.
J’accepte, du reste, les deux
amendements de la section centrale ; la réserve qu’elle propose a figuré dans
toutes nos lois de budget depuis 1834, et comme elle ne préjuge rien, je ne
crois pas devoir m’y opposer.
Quant au deuxième amendement, qui
consiste à porter en recette les intérêts du fonds d’amortissement, je l’adopte
également ; il est vrai qu’à la rigueur les intérêts devraient profiter au
fonds d’amortissement lui-même, comme je l’ai établi dans mon discours à
l’appui des budgets, mais la section centrale ayant pris en considération que
près de quatre millions sont déjà consacrés à augmenter cette année nos
différents fonds d’amortissement, j’ai pensé pouvoir me rallier aussi à cet
amendement.
Je dirai quelques mots des valeurs qui
forment l’ancien encaisse du caissier-général et de toutes celles dont le
traité nous a mis en possession. Au moment où je devais présenter aux chambres
la situation générale de nos finances, il y avait nécessité de mettre nos
capitaux en regard de notre découvert et de constater le résultat de ce
décompte. C’est ce que j’ai fait ; il eût été absurde de faire ressortir une
insuffisance de 37 millions sans indiquer à quel chiffre elle pouvait être
réduite par l’emploi des capitaux disponibles.
Le compte que j’ai présenté ne
pouvait être basé que sur les faits existants au moment où il a été formé. A
l’occasion d’une opération financière telle qu’une conversion ou une
capitalisation, il y aurait lieu d’examiner s’il ne serait pas utile d’amortir
tout d’un coup les obligations à 4 p. c. qui forment l’encaisse, s’il ne serait
pas convenable de réduire la dette flottante par un capital équivalent demandé
à l’emprunt, si même il n’y aurait pas lieu de combler entièrement le
découvert, ainsi qu’en émettait le vœu un honorable membre dans une de nos
dernières séances. Toutes ces questions sont évidemment réservées. Quant aux
revirements de valeurs, ce sont des opérations qui peuvent se faire sans aucun
inconvénient dans la trésorerie selon les exigences des différents services.
Je rappellerai, au surplus, que, dans
les diverses propositions que j’ai soumises à la chambre pour l’emploi des
capitaux, je n’ai eu qu’un but, celui de réduire la dette flottante le plus
possible ; car, je l’ai dit maintes fois, il est toujours dangereux pour l’Etat
que le chiffre en soit élevé.
En 1830, j’ai constaté que
notre découvert était de 25,400,000 ; j’ai proposé de réduire la dette
flottante à 8 millions, en prélevant 17,400,000 fr. sur l’emprunt ; or, les fonds
pris sur l’emprunt sont un capital, aussi bien que les valeurs qui constituent
l’ancien encaisse ou qui nous rentrent par suite du traité. Au surplus, comme
la proposition du gouvernement n’a pas reçu, à cette époque, l’assentiment de
la chambre, j’ai annoncé plus tard, dans l’exposé des motifs du budget des
voies et moyens, que les capitaux qui seraient mis plus tard à notre
disposition, tels que l’encaisse de 1830 et les redevances dues par la Société
générale pourront être employés à l’extinction de la dette flottante.
C’est précisément ce que je propose
encore aujourd’hui et j’arrive au même résultat ; la balance du décompte laisse
une insuffisance de 9 millions qui sera immédiatement réduite à 8 millions par
l’aliénation d’un million de domaine. Je suis entré dans ces explications moins
à cause des observations très peu nombreuses qui ont été faites dans cette
enceinte et auxquels pleine satisfaction a été donnée, que parce qu’au dehors
on a défiguré notre situation financière, et prêté au gouvernement une conduite
qu’il n’a pas tenue. J’ai cru qu’il pouvait être utile de prémunir le pays
contre de pareilles manœuvres.
M. Malou. - Messieurs, dans la section à laquelle j’appartenais et dans la
section centrale, j’ai émis l’opinion que l’opération faite par M. le ministre
des finances n’était pas régulière.
Les intérêts des fonds qui
représentent aujourd’hui l’encaisse de 1830, ont été chaque année portés au
budget des voies et moyens pour la totalité. J’ai toujours considéré cette
application du revenu de l’encaisse comme une espèce d’immobilisation de
l’encaisse lui-même. La chambre en a jugé ainsi précédemment. En effet, vous
n’ignorez pas que, dans l’encaisse, se trouvaient des fonds provinciaux qui en
ont été distraits par la loi du 25 mars 1838. Lors de la discussion de cette
loi, d’honorables membres disaient que, dès que la Société générale consentait
à se dessaisir des fonds appartenant aux provinces, la loi était complètement
inutile. L’honorable M. d’Huart, qui était alors ministre des finances,
répondit :
« Dans le budget des voies et moyens
de 1838 se trouve un article de 670,000 francs, pour produit des obligations de
la Société générale composant le solde de l’ancien caissier de l’Etat. Si je
disposais d’une partie du capital de ces fonds, j’amènerais une réduction
d’autant dans les intérêts, réduction qui en produirait une égale dans une
prévision positive du budget des voies et moyens ; d’où se trouverait modifiée,
par une disposition administrative, une résolution législative. La loi est donc
nécessaire… » (Moniteur du 25 mai 1838.)
On s’est écarté de cette voie. J’ai
peut-être tort de me servir de cette expression. Car cette opération, que
l’honorable rapporteur du budget de la dette publique appelle une opération
fictive, est, je crois, une opération imaginaire.
Voici en effet, messieurs, ce que je
trouve dans la situation du trésor, qui nous a été distribuée malheureusement
après que la section centrale avait déjà délibéré sur cet article. A la page 24
et 25 de la situation du trésor se trouve : « Intérêt de l’encaisse de
l’ancien caissier général, sans préjudice, etc., versement fait pendant les
huit premiers mois de 1843, 537,520 fr. » ce qui représente les intérêts
de toutes les obligations 4 p. c. qui formaient l’encaisse. Je ferai remarquer,
en passant, que les échéances de cet emprunt sont en janvier et en juillet, et
que M. le ministre des finances, dans son discours, nous fait connaître que
l’opération fictive ou imaginaire dont il s’agit, aurait été faite au mois de
juin.
Quoi qu’il en soit, quelle
différence y a-t-il, messieurs, entre la proposition de la section centrale et
l’amendement de l’honorable M. Osy ? une différence de mots et rien de plus.
L’opération tendait à faire produire un intérêt au profit du fonds
d’amortissement de l’emprunt de 1840 ; du moment que l’intérêt des capitaux
acquis au fonds d’amortissement est porté en recette au budget des voies et
moyens, et appliqué aux dépenses générales de l’Etat, il ne reste plus rien de
l’opération.
Que nous rétablissions l’encaisse tel
qu’il était au budget de l’année dernière, ou que nous en fassions deux
articles séparés comme le propose la section centrale, et quant au trésor et
quant au fonds d’amortissement, le résultat est identiquement le même. Je pense
aussi, messieurs, que la discussion relative à l’interprétation des deux
contrats de l’emprunt de 1840 trouvera mieux sa place, quand nous examinerons
le budget de la dette publique. Aussi n’entre-t-il pas dans mes intentions
d’examiner maintenant les observations qui ont été faites. Je crois seulement
devoir faire une réserve sur le sens du premier contrat.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Si la chambre n’adoptait pas les propositions faites par la section centrale,
auxquelles le gouvernement s’est rallié, et qui sont conformes, sous un rapport
du moins, aux propositions primitives du gouvernement, plusieurs changements
devraient être faits dans les différentes lois qui vous ont été proposées.
D’abord pour faire produire un intérêt à ces deux millions, il faudrait
nécessairement acheter des fonds à la bourse ou les placer en bons du trésor ;
le premier moyen est repoussé par les auteurs de l’amendement ; quant au second
on ne pouvait y avoir recours, puisqu’il fallait, au contraire, diminuer le
chiffre de la dette flottante. D’ailleurs l’intérêt, par un pareil placement,
n’eût été que de 3 p. c. et déjà l’on semble se plaindre de ce que le fonds ne
rapporte que 4 p. c. par suite de l’opération qui a été faite.
Le montant de la dette flottante
devrait être immédiatement augmenté de plus de deux millions à l’art. 3 de la
loi des voies et moyens ; pour en augmenter l’émission il faudrait peut-être
élever bientôt l’intérêt de ces bons ; la somme d’intérêt figurant au budget de
la dette publique pour la dette flottante devrait aussi être portée a un
chiffre plus élevé ; enfin, dans peu d’années, toute notre dette flottante
serait insuffisante pour cette seule destination.
Dans tous les cas, messieurs,
comme vous l’a fait observer l’honorable M. Cogels, ce n’est qu’une opération
de trésorerie, mais elle a produit des conséquences favorables sur la situation
du trésor public.
Elle ne peut, en aucun cas, porter
préjudice ; c’est ce que doivent au moins avouer ceux qui ne lui reconnaissent
pas des effets salutaires. Nous demandons donc qu’elle soit maintenue.
M. Cogels. - Messieurs, j’ai été surpris de la vivacité avec laquelle M. le
ministre des finances a combattu mes arguments. Je crois n’avoir rien dit qui
fût le moins du monde désobligeant. J’ai été encore plus surpris de le voir
s’élever contre les conclusions que j’avais prises, car nous sommes
parfaitement d’accord, et ces conclusions, il les a adoptées.
Il m’a été impossible, messieurs, de
discuter la question de l’encaisse sans faire connaître mon opinion sur celle
de l’amortissement. Mais j’ai demandé moi-même que cette question fût réservée,
et le seul moyen de la réserver, c’était de rétablir les choses dans l’état où
elles se trouvaient avant que M. le ministre des finances eût fait l’opération
qu’il nous a annoncée, opération qu’il était d’autant plus facile de défaire,
qu’elle n’était que fictive, imaginaire.
M. le ministre des finances me fait
dire que, pour satisfaire aux obligations du contrat, nous aurions dû acheter
des fonds 5 p. c. à la bourse. Pas le moins du monde. J’ai dit qu’un emploi en
bons du trésor aurait été préférable.
A cet argument, que nous a répondu M.
le ministre des finances ? Qu’en cas de crise, une émission plus forte de bons
du trésor serait extrêmement dangereuse parce que ce serait dans ce moment
précisément que le gouvernement aurait le plus besoin de ses fonds.
Ceci serait vrai jusqu’à un certain
point, si la crise vous venait du pays même, mais il y a des crises qui nous
viennent du dehors et qui affectent la bourse, sans affecter pour cela la
position du trésor. Ce sont de ces crises-là principalement que j’ai voulu
parler. Alors, il est bien vrai que les bons du trésor subissent également une
baisse, mais cette baisse ne porte que sur le taux de l’intérêt et non sur le
capital. Dans la rente perpétuelle, au contraire, c’est le capital qui est
affecté par la baisse.
Quelle est la conséquence de
cet état de choses ? C’est que le gouvernement, pour rembourser des bons du
trésor à 5 p. c. d’intérêt, devrait peut-être en émettre à 5 1/2 ou 6 p. c., ce
qui ne lui occasionnerait pas une perte considérable. Mais si, pour satisfaire
aux obligations de son contrat, il fallait faire vendre à la fois les 2,264
obligations 4 p. c. dans un moment où ou trouve difficilement des fonds, il
devrait peut-être faire un sacrifice de 12 ou 15 p. c.
C’est là ce que je voudrais éviter,
et c’est pourquoi je pense qu’une opération en bons du trésor, qui ne serait
également que fictive, puisque le gouvernement en trouverait le placement en
lui-même, serait moins dangereuse que celle qui a eu lieu ; c’est ce qui s’est
pratiqué en France par suite de la loi de 1834.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Ainsi que je l’ai expliqué, j’ai cherché, messieurs, à réduire
l’encaisse en diminuant l’intérêt des bons du trésor. Maintenant, que voudrait
l’honorable membre ? Que j’aille, au contraire, placer les fonds
d’amortissement en bons du trésor. Je demande quel avantage en serait résulté
pour l’Etat ?
J’ai dit qu’il fallait tirer un
revenu du fonds d’amortissement. Pour cela deux moyens se présentaient : ou
acheter des fonds à la bourse, ou réduire l’intérêt des bons du trésor en
diminuant l’encaisse. C’est cette dernière opération qui était la meilleure, et
c’est celle que j’ai faite.
M. Osy. - L’unique but de mon amendement est de ne pas discuter aujourd’hui ce
que nous ferons avec le fonds de l’amortissement ; et de ne rien décider quant
à l’encaisse, avant qu’on nous ait présenté un projet de loi à cet égard. M. le
ministre des finances, dans son exposé des motifs, nous parle de la vente de 13
mille obligations à 4 p. c. Mais si vous en donnez 2,000 à la caisse
d’amortissement, il n’en restera plus que 11,000 à vendre.
Je demande donc que nous supprimions
le premier article proposé par la section centrale et que nous augmentions de
90,000 francs l’article suivant.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - L’honorable membre parle de la vente d’obligations ; je me suis déjà
expliqué à cet égard, puisque j’ai promis à la chambre de lui présenter un
rapport général sur toutes les opérations financières qui se rapportent au
traité. II n’y aura donc pas de vente d’obligations avant la présentation de ce
rapport.
M. Devaux. - J’appuie, messieurs, l’amendement de l’honorable M. Osy, dans ce
sens, qu’il ne tranche ni ne préjuge aucune question. Je préfère cet amendement
à la proposition de la section centrale qui me paraît trancher la question et
qui la tranche en sens contraire de ce que veut M. le ministre des finances.
Aussi je m’étonne que M. le ministre des finances se rallie à la proposition de
la section centrale ; car cette proposition, comme vient de l’expliquer
l’honorable M. Malou, renverse l’opération de M. le ministre des finances.
M. le ministre des finances a trouvé
des fonds improductifs dans les caisses de l’Etat ; il les a placés en 4 p. c.
Pourquoi, vous a-t-il dit, a-t-il fait cette opération ? Pour faire rapporter
des intérêts au fonds d’amortissement. Or, que veut la section centrale ? C’est
que le fonds d’amortissement ne profite pas de l’intérêt qu’il rapportera, mais
que cet intérêt soit versé dans la caisse des besoins généraux de l’Etat.
La section centrale annule
donc l’opération de M. le ministre des finances. Je me trompe, elle ne l’annule
pas tout à fait ; elle oblige la caisse des fonds généraux à profiter de
l’opération. Ainsi, le fonds d’amortissement ne recevra pas d’intérêts ; mais
si un jour il a besoin de capitaux, au lieu de trouver les millions en espèces
dans ses caisses, il trouvera du papier, sur lequel il devra peut-être perdre
en le vendant. Ainsi l’opération aura été désastreuse de toutes les manières pour
l’amortissement.
Je demande donc qu’on adopte
l’amendement de l’honorable M. Osy qui, bien entendu, ne préjuge aucune
question. Sans cela, nous renversons le système de M. le ministre des finances,
avec sort assentiment, il est vrai, mais assentiment dont je ne me rends pas
bien compte.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, l’honorable membre n’a pas fait une distinction qu’il
était cependant essentiel de faire. Le but principal de l’opération dont il
s’agit était de rendre productif deux millions qui jusqu’alors étaient restés
dans la caisse de l’Etat sans rapporter aucun intérêt. Du reste, j’avais pensé
qu’il était rationnel de faire profiter cet intérêt au fonds d’amortissement
même mais telle n’était pas la question principale ; le point essentiel était
la production d’un intérêt. Lorsque la section centrale a proposé de porter le
montant de cet intérêt au budget des voies et moyens, j’ai cru pouvoir me
rallier à cette proposition qui tendait à faire servir cette somme à couvrir
les dépenses de l’Etat dont le budget est déjà grevé de près de 4 millions pour
l’amortissement, parce qu’à mon avis, le fonds d’amortissement non employé, ne
doit pas, aux termes des contrats, être réservé pour être employé au rachat des
obligations, alors que leur cours sera au-dessous du pair. C’est là, messieurs
une opinion que je défendrai lorsque nous discuterons le budget de la dette
publique.
Ainsi, messieurs, l’honorable
membre a raison, lorsqu’il fait observer que la somme dont il s’agit va être
appliquée aux dépenses générales de l’Etat, mais il est dans l’erreur quand il
pense que le but principal que j’ai eu en vue n’a pas été atteint.
M. Dumortier. - Je ne puis, messieurs, admettre l’opinion que vient d’exprimer M. le
ministre des finances, qu’il serait loisible au gouvernement de faire d’un
fonds de l’Etat tel emploi qu’il jugerait convenable. M. le ministre des
finances trouve deux millions dans la caisse de l’Etat, et immédiatement, il achète,
au moyen de ces deux millions, des obligations 4 p. c.
Un membre. - C’est fictif.
M. Dumortier. - Que ce soit fictif ou réel, peu importe ; ce qui est certain, c’est que
la Société générale devait, du chef de l’encaisse, des écus et non des
obligations 4 p. c. Si M. le ministre des finances voulait utiliser cet
encaisse, il me semble qu’il aurait bien mieux fait de l’employer à diminuer la
dette flottante qu’à acheter des obligations 4 p. c., car voici ce qui résulte
de cette opération ; d’une part nous avons un emprunt levé sur les
contribuables, la dette flottante, et, d’autre part, nous avons en caisse des
titres contre l’Etat lui-même, c’est-à-dire les obligations 4 p. c. ; nous
payons l’intérêt des bons du trésor et en même temps nous recevons l’intérêt
des obligations 4 p. c. C’est là évidemment une opération vicieuse. Que
diriez-vous d’un particulier qui emprunterait et qui
prêterait en même temps ? C’est cependant là la position dans laquelle nous
nous trouvons. Il me semble que le seul système rationnel, ce serait de réduire
le chiffre des bons du trésor d’une somme équivalente au montant du fonds dont
il s’agit, et je crois que par une loi que nous aurons à voter, nous devons
autoriser le gouvernement à émettre les obligations 4 p. c. qu’il a entre les
mains, à jour fixe et à bureau ouvert, afin de réduire la dette flottante
jusqu’à concurrence du montant de ces obligations.
D’après ces considérations, je pense,
messieurs, que nous devons admettre la proposition de M. Osy, afin de ne rien
préjuger en ce moment, afin de laisser la question entière jusqu’à ce que nous
discutions le budget de la dette publique.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - L’honorable M. Dumortier n’a pas bien saisi la question. Il ne
pouvait s’agir de diminuer le chiffre des bons du trésor ; en plaçant les deux
millions dont il s’agit en bons du trésor, on eût, au contraire, augmenté
d’autant leur émission, bien loin de la restreindre ; j’ai fait tout ce qui
était en mon pouvoir pour diminuer le chiffre des bons du trésor ; j’en ai
réduit l’intérêt à 3 et même à 2 p. c. ; l’intérêt de la dette flottante n’a
jamais été aussi bas.
M. Delfosse. - Messieurs, que la chambre adopte l’amendement de M. Osy ou celui de
la section centrale, le résultat sera absolument le même.
L’adoption de l’un ou de l’autre de
ces amendements aura pour effet d’accroître les voies et moyens d’une somme de
90,560 francs que M. le ministre des finances voulait primitivement employer à
accroître le fonds d’amortissement.
Dès que cette somme est portée au
budget des voies et moyens, l’opération de M. le ministre des finances devient,
comme on vous l’a dit, une opération tout à fait fictive, tout à fait
imaginaire.
Voici quelle est cette opération : Il
y a, d’un côté, dans les caisses publiques, 2,264 obligations de l’emprunt de
30 millions de francs à 4 p. c., et d’un autre côté, une somme d’environ 2
millions destinée à l’amortissement de l’emprunt de 1840 ; M. le ministre des
finances a employé cette dernière somme, appartenant à l’Etat, à l’achat des
2,264 obligations de l’emprunt de 30 millions de francs, appartenant également
à l’Etat.
Quelle est, messieurs, la position du
trésor après cette opération ? elle ne diffère en rien de ce qu’elle était
avant ; après l’opération comme avant l’opération, l’Etat se trouve possesseur
des 2,264 obligations et des deux millions ; il n’a rien de plus, rien de
moins.
M. le ministre nous dit qu’au moyen
de l’opération il pourra employer les deux millions à l’extinction des bons du
trésor ; mais il aurait pu faire le même emploi, alors même que l’opération
n’aurait pas en lieu.
Vous voyez, messieurs, que
l’opération de M. le ministre des finances n’a rien qui doive nous alarmer.
C’est une opération fort innocente. M. le ministre des finances croit avoir
fait quelque chose, il n’a rien fait du tout.
- L’amendement de M. Osy est mis aux
voix ; il n’est pas adopté.
L’amendement de la section centrale
est mis aux voix et adopté.
Le paragraphe relatif à l’encaisse de
l’ancien caissier général est ensuite mis aux voix et adopté avec la rédaction
proposée par la section centrale.
Les paragraphes relatifs aux
produits de l’emploi des fonds de cautionnement et consignations de l’école
vétérinaire et d’agriculture et des actes des commissariats maritimes, sont
successivement mis aux voix et adoptés sans discussion.
La chambre passe au paragraphe
relatif aux produits de la fabrication de pièces de 1 et de 2 centimes.
M. Sigart. - Je dois signaler au gouvernement le grand nombre de pièces
françaises de 5 et de 10 centimes qui circulent dans le Hainaut. Un projet de
loi tendant à démonétiser ces pièces a été présenté à la chambre, il y a déjà
longtemps ; il serait à désirer qu’elle pût s’en occuper. Quoi qu’il en soit,
comme la fabrication des pièces de 1 et de 2 centimes présente un bénéfice, il
doit en être de même des pièces de 5 et de 10 centimes, et dès lors il me
semble que le gouvernement ferait bien d’en faire fabriquer pour remplacer les
pièces françaises qui inondent nos provinces du midi.
- Le paragraphe est mis aux voix et
adopté.
La chambre passe au paragraphe
relatif aux produits des droits de pilotage et de fanal.
M. Donny. - Messieurs, j’ai eu l’honneur de vous présenter un amendement relatif
aux droits de pilotage et de fanal ; cet amendement a été renvoyé à la section
centrale.
En ce qui concerne le droit de fanal,
la section centrale a fait remarquer par son honorable rapporteur que si vous
adoptez la proposition d’établir sur la navigation de l’Escaut un droit de
fanal de 3 cents par tonneau à la remonte et de 3 cents à la descente, le grief
du port d’Ostende en ce qui concerne les droits de feu qu’on y perçoit viendra
à disparaître. Je dois reconnaître qu’en effet, si vous adoptez la proposition
de la section centrale, ce grief perdra beaucoup de son importance. Il restera
bien encore entre le tarif des deux ports une certaine différence, mais elle
sera légère. Je ne puis cependant pas dire que je suis complètement satisfait ;
car je désirais mettre tous les ports de la Belgique sur la même ligne en ce
qui concerne le droit de fanal, je désirais de plus que le commerce ne fut pas
obligé de payer au-delà de ce qui est nécessaire pour faire face au besoin du
service.
Or, d’après les prévisions que j’ai
basées sur le budget de 1844, les droits de 3 cents à la remonte et de 3 cents
à la descente de l’Escaut et les droits de feux qu’on continuera à percevoir
dans le port d’Ostende donneront beaucoup plus que 28,761 francs, montant des
dépenses ordinaires et les 2,500 francs montant des dépenses d’éclairage qui
figurent au budget de 1844. Selon moi, il ne devait pas en être ainsi, le
commerce ne devrait rembourser à l’Etat que ce qu’il doit débourser.
Comme je n’ai pas l’espérance
d’obtenir de la chambre ce que je n’ai pu obtenir de la section centrale, je
n’insisterai pas davantage sur cet objet mais je me réserve de reproduire mes
plaintes et ma proposition, si celle de la section centrale relativement aux
droits de fanal sur l’Escaut n’était pas adoptée par la chambre.
En ce qui concerne le pilotage, la
section centrale et un grand nombre de membres ont pensé que ma proposition
devait faire l’objet d’un projet de loi spécial. J’aurai l’honneur de présenter
ce projet aussitôt que M. le ministre de l’intérieur aura pris une décision
définitive sur la pétition que la chambre de commerce d’Ostende lui a fait
parvenir relativement au pilotage.
Moyennant ces explications on peut
considérer mon amendement comme remplacé, en ce qui concerne le droit de fanal,
par la proposition de la section centrale relative à la navigation de l’Escaut,
et, en ce qui concerne le droit de pilotage, par le projet que j’aurai
l’honneur de présenter ultérieurement.
- L’amendement étant retiré,
l’ensemble de l’article est mis aux voix et adopté.
Remboursements
Contributions directes, etc.
« Prix d’instruments fournis par l’administration des contributions,
etc. : fr. 1,000 »
« Frais de perception des centimes provinciaux et communaux : fr.
80,000 »
« Total : fr. 81,000 »
- Adopté.
Enregistrement, domaines et forêts
« Recouvrements de reliquat de comptes arrêtés par la cour des
comptes : fr. 50,000
« Bénéfice éventuel produit par la fonderie de canon à Liége sur la
fabrication d’armes de guerre à exporter pour l’étranger : fr. 25,000 »
« Avances faites par le ministère des
finances
« Frais de poursuites et d’instance ; frais de justice en matière
forestière : fr. 15,000
« Recouvrement sur les communes, les hospices et les acquéreurs de
biens domaniaux pour frais de régie de leurs bois : fr. 140,000
« Frais de perceptions faites pour le compte de tiers : fr. 4,000
« Frais de perceptions faites pour le compte des provinces : fr.
10,000 »
« Avances faites par le ministère de la justice
« Frais de justice en matière criminelle, correctionnelle, de
simple police, etc. : fr. 150,000
« Frais d’entretien, de transport et de remplacement de mendiants,
d’entretien et de remplacement de mineurs, d’enfants trouvés, etc. : fr.
15,000 »
« Avances faites par le ministère de
l’intérieur.
« Frais de justice devant les conseils de discipline de la garde
civique : fr. 1,000 »
« Pensions à payer par les élèves de l’école militaire : fr. 25,000 »
« Total : fr.
431,000. »
- Adopté.
Trésor public
« Recouvrement d’avances faites par le ministère de la justice aux
ateliers des prisons pour achats de matières premières : fr. 1,165,000 »
« Recouvrement d’une partie des avances faites par le département
de la guerre aux corps de l’armée, pour masse d’habillement et d’entretien :
fr. 150,000 »
« Recouvrement d’une partie des avances faites aux régences par le
département de la guerre, pour construction d’écuries destinées à la cavalerie
: fr. 15,000 »
« Recettes accidentelles : fr. 150,000 »
« Versement des sommes
allouées aux budgets des communes et des provinces pour le transport des
dépêches : fr. 60,000 »
« Banque de Belgique. -
Intérêts exigibles en 1844 : 40,000 fr.»
« Chemin de fer rhénan. -
Intérêts exigibles en 1844 : 200,000 fr. »
« Total : 1,780,000 fr. »
M. Zoude. - L’honorable M. Meeus m’a amené sur un terrain brûlant ; les
expressions dont il s’est servi à mon égard me force à dire ce que j’aurais
voulu taire ; il a parlé latin, je lui dirai dans la même langue J : Vae illi
per quem scandalum venit.
Il m’a fait un grief de ce que je me
suis plaint de ce que certains établissements auraient abaissé le taux des
escomptes ; à Dieu ne plaise que je profère jamais pareille hérésie ;
l’escompte est baissé, j’espère qu’il baissera encore, c’est le désir, c’est le
besoin du commerce ; mais ce dont je me suis plaint, c’est de l’intention qui
l’a fait baisser subitement au dessous du taux normal d’alors.
Cette inculpation serait téméraire,
si je n’étais en mesure, comme ancien rapporteur de section, de parler d’un
service autrement bienveillant qu’à voulu rendre au pays l’établissement que
dirige celui auquel je réponds. Ab uno disce omnes.
Cet établissement possédait alors un
encaisse considérable dont il ne payait aucun intérêt à l’Etat. Il ne recula
cependant pas devant la proposition d’escompter 20 millions de bons du trésor à
10 1/2 p. c., à la vérité, sous l’apparence trompeuse d’un intérêt de 6 p.c.
l’an, mais cet intérêt devait se payer, ainsi qu’une commission de 1/8 p. c. et
1/4 d’encaissement pour quatre mois, lorsque l’Etat n’aurait eu la jouissance
des fonds que pendant trois mois, ce qui porte bien nettement l’intérêt annuel
à 10 1/2 p. c.
Ce n’est pas tout, par convention
avec le gouvernement, le caissier devait garder pendant 6 ou 7 mois des bons
d’emprunt pour une somme de 4 millions à l’intérêt de 5 p. c., et il exigea
dans ses conditions que les bons fussent reçus comme argent comptant au premier
versement, c’est-à-dire qu’un intérêt, convenu à 5, serait converti
immédiatement en intérêt à 10 1/2 ; ce n’est pas tout encore, c’est qu’une
condition flétrissante était imposée, celle de ne plus négocier ni emprunt, ni
escompte sans sa participation.
Je me hâte de dire que
l’établissement dont je parle, n’était pas seul en jeu ; une maison étrangère y
intervenait, je ne lui en adresse pas de reproche ; il imposait des conditions
que doivent subir tous les gouvernements qui éprouvent de grands embarras
financiers.
Mais je m’adresse à celui-là qui
possédait des millions appartenant à l’Etat, et qui voulut en faire un usage
aussi antinational.
Je me proposai d’en dire davantage,
mais le discours de l’honorable M. Meeus ayant enfin paru dans le Moniteur d’hier, j’y ai vu qu’il
désavouait toute malveillance envers la banque de Belgique ; j’accepte sa
déclaration, je l’accepte dans le fond et lui renvoie la forme avec une
parfaite réciprocité.
M. Meeus. - Vous le savez, messieurs, personne plus que moi n’abhorre les
questions de personnes. Je trouve qu’elles n’ont d’autre résultat que de porter
atteinte à la dignité de la tribune nationale ; aussi, vous me rendrez cette
justice, je l’espère, que ce n’est que poussé à bout, pour ainsi dire, que je
demande la parole pour venir me placer sur ce terrain brûlant. Je regrette
qu’après les questions de personnes dont nous avons eu à gémir, l’année
dernière, on soit venu soutenir des questions d’établissement à établissement.
Ces rivalités d’un autre genre ne sont, pas plus que les questions
personnelles, un moyen d’ajouter au respect qui est dû à la représentation
nationale. Je me demande aujourd’hui, messieurs, comment il est possible que
l’honorable M. Zoude vienne parler d’une opération tellement ancienne, qu’en
vérité j’en ai perdu le souvenir ? Est-ce que, dans nos réponses, est-ce que,
dans aucune occasion, je me suis jamais permis d’attaquer l’établissement qu’il
est venu défendre si chaleureusement ? Est-ce qu’au contraire, dans toute
occasion, je n’ai pas voté avec la majorité pour toutes les mesures qui
pourraient être utiles à cet établissement ? Ce que j’ai fait, je le ferai
encore, parce que, dans ma pensée, la conception de la Banque de Belgique a été
une faute capitale, mais qu’une fois que cette banque existe, c’est un
établissement du pays dont la prospérité est liée à celle du pays, et que, dès
lors, nous devons désirer cette prospérité.
Ceux qui croient que, par des
rivalités, on fait ses affaires, ont perdu le fruit de l’expérience du passé.
Les rivalités ne sont pas fécondantes de leur nature ; elles n’amènent que des
désastres.
Quant à l’opération dont l’honorable
M. Zoude a parlé et sur laquelle je m’efforce de rappeler mes souvenirs, je
crois qu’elle se rattache à une mission qui n’avait pas été confiée à la
Société générale, mais à moi, en particulier, si ma mémoire est fidèle, par
l’honorable M. Duvivier alors ministre des finances. J’avais plus d’une fois
conseillé au gouvernement de parer aux détresses financières du moment, par une
émission de bons du trésor, ainsi que cela se pratique en France et dans
d’autres Etats. J’ai donc, à cette époque, reçu la mission d’aller à Paris
proposer une opération à conclure, non avec la Société générale, mais par la
maison de MM. de Rothschild, avec le gouvernement.
Lorsque je fus à Paris, M. Ch. de
Brouckere, alors membre de cette chambre, s’y trouvait également. C’est en sa
présence, si je ne me trompe, que je discutai avec MM. de Rothschild les
conditions de l’émission des bons du trésor dont il s’agit. M. Ch. de Brouckere
se rappellerait peut-être que quelques paroles assez vives furent échangées
entre ces messieurs (qui étaient certainement dans leurs droits de prêteurs) et
moi qui défendais avec chaleur, comme c’était mon devoir, les intérêts du pays,
les intérêts du trésor belge. Je suis revenu de Paris, avec les propositions de
cette maison, qu’on avait le droit d’accepter ou de refuser. Le gouvernement,
ma mission étant remplie, devait juger si ces propositions pouvaient convenir,
oui ou non, aux intérêts du trésor. Le gouvernement les rejeta et il en avait
le droit. A-t-il bien ou mal fait, pour l’époque à laquelle nous nous trouvions
? je ne saurais le dire ne me rappelant pas aujourd’hui quelles étaient les
conditions de cette opération.
Je n’en dirai pas davantage,
messieurs, je crois avoir suffisamment répondu à l’honorable M. Zoude.
Je répéterai seulement, en
terminant, que c’est avec peine que je me suis vu forcé de descendre, dans
cette enceinte, à des questions qui ne sont pas d’un intérêt national ; ce
n’est pas à moi qu’on pourra jamais faire le reproche d’oublier que les
questions d’intérêt privé ne doivent pas être portées devant cette chambre
appelée, par nos institutions, à s’occuper des grands intérêts du pays et à
laquelle sont soumises, dans ce moment, tant d’affaires importantes dont
l’intérêt national réclame instamment la prompte solution.
M. le président. - Je ne tolérerai plus les récriminations d’un établissement
particulier contre un autre établissement, si cela se représente, à moins que
l’assemblée n’en décide autrement, je retirerai la parole.
M. Zoude. - Je serai heureux que l’honorable membre mît en pratique la
déclaration qu’il a faite, ce serait dans l’intérêt des établissements dont il
s’agit, et par conséquent dans l’intérêt du pays.
Si, tout à l’heure, j’avais pu aller
plus loin, j’aurais demandé la permission de déposer sur le bureau une pièce
prouvant que la Société générale était partie intervenante dans l’opération.
M. Malou, rapporteur. - Je désire savoir si, malgré la résolution de la banque de Belgique
qui nous a été annoncée à l’une de nos dernières séances, il y a lieu de
maintenir au budget des recettes les 40,000 fr. pour les intérêts exigibles en
1844 sur le prêt fait à cette banque. Si elle a fait connaître au gouvernement
son intention de rembourser les sommes prêtées, peut-être devons-nous
retrancher, en tout ou en partie, les intérêts portés en recette ?
Je demanderai, à cet égard, une
explication à M. le ministre des finances.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, l’offre de remboursement des 3,300,000 fr. qui restent
encore entre les mains de la Banque de Belgique, a été faite au gouvernement.
Cependant comme l’état du trésor ne demande pas que ce remboursement ait lieu
immédiatement en une seule fois, il est possible que dans les arrangements qui
seront pris, une fraction des intérêts courre encore pendant l’année 1844.
C’est pour ce motif que je n’ai pas cru devoir prendre l’initiative d’une
proposition dans le sens de celle dont parle l’honorable préopinant.
M. Rogier. - Messieurs, d’après une correspondance publiée par les journaux, il
semblerait que le remboursement de la somme prêtée à la banque de Belgique
serait subordonné de la part de l’Etat, à certaines mesures violentes qu’elle
prendrait vis-à-vis d’établissements industriels, aux secours desquels les 4
millions avaient été en partie employés. Je crois, messieurs, que cette
circonstance est de nature à changer des opinions et peut être la détermination
de certains membres en ce qui concerne ce remboursement.
On se le rappelle, les 4 millions
votés par la chambre, le million prêté d’office par le gouvernement sans
autorisation de la chambre, ont reçu une destination en quelque sorte spéciale
; ils avaient pour but de mettre la banque de Belgique, dont je ne considère
nullement l’existence comme un mal pour le pays, différent en cela de l’opinion
qui vient d’être émise, en état de venir an secours d’établissements
industriels que des circonstances politiques avaient placés dans une situation
fort mauvaise.
Si aujourd’hui, messieurs, la
restitution de ces millions devait entraîner les effets désastreux que l’on a
voulu éviter il y a quatre ou cinq ans, je crois que la chambre persisterait
dans la détermination qui a guidé son vote à cette époque. Il importe d’avoir
une explication catégorique sur ce point, et j’espère qu’on nous la donnera.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, je puis dire à la chambre que le directeur de la banque de
Belgique m’a exprimé ses regrets qu’une sorte de menace de cette nature ait été
insérée dans les journaux sans sa participation. Je ne puis donner que ce
renseignement à la chambre. La lettre que j’ai reçue ne contenait d’ailleurs
aucune menace.
M. Rogier. - Peu importe, messieurs, que la lettre ait été imprimée avec
l’assentiment ou non de M. le directeur de la banque de Belgique. L’essentiel
est de savoir si ce fait existe. L’important est de connaître les intentions du
directeur de cet établissement. S’il rembourse les millions qui ont été prêtés
à la banque, le fera t-il avec l’argent qu’il obtiendra d’expropriations
forcées, exercées vis-à-vis de certains établissements industriels. Voilà la
question.
Or, il résulte de la lettre
publiée par les journaux et dont on ne conteste pas, je pense, l’authenticité,
que la banque de Belgique serait amenée à exercer des violences envers certains
établissements à l’effet de rentrer dans les fonds qu’elle a avancés. Doit-on
considérer cette lettre comme non avenue ? Ces espèces de menaces indirectes
sont-elles retirées ? je le veux bien, je suis alors en sécurité. Mais si, au
contraire, la banque devait, dans le but de rembourser au gouvernement les
millions qu’elle lui doit encore, précipiter la chute de certains
établissements, je crois que le gouvernement ne devrait pas accepter le
remboursement à de pareilles conditions, et pour ma part je préférerais voir
continuer le prêt sans intérêt.
M. Dumortier. - Messieurs, il y a ici deux dires diamétralement opposés. D’une part
on est venu annoncer à cette assemblée que la banque de Belgique était prête à
rembourser les trois millions qu’elle doit encore au trésor public ; d’autre
part il semble que par une lettre publiée dans les journaux, on craint que ce
remboursement ne puisse se faire sans jeter de la perturbation chez d’autres
sociétés industrielles. Je voudrais savoir laquelle de ces deux assenions est
vraie. Car si la banque de Belgique est dans l’intention, pour le cas où l’Etat
exigerait le remboursement, de jeter la perturbation dans les sociétés
industrielles, alors manifestement ce serait bien à tort que l’on dit que l’on
est prêt à rembourser. Il faut donc que nous ayons une explication à cet égard.
Je ferai remarquer que lorsqu’en
1839, la chambre a consenti à l’avance de 4 millions pour la banque de
Belgique, cette avance a été faite principalement pour la banque de Belgique
elle-même, afin d’éviter la crise qu’on n’a pas pu empêcher.
Maintenant est-ce à dire que la
banque de Belgique pourra toujours conserver les fonds de l’Etat, qu’elle
pourra, lorsqu’elle le voudra, au moyen d’une lettre lancée dans les journaux,
retenir les 3 millions, qu’elle nous doit ? Je ne pense pas que cela puisse
être. Il me semble que si l’Etat a avancé des fonds à la banque de Belgique
pour la tirer de la situation fâcheuse où la crise de 1839 l’avait placée, il
peut très bien, sans manquer à personne, demander le remboursement de ces fonds
aujourd’hui que la banque de Belgique est dans une position qui lui permet de
faire ce remboursement. Que la position de la banque de Belgique soit
satisfaisante, c’est ce qui ne peut, je pense, donner lieu au moindre doute. En
effet ses actions (je parle de celles de la 2ème émission) sont aujourd’hui à
un taux très élevé. D’un autre côté la banque de Belgique elle-même a le plus
grand intérêt à ne laisser s’accréditer des bruits comme ceux qui ont été
répandus par les journaux, car si elle laissait de semblables bruits
s’accréditer, alors il est manifeste qu’à l’avenir elle ne trouverait plus de
prêteurs.
Je pense donc, messieurs, que nous
pouvons très bien, sans jeter aucune perturbation dans le pays, exiger le
remboursement des trois millions que la banque de Belgique doit encore à l’Etat.
Ce remboursement nous mettrait à même de réduire de un tiers le chiffre de la
dette flottante.
Je désire vivement que M. le ministre
des finances veuille bien nous dire sur quoi il s est fondé lorsqu’il nous a
annoncé que la banque de Belgique était prête à faire de remboursement dont il
s’agit.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Je n’ai pas annoncé cela.
Un membre. - C’est M. Zoude qui l’a annoncé.
M. Dumortier. - En effet, je me rappelle que c’est l’honorable M, Zoude qui a fait
cette déclaration. Eh bien, je prie l’honorable membre de bien vouloir nous
dire sur quoi il s’est fondé dans cette circonstance ; puisqu’il paraît
être le représentant de la banque de Belgique il doit pouvoir nous dire si cet
établissement est, oui ou non, en mesure de rembourser les trois millions qu’il
doit au trésor, sans jeter la perturbation dans certains établissements
industriels.
M. de La Coste. - Messieurs, les deux établissements financiers dont il a été question
dans cette discussion, méritent, ce me semble, par leur importance, par l’effet
que leur situation peut avoir sur notre crédit public, ou ce qui revient à peu
près au même, sur l’opinion que l’étranger s’en forme, méritent, dis-je, l’un
et l’autre l’intérêt de la chambre.
Je ne viens pas, messieurs, donner
des renseignements sur le fait de la lettre que l’on a citée ; car je ne l’ai
pas même lue et je me trouve, je l’avoue, assez embarrassé de formuler une
opinion dans la situation où l’affaire paraît se trouver : D’une part, le
département des finances a demandé le remboursement partiel de la somme
avancée, et d’autre part, on a annoncé que la banque de Belgique avait offert
le remboursement total. Si une offre semblable n’avait pas été faite, alors, en
considération de l’intérêt que l’Etat doit porter à un aussi vaste
établissement, j’appuierai des mesures qui adoucissent la promptitude de ce
remboursement. Certes, je ne puis ni ne veux m’opposer à ce que la banque de
Belgique rembourse, si elle désire le faire, mais s’il n’en est point ainsi, je
ne verrais pas pourquoi, après avoir patienté, pendant si longtemps, la
nécessité de ce remboursement deviendrait tout à coup si urgente qu’on dût
l’exiger instantanément.
J’ai dit messieurs, que je ne
connaissais pas la lettre dont il est question. Je ne connais pas non plus les
intentions de l’administration de la banque de Belgique à l’égard des
établissements industriels qui sont ses débiteurs, mais il y a cependant un raisonnement
que chacun peut faire, c’est que si la banque de Belgique doit solder
sur-le-champ une somme aussi considérable, il n’y aurait rien de surprenant
que, pour la remplacer dans ses caisses, elle pressât un peu les remboursements
qu’elle a à recevoir. Je ne sais pas, je le répète, quelles sont ses
intentions, mais cela me paraît tout à fait naturel. Il serait certainement
très déplacé de la part de la banque de Belgique (et je ne puis lui supposer
cette intention) d’exercer des rigueurs contre ses débiteurs par une sorte de
représailles, mais il ne serait pas surprenant que cette conséquence eût lieu
sans aucune intention semblable. Certes, si je suis débiteur d’une somme
considérable, que je sois appelé à rembourser, ou que, par des considérations d’honneur,
ou pour assurer mon crédit, je crois devoir rembourser sur-le-champ, je me
mettrais à voir quelles sont les personnes qui me doivent de leur côté, et je
ferai opérer les rentrées avec plus de rapidité, que je ne l’aurai fait
autrement. Il me semble que c’est là une considération que chacun peut
apprécier sans avoir connaissance des intentions de la Banque.
En résumé, messieurs, je pense, si la
chose n’est pas terminée, que si on pouvait ménager la transition par des
mesures qui adoucissent celles qui semblaient devoir être prises, cela serait
tout à fait conciliable, dans l’intérêt de l’établissement dont je parle, et
dans l’intérêt même de l’établissement que l’on considère comme rival ; car
celle-ci peut se trouver aussi, et s’est même déjà trouvé, dans une position où
il ne lui était pas indifférent comment le gouvernement et les chambres
agissaient à son égard. Quant à moi, si j’avais un intérêt, ce serait en faveur
de ce dernier établissement ; j’y ai, en effet, un léger
intérêt que je n’ai pas dans l’autre ; cependant, par suite de la confiance que
la Banque de Belgique a placée en moi, j’ai quelque connaissance de ce qui s’y
passe ; je sais que cet établissement s’est soumis à des mesures contraires à
l’opinion de ceux à qui la direction de ses intérêts est confiée, par égard
pour le gouvernement, dans la vue de ménager le crédit public.
M. le ministre des finances ne
pourrait donc être blâmé, du moins pour mon compte je l’appuierais en cela si
dans le cas où le remboursement complet ne serait pas définitivement résolu, il
prenait quelque mesure qui rendît la transition plus douce et plus facile, et
je ne mettrais pas à exiger ce remboursement l’empressement extraordinaire
qu’on témoigne dans ce moment.
M. Delfosse. - J’ai demandé la parole pour soumettre à la chambre quelques
observations dans le sens de celles que l’honorable M. Dumortier vient de
présenter ; je ne puis laisser passer sans réponse l’opinion émise par
l’honorable M. Rogier.
Parce que la banque de Belgique va
rembourser à l’Etat les millions qu’elle lui doit, s’ensuit-il qu’elle
poursuive impitoyablement les établissements industriels qui sont ses débiteurs
? Cela n’est pas probable, messieurs ; la banque de Belgique comprendrait fort
mal ses intérêts en agissant ainsi.
Mais nous n’avons pas à nous enquérir
de ce que la banque de Belgique fera en cette circonstance, nous avons avant
tout à nous préoccuper des intérêts du trésor public. Il y a quatre ou cinq
ans, dans un moment de crise, nous avons cru devoir venir au secours de la
banque de Belgique par un prêt considérable, pour lequel nous avons exigé un
intérêt égal à celui des emprunts que nous contractions, un intérêt de 5 p. c.
; faut-il aujourd’hui, quatre ou cinq ans après que la crise a éclaté, continuer
ce prêt et réduire l’intérêt à 2 p. c. ? Non sans doute.
Je porte, tout comme
l’honorable M. Rogier, un vif intérêt aux établissements industriels qui ont
des rapports avec la banque de Belgique, mais il est d’autres établissements
industriels qui n’ont pas moins de titres à notre sollicitude ; si nous venions
en aide aux établissements industriels qui ont des rapports avec la banque de
Belgique, nous ne pourrions, sans être taxés d’injustice et de partialité,
refuser de venir également en aide à d’autres établissements qui se
trouveraient dans la même position, qui éprouveraient les mêmes embarras, et
Dieu sait où cela nous conduirait. Tous les revenus du trésor public ne
suffiraient pas, messieurs, pour tirer d’embarras les établissements industriels
qui viendraient réclamer notre intervention.
La chambre, en adhérant à l’opinion
émise par l’honorable M. Rogier, paraîtrait approuver la complaisance beaucoup
trop grande que l’honorable M. Smits a eue pour la banque de Belgique, c’est ce
que la chambre ne fera pas.
M. Pirmez. - En venant au secours d’un établissement industriel, vous nuisez aux
établissements de même nature. Quand vous employez les deniers du trésor public
pour secourir une manufacture, vous faites réellement concurrence à d’autres
manufacturiers, et vous pouvez par là les faire succomber.
Le système que quelques membres
viennent de défendre, est la ruine des industriels particuliers. Il est injuste
que l’Etat prête à la banque de Belgique, sans intérêt par exemple, comme le
voudrait l’honorable M. Rogier, et cela pour qu’elle puisse prêter à son tour
sans intérêt à des établissements particuliers qu’elle soutient, alors que des
établissements rivaux ne peuvent emprunter qu’à 5 p. c., et ne trouvent même
pas quelquefois de fonds.
Il me paraît que nous ne
devons pas nous immiscer dans les affaires de la banque de Belgique, qui, ainsi
qu’on l’a dit et que les événements l’ont n’a été montré qu’une conception
fatale. Nous ne pouvons disposer ainsi des deniers des contribuables, et avec
les deniers des industriels faire concurrence à ces mêmes industriels.
On engage M. le ministre des finances
à prêter sans intérêts ; mais M. le ministre des finances ne peut ainsi agir ;
il doit suivre les prescriptions du contrat. On a déjà commis un assez grand
abus en s’en écartant. Il n’y a qu’une loi qui puisse autoriser M. le ministre
des finances à accorder des faveurs à certaines banques, à certains
particuliers.
M. Cogels. - Messieurs, j’ai toujours vu avec regret l’espèce de rivalité que
l’on voulait éveiller entre deux établissements financiers qui sont appelés
l’un et l’autre à rendre des services au pays, et entre lesquels doit exister
en effet la concurrence, mais une concurrence loyale, et qui tende à augmenter
les avantages qu’ils présentent au commerce et à l’industrie.
On a parlé de l’offre de
remboursement faite par la banque de Belgique, et on a paru douter que cette
offre fût sérieuse. Oui, messieurs, cette offre est sérieuse. Elle n’a pas été
de la part de la direction de la banque de Belgique tout à fait spontanée, elle
a eu lieu sur la demande que M. le ministre des finances avait faite de
remboursements partiels, en faisant connaître en même temps son intention de
demander successivement tous ces remboursements.
Mais, nous dit-on, la banque de
Belgique est-elle en état de faire ces remboursements ? Messieurs, ce n’est pas
à nous à nous en enquérir : Si la banque de Belgique n’était pas en état
d’opérer le remboursement, elle ne l’aurait pas offert. D’ailleurs, par suite
de la position que j’ai occupée près la banque de Belgique, mais que je
n’occupe plus depuis deux ans, je puis dire que cet établissement doit être en
état de l’effectuer. Elle l’est par son nouveau capital qui, j’en conviens, a
une destination spéciale. Elle doit l’être aussi par son ancien capital et au
moyen des cédules hypothécaires qui lui sont données par les établissements
industriels auxquels elle avait prêté des fonds, et dont la négociation est
facile.
La banque de Belgique, par suite de
ce remboursement, devra-t-elle exercer des rigueurs envers les établissements
auxquels elle avait prêté ? Non, messieurs, elle ne le devra pas, mais elle le
pourra, tandis qu’auparavant elle ne le pouvait pas, par suite des engagements
qu’elle avait pris vis-à-vis du gouvernement, lors du prêt très onéreux que
celui-ci lui avait fait. Je dis que ce prêt était onéreux, et il l’était
doublement : d’abord en ce qu’on exigeait un intérêt de 5 p. c., tandis que 5
p. c. était le maximum qu’elle pouvait retirer de ses fonds ; en second lieu,
parce qu’on lui imposait une obligation qui pouvait compromettre ses intérêts
vis-à-vis d’établissements industriels contre lesquels une exécution immédiate
lui aurait peut-être permis de rentrer dans des fonds dont le recouvrement sera
maintenant bien plus difficile.
Voici donc la position de la banque
de Belgique : étant libre de tout engagement vis-à-vis du gouvernement, elle se
trouve par là même affranchie des liens que celui-ci lui avait imposés à
l’égard des établissements avec lesquels elle avait contracté.
L’honorable M. Dumortier nous a parlé
du cours des actions de la banque de Belgique. C’est là une chose dont, comme
chambre législative, nous n’avons pas à nous inquiéter. Je dirai même que
l’actionnaire sérieux d’un établissement ne doit pas attacher trop d’importance
au cours des actions. Ces cours intéressent principalement la bourse, et c’est
un objet qui ne mérite guère notre attention.
L’honorable M. Pirmez vous a
dit que l’établissement de la banque de Belgique avait été une conception
fatale. C’est ce que je ne puis admettre. Il est vrai que les premiers statuts
de cet établissement n’ont pas été ce qu’ils devaient être. On a eu grandement
tort, lorsqu’on lui a donné la sanction royale, de ne pas lui tracer pour ses
opérations le cercle qui a été tracé aux banques de Hollande, de France et
d’Angleterre. Si les statuts avaient été plus sévères, la banque de Belgique
n’aurait pu se livrer aux folles opérations qui ont compromis son crédit. En
cela, il est vrai, elle a été une conception fatale. Mais si dès le principe la
banque avait été sage, si elle s’était bornée aux véritables opérations de
banque, elle aurait été un établissement très utile au pays. Et elle peut
encore le devenir, elle l’est déjà, parce que, par suite des modifications
apportées aux statuts, le nouveau capital ne peut être placé qu’en véritables opérations
de banque, c’est-à-dire que, pour l’emploi de ce capital, la banque doit se
conformer dans le cercle tracé à la banque de France ou à celle des Pays-Bas.
M. Malou, rapporteur. - Messieurs, je crois que ce
n’est pas le moment de discuter le système indiqué par l’honorable M. Pirmez,
non plus que la question de savoir si la création de la banque de Belgique a
été une bonne ou une malheureuse conception.
En acceptant les faits accomplis,
nous avons seulement à examiner quelles sont les intentions de la banque de
Belgique, quelle est la position de la chambre, quelle est la position du
gouvernement.
Les intentions de la banque, je les
trouve dans la lettre dont on vous a parlé, et dont je vais lire les principaux
passages :
« En présence des influences qui
s’agitent tous les ans pour cette affaire, l’administration de la banque a cru
qu’il était de la dignité de cet établissement de mettre sur-le-champ le
capital entier à la disposition du ministre.
« Pour vous, messieurs (veuillez
remarquer que cette lettre est adressée par le directeur de la banque aux
commissaires du gouvernement prés cet établissement), pour vous, messieurs, qui
assistez à nos travaux, vous savez parfaitement que la banque, pour ses
affaires actuelles, peut très bien se passer de cette somme, qu’elle est
employée exclusivement à donner quelque répit à l’industrie souffrante, et
après tout, qu’elle se trouve aussi en sûreté dans nos coffres que dans celles
où elle va passer.
« Le gouvernement connaît ces vérités,
mais une partie de la chambre paraît les ignorer... »
Ce sont là les paragraphes essentiels
: contiennent-ils une menace ? Il me semble que non. La banque de Belgique
offre au gouvernement le remboursement ; c’est là le seul fait nouveau qui soit
survenu depuis le rapport de la section centrale et depuis les observations qui
ont été faites à cet égard dans la discussion générale du budget des voies et
moyens. Mais la banque ne dit pas qu’elle usera de rigueur immédiate envers les
établissements créés sous son patronage. Comme vous l’a fait observer, avec
raison, l’honorable M. Delfosse, la banque elle-même a intérêt à ne pas abuser
de sa position vis-à-vis ces établissements.
Je crois avoir indiqué, autant qu’il
nous est possible de les connaître, quelles peuvent être les intentions de la
banque de Belgique.
Quant à la position de la chambre et
à celle du gouvernement, celui-ci a écrit à l’administration de la banque de
Belgique qu’il disposerait, conformément à l’arrangement intervenu en janvier
1842, c’est-à-dire à raison d’une somme de 150,000 fr. par mois, sauf à
différer quelques versements, lorsque l’état du trésor le permettrait. Voilà la
position que le gouvernement a prise.
J’ai demandé tantôt s’il
fallait maintenir intégralement au budget le chiffre de 40,000 fr. ou le
réduire. D’après les explications qui nous ont été données, je crois que ce
chiffre doit être conservé. De cette manière, la banque de Belgique ayant fait
l’offre de remboursement, le gouvernement pourra l’accepter, s’il n’y voit pas
d’inconvénient. Mais en maintenant le chiffre, le gouvernement conservera
aussi, à l’égard de la banque, la position qu’il a prise, c’est à-dire qu’il
sera libre de disposer de 150,000 fr. par mois, sauf à différer quelques
versements s’il y a lieu.
La position reste donc telle que la
section centrale l’avait acceptée avant l’offre de remboursement. La position
du gouvernement est même améliorée, si l’on veut, en ce sens qu’il peut
reprendre la somme intégrale, s’il le croit convenable.
Je pense qu’après la discussion qui a
lieu, après les explications qui ont été échangées, il est fait droit à
l’observation que j’avais présentée, et que nous pouvons voter le chiffre de
40,000 fr.
M. Duvivier. - Dans la réplique que
l’honorable M. Meeus vient de se croire obligé de faire à l’honorable M. Zoude,
j’ai été nominalement cité. Je dois déclarer, messieurs, que tout ce qu’a dit
l’honorable M. Meeus relativement à la mission dont je l’avais chargé en 1831,
est en tout point conforme à la vérité. A cette occasion je pourrais vous
rappeler un mot que l’honorable M. David nous a dit, relativement à une affaire
qui concerne le chemin de fer, c’est-à-dire le compte rendu en 1843.
L’honorable M. David nous a dit, messieurs, que le compte rendu de 1842 était
déjà de l’histoire ancienne ; et bien, messieurs la circonstance que
l’honorable M. Meeus a rappelée est autrement ancienne puisqu’elle date de
1831. Quoiqu’il en soit, messieurs, tous les dires de l’honorable M. Meeus, je
me plais à le répéter, sont conformes à la vérité, et je n’ai eu qu’à me louer
extrêmement de son zèle, et de son dévouement au pays.
- Le paragraphe est mis aux voix est
adopté.
Recettes pour ordre
Trésor public
« Art. 1. Cautionnements versés en numéraire dans les caisses du
trésor public de la Belgique, par des comptables de l’Etat, par des receveurs
communaux, des receveurs de bureaux de bienfaisance, des préposés aux bureaux
de station de l’administration du chemin de fer, et cautionnements fournis par
des contribuables pour garantie du payement de leurs redevabilités en matière
de douanes, d’accises, etc. : fr. 1,000,000 »
« Art. 2. Caisse des veuves et orphelins des officiers de l’armée :
fr. 178,000 »
« Art. 3. Commission de secours : fr. 30,000 »
« Art. 4. Masse d’habillement et d’équipement de la douane : fr.
212,000 »
« Art. 5. Retenue pour la caisse de retraite, y compris les parts
dans les amendes et confiscations et les contributions volontaires pour
admission de services étrangers : fr. 472,000 »
« Total : fr. 1,892,000 »
Contributions directes, cadastre, douanes et accises
« Art. 1. Réimposition sur la contribution foncière : fr.
725 »
« Art. 2. Produit des amendes, saisies et confiscation opérées par
l’administration des contributions : fr. 120,000 »
« Art. 3. Expertise de la contribution personnelle : fr.
30,000 »
« Art. 4. Produit d’ouverture des entrepôts : fr. 14,000 »
« Art. 5. Recouvrement d’impôt en faveur des provinces : fr.
6,734,000 »
« Art. 6. Recettes en faveur des communes : fr. 1,950,000 »
« Art. 7. Taxe provinciale sur les chiens : fr. 200,000 »
« Art. 8. Taxe provinciale sur le bétail : fr. 125,000 »
« Art. 9. 4 et 5 p.c. au profit des villes de Liége et Verviers
pour pillages : fr. 18,500 »
« Total : fr. 9,192,225 »
Fonds de tiers et consignations
Enregistrement, domaines et forêts
« Art. 1. Amendes diverses et autres recettes soumises aux frais de
régie : fr. 100,000 »
« Art. 2. Amendes de consignation et autres recettes non
assujetties aux frais de régie : fr. 800,000 »
« Art. 3. Recouvrement de revenus pour compte des provinces : fr.
666,000 »
« Art. 5. Consignations diverses (loi du 26 nivôse an XIII) : fr.
800,000 »
« Art. 6. Consignations à titre de dépôt : fr. 1,000 »
« Total : fr. 2,367,000 »
Vote
sur les articles de la loi
M. le président. - Nous passons aux articles de la loi ; l’article 1er est ainsi conçu
Article premier
« Art. 1er. Les impôts directs et indirects
existant au 31 décembre 1843, en principal et centimes additionnels ordinaires
et extraordinaires, tant pour le fonds de non-valeurs qu’au profit de l’Etat
ainsi que la taxe des barrières, continueront à être recouvrés, pendant l’année
1844, d’après les lois et les tarifs qui en règlent l’assiette et la
perception. »
Ici la section centrale propose le §
nouveau suivant :
« Les droits de fanal mentionnés au §
2 de l’art. 18 du traité du 5 novembre 1842, seront perçus au profit de
l’Etat. »
Vient ensuite le dernier paragraphe
conçu comme suit :
« La disposition de l’art. 15 de la
loi du 29 décembre 1835, n°859, est renouvelée pour l’exercice 1844, à l’égard
des provinces qui n’ont pas contracté d’abonnement pour le service
administratif de la poste aux lettres. »
M. le ministre des finances (M. Mercier) déclare se rallier à l’amendement de la section centrale.
- L’article est adopté avec cet
amendement.
Article 2
M. le président. - Par suite des amendements que la section centrale avait proposés au
tableau et qui ont été adoptés par la chambre, elle a également dû changer les
chiffres de l’art. 2. Voici cet article tel qu’elle le propose :
« Art. 2. D’après les dispositions
qui précèdent, le budget des recettes de l’Etat, pour l’exercice 1844, est
évalué à la somme de cent et neuf millions cinq cent soixante-six mille
quatre-vingt-quatre francs (109,560,084 francs), et les recettes pour ordre à
celle de treize millions quatre cent cinquante et un mille deux cent vingt-cinq
franc (13,451,225 fr.), le tout conformément au tableau ci-annexé. »
M. le ministre des finances (M. Mercier) déclare se rallier à la proposition de la section centrale.
M. le président. - Il faut que nous nous entendions bien sur la question de savoir si
M. le ministre, en se ralliant aux chiffres proposés par la section centrale,
il se rallie par cela même à ce qui a été adopté relativement au canal de Mons
à Condé. La chambre n’entend sans doute pas donner cette portée à la
déclaration de M. le ministre des finances ?
M. Malou. - Si je comprends bien la
question de M. le président, il s’agit de savoir si, dans le cas où nous
voterions maintenant le chiffre proposé par la section centrale, on ne pourrait
plus revenir sur ce qui a été décidé hier, relativement au canal de Mons à
Condé. Il me semble que le vote que nous allons émettre est aussi un premier
vote, en ce sens que s’il arrive malheur au canal de Mons à Condé, il faudra
également modifier le chiffre porté à l’art. 2.
Plusieurs membres. - C’est juste.
M. Savart-Martel. -
Ainsi, il est bien entendu que la question reste entière. (Oui, oui.)
- L’art. 2 est mis aux voix et
adopté.
Articles 3 et 4
« Art. 3. Pour faciliter le
service du trésor pendant le même exercice le gouvernement pourra, à mesure des
besoins de l’Etat, mettre en circulation des bons du trésor jusqu’à concurrence
de la somme de vingt et un millions cinq cent mille fr. (21,500,000
francs). »
- Adopté.
« Art. 4. La présente loi sera
obligatoire le 1er janvier 1844. »
- Adopté.
M. le président. - Messieurs, comme il y a des amendements, le vote définitif est remis
à après-demain.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Comme le sénat se réunit demain je demanderai si la chambre ne
pourrait pas fixer le second vote également à demain.
M. Verhaegen. - Le budget des voies et moyens est extrêmement important et il y a
été introduit un amendement qui intéresse à un très haut degré, une de nos plus
importantes provinces. Il me semble dès lors que l’on doit rester dans le
règlement et ne pas faire d’exception. Je ne vois pas d’ailleurs qu’il y ait un
motif quelconque pour déclarer l’urgence. Le sénat aura à s’occuper d’autre
chose que du budget des voies et moyens.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, la discussion ne peut porter que sur un seul point : le
gouvernement s’est rallié aux différentes propositions de la section centrale, à l’exception de celle qui est relative au
canal de Mons à Condé. Je ne vois donc pas le motif pour lequel l’honorable M.
Verhaegen persiste à demander le renvoi du second vote à après-demain. Le sénat
se réunit demain, et il est désirable que le budget des voies et moyens puisse
être immédiatement soumis à ses délibérations.
M. Verhaegen. - La question du canal de Mons à Condé est précisément une question
très importante et elle n’a été décidée que par 39 voix contre 39 : Si
maintenant l’un ou l’autre membre qui s’attendait à voir observer le règlement,
s’est absenté, ce membre sera dans une position extrêmement fâcheuse. Il me
semble, messieurs, que cette seule observation suffit pour vous déterminer à ne
pas déroger au règlement dans cette circonstance.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je ferai remarquer à l’honorable
membre que la question de disjonction qui a été résolue par 39 voix contre 39,
ne peut plus être reproduite ; la seconde discussion a des limites indiquées
dans le règlement ; tout ce qui peut être soumis à un second vote, c’est le
système de transaction qui a été adopté sur la proposition de M. d’Huart.
M. Verhaegen. - Mais, messieurs, des membres pourront s’être absentés, parce qu’ils
ne s’attendaient pas à ce que le vote définitif eût lieu demain. On n’a pas
répondu à cette objection.
- La chambre décide que le vote
définitif aura lieu demain.
PROJET
DE LOI PORTANT LE BUDGET DU DÉPARTEMENT DE LA JUSTICE POUR L’EXERCICE 1844
M. Savart-Martel
présente le rapport de la section centrale qui a examiné le budget de la
justice.
- La chambre ordonne l’impression de
ce rapport et décide que la discussion du budget de la justice aura lieu à la
suite du vote des budgets qui sont déjà mis à l’ordre du jour.
- La séance est levée à 3 heures 3/4.