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d’intention
Chambre
des représentants de Belgique
Séance du lundi 14 mars 1842
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre, notamment pétitions
relative à un notaire demandant à pouvoir instrumenter (Huveners),
à la loi sur les distilleries (Huveners), aux
circonscriptions cantonales (Rodenbach)
2) Projet de loi relatif au renouvellement des inscriptions
hypothécaires. Rapport (Demonceau)
3) Motion d’ordre relative au projet de loi sur la
pension de la veuve Buzen. Conspiration des paniers percés (Eloy
de Burdinne, Dumortier, Cools,
Dumortier, Doignon)
4) Projet de loi relatif aux indemnités. Comité
général
(Moniteur
belge n°74, du 15 mars 1842)
(Présidence de M. Fallon)
M. de Renesse fait l'appel nominal à 2 heures.
M.
Kervyn lit le
procès-verbal de la séance précédente,
dont la rédaction est adoptée.
M. de Renesse fait connaître l’objet des pièces adressées à la
chambre :
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur Hilgers,
directeur de poudrières, né en Prusse, demande la naturalisation. »
-
Renvoi au ministère de la justice.
________________________
« Le
conseil communal et des habitants notables de la commune de Marche-les-Ecaussines
demandent le maintien de cette commune au canton de Rœulx.
»
-
Renvoi à la commission chargée de l'examen du projet de loi sur la
circonscription cantonale.
________________________
« Le sieur Daels, notaire à
Lommel (Limbourg) demande que, dans le cas où cette commune serait distraite du
canton de Peer, pour être joint à celui d'Overpelt, il soit autorisé à
continuer d'instrumenter dans le canton de Peer. »
-
Même décision, sur la proposition de M. Huveners.
_________________________
« Les distillateurs de Ophoven
adressent des observations contre le nouveau projet de loi sur les
distilleries, et demandent que le droit actuel de 60 cent. soit
réduit à 40 cent. »
-
Renvoi à la section centrale, qui sera chargée de l'examen du projet de loi sur
les distilleries, et insertion au Moniteur sur la proposition de M. Huveners.
_________________________
« Le
sieur Debefve, un des héritiers Clermont-Leloup,
créancier des communes de Herve, Petit-Rechain et
Dison, renouvelle sa demande, que la chambre adopte une mesure qui ordonne la
liquidation de ces créances. »
-
Renvoi à la commission permanente des finances.
_________________________
« Le
sieur Van Heurek demande à être indemnisé de la perte
du mobilier de la grande cantine, dans la citadelle d'Anvers, et occupée par
son père, dont le mobilier, évalué à 4,000 fr., a été détruit pendant le siège
de la citadelle. »
-
Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur les indemnités.
_________________________
« Les membres du conseil communal de Hooglede demandent
que le canton actuel de Hooglede soit conservé tel qu'il existe actuellement,
sauf suppression de la commune d'Ouckene et réunion
de la commune d'Oosternieuwekerke. »
-
Sur la proposition de M. Rodenbach, renvoi à la commission chargée de l'examen du projet
de loi sur la circonscription cantonale.
M. de Behr, au nom d'une commission,
dépose le rapport sur le projet de loi relatif au renouvellement des
inscriptions hypothécaires.
-
Ce rapport sera imprimé et distribué.
Sur
la proposition de M. Demonceau, la chambre le met à l'ordre du jour à la suite des objets
qui y sont déjà.
M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, un incident a été
soulevé à la cour d'assises du Brabant, dans la séance du 12 mars, par un des
défenseurs des accusés (M. Orts), à l'occasion du discours que j'ai prononcé à
la chambre, dans la séance du 10 mars, en appuyant la proposition d'accorder
une pension viagère à la veuve du général Buzen.
M.
Orts a cru devoir interpréter mes paroles en ce sens que j'avais connaissance
que des récompenses pécuniaires avaient été données.
Après
avoir donné lecture de mon discours, M. Orts a ajouté : « Puisque cela a
été dit en présence de ceux qui représentent le pays, je crois qu'il
conviendrait que cela fût répété et développé devant la cour. » Apres une
discussion entre M. l'avocat-général et M. Orts, M. le président prit la parole
et dit :
« Il
s'agit d'un discours prononcé à tribune nationale, je ne sais pas jusqu'à quel
point je puis user de mon pouvoir discrétionnaire pour le faire venir à
l’audience. Cependant, comme je veux que rien ne soit négligé pour arriver à la
découverte de la vérité, je ferai demander à M. Eloy de Burdinne s'il consent à
venir donner ici des développements à l'opinion qu'il a émise, et s'il y
consent, il sera entendu en vertu de mon pouvoir discrétionnaire. »
Je
viens de recevoir une lettre d'invitation de la part de M. le président, dont
je vais vous donner lecture.
(Ici
M. Eloy de Burdinne donne lecture de la lettre de M. le président de la cour d'assises, par
laquelle il lui demande s'il peut lui convenir de donner devant la cour les
explications demandées.)
J'aime
à croire, que M. le président a interprété l'art. 44 de la constitution et
qu'il lui donne le même sens que moi, c'est-à dire qu'en ma qualité de député
je ne puis être recherché à l'occasion de l'opinion émise dans l'exercice de
mes fonctions. Cependant, ayant réfléchi qu’il est important que rien ne soit
négligé de ce qui peut conduire à la vérité, je crois qu'il est de mon devoir
d'expliquer ici le sens que j'ai donné à mes paroles, afin qu'on ne leur donne
pas plus de portée que je ne leur en ai donné moi-même. Je demande à la chambre
la permission d'entrer dans quelques détails, pour expliquer le sens des
paroles que j'ai prononcées le 10 mars dernier.
Dans la séance du 10 mars j'ai dit :
« que le complot contre la sûreté de l'Etat avait été dévoilé par le
général Buzen, sans qu'il en ait coûté un centime à l'Etat ». J'ai ajouté
: « et vous le comprendrez, messieurs, des trames de l'espèce ne se
découvrent pas sans faire de la dépense. L'argent nécessaire pour dévoiler
cette conspiration a été fourni par la bourse du trop malheureux général
ministre de la guerre. »
Telles
sont les paroles que j'ai prononcées à la séance du 10 mars. Voici le sens que
l'on doit donner à mes paroles, qui est celui que je leur donne, quand j’ai
prononcé mon discours. Je me suis dit : Il est de notoriété publique que le
complot a été découvert sans qu'il fût fait de la dépense à charge de l'Etat.
Le général Buzen étant connu comme celui qui a découvert cette conspiration, il
a dût faire de la dépense pour obtenir les renseignements nécessaires pour la
dévoiler. Le gouvernement, n'ayant pas donné d'argent, on doit présumer que
cette dépense (s'il en a été fait, comme je le supposais), a été faite des
deniers de M. le ministre de la guerre, non pas pour suborner des témoins
(Buzen était à l'abri de semblables suspicions), mais bien pour obtenir des
renseignements de nature à trouver les traces de la conspiration.
Tel
est, messieurs, le sens des paroles que j'ai prononcées pour appuyer la
proposition d'accorder une pension à la dame veuve Buzen.
J'ai
souvent vu que dans des discours parlementaires on donnait des présomptions
pour des réalités. Eh bien ! messieurs, c'est ce que j'ai fait en vous disant
que la dépense pour découvrir le complot avait été faite des deniers de
l'ex-ministre de la guerre, puisqu'elle n'avait pas été faite pour compte de
l'Etat. Je n'avais pas d'autres motifs de le croire, jamais le général Buzen ne
m'ayant parlé de dépenses faites pour découvrir le complot.
D'après
ces explications, j'aime à croire que MM. les avocats des prévenus seront
satisfaits et reconnaîtront sans doute, que ma présence à la cour serait fort
inutile, n ayant rien à ajouter à ce que je viens de dire.
C'est dans ce sens que je me propose de répondre à la lettre
que M. le président des assises m'a adressée et que j'ai reçue ce matin un
moment avant de me rendre à la section où j'étais convoqué.
M. Dumortier. - Messieurs, on vient de m'informer également que les
défenseurs des accusés auraient l'intention de tirer parti des paroles que j'ai
prononcées à la tribune nationale. Lorsque j'ai énuméré dernièrement les
services que le général Buzen avait rendus au pays, j'ai rappelé entre autres
tout ce qu'il avait fait pour déjouer le complot tramé contre la sûreté de
l'Etat. Je ne me souviens pas en ce moment des paroles dont je me suis servi,
et je n'ai pas sous les yeux le texte même de ces paroles. Si j'ai dit que le
général Buzen a découvert le complot, et qu'on voulut prétendre que ce n'est
pas lui, je dirai volontiers ce que je sais à cet égard. Je crois savoir qu'un
autre ministre avait été prévenu d’abord qu’un complot se transmet contre la
sûreté de l'Etat ; que ce ministre avait été instruit par un officier qui avait
très bien compris le devoir qu'il avait à remplir envers le Roi et la patrie,
celui de dénoncer à ses chefs la conspiration qui s'ourdissait contre le
gouvernement. Accomplir un devoir aussi impérieux, ce n'est pas jouer le rôle
d'un dénonciateur salarié, c'est faire acte de fidèle et loyal officier.
Si
du temps de l'empire, en présence de l'ennemi, un officier avait eu
connaissance de mesures qui se tramaient contre l'Etat, et qu'il ne les eût pas
dénoncées immédiatement, il aurait été fusillé sur-le-champ. (Oui, oui !) Or, quand un officier vient,
en temps de paix, dénoncer à un ministre un complot qui se trame contre la
sûreté de l'Etat, ce n'est pas un dénonciateur salarié, c'est un homme qui ne
fait que remplir son devoir, un homme loyal et qui ne forfait pas à l'honneur.
Je
sais donc que le général Buzen, ainsi qu'un autre ministre, avaient eu
connaissance du complot ; mais les services auxquels j'ai spécialement voulu
faire allusion, ce sont les démarches actives, persévérantes, infinies, que le
général Buzen a faites, pour empêcher le complot d'éclater ; il nous a rendu en
cela un immense service ; car il est sans doute bien préférable qu'il ait pu
déjouer la conspiration, avant qu'elle éclatât ; il valait bien mieux la
déjouer alors que d'attendre que la capitale ait été inondée de sang. C'est en
cela qu'il a mérité notre reconnaissance. J'ai dit qu'en
nous rendant un service aussi signalé, le général Buzen avait droit à toute la
gratitude du pays.
M.
Cools. -
Messieurs, cet incident n'est pas sans importance ; l'honorable préopinant a
jugé convenable de donner des explications dans cette enceinte ; je n'ai pas à
examiner si cet honorable membre a bien ou mal agi en ne se rendant pas à la
cour d'assises ; mais, messieurs, il s'agit ici d'une affaire importante pour
le pays, d'une affaire qui aurait pu compromettre, sinon la sûreté, du moins la
tranquillité du pays ; si l'accusation est fondée, il s'agit du sort de
l'avenir de plusieurs personnes que nous devons supposer innocentes, tant qu'un
arrêt de condamnation n'a pas été prononcé contre elles. Je crois donc pouvoir
me permettre de demander quelques explications à mon honorable collègue, pour
que, hors de cette enceinte, elles ne laissent subsister aucune espèce de
doute.
L'honorable
M. Eloy de Burdinne a dit que le général Buzen ne lui aurait pas parlé de
dépenses personnelles qu'il aurait faites pour déjouer le complot ; je
demanderai dès lors à cet honorable membre s'il a appris d'autres personnes que
le général Buzen aurait fait de la dépense ; ou bien
s'il s'est livré à de simples conjectures.
M. Dumortier. - J'ai eu occasion de parler plusieurs fois à M. le général
Buzen du service qu'il avait rendu au pays en déjouant la conspiration, et le
général me disait toujours avec satisfaction que ce qui lui faisait le plus de
plaisir, c'est qu'il était parvenu à déjouer le complot, sans qu'il en eût
coûté un sou à l'Etat.
Si
maintenant l'on veut supposer qu'on ne déjoue pas une conspiration sans faire
de la dépense, comme l'a dit l'honorable M. Eloy de Burdinne, ce que je
présume, sans avoir au reste à cet égard aucune preuve, c'est que le général
Buzen aura, par délicatesse, payé de sa bourse les dépenses qu'il aurait, dans
cette supposition, été dans le cas de faire. C'est dans ce sens qu'il faut, me
paraît-il, interpréter les paroles prononcées par notre honorable collègue
M. Eloy de Burdinne. - Oui ! oui !
M. Dumortier. - Mais, quant à moi, ce que le général m'a toujours dit, c'est qu'il était parvenu à déjouer le complot sans qu'il en
coûtât un sou à l'Etat. Inutile de dire combien ses sentiments d'honneur
éloignent toute pensée de subornation.
M.
Doignon. -
Messieurs, je regrette que les honorables préopinants aient rappelé ici les
conversations qu'ils ont eues avec le général Buzen, je me vois forcé dès lors
de m'en expliquer. Eh bien, je dirai que le général Buzen m’a fait à moi la
même déclaration qu’à M. Dumortier, mais je dois ajouter que d’après le langage
du général, j’ai compris que la découverte du complot n’avait pas coûté un
centime à l’Etat, parce qu’il n’avait dû salarier personne, pour découvrir et
déjouer la conspiration, tous les agents du gouvernement ayant rempli
parfaitement leur devoir. Voilà en conscience dans quel sens j’ai compris le
général Buzen.
De toutes parts, avec force. - L’ordre du
jour ! l’ordre du jour !
PROJET DE LOI RELATIF AUX INDEMNITES
Formation du comité général
M.
le président.
- L’ordre du jour appelle la suite du comité secret.
Huissier,
faites évacuer les tribunes.
La
chambre se forme en comité secret à 2 heures 3/4 et se sépare à 4 heures 1/2.