(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 1)
(page 692) (Présidence de M. le baron Surlet de Chokier)
La séance est ouverte à midi. (P.V.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, lit le procès-verbal ; il est adopté. (P. V.)
M. Liedts, secrétaire, présente l'analyse des pièces suivantes :
M. Raseleer, de Bruxelles, réclame le remboursement des rentes remboursables (los-renten) qui lui avait été promis pour le 1er novembre dernier.
M. de Beaumont, artificier à Bruxelles, réclame le payement d'un bon de 167 florins 50 cents, souscrit à son profit par le général Mellinet, le 14 octobre dernier, pour fourniture d'étoupilles à l'usage de l'artillerie bruxelloise.
M., Jean van Belle, chirurgien à Meulebeke (Flandre occidentale), demande que les médecins et chirurgiens attachés à des administrations de bienfaisance soient exempts du service de la garde civique.
M. du Tilleul soumet au congrès quelques observations concernant le projet de décret sur la perception des impôts pendant l'année 1831.
Cinq individus d'Hévillers, district de Nivelles, demandent la rémission entière d'une peine correctionnelle qui leur a été infligée par jugement du tribunal de Nivelles.
M. Martin Lequeu demande la suppression de la place d'administrateur des domaines et émet le vœu que le baron de Loen soit écarté de la chambre des comptes.
M. Theys, de Bruxelles, propose la suppression des trois administrateurs des domaines et de tous les receveurs des domaines, ainsi que la réunion du syndicat d'amortissement à l'administration de l'enregistrement.
M. Staumont, de Rai, prie le congrès de rejeter les demandes faites par l'archevêque de Malines par sa lettre du 15 du courant.
M. Tessin présente au congrès des observations sur l'accise du café.
L'administration communale de Bossut-lez-Walcourt propose quelques moyens d'introduire des améliorations et des économies dans le système financier.
M. Demoor, ancien employé à la chambre des comptes à Bruxelles, soumet au congrès un projet économique sur la rentrée des contributions.
M. Gambier, à Bruxelles, transmet des observations sur le projet de budget présenté par le comité des finances.
M. Henri Évenepoel, de Bruxelles, demande une place à la chambre des comptes.
Même demande de la part de M. François Depêne, de Bruxelles.
Même demande de la part de M. Joseph Dufossé, de Bruges.
M. de Moreau de Gerbehaye, employé de première classe des contributions directes à Hautrages, demande à être nommé contrôleur sur la ligne ou receveur des douanes. (U. B., 31 déc., et P. V.)
- Ces pièces sont renvoyées à la commission des pétitions. (P. V.)
M. le président – L'ordre du jour étant la discussion du projet de loi sur la cour des comptes, M. Rodenbach est invité à faire un rapport sur les pétitions des candidats qui se sont présentés. (J. B., 31 déc.)
M. Constantin Rodenbach – Messieurs, je suis chargé de vous faire un rapport sur les pétitions qui ont pour objet des demandes de place de (page 693) conseiller à la cour des comptes ; 44 demandes ont été adressées au congrès, elles sont appuyées de pièces justificatives constatant les titres des pétitionnaires à l'emploi qu'ils sollicitent. Votre commission des pétitions a pensé que ce n'était pas le cas de vous faire sur ces demandes un rapport qui ne pourrait être que long et fastidieux, trouvant plus convenable de vous faire présenter tout simplement la liste imprimée de tous les candidats, et de proposer le renvoi des pétitions et des pièces à l'appui au bureau des renseignements. (U. B., 31 déc.)
M. François propose de ne clore la liste que trois ou quatre jours avant celui où doit se faire la nomination, pour donner à ceux qui pourraient se présenter encore le temps de s'y faire porter. (U. B., 31 déc.)
M. le président – On imprimera la liste de ceux qui ont déjà fait leur demande, et on laissera un blanc pour ajouter, à la main, le nom de ceux qui se présenteront plus tard. (U. B., 31 déc.)
- Après quelques observations de M. le comte Duval de BeaulieuM, M. le chevalier de Theux de Meylandtle chevalier de Theux de Meylandt et M. le comte de Quarré, le congrès se range de l'avis de M. le président. (U. B., 31 déc.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, donne lecture d'une proposition de M. de Robaulx, conçue en ces termes :
« J'ai l'honneur de proposer au congrès de décréter d'inviter le comité diplomatique à lui faire connaître :
« 1 ° L'État de nos relations diplomatiques et sur quelles bases elles sont ouvertes avec les envoyés des cinq grandes puissances à Londres.
« 2° Si le choix du futur chef de l'État entre ou est entré pour quelque chose dans les négociations.
« 3° Si, en cas où la Hollande persévère à ne pas exécuter pleinement les conditions de la suspension d'armes, il a été pris des mesures et donné des ordres pour la reprise des hostilités dans un délai quelconque.
« 4° Si le comité a ouvert ou va ouvrir avec la France des négociations pour un traité de commerce, qui facilite les échanges des produits réciproques. » (U. B., 31 déc., et P. V.)
M. le président – La proposition est-elle appuyée. (Oui ! oui !) (U. B., 31 déc.)
M. le comte de Celles – A qui s'adresse M. de Robaulx ? (C., 30 déc.)
M. de Robaulx – Au congrès, pour qu'il s'adresse au gouvernement. (C., 30 déc.)
M. le président – M. de Robaulx a la parole pour développer sa proposition. (U. B., 31 déc.)
M. de Robaulx – Messieurs, vous savez que des négociations sont ouvertes sur des objets de la plus haute importance par le comité diplomatique. Depuis longtemps ces négociations sont entamées, et nous ne savons encore ni l'état où se trouvent nos relations diplomatiques, ni sur quelles bases elles reposent ; car les explications qu'on a bien voulu nous donner ne nous ont rien ou presque rien appris. Je suis loin d'interpréter en mal ceux qui croient devoir garder à notre égard une si grande réserve, cependant je suis loin d'adopter le principe d'après lequel ils prétendent agir : il me semble qu'il est essentiel que le congrès national, que la nation elle-même, sachent à quoi s'en tenir sur des affaires qui les touchent de si près ; il faut qu'ils le sachent, messieurs, car grâce à l'ignorance où on nous laisse, des bruits contradictoires circulent, tout le monde s'en inquiète, et cette inquiétude générale est un grand mal. Je suis loin de croire à ces bruits de journaux, qui tendent à jeter le désordre parmi nous et la division dans l'État, mais il est essentiel de les faire cesser : il faut qu'on donne un démenti formel à ceux qui osent dire que l'on s'occupe, dans les conférences des plénipotentiaires des cinq grandes puissances, de nous imposer un chef. Il faut que le comité diplomatique réponde, et j'espère qu'il nous dira que le choix du chef de l'État ne se traite ni directement ni indirectement dans les conférences de Londres, et que, sur un objet d'une si haute importance, personne ne se sera permis d'empiéter sur la prérogative et les droits sacrés du congrès national. Voilà quels sont les deux premiers objets de ma proposition. .
Le troisième est relatif à la suspension d'armes qui est venue arrêter les hostilités entre la Hollande et nous. S'il est vrai (et il ne nous est malheureusement pas permis d'en douter) que la Hollande persisté à ne pas exécuter les termes des traités, pourquoi les hostilités n'ont-elles pas déjà recommencé ? Notre brave armée s'impatiente des délais de l'armistice : moins confiante que nos diplomates dans la bonne foi de l'ennemi, elle ne désire rien tant que de marcher à sa rencontre et de se mesurer avec lui. Profitons de sa bonne volonté et de son ardeur. Quand les lenteurs interminables que la Hollande nous suscite auront pris (page 694) une fin, alors nous serons forcés de reprendre les armes, et nous ne pourrons peut-être plus le faire avec le même avantage. Il faut donc que le comité diplomatique déclare si la Hollande consent, après tant de lenteurs, à exécuter les conditions de l'armistice, si la libre navigation de l'Escaut sera enfin une vérité, et dans le cas contraire s'il a pris des mesures efficaces pour la reprise immédiate des hostilités.
J'arrive au dernier point de ma proposition. On nous a dit que la Belgique était devenue une puissance indépendante, qu'enfin nous étions admis dans la grande famille européenne. S'il en est ainsi, messieurs, nous devons nous empresser d'y prendre rang, et demander que nos relations commerciales s'établissent. Vous savez que notre industrie et notre commerce sont dans un état de marasme complet ; de là des bruits sinistres qu'il est temps de faire cesser avec les craintes qui les font naître. Il faut que le comité diplomatique nous dise s'il a commencé de faire des ouvertures aux nations voisines, et notamment à la France, pour établir sur un bon pied nos relations commerciales ; s'il s'est occupé de procurer des débouchés à nos produits ; si nos charbons, nos fers, nos toiles, pourront enfin sortir de nos mains avec avantage, et si les prohibitions qui nous tuent cesseront bientôt. Voilà, messieurs, tout ce que j'avais à dire pour vous faire sentir l'opportunité de ma proposition. Elle est propre à rétablir le calme et la tranquillité dans les esprits, en nous faisant connaître notre véritable situation : c'est pour cela que je l'ai présentée. (Appuyé ! appuyé !) (U. B., 31 déc.)
- Personne ne demande la parole. (C., 30 déc.)
M. le président – Veut-on une seconde lecture de la proposition de M. de Robaulx ? (Oui !oui !) (U. B., 31 déc.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, la relit. (U. B., 31 déc.)
M. le président – Il me semble que cette proposition concerne en partie le comité diplomatique, en partie le département de la guerre, et même le département des finances pour ce qui est relatif aux douanes. (U. B., 31 déc.)
M. de Robaulx – C'est une erreur. Ma proposition n'a pour but que de demander, sur tous les points qu'elle traite, des explications au comité diplomatique. Je crois qu'il doit être à même de nous les donner lui seul, sans recourir aux autres départements ministériels. (U. B., 31 déc.)
M. le comte de Celles, vice-président du comité diplomatique – Je me permettrai de faire une question à l'assemblée : Le congrès désire-t-il que le comité diplomatique ou le gouvernement provisoire fasse une réponse écrite à la proposition ? Dans ce cas, il faut la renvoyer au gouvernement. Si le congrès veut se contenter d'une réponse verbale, je parcourrai ces divers points à la tribune. (Parlez ! parlez !) (U. B., 31 déc.)
- Quelques voix – Oui, mais sans préjudice des explications du gouvernement. (U. B., 31 déc.)
M. le comte de Celles, vice-président du comité diplomatique – Messieurs, il me semble que les différents points de la proposition de l'honorable orateur se réduisent à quatre : les négociations pour le choix du chef de l'État ; la cessation des hostilités ; la libre navigation de l'Escaut, et la reconnaissance de la Belgique comme puissance indépendante.
A l'égard du premier point, je dirai ce que M. Van de Weyer vous dit il y a peu de jours, que le comité diplomatique ainsi que le gouvernement provisoire n'agiront jamais en dehors de la sphère de leurs pouvoirs, et que jamais, pour tout ce qui peut avoir rapport au choix du souverain de la Belgique, ni le gouvernement provisoire, ni le comité diplomatique ne transgresseront la marche fixée par le pacte fondamental. Quant aux bruits répandus ou répétés par les journaux, je ne crois pas, messieurs, que le congrès puisse y trouver un motif suffisant pour demander une communication au gouvernement. Qu'il suffise au congrès et à la nation de savoir que nos droits et notre liberté, sur ce point important, resteront entiers : cela est clair et net, et doit rassurer tout le monde.
Quant à la cessation des hostilités, vous savez, messieurs, que si l'armistice a été conclu, on était en droit d'en attendre des avantages qui peuvent ne pas encore s'être réalisés entièrement, mais qui, du moins, ont arrêté, l'effusion du sang. Du reste, on a de justes motifs d'espérer que la cessation des hostilités aura été plus que provisoire, et que la paix en sera la suite sans avoir besoin de recourir aux armes.
Pour ce qui est de la libre navigation de l'Escaut, ce point, messieurs, ne fait pas plus de difficulté à Londres qu'à Bruxelles, et si la Hollande s'y est opposée jusqu'à ce jour, cela n'a pas plus dépendu du comité diplomatique que des plénipotentiaires des cinq grandes puissances qui, du reste, sauront bien l'y forcer.
Quant à notre indépendance et aux traités de commerce dont on voudrait qu'elle eût été suivie, je dirai que ce n'est pas le lendemain d'une reconnaissance qu'on peut se présenter chez les nations voisines un traité de commerce à la main, (page 695) pour en demander l'exécution. Un pareil traité ne saurait être improvisé, il faut y réfléchir longtemps avant d'en trouver un praticable. Le comité diplomatique en a déjà fait l'objet de ses méditations ; une commission a été nommée pour cela, et dès qu'elle pourra présenter ses vues, elle s'empressera de le faire. Voilà, messieurs, ce que j'ai cru devoir répondre à la proposition de l'honorable orateur. (U. B., 31 déc.)
M. de Robaulx – Je ne peux pas laisser sans réponse une assertion hasardée par l'honorable préopinant. Si je ne me trompe, je l'ai entendu dire que si la Hollande persiste à ne pas rendre libre la navigation de l'Escaut, les puissances sauront bien l'y forcer. Ce n'est pas ce que nous entendons, car ce serait de leur part une véritable intervention dans nos affaires, et le principe de non-intervention tant de fois invoqué depuis quelque temps se trouverait violé. Mais, messieurs, avons-nous jamais entendu, lorsqu'on nous a parlé de navigation, que les puissances interviendraient à main armée ? Non, et cela est si vrai que les diplomates ont dit constamment qu'il ne s'agissait que de communications amiables, et cela ne peut pas être autrement. Eh quoi ! si aujourd'hui il ne nous convenait pas de ratifier les négociations de notre comité diplomatique, le congrès pourrait-il être lié par ce qu'il aurait promis, et les puissances seraient-elles en droit de nous forcer à l'exécution ? Non, messieurs, et je proteste contre une semblable assertion et contre toutes ses conséquences. Je repousse l'intervention étrangère : qu'on nous laisse le soin de sanctionner par la force les traités conclus, et si la Hollande refuse d'y souscrire, nous aurons la guerre pour lui répondre ; mais cette guerre, c'est la Belgique qui la fera sans le secours de l'intervention étrangère. (Bravo ! bravo !) Je demande le renvoi de ma proposition au gouvernement. (Appuyé ! appuyé ! )(U. B., 31 déc.)
- Ce renvoi est mis aux voix et adopté. (P. V.)
M. le président – L'ordre du jour est la discussion du projet de décret relatif à l'établissement d'une cour des comptes.
M. Beyts a la parole. (U. B., 31 déc.)
M. le baron Beyts commence par rendre hommage au travail de la commission, dont il ne saurait, dit-il, assez faire l'éloge ; il fait ensuite l'historique de la cour des comptes, établie par la constitution de l'an III, et finit par proposer un amendement à l'article premier et tendant à faire déclarer qu'il suffit d'être âgé de vingt-cinq ans pour être conseiller à la chambre des comptes, mais qu'il faudra avoir trente ans pour être président. (U. B., 31 déc.)
M. Jacques voudrait qu'on étendît les attributions de la cour des comptes, plus que ne le fait le projet : qu'on lui confiât le grand-livre de la dette publique, le grand-livre des pensions, et la direction de la trésorerie. Il voudrait aussi qu'au lieu d'être composée de six conseillers et d'un président, il y eût autant de conseillers que de provinces dans l'État, et que ces conseillers élussent entre eux leur président. L'honorable orateur voudrait encore que le mode de nomination fût autre que celui du projet ; il faudrait, selon lui, que les députés de chaque province présentassent deux ou trois candidats, entre lesquels le congrès ferait un choix ; car, pour lui, il n'oserait répondre du choix de huit individus étrangers à sa province et qu'il ne connaîtrait pas parfaitement. (U. B., 31 déc.)
M. le chevalier de Theux de Meylandt prend la parole, mais sur l'observation de quelques membres il se réserve de parler sur l'article 1er. (C., 30 déc.)
M. le président – Il n'y a pas d'autres orateurs inscrits pour la discussion générale ; on va passer à la discussion de l'article premier dont voici le texte :
« Art. 1er. Une cour des comptes est instituée ; elle est composée d'un président, de six conseillers et d'un greffier.
« Ils sont nommés par le congrès, et toujours révocables par la législature.
« Ils doivent avoir l'âge de trente ans accomplis.
« Le greffier n'a pas voix délibérative. » (U. B., 31 déc., et A. C.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire - Il y a sept amendements.
M. Frison propose la rédaction suivante ;
« Une cour des comptes est instituée. Elle est composée de neuf conseillers et d'un secrétaire.
« Ces neuf conseillers sont choisis par l'administration provinciale (états provinciaux) dans chacune des neuf provinces de la Belgique.
« Ils élisent entre eux à la pluralité des voix un président annuel, et ont la nomination du secrétaire, lequel a rang de conseiller.
« Le secrétaire n'a pas voix délibérative. »
M. l'abbé de Foere demande que la cour des comptes soit composée d'un président, de neuf conseillers et d'un greffier.
(page 696) M. le baron Beyts présente l'amendement suivant au paragraphe 3 de l'article premier :
« Le président doit avoir l'âge de trente ans accomplis.
« Les conseillers et le greffier doivent être âgés de vingt-cinq ans accomplis ; le greffier n'a pas voix délibérative. »
M. Fransman propose de remplacer l'article premier par une disposition ainsi conçue :
« La cour des comptes, instituée pour toute la Belgique, est composée de neuf membres.
« Ils sont nommés par le congrès et toujours révocables par la législature. Ils doivent avoir l'âge de trente ans accomplis et sont choisis autant que possible dans chaque province.
« Il y a près de la cour des comptes un greffier également nommé par le congrès et révocable par la législature ; il ne doit avoir que l'âge de vingt-cinq ans accomplis ; il n'a point voix délibérative. Elle procède chaque année à l'élection de son président par scrutin secret et à la majorité absolue des suffrages. »
M. Van Meenen propose de remplacer dans le paragraphe 2 les mots : Ils sont nommés par le congrès, par ceux de : Ils sont nommés par le pouvoir exécutif.
M. Jacques présente l'amendement suivant :
« Une cour des comptes est instituée : elle se compose d'autant de membres qu'il y a de provinces.
« Les députés de chaque province au congrès national présentent deux ou trois candidats ; le congrès en nomme un à la majorité relative des suffrages.
« Les membres de la cour des comptes doivent avoir trente ans au moins et cinquante au plus ; ils sont toujours révocables par la législature. Ils choisissent entre eux à la majorité absolue des suffrages, et au commencement de chaque trimestre, un président, un greffier, un directeur du grand-livre de la dette publique, un directeur de la trésorerie nationale, un ordonnateur des dépenses, un directeur du grand-livre des pensions, et un directeur du livre des annotations et chargements. »
M. Devaux demanda de substituer au deuxième paragraphe de l'article du projet les dispositions suivantes :
« Ils sont nommés (les membres de la chambre des comptes) tous les six ans, par la chambre des représentants, qui a toujours le droit de les révoquer.
« La première nomination se fera par le congrès. » (U, B., :31 déc. et A,)
- Ces amendements sont appuyés, à l'exception de celui de M. le baron Beyts. (C., 30 déc.)
M. Frison – Messieurs, l'on a souvent dit dans cette enceinte (et je crois qu'à cet égard au moins nous sommes unanimes) qu'il nous fallait un gouvernement à bon marché ; j'ose donc espérer d'être accueilli favorablement en vous présentant un amendement qui, loin d'ajouter de nouvelles charges, présente sur l'allocation demandée par le gouvernement pour la cour des comptes une économie de fl. 17,000, outre l'avantage immense à mes yeux de procurer un contrôle plus assuré de l'emploi dès deniers de l'État.
Avant d'entrer dans des développements, je crois, messieurs, devoir donner quelques détails sur la composition et les dépenses de la chambre des comptes, sous le régime odieux que nous avons renversé.
Elle se composait de seize conseillers, un secrétaire, dix-sept premiers commis, quarante seconds commis, et d'une fourmilière d'employés en sous-ordre dont le nombre m'est inconnu.
Voici pour le nombre, passons à la dépense ;
Un conseiller aux appointements de fl. 5,000
Quinze conseillers à raison de fl. 4,000 chacun. 60,000
Un secrétaire. 5,000
Total pour la chambre : fl. 70,000
Pour couvrir les frais de bureaux tant en fournitures qu'en employés, etc., il était alloué la somme énorme de fl. 110,000
C'était donc fl. 180,000 qui étaient engloutis dans ce gouffre ; et certes, , messieurs, l'on sait de quelle utilité était cette chambre des comptes, véritable sinécure pour ses conseillers, qui se bornaient à délibérer une ou deux fois la semaine en assemblée générale sur des affaires dont l'examen avait été fait par des commis ; cela n'était plus qu'une mesure de forme.
Mon amendement tend à détruire cet abus, et à assurer la vérification exacte et consciencieuse des pièces soumises au contrôle de la chambre des comptes.
Je propose neuf conseillers choisis dans chacune des neuf provinces de la Belgique, et un secrétaire avec le rang de conseiller et à la nomination des conseillers.
Leurs appointements seraient fixés comme suit :
Un conseiller président. fl. 3,000
Huit conseillers ordinaires à fl. 2,500 l'un, fl. 20,000
Un secrétaire. 2,500
(page 697) J'évalue le nombre des commis à quinze aux appointements de fl. 1,000, fl. 15.000
Je compte pour les huissiers, messagers et gens de service fl. 3,500.
Pour les fournitures de bureaux, chauffage, éclairage, entretien des locaux, frais d'impression : 6,000
Ce qui donne pour total. fl. 50,000, tandis que l'allocation demandée par le gouvernement est de 67,000 florins.
Je vois, messieurs, un grand avantage dans la nomination d'un conseiller par province ; vous les satisferez toutes, et vous éviterez par là le reproche de partialité, reproche qui se glisse partout ; vous assureriez bien mieux encore le contrôle si vous laissiez ces nominations aux administrations provinciales qui seront des juges bien plus compétents que nous de la capacité des individus, car avouons-le, messieurs, la plupart d'entre nous, dans les choix que peut-être ils vont être appelés à faire, devront s'enquérir auprès de leurs collègues si messieurs tels ou tels, parmi les nombreux candidats qui se présentent tous les jours, sont dignes de leurs suffrages.
Une autre considération, outre ces motifs, me fait désirer la nomination par les provinces des conseillers à la cour des comptes.
Je vous l'avouerai, messieurs, ce n'est point sans un sentiment pénible que j'ai vu plusieurs de nos collègues se mettre sur les rangs pour ces places de conseillers ; mandataires de la nation belge, éloignons de nous toute idée d'intérêt personnel , ne laissons point croire à ceux qui nous ont honorés de leur confiance, que nous aussi nous sommes atteints de cette rage de places presque universelle, véritable fléau dont notre Belgique n'a point seule donné l'exemple, mais dont nous avons à cœur comme représentants de la nation de nous montrer exempts.
Je rends plus que personne justice aux talents et aux lumières des honorables collègues dont je parle, j'ai la plus grande confiance en eux, mais je veux éviter (pour ce qui me concerne au moins) tout reproche de partialité.
L'on va m'objecter que cette nomination par les provinces entraînera des lenteurs, que l'installation de la cour des comptes presse ; tout cela est vrai ; mais, messieurs, nous sommes tout en provisoire, que fait une mesure provisoire de plus ? Nommons donc provisoirement une commission, qui tiendra lieu, en attendant, de la cour des comptes. (E., 2 janv.)
M. l’abbé de Foere développe son amendement. Conformément à la chambre des comptes, instituée sous l'empire de nos anciennes constitutions, il propose d'attribuer à la cour des comptes l'administration des domaines de l'État. L'orateur voudrait à cet effet lui adjoindre trois autres membres chargés spécialement de l'administration de cette branche. Les sept autres membres auraient le droit exclusif d'examiner, de contrôler, de liquider et d'arrêter les comptes de ces trois membres. Il attaque les vices de l'administration actuelle des domaines et s'oppose à ce que les domaines soient régis par un seul, comme la commission du budget le propose. (J. F., 31 déc.)
M. Fransman – D'après mon amendement, le président serait nommé annuellement par les conseillers eux-mêmes. (J. F., 31 déc.)
M. Van Meenen voudrait que l'on remît le choix des membres de la cour des comptes au pouvoir exécutif. Le grand nombre de candidats qui se présentent, dit-il, la qualité de député de plusieurs d'entre eux rendront pour nous le choix embarrassant. La chambre des comptes n'est pas, comme sous l'ancien régime, une espèce de commission permanente de la deuxième chambre, c'est une véritable cour judiciaire. (J. B., 31 déc.)
M. Devaux – Il suffira de très peu de mots pour justifier mon amendement. Il porte sur le deuxième paragraphe de l'article premier ; en voici les termes :
« Ils sont nommés, tous les six ans, par la chambre des représentants, qui a toujours le droit de les révoquer.
« La première nomination se fera par le congrès. »
Je remplace le mot législature par ceux-ci : la chambre des représentants. Je sais bien que ce décret n'est que provisoire, puisque l'article 19 porte qu'il sera révisé par la législature avant l'expiration de l'année 1831 ; cela ne doit pas nous empêcher de le rendre aussi irréprochable que possible, et il faut tâcher de le faire de manière à ce qu'il soit confirmé. J'ai voulu que les membres de la chambre ne fussent nommés que pour six ans, parce que le droit de les révoquer, réservé à la législature, aurait été presque illusoire. On ne se serait pas, en effet, aisément décidé à user de ce droit, parce que la révocation est une mesure sévère, qui n'aurait pu être autorisée que par des raisons très graves, et parce que celui qui en aurait été frappé en eût été presque déshonoré. Cette considération aurait fait maintenir à leur poste des hommes dont on aurait eu réellement à se plaindre. Par mon amendement, ce grave (page 698) inconvénient disparaît. Tous les six ans, on pourra remanier la cour, en éloigner ceux qui n'auront fait leur devoir, et réélire les autres : comme il est probable que les fautes de négligence seront les seules dont pourront se rendre coupables les membres de la cour, la crainte de n'être pas réélu au bout de six ans excitera l'émulation, et le service en sera mieux assuré. Je n'ai pas d'autre considérations à faire valoir pour mon amendement ; toutefois je les crois suffisantes pour que le gouvernement se détermine à les adopter. (U. B., 31 déc.)
M. Charles de Brouckere – L'amendement le plus éloigné du projet est celui de M. l'abbé de Foere ; il me semble qu'il y a là une étrange confusion d'idées (on rit), et je ne conçois pas par quel motif on veut que la cour des comptes ait en même temps l'administration des domaines. Autrefois ces deux choses pouvaient être amalgamées car il y a quarante ans les administrateurs des domaines agissaient sans responsabilité, et pour ainsi dire à leur guise ; mais, sous un gouvernement représentatif, il en est autrement : la responsabilité ministérielle est organisée, le domaine est une administration de son ressort, et comme la cour des comptes est appelée à contrôler les actes du ministère (quant aux finances s'entend), il est impossible de l'amalgamer avec l'administration des domaines. Je ne sais à quel propos l'honorable membre a mêlé dans son discours le rapport du budget avec le rapport de la chambre des comptes. Mais il a demandé pourquoi trois administrateurs des domaines ont été supprimés à Gand, Liége et Bruxelles : c'est parce qu'on a trouvé que ces administrateurs étaient trois rouages inutiles. Je dirai donc à M. de Foere que la chambre des comptes est un tribunal, et qu'elle ne peut être, par conséquent, une administration.
D'autres préopinants proposent l'augmentation des membres de la cour. Ils veulent qu'elle soit composée de neuf conseillers et d'un président. Je ne conçois pas comment on veut augmenter le personnel et demander en même temps des diminutions de dépenses ; mais, dit-on, nous demandons neuf membres pour qu'il y en ait autant que de provinces, et pour que les états provinciaux puissent nommer chacun un membre. Je ne vois pas, moi, ce que les états provinciaux ont à faire dans l'administration générale. Les membres de la cour des comptes doivent s'occuper, non pas de ce qui concerne telle ou telle province en particulier, mais de ce qui concerne la nation entière. Remarquez, messieurs, que si un pareil système prévalait, on finirait par avoir près de la cour un procureur pour chaque province, et qui solliciterait dans son intérêt. Mais il ne faut pas oublier que la cour des comptes est destinée à rendre des arrêts, et non à donner audience à des solliciteurs. Cette cour ne doit donc appartenir à aucune province en particulier, et elle doit être indépendante de toutes. Mais, ajoute-t-on, les états provinciaux connaissent mieux que nous les candidats. Eh ! messieurs, ne sommes-nous pas tous ici de toutes les provinces ? et n'est-il pas facile de nous entendre et de nous donner les uns aux autres les renseignements nécessaires pour faire de bons choix ? Il n'y a aucune raison solide pour autoriser l'augmentation des membres de la cour ni pour en ôter la nomination au congrès, pour en gratifier les administrations provinciales.
Mais voici un autre orateur, M. Van Meenen, qui propose de donner la nomination au pouvoir exécutif. Nous dérogerions, dit-il, à notre dignité en nommant les membres de la cour. Mais, si la cour des comptes est instituée pour contrôler les actes du ministre, comment nommera-t-il lui-même ses contrôleurs ? J'aimerais mieux dire qu'il faut augmenter les commis du ministre des finances, et le laisser diriger les affaires comme il l'entendra. N'oublions pas, messieurs, que la cour a pour but de surveiller les opérations et la marche financière du ministre ; cette seule pensée suffira pour lui refuser une part quelconque à la nomination de ses membres. L'ancienne chambre des comptes, était nommée par le gouvernement ; jamais on n'a pu obtenir qu'aucun compte fût rendu par elle à la législature ; les seuls comptes qu'on daignât nous communiquer étaient des espèces de livres de caisse qu'il aurait fallu étudier pendant plusieurs mois pour y comprendre quelque chose.
Une expérience de quinze années doit nous servir de leçon : ne confions jamais au pouvoir exécutif le soin de faire contrôler les finances par ses créatures. Je me résume, et je dis que si le congrès veut bien se pénétrer de cette vérité, que la cour des comptes est un véritable. tribunal, il reconnaîtra qu'elle ne peut administrer, et rejettera l'amendement de M. de Foere. Si l'on se souvient qu'elle est destinée à contrôler les opérations du ministère des finances, on rejettera l'amendement de M. Van Meenen. Si l'on veut des économies, on ne consentira pas à augmenter le nombre des membres de la cour. Si on veut que la cour soit indépendante, il faut la laisser à la nomination de la législature. L'amendement de M. Devaux est le seul utile ; les considérations qu'il a exposées touchant les difficultés de la révocation, sont pleines de justesse : j'appuie donc son amendement (page 699) et je rejette tous les autres. (U. B., 31 déc.)
M. de Muelenaere, rapporteur, fait valoir quelques considérations nouvelles pour repousser et l'amendement de M. de Foere et ceux qui tendent à faire nommer les membres de la cour des comptes par les administrations provinciales, et déclare que le seul amendement bon, utile et propre à améliorer l'article premier est l'amendement de M. Devaux. (U. B., 31 déc.)
M. le chevalier de Theux de Meylandt appuie aussi l'amendement de M. Devaux. (U. B., 31 déc.)
M. Barthélemy – Je demande la parole contre l'amendement de M. de Foere. Je ferai observer à M. de Foere qu'anciennement la chambre des comptes n'était pas l'administration des domaines (U. B., et J. B., 31 déc.)
M. le président – Tout le monde en veut à l'amendement de M. de Foere. Il ne dit pas ce qu'on lui prête. (U. B., 31 déc.)
M. de Muelenaere, rapporteur – Son amendement tend à charger trois membres de la cour de l'administration des domaines. (U. B., 31 déc.)
M. le président – L'honorable M. de Foere a parlé de cela dans son discours ; mais son amendement se borne à dire que la cour sera composée d'un président, de neuf conseillers et d'un greffier. (U. B., 31 déc.)
M. l’abbé de Foere reproduit ses idées sur l'administration des domaines, qu'il voudrait voir confiée à la cour des comptes. (U. B., 31 déc.)
M. Lebeau – Le projet du préopinant ne tendrait à rien moins qu'à nous faire nommer deux cours des comptes ; car si elle avait l'administration des domaines, ne pouvant elle-même contrôler ses actes, il faudrait une autre cour pour les contrôler. Je dois faire une autre observation : je suis étonné qu'on ne puisse abandonner cette idée de vouloir qu'en tout et pour tout chaque province soit représentée ; mais, messieurs, dans l'administration générale, cette distinction doit s'effacer ; il faut songer que la cour ne sera pas instituée pour l'administration particulière des provinces, mais pour l'administration générale. Si le même esprit régnait en France, et que le système qu'on l’ont faire prévaloir s'y établît, il faudrait donc que la cour des comptes fût composée de quatre-vingt-six membres. Mais, dit-on, il faut que les emplois soient autant que possible répartis entre toutes les provinces. Il faut le dire, messieurs, car c'est une vérité dont personne ici ne semble pénétré, les emplois n'appartiennent pas à telle ou telle province, à telle ou telle localité, mais à la capacité, et c'est la meilleure garantie de toutes ; l'emploi n'est pas donné en vue de favoriser quelqu'un, mais en vue du bien général : je repousse donc tous les amendements proposés, excepté celui de M. Devaux. (U. B., 31 déc.)
M. Charles de Brouckere – Je demande la permission d'ajouter une observation que j'avais omise. Dans quelques amendements il est question de faire élire le président par les membres de la cour. Les uns veulent que le président soit élu pour trois mois, les autres veulent que ce soit pour un an. Messieurs, quand on a présenté aux états généraux un projet de loi, tendant à rendre temporaires les fonctions du président de la cour des comptes, je me suis opposé à cette mesure parce que le président étant comme l'âme du corps, c'est à lui qu'il appartient de régler les travaux de la cour et de donner une direction à sa marche ; avec ces présidences temporaires, on ne voulait rien changer à ce qui était établi, parce qu'on était assuré que les améliorations seraient repoussées par le président suivant. C'est ainsi qu'un honorable membre que je pourrais nommer, étant président, et ayant voulu réorganiser la cour sur un meilleur pied, vit son successeur bouleverser son travail et remettre les choses dans leur premier état. Dans tous ces changements qu'arrive-t-il ? C'est qu'il reste toujours un homme qui ne change pas : c'est le greffier qui tient la clef de toutes les opérations, et dont tous les présidents qui se succèdent ne peuvent se passer ; car, sans lui, rien ne marcherait. Ainsi on dépouille le président de l'inamovibilité pour en gratifier un subalterne. (U. B., 31 déc.)
M. Jacques – Les observations de M. de Brouckere me déterminent à consentir à ce que les mots : le président ne sera élu que pour trois mois, soient supprimés ; j'adhérerai aussi à l'amendement de M. Devaux : je ne me souviens pas de ce qu'il contient... (Hilarité générale et prolongée.) (U. B., 31 déc.)
M. Le Grelle admet l'amendement de M. Devaux. (E., 31 déc.)
M. Fransman répond à M. Charles de Brouckere et démontre qu'il y aurait avantage à ce que le président fût nommé périodiquement. (E., 31 déc.)
M. Charles Le Hon parle en faveur de l'amendement de M. Devaux. (U. B., 31 déc.)
- La clôture de la discussion est prononcée. (C., 30 déc.)
Les amendements de MM. Van Meenen, Frison, Fransman et Jacques sont mis successivement aux voix ; pas un seul membre ne se lève pour les soutenir ; ils sont rejetés. (U. B., 31 déc.)
M. l’abbé de Foere (page 700) retire le sien. (U. B., 3i déc.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, donne lecture de celui de M. Devaux :
« Ils sont nommés, tous les six ans, par la chambre des représentants qui a toujours le droit de les révoquer.
« La première nomination se fera par le congrès. » (U. B., 31 déc., et P. V.)
- Cet amendement est mis aux voix et adopté ; il remplace le paragraphe 2 du projet. (P. V.)
M. Charles de Brouckere propose comme amendement au troisième paragraphe :
« Le président et les conseillers doivent avoir au moins l'âge de trente ans. » (P. V.)
M. Destouvelles – L'âge du greffier est donc indéterminé. (C., 30 déc.)
M. Le Grelle propose d'ajouter :
« Le greffier n'a pas voix délibérative ; il doit avoir au moins vingt-cinq ans. » (P. V.)
M. le baron Beyts reproduit son amendement qui n'exige trente ans que du président, et vingt-cinq ans des conseillers et du greffier. (C., 30 déc.)
M. le président met cet amendement aux voix ; il est rejeté. (U. B., 31 déc.)
- Le sous-amendement de M. Le Grelle et l'amendement de M. Charles de Brouckere sont adoptés. (P. V.)
L'ensemble de l'article premier amendé est ensuite mis aux voix et adopté en ces termes :
« Une cour des comptes est instituée. Elle est composée d'un président, de six conseillers et d'un greffier.
« Ils sont nommés, tous les six ans, par la chambre des représentants, qui a toujours le droit de les révoquer.
« La première nomination se fera par le congrès.
« Le président et les conseillers doivent avoir au moins l'âge de trente ans.
« Le greffier n'a pas voix délibérative ; il doit avoir au moins vingt-cinq ans. » (P. V.)
- La discussion est ouverte sur l'article 2. (U. B., 31 déc.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, en donne lecture :
« Art. 2. Les membres de la cour des comptes ne peuvent être parents, ni alliés jusqu'au quatrième degré inclusivement ; ils ne peuvent remplir aucun emploi salarié par le trésor, ni être directement ou indirectement intéressés dans aucune entreprise, gestion ou affaire, sujette à une comptabilité envers l'État. » (U. B., 31 déc., et A. C.)
- M. de Gerlache, premier vice -président, remplace M. le baron Surlet de Chokier au fauteuil.
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire - Il y a deux amendements :
Le premier est de M. Fransman ; il est ainsi conçu :
« Ils ne peuvent délibérer sur des affaires qui les concernent personnellement, ou dans lesquelles leurs parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclusivement sont intéressés.»
« Les fonctions de membre de la cour des comptes sont incompatibles avec celles de membre des états provinciaux. »
Le deuxième amendement est de M. Lebeau ; il consiste à substituer aux mots ; ils ne peuvent remplir aucun emploi salarié par le trésor, ceux-ci : ils ne peuvent remplir aucun emploi salarié à la nomination du gouvernement. » (U. B., 31 déc., et A.)
M. Le Grelle propose un amendement tendant à déclarer l'incompatibilité entre les fonctions de député et celles de membre de la cour des comptes. (C., 30 déc. et J. B., 31 déc.)
M. Fransman développe son amendement. (U. B., 31 déc.)
M. Simons propose de dire :
« Les membres de la cour ne peuvent être parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni d'un ministre ou d'un chef d'administration générale. » (P. V.)
M. Lebeau – Mon amendement a pour but de proscrire toute incompatibilité entre les fonctions de membre de la chambre des représentants et celles de membre de la chambre des comptes. Si on avait conservé dans l'article les mots : salariés par le trésor, on aurait pu considérer les traitements alloués aux représentants comme atteints par cette disposition, et exclure de la chambre des comptes les membres de la deuxième chambre ou réciproquement. Je pense, messieurs, que ce serait un grand mal. Le gouvernement représentatif est le gouvernement des capacités. Il faut les prendre partout où on les trouve. Les capacités se font connaître ou se développent dans les discussions publiques des assemblées législatives ; c'est donc parmi les représentants qu'il faudra les chercher, et je pense qu'il est dans l'esprit du gouvernement représentatif, que même les ministres doivent être pris dans les chambres. Que si on adoptait un système contraire, on exclurait les hommes de talent, ou, de la chambre des représentants ou de la cour des comptes, et les hommes de talent ne sont pas assez communs pour qu'on se prive de leurs lumières. (U. B., 31 déc.)
M. de Muelenaere, rapporteur, fait (page 701) observer que la question soulevée par M. Lebeau a été longuement discutée dans le sein de la commission, que toutes les raisons pour et contre ont été débattues, et qu'en définitive la commission a voulu laisser la question indécise pour la livrer tout entière à la décision du congrès. L'opinion personnelle de l'orateur est que les fonctions de représentant et de membre de la cour des comptes sont incompatibles. (U. B. , 31 déc.)
M. Le Grelle – Le travail assidu de la cour des comptes rend le cumul des deux fonctions impossible. (J. B., 31 déc.)
M. Fransman – Il y a un article de la constitution qui dit que tout membre de l'une des chambres qui sera salarié par l'État cessera de siéger. (J. B., 3i déc.)
M. Devaux – Il ne peut y avoir d'incompatibilité, puisque les chambres électives ne sont pas appelées à contrôler le travail de la chambre des comptes. (J. F., 31 déc.)
M. le comte Duval de Beaulieu – J'étais membre de la commission, et j'ai pensé qu'il y avait incompatibilité entre les fonctions de membre de la cour des comptes et celles de représentant. Je partage bien l'opinion de MM. Lebeau et Devaux, quand ils veulent que l'on puisse choisir parmi les députés les membres de la cour des comptes ; mais je crois qu'après leur nomination ils ne peuvent plus être députés. (U. B., 31 déc.)
M. le comte de Celles parle en faveur de l'incompatibilité entre les fonctions de membre de la chambre, et celles de la représentation nationale ; il ne reconnaît nullement l'utilité d'avoir dans les chambres électives des fonctionnaires entre les mains desquels serait passée la comptabilité des agents du pouvoir ; ils ne pourraient que défendre ce qu'ils auraient déjà approuvé. Ayez une comptabilité claire, il n'aura qu'à gagner à être jugée par des gens n'ayant pas de si vastes connaissances. (E., 31 déc.)
M. Lebeau – Les emplois publics ne sont pas une récompense, ils doivent s'accorder à la capacité ; vouloir en faire des récompenses, c'est ramener tout à une proportion mesquine. Qu'on ne vienne pas nous dire qu'être tout à la fois membre de la cour et de la chambre des représentants, ce serait servir deux maîtres. Messieurs, dans un gouvernement représentatif, il n'y a pas deux maîtres à servir ; on n'en sert qu'un, c'est la nation. Vous voulez environner la cour des comptes d'une grande considération : si vous en excluez les représentants, vous n'atteindrez pas votre but, car les hommes d'un vrai mérite ne voudront pas de votre nomination, et pour un salaire de 3,000 fl., ils ne renonceront pas au beau privilège de représenter la nation. Vous trouverez, je le sais très bien, des hommes qui ne mettront pas à plus haut prix leur nomination, mais ce ne seront pas des hommes du premier mérite, et, j'ose le dire, votre cour des comptes ne sera composée que de la lie de la nation. (Murmures.) Une bonne loi sur le cumul eût suffi, ce me semble, pour lever toutes les difficultés sur cette matière. Qu'on ne parle donc plus d'incompatibilité, ou du moins que l'on fasse un essai, et qu'avant de la proclamer, on ait bien constaté qu'elle existe. Toutefois, messieurs, je le dis bien haut, je ne peux pas concevoir cette incompatibilité : si vous l'adoptez pour la chambre des comptes, elle devrait s'étendre à tous les magistrats ; les membres des cours souveraines et des tribunaux ont, en effet, une juridiction bien plus étendue que la cour des comptes. Celle-ci ne juge que quelques comptables, les autres tiennent dans leur balance la fortune, l'honneur, la vie même de tous les citoyens. Fermez-leur aussi la porte de la législature, que vous restera-t-il ? une chambre d'utopistes : vous n'y verrez que des théoriciens, et pas un seul homme pratique. Mais ce n'est pas ainsi que l'on doit entendre le gouvernement représentatif : il lui faut principalement des hommes d'expérience, il lui faut des faits et non des théories. Que signifie encore cette objection, qu'il serait peu séant de voir les représentants de la nation se choisir eux-mêmes. Mais on en devrait dire autant des électeurs, et porter une disposition pour que les collèges électoraux choisissent leurs députés en dehors de leur sein. Vous le voyez, messieurs, toutes les raisons qu'on a déduites tombent devant le plus léger examen. Je persiste de plus fort dans mon amendement. (U. B.. 31 déc.)
M. le comte d’Arschot – L'expérience de tous les temps nous prouve que quand un homme a deux fonctions à remplir, l'une d'elles en souffre nécessairement. Cette première considération suffirait pour rendre manifeste à mes yeux l'incompatibilité des fonctions de représentant avec celles de membre de la cour des comptes. Mais il en est encore une plus puissante : la cour des comptes sera composée d'un si petit nombre de membres, qu'il ne serait pas étonnant que tous ou presque tous appartinssent à la chambre des représentants ; et alors il arriverait, ou que le service de la cour serait suspendu, ou que les membres n'assisteraient pas assidûment à nos séances. Je vote donc contre l'amendement de M. Lebeau. (U. B., 31 déc.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire - (page 702) Voici un amendement de M. de Muelenaere :
« Les membres de la cour des comptes ne peuvent être membres de l'une ou de l'autre chambre législative, ni remplir aucun emploi salarié par le trésor. » - (Le reste comme au projet.) (U. B., 31 déc., et P. V.)
M. Le Grelle retire son amendement et se rallie à celui de M. de Muelenaere. (U. B., 31 déc.)
M. le comte de Quarré propose un amendement ainsi conçu :
« Les membres de la chambre des comptes pour être élus et continuer à y siéger, etc. » (A.)
M. de Brouckere déclare que, malgré la vive sympathie qu'il éprouve pour l'amendement de M. de Muelenaere, il soutiendra celui de M. Lebeau. La réélection à laquelle seront soumis les représentants qui accepteront leur place de membres de la cour des comptes lui suffit. On a parlé, ajoute l'honorable membre, des grands travaux de la cour des comptes ; mais alors il faudrait exclure de la chambre des représentants les chefs des départements ministériels, car je ne sache pas de fonctions dans l'État qui exigent un plus grand travail que celles de ministre. Cependant, messieurs, au lieu de les en éloigner, il est nécessaire qu'ils en fassent partie. En Angleterre, pour faire une proposition de loi à la chambre des communes, il faut en être membre, et c'est un moyen de forcer la couronne à choisir toujours quelques-uns de ses ministres dans cette chambre. Si vous voulez des notabilités dans la cour des comptes, il faut que vous permettiez le cumul, parce que c'est dans la législature que vous trouverez les hautes capacités. Si le cumul est interdit, renoncez à avoir des hommes de talent, parce que, pour entrer à la cour des comptes, les hommes de talent ne renonceront pas au plus beau mandat dont un citoyen puisse être honoré, celui de représenter un pays. (Aux voix ! aux voix ! la clôture !) (U. B., 31 déc.)
M. Alexandre Rodenbach appuie fortement l'amendement de M. de Muelenaere. Si les six conseillers, dit-il, de la cour des comptes étaient nommés tous les six représentants du peuple, qui est-ce qui vérifierait alors la gestion des comptables de la nation ? (J. F., 31 déc.)
M. Van Snick demande la parole. (Les cris : Aux voix ! la clôture ! étouffent sa voix. A peine le bruit a-t-il cessé que M. Van Snick veut parler ; mais dès les premiers mots il est arrêté par de nouveaux cris : Aux voix ! la clôture ! L'honorable membre s'élance à la tribune, il attend que le calme soit rétabli). – Messieurs, on a entendu MM. Lebeau et de Brouckere, aussi longtemps qu'il leur a plu de parler ; il me semble que vous devez me permettre de leur répondre. (U. B., 31 déc.)
- De toutes parts – Non ! non ! la clôture ! la clôture ! (U. B., 31 déc.)
M. le président – Je dois consulter l’assemblée et mettre la clôture aux voix. (U. B., 31 déc.)
- La clôture est prononcée. (U. B., 31 déc.)
M. Van Snick descend de la tribune. (E., 31 déc.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, lit l'amendement de M. le comte de Quarré.
- Il est mis aux voix et rejeté. (U. B., 31 déc.)
L'amendement de M. Simons est ensuite mis aux voix et adopté. (P. V.)
L'amendement de M. de Muelenaere est pareillement mis aux voix et adopté. (P. V.)
La première partie de la disposition additionnelle de M. Fransman est aussi adoptée. (P. V.)
La deuxième partie de la disposition additionnelle de M. Fransman est ensuite mise aux voix et rejetée. (U. B., 31 déc.)
M. Charles de Brouckere – Avant de mettre aux voix l'article 2, je ne sais si je peux encore présenter un sous-amendement sans lequel cet article serait inexécutable. (Parlez ! parlez !) M. Simons a proposé d'exclure les parents ou alliés de ministres ou de chefs d'administration générale ; je voudrais que l'on ajoutât : au moment de leur nomination ; car, si la disposition restait telle que nous l'avons votée, en nommant un ministre parent au quatrième degré d'un membre de la cour des comptes, le gouvernement prononcrait l'exclusion de ce membre, et si le ministère changeait tous les jours comme en France (on rit), tous les quinze jours la chambre des comptes courrait le risque d'être renouvelée. Vous donneriez donc par là au gouvernement un moyen indirect d'exclure de la cour tel membre qui lui déplairait. Un autre inconvénient encore, c'est qu'il pourrait arriver que tel, à qui on offrirait un portefeuille, refuserait de l'accepter, s'il avait un parent à la cour des comptes, pour ne pas être cause de son exclusion : avec le sous-amendement que je propose, tous les obstacles sont levés. (U. B.., 31 déc.)
M. Simons consent à ce sous-amendement. (U. B., 31 déc.)
- Le sous-amendement est mis aux voix et adopté. (P. V.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, (page 703) donne lecture de l'ensemble de l'article 2 amendé :
« Les membres de la cour des comptes ne peuvent être parents ou alliés entre eux au quatrième degré, inclusivement, ni, à l'époque de leur nomination, parents ou alliés au même degré d'un ministre ou d'un chef d'administration générale. Ils ne peuvent être membres de l'une ou de l'autre chambre législative, ni remplir aucun emploi salarié par le trésor, ni être directement ou indirectement intéressés dans aucune entreprise, gestion ou affaire sujette à une comptabilité envers l'État.
« Ils ne peuvent délibérer sur des affaires qui les concernent personnellement, ou dans lesquelles leurs parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclusivement sont intéressés. (U. B., 31 déc., et P. V.)
- Cet article est mis aux voix et adopté. (P. V.)
L'assemblée décide qu'il n'y aura pas séance ce soir ; il est quatre heures et demie ; la séance est levée. (C., 30 déc.)