(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 3)
(page 54) (PRÉSIDENCE DE M. de Gerlache)
La séance est ouverte à midi. (P. V.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, fait l'appel nominal. Quand il prononce le nom de M. Fendius, les cris : A Luxembourg avec Saxe-Weimar ! se font entendre. (E., 10 avril.)
M. le baron de Pélichy van Huerne annonce qu'une indisposition l'a empêché jusqu'à ce jour de se rendre au congrès : il sera prochainement à son poste. (C., 10 avril.)
- Pris pour notification. (P. V.)
M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il est adopté. (P. V.)
M. Claes (de Louvain) – J'ai remarqué que dans l'appel nominal, on a prononcé le nom de M. Fendius, qui est au nombre des absents ; le bruit a couru que M. Fendius est passé dans les rangs de nos ennemis, en allant se soumettre au duc de Saxe-Weimar à Luxembourg. J'ignore (page 55) si le fait est vrai, mais il me semble qu'il est de l'honneur du congrès de prendre des renseignements, pour savoir si en effet un de ses membres s'est rendu coupable d'une pareille défection. (I., 10 avril.) (Note de bas de page : Dans une lettre datée d'Eich près Luxembourg, le 10 avril. 1831, et adressée à l'Émancipation, (voyez le numéro du 25 avril.), M. Fendius a déclaré qu'il était faux qu'il se fût rendu à Luxembourg pour reconnaître l'autorité du duc de Saxe-Weimar. « La preuve en est, a-t-il ajouté, que je n'ai pas quitté un instant mon poste à Eich, près Luxembourg, où j'ai constamment rempli, et où je remplis encore dans ce moment, les fonctions de juge de paix ; que, comme tel, j'ai prêté, le 5 avril. courant, le serment prescrit au régent, et que même, dans une lettre que j'ai écrite à M. le président du congrès le 9 du même mois, je lui ai annoncé ma prochaine arrivée à Bruxelles, en m'excusant de ce que des affaires importantes m'ont empêché de le faire plus tôt. »)
M. le président – M. Claes devrait faire une proposition à ce sujet. (I., 10 avril.}
M. Forgeur – L'honorable membre n'a fait qu'une observation, et c'est, je crois, tout ce qu'il pouvait faire. En effet, avant de faire une proposition quelconque, il faudrait, ce me semble, constater le fait, et le bureau pourrait s'en charger en écrivant pour prendre des renseignements dans le Luxembourg. (I., 10 avril.)
M. le président – Le plus court sera d'écrire à M. Thorn, gouverneur de la province. (Appuyé !) (I., 10 avril.)
M. Masbourg demande un congé de huit jours. (P. V.)
- Ce congé est accordé. (P. V.)
M. le baron de Liedel de Well annonce que sous peu de jours il se rendra au sein du congrès. (I., 10 avril.)
- Pris pour notification. (P. V.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, donne lecture d'un message de M. le ministre de la justice, en date du 4 mars, contenant plusieurs requêtes pour obtenir la naturalisation ; les unes sont accompagnées de renseignements, les autres n'en contiennent aucun. (C., 10 avril.)
M. le président – Désire-t-on qu'une commission soit nommée pour examiner ces titres et pour correspondre avec les pétitionnaires ? (J. B., 10 avril.)
M. Destouvelles demande que ce soit au ministre de la justice à faire l'instruction préalable, sans préjudice de nommer une commission qui prendrait elle-même des renseignements, si elle n'était pas satisfaite des premiers. (C., 10 avril.)
M. de Robaulx et M. Van Snick soutiennent que la naturalisation ne pouvant être accordée que par une loi, c'est au corps législatif seul qu'il appartient de prendre les renseignements nécessaires. (I., 10 avril.)
M. Defacqz demande qu'une commission soit nommée au moins pour examiner les requêtes accompagnées de renseignements. (C., 10 avril.)
- Le congrès décide qu'une commission de cinq membres sera nommée par M. le président, pour examiner toutes les demandes en naturalisation, s'entourer des renseignements nécessaires et faire son rapport au congrès. (P. V.)
M. le président compose la commission de MM. Destouvelles, de Labeville. Barbanson, Le Bègue, et de Behr. (P. V.)
M. Raikem fait le rapport de la section centrale sur quatre des projets de décret présentés dans la séance du 31 mars, et qui ont pour objet :
Le premier, une déclaration de guerre à faire au roi de Hollande si, dans le délai d'un mois, il n'a renoncé à ses prétentions sur la rive gauche de l'Escaut, le Limbourg et le grand-duché de Luxembourg ;
Le deuxième, des mesures répressives pour assurer l'exécution du décret sur l'exclusion des Nassau ;
Le troisième, des poursuites judiciaires contre les auteurs ou instigateurs des scènes de pillage ou de dévastation ;
Le quatrième, la dissolution du congrès.
L'assemblée ordonne l'impression et la distribution de ce rapport. (P. V.)
Sur la proposition de M. Le Bègue, on décide que le règlement d'ordre de la chambre des comptes sera discuté demain sans avoir passé par les sections. Le président de cette cour sera invité à assister à la séance. (P. V.)
M. Serruys propose de modifier les droits (page 56) d'entrée perçus sur le poisson provenant de pêche étrangère.
- Le congrès renvoie cette proposition à l'examen d'une commission spéciale. (P. V.)
M. le président, chargé par l'assemblé de former la commission qui doit s'occuper de la proposition de M. Serruys, nomme membres de cette commission : MM. Serruys, d'Hanis van Cannart, Coppieters, Albert Cogels et le baron Beyts. (P. V.)
L'ordre du jour appelle la discussion des articles du projet de décret concernant l'emprunt de 12 millions de florins, qui ont été renvoyés à la section centrale. (I., 10 avril.)
M. Lecocq, rapporteur de la section centrale chargée d'examiner ces articles et les amendements qui s'y rapportent, présente les dispositions suivantes :
« Art. 11. Les récépissés provisoires seront échangés du 1er août prochain au 31 décembre, par les agents que désignera le pouvoir exécutif, contre des obligations du trésor de 500, de 100, de 50 de 25 et de 10 florins chacune.
« Les communes sont autorisées à réunir les récépissés provisoires des porteurs qui le désireraient ainsi, pour procéder à un seul et même échange au nom de la commune, laquelle sera alors chargée d'en compter avec les intéressés ; elle pourra délivrer à cet effet des bons au porteur.
« Les obligations du trésor sont soumises au visa de la cour des comptes ; elles sont aussi considérées comme effets au porteur.
« Les obligations du trésor porteront intérêt à 5 pour cent à partir du 1er juillet prochain.
» Art. 12. Les agents chargés des échanges sont autorisés à recevoir en espèces le supplément nécessaire pour compléter le montant d'une obligation. Si les intéressés le préfèrent, il leur sera délivré de nouveaux récépissés pour compléter le montant de ceux qui seront convertis en obligations. Ces récépissés devront, comme les autres, être convertis en obligations avant le 31 décembre prochain. » (P. V.)
- La discussion s'ouvre de suite sur les articles proposés par la section centrale. (J. B., 10 avril.)
L'assemblée adopte une addition au paragraphe 2 de l'article 10 déjà voté ; cette addition est ainsi conçue :
« Ils indiquent les cotes respectives qu'ils représentent, et ne pourront valoir que pour le montant réel de ces cotes ; ils seront échangés dans l'arrondissement où ils ont été délivrés. » (P. V.)
« Art. 11. Les récépissés provisoires seront échangés du 1er août prochain au 31 décembre, par les agents que désignera le pouvoir exécutif, contre des obligations du trésor de 500, de 100, de 50, de 25 et de 10 florins chacune.
« Les communes sont autorisées à réunir les récépissés provisoires des porteurs, qui le désireraient ainsi, pour procéder à un seul et même échange au nom de la commune, laquelle sera alors chargée d'en compter avec les intéressés ; elle pourra délivrer à cet effet des bons au porteur.
« Les obligations du trésor sont soumises au visa de la cour des comptes ; elles sont aussi considérées comme effets au porteur.
« Les obligations du trésor porteront intérêt à 5 pour cent, à partir du 1er juillet prochain. »
- Adopté. (P. V.)
« Art. 12. Les agents chargés des échanges sont autorisés à recevoir, en espèces, le supplément nécessaire pour compléter le montant d'une obligation. Si les intéressés le préfèrent, il leur sera délivré de nouveaux récépissés pour compléter le montant de ceux qui seront convertis en obligations. Ces récépissés devront, comme les autres, être convertis en obligations avant le 31 décembre prochain. »
- Adopté. (P. V.)
On revient à l'article 16 du projet, qui a été adopté hier en ces termes : « Art. 16. Les privilèges du trésor public, pour le recouvrement de l'emprunt, sont les mêmes qu'en matière de contribution directe.
« Les poursuites s'exerceront d'office, à la diligence des receveurs, sans autorisation préalable, en commençant par la contrainte, qui sera décernée contre les retardataires cinq jours après l'expiration de chaque terme : au besoin, la force publique pourra être requise, conformément à l'article 19 de l'arrêté du 16 thermidor an VIII. » (J. B., 10 avril., et P. V.)
M. Marlet propose d'ajouter à cet article ce qui suit :
« A défaut des propriétaires, les locataires pourront être contraints au payement de l'emprunt ; (page 57) ils seront subrogés aux droits du trésor pour le remboursement des sommes qu'ils auront avancées. »
Cette disposition, dit l'honorable membre, évitera la lenteur que doit éprouver la perception. Beaucoup de fonds appartiennent à des absents, à des étrangers. (J. B., 10 avril., et A.)
M. Isidore Fallon – Les lois existantes y ont assez pourvu. Si la proposition était adoptée, un locataire dont le bail est près d'expirer devrait payer l'emprunt comme celui dont le bail a un terme éloigné. (J. B., 10 avril.)
M. Delwarde – La contribution foncière repose entièrement sur le fonds. C'est le propriétaire seul qui peut être attaqué. (J. B., 10 avril.)
- La proposition de M. Marlet est retirée. (P. V.)
L'assemblée adopte les deux articles suivants proposés en remplacement de l'article 17 du projet :
« Art. 17. Il est loisible à chacun, jusqu'au 1er juillet prochain, de participer à l'emprunt par des souscriptions volontaires de 500, 100, 50, 25 et 10 florins.
« Le montant de ces souscriptions sera versé chez les receveurs de contributions directes des chefs-lieux d'arrondissement contre récépissés. »
« Ces récépissés seront convertis en obligations de la manière indiquée à l'article 11.
« Les administrations et établissements publics sont autorisés à participer à l'emprunt. »
» Art. 18 nouveau. Le gouvernement est autorisé à faire racheter successivement les obligations du présent emprunt lorsque l'état du trésor le permettra. » (P. V.)
« Art. 18. Le décret du 5 mars dernier est rapporté. » (A. C.)
- Cet article est remplacé par la disposition suivante :
« Les articles 1 et 2 du décret du 5 mars dernier sont rapportés. » (P. V.)
On procède au vote par appel nominal sur l'ensemble du décret.
117 membres répondent à l'appel.
112 votent pour.
5 votent contre.
En conséquence le décret est adopté. (P. V.)
Ont voté contre : MM. Speelman-Rooman, Du Bus, Buylaert, Surmont de Volsberghe, Annez de Zillebeecke (I., 10 avril.)
M. le marquis de Rodes – Messieurs, je demande la permission au congrès de lui présenter brièvement, ainsi qu'au ministre des finances, quelques observations au sujet de l'emprunt de douze millions, somme égale à la contribution foncière.
Cet emprunt est voté, et je vois avec un grand plaisir qu'il a été voté à la presque unanimité. Il en sera toujours ainsi quand il s'agit d'honneur et de patrie dans les mesures qui nous sont présentées par nos ministres.
Remarquez, je vous prie, messieurs, que les députés des deux Flandres ont voté presque tous pour l'emprunt, malgré la grandeur et l'énormité des charges qui pèsent particulièrement sur ces provinces, par la raison qu'elles payent le double de la contribution foncière des autres provinces. Ainsi, messieurs, les Flandres vont payer au taux de 20 pour cent du revenu, tandis qu'une province contiguë (le Hainaut) payera à peine au taux de 10 pour cent. Et, certes, vous conviendrez tous avec moi que c'est un triste privilège de payer le double des autres. (On rit.)
Je voulais aussi faire observer que, dans l'avance que le congrès a décrété de payer par anticipation la contribution foncière de cette année, ainsi que dans cet emprunt, les Flandres ont toujours le sort d'avoir le double de sacrifices à faire.
Je n'ai pris la parole que pour appeler l'attention de l'assemblée sur cette inégalité révoltante, dont les Flandres se plaignent depuis si longtemps, et qui est peut-être inconnue à plusieurs membres du congrès.
On m'assure que le ministre des finances vient d'ordonner que les travaux du cadastre soient repris, je crois, à dater du 15 de ce mois, et le motif pour lequel je prends la parole, comme député de la Flandre, est de l'exciter à faire poursuivre les évaluations avec toute l'activité possible.
Je désire qu'il puisse me donner l'espoir que les chambres législatives, qui se composeront peut-être de plusieurs membres de cette assemblée, pourront procéder, dès l'année prochaine, à la péréquation de la contribution foncière, d'après la statistique qui leur sera présentée des cantons cadastrés, pour que toute la Belgique ne paye, en 1833, que d'après une base proportionnelle égale.
Et, comme l'a dit fort bien notre honorable collègue M. Forgeur, à propos d'autres questions, qu'il n'y ait plus, en Belgique, de catégories ni de privilèges, et j'y ajoute, surtout en matière d'impôts ; j'espère que le congrès voudra bien apprécier les sentiments qui m'ont guidé en ne lui présentant ces observations qu'après l'adoption des projets de loi financiers. (J. B., 10 avril.)
M. Charles de Brouckere, ministre des finances, reconnaît que les députés des Flandres, et notamment ceux de la Flandre occidentale, ont toujours réclamé contre la surcharge dont vient de se plaindre le préopinant. Il promet (page 58) de faire travailler sans relâche au cadastre, mais il ne peut pas répondre que les opérations soient terminées aussitôt que le désirerait le préopinant parce qu'il faut une paix profonde pour les travaux du cadastre. (C., 10 avril.)
- La séance est levée à quatre heures. (P. V.)