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d’intention
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Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du mercredi 23 décembre 1835 (après-midi)
Sommaire
1) Projet
de loi portant des crédits provisoires au budget du département de la guerre
pour l’exercice 1836 (de Jaegher)
2) Projet
de loi relatif au classement des tribunaux de Hasselt et de Verviers
3) Projet
de loi relatif au personnel du tribunal de Bruxelles
4) Projet
de loi portant le budget des voies et moyens pour l’exercice 1836. Mise à
l’ordre du jour de la question relative à la position de la société générale
vis-à-vis du trésor public (Fallon, Rogier,
Meeus, Fallon, Demonceau, Lebeau, Demonceau, de Theux, Dumortier, Fallon, Meeus, Verdussen, Dumortier, Duvivier, Jadot, Lebeau, Meeus,
Dubus, Dumortier, Gendebien, d’Huart, Demonceau, Devaux, d’Huart)
5) Projet
de loi portant le budget du département des affaires étrangères et de la marine
pour l’exercice 1836
6) Projet
de loi portant des crédits provisoires au budget du département de la guerre
pour l’exercice 1836
7) Projet
de loi portant le budget des voies et moyens pour l’exercice 1836. Prélèvement
exceptionnel pour le remboursement de la dette flottante (F.
de Mérode, Fallon, Dubus, de Muelenaere, F. de Mérode,
Gendebien), contribution personnelle (taxe sur les
chevaux) (Demonceau), idem + impôt sur les
distilleries (d’Huart), impôt sur les distilleries (d’Huart, Raikem), droit
d’enregistrement sur les actes des caisses d’épargne.
8) Projet
de loi relatif à la taxe du timbre sur les actes des caisses d’épargne (mesure
philanthropique) (Gendebien, d’Huart,
Legrelle, Gendebien, Seron, d’Huart)
9) Projet
de loi portant des crédits provisoires au budget du département de la guerre
pour l’exercice 1836 (Evain, Dubus,
de Puydt, d’Huart, Legrelle, Gendebien, Evain)
10)
Projet de loi fixant le contingent de l’armée pour l’année 1836. Constitution
de l’armée de réserve et garde civique (Gendebien, Evain, Gendebien, Dumortier, Evain, Gendebien, Frison, de Theux)
11)
Projet de loi relatif à la confection des budgets provinciaux pour l’année
1836. Vote de la loi d’organisation provinciale par le sénat (Seron,
Legrelle, F. de Mérode, de Theux, Dubus, de
Theux, Dumortier, de Theux,
Lejeune, Dumortier, de Theux, Gendebien)
12)
Fixation de l’ordre des travaux de la chambre. Concessions de péages (de Theux, Dumortier, Pirmez), droits sur les os (Gendebien)
13)
Projet de loi relatif au renouvellement des concessions de péages. Intervention
de la chambre dans la faculté de concéder des chemins de fer (projets de
concession, société générale, mise à disposition d’ingénieurs du gouvernement…)
(Rogier, de Theux, Rogier, Devaux, de
Theux, Desmet, Gendebien,
Dubus, Legrelle, Gendebien, de Theux, Meeus, Pirmez, Dubus,
Rogier, de Theux)
(Moniteur
belge n°360, du 25 décembre 1835, Moniteur belge n°361 et 362, des 26 et 27
décembre 1835)
(Présidence de M. Raikem.)
(Moniteur
belge n°360, du 25 décembre 1835) La séance est ouverte à 11 heures et
demie.
M. de Renesse
fait l’appel nominal à midi.
M. Schaetzen lit
le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
PROJET DE LOI PORTANT DES CREDITS PROVISOIRES AU BUDGET DU DEPARTEMENT
DE
M. le ministre de la guerre
(M. Evain) présente à la chambre un projet de loi tendant à mettre à la
disposition du département de la guerre un crédit provisoire de 3 millions pour
le service du mois de janvier.
M. de Jaegher.
- Je propose de renvoyer séance tenante le projet à l’examen de la section
centrale qui a été chargée de l’examen du budget de la guerre.
- La proposition de M. de Jaegher est adoptée.
PROJET DE LOI RELATIF AU CLASSEMENT DES TRIBUNAUX DE HASSELT ET DE
VERVIERS
M. de Behr dépose
sur le bureau un projet de loi relatif au classement des tribunaux de Hasselt
et de Verviers.
- L’impression et la distribution en sont
ordonnées.
PROJET DE LOI RELATIF AU PERSONNEL DU TRIBUNAL DE BRUXELLES
M. Demonceau
dépose un rapport relatif à l’augmentation du personnel du tribunal de
Bruxelles et au traitement des substituts.
- L’impression et la distribution en sont
ordonnées.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DES VOIES ET MOYENS POUR L’EXERCICE 1836
Discussion des articles
Trésor public
M.
le président. - L’ordre du jour appelle la discussion de l’article du
budget des voies et moyens, ajourné dans la séance précédente. Il est relatif aux
intérêts de l’encaisse de l’ancien caissier-général.
M. Fallon. - Il
s’agit de savoir d’abord si la chambre s’occupera de l’examen de cette question
avant d’avoir terminé le budget des voies et moyens. Demain nous ne serons plus
en nombre. Il est important d’évacuer dans la séance d’aujourd’hui le budget
des voies et moyens et les lois dont le vote avant le 1er janvier est
indispensable.
M.
Rogier. - Je ne sais pas si la chambre sera en nombre demain. J’ignore
pour quel motif elle ne le serait pas. Si l’intention de la chambre est de
s’ajourner, il me semble que dans tous les cas il serait bon qu’elle fixât le
jour destiné à la discussion importante qui doit être remise. Pour nous, nous
ne demandons pas mieux que de voir cette discussion commencée. Nous sommes
prêts à soutenir la discussion dès aujourd’hui. Mais le rapport qui vous a été
fait sur la convention conclue entre l’ancien ministère et la société générale
pourrait être long, attendu qu’il contient de graves inculpations contre nous ;
je crois que nous sommes en droit de réclamer au moins une séance pour être
entendus dans notre défense. Il semble donc difficile d’entamer cette
discussion avant la séparation de la chambre. Il y a d’autres projets à voter
immédiatement outre le budget des voies et moyens ; par exemple, la loi
tendant à autoriser les députations provinciales à dresser les budgets des
provinces.
La loi des péages n’est pas aussi urgente ; le
gouvernement pourrait se dispenser pendant un certain temps d’accorder une
concession. Je citerai une autre loi qui doit être votée avant le 1er janvier.
C’est celle sur la sortie des os. Il est impossible qu’elle donne lieu à
discussion, si l’on veut maintenir l’état de choses existant. Mais si l’on y
apporte des modifications, il est probable qu’une discussion assez longue se
présentera. Pour ma part, j’aurai dans ce cas des observations à présenter à
l’assemblée. Il me semble nécessaire que la chambre prenne dés à présent une
décision pour fixer l’ordre de ses discussions, qu’elle dise si la discussion
sur le rapport de l’honorable M. Fallon aura lieu immédiatement ou à la rentrée
des chambres après le congé de janvier. Quant à nous, nous ne reculons pas
devant la discussion ; au contraire, nous la désirons.
M. Meeus. - Quant
à moi, je désirerais que l’on n’ajournât pas la discussion relative aux
questions que doit soulever dans cette enceinte la convention passée entre la
société générale et le gouvernement. Si cependant la chambre en décidait
autrement, j’espère qu’elle voudrait bien me permettre de répondre aux discours
qui ont été prononcés dans la discussion générale, par les honorables MM.
Doignon et Desmet.
Je suis autant que personne
avare des moments de la chambre. Comme je m’attendais à ce que la discussion
relative à la convention dont j’ai parlé eût lieu avant la fin de l’année à
l’occasion du budget des voies et moyens, j’avais cru inutile de prendre la
parole dans la discussion générale, comptant bien en trouver l’occasion lorsque
nous serions arrivés à l’article relatif aux intérêts de l’encaisse du
caissier-général de l’Etat.
Il importe, messieurs, que
les discours des honorables membres ne restent pas sans réponse. Ils sont
remplis de faits erronés et peuvent, s’ils ne sont pas réfutes, produire des
impressions fâcheuses pour un établissement dont tout au moins vous devez
ménager le crédit. Je demande donc que si l’on prononce l’ajournement, l’on
veuille bien me permettre de répondre aux membres qui ont attaqué la société
générale. Selon mon habitude je ne ferai pas abus de la parole. Car j’aime à
m’exprimer en peu de mots.
M.
Fallon. - Je désire aussi que l’on puisse en finir avec la banque. Il
faut que l’on se prononce sur la convention faite sous l’ancien ministère et
sur les autres questions qui s’y rattachent.
M. Demonceau
propose de fixer la discussion de l’article relatif à la banque au mois de
janvier.
M. Fallon. - Je
partage entièrement l’avis de M. Demonceau de ne fixer la discussion qui nous
occupe qu’au 12 janvier, c’est-à-dire à l’époque de la rentrée de la chambre.
Chaque année l’on essaie d’avancer cette rentrée, et chaque année les membres
les plus diligents sont victimes de leur zèle, parce que la chambre ne se
trouve pas en nombre suffisant pour délibérer. Il est fort douteux, d’ailleurs,
que nous puissions entamer cette question plus tôt. Car il sera impossible de
réunir la chambre la semaine prochaine. Je me rallie donc à la proposition de
M. Demonceau, mais je pense qu’il faudrait fixer un jour. Ce jour pourrait être
le 12 janvier.
M. Lebeau. -
Puisque la commission elle-même, par l’organe de son rapporteur, demande l’ajournement
motivé sur des considérations qui frappent tous les esprits, à savoir la
résolution que semble avoir prise la chambre de se donner une vacance,
considérations qui se fortifient encore de la nécessité de voter plusieurs lois
urgentes, qui doivent être votées ou renouvelées avant le 1er janvier, je
n’insisterai pas pour une discussion immédiate, quoique je la désire aussi
vivement que mon honorable ami M.
Rogier.
Je crois comme lui que nous
avons le plus grand intérêt à rectifier beaucoup de faits qui, malgré le
caractère honorable de MM. le rapporteur et les membres de la section centrale,
ne me paraissent pas empreints de l’impartialité et de l’exactitude désirables.
Je ne m’étendrai pas davantage sur ce point. La chambre me permettra d’émettre le vœu que la
discussion du rapport de l’honorable M. Fallon soit fixée dans le délai le plus
rapproché possible. La chambre comprendra tout ce qu’il y a de légitime dans
notre impatience.
Je demanderai donc, m’associant aux vœux de M. le
rapporteur lui-même, que le jour soit le plus rapproché possible. Je laisserai
à la chambre le soin de décider la question de savoir si elle ne pourrait
concilier avec l’ajournement demandé l’autorisation d’entendre l’honorable M.
Meeus, qui croit avoir le droit de se constituer le défenseur d’un
établissement dont d’autres membres se constituent les accusateurs. C’est une
question de justice sur laquelle je n’ai pas à me prononcer. Je ne suis ni
l’avocat de la banque, ni son antagoniste par système. C’est une question de
bonne foi que la chambre décidera.
M. Demonceau. - Je demande que la discussion de
l’article relatif à l’encaisse de l’ancien caissier-général soit fixée au 11
janvier. J’ai choisi ce jour, parce qu’il n’est pas probable que nous puissions
nous réunir avant cette époque.
Il est très important que la question de la banque
soit examinée. Elle soulève des questions très importantes de droit civil et
public. Quant à moi, je tiens à les examiner à fond. Il ne nous resterait pas
assez de temps, avant la fin de l’année, pour cet examen. C’est tout au plus si
nous pouvons terminer toutes les lois dont le vote est jugé indispensable. Je
crois en conséquence que ma proposition ne peut rencontrer d’opposition dans la
chambre.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je proposerai de ne pas fixer de jour déterminé, mais simplement de fixer la
discussion de l’article relatif à la banque vers la rentrée de la chambre. Dans
le moment actuel nous ne pouvons nous déterminer sur le jour de la rentrée,
attendu que nous ne savons pas quand nous nous séparerons. Si la chambre
s’ajournait dès demain, elle aurait à examiner si le terme du 11 janvier n’est
pas trop éloigné.
M.
Dumortier. - J’ai demandé la parole pour faire une réflexion. C’est que
l’honorable député de Bruxelles, qui a demandé à être entendu, a laissé passer
le temps nécessaire pour parler, la discussion générale a été close.
C’était dans cette discussion qu’il devait prendre
la parole. Ce n’est pas comme directeur de la banque, sans doute, qu’il la
demande. Personne n’a le mandat de défendre la banque dans cette enceinte. L’on
ne pouvait accorder la parole à l’honorable membre, sans l’accorder également à
ceux qui voudront répondre.
M. Fallon. - Je
voulais faire une observation qui se rattache à celle de l’honorable M. Dumortier. Je crois qu’il est de
totale justice d’entendre M. Meeus.
Mais je ferai remarquer que si nous commençons par l’écouter, d’autres membres
voudront lui répondre. Nous absorberons cette séance dans la discussion de
cette question. Je demande que, préalablement, l’assemblée s’occupe de l’ordre
du jour ; s’il nous reste assez de temps après l’achèvement des lois reconnues
urgentes, nous accorderons la parole à M.
Meeus.
M.
Meeus. - Je croyais m’être bien fait comprendre. J’ai fait observer à
la chambre que si je n’avais pas pris la parole dans la discussion générale,
c’était pour ne pas faire perdre de temps à la chambre, parce que je pouvais
m’attendre à voir ouvrir une discussion sur la convention passée entre le
gouvernement et la société générale. J’y trouvais un à-propos pour répondre aux
discours des différents membres qui ont attaqué la banque : si aujourd’hui vous
ne me laissez pas réfuter ces discours, vous permettrez que des faits erronés
subsistent, et préjudicient à un établissement pour le crédit duquel il me
paraît que l’on fait fort peu de chose.
Quand j’ai demandé la parole pour répondre, ce
n’était pas comme gouverneur de la banque. Dans cette enceinte je ne suis que
député. Comme député, je puis aussi bien défendre cet établissement qu’il
appartient à d’autres de l’attaquer.
Déjà, dans une séance
précédente, l’honorable M. Dumortier a voulu voir en moi le gouverneur de la
banque. Quant à moi, je ne vois ici que des députés. Je ne vois pas même dans
l’honorable M. Dumortier un académicien. Comme député, j’ai le droit de relever
des assertions erronées sur un établissement quelconque, quand je sais qu’elles
sont contraires à la vérité.
M. Verdussen. -
Le motif qu’a fait valoir l’honorable M. Meeus pour relever les contre-vérités
dont certains discours lui paraissent entachés, me paraît un motif au contraire
pour ne pas l’entendre. Si l’honorable orateur émet des faits qui peuvent être
contestés par d’antres membres, ils pourront lui répondre par le même argument
; il existera une prévention en faveur du dernier qui aura parlé. Si les faits
dont se plaint l’honorable membre devaient produire une impression aussi
fâcheuse, il aurait dû les relever plus tôt. Sa proposition ne tendrait à rien
moins qu’à nous entraîner dans la discussion du fond, interminable aujourd’hui.
M.
Dumortier. - L’honorable préopinant a présenté en partie les objections
que j’avais à soumettre. Il me reste à répondre à M. Meeus
Il a dit qu’il ne parlait pas dans cette enceinte
comme directeur de la banque. Je sais parfaitement que ce n’est pas en cette qualité
qu’il demande la parole lorsque la discussion générale est close. Quoique la
banque soit une puissance très chère pour nous, elle n’en est pas venue à ce
degré de pouvoir que son directeur ait le droit de parler, comme le ministre,
quand il le veut. Si je lui ai fait l’observation que le directeur de la banque
ne pouvait parler après la clôture d’une discussion, c’est que M. Meeus a dit
lui-même en une autre circonstance qu’il était très lié avec le gouverneur de
la banque.
Vous jugerez, messieurs, si
vous devez entendre ou non son discours. Si l’honorable membre est admis à
parler, je demanderai également la parole. Maintenant que la discussion
générale a été close, il faut que les choses soient égales pour tous.
M.
Duvivier. - Comme la chambre paraît déterminée à renvoyer la discussion
de la convention faite avec la banque à l’époque de sa rentrée, je demanderai
que l’on réimprime les pièces relatives à cette convention. Il ne s’en trouve
pas au greffe un nombre d’exemplaires suffisant pour les 15 ou 20 nouveaux
membres à qui la distribution n’en a pas été faite.
M. Jadot, rapporteur.
- Il me semble que l’honorable M. Meeus, s’il tient à réfuter les discours
prononcés par les honorables MM. Doignon et Desmet, pourrait faire insérer le
sien au Moniteur. L’effet qu’il en
attend serait rempli.
M.
Lebeau. - Il me semble que l’on simplifierait beaucoup la discussion incidente
qui nous occupe, si l’on commençait par statuer sur la proposition de
l’honorable M. Demonceau modifiée par M. le ministre de l’intérieur, et qui ne
paraît pas devoir rencontrer de difficultés. Cette première décision de la
chambre mettra les intéressés à même de savoir pour quand ils doivent être
prêts à soutenir la discussion. Pour moi, je suis préparé. Il est possible que
beaucoup de membres ne le soient pas.
Je suis du reste sans inquiétude sur le résultat de
l’ajournement. Quoique j’éprouve la plus vive impatience d’aborder la
discussion du rapport de l’honorable M. Fallon, je me confie assez dans la
justice, dans la loyauté de mes honorables collègues, pour être sûr qu’ils
suspendront leur jugement jusqu’à ce qu’ils aient entendu la contrepartie de ce
rapport. C’est confiant dans ces dispositions que je n’insiste pas sur une
discussion immédiate.
M.
Meeus. - J’ai débuté en disant que j’étais plus que personne avare du
temps de la chambre. Je sais le prouver. Je renonce à répondre aux discours de
MM. Desmet et Doignon ; j’espère que vous voudrez bien suspendre votre jugement
sur leurs discours, jusqu’à ce qu’il été permis d’y répondre. (Oui, oui.) Vous suspendrez votre opinion
jusqu’à la discussion.
En attendant, vous vous rappellerez ce que le
discours du trône, à l’ouverture de la session de
M.
Dubus. - Je dirai qu’il n’y a pas seulement un discours auquel
l’honorable M. Meeus est si pressé de répondre. Il y a un rapport de la
commission qui contient certains développements auxquels il a intérêt à
répondre. Ce rapport a été imprimé et distribue. S’il désire y faire une
réponse, il pourra la faire imprimer. Nous aurons dès lors sous les yeux les
pièces du procès.
Un honorable député de Bruxelles, parlant sur
l’ajournement, a dit que la commission elle-même, par l’organe de son
rapporteur, demandait l’ajournement. Je ne sais pas si cette expression est
exacte. La commission reconnaît qu’il y a impossibilité de se livrer à cette
discussion, parce que les discours de plusieurs membres doivent occuper plusieurs
séances.
Il est évident qui nous ne pouvons aborder cette
discussion en ce moment, puisqu’il nous reste à peine assez de temps pour voter
des lois qui doivent être indispensablement portées avant le 1er janvier. Déjà
le sénat se plaint qu’on le force à voter au galop. Il faut donc laisser à
cette chambre du pouvoir législatif le temps de les examiner.
Quant à la motion qui fixe
l’ajournement jusqu’au 11 janvier, elle me paraît admissible. Il est important
que la chambre se trouve en grand nombre pour cette discussion.
Il est même à désirer qu’elle se trouve au complet.
Voilà pourquoi je voudrais que la discussion ne commençât pas précisément le
jour de la rentrée, mais seulement lorsque la chambre présentera un nombre de
membres présents qui convienne à l’importance de la discussion. (Approbation).
M.
Dumortier. - Je demanderai à MM. les ministres s’ils peuvent consentir
à ce que l’on ne discute pas les budgets immédiatement à la rentrée de la
chambre.
Nous arriverons au 20 ou 21 janvier, sans avoir
voté aucun budget ; je pense qu’il vaudrait mieux mettre cette discussion après
le vote des budgets.
M. Gendebien. -
Si ma mémoire est fidèle, quand on s’est proposé de discuter la difficulté qui
a existé entre la banque et le gouvernement et qui existe maintenant entre la
banque et la chambre, l’honorable ministre des finances a demandé qu’on
ajournât la discussion de cette question jusqu’à celle du budget des voies et
moyens, en ajoutant qu’il présenterait des conclusions qui resserreraient la
discussion et en faciliteraient la solution. Si, dis-je, ma mémoire est bonne,
c’est ainsi que les choses se sont passées.
Je demanderai dès lors pourquoi le ministre n’a pas
présenté ces conclusions. Je demanderai en outre, pour le cas où ma mémoire
serait en défaut, si le ministre ne pourrait pas nous présenter des
conclusions. Il me semble qu’il serait utile que le gouvernement qui est en
mesure de connaître les faits, se prononçât sur cette question.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Messieurs, je me suis borné à dire que la
chambre serait saisie de la question de la banque lors de la discussion du
budget des voies et moyens ; j’ai satisfait à ma promesse puisqu’en ce moment
même cette question est à l’ordre du jour et qu’il ne s’agit plus actuellement
que de décider si on la discutera aujourd’hui, ou si on la renverra à une
époque déterminée après les vacances, soit avant, soit après le vote des budgets.
Nous n’avions pas promis de présenter des
conclusions dans le budget des voies et moyens ; cependant, lorsque la chambre
abordera la discussion, nous nous expliquerons sans aucune espèce de
répugnance.
Quant à l’époque
qu’il convient de fixer pour cette discussion, elle dépend du temps que la
chambre croira devoir prendre pour ses vacances. Si elle devait se réunir le 5
ou le 6, comme nous désirons que cette question de la banque que nous voudrions
voir enfin tranchée, soit discutée le plus tôt possible, nous demanderions
qu’elle fût mise à l’ordre du jour immédiatement après le renouvellement de
l’année. Si la chambre ne devait reprendre ses travaux que vers le 12 janvier,
et qu’on crût que la discussion dont il s’agit pût durer une dizaine de jours, il
serait peut-être plus utile de remettre cette discussion après le vote des
budgets. Je ne pense pas toutefois que la discussion puisse durer aussi
longtemps ; les opinions sur cette question, déjà débattue dans tous les sens,
doivent être formées quoi qu’on puisse dire, et quels que soient les discours
qu’on pourra prononcer, je crois que quatre ou cinq séances suffiront pour
prendre une résolution.
Quoi qu’il en soit, comme
cette question paraît exciter une sorte d’agitation dans cette enceinte, il
serait bon de la résoudre le plus tôt possible.
Je demanderai en conséquence qu’on fixe la
discussion relative à la banque au jour de la rentrée de la chambre.
M. Demonceau. -
La proposition de M. le ministre est la même que la mienne, puisque ce serait
le 11 janvier qu’on se réunirait la première fois.
M. Devaux. - Je ne
sais quelle sera la décision de la chambre entre la proposition du ministre de
l’intérieur et celle de M. Dumortier, qui demande qu’on fixe la discussion des
questions relatives à la banque après les budgets ; pour moi, je désirerais
qu’on fixât cette discussion seulement après ce qui est indispensable,
c’est-à-dire après le budget de la guerre. La chambre pourrait de cette manière
être en grand nombre quand on s’occupera de la banque.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Nous nous rallierons bien volontiers à la
motion de l’honorable M. Devaux, qui me paraît très raisonnable. Le budget de
la guerre sera voté pour le 20 janvier. La chambre pourra se trouver au grand
complet quand nous commencerons la discussion sur la banque.
- La chambre consultée décide que la discussion
relative à la banque aura lieu après le vote du budget de la guerre.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DU DEPARTEMENT DES AFFAIRES ETRANGERES
ET DE
M. Simons dépose le
rapport de la section centrale chargée d’examiner le budget des affaires
étrangères et de la marine.
- Ce rapport sera imprimé et distribué.
PROJET DE LOI PORTANT DES CREDITS PROVISOIRES AU BUDGET DU DEPARTEMENT
DE
M. le président. -
M. de Puydt a la parole pour présenter le rapport sur la demande de crédit provisoire
faite par le ministre de la guerre.
M. de Puydt, rapporteur. - Messieurs, la section
centrale, adoptant les motifs d’urgence sur lesquels se fonde la demande de
crédit supplémentaire faite par M. le ministre de la guerre, est d’avis de lui
accorder ce crédit à valoir sur le budget de 1836.
Cependant, et sans vouloir rien préjuger
relativement à l’adoption future de ce budget, la section centrale pense que le
crédit de trois millions que la chambre accorderait, doit être imputé par
douzièmes sur chaque chapitre et article du budget, tel qu’elle l’a réglé par
son précédent rapport, et en se renfermant dans les limites des seules
allocations qu’elle a consenties.
Elle propose en conséquence le projet de loi
ci-après :
« Léopold, etc.
« Article unique. Il est ouvert au ministre de
la guerre un crédit provisoire de la somme de trois millions de francs, pour
faire face aux dépenses de janvier 1836.
« Ce crédit sera imputé proportionnellement
sur les différents chapitres et articles du budget tel qu’il a été proposé
provisoirement par la section centrale. »
- La chambre décide que ce rapport sera discuté
immédiatement après le budget des voies et moyens.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DES VOIES ET MOYENS POUR L’EXERCICE 1836
Pièce adressée à la chambre
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Je viens de déposer sur le bureau de la
chambre la pièce réclamée dans la séance d’hier, concernant la cession de la
calamine de Moreslet.
Je ne pense pas qu’il soit utile d’imprimer cette
pièce. Les membres qui désireraient prendre connaissance de cette pièce
pourront la lire. Elle restera déposée sur le bureau. Je pense que ce serait
une dépense inutile que de l’imprimer.
Cependant, si après la lecture de la pièce on en
croyait l’impression nécessaire, on pourrait la demander.
M. Fallon. - Je
demanderai à M. le ministre si cette impression présente des inconvénients.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Il n’y en a aucun.
M. Fallon. - Dans
ce cas, je demanderai l’impression au Moniteur.
- La chambre décide que l’impression de la pièce déposée
aura lieu par la voie du Moniteur.
Vote des dispositions légales
Article
premier
M. le président. -
Voici l’article premier du projet du gouvernement :
« Les impôts directs et indirects existants au
1er décembre 1835, en principal et centimes additionnels ordinaires et
extraordinaires, tant pour le fonds de non-valeurs qu’au profit de l’Etat, des
provinces et des communes, continueront à être recouvrés pendant l’année 1836,
d’après les lois et les tarifs qui en règlent l’assiette et la perception, sauf
les modifications ci-après. »
La section centrale propose de terminer l’article
de cette manière :
« Sauf les modifications établies dans
l’article suivant. »
M. de Mérode propose une
disposition additionnelle qui, je crois, se rapporte à cet article ; elle est
ainsi conçue :
« A titre de subvention éventuelle destinée au
remboursement de la dette flottante, il sera en outre prélevé cinq centimes sur
le principal et les additionnels ordinaires et extraordinaires, au profit du
trésor, de la contribution foncière, personnelle et des patentes, des droits de
douane et de tonnage, des droits d’accises et timbres collectifs, et des droits
de timbre, enregistrement, greffes, hypothèques et succession. »
M. de Mérode a la parole pour développer son
amendement.
M. F. de Mérode.
- Messieurs, après le discours que j’ai eu l’honneur de prononcer devant vous,
sur l’insuffisance des voies et moyens, je n’ai pas besoin d’ajouter à ma proposition
de longs développements. Avoir recours aux émissions de bons du trésor est une
sage mesure dans les moments de crise, dans les moments où l’impôt ne peut
fournir à toutes les exigences ; mais, en créant une dette flottante, il faut
être fermement résolu à l’amortir aussitôt que possible. Y a-t-il maintenant
possibilité d’en amortir une partie ? évidemment oui.
L’année dernière, la loi des voies et moyens accorda au trésor une subvention
de 10 p. c. ; elle a été perçue, je ne dis pas sans
gêner aucunement, mais du moins, sans froisser les contribuables.
Malheureusement, il en a arrêté le recouvrement au bout de 8 mois, parce que
les craintes de guerre étaient calmées ; cependant, le trésor public a gagné
quelques millions, dont l’utile placement n’a pas été difficile. Qui donc
regrette maintenant les sacrifices légers auxquels il a été soumis pour
recueillir ces millions ? personne, je pense. Il en
sera de même toutes les fois que l’on aura le courage de verser quelques
subsides supplémentaires dans les caisses de l’Etat. Aujourd’hui, chez nous, le
prince et les ministres ne disposent pas de la fortune publique, tous les
revenus nationaux sont employés avec le consentement des représentants du pays
au service réel de l’Etat.
Dès lors, messieurs, pourquoi n’agirions-nous pas
avec la prudence d’un bon père de famille lorsqu’il met de niveau ses dépenses
et ses recettes ? Le bon père de famille se prive d’une partie de ses revenus
pour assurer son avenir et celui de ses enfants. II se garde d’accumuler ses
obligations, il les rembourse dès qu’il le peut. Faisons de même, messieurs :
nous avons une dette flottante de 13 millions qui ne repose sur aucune
acquisition, sur aucune création productive ; il nous est facile de la
rembourser par tiers en trois années, et cela au moyen de la subvention que je
vous propose. Ne croyez pas qu’il y ait obstination de ma part, lorsque je
réclame l’augmentation du budget des recettes. Il n’y a qu’un désir sincère de
voir gérer avec sagesse et non avec mollesse et abandon les affaires du pays.
J’y prends intérêt comme aux miennes propres. Je veux traiter les unes comme
les autres.
Messieurs, si dans les années favorables vous vous
contentez de mettre les recettes au niveau des dépenses, lorsque précédemment
vous aurez été forcés par les circonstances de contracter des dettes, vous
finirez à la longue par accroître outre mesure les charges de la nation.
Peut-on croire, en effet, que l’avenir sera toujours un temps de félicité ? Non
certainement ; peu d’années successives se passeront sans alternatives
malheureuses, sans fléaux, sans disette qui nécessiteront le recours à des
ressources extraordinaires. N’avons-nous pas aujourd’hui même à indemniser
certaines pertes qui réclament instamment notre sollicitude toute particulière
? Laisserez-vous ultérieurement les propriétaires des polders inondés autour de
Lillo et Liefkenshoeck sans dédommagement annuel de
la privation qu’ils éprouvent de tous leurs revenus ? Naguère j’ai visité ces
terres désolées ; j’ai parcouru la limite de ces champs fertiles couverts d’eau
et de boue, avec ceux auxquels ils appartenaient. J’étais accompagné du
bourgmestre du village de Lillo actuellement détruit. Il possédait lui-même une
certaine aisance ; chassé de son domicile, il est maintenant dans un complet
dénuement, et tandis que la convention du 21 mai nous procure les avantages de
la paix, lui et ses compagnons d’infortune subissent, sans en apercevoir le
terme, toutes les calamités de la guerre.
Vous peindrai-je aussi de nouveau la situation fâcheuse
d’une grande partie du Luxembourg qui attend avec impatience la reprise des
travaux abandonnés depuis 1830 ? Non, messieurs ; mais je ferai valoir en
faveur de cette province une considération spéciale qu’il est bon de vous
rappeler ; les dépenses pour l’armée ont profité à tout le pays occupé par les
troupes.
Le Luxembourg, où la présence de l’armée était
inutile pour prévenir les agressions de
Je sais que l’honorable M. de Puydt vous a soumis
déjà une proposition d’emprunt sur l’excédent du produit des barrières, emprunt
dont le capital serait employé à construite plus activement les routes et
canaux commencés ou en projet. M. de Puydt veut renouveler sa proposition. Je
ne suis pas ennemi de semblables emprunts, parce qu’ils offrent souvent des
moyens de richesses supérieures aux capitaux alloués pour les obtenir.
Cependant, messieurs, les dettes mêmes utilement contractées, ont toujours de
l’inconvénient, et je ne consentirais volontiers à en charger le pays que si je
le voyais résolu d’autre part à se dégrever des 13 millions de dettes
flottantes qui ne reposent sur rien.
On nous propose un budget de recette de 84 millions
; augmentons-le de 4 millions pendant trois années, et cette dette flottante
disparaîtra au grand avantage et des contribuables et du crédit public qui
s’affermira de plus en plus.
II me reste à dire un mot
sur les économies dont j’entends parler quelquefois, et que j’admets avec
plaisir lorsqu’elles ne nuisent pas au service public ou qu’elles ne portent
point pour des sommes minimes l’inquiétude et le découragement parmi les
employés.
Si l’on m’indique des économies bien entendues, je
les adopterai d’autant plus volontiers qu’elles serviraient encore à réduire
nos obligations.
- L’amendement de M. de Mérode est appuyé.
Plusieurs membres demandent la parole.
M. le président. -
M. Fallon a la parole.
M. Eloy de
Burdinne. - Je l’avais demandée tout le premier.
M. Dubus. - Je
l’ai demandée pour une motion.
M.
Fallon. - C’est aussi pour une motion que j’ai demandé la parole.
C’est pour demander une explication à M. de Mérode,
pour le prier de vouloir bien dire si c’est en qualité de ministre d’Etat ou de
député qu’il a fait sa proposition.
M. F. de Mérode.
- C’est comme simple député que j’ai présenté mon amendement ; je ne me suis
nullement entendu avec le ministre des finances pour la proposer.
M. Dubus. -
Messieurs, assurément cette discussion n’est pas inopinée pour l’honorable
ministre d’Etat qui vient de faire la proposition dont il s’agit, car il vous a
lu un discours à l’appui. Mais je crois pouvoir assurer qu’elle est inopinée
par les autres membres de cette chambre. Je dois manifester mon étonnement de
ce qu’au moment où nous avons en quelque sorte achevé la discussion des voies
et moyens et où nous ajournons pour cause d’urgence les parties du projet qui
devaient donner lieu à une longue discussion, on vienne jeter à la traverse ce
nouvel objet de discussion qui est très grave, comme pour empêcher de terminer
la loi dont nous avons à nous occuper.
Messieurs, nous avons fixé non seulement les sommes
que nous allouons en principal sur l’impôt, mais nous avons fixé aussi le
nombre des centimes additionnels. Tout le tableau a été discuté, plusieurs
articles ont été l’objet de propositions spéciales, et après que toutes les
questions relatives aux diverses natures d’impôt ont été discutées et résolues
par la chambre, on vient en quelque sorte remettre tout en question.
Messieurs, que penseriez-vous d’un amendement que
je déposerais et qui tendrait à réduire de 5 p. c. toutes les sommes portées au
tableau ? Vous diriez : Il faut le rejeter par la question préalable, parce que
la chambre s’est prononcée ; elle a fixé l’impôt quant au principal et aux
centimes additionnels ; vous ne pouvez pas, par un moyen détourné, remettre en
question tout ce que la chambre a décidé.
C’est la même chose que vous propose l’honorable M.
de Mérode, avec cette différence qu’au lieu d’un dégrèvement c’est un surcroît
de charge ou augmentation de cinq centimes additionnels qu’il propose sur tous
les impôts. Il est trop tard pour proposer un semblable amendement. Je vous
rappellerai la discussion qui a eu lieu relativement à l’impôt foncier ; loin
d’être disposé à l’augmenter, on a demandé de le réduire d’une part de 10
centimes et d’autre part de 5 ; ces propositions ont été mises aux voix, et
après qu’elles ont été rejetées, on vient vous proposer une augmentation.
C’est alors que l’honorable
M. F. de Mérode qui, paraît-il d’après son discours, avait déjà formé le
dessein de proposer son amendement, devait le présenter et dire qu’au lieu de
diminuer l’impôt, on devait l’augmenter ; la chambre aurait examiné d’une part
la question d’augmentation et de l’autre la question de diminution.
Je pense qu’il n’est plus
temps de présenter un amendement, maintenant que nous avons arrêté le tableau ;
car ici, sous la forme de disposition additionnelle, c’est une augmentation
considérable qu’on propose à tout le tableau. Si vous l’admettiez, vous seriez
obligés d’ajouter au tableau un article qui comprît le calcul de ces cinq
centimes additionnels sur toutes les contributions. Sous ce rapport je propose
la question préalable. Si la chambre n’adoptait la question préalable, je
proposerais l’ajournement. La chambre ne peut pas aborder la discussion d’un
amendement semblable sans examen des sections et de la section centrale. Vous
n’auriez qu’une discussion inopinée, et quand il s’agit d’augmenter les charges
du peuple, vous devez au moins en faire l’objet d’une mûre délibération.
M.
le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Je crois que
l’honorable député de Tournay économiserait le temps de la chambre s’il
renonçait à la question préalable et à la motion d’ajournement. Ce qu’on
pourrait faire de mieux, ce serait de mettre tout simplement la proposition aux
voix, car une proposition semblable n’est pas de nature à pouvoir être faite
incidemment ni à être adoptée sans discussion.
M. F. de Mérode.
- M. Dubus a prétendu que j’aurais dû proposer mon amendement quand il s’est
agi de l’impôt foncier. Je lui ferai observer que mon amendement s’appliquant à
toutes les catégories d’impôt, il m’eût été difficile de le proposer plus tôt
que je ne l’ai fait. Si on n’en veut pas, on votera contre ; mais les motifs
que j’ai développés resteront, et le public les appréciera.
M. Gendebien. -
Tout en votant pour la question préalable, je n’entends pas méconnaître les
motifs dont l’honorable M. de Mérode a appuyé sa proposition, Il n’est personne
qui soit plus disposé que moi à venir au secours de ceux qui souffrent et
particulièrement des malheureux habitants des polders. J’ai fait plusieurs
motions dans le but de les secourir. Si je fais ici cette observation, c’est
pour qu’ils ne soient pas découragés par le vote que la chambre pourra émettre,
et qu’ils sachent que si on repousse la proposition de M. de Mérode, ce n’est
pas en raison des motifs dont il l’appuie, mais à défaut de temps pour
l’examiner.
M. F. de Mérode.
- Je retire ma proposition puisqu’elle n’est pas bien accueillie, mais je
déclare que l’année prochaine je la renouvellerai. On sera prévenu assez
longtemps d’avance.
M. le président. -
L’article se terminant par ces mots : « sauf les modifications
suivantes, » je crois devoir commencer par mettre aux voix les articles
qui apportent des modifications à l’article 1er. Nous reviendrons ensuite à cet
article.
Article
2
« Art. 2. Il ne sera payé en principal que
quinze francs par cheval servant à la selle on à l’attelage de voitures
suspendues sur ressorts ou soupentes, mais employé principalement et
habituellement dans l’exercice de leur profession par les médecins,
chirurgiens, artistes vétérinaires, fabricants, commis-voyageurs et
cultivateurs, dont la culture forme le principal moyen d’existence.
« Sont soumis à la même taxe les chevaux tenus
pour le service de la garde civique, lorsqu’ils servent en même temps pour
d’autres usages, à la selle ou à des voitures suspendues.
« Toutefois, les médecins, chirurgiens,
artistes vétérinaires, commis-voyageurs, et les gardes civiques, ne pourront
jouir pour plus d’un cheval du bénéfice des précédentes dispositions. Tous
autres chevaux tenus par eux, et servant aux mêmes usages, seront imposés comme
chevaux de luxe.
« En cas de
contestation relativement à l’usage du cheval ou à la condition exprimée à
l’égard du cultivateur, la cotisation sera établie d’après une décision de la
députation permanente des conseils provinciaux, prise sur l’avis de la
commission instituée par l’art. 8 de la loi sur la contribution personnelle, et
dont chaque fraction avisera séparément lorsqu’il y aura partage égal de voix.
« L’avis de la commission sera présenté à la
députation permanente par l’intermédiaire du directeur des contributions
directes, cadastre, douanes et accises. »
M. le président. -
La section centrale propose de renvoyer ce qui fait l’objet de cet article à
une commission, à l’effet d’être examiné et converti en projet de loi séparé.
Le ministre a déclaré ne pas se rallier à cette
proposition.
M. Demonceau. - Si
M. le ministre voulait se rallier à la section centrale, il éviterait une
longue discussion sur cet article et sur l’art. 3 que nous allons aborder
ensuite. Je l’engage à le faire.
- M. Raikem cède le
fauteuil à M. Fallon, vice-président.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Messieurs, je regrette que la section centrale
ait propose l’ajournement des trois dispositions qui avaient été proposées par
le gouvernement ; je crois qu’elles auraient pu être facilement appréciées, et
qu’elles pouvaient être convenablement adoptées dans le budget des voies et
moyens à l’instar de dispositions analogues qui ont été insérées dans le même
budget les années précédentes.
La section centrale, tout en proposant
l’ajournement de la discussion sur ces dispositions, demande cependant, en ce
qui concerne les distilleries, que l’on adopte la majoration de 22 à 30 c. par
hectolitre sur les matières fermentées ; par là la section centrale ne se
montre pas très conséquente avec ce qu’elle a dit relativement aux autres
dispositions ; elle a prétendu, en effet, que les budgets des voies et moyens
n’étaient pas propres à renfermer des modifications aux lois générales ; et
cependant elle déroge elle-même à ce principe en proposant l’augmentation du
droit sur les matières fermentées.
Quoi qu’il en soit, si la section centrale demande
l’ajournement pour soumettre les diverses dispositions dont il s’agit à des
commissions spéciales, je crois qu’il faudrait aussi ajourner la proposition
relative à l’augmentation du droit : la majoration sur les matières fermentées
sans imposer les vaisseaux distillatoires occasionnerait une perte au trésor,
parce que la fraude serait plus active : je pourrais appeler à l’appui de mon
opinion une pétition de la province de Liége, insérée au Moniteur, et dans
laquelle on demande l’ajournement des deux points qui concernent les
distilleries.
Les distillateurs de Liège préfèrent l’adoption de
la proposition du gouvernement tout entière, que celle de la section centrale,
parce que, disent-ils, si l’on ne frappe pas tous les vaisseaux employés par
les distillateurs, on stimulera la fraude d’une manière dangereuse, par la
seule augmentation du droit sur les vaisseaux actuellement imposés.
Messieurs, tout en témoignant le regret de voir
ajourner les trois dispositions proposées dans le budget des voies et moyens,
je me détermine à admettre cet ajournement de leur discussion, ainsi que leur
renvoi à l’examen d’une commission spéciale.
M. Jadot, rapporteur.
- Je n’ai rien à objecter à ce que propose M. le ministre des finances.
M. Demonceau. -
Ma proposition a pour but d’ajourner la discussion de la disposition relative à
l’impôt personnel.
M. Raikem. - Dès
qu’il ne s’agit que du personnel, je n’ai pas d’objection à présenter : la
section centrale a demandé le renvoi de cette disposition à une commission
spéciale, afin d’examiner plus particulièrement cet objet, et de connaître les
exceptions qu’il faut faire relativement à cet impôt personnel.
- La proposition d’ajournement, mise aux voix, est
adoptée.
M. le président. -
La proposition relative aux exceptions à faire sur l’impôt personnel est
renvoyée à une commission spéciale ; par qui cette commission sera-t-elle
nommée ?
De
toutes parts. - Par le bureau !
M. le président. -
Nous allons passer à la disposition relative aux distilleries.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Je me rallie aussi à la proposition
d’ajournement relativement aux distilleries ; mais je demande que l’on ajourne
la disposition tout entière par les motifs que je viens d’exposer.
Par l’amendement de la section centrale, et la
pétition de Liège vous l’a dit, vous exciteriez la fraude en augmentant l’impôt
sur les matières fermentées, sans frapper d’impôt tous les vaisseaux
distillatoires.
M. Raikem. - Je me
propose d’expliquer quel a été le but de la section centrale. Lorsqu’elle s’est
occupée de l’objet relatif aux distilleries, et qu’elle a cru devoir adopter
une augmentation du droit sur les matières en fermentation, elle n’a pas pensé
que cette augmentation pourrait nuire au système existant. Il a été fait des
observations à cet égard, et ces observations ont fait impression sur
l’assemblée ; il paraît que l’on comprend que l’augmentation du droit ne ferait
qu’augmenter la fraude que l’on voudrait détruire ; j’avoue que cette
considération avait échappé à la section centrale, qui ne voulait qu’une
augmentation d’impôt réclamée par le ministre, et, à ce qu’il paraît, par la
majorité de la chambre ; mais en renvoyant la proposition faite par le
gouvernement à une commission afin d’en faire un projet de loi séparé, je crois
que l’on aura satisfait pleinement à tout ce que l’on peut désirer à cet égard.
(Aux voix ! aux voix !)
- La chambre, consultée, renvoie à une commission
spéciale la proposition tendant à augmenter le droit sur les matières en
fermentation, et sur les vaisseaux employés dans les distilleries.
M. le président. -
Comment la commission sera-t-elle nommée ?
De
toutes parts. - Par le bureau ; on la composera de 7 membres !
Article
4
M. le président. -
Vient ici une disposition relative aux caisses d’épargne.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - La section centrale transforme cette disposition
en un projet de loi séparé : nous pouvons l’adopter sous cette forme, et
ajourner la discussion sur ce point.
Articles
1 à 5 (du projet de la section centrale)
M. le président.
-Alors il reste les articles du projet de loi concernant le budget des voies et
moyens, libellés par la section centrale, et auxquels M. le ministre des
finances se rallie.
- Ces articles sont ainsi conçus :
« Art. 1er. Les impôts directs et indirects
existant au 31 décembre 1835, en principal et centimes additionnels ordinaires
et extraordinaires, tant pour le fonds de non-valeurs qu’au profit de l’Etat,
des provinces et des communes, continueront à être recouvrés pendant l’année
1836 d’après les lois et tarifs qui en règlent l’assiette et la perception. »
« Art. 2. La quotité en principal de l’accise,
établie par l’art. 2 de la loi du 18 juillet 1833 (bulletin officiel, n°864),
est fixée a vingt-deux centimes.
« La décharge accordée par les art. 27 et 29
de ladite loi, et par l’art. 5 de la loi du 9 août 1835 (Bulletin officiel,
n°551), est fixée à sept francs. »
« Art. 3. D’après les dispositions qui
précèdent, le budget de recettes pour l’exercice 1836 est évalué à la somme de
quatre-vingt-quatre millions cinq cent cinquante-sept mille cent cinquante-un
francs, conformément au tableau ci-annexé. »
« Art.4. Pour faciliter le service du trésor
pendant le même exercice, le gouvernement pourra, à mesure des besoins de
l’Etat, renouveler et maintenir en circulation les bons du trésor, dont la
création a été autorisée par les lois des 16 février 1833, 1er mai 1834 et 26
septembre 1835, et ce jusqu’à concurrence de vingt-six millions quatre cent
quatre-vingt-dix mille francs. »
« Art. 4. La présente loi sera obligatoire le
premier janvier 1836. »
- Ces articles sont successivement lus et adoptés.
Vote sur l’ensemble du projet
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Il n’y a réellement pas eu d’amendements au
budget des voies et moyens. Aux brevets d’invention, on a mis dix mille francs
au lieu de onze mille ; mais le chiffre onze était une erreur. Je crois qu’on
peut voter la loi pour motif d’urgence.
- La chambre consultée décide qu’il y a urgence.
En conséquence, on procède au second vote sur les
articles.
L’appel nominal constate la présence de 66 membres.
64 votent l’adoption ;
1 seul vote le rejet.
M. Gendebien s’abstient de prendre part à la
délibération.
En conséquence le budget des voies et moyens est
adopté et sera transmis au sénat.
M. Gendebien. -
Messieurs, je n’ai pas voulu voter contre le budget, parce qu’il faut bien que
les recettes se fassent ; je n’ai pas non plus voulu donner mon assentiment à
cette loi, parce que je ne veux pas de recettes obtenues par des impôts aussi
injustement répartis ; et aussi longtemps qu’on ne fera pas la justice que je
réclame tous les ans, je ne pourrai voter pour les budgets des voies et moyens.
- Ont voté l’adoption : MM. Berger, Bosquet,
Coghen, Cols, Cornet de Grez, de Behr, Dechamps, de Jaegher, de Meer de
Moorsel, F. de Mérode, W. de Mérode, Demonceau, de Muelenaere, de Nef, de
Puydt, de Renesse, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Theux,
Devaux, d’Hoffschmidt, d’Huart, Doignon, Dubois, Dubus (aîné), Dubus (Bernard),
Dumortier, Duvivier, Eloy de Burdinne, Ernst, Fallon, Frison, Hye-Hoys, Jadot,
Jullien, Kervyn, Lardinois, Legrelle, Lejeune, Liedts, Mast de Vries, Meeus,
Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Pirmez, Pirson, Raymaeckers, A. Rodenbach,
Rogier, Simon, Stas de Volder, Thienpont, Trentesaux, Troye, Ullens,
Vandenbossche, Verdussen, Vergauwen, H. Vilain XIIII, L. Vuylsteke, Raikem.
M. Seron a voté le rejet.
PROJET DE LOI RELATIF À
M. Fallon,
président. - Nous allons passer à la délibération sur le projet de loi
concernant les caisses d’épargne. Ce projet qui est une proposition du ministre
des finances est ainsi conçu :
« Art. unique. Sont
exempts de timbre et d’enregistrement les registres et autres pièces concernant
l’administration des caisses d’épargne, ainsi que les certificats de mise de
fonds, les livrets et comptes rendus aux actionnaires par les administrateurs
desdites caisses. »
M. Gendebien. -
Messieurs, je trouve la proposition du ministre parfaitement libérale,
parfaitement acceptable, si elle ne s’applique qu’à des caisses d’épargne :
cependant, il ne faut pas se faire illusion, les caisses d’épargne ne sont pas
seulement consacrées à recueillir les deniers du pauvre, les gens riches en
usent. J’aurais désiré que l’on donnât une statistique de ces caisses ; d’après
ce que l’on dit, les neuf dixièmes des fonds qui y sont déposés appartiennent à
des personnes fortunées. Quand cela serait vrai, ce ne serait pas un motif pour
me faire rejeter le projet de loi. Toutefois, je voudrais avoir des
éclaircissements sur ce point. Il faut que l’on puisse recueillir les deniers
du pauvre ; mais il faudrait éviter les abus. Si le ministre pouvait attendre jusqu’à
la rentrée prochaine de la chambre, je crois qu’on devrait ajourner jusque-là
le projet, afin de l’examiner mûrement.
M.
le ministre des finances (M. d'Huart). - L’article qui vous est
présenté par le gouvernement est tout à fait conçu dans l’intérêt des caisses
d’épargne, c’est-à-dire de ces établissements qui permettent au pauvre de
mettre en réserve les économies qu’il peut faire, et de se former par
accumulation un petit capital pour ses vieux jours. La proposition du gouvernement
n’a donc qu’un but philanthropique ; cependant il peut se faire que les gens
riches déposent des fonds dans les caisses ; ce serait là un abus, mais un abus
auquel il serait impossible de porter remède, car le riche pourra toujours
cacher son nom et faire des dépôts par des moyens détournés.
Il est cependant permis de croire que les
capitalistes, en général, ne s’amusent pas a placer leurs fonds dans ces
caisses, car ils savent les employer dans des associations, dans des
entreprises bien plus profitables.
Il n’y aurait pas d’inconvénient grave à ajourner
la loi, mais il n’y aurait pas d’avantage non plus ; il vaut mieux dès lors la
voter, sauf à voir si, en suite d’un examen du règlement des caisses d’épargne,
on ne pourrait pas y apporter des changements propres à en consacrer
exclusivement l’usage en faveur du pauvre. L’adoption du projet de loi ne
s’oppose pas aux améliorations de l’organisation de ces institutions.
M. Legrelle. - J’aurais désiré que les
caisses d’épargne eussent été établies par une loi : vous voulez leur accorder
une faveur législativement, tandis qu’elles n’ont pas été créées
législativement ; il me semble qu’il y a là quelque anomalie. Puisque le
ministre des finances n’attache pas grande importance à l’adoption sur-le-champ
du projet en discussion, ne serait-il pas tout aussi rationnel de déclarer dans
la loi qui organiserait les caisses d’épargne qu’elles auront les avantages
qu’on nous propose de voter actuellement ? Cette idée m’est suggérée par ce
qu’il se passe en France. Ces établissements sont extrêmement utiles et moraux,
et je suis de l’avis de leur donner tous les encouragements possibles en les
organisant légalement.
M.
Gendebien. - Dès l’instant qu’on veut subordonner à une loi générale la
question de l’exemption du timbre, je retire mon observation qui n’a jamais été
convertie en proposition. Je suis prêt à voter pour la loi.
M. Seron. - Je remercie
le ministère de ce que lui qui met assez ordinairement le nez partout, lui qui
veut n’être étranger à rien, veut bien aujourd’hui être assez libéral pour ne
pas s’occuper des caisses d’épargne.
Quant à la proposition de l’honorable député d’Anvers,
je ne la trouve pas très libérale.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Je pense que la loi en discussion peut être
votée, abstraction faite de toute espèce de loi d’organisation sur les caisses
d’épargne. Il s’agit simplement de lever un doute de l’administration, quant à
l’obligation de percevoir un droit de timbre. C’est là seulement ce que nous
demandons. L’exemption de ce droit de timbre n’a d’autre but que de faciliter
les placements de la classe moyenne et même de la classe pauvre.
La question des caisses d’épargne, question d’une
haute gravité et qui mérite un examen tout spécial, est indépendante de cette
petite question d’exemption de timbre qui se réduit en définitive à une somme
assez faible. (Adhésion générale.)
- La chambre procède à l’appel nominal sur
l’article unique du projet. Le projet de loi est adopté à l’unanimité des 67
membres présents.
PROJET DE LOI PORTANT DES CREDITS PROVISOIRES AU BUDGET DU DEPARTEMENT
DE
(Moniteur
belge n°361 et 362, des 26 et 27 décembre 1835) M.
le président. - Le projet présenté par le gouvernement est ainsi conçu
:
« Considérant qu’en attendant que le budget
des dépenses puisse être réglé définitivement, il importe d’assurer le service
du département de la guerre.
« Nous avons, de commun accord avec les
chambres, décrété et nous ordonnons ce qui suit :
« Art. unique. Il est
ouvert au ministre de la guerre un crédit provisoire de la somme de 3 millions
de fr. pour faire face aux dépenses du mois de janvier 1836. »
La section centrale propose un paragraphe
additionnel ainsi conçu :
« Ce crédit sera imputé proportionnellement
sur les différents chapitres et articles du budget tel qu’il a été proposé
provisoirement par la section centrale. »
M. le ministre de la guerre
(M. Evain). - Les dépenses du mois de janvier doivent être
effectivement du douzième des dépenses de l’armée qui se paient mensuellement,
et d’après l’effectif, au 1er du mois, telle que la solde, les traitements et
les masses. Quant à ces dépenses, en accordant le douzième de la somme totale,
cette allocation suffira pour assurer le service du mois de janvier. Il y a
d’autres services, sur lesquels il n’y aura pas de dépenses à faire en janvier
; ainsi, pour le service des remontes, la dépense ne vient qu’en avril et en
mai ; les dépenses relatives aux travaux des fortifications ne commencent qu’en
mai et en juin. Les fonds affectés à ces services et à ceux qui ne se paient
qu’à la fin du trimestre resteraient donc sans emploi pour les affections
spéciales.
Si la chambre votait le
projet tel que je l’ai proposé, la somme de trois millions eût été suffisante.
Maintenant, si on veut adopter une disposition additionnelle tendant à ce que
les paiements à faire soient imputés exactement par douzièmes sur les
différents chapitres et articles mêmes du budget de l’exercice prochain, amendé
par la section centrale, il faudra m’accorder non plus 3 millions, mais le
douzième juste du montant du budget proposé, c’est-à-dire, 3,175,000.
Plusieurs membres. - Cela est juste.
M.
Dubus. - Je crois que la loi devrait être formulée autrement que ne le propose
la section centrale. Le rapport de la section centrale devrait donc être annexé
à la loi. Je crois qu’une semblable manière de renvoyer au rapport d’une
commission de la chambre est absolument sans exemple.
M.
de Puydt, rapporteur. - La section centrale, en vous faisant cette
proposition, a voulu que le ministre ne pût pas prendre sur le crédit
provisoire les sommes nécessaires pour faire face à des dépenses qu’elle a
écartées dans son rapport. Si cette proposition était accueillie, on n’aurait
qu’à joindre à la loi le tableau qui est à la suite du rapport et qui contient
les propositions de la section centrale par chapitre et article.
M.
le ministre des finances (M. d'Huart). - Je demanderai à la chambre si,
pour faire droit à l’observation de l’honorable M. Dubus, on ne pourrait pas se
référer non pas au budget prochain, mais au budget de cette année. On
référerait ainsi à une loi adoptée. Je pense que cela satisferait tout à fait à
l’observation de M. Dubus.
M.
Legrelle. - Je ne suis pas d’accord avec M. le ministre des finances,
parce qu’il est des dépenses portées au budget de cette année et dont la
section centrale a proposé la suppression pour l’exercice prochain. Or, si la
proposition de M. le ministre des finances était adoptée, ces dépenses
pourraient être commencées, et ce serait en quelque sorte un engagement pris
pour les continuer.
M. Gendebien. -
Il serait beaucoup plus simple que M. le ministre de la guerre prît
l’engagement de ne pas disposer en janvier des sommes qui n’auraient pas été
allouées par la section centrale, de s’abstenir sans rien préjuger.
M. le ministre de la guerre
(M. Evain). - J’en prends l’engagement formel envers la chambre ; je ne
m’oppose même pas à la proposition de la section centrale pour en insérer le
quantum dans la loi ; mais elle devient inutile, si la chambre veut bien s’en
rapporter à ma promesse.
Un grand
nombre de voix. - Oui ! oui ! Aux voix !
aux voix !
M. le président. -
D’après cela il suffira de mettre aux voix la proposition du gouvernement.
M. le ministre de la guerre
(M. Evain). - Je retire en conséquence ma demande supplémentaire de
175,000 fr. ; je me borne à demander la somme de 3 millions, conformément à ma
première proposition.
- L’article unique et les considérants du projet de
loi sont successivement mis aux voix et adoptés. L’ensemble du projet est
adopté à l’unanimité des 69 membres présents.
PROJET DE LOI
FIXANT LE CONTINGENT DE L’ARMEE POUR L’ANNEE 1836
M. le président. -
La discussion est ouverte sur l’ensemble du projet.
M. Gendebien. -
Je ne crois pas pouvoir me dispenser de présenter à la chambre une observation
sur une phrase de l’exposé des motifs du projet en discussion, phrase qui me
semble tout à fait inconstitutionnelle ; la voici :
« Mais cette force dont le gouvernement a cru
devoir se priver, pour ne pas porter au-delà de justes bornes les sacrifices
réclamés du dévouement des citoyens, et qui ont été faits avec une ardeur et un
zèle si méritoires, dont le pays conservera le souvenir ; cette force, dis-je,
a été remplacée par une nouvelle organisation donnée à la réserve instituée par
la loi du 4 juillet 1832. »
Je dois protester contre le
sens de cette phrase, si tant est que le ministre y donne le sens que j’y donne
moi-même. J’y vois la dissolution de la garde civique à laquelle on substitue
l’armée de réserve ; or, la constitution a institué deux espèces de force armée
: une armée régulière ou de ligne destinée principalement à la défense du
territoire ; et une garde civique destinée aussi à concourir à la défense du territoire,
mais destinée avant tout à défendre envers et contre tous les institutions du
pays, à défendre la constitution. C’est cette force armée, sauvegarde de nos
libertés, que l’on veut remplacer par une armée de réserve qui a la même
organisation que l’armée de ligne.
Je ne sais si c’est ainsi que M. le ministre de la
guerre comprend la phrase dont j’ai donné lecture mais c’est ainsi que tout la
monde la comprendra.
M.
le ministre de la guerre (M. Evain). - Je crois devoir donner quelques
développements à l’idée que j’ai voulu exprimer dans l’exposé des motifs du
projet. Ce n’est pas pour remplacer la garde civique mobilisée par l’armée de
réserve que nous nous sommes appuyé sur la loi du 4 juillet 1832, qui institue
la réserve. Jamais je n’ai entendu substituer la réserve à la garde civique,
telle qu’elle est constituée par la loi, et qui doit rester organisée
conformément aux lois qui règlent son service et ses attributions.
Mais j’ai voulu dire que les 15 mille hommes qui
formaient en 1835 la portion du premier ban de la garde civique, qui avait été
mobilisée en 1831, seraient remplacés numériquement, et dans le genre de
service qui leur était dévolu, par une force à peu près égale des nouveaux
régiments de réserve, ce qui avait permis de remercier et de renvoyer
définitivement dans leurs foyers les 26 bataillons de garde civique mobilisée.
M. Gendebien. -
Il n’est pas moins vrai de dire que les miliciens qui ont fini leur terme de 5 ans,
et qui sont renvoyés dans leurs foyers, font partie de l’armée de réserve, et
passent 5 ans dans la réserve au lieu d’être incorporés dans le premier ban de
la garde civique.
M. le ministre de la guerre s’appuie à tort sur la
loi du 4 juillet 1832 ; car cette loi n’a été faite que pour la création des
cinquièmes bataillons.
A cette époque on avait mis en activité le premier
ban de la garde civique, d’une manière fort irrégulière : il y avait des
provinces surchargées ; il y avait des cantons qui fournissaient leur
contingent tout entier, d’autres qui ne fournissaient rien. On voulut que la
charge du service fût également répartie ; et pour ne pas désorganiser les
bataillons et les légions de gardes civiques, pour les réorganiser selon les
règles de la loi, on forma les cinquièmes bataillons, dans lesquels on fit
entrer les miliciens qui n’avaient pas été appelés à faire partie du premier
ban en activité. C’est donc à tort qu’on s’appuie sur la loi transitoire et
spéciale du 4 juillet 1832, pour justifier l’organisation d’une armée de
réserve destinée à remplacer le premier ban de la garde civique.
Qu’on ne nous dise pas que
le salut du pays exige une organisation permanente car avant tout le salut de
la constitution. D’ailleurs le salut du pays serait assuré si l’on pouvait
organiser le premier ban de toutes nos gardes civiques, comme a été organisé le
premier ban de la garde civique.
Je parlerai notamment de la garde civique d’Anvers,
parce que nous l’avions tous les jours sous les yeux. J’ose dire que cette
garde civique manœuvrait tout aussi bien que la troupe de ligne. Pourquoi
toutes les gardes civiques du premier ban ne seraient-elles pas organisées de
la même manière que celle d’Anvers ! Et cette garde civique d’Anvers ne
l’avons-nous pas vue ici, dans les parades, et aux champs d’exercice, manœuvrer
à côté de l’infanterie de ligne, et tout aussi bien qu’elle ?
Quant à moi, sans vouloir accuser les intentions du
ministre, je considère cette disposition comme destructive de la garde civique,
ce boulevard nécessaire contre les empiétements du pouvoir sur nos libertés
constitutionnelles.
M.
Dumortier. - La constitution a voulu que l’organisation de l’armée fût
réglée par une loi ; c’est pour satisfaire au vœu de la constitution que M. le
ministre de la guerre, en 1832, est venu présenter un projet de loi tendant à
la formation d’une armée de réserve. Malgré la position très militaire du pays
à cette époque, malgré les préparatifs de guerre que faisait alors
Dans cet état de choses, je dis que l’arrêté de M.
le ministre de la guerre ne nous lie en rien, que la loi du 7 juillet conserve
toute sa force et vigueur, et que le gouvernement ne peut donner suite à
l’arrêté du ministre de la guerre, à moins qu’il ne soit présenté une loi.
M. le ministre de la guerre
(M. Evain). - Je n’ai pas présenté le projet de loi dont l’honorable
préopinant vient de vous entretenir, et qui avait, dit-il, pour objet de fondre
le premier ban de la garde civique dans la réserve de l’armée.
Je conviens cependant qu’il fut élaboré au dépôt de
la guerre, au commencement de 1832, un projet complet d’organisation d’une
forte réserve. Mais ce projet ne fut pas présenté à la chambre, et le
gouvernement se borna à présenter celui qui, à quelques modifications près, fut
converti en loi le 4 juillet 1832.
Ce projet fut renvoyé à l’examen d’une commission
de la chambre ; c’est par suite des conférences que j’ai eues avec cette
commission qu’il subit quelques changements dans quelques-unes de ses
dispositions.
Cette loi mettait à la disposition du gouvernement
30 mille hommes pour former une armée de réserve. Le gouvernement qui avait la
latitude de lever partie ou totalité de cette réserve, crut devoir se borner à
ne faire qu’un appel de 15,000 hommes ; mais la loi ne disait nullement qu’il
serait formé des cinquièmes bataillons ; elle mettait les hommes à la
disposition du gouvernement, le laissant libre d’adopter telle organisation qu’il
voudrait donner à cette réserve, en ne lui imposant que la condition que cette
organisation fût conforme à celle de l’armée de ligne.
Pour ne point former de prime abord de nouveaux
corps avec des hommes de nouvelles levées, le gouvernement organisa les
cinquièmes bataillons de nos régiments d’infanterie, les 7èmes escadrons des
régiments de cavalerie et 3 nouvelles batteries d’artillerie, avec ces 15,000
hommes. Nos régiments d’infanterie se trouvant forts de 4,200 à 4,500 hommes à
la suite de l’appel des classes de 1832 et de 1833, et les régiments comptant
20 classes de miliciens immatriculés dans leurs cadres, avaient alors de 7 à
8,000 hommes : l’administration de corps aussi nombreux était devenue
impossible.
D’après un système qui parut très bon à ceux qui
l’ont examiné, qui sera approuvé par ceux qui voudront l’étudier et qui
consiste à n’appeler les miliciens sous les drapeaux que quand ils ont atteint
l’âge de 20 ans révolus, ces miliciens passent dans leurs foyers les 2
premières années de leur temps de service : ils sont appelés au commencement de
la troisième aimée, pour servir pendant 5 ans dans l’armée de ligne, où ils ont
droit à des congés limités.
Après ces 5 ans de service réel sous les armes, ces
militaires sont placés en congé illimité, et toujours appartenant à leurs
régiments, parce qu’il peut survenir quelque éventualité qui oblige à les
rappeler à leurs corps ; mais si pendant cette année de congé illimité ils ne
sont pas rappelés, ils passent de droit à la réserve. Ainsi, la réserve se
compose donc des deux plus anciennes classes de miliciens. Ceux qui en font
partie ne seront astreints qu’à 15 jours de service pendant le mois de
septembre et au bout des 10 ans accomplis, ils obtiennent leur congé définitif.
Le gouvernement a cru allier la justice avec la
prudence que commande la défense du pays, en n’accordant des congés définitifs
qu’après 10 ans de service, et j’ai eu l’honneur de vous en exposer les motifs.
En faisant l’application de
ce système à l’état de choses actuel, et pour en bien faire comprendre le
résultat, les miliciens de la classe de 1826 vont recevoir leur congé définitif
et absolu ; la réserve se composera des classes de 1827 et 1828 ; la classe de
1829 sera mise en congé illimité ; les miliciens des quatre classes de 1830,
1831, 1832 et 1833 resteront sous les drapeaux, et celle de 1834 y sera appelée
au mois d’avril prochain. La classe de 1835 restera dans ses foyers jusqu’à
1837, et la classe à lever en 1836 y restera jusqu’en 1838, à moins que des
circonstances extraordinaires n’obligent le gouvernement à anticiper l’époque
fixée pour leur appel sous les armes.
Ce système me paraît devoir concilier tous les
suffrages, et j’espère que l’expérience en démontrera les avantages.
Je persiste, d’ailleurs, à soutenir que l’arrêté
relatif à l’organisation de la réserve en régiments est conforme à l’esprit et
au texte même de la loi du 4 juillet 1832, qui a institué la réserve de
l’armée, qu’elle a fixée à 30,000 hommes, et qu’elle a autorisé de garder sous
les armes jusqu’à la paix.
M.
Gendebien. - La question soulevée ne me paraît pas pouvoir amener une
solution, sans une longue discussion à laquelle nous n’avons pas maintenant le
temps de nous livrer.
Pour moi, je persiste à croire que le gouvernement
a l’intention de substituer le régime prussien au régime constitutionnel belge.
Je demande que l’on vote la loi du contingent, dont
tout le monde reconnaît la nécessité, mais qu’on vote sans rien préjuger sur la
question que j’ai soulevée, et en se réservant d’y revenir quand il s’agira du
budget de la guerre.
M. Frison. -
Messieurs, à propos de la loi sur le contingent de l’armée, je me permettrai de
demander à M le ministre de l’intérieur s’il a donné des instructions pour le
mode à suivre dans la délivrance des certificats d’exemption, que les membres
délégués des conseils de régence sont appelés à délivrer prochainement ? Il est
à remarquer que les fonctionnaires chargés de cette tâche se trouvent dans la
position la plus fâcheuse et la plus embarrassante,
La garde civique se
trouvant démobilisée, aura-t-on égard, dans certains cas, pour exempter un
milicien, au remplaçant que son frère aura mis dans la garde civique ?
La question que j’élève est grave, messieurs, et l’on
aurait évité la fausse position où l’on a placé les administrateurs chargés de
la délivrance des certificats, si l’on avait fait passer les opérations de la
milice avant celles de la garde civique ; cette marche était la plus
rationnelle, puisqu’il fallait prendre en considération le service obligé de la
milice avant le service éventuel actif de la garde civique ; et il était plus
juste d’exempter un garde civique pour le service de son frère dans la milice
que d’adopter le mode contraire. Toutes les administrations des provinces où la
garde civique a été mobilisée se trouvent dans l’embarras que je viens de
signaler.
Je désire que M. le ministre veuille bien répondre
à ma question.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Je puis informer l’honorable membre que
des instructions ont été adressées aux gouverneurs pour l’exécution de la loi.
- La chambre passe au vote des 3 articles du projet
; ils sont ainsi conçus :
« Art. 1er. Le contingent de l’armée sur le
pied de guerre, pour 1836, est fixé à 110.000 hommes. »
« Art. 2. Le contingent de la levée de 1836
est fixé à un maximum de 12,000 hommes, qui sont mis à la disposition du
gouvernement. »
« Art. 3. La présente loi sera obligatoire le
1er janvier 1836. »
Il est procédé à l’appel nominal sur l’ensemble du
projet. Voici le résultat du vote :
68 membres sont présents.
2 s’abstiennent.
66 prennent part au vote.
65 votent pour.
1 (M. Jadot) vote contre.
La chambre adopte.
M. le président. -
Je prie MM. Gendebien et Seron qui se sont abstenus de vouloir bien,
conformément au règlement, en énoncer les motifs.
M. Gendebien. -
Je n’ai pas cru devoir voter contre la loi, parce qu’elle est indispensable. Je
me suis abstenu parce que je doute si dans l’exécution elle ne violera pas la
constitution.
M. Seron. - Je ne
croyais pas que la loi fût mise à l’ordre du jour ; et je n’ai pas examiné la
question de savoir si l’armée devait rester ou non sur le pied de guerre. Si la
discussion avait été longue, elle m’aurait peut-être déterminé à voter pour la
loi. Mais à peine y a-t-il eu une discussion, et cette discussion n’a rien
éclairci. Dès lors je suis resté dans le doute ; j’ai donc dû m’abstenir.
PROJET DE LOI RELATIF A
M.
le président. - La discussion est ouverte sur le projet de loi relatif
à la confection des budgets provinciaux.
M. Seron dépose un amendement tendant à ce que les
budgets provinciaux ne contiennent que les dépenses des six premiers mois de
l’année 1836.
M. Seron. -
J’exposerai mes motifs en deux mots : j’ai présenté mon amendement comme moyen
d’avoir la loi provinciale cette année. Voilà tous mes motifs, je n’en ai pas
d’autres.
M. Legrelle. -
Je ne ferai qu’une seule observation sur l’amendement présenté, c’est que son exécution
est impossible. Il y a des dépenses que l’on ne peut diviser par semestres,
telles que celles pour les canaux et les routes.
M.
Seron. - Je ne connais qu’une espèce de dépense indivisible : par
exemple, dans le budget des communes, l’abonnement au Journal officiel, les registres de l’état-civil.
Pour ce qui est des
réparations et constructions de routes, l’on peut fort bien payer une partie
des frais sur les allocations du premier semestre, l’autre partie sur celles du
second. Il ne suit pas, de ce qu’une dépense n’est admise que pour la moitié,
que l’on n’en doive pas admettre la deuxième. Il me semble que les budgets
peuvent fort bien être faits pour 6 mois. Vous venez d’adopter pour le
département de la guerre une loi qui n’autorise des dépenses que pour un mois ;
moi, je donne six mois pour les budgets de provinces, je donne de la marge.
M.
F. de Mérode. - Je ne vois pas l’avantage que nous aurons à avoir des
budgets provinciaux pour 6 mois ; c’est pour obtenir plus tôt la loi
provinciale. Mais le gouvernement ne se refuse pas à donner cette loi, il ne
s’est pas mis en opposition avec le vote de la chambre. Je ne conçois pas
comment cela pourra servir dans l’intérêt de la loi provinciale. L’amendement
ne servira qu’à jeter de la confusion dans la comptabilité provinciale. Il
faudra recommencer au bout de six mois. La loi provinciale n’y gagnera pas la
moindre chose.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Je dois m’opposer à la proposition de
l’honorable M. Seron. Tout le
monde comprend les grandes difficultés de la confection d’un budget de six mois
pour les recettes et dépenses ; je m’opposerai également aux motifs qu’il a
allégués. Je crois qu’il n’est nullement nécessaire de recourir au moyen qu’il
propose pour avoir la loi provinciale ; j’espère que cette année la loi
communale et la loi provinciale seront votées, à la satisfaction du pays et de
commun accord avec les trois branches du pouvoir législatif.
M. Dubus. - Je
partage entièrement les motifs de l’amendement proposé par l’honorable M. Seron. M. le ministre croit que ses
motifs ne sont pas fondés ; il a l’espoir que le pays sera doté des lois
provinciale et communale dans le courant de l’année ; je ne partage pas du tout
cet espoir, si j’en dois juger de ce qui est arrivé.
Je rappellerai à la chambre
qu’à la fin de l’année
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je ne pense pas que, parce qu’il aura plu à un membre de dire que la loi
provinciale reviendra à la chambre, l’assemblée doive voir dans ces paroles les
intentions réelles du sénat. Je ne crois pas que la mesure proposée soit de
nature à activer les travaux importants de l’organisation provinciale et
communale. C’est surtout par une harmonie constante entre les pouvoirs de
l’Etat que l’on doit arriver à ce but, et ce serait provoquer des mesures de
réaction que de prendre l’initiative à cet égard. En ce qui concerne la
difficulté de diviser par semestre les dépenses provinciales, chacun
l’appréciera : autant dire que l’on fera des budgets pour 15 jours ou pour un
mois. Tout repose dans l’administration sur un budget annal. C’est un usage
consacré, je ne crois pas que ce soit le moment de s’en départir.
M. Dumortier. -
J’appuie de tous mes moyens l’amendement de l’honorable M. Seron ; il n’est pas
vrai que l’on ne puisse pas faire un budget de 6 mois. Ce n’est pas dans une
séance où nous venons de voter un budget d’un mois que l’on peut présenter une
pareille objection. M. le ministre de l’intérieur dit qu’il faut qu’une bonne
harmonie règne entre les trois branches du pouvoir législatif ; je suis
d’accord avec lui sur ce point. Mais, pour y arriver, faut-il que nous oublions
que nous laissons le pays dans un état de souffrance ; que nous perpétuions les
lacunes qui existent dans les cours et tribunaux, parce que l’on ne peut
pourvoir aux places vacantes de présidents et conseillers sans l’organisation
provinciale. Pour que l’harmonie règne entre les trois branches du pouvoir
législatif, il faut qu’elles remplissent leurs mandats. Une branche ne remplit
pas son mandat lorsqu’elle laisse dans l’oubli une loi organique exigée par la
constitution.
Je sais que l’on viendra dire que nous ne pouvons
critiquer ce qui se passe dans une autre enceinte. Je ne partage pas cet avis.
Je vous rappellerai ce qui s’est passé à la chambre des communes à l’occasion
du rejet du corporation-bill (loi municipale) par la chambre des lords. On
agita dans la chambre basse la question de savoir s’il ne convenait pas de
refuser les subsides. Cependant, il ne s’agissait pas dans ce cas de censurer
la conduite du gouvernement, mais bien celui de la chambre des lords. Dans les
gouvernements représentatifs tous les pouvoirs se contrôlent. Le sénat contrôle
la chambre des représentants en rejetant les lois qu’elle lui envoie. Le
pouvoir exécutif contrôle les deux branches du pouvoir législatif en ne
sanctionnant pas les lois. La chambre des représentants doit avoir aussi ses
moyens de contrôle.
Le moyen présenté par l’honorable M. Seron n’a rien
de violent. Il me semble que personne ne pourra se plaindre. C’est un simple vœu.
Nous devons exprimer l’impatience du pays qui attend vivement la loi
provinciale.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Et la communale.
M.
Dumortier. - Au moins on peut attendre l’organisation communale, parce
que celle qui existe actuellement est en harmonie avec les principes de la
révolution.
Si je voulais prendre quelqu’un à témoin, ce serait
M. le ministre de l’intérieur : alors qu’il était rapporteur du projet de loi d’organisation
provinciale, il a dit dans son rapport, et cela dans les termes les plus exprès,
que l’Etat est en souffrance, qu’il est nécessaire de sortir de cet état de
souffrance. Il déplorait que le pays n’eût pas d’organisation provinciale. Il y
a 8 ans qu’il disait cela. Nous sommes aujourd’hui dans la même position.
Prouvons à l’assemblée qui arrête l’organisation provinciale, par le vote de
budgets de six mois, que nous déplorons comme M. le ministre de l’intérieur
l’état de souffrance où se trouve le pays.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Je remercie l’honorable préopinant de
m’avoir fourni l’occasion de m’expliquer sur le rapport de la loi provinciale.
Déjà la presse a tiré parti de mes paroles pour me trouver en contradiction
avec moi-même. Que l’on veuille bien se rappeler que lorsqu’il fut question
dans cette chambre de la priorité à donner à la loi communale sur la loi
provinciale, je fus du nombre de ceux qui votèrent pour cette priorité. Si nous
avions eu le rapport de la loi communale, comme nous devions nous y attendre,
elle aurait été votée avant la loi provinciale.
Je ferai à cette assemblée une observation qui, je
le crois, mérite toute son attention. Si l’on adoptait l’amendement de M.
Seron, surtout après les derniers développements, l’on donnerait au sénat lieu
de croire que la chambre n’a pas envie de voter la loi communale. Cependant la
constitution prescrit aussi bien cette organisation que l’autre. L’argument
pourrait donc être rétorqué victorieusement.
L’honorable préopinant a
dit que nous n’avons pas besoin de l’organisation communale. Ce n’est pas la
première fois que l’on a manifesté cette opinion dans cette enceinte. Je crois
que nous avons besoin de l’organisation communale prescrite par le congrès,
comme de l’organisation provinciale. Le pays attend les deux lois avec une
égale impatience.
L’on a fait remarquer, quand nous avons manifesté
l’espoir d’obtenir les deux lois l’année prochaine, que nous avions dit la même
chose en 1834. Je ferai remarquer que la discussion approfondie qui a déjà eu
lieu de la loi communale aplanira singulièrement les difficultés de la
discussion ultérieure.
Je ne pense pas que l’on doive s’attendre à des
débats aussi longs. Ainsi rien ne s’oppose à ce que l’organisation communale et
provinciale ne soit mise à exécution dans le courant de l’année.
M.
Lejeune, rapporteur. - Votre commission chargée d’examiner le projet de
loi dont la discussion nous occupe, a été unanime pour émettre le vœu que la
loi provinciale puisse être mise en vigueur dans le courant de l’année 1836.
Elle a examiné la question de savoir s’il était possible d’introduire dans la
loi quelques modifications, afin d’engager le sénat à discuter la loi provinciale
; si l’on ne pourrait pas réduire les dépenses au strict nécessaire, ou, s’il
résulterait des inconvénients graves de la fixation des budgets pour le premier
semestre seulement. Votre commission a été unanime pour ne point introduire de
modifications dans le projet soumis à son examen, parce qu’elle a pensé
qu’elles n’auraient pas le résultat tant désiré et tant de fois exprimé dans
cette chambre. Elles n’auraient pour résultat que de faire souffrir encore les
provinces qui souffrent déjà tant de l’absence de la loi provinciale. Elle a
donc cru devoir admettre le projet tel qu’il a été présenté. J’ai donné ces
explications, messieurs, pour que vous sachiez que votre commission s’est
occupée de la question soulevée par l’amendement de l’honorable M. Seron.
M. Dumortier. -
M. le ministre de l’intérieur a dit que l’on pouvait inférer de mes paroles que
nous ne voulons pas de la loi communale. Il a ajouté que j’avais manifesté
cette opinion en plusieurs circonstances. C’est dénaturer ma pensée que de me
prêter celle-là. J’ai dit que nous avons une organisation communale en harmonie
avec la constitution, décrétée par le pouvoir révolutionnaire. C’est un fait
incontestable. Loin de moi de repousser l’organisation communale ; mais je la
veux tout autre que vous l’entendez. Si l’on avait voulu organiser les communes
sans enlever au peuple les libertés qu’il a conquises au prix de son sang,
j’aurais été le premier à y donner mon adhésion. Mais chaque fois que l’on
voudra enlever au peuple ses libertés, j’élèverai la voix pour m’y opposer.
Mais, messieurs, voulez-vous une autre preuve de la
nécessité d’adopter l’amendement de l’honorable M. Seron ? Voyez ce qui s’est
passé en France dans une circonstance analogue. Voilà 5 ans que la révolution
de juillet a été faite. La loi d’attributions municipales n’est pas encore en
vigueur parce que les deux chambres n’ont pu s’entendre. Pouvez-vous prévoir le
jour où dans notre pays les deux branches du pouvoir législatif s’entendront
sur la question d’organisation provinciale ? Cependant nous serons obligés de
maintenir dans leurs fonctions des députations d’états provinciaux dont le
mandat est expiré depuis longtemps, des corps délégués par des corporations qui
n’existent plus depuis que la révolution a aboli toute distinction d’ordres.
Les états provinciaux sont sans aucune espèce de mandat. Il n’en pas de même
des administrations communales. Sans doute il y a quelques vices dans leur
organisation. Mais au moins elle est régulière. Elle appartient à un ordre
d’institutions éclos de la révolution.
L’absence de l’organisation provinciale arrête la
marche de l’Etat. C’est par suite de cette absence que nous sommes obligés de
voter des sections nouvelles dans les tribunaux et que nous grevons le budget
de nouvelles dépenses.
Il n’y a qu’un seul moyen d’obtenir promptement la
loi provinciale. C’est celui que propose l’honorable M. Seron.
On croit qu’il suffit d’exprimer le vœu que cette
loi soit bientôt votée par le sénat.
Mais voilà trop longtemps que nous avons clairement
manifesté ce désir, sans que cela ait produit aucun effet. Aux états-généraux,
la section centrale exprimait toujours le vœu que telle chose arrivât, que
telle réforme eût lieu. C’était une simple formule qui n’empêchait pas le gouvernement
de persévérer dans ses voies. Il en arrivera de même aujourd’hui. Je vous le
prédis, vous n’aurez pas de loi provinciale dans le courant de l’année
prochaine.
M. le ministre de
l’intérieur, je le répète, avait reconnu, lorsqu’il était rapporteur de la loi
provinciale, tous les inconvénients qui résultaient pour le pays de l’absence
de cette loi. Il reconnaissait que les députations provinciales n’avaient plus
d’existence légale. Je m’empare des paroles qu’il a prononcées dans la séance
du 18 novembre 1833 pour demander qu’on n’accorde à des corps qui n’ont plus
d’existence légale que le pouvoir qu’il est strictement nécessaire de leur
accorder. Pourquoi ne pourrions-nous avoir des budgets provinciaux de 6 mois ?
Nous avons bien fait un budget de la guerre pour six mois. C’est même ce qui a
été cause de la dissolution de la chambre sous l’ancien ministère. S’il y a
quelque inconvénient à n’avoir que des budgets provinciaux semestriels, il sera
toujours moins grand que celui qui résulte de l’absence de toute organisation
provinciale.
C’est pour nous un devoir
de voter en faveur de la proposition de l’honorable M. Seron.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - J’aurais désiré que l’honorable membre qui
s’attache à me mettre en contradiction avec moi-même eût bien voulu, comme je
l’en avais prié, rappeler ce que j’ai dit lors de la discussion de la question
de priorité des deux lois communale et provinciale. Je persiste dans l’opinion
que j’émis alors. C’est parce que j’y persiste que je demande que la chambre
n’adopte point l’amendement de l’honorable M. Seron.
M. Gendebien. -
M. le ministre de l’intérieur déclare qu’il persiste dans son opinion. Mais
depuis trois ans, il s’est exprimé assez positivement sur la nécessité
d’obtenir la loi communale. Comment se fait-il qu’en sa qualité de ministre il
n’ait jamais fait part au sénat de son opinion, qu’il n’ait jamais fait
comprendre non plus à cette assemblée qu’il était urgent de pourvoir à
l’organisation provinciale ?
- L’amendement de M. Seron est mis aux voix ; il
n’est pas adopté.
Le projet de loi est mis aux voix par appel
nominal.
71 membres répondent à l’appel.
64 adoptent.
7 rejettent.
En conséquence la loi est adoptée. Elle sera
transmise au sénat.
FIXATION DE L’ORDRE DES TRAVAUX DE
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Je proposerai à la chambre de s’occuper
immédiatement de la loi sur les péages. L’on ne propose qu’une prolongation de
la loi, et aucun abus n’ayant été signale, la chambre ne se refusera pas sans
doute à l’accorder.
M. Dumortier. -
L’honorable M. Rogier a dit que cette loi n’est pas urgente. Je suis d’avis de
ne pas la voter dans ce moment. Quant à moi, j’aurai des amendements à y
proposer. Plusieurs de nos honorables collègues sont peut-être dans ce cas.
C’est une loi extrêmement importante qui se résume à permettre au gouvernement
de tout accorder en matière de péages. Je ne pense pas que l’intention de la
chambre soit de proroger indéfiniment cette faculté. Il est impossible de voter
une pareille loi vers la fin d’une séance.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Si vous ne vous occupez pas en ce moment de la loi des péages, il ne faut pas
croire qu’elle sera ajournée pour quinze jours seulement. Elle le sera pour six
mois. En effet, elle ne pourra passer qu’après les budgets, la loi communale,
la loi sur le transit, etc. dans l’ordre de vos discussions. Je vous ferai
remarquer que si vous laissez tomber, sans le renouveler, le terme de la loi,
vous aurez à recommencer la discussion sur nouveaux frais. Vous priverez,
pendant un espace de temps trop long, le pays de nouvelles communications qui
pourraient être accordées par voie de concession, dans un moment où l’on paraît
disposé à accorder des fonds pour de nouveaux travaux publics.
M. Dumortier. -
Je proposé de discuter immédiatement la loi sur les os.
M.
Pirmez. - Je crois qu’il y aurait le plus grand inconvénient à ne pas
autoriser le gouvernement à accorder des concessions. Il y a plusieurs demandes
sur lesquelles il importe que le gouvernement statue le plus tôt possible. Je
propose donc de discuter immédiatement la loi sur les péages. Si l’on a des
amendements à présenter, qu’on les propose ; nous ne devons pas reculer devant
la discussion, par la crainte qu’elle n’offre quelques difficultés.
Quant à la loi sur les os, je désirerais qu’on
différât jusqu’au 1er janvier 1837.
M. le président. - M. Gendebien présente la proposition
suivante :
« Les articles de la loi du 25 mai 1834,
portant des modifications au droit d’entrée et de transit des os, continueront
d’avoir force obligatoire jusqu’à disposition ultérieure.
- La chambre décide la priorité en faveur de la
discussion de la loi sur les péages. En conséquence, la discussion est ouverte
sur l’ensemble de cette loi.
PROJET DE LOI RELATIF AU RENOUVELLEMENT DES CONCESSIONS DE PEAGES
M. Rogier. - Je
crois comme M. le ministre de l’intérieur que la loi en discussion ne pourrait
être ajournée pendant six mois, sans compromettre l’avenir des nouvelles
communications qui vont s’ouvrir dans notre pays.
En disant que l’on pourrait ajourner la discussion
de cette loi, j’entendais qu’elle eût lieu, dans tous les cas, dans la première
quinzaine de janvier.
Je suis le premier à demander que la loi soit continuée.
Je ne demande pas mieux que de la voter immédiatement. Mais je demanderai à M.
le ministre de l’intérieur une explication sur ses conséquences probables.
Vous vous rappellerez que la loi du 1er mai 1834
décrète l’établissement d’un système de chemins de fer construits aux frais du
gouvernement, ayant pour point central Malines, et se dirigeant à l’est, vers
la frontière de Prusse, par Louvain, Liège et Verviers, au nord par Anvers, à
l’ouest sur Ostende, par Termonde, Gand et Bruges, au midi sur Bruxelles et
vers la frontière de France, par le Hainaut.
Cependant, d’après les révélations qui ont été
faites, il paraîtrait que l’intention du gouvernement serait d’accorder des
concessions d’embranchements par le Hainaut vers
Nous avons vu, il y a quelques mois, deux
publications établissant une enquête sur deux projets de routes vers
Je demande si le gouvernement s’est occupé pour son
propre compte de la rédaction du projet de route en fer vers
La chambre, après une longue et mémorable
discussion, s’est prononcée pour l’exécution par l’Etat d’un système complet de
routes en fer. Sans exclure absolument le système des concessions, elle a voulu
attribuer à l’Etat l’exécution des routes considérées comme nationales, des
grandes voies de communication ; la loi elle-même a indiqué quelles devaient
être ces voies nationales.
Je crois qu’après la première expérience qui a été
faite, il serait dangereux pour l’Etat d’abandonner à une association
particulière une partie du système, et une partie des plus productives ; car,
remarquez que l’intérêt particulier s’entend à merveille à choisir ce qui doit
lui rapporter le plus. Je suppose que l’on abandonne à la banque l’exécution
d’une route en fer de Gand sur Lille, je crois que cet embranchement sera très
profitable pour la banque. Mais par cela même qu’il sera très profitable, je
crois que le gouvernement doit s’en réserver, ou au moins examiner mûrement
cette question.
Il importe de savoir si le
gouvernement se propose d’accorder à une société concessionnaire l’exécution de
la route en fer vers
Cette concession est demandée, sinon par la banque,
du moins par une des sociétés écloses en son sein ; c’est un des nombreux
enfants de cette providence. (On rit.)
Quant à moi, j’applaudis aux efforts faits par
toute espèce de société, pour marcher dans la voie du progrès et de la
prospérité ; mais je veux que le gouvernement suive aussi cette voie ; je ne
veux pas qu’il se laisse successivement enlever les avantages qu’il peut
retirer de sa position. Nous lui avons mis entre les mains un grand moyen
d’assurer les progrès de la civilisation, lorsque nous lui avons confié
l’exécution du système des chemins de fer. J’espère qu’on ne renoncera à aucun
des avantages garantis par la loi du 1er mai 1834.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Messieurs, lorsqu’à l’ouverture de la
session, j’ai fait connaître aux chambres le projet qu’avait la société
générale de demander la concession d’une route en fer de Bruxelles à Paris,
j’ai dit en même temps que ce projet (si tant était que le gouvernement fût
d’accord avec la société générale) devrait faire l’objet d’une loi, attendu que
la loi du 1er mai
J’ajouterai que nonobstant
les dispositions de la loi, je croyais qu’il était de l’intérêt du pays
d’accéder à la proposition de la société générale de faire les études
préliminaires et de présenter au gouvernement un projet de demande en
concession. Lorsque le gouvernement aura reçu les propositions de la société
générale, il sera à même de se prononcer sur la question de leur plus ou moins
d’utilité. Dans tous les cas, les frais d’étude de cette route en fer seront à
la charge de la société générale. J’ajouterai encore qu’il ne pouvait résulter
pour le gouvernement que des avantages de cette manière d’opérer, attendu que
si le gouvernement et la société générale ne pouvaient se mettre d’accord, les
études faites par les ingénieurs du gouvernement serviraient au gouvernement
pour l’exécution du projet aux frais de l’Etat. De cette manière, tous les
intérêts sont, je crois, garantis.
J’ai pensé que s’il était une question sur laquelle
on doit appeler les investigations de la publicité, c’était sans aucun doute
celle-ci.
M.
Rogier. - Je vois avec plaisir que les études faites par les ingénieurs
de l’Etat pour le compte de la société générale profiteront au gouvernement,
dans le cas ou il ne se mettrait pas d’accord avec celle-ci.
Mais je voudrais que M. le ministre de l’intérieur déclarât
que l’exécution de projets de routes en fer qui ne sont pas énoncés dans la loi
du 1er, comme les deux projets de route de Gand vers Lille, ne sera pas confiée
à une société concessionnaire sans l’intervention de la législature. Une telle
déclaration me semble nécessaire pour rassurer la chambre et le pays contre la
crainte de la mise en concession de routes en fer ; car la grande majorité du
pays a pris goût à l’exécution des routes en fer par l’Etat.
Je m’abstiendrai de présenter un amendement, quant
à ces deux routes ; car j’attends de M. le ministre de t’intérieur qu’il
déclare qu’il n’accordera pas à cet égard de concession sans intervention de la
législature.
M.
Devaux. - Le danger de la loi actuelle me paraît être celui-ci : les
embranchements les plus productifs des routes en fer seront exécutés par des
sociétés concessionnaires ; les embranchements les moins productifs resteront
pour le compte de l’Etat. Si au contraire tout le système des chemins de fer
est exécuté par l’Etat, telle partie qui a un excédant, le fournit pour une
autre partie qui ne peut subvenir aux frais.
Ainsi par exemple, les Flandres et le Hainaut, qui
auraient un excédant, suppléeraient aux dépenses pour le Limbourg et le
Luxembourg. Si au contraire vous laissez exploiter par l’intérêt particulier
les meilleures parties du chemin de fer, comme les péages sur les routes en fer
faites par les particuliers seront plus élevés que sur les parties construites
par le gouvernement, il en résultera que pour satisfaire aux plaintes
qu’excitera la différence des prix, vous serez obligés d’acheter à un très haut
prix, au double, peut-être, de ce qu’elles auront coûté, les parties du chemin
de fer livrées à l’exploitation particulière.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Malgré ce que vient de dire l’honorable
préopinant, je crois que le gouvernement a fait acte de prudence, je dirai même
d’intérêt général, en accédant aux propositions faites par la société générale
et en lui prêtant le secours de quelques ingénieurs pour la formation de
projets dont elle se propose de demander la concession. En effet, messieurs, il
est important de remarquer qu’il ne s’agit pas seulement du chemin de fer de
Bruxelles à la frontière de France, mais bien de la route de Bruxelles à Paris,
et qu’il est naturel que la société générale qui se propose de demander cette
concession ait des hommes de confiance qui puissent s’aboucher avec les
ingénieurs français. Que l’on ne croie pas que le gouvernement ait mis à la
disposition de la banque des ingénieurs sans aucune espèce de conditions. La
première, c’est que les ingénieurs resteraient en correspondance directe avec
le gouvernement pour la partie des travaux exécutés en Belgique ; que le
gouvernement en recevrait les plans au fur et à mesure de leur avancement.
J’ajouterai qu’aucune indemnité n’a été stipulée en faveur de la société
générale ; que même une stipulation contraire a été faite. Il était donc
impossible de se montrer plus jaloux des intérêts de l’Etat. L’on a signalé un
danger qui résulterait de la loi des péages ; le gouvernement sera engagé à
accorder successivement des routes partielles qui en définitive constitueront
une route en fer vers la frontière de France, de manière que la construction
décrétée par la loi deviendrait onéreuse.
Je crois que l’on peut accorder au gouvernement
assez de prévoyance, assez d’entente des intérêts du pays pour supposer qu’il
commencera par déterminer le tracé du chemin de fer, dont la loi ordonne la
construction aux frais du trésor, avant d’accorder des concessions qui
pourraient compromettre l’intérêt de l’Etat.
Un des honorables
préopinants s’est élevé contre le danger des concessions de chemins de fer, et
a demandé pourquoi on n’adoptait pas pour ces communications les mêmes
principes que pour les routes pavées, et pourquoi l’on n’attendrait pas, pour
continuer le système de chemins de fer, qu’il y eût des excédants sur les
parties dont la loi ordonne la construction ? Voyez où cela nous mènerait ;
autant vaudrait dire que toutes les provinces qui ne sont pas appelées à jouir
des bénéfices du système de chemins de fer se trouveront privées de l’espoir de
les obtenir aussi longtemps qu’il n’y aura pas d’excédants.
Ce qui est surtout utile pour
En ce qui concerne les péages, il s’agira de les
établir de la manière la moins onéreuse pour le trésor. A cet égard nous y
apporterons toute l’attention possible.
M. Desmet. - J’ai
pris la parole dans le seul but de ne pas la laisser exister un fait erroné que
l’honorable M. Rogier vient d’avancer, quand il a dit que tout le pays était
satisfait de la manière qu’étaient exécutés les travaux de la section du chemin
de fer entre Malines et Bruxelles. Je crois que c’est tout le contraire, et
qu’on peut dire que tout le pays critique l’exécution de ces travaux, et que
partout on dit qu’ils sont très mal faits et ne seront d’aucune durée ; on ne
peut en douter quand on examine les bois qu’on a employés pour les traverses
sur lesquelles reposent les rails. Si ces travaux devaient servir de preuve de
la bonne exécution des ceux faits par le gouvernement, le procès serait bientôt
jugé, et alors on ne devrait plus revenir, comme on le fait dans ce moment, à
la discussion de cette question qui, à tant de reprises, a eu lieu dans cette
chambre, si les ouvrages exécutés par le gouvernement et à son profit doivent
avoir la préférence sur ceux faits par des sociétés particulières.
Et, pour ce qui regarde les
produits de la section de Bruxelles à Malines, certainement ils ne peuvent
servir à juger de ce que produira le chemin de fer quand il sera totalement
achevé ; on sait qu’il a été fréquenté comme un spectacle de curiosité et par
beaucoup de promeneurs, ce qu’on n’aura pas sur les autres sections et je crois
qu’on peut dire que l’importance des produits des routes en fer est encore un
problème en Belgique, et pour le transport des marchandises, il serait
difficile d’en juger, car je ne sache pas que, jusqu’à ce jour, il y en ait eu
sur le chemin de fer...
Messieurs, je crois que l’intention de l’honorable
membre qui a élevé cette discussion est de faire continuer le monopole du
gouvernement sur les routes en fer, dont le pays a été doté sous le ci-devant
ministère ; j’espère, cependant, que le ministère actuel ne marchera pas dans
la même voie, et qu’il sera plus sage et verra mieux les intérêts du pays que
de repousser les sociétés particulières dans l’exécution des travaux publics.
M.
Gendebien. - Si nous continuions ainsi la discussion, s’il faut
entendre tous les orateurs, nous n’aurons pas fini demain ; c’est précisément
parce que je comprends toute l’importance de l’objet qui nous occupe, que je
demandais qu’on ne le traitât pas actuellement. La chambre est décidée à se
séparer demain ; il est impossible de continuer la séance, car nous avons à
nous réunir à 7 heures du soir ; laissez-nous au moins le temps de dîner, et remettez
la séance à demain.
Provoquez la loi, car elle est indispensable ; mais
qu’il soit bien entendu que rien ne sera préjugé, et à la rentrée des chambres,
nous pourrons examiner toutes les questions que la loi ne manquera pas de
soulever dans cette enceinte.
M.
Dubus. - J’appuierai la motion de l’honorable préopinant ; je désire
autant que lui de mettre fin à cette discussion, pour autant que l’on ne
préjuge rien. Mais est-ce ne rien préjuger que de voter une loi qui proroge ce
terme des péages pour 4 ans ? Je ne vois pas la nécessité d’accorder un terme
aussi long. Si on y était décidé, il vaudrait mieux aborder immédiatement les
différentes questions que soulève le projet de loi. Il y en a une très
importante à examiner. Il s’agit de savoir si le pouvoir exécutif doit seul
accorder des concessions, et s’il n’appartient pas au pouvoir législatif
d’intervenir dans les concessions de chemin de fer.
C’est ainsi que le pouvoir exécutif est obligé de
s’adresser à la législature pour concéder la canalisation d’un fleuve ou d’une
rivière. Il s’agit de savoir si la concession d’un chemin de fer n’est pas un
objet d’une importance assez haute pour exiger l’intervention de la
législature.
C’est une question que je ne veux pas préjuger.
M.
le président. - L’amendement suivant vient d’être déposé par M. Legrelle :
« La loi du 19 juillet 1832 sur les concessions de
péages, est prorogée au premier janvier 1837.
« Néanmoins, jusqu’à ce qu’il y soit autrement statué
par la législature, toute concession de chemins de fer devra faire l’objet
d’une loi. »
M.
Gendebien. - Je retire ma motion d’ordre.
M. Legrelle. -
Je serais parfaitement d’accord avec le gouvernement, si j’avais l’assurance
qu’en attendant que la loi définitive fût votée, aucune concession ne sera
accordée par le gouvernement en faveur de la société générale. Car le
gouvernement a beau dire qu’il ne veut donner aucun avantage à la société
générale, personne ne croira que la société générale soit assez désintéressée,
contre son ordinaire, pour faire toutes les études, tous les travaux à ses
frais et pour le compte du gouvernement. Sauf à s’être réservé des droits à
quelque indemnité que ce soit. Cela n’est pas assez dans les habitudes de la
société générale pour qu’on puisse le croire. (On rit.) Je sais qu’elle songe souvent aux intérêts du pays mais
ici son désintéressement serait trop fort pour qu’on pût le croire. Pour moi,
je pense que la chambre doit aujourd’hui plus que jamais maintenir la loi du
1er mai 1834 ; c’est dans ce but que j’ai présenté mon amendement.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Je ne crois pas qu’il puisse rien y avoir
de plus contraire aux intérêts industriels d’un pays que ce que demande
l’honorable M. Legrelle.
Dans un moment où l’industrie, pour se déployer, a
besoin de communications rapides et économiques, on propose de décréter
qu’aucun chemin de fer ne sera fait qu’en vertu de lois spéciales ; avez-vous
donc perdu de vue la difficulté de porter des lois ? Songez au nombre
considérable de projets de loi dont votre bureau est surchargé. Dans un pareil
moment et lorsqu’on voit l’immense difficulté qu’il y a à obtenir des lois,
admettre la proposition de M. Legrelle, ce serait décider que l’industrie doit
rester stationnaire en Belgique.
J’ai dit que le système de
chemins de fer, décrété par la loi du 1er mai, resterait entier. C’est ainsi
que j’entends la loi. Le gouvernement ne peut concéder aucune des parties de ce
système, si ce n’est en vertu d’une loi nouvelle dérogeant à la loi maintenant
en vigueur. C’est ainsi que j’entends l’exécution de la loi. Mais le
gouvernement peut mettre en concession des chemins de fer de deuxième, de
troisième, de quatrième ordre ; c’est-à-dire tous ceux qui ne sont pas compris
dans la loi du 1er mai.
Demander dans tous les cas l’intervention de la
législature ce serait froisser pour longtemps l’industrie du pays et priver un
grand nombre de localités de la propriété à laquelle elles peuvent prétendre
aussi bien que les autres parties du pays, favorisées par la loi du 1er mai.
Pour moi je ne fais qu’un vœu, c’est que nous
puissions mettre en concession un grand nombre de routes en fer de deuxième,
troisième et quatrième ordre, que tout le pays puisse être sillonné de routes
en fer ; car je crois que nous serons arrivés alors au plus haut degré de
prospérité que nous puissions atteindre.
M. Meeus. - Je ne
croyais pas prendre la parole dans cette discussion ; mais les paroles de M.
Legrelle me forcent à donner quelques explications. Cet honorable membre a
trouvé à propos, en développant son amendement, de dire quelques mots assez
piquants sur le compte de la société générale. Ce que trouverais, moi, de plus
piquant, ce sera de ne pas y répondre. Mais comme je ne suis pas étranger à la
conception d’un projet d’exécution de chemins de fer de Bruxelles à Paris, par
Mons et Valenciennes, et de Gand par Lille, etc., je dois vous déclarer que la
société générale s’est adressée au gouvernement, à peu près en ces termes ; «
Nous croyons qu’il est nécessaire, dans l’intérêt des deux pays, que ces
communications s’établissent. Nous comprenons les difficultés des deux gouvernements
à faire les dépenses des premiers travaux. Nous nous offrons donc à les faire à
nos risques et périls ; c’est-à-dire que nous paierons les ingénieurs, la levée
des plans, etc. ; et si ces dépenses s’élèvent à 50, 60, 100 mille francs,
cette somme restera à la charge de la société générale. S’il convient aux deux
gouvernements de ne pas accorder la concession de cette route en fer, la
société générale n’aura droit à aucune indemnité pour les études et les travaux
préliminaires qu’elle aura fait faire. » Telles ont été les propositions
de la société générale.
Maintenant, M. le ministre de l’intérieur vient
dire que l’exécution de cette ligne de communications vers Paris ne pourrait
jamais être concédée qu’avec l’assentiment de la législature. Cela ne suffit-il
pas pour calmer les craintes exprimées par l’honorable M. Rogier !
Quant à l’amendement de
l’honorable M. Legrelle, comme l’a fort bien dit M. le ministre de l’intérieur,
il ne tend à rien moins qu’à ruiner l’industrie et le commerce du pays. Je
crois que vous ne devez pas hésiter à le rejeter. Il ne vaut vraiment pas
l’honneur d’une discussion. Comment, lorsque de tous côtés s’élèvent des
demandes de concessions de routes en fer dans l’intérêt d’industries locales,
dans l’intérêt de l’industrie charbonnière, pour activer l’exploitation des
hauts-fourneaux vous iriez paralyser l’industrie et le commerce en repoussant
ces demandes, vous lieriez le gouvernement de telle manière qu’il ne pourrait
plus concéder la construction d’un chemin de fer ? Ce serait, je le répète, la
ruine de l’industrie. Il suffit, pour faire juger l’amendement de M. Legrelle,
de dire que tel serait son résultat.
Plusieurs
membres. - La clôture !
M.
Pirmez. - Je viens appuyer l’opinion émise par M. le ministre de
l’intérieur et M. Meeus. Je
crois comme eux que l’amendement de M. Legrelle serait la ruine de l’industrie.
(L’orateur
continue de parler au milieu du bruit ; ses paroles ne parviennent pas jusqu’à
nous.)
Un grand
nombre de voix. - La clôture !
M. Dubus. - Je
demande à présenter une observation ; trois ou quatre orateurs viennent de
parler dans le même sens, on doit pouvoir leur répondre ; je ne dirai
d’ailleurs que fort peu de mots.
M. le ministre de l’intérieur admet en théorie
qu’il y a des chemins de fer de premier ordre, dont la concession ne peut avoir
lieu qu’en vertu d’une loi ; il ajoute qu’il n’en est pas de même pour ceux de
deuxième, de troisième et même de quatrième ordre ; car j’ai entendu tout cela
dans les observations. Mais quel moyen y a-t-il de reconnaître si un chemin de
fer est de deuxième, de troisième ou de quatrième classe ?
On reconnaît qu’il y a des
concessions qui doivent être accordées par le pouvoir législatif et d’autres
d’un ordre moins important, qui sont simplement du ressort du pouvoir exécutif.
L’on dit que la loi est urgente, et l’on ne nous
donne pas le temps de la discuter. Ce n’est pas une loi de cette importance,
une loi qui accorde au gouvernement le pouvoir illimité de faire tout ce qu’il
veut en matière de concessions, que l’on peut se borner à voter sans examen.
Nous sentons qu’il ne faut pas préjuger la question, et encore une fois ne
serait-ce rien préjuger que d’accorder la loi pour le terme de 4 ans ?
Plusieurs membres quittent leurs places.
M. Rogier. - La
discussion est d’une trop haute importance pour qu’on la termine maintenant. Je
propose de la continuer ce soir.
Plusieurs
voix. - Non, demain !
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Je rappellerai à la chambre qu’il est
de toute nécessité qu’elle ne se sépare point avant qu’elle n’ait émis un vote
quelconque sur deux lois dont l’absence compromettrait une foule d’intérêts industriels.
Je veux parler de la loi des péages et de celle sur la sortie des os.
- La séance est levée à 4 heures et demie.