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Note
d’intention
Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du lundi 23 septembre 1833
Sommaire
1) Membres
absents sans congé
2) Projet de loi portant le budget du département de
l’intérieur pour l’exercice 1833. Discussion des articles. Service de
3)
Motion d’ordre relative à une prétendue agression hollandaise sur le fort et le
polder de Liefkenshoek (Evain),
situation diplomatique de
4)
Projet de loi ouvrant des crédits pour le département de la guerre, pour
l’exercice 1833 (Ernst, Evain,
(+cavalerie et ophtalmie militaire) A. Rodenbach et Evain, atteinte aux attributions religieuses des ministres
du culte et/ou liberté religieuse (de Theux, Evain, Lebeau, Jullien,
Evain, Lebeau, de
Theux, Jullien)
5) Projet de loi relatif aux crédits
supplémentaires demandés pour solder les dépenses arriérées des exercices de
1830 et 1831 du département de la guerre. Indemnités aux habitants des environs d’Anvers
pour dégâts lors du siège de la citadelle d’Anvers.
(Remarque : il n’y avait pas d’indication du nom du président dans
ce Moniteur)
(Moniteur belge n°268, du 25 septembre 1833 et Moniteur belge n°269 du
26 septembre 1833)
(Moniteur belge n°268, du 25 septembre 1833) M. Dellafaille
fait l’appel nominal à onze heures et demie.
La chambre ne se trouve en
nombre qu’à midi et quart.
MEMBRES
ABSENTS SANS CONGE
MM. Angillis, Berger, Brabant,
Coghen, Corbisier, Dams, de Behr, de Foere ; de Meer, de Mérode (W.), de
Muelenaere, de Renesse, de Robaulx, de Robiano, Desmanet, Devaux, Domis,
Dubois, Dumont, Duvivier, Fallon, Frison, Gendebien, Goblet, Lardinois, Meeus, Milcamps,
Pirson, Polfvliet, Rodenbach (C.), Smits, Teichmann, Vandenhove, Vanderbelen,
Van Hoobrouck, Vilain XIIII.
M. Dellafaille donne lecture du procès-verbal de la
séance. La rédaction en est adopté.
Discussion des articles
Chapitre
VIII - Canaux, ports et côtes, polders
M. Dubus, rapporteur. - Messieurs, votre section centrale pour
le budget de l’intérieur vient de terminer son travail sur l’amendement proposé
par M. de Theux dans la séance du 16 septembre courant. Elle m’a chargé de vous
présenter son rapport. Cet amendement est un article additionnel au chapitre
VIII, et voici comment il est conçu : « 73,000 fr. pour la réparation des
rives de
(Note du webmaster : Le Moniteur du jour rend ensuite compte de la
lecture intégrale du rapport élaboré par la section centrale chargée de
l’examen des crédits pour le département de l’intérieur en 1833. Ce rapport
n’est pas repris dans la présente version numérisée.)
M. d’Huart. - C’est moi, messieurs, qui ai demandé
l’ajournement de la proposition de l’honorable M. de Theux, parce qu’il me
semble que la manière dont elle a été présentée est tout à fait insolite, et
parce que l’affaire ne m’a pas paru suffisamment éclairée par les pièces qui
ont été produites à la section centrale.
Comment se fait-il en effet
que l’on attende l’occasion d’un budget qui se vote à la fin de l’exercice
auquel il a rapport, pour demander un crédit pour des travaux dont l’urgence
est, dit-on, telle que leur exécution ne peut être différée jusqu’à l’année
prochaine ? Comme se fait-il surtout que cette demande de crédit soit présentée
par un membre de cette chambre et non par le gouvernement lui-même, si l’objet
auquel l’allocation est destinée peut incomber, en tout ou en partie, à la
charge de l’Etat ? Le gouvernement n’aurait-il pas en effet gravement compromis
sa responsabilité en gardant le silence, si l’urgence des travaux et les faits
qu’on a allégués dans cette enceinte étaient tels qu’on les a présentés ?
Je dois vous dire, messieurs,
qu’il n’a pas été prouvé par les renseignements mis à la disposition de la
section centrale que la province ait fait des démarches près des riverains pour
obtenir qu’ils mettent la main aux réparations dont incontestablement la
majeure partie est à leur charge ; il n’a pas été prouvé non plus, et je dirai
même que rien ne l’indique, que le gouvernement ait pris vis-à-vis de la
province des mesures propres à lui faire remplir les obligations qui lui
incombent, d’après la législation existante, en cas d’insuffisance ou
d’inexécution de la part du gouvernement.
D’après l’arrêté du 17
décembre 1819,
Cela est si vrai qu’une
disposition de l’arrêté porte que les provinces seront, le cas échéant,
autorisées à établir des impositions pour suppléer au défaut de revenus de
telle rivière ou de telle autre communication.
On objecte que la province est
privée des revenus de la navigation depuis 1830, par le fait de la révolution ;
mais je répondrai à cela que les dégâts de
Messieurs, en admettant
l’amendement de M. de Theux, ce serait poser un antécédent dangereux dont les
conséquences deviendraient funestes au trésor ; vous seriez bientôt accablés de
réclamations tout aussi fondées que celle dont il s’agit ici, et je pourrais vous
citer, dès maintenant, des dégâts tout à fait analogues occasionnés par
l’Ourthe dans la province de Liége, près de Felines
et de Forchi-fossé.
Dans la province d’Anvers, il
est arrivé à diverses époques, et fréquemment depuis 1819, des dégâts considérables
aux rives du fleuve et des rivières qui s’écoulent par cette province ;
toujours les riverains ont rétabli ces désastres à leurs frais, et jamais
l’Etat n’y est intervenu. D’ailleurs, avant d’attraire celui-ci en défaut, la
province aurait dû comparaître, et ce n’eût été qu’à défaut total de moyens de
celle-ci que, conformément à l’arrêté de décembre 1819, le trésor public eût dû
suppléer.
On s’appuie sur l’urgence des
travaux ; mais, je dois le répéter, cette urgence n’est pas suffisamment
constatée : la conduite du gouvernement doit le prouver pour nous, quelles que
puissent être, d’ailleurs, les allégations, et même les rapports contraires. Il
semblerait, en effet, que cette urgence ne s’est présentée dans toute sa force
qu’à l’instant même où les honorables députés du Limbourg l’ont signalée dans
l’une de vos précédentes séances. Qu’on ne nous parle pas de la responsabilité
à laquelle nous nous exposerions en refusant le crédit demandé ; cette
responsabilité ne saurait arriver jusqu’à la législature. Les riverains, en
premier lieu ; la province ensuite ; et enfin, à la dernière extrémité, le
pouvoir exécutif, devraient seuls la
craindre. Je crois, d’ailleurs, que l’urgence ne saurait, sous un autre
rapport, nous engager à la précipitation ; car les riverains du royaume et les
provinces sauraient qu’en pareille matière l’urgence fait céder la législature,
et ils ne manqueraient pas de laisser arriver les dégâts des cours d’eau à la
dernière période pour invoquer alors près de vous l’urgence avec succès.
Messieurs,
le peu de temps que j’ai eu à ma disposition depuis que la section centrale
s’est séparée tout à l’heure, ne m’a pas permis d’étendre et de vous présenter
ici toutes les considérations que j’ai désiré vous soumettre ; mais j’espère
que j’en aurai dit assez pour vous engager à ne pas agir avec précipitation. Je
réitère en conséquence à la chambre la proposition d’ajourner pour le moment la
proposition de l’honorable M. de Theux comme n’étant pas suffisamment
justifiée, sauf à en faire, avant notre séparation, s’l y a lieu, l’objet d’un
projet de loi séparé.
J’ai d’autant plus lieu de
croire que vous accueillerez ma proposition, qu’ainsi que vient de l’avouer
l’honorable M. Dubus, les explications principales, obtenues par la section
centrale, n’avaient pas un caractère suffisamment officiel, n’étant que
verbales.
M.
Jullien. - Les
explications qui nous sont données dans le rapport, tant sur le point de fait
que sur le point de droit, doivent nous convaincre que la question a paru très
délicate à la section centrale et au rapporteur lui-même. Il ne serait pas
possible de discuter le rapport en connaissance de cause dès à présent. La
première question est de savoir si la chambre ordonnera l’impression du rapport
ou si nous le discuterons immédiatement, à cause de l’urgence. Il m’a semblé
que les conclusions du rapport tendaient à une discussion immédiate, car elle a
reconnu l’urgence des travaux à faire ; d’un autre côté, un membre a prétendu
que l’urgence n’existait pas. Dans tous les cas il s’agit de savoir si l’on
veut discuter immédiatement. Quant à moi, à moins d’admettre l’urgence des
travaux et de voter de confiance sur les explications de M. le rapporteur, il
me serait impossible de donner mon vote sur la proposition. Je pense qu’il
serait prudent d’ordonner l’impression, sauf à statuer ensuite sur
l’ajournement.
M. de Theux. - Si la motion se borne à la question du
rapport, sans rien préjuger sur l’ajournement, je n’ai aucun motif de m’y
opposer. Je suis certain que la lecture du rapport ne fera que vous convaincre
davantage de la nécessité et de l’urgence des travaux, et par suite, de
l’adoption de la proposition. Mais je m’opposerais à l’ajournement, car je ne
crains pas de dire que si vous n’adoptez pas la proposition, l’année prochaine
vous aurez à voter des fonds plus considérables pour secourir les victimes des
désastres qui seront survenus. Ce sera alors une allocation perdue, tandis
qu’aujourd’hui elle sera très profitable.
M. d’Huart. - J’ai cru devoir vous donner quelques
explications pour empêcher toute précipitation de votre part. Je vois que mon
but est atteint, puisque la chambre ordonne l’impression du rapport, et je
n’insiste pas pour l’ajournement.
Un membre a dit que je
soutenais que l’urgence des travaux n’existait pas ; j’ai seulement dit que le
silence du gouvernement et la demande tardive qui nous est faite tendaient à
faire croire que l’urgence n’était pas suffisamment démontrée. Or, comme
législateurs il faut que l’urgence d’un crédit soit démontrée pour que nous la
votions.
- La chambre ordonne
l’impression du rapport recueilli par les sténographes.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier) - Je désirerais beaucoup que la
discussion de la proposition ne retardât pas le vote du budget de l’intérieur ;
je ne verrais pas qu’il y eût un grave inconvénient à ce que la proposition de
M. de Theux devînt le sujet d’un projet de loi. (Appuyé ! appuyé !)
M. de Theux. - Si l’on ne veut qu’ajourner la
discussion du rapport de la section centrale, je n’ai aucun motif pour m’y
opposer ; que m’importe que cette proposition soit discutée demain ou
après-demain. Je voudrais que le vote sur cette proposition eût lieu avant la
fin de la semaine ; car évidemment il y a urgence dans les travaux.
- La
chambre décide que les conclusions du rapport forment un projet de loi dont la
chambre est saisie.
Là chambre décide ensuite
qu’il y aura séance mercredi à dix heures.
M. de Theux. - Je voudrais que l’on mît à l’ordre du
jour de mercredi la discussion du rapport de M. Dubus.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Il ne suivrait pas de l’adoption de
cette proposition que la discussion ne pourrait pas être remise au lendemain.
M. de Theux. - Tout ce que j’ai voulu, c’est que la
discussion ne fût pas renvoyée après le budget des finances car, en supposant
que la chambre adopte la proposition, il y aurait eu un temps précieux de
perdu.
- La proposition de M. de
Theux, ainsi expliquée est adoptée.
Chapitre XII. (devenu chapitre XIII) - Agriculture, industrie, commerce, lettres, sciences, arts, service de santé
(Motion d’ordre)
M. Legrelle. - Dans la séance d’hier, un député du Luxembourg a réclamé contre le
défaut d’insertion d une partie de son discours. Permettez-moi, messieurs, de
me plaindre d’une erreur beaucoup plus grave, en ce que plusieurs journaux
m’ont fait dire samedi soir précisément le contraire de ce que j’ai dit.
Plusieurs membres. - Adressez-vous à ces journaux eux-mêmes.
M. Legrelle. - Nous lisons dans l’Indépendant : « M. Legrelle dit que les arts
n’ont pas besoin d’être encouragés par le gouvernement, que les particuliers
les favorisent assez, etc. » Messieurs, je repousse de toutes mes force la
manière dont on a rendu compte de mes paroles : j’ai dit, et j’invoque à cet
égard le témoignage de la chambre, que ce n’était pas moi, né dans le berceau
des beaux-arts de
J’attends de l’impartialité de
MM. les journalistes la rectification de ce fait.
MOTION D’ORDRE RELATIVE À UNE PRETENDUE
AGRESSION HOLLANDAISE SUR LE FORT ET LE POLDER DE LIEFKENSHOEK
(Moniteur belge n°269 du 26 septembre 1833) M. le
ministre de la guerre (M. Evain) - Messieurs, la chambre a désiré que je donnasse quelques explications sur
la rupture de la digue du Doel. Je vais satisfaire à
la demande de l’assemblée.
Messieurs, la digue qui sépare
le polder inondé de Callooshoek de celui du Doel, préservé jusqu’à ce jour des inondations tendues par
les Hollandais à l’entrée du fort de Liefkenshoek, a été rompue dans la nuit du
20 au 21 de ce mois, et les eaux qui contenait cette digue se sont répandues
sur une partie du polder de Doel.
Dès que le général Buzen fut
prévenu de cet événement, il se hâta de se rendre au Doel,
en y dirigeant aussitôt des troupes pour arrêter les dégâts de l’inondation par
l’établissement d’une contre-digue.
Cette contre-digue a été
établie dans les journées des 21 et 22, et la coupure se trouvait entièrement
fermée hier au soir ; mais quelques centaines de bonniers de terre ont été
inondés, et les récoltes qui s’y trouvaient sont détruites ou détériorées.
Il faudra quelques jours pour
faire évacuer entièrement les eaux qui sont entrées dans le polder du Doel, et qui en ont inondé les parties les plus basses.
Tel est le résultat de cet
événement dont la cause est encore inconnue.
Le général Buzen avait
demandé, dans la journée du 21, au commandant du fort de Liefkenshoek, de ne
pas faire entrer dans l’inondation tendue à l’entour de ce fort les eaux de la
marée du jour, afin de faciliter les travaux de la contre-digue ; mais ce
commandant n’a point obtempéré à cette demande, et au lieu de tenir les écluses
fermées, il les a fait ouvrir et a fait élever les eaux de
Il a été répondu que le
commandant supérieur des forts, ne pouvant décider la question, allait demander
des ordres à
Il a été également constaté
que dans la soirée du 20 de ce mois, quelques heures avant la rupture de la
digue, les Hollandais avaient élevé les eaux de l’inondation de
J’ai ordonné de faire une
enquête pour savoir à quelle cause l’on doit attribuer ce désastre et jusqu’à
ce que les faits soient bien constatés, la chambre appréciera les motifs qui ne
me permettent pas encore d’énoncer les soupçons qu’a fait naître cet événement.
Toujours est-il constaté
aujourd’hui que le commandant du fort de Liefkenshoek s’est refusé à accéder à
la demande que lui avait adressée le général Buzen, en se fondant sur
l’obligation où il était de demander ses ordres à
Le commandant supérieur des
forts de Lillo et de Liefkenshoek, ayant demandé dans les premiers jours du
mois de juin, après la ratification de la convention de Londres du 21 mai, de
fixer de concert les limites de ces deux forts sur les digues où la garnison de
ces forts peut avoir accès, afin d’éviter les collisions qui avaient eu lieu
avec les postes de nos troupes, il fut convenu verbalement qu’il serait placé
des poteaux de limitation de part et d’autre, et la digue du DoeI (celle qui a été rompue et qui est perpendiculaire a
la grande digue de l’Escaut) se trouvait en dehors des limites assignées à la
garnison hollandaise du fort de Liefkenshoek ; ainsi elle ne devait avoir aucun
accès sur cette digue, et nos troupes, cantonnées au village du Doel, devaient tenir des stations pour le surveiller.
Cette convention conclue, nous
retirâmes une partie des troupes que nous avions sur la rive gauche de
l’Escaut, et nous ne laissâmes que des postes d’observation,.
Celui qui était cantonné au village
du Doel devait surveiller la digue dont la rupture a
eu lieu.
L’enquête fera connaître le
rapport du poste chargé de cette surveillance.
C’est au zèle et au dévouement
des cinq compagnies d’infanterie que le commandant des troupes sur la rive
gauche a pu réunir dès le matin du 21, et à l’arrivée d’une compagnie de
sapeurs-mineurs, que l’on doit le prompt établissement de la contre-digue.
Leur conduite mérite les plus
grands éloges.
Le
général Buzen a déployé la plus grande activité et a envoyé de nouvelles
troupes pour exercer la plus sévère surveillance au pourtour de l’inondation,
qui présente plus de
Il devient indispensable que
la direction des ponts et chaussées renforce ces contre-digues dans quelques
endroits pour soutenir les efforts des eaux de l’inondation pendant les mauvais
temps.
La rupture de cette digue et
l’inondation du polder du Doel qui devait s’en
suivre, n’ajoutant rien aux moyens de défense du fort de Liefkenshoek, c’est à
la malveillance seule que l’on doit l’attribuer, si la cause de cette rupture
n’est pas l’effet d’un simple accident.
C’est ce que doit faire
connaître l’enquête que j’ai ordonnée et dont le général Buzen poursuit
l’instruction afin de recueillir tous les renseignements possibles tendant à
découvrir avec certitude les auteurs de cette nouvelle violation des droits des
gens et des nations, pendant un
armistice reconnu de part et d’autre, et garanti par les puissances qui ont
stipulé la convention du 21 mai dernier.
De nouveaux rapports me sont
parvenus pendant la séance ; je m’empresserai de vous faire connaître le
résultat de l’enquête. (Bien ! bien !)
M.
Jullien. -
L’interpellation à laquelle on vient de répondre m’en rappelle une autre que
j’ai faite ; j’ai demandé si était vrai que la conférence de Londres était
dissoute ou supprimée. M. Nothomb, alors commissaire du Roi, a répondu que la
conférence n’était ni dissoute, ni séparée ; qu’elle n’était pas inerte,
qu’elle était pleine de vie ; et cependant, depuis cette époque, tous les
journaux s’accordent pour affirmer que la conférence n’existe plus, qu’elle est
séparée ou plutôt suspendue, sans qu’on puisse prévoir quand elle se réunira.
Je demanderai aujourd’hui aux ministres si le fait est vrai, et quelle
influence il peut avoir sur nos affaires. Je désirerais avoir une explication à
cet égard. Il paraît que cette suspension n’est plus un mystère pour personnel,
si ce n’est pour nous.
M. Nothomb. - Messieurs, il est très vrai que
lorsque, dans la séance du 6 de ce mois, j’ai été interpellé comme commissaire
du Roi, et il importe de se reporter à cette époque, j’ai déclaré que la
conférence n’était ni dissoute, ni séparée ; qu’elle continuait ses travaux, et
qu’elle attendait les réponses que devait lui faire le cabinet de
Quoi qu’il en soit, j’insiste
sur la différence des époques ; j’ai pu dire le 6 septembre que la conférence
était pleine de vie, conformément à l’expression de M. Jullien. Quelques
semaines se sont écoulées depuis lors, et le fait qui a motivé la suspension
des réunions de la conférence est postérieur à la séance qu’on a rappelée.
M. Dumortier. - Puisque M. le commissaire du Roi reconnaît que
la conférence a terminé ses travaux vendredi ou samedi dernier, je crois
qu’avant de voter le budget des finances, le gouvernement doit nous faire
connaître l’état de nos relations diplomatiques par suite de ce fait. Avant de
nous renvoyer dans nos foyers, nous devons connaître la situation du pays.
J’ai
toujours attaché peu d’importance à la reconnaissance de
Si notre armée ne devait
servir qu’à faire des parades à l’intérieur, mieux vaudrait n’en point avoir.
Il est temps de savoir si nous devons l’employer à maintenir notre dignité
au-dehors et à faire respecter notre territoire.
Avant le vote du budget des
finances il faut que nous sachions à quoi nous en tenir. La chambre n’est pas
assez nulle pour qu’on ne lui donne pas des éclaircissements sur les affaires
du pays avant d’en renvoyer les membres dans leurs foyers.
M. Nothomb. - Le gouvernement, comme je l’ai dit en terminant,
a besoin de connaître le résultat de la dernière réunion de la conférence, pour
savoir s’il peut, oui ou non, faire des communications à la chambre ; s’il
persiste à ne pas répondre à vos interpellations, vous apprécierez les motifs
qu’il vous exposera pour justifier son silence. C’est ce que j’ai annoncé
moi-même, et vous le voyez, j’ai été au-devant des intentions du préopinant. Le
gouvernement ne prétend pas se renfermer dans le silence d’une manière absolue
et sans dire pourquoi ; mais il est dans la nécessité, je le répète, d’attendre
de nouveaux renseignements pour savoir ce qu’il peut faire sans compromettre
les intérêts du pays.
M. Dumortier. - J’attendrai au vote du budget du ministère des
finances pour renouveler mes interpellations.
M. Ernst. - Je demanderais que la chambre délibérât d’abord sur le projet de loi
dont j’ai entretenu la chambre comme rapporteur de la commission à laquelle il
avait été renvoyé.
M. le
ministre de la guerre (M. Evain) - L’objet le plus urgent est l’ouverture du crédit pour mon département,
parce qu’au 1er octobre je ne pourrai plus ordonnancer aucun compte ; ce projet
ayant réuni l’unanimité des suffrages de la commission, je prierai M. le
président de le mettre en délibération.
M. le président. - La discussion générale est ouverte sur le projet
de loi tendant à ouvrir des crédits au département de la guerre.
M.
A. Rodenbach. - Messieurs, je dois
à la vérité de dire que sur les 66 millions portés au budget général de la
guerre, M. le ministre a fait des économies réelles de 11 millions 433,000 fr.
; je ne m’opposerai donc pas au crédit demandé ; mais, tout en allouant ce
crédit, je me plais à croire que M. le ministre introduira encore beaucoup
d’économies dans son département.
Dans la séance du 27 juin, je
lui ai demandé des économies sur les distributions des rations de fourrages
faites aux officiers supérieurs.
On a demandé l’ajournement de
ma proposition afin que les généraux pussent vendre leurs chevaux ; il me semble
qu’ils ont eu le temps de se défaire des chevaux qu’ils ne doivent point avoir,
et qu’on ne leur donne plus 6 et 8 rations de fourrages.
Je ferai encore une
observation sur le département de la guerre. Un fléau, l’ophtalmie, ait des
ravages dans notre armée, et nous avons à déplorer le sort des malheureux qui
en sont frappés, parce qu’il ont obéi à la loi sur la milice.
Si j’en
crois les journaux, on a été obligé d’en pensionner
M. le
ministre de la guerre (M. Evain) - L’ophtalmie a désolé l’armée des Pays-Bas depuis 1815 jusqu’à notre
révolution. Le gouvernement d’alors a cherché beaucoup de moyens pour obtenir
un remède à cette fatale maladie, et n’a pu rien trouver. Depuis 1830, on
croyait que la maladie avait cessé ; du moins, elle avait diminue d’intensité
et le nombre des aveugles était moins grand. Cette maladie a été constamment
l’objet de mes sollicitudes, et j’ai demandé des renseignements sur tout ce qui
concerne la vie du soldat. J’ai chargé l’officier de santé en chef de l’armée
de me donner son avis.
Il a conclu à la formation
d’une commission de santé. Il attribue la principale cause du mal aux
vêtements.
Il est très vrai qu’ayant
recueilli des renseignements près des gouverneurs militaires des provinces,
j’ai trouvé que le nombre des soldats aveugles pensionnés était de 279 pour
1830 à 1831 et le premier semestre de 1832. Depuis il y en a encore eu 141 de
pensionnés ; ainsi le nombre total des soldats frappés de cécité depuis quatre
années est de 420.
J’ai formé une commission de 4
des médecins qui n’ont pas pris part à la polémique engagée sur cet objet ; j’y
ai adjoint deux professeurs de l’université ; cette commission nous proposera
les moyens qu’elle croira les plus propres à arrêter la maladie.
La même
maladie attaque l’armée prussienne.
J’ai demandé en France des
modèles d’habillements pour les comparer aux nôtres. J’espère que nous
parviendrons, à force de recherches et de soins, à arrêter le mal qui a attaqué
beaucoup d’hommes, mais qui en attaque beaucoup moins maintenant.
M.
A. Rodenbach. - M. le ministre
veut-il aussi répondre à la question sur les fourrages ?
M. le
ministre de la guerre (M. Evain) - J’ai donné les ordres pour qu’on ne donnât les fourrages qu’aux chevaux
réellement en la possession de généraux.
M. de Theux. - A l’occasion du décès d’un officier de santé
en garnison à Tournay, des officiers de cette garnisons ont cru devoir, malgré
le curé, faire entrer le corps dans l’église, et appliqués sur le corps des
cérémonies religieuses qu’il n’appartient qu’aux ministres du culte de
célébrer.
Une pareille scène ne peut
être regardée que comme une scène de désordre. Je voudrai savoir si le ministre
a blâmé la conduite de ces officiers, et s’il a donné des ordres pour que de
pareils scandales ne se renouvelassent pas.
M. le ministre de la guerre (M. Evain) -
Ayant vu dans les journaux des détails sur les scènes dont on parle, j’ai pris
des informations ; il en est résulté que les journaux avaient beaucoup exagéré
le désordre commis. J’ai trouvé la scène très répréhensible ; en conséquence,
j’ai donné les arrêts contre ses auteurs, et je leur ai fait connaître le
mécontentement du gouvernement.
C’est parce que le clergé est
intervenu lui-même en faveur de celui qui en était le principal auteur que
l’affaire n’a pas eu d’autres suites.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Comme l’honorable député de Hasselt a
bien voulu me prévenir au commencement de la séance de la question qu’il allait
adresser au ministre de la guerre, j’ai fait prendre dans mon ministère des
renseignements sur cette scène. C’est le 22 juillet que le premier rapport m’a
été adressé. Je dois confirmer ce qu’a dit mon honorable collègue relativement
à l’exagération du récit fait par quelques journaux ; quoi qu’il en soit, j’ai
ordonné qu’on informât. Par lettre du 23 juillet, je me suis adressé à M.
l’auditeur-général, et, sous la date du 20 août, M. l’auditeur-général m’a fait
connaître que, de l’enquête à laquelle on avait procédé, il était résulté que
les faits dénoncés par M. le procureur du Roi de Tournay étaient exacts, mais
que, malgré leur extrême inconvenance, ils n’avaient pas paru rentrer dans les
dispositions du code pénal.
Si cette
opinion avait été exprimée par un magistrat du parquet civil, j’aurais pu
provoquer une instruction ultérieure et une décision de la chambre du conseil ;
mais les chambres du conseil n’existent pas dans la justice militaire.
Au surplus, le vénérable chef
du diocèse de Tournay s’est interposé avec la plus grande ardeur pour que
l’affaire n’eût pas de suites : je ne sais s’il a cédé à la crainte d’exciter
quelque scandale en poursuivant les auteurs de cette scène blâmable et en
réveillant de pénibles souvenirs, ou s’il n’a obéi qu’à l’impulsion d’une
charité vraiment évangélique, qui ne saurait surprendre ceux qui connaissent ce
respectable prélat.
Toujours est-il que, prenant
surtout en considération cette intervention bienveillante, l’autorité n’a pas
cru devoir persister, et que l’affaire en est restée là.
Si vous jetez les yeux sur le
code pénal, vous verrez au surplus que, quelque inconvenante que soit la scène
dont il vient d’être parlé, elle ne paraît pas rentrer tout à fait dans le cas
de l’art. 262 du code pénal, sur lequel on avait basé les recherches
judiciaires.
M. Jullien. - J’ai aussi une interpellation à faire au ministre. Voici le fait comme
il m’a été raconté : Une procession passait, un officier passait en même
temps ; le bedeau fait sauter violemment le schako du militaire qui ne se
découvrait pas assez vite à son gré, sans doute. L’officier a eu la prudence de
ne pas se venger immédiatement ; il a fait une plainte à ses chefs, mais
jusqu’à présent il n’y a pas été fait droit. Je demande si cet acte de violence
a été réparé. (Erratum au Moniteur n°270,
du 27 septembre 1833 : Nous avons omis de mentionner que c’est à Ypres que
le fait rapporté par M. Jullien, dans la séance de lundi dernier, a eu lieu. On
se rappelle qu’il s’agissait d’un acte de violence commis par un bedeau à
l’égard d’un officier.)
M. le ministre de la guerre (M. Evain) - Sur le rapport qui m’a été fait par le
gouverneur de 1a Flandre occidentale, j’ai pris des informations ; j’ai vu
qu’il y avait à poursuivre. et M. le procureur du Roi est instruit de
l’affaire. L’officier a été interrogé, et l’instruction continue.
M. le ministre de la justice
(M. Lebeau) -
Je ne suis pas étranger aux poursuites : comme la plainte était de la
compétence de l’autorité judiciaire civile, j’ai ordonné que des poursuites
eussent lieu sans ménagements. Si nous devons maintenir protection à la
religion, nous devons protéger de même toutes les opinions, tant qu’elles ne se
traduisent pas en actes coupables. C’est ainsi que nous entendrons toujours la
liberté de 1a religion et celle des individus.
M. de Theux. - Le but de mon interpellation a été
rempli. Je voulais obtenir la déclaration que le gouvernement ne permettait
aucune atteinte à la liberté des cultes. Comme le Moniteur avait gardé le silence sur le fait dont il s’est agi,
j’ai été bien aise de saisir l’occasion d’avoir l’explication que vous venez
d’entendre, et je me déclare satisfait.
M. Jullien. - Je ne suis pas moins satisfait que M.
de Theux. Je suis bien aise d’apprendre que des poursuites ont lieu. Reste
toujours à savoir quelles en seront les suites.
- La discussion générale est
fermée.
La chambre adopte à
l’unanimité des 53 membres présents les articles du projet de loi suivants :
« Art. 1er. Le
département de la guerre est autorisé à disposer d’une somme de 12,733,500 fr.,
à prendre sur celle à laquelle le budget de ce département a été fixé par la
loi du 19 avril dernier. »
« Art. 2. Ce nouveau
crédit et ceux qui ont été ouverts au même département par la susdite loi et
par celle du 6 juillet i833, formant ensemble la somme de 55,000,000 de francs,
seront employés au paiement des dépenses de l’exercice 1833. »
« Art. 3. La présente loi
sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. »
PROJET
DE LOI RELATIF AUX CREDITS SUPPLEMENTAIRES DEMANDES POUR SOLDER LES DEPENSES
ARRIEREES DES EXERCICES DE 1830 ET 1831 DU DEPARTEMENT DE
La chambre adopte ensuite sans
discussion à la même unanimité, le projet de loi dont voici les articles :
« Art. 1er. Le
ministre-directeur de la guerre est autorisé à disposer d’une somme de 341,345
fr, 28 c. à l’effet de payer les bois coupés pour le baraquement et le
chauffage des troupes françaises, et pour les travaux d’attaque de la citadelle
d’Anvers pendant les mois de novembre et de décembre 1832, sauf le recours du
gouvernement contre qui de droit. »
« Art. 2. Cette somme
sera prélevée sur les fonds disponibles du chap. X du budget de la guerre de
l’exercice 1833. »
La chambre adopte ensuite les
articles d’un troisième projet de loi concernant le ministère de la guerre.
N’ayant pas eu ce projet sous les yeux, nous n’avons pu suivre les
rectifications de chiffre qui y ont été faites, et qui ont décidé la chambre à
en renvoyer le vote définitif à un autre jour.
La séance est levée à trois
heures trois quarts.