(Annales parlementaires de Belgique, session 1846-1847)
(Présidence de M. Liedts.)
(page 1150) M. Huveners fait l’appel nominal à 1 heure et un quart.
M. de Man d’Attenrode donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.
M. Huveners communique l’analyse des pièces adressées à la chambre.
« Plusieurs habitants de Loenhout demandent la distribution gratuite du maïs pour le mois d'août prochain. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Les sieurs Davignon et Funcken, président et membre de la Société agricole et forestière de Jalhay, prient la chambre de voter les fonds nécessaires à l'achat de céréales qui seraient vendues pour la consommation sur les divers marchés régulateurs, de limiter la distillation des grains, de rapporter la loi de 1834, d'autoriser le transport gratuit des denrées alimentaires et de voter un emprunt pour faire améliorer partout la voirie vicinale. »
« Plusieurs administrations communales adhèrent à cette pétition. »
- Même renvoi.
« Les notaires du canton de Cruyshautem demandent la prompte discussion du projet de loi sur le notariat. »
« Même demande de plusieurs notaires d'Anvers. »
« Plusieurs notaires de Liège demandent que cette discussion soit ajournée, et présentent des observations contre le projet de loi. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
M. Delfosse. - Je suppose que l'honorable rapporteur du projet de loi sur le notariat a soin de prendre communication de toutes les pétitions qui nous arrivent.
« Le sieur de Ridder, artiste vétérinaire, demande que le projet de loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire contienne une disposition transitoire qui permette aux vétérinaires non diplômés actuellement établis, de continuer l'exercice de leur art. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi.
« La chambre de commerce d'Alost demande la réforme postale basée sur la taxe uniforme de 10 centimes, et prie la chambre de s'occuper, pendant la session actuelle, du projet de loi qui modifie le régime postal. »
- Renvoi à la section centrale chargée de l'examen du projet.
« Le sieur Coppin demande que le gouvernement engage les administrations communales à suspendre immédiatement, jusqu'au 1er juillet 1847, tout droit d'octroi sur les principales denrées alimentaires et notamment sur la viande. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Plusieurs fabricants de toiles demandent des mesures de protection en faveur de l'industrie linière. »
M. Rodenbach. - Messieurs, la pétition dont on vient de faire l'analyse vous est adressée par plusieurs fabricants et négociants en toile de Bruges. Plusieurs conseillers de régence se sont joints à ces messieurs pour demander à la chambre des mesures, protectrices de l'industrie linière ; déjà plusieurs brochures et pétitions relatives à cette question et aux droits à l'exportation du lin ont été renvoyées à la commission d'industrie ; je demanderai que la pétition actuelle lui soit également renvoyée et que la commission soit invitée à faire un prompt rapport sur toutes ces pièces.
- Cette proposition est adoptée.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux) fait connaître le résultat du supplément d'instruction auquel a été soumis le projet de rectification des limites entre les communes de Lambusart et de Moignelée, et prie la chambre de renvoyer toute l'affaire à la commission qui a été chargée d'examiner le projet de loi.
M. Pirmez. - Je ferai remarquer, messieurs, que c'est déjà la troisième fois qu'on remet cette affaire au moment où elle doit être décidée. Je viens de prendre lecture de la lettre de M. le ministre de l'intérieur, et je vois que M. le ministre est favorable à l'adoption de la proposition faite par la commission. C'est, d'ailleurs, le résultat d'une transaction, car Lambusart a d'autres droits à faire valoir, et si maintenant l'affaire est renvoyée à la commission, il est bien entendu que tous ces droits lui sont réservés. Lorsque M. le ministre demande un ajournement, je sais combien il est difficile de décider la chambre a se prononcer immédiatement, mais je ferai remarquer que c'est un abus de traîner aussi longtemps cette affaire. Si la chambre prononce le renvoi à la commission, il est bien entendu que tous les anciens droits de la commune de Lambusart demeurent réservés.
M. Fallon. - Dans une précédente séance la chambre a accordé un délai jusqu'au 15 mars pour laisser à la députation permanente de Namur le temps de produire différents documents. J'ignorais que ces pièces avaient été communiquées au département de l'intérieur ; je ne l'ai appris que ce matin. Je tiens ici le dossier ; il est très volumineux et il renferme des titres très anciens. J'appuie donc la proposition de M. le ministre de l'intérieur, car si la chambre voulait aborder maintenant la discussion, je serais obligé de parcourir toutes les pièces et je tiendrais peut-être plus d'une séance.
M. Pirmez. - Quand il s'agit d'affaires de cette nature, les pièces sont d'abord examinées et discutées par les députations des états. C'est après qu'on en a agi ainsi, que le gouvernement soumet une proposition à la chambre, et dans ce cas-ci, après quarante années de contestations par une transaction entre les intérêts, M. le ministre nous a soumis le projet sur lequel la commission a prononcé. Voudrait-on faire examiner par la chambre toutes les anciennes pièces de ce long procès ?
M. Fallon. - La députation permanente du conseil provincial du Hainaut fonde ses prétentions sur une matrice de rôle de l'an XIII qui ne se trouve pas au dossier du ministère de l'intérieur. Si l'on produit des pièces que la commission n'a pas eues sous les yeux, il importe, avant que la chambre se prononce, que la commission examine les pièces.
M. Pirmez. - Il n'y a pas de raison pour que dans huit jours nous ne soyons encore au même point.
M. Fallon. - J'attendrai que la chambre se soit prononcée sur le renvoi ; j'aurai alors, le cas échéant, à faire une proposition.
- Le renvoi demandé par M. le ministre de l'intérieur est mis aux voix et adopté.
M. Fallon. - Un membre de la commission, l'honorable M. Thyrion, est absent pour cause d'indisposition. Si on veut avancer l'affaire, on doit compléter la commission. Je désirerais pouvoir réunir la commission le plus tôt possible. Je proposerai donc à la chambre de nommer un nouveau membre, en remplacement de M. Thyrion.
M. Lejeune. - Je pense qu'il conviendrait mieux d'adjoindre un sixième membre à la commission, qui est composée de cinq membres.
- La chambre, consultée, décide qu'un sixième membre sera adjoint à la commission. Elle décide ensuite que la nomination se fera par le bureau.
M. Vilain XIIII remplace M. Liedts au fauteuil.
M. Clep, rapporteur. - Messieurs, dans la séance du 27 janvier 1847, vous avez renvoyé à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport, la requête du sieur Chevalier, marchand tapissier à Mons, réclamant l'intervention de la chambre pour obtenir, en faveur de son fils Théodore, la pension annuelle promise par la loi du 29 nivôse an XII (19 janvier 1805} au père de famille qui a sept enfants vivants.
Le sieur Chevalier expose qu'il se trouve dans les termes de la loi, qu'il a fait sa déclaration le 21 novembre dernier et invoque à son appui l'autorité d'un arrêt rendu, dit-il, le 22 mai 1846, en Hollande, pays qui, comme la Belgique, a encore fait partie de l'empire français.
Le pétitionnaire ajoute encore que M. le ministre de l'intérieur lui a répondu qu'il ne croyait pas devoir admettre ses prétentions.
Tel est l'exposé de cette réclamation qui a été soumise à la commission des pétitions.
Nous savons, messieurs, qu'une question identique a fait la matièie d'un débat judiciaire en Hollande, et que le gouvernement a été condamné à payer une pension annuelle, jusqu'à l'âge de 18 ans, en faveur d'un septième enfant.
L'on sait encore que le gouvernement néerlandais, tout en respectant l'autorité de la chose jugée, vient de présenter aux états généraux un projet de loi pour le retrait de la loi du 29 nivôse an XIII.
A cette occasion, ce gouvernement a communiqué aux sections les renseignements qu'il a obtenus du gouvernement français sur la même loi. Voici ces renseignements tels qu'ils sont consignés dans le Journal de La Haye, en date du 10 du mois courant :
« La loi du 29 nivôse an XIII n'a jamais reçu d'exécution en France : à peine eut-elle été promulguée, qu'on reconnut par le nombre infini des demandes qui s'appuyaient sur ses dispositions, qu'elle était inexécutable. »
La subvention spéciale qui aurait été nécessaire ne fut point portée au budget.
« La loi du 29 nivôse n'ayant pas été abrogée, le bénéfice en est quelquefois encore réclamé ; mais la désuétude est constamment opposée à ces réclamations. »,
La commission des pétitions estime que les explications ou considérations ci-dessus sont parfaitement applicables à la réclamation qui nous occupe, et, comme elle n'a non plus aucune connaissance que la loi du 29 nivôse ait encore été exécutée en Belgique, la commission a l'honneur de vous proposer, messieurs, l'ordre du jour sur cette requête.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Clep, rapporteur. - Messieurs, dans la séance du 2 février 1846 vous avez renvoyé à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport, la requête de plusieurs propriétaires et habitants de Flemalle, Sclessin et autres communes dans la province de Liège qui demandent l'abrogation de l'article 7 du titre XXVIII de l'ordonnance de 1669 sur la police du halage.
Ces pétitionnaires se plaignent de différents griefs et entre autres qu'un arrêté royal accorde, disent-ils, le droit arbitraire à l'ingénieur chargé du service de la Meuse, de rétrécir d'après son bon vouloir le chemin de halage, d'abandonner celui qui existe sous prétexte qu'il est devenu trop bas ou qu'il est détérioré par la faute même du gouvernement, pour le reporter ensuite à une plus grande largeur sur les terrains des riverains.
Après cet exposé, les pétitionnaires prient la chambre de remplacer l'article 7 du titre VIII de ladite ordonnance de 1669 par une loi qui concilie mieux les besoins de la navigation avec le respect dît aux propriétés riveraines.
La commission des pétitions ne peut qu'appuyer cette demande, et pour les considérations ci-dessus elle vous propose, messieurs, de renvoyer cette requête à M. le ministre des travaux publics.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Clep, rapporteur. - Messieurs, dans la séance du 5 février 1847, vous avez renvoyé à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport, la demande de la députation permanente du conseil provincial de Namur, réclamant une nouvelle loi sur la police du halage et sur l'étiage des rivières.
La députation permanente avait été chargée de cette mission par décision du conseil provincial de Namur, cette décision avait été prise dans sa dernière session sur la proposition de l'un de ses membres, et motivée sur ce qu'il convient de remplacer le plus tôt possible l'ordonnance de 1669 par une loi qui concilie mieux les besoins de la navigation avec le respect dû aux propriétés riveraines.
La commission des pétitions, prenant en considération les plaintes multipliées qui se sont élevées contre l'exécution de cette ordonnance, vous propose, messieurs, l'envoi de cette réclamation à M. le ministre des travaux publics.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Le Roi m'a chargé de présenter à la chambre un projet de loi pour l'acquisition de quelques immeubles à Bruxelles.
Ce projet est ainsi conçu :
« Article unique. Il est ouvert au département des finances un crédit supplémentaire de 490,000 fr. pour l'acquisition de deux hôtels n°12 et 14 rue de la Loi et d'une maison n°5, rue de l'Orangerie, à Bruxelles.
« Ce crédit formera l'article unique du chapitre VIII du budget des finances pour l'exercice 1847.
« La dépense sera imputée sur le fonds spécial provenant des ventes de biens domaniaux. »
M. le président. - Il est donné acte à M. le ministre de la présentation du projet de loi dont il vient de donner lecture. Ce projet et les motifs qui l'accompagnent seront imprimés et distribués aux membres.
Comment la chambre veut-elle que ce projet soit examiné ?
Plusieurs membres. - Par une commission.
M. Osy. - Ce projet n'a rien d'urgent, je demande formellement qu'on le renvoie à l'examen des sections.
- Le renvoi aux sections est ordonné.
M. le président. - L'ordre du jour appelle la prise en considération de demandes en naturalisation ordinaire (feuilletons n°4 et 5).
- Il est procédé à l'appel nominal. En voici le résultat :
Nombre des votants, 54. Majorité, 28.
Tous les pétitionnaires ayant réuni plus de la majorité des suffrages, les demandes sont prises en considération. Ce sont les suivantes :
Georges-Jean Goodman, employé à l'administration des chemins de fer de l'Etat, né à Londres, le 30 janvier 1814, domiciliée Ixelles (Brabant).
Jacques-Bernard Parasie, capitaine commandant au 1er régiment de cuirassiers, né à Gand, le 5 mars 1795.
Charles-Corneille Zeehoff, sous-lieutenant au 3ème régiment des chasseurs à pied, né à Goedereede, Pays-Bas, le 17 janvier 1809.
Jean-Jurgen Hinrichsen, capitaine de navire au long cours, né à Fohr (Danemarck), le 26 septembre 1811, domicilié à Anvers.
Herre Arends, capitaine en second de navire au long cours, né à l'ire de Juist (Hanovre), le 6 janvier 1817, domicilié à Anvers.
Martin Pienschke, capitaine de navire au long cours, né à Broesen (Prusse), le 29 janvier 1795, domicilié à Anvers.
Tjark-Overwien Meents, capitaine de navire au long cours, né à Tunnix (Hanovre), le 20 septembre 1814, domicilié à Anvers.
André-Albert Jansen, capitaine en second de navire au long cours, né à Keitum (Danemark), le 28 octobre 1819, domicilié à Anvers.
Michel Michelsen, capitaine de navire au long cours, né à Christiansoe (Danemark), en 1800, domicilié à Anvers.
Jean-Ihnken Reeners, capitaine de navire au long cours, né à Carolinersyhl (Hanovre), le 10 octobre 1805, domicilié à Anvers.
Jean-Martin Dam, capitaine de navire au long cours, né à Lubeck (Allemagne), le 23 août 1801, domicilié à Anvers.
Pierre-Jean Giebelstein, capitaine en second de navire au long cours, né à Petersdorf (Danemark), le 29 août 1812, domicilié à Anvers.
Riewert-Boy Ketelsen, premier second de navire au long cours, né à Oldsum (Danemark), le 15 janvier 1819, domicilié a Anvers.
Jens-Jens Petersen, capitaine de navire au long coars, né à Morsum (Danemark), le 30 août 1806, domicilié à Anvers.
Henri-Thies Dirks, capitaine en second de navire au long cours, néa Morsum (Danemark), le 24 décembre 1817, domicilié à Anvers.
Arfst-Rord Arfsten, capitaine de navire au long cours, né à Alkersum (Danemark), le 16 septembre 1791, domicilié à Anvers.
Jean-Henri-Clément Nieberding, capitaine de navire au long cours, né à Steinfeld (Oldenbourg), le 28 novembre 1810, domicilié à Anvers.
Gérard Kuiper, capitaine de navire au long cours, né à Kleinemeer (Pays-Bas), le 22 février 1811, domicilié à Anvers.
Charles-Joseph Gerberding, capitaine de navire au long cours, né à Steinfeld (Oldenbourg), le 26 février 1812, domicilié à Anvers.
Wybrand de Ryk, capitaine de navire au long cours, né à Woudsend (Pays-Bas), le 31 mars 1803, domicilié à Anvers.
Harke-Bruns Wegman, second de navire au long cours, né à Embden (Hanovre), le 3 décembre 1819, domicilié à Anvers.
Frédéric-Guillaume-Louis Mente, musicien gagiste au régiment d'élite, né à Burgel (Saxe), le 13 janvier 1819.
François-Pierre Marquet, négociant, né à Selles (France), le 28 nivôse an X, domicilié à Liège.
Félicissime-Alphonse Laisné, brigadier-tailleur au 1er régiment de chasseurs à cheval, né à Hesdin (France), le 28 juillet 1808.
Edouard Servantes, sergent au 12ème régiment de ligne, né à Londres, le 7 août 1803.
Jean-Baptiste Meurisse, sergent-major armurier au 2ème régiment des chasseurs à pied, né à Ferrière-le-Grand (France), le 20 février 1806.
Henri Chambaz, sergent au 9ème régiment de ligne, né à Gauljon (Suisse), le 17 décembre 1786.
Jean Warg, chef de musique au 1er régiment de ligne, né à Hamelm (Hanovre), le 14 juin 1804.
Dieudonné Daubourg, musicien gagiste au 2ème régiment de ligne, né à Mayence, le 6 janvier 1815.
Edouard-Jean-Baptiste Carré, soldat au 1er régiment des chasseurs à cheval, né à Rochefort (France), le 31 janvier 1813.
Jean-Pierre-Louis-Eugène Lureau, capitaine au 3ème régiment de ligne, né à Bordeaux (France), le 17 juillet 1807.
Nicolas Molitor, employé à l'administration des chemins de fer de l'Etat, né à Grevenmacher (grand-duché de Luxembourg), le 21 juillet 1821, domicilié à Bruxelles.
Jean Wardle, chef d'atelier de l'administration des chemins de fer de l'Etat, né à Framlington (Angleterre), le 27 décembre 1791, domicilié à Malines.
Auguste-Anne Coyon, professeur au collège communal, né à Sainte-Ménéhould (France), le 19 janvier 1806, domicilié à Huy.
Joseph-Adrien Hiver, sculpteur, né à Charleville (France), le 24 avril 1810, domicilié à Gand.
Jean-Guillaume Gyr, sergent-major au 2ème régiment de ligne, né à Aix-la-Chapelle, le 5 septembre 1819.
Isidore Bonheur, sergent-major au 5ème régiment de ligne, né à Versailles, le 4 juillet 1824.
Henri-Auguste-Adrien-Jean-Baptiste de Biber, sergent-fourrier au 6ème régiment de ligne, né à Thionville (France), le 9 avril 1825.
Nicolas-François Deberle, capitaine au 1er régiment de chasseurs à pied, né à Paris, le 1er octobre 1798.
Philippe-Olivier Leroy, soldat au 8ème régiment de ligne, né à Condé (France), le 22 mars 1819.
Frédéric-Guslave-Louis Bailleu, enseigne de vaisseau, né à Anvers, le 22 janvier 1814.
Adolphe Black, capitaine au 1er régiment de chasseurs à pied, né à Cherbourg (France), le 25 octobre 1806.
Chrétien-Thomas Branehazi, sergent au 12ème régiment de ligne, né à Trons (Suisse), le 31 juillet 1804.
Philippe-Guillaume-Dirk Westendorp, maréchal des logis au 2ème régiment de lanciers, né à Louvain, le 12 novembre 1818.
Et François-Joseph-Berlin Podevin, capitaine au 5ème régimeiu de ligne, né à Calais (France), le 25 fructidor an XI.
- Ces demandes seront transmises au sénat.
(page 1152) II est procédé au scrutin secret pour la prise en considération de la demande de grande naturalisation formée par le sieur Grégoire Gauchin, capitaine de première classe au régiment d'élite.
Voici le résultat du vote :
Nombre des votants, 50.
Majorité absolue, 26
Boules blanches, 44
Boules noires, 6.
En conséquence la demande de grande naturalisation du sieur Grégoire Gauchin est prise en considération ; elle sera transmise au sénat.
Il est procédé au scrutin secret pour la prise en considération de la demande de grande naturalisation formée par le sieur François-Philippe Hoed, ancien capitaine de navire de commerce, à Ostende.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre des votants, 51.
Majorité absolue, 26.
Boules blanches, 12.
Boules noires, 39.
En conséquence, la demande de grande naturalisation du sieur François Philippe Hoed n'est pas prise en considération.
M. de Man d’Attenrode. - Messieurs, je vais tâcher d'être clair et concis ; la cause que je défends ne peut qu'y gagner. J'établirai de plus, messieurs, que la chambre a agi sagement en ajournant à aujourd'hui le vote définitif de la loi portant règlement pour l'exercice de 1840.
La somme de 405,939 francs 91 centimes est sortie du trésor de l'Etat sur la demande du département des travaux publics, pendant l'exercice de 1840, pour l'établissement des chemins de fer, et à l'heure qu'il est, en 1847, nous ignorons encore ce que cette somme est devenue. Ceci est une chose constante. Quel délai imposerez-vous à l'administration, endéans lequel elle aura à produire les justifications nécessaires pour mettre sa responsabilité à couvert ? Telle est la question, messieurs, que je défère à votre jugement. Elle n'est pas d'une importance aussi imperceptible qu'a bien voulu le dire, dans la séance de samedi dernier, l'honorable ministre des finances.
La commission des finances vous propose, par la rédaction de son article C, de retrancher, de la somme des crédits définitifs de l'exercice, un crédit de 1,481,268 fr. 77 c, parce qu'il n'a pas été dépensé pendant l'exercice ; plus un crédit de 405,939 fr. 91c. parce que, bien que dépensé, il n'a pas été justifié de son emploi : elle vous propose encore de renvoyer ces crédits spéciaux s'élevant à 1,887,208 fr. 68 c. à l'exercice 1843.
Pourquoi vous a-t-elle fait cette proposition ? C'est pour donner un délai au gouvernement afin d'en justifier. Ce délai, d'après des calculs faciles à faire, est de 18 mois environ. En effet, la commission des finances ne pourra s'occuper du projet de loi tendant à régler cet exercice que dans le courant de l’année prochaine. Que nous a proposé M. le ministre des finances ? Il a proposé de renvoyer ces crédits à l'exercice de 1847. Comme l'exercice a une durée de 3 ans et que les mesures nécessaires pour établir le compte et pour le faire vérifier par la cour exigent, d'après ce qui se passe jusqu'à présent, près de deux ans, il s'ensuivra que si l'amendement, adopté samedi, l'est aujourd'hui d'une manière définitive, la commission des finances et la chambre, ensuite, ne pourront statuer sur l'emploi des 405,939 francs que dans quatre ou cinq ans.
Mais, messieurs, songez-y : accorder 4 ou 5 ans, c'est permettre au temps de faire disparaître les agents que l'on pourrait tenir responsables ; c'est anéantir le recours à la responsabilité administrative, s'il y a lieu ! Et cela pour quel motif ? parce que cela simplifierait la besogne des employés de la trésorerie ; c'est le seul motif allégué par le gouvernement.
Je vous avouerai que ce motif me semble d'une bien faible importance. Je pense que notre devoir est d'agir envers le trésor public comme nous agirions pour nous-mêmes, comme nous agirions pour la gestion de notre propre fortune. Je suppose, messieurs, que l'un d'entre nous ait confié une somme considérable à un homme d'affaires pour une construction. Au bout de quelque temps, cet agent lui rend compte d'une partie de cette somme ; mais que feriez-vous, messieurs, si, ensuite, il tardait 5 ou 6 ans à justifier de l'autre partie, qui serait assez considérable ? Je pense, messieurs, que dans cette circonstance, pour vous conformer aux règles de la prudence la plus vulgaire, et sans agir avec trop de rigueur, vous fixeriez un délai de quelques mois à cet agent, au bout duquel il aurait à justifier de la somme totale qui lui aurait été confiée ; et si au bout de ce délai il ne l'avait pas fait, vous aviseriez aux moyens de l'y contraindre.
Eh bien, messieurs, je pense que nous devons agir de même pour les finances de l'Etat. Nous devons fixer un délai. Ce délai ne doit pas être trop long. Nous en avons proposé un qui est, comme je viens de le dire, d'un an et demi, et qui me semble très suffisant.
D'ailleurs, messieurs, voici un argument final en faveur de la rédaction de l'article C, proposée par la commission des finances. L'amendement qu’il a été adopte samedi dernier est en contradiction flagrante avec l'article 10. La commission des finances, en rejetant de l'art. 6, qui fixe les crédits, une somme de 1,887,208 fr., a dû tout naturellement augmenter le chiffre du boni de l'exercice, qui se trouve fixé par l'article 10. Eh bien, M. le ministre des finances, en faisant adopter un amendement à l'article 6, n'a pas songé à en proposer un autre à l'article 10, ce qui était une conséquence indispensable de sa proposition, car tous les articles d'une loi de ce genre s'enchaînent les uns aux autres. Maintenant que cet article 10 est adopté définitivement, si l'on veut respecter le règlement, on ne peut pas y revenir. Je reconnais toutefois que la chambre est omnipotente, et si la chambre, consultée, décide qu'on peut y revenir, on y reviendra.
En somme, messieurs, ce que je réclame c'est de fixer un délai qui ne soit pas trop éloigné. J'insiste en faveur du maintien de l'article 6 proposé par la commission des finances, comme conséquence de l'adoption définitive de l'article 10. En agissant ainsi, vous ne ferez que confirmer ce que vous avez fait les années précédentes pour les exercices antérieurs, en renvoyant leurs excédants de recette ou de dépense à l'exercice 1843. Et cette mesure a été adoptée par la commission des finances, de concert avec le département des finances, et cette mesure a eu la sanction de la législature, pour tous les exercices antérieurs.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Messieurs, je n'entretiendrai pas longtemps la chambre de cette question qui n'a d'importance ni en principe, ni en fait. Il ne s'agit pas d'abord d'éviter quelque travail aux bureaux de l'administration des finances ; voici ce dont il s'agit ;
Les sommes dont l'honorable rapporteur vient de parler forment des fonds spéciaux qui ne se rattachent pas à un exercice déterminé ; si une partie de cette dépense n'a pas été justifiée dans le cours de l'exercice, c'est principalement, parce que la dépense elle-même n'était pas faite ; elle ne doit pas être justifiée avant qu'elle ne soit faite ; on me concédera du moins ce point.
Ainsi, en 1843,l'on a dépensé 295,000 fr., et en 1844, 183,000 fr. sur ce crédit ; il est dès lors évident qu'on ne pouvait justifier l'emploi du crédit en 1843.
L'honorable rapporteur croit avoir découvert un abus ; mais, je dois le dire, il s'est trompé ; il n'y a pas l'ombre d'un abus ; c'est un fait sans conséquence et d'ailleurs inévitable, que l'emploi de ces fonds constitue un fonds spécial ouvert même après la clôture de l'exercice.
J'avais proposé au premier vote l'année 1847, parce que la dernière partie de cette dépense s'est faite dans les premiers jours de l'année courante. Pour montrer que je ne désire pas du tout retarder la justification de cette dépense, je propose moi-même à la chambre de porter cette somme, non pas à l'exercice 1843, mais à l'exercice 1845. Comme la dépense est aujourd'hui complète et que l'exercice 1845 ne sera clos qu'à la fin de 1847, j'espère que ce moyen terme ne pourra être admis : j'avance ainsi de 2 ans le terme tant désiré par l'honorable rapporteur.
Si l'on adopte le chiffre 1845 à l'article 6, je demande que, par voie de conséquence et en vertu du règlement, on modifie l'article 10.
- La discussion est close.
Le chiffre 1845 proposé par M. le ministre des finances est mis aux voix et n'est pas adopté.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Il faut maintenant mettre aux voix le chiffre 1847, qui a été adopté lors du premier vote.
M. Vanden Eynde (sur la position de la question). - Messieurs, je ne pense pas qu'on puisse mettre encore aux voix le chiffre 1847 qui a été adopté, lors du premier vote. Dans la séance de samedi, la chambre, sur la proposition de M. le ministre des finances, avait adopté le chiffre 1847 ; aujourd'hui, M. le ministre est venu demander un changement à ce chiffre, il a proposé de substituer 1845 à 1847, et le chiffre 1845 n'a pas été adopté. Le chiffre 1847 ne peut plus être mis aux voix.
M. le ministre des finances (M. Malou) (sur la position de la question). - Messieurs, pour prévenir toute discussion, je me rallie au chiffre 1843. Il en résultera seulement que l'année prochaine on aura une nouvelle discussion sans but et sans résultat.
- Le chiffre 1843 est mis aux voix et adopté.
On procède à l'appel nominal pour le vote sur l'ensemble du projet de loi.
Le projet est adopté à l'unanimité des 49 membres qui ont répondu à l'appel nominal ; il sera transmis au sénat.
Ont pris part au vote : MM. Pirmez, Pirson, Rogier, Sigart, Van Cutsem, Vanden Eynde, Vandensteen, Vilain XIIII, Wallaert, Zoude, Biebuyck, Cans, Clep, d'Anethan, David, Dechamps. de Corswarem, Dedecker, de Garcia de la Vega, de Haerne, Delfosse, de Man d'Attenrode, de Meester, de Renesse, de Roo, Desmaisières, Desmet, de Theux, de T'Serclaes, d'Hoffschmidt, Donny, A. Dubus, Eloy de Burdinne, Fallon, Fleussu, Henot, Huveners, Jonet, Kervyn, Lange, Lebeau, Le Hon, Lejeune, Lesoinne, Lys, Malou, Nothomb, Orban, Osy.
« Article unique. Le gouvernement est autorisé à rectifier, de concert avec le gouvernement français, la limite frontière entre les territoires belge et français, au point de contact des communes de Sugny (Belgique) et de Donchery (France).
« Cette délimitation sera déterminée, s'il y a lieu, conformément à la ligne A, B, C, D, E, tracée sur le plan ci-annexé, en prenant pour point de jonction des deux communes le chêne-charme indiqué par la lettre F. »
(page 1153) Personne ne demandant la parole, il est procédé au vote par appel nominal.
Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 48 membres qui ont répondu à l'appel. Il sera transmis au sénat.
« Article unique. Il est ouvert à l'article premier du chapitre V du budget du département des finances de l'exercice 1840 (pensions), un crédit supplémentaire de soixante et douze mille francs (fr. 72,000). »
- Personne ne demandant la parole, il est procédé au vote par appel nominal.
Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 53 membres qui ont répondu à l'appel.
Il sera transmis au sénat.
Ont répondu à l'appel : MM. Pirmez, Pirson, Rodenbach, Rogier, Sigart, Van Cutsem, Vanden Eynde, Vandensteen, Veydt, Wallaert, Zoude, Anspach, Biebuyck, Cans, Clep, d'Anethan, David, Dechamps, de Corswarem, Dedecker, de Garcia de la Vega, de Haerne, de Lannoy, Delfosse, de Man d'Attenrode, de Meester, de Renesse, de Roo, Desmaisières, de Smet, de Theux, de T'Serclaes, d'Hoffschmidt, Donny, Dubus (Albéric), Eloy de Burdinne, Fallon, Fleussu, Henot, Huveners, Jonet, Kervyn, Lange, Lebeau, Le Hon, Lejeune, Lesoinne, Lys, Malou, Nothomb, Orban, Osy et Vilain XIIII.
M. de Roo, rapporteur. - Je demande la parole pour présenter quelques observations préliminaires.
Messieurs, à la section centrale nous avons écarté tous les amendements qui ne se rapportaient pas directement au principe du projet de loi proposé, afin d'éviter d'entrer dans la discussion de la loi générale et de nous circonscrire dans le projet actuel. L'année dernière nous avions ajourné le même projet de loi afin d'obtenir une loi plus complète sur la matière. Nous n'avons pas réussi ; car on nous a renvoyé cette année le même projet que nous avions ajournée. Force nous a donc été d'examiner ce projet tel qu'il nous a été présenté. Ce projet est loin de satisfaire à toutes les exigences ; mais il a cependant un côté utile. C'est celui de jeter les bases d'une révision prochaine.
Adopter des modifications à la loi générale, admettre des dispositions incohérentes, ce serait jeter de la confusion dans le projet de loi. Ou il faut ajourner le projet de loi, ou il faut se restreindre dans les principes qu'il consacre.
Ce n'est pas moi qui suis opposé à accepter quelques modifications à la loi générale. Je crois qu'il en est qu'il pourrait être utile d'y introduire, mais je soutiens qu'il y aurait inopportunité.
On ne peut point perdre de vue qu'il s'agit ici d'une loi de principe, qui doit amener une révision de la loi générale et des lois subséquentes sur la milice. C'est alors que les modifications à ces lois trouveront leur place, modifications qui actuellement ne pourraient que jeter de la confusion dans la loi actuelle.
Si on veut faire une bonne loi, on doit en écarter tout ce qui y est inutile.
M. Lebeau. - Quel que soit le cercle dans lequel on veut nous circonscrire, je crois cependant qu'en attendant une révision générale, (que j'espère très peu, en raison du nombre considérable de dispositions qu'il s'agit de réviser), s'il était reconnu que par un amendement, qui n'affecterait pas l'économie de la loi générale, et qui aurait pour résultat de mettre un terme à des abus dont personne ne conteste l'existence, il conviendrait d'adopter un tel amendement ; on ne pourrait l'écarter par une fin de non-recevoir. Je ne veux pas d'emblée en proposer un ; je désire en laisser l'initiative au gouvernement.
Depuis longtemps, on se plaint d'une divergence dans la jurisprudence administrative en matière de milice et de garde civique. Il est connu de tous ceux qui s'occupent d'administration, que les députations des conseils provinciaux n'appliquent pas d'une manière uniforme les dispositions des lois sur la milice, notamment en matière d'exemption. Je ne dirai pas qu'il y a autant de jurisprudences que de provinces ; mais il y a une diversité notoire, flagrante dans les décisions relatives à des cas tout à fait identiques par telle province et par telle antre.
En vue de ces inconvénients, j'ai présenté un projet de loi ayant pour but de déférer à la cour de cassation les décisions des députations provinciales qui diffèrent en droit. (Il va de soi que les décisions en fait échapperaient à la cour de cassation qui ne statue pas non plus sur les décisions en fait des tribunaux.) Il avait, je crois, été fait rapport sur ce projet. Je ne sais ce qu'il est devenu.
On pourrait, ce me semble, adopter sans inconvénient une proposition de ce genre, qui doit s'appliquer à tous les systèmes ; car il est évident qu'il faut veiller à l'exécution uniforme de la loi sur la milice, comme on veille à l'exécution uniforme de toutes les lois.
Déjà dans d'autres circonstances, vous avez attribué à la cour de cassation le droit de connaître des décisions des députations du conseil provincial, notamment en matière d'élections. Je ne sais pas si en matière de garde civique la cour de cassation n'est pas également appelée à intervenir dans l'examen de décisions administratives.
Je crois qu'il n'y a pas lieu de perpétuer cet abus plus longtemps. Cependant je ne veux pas embarrasser la discussion du projet de loi. Je me bornerai donc à signaler mes observations à l'attention de M. le ministre de l'intérieur, en l'engageant à examiner s'il n'y a pas lieu de proposer une disposition pour assurer l'exécution uniforme des lois sur la milice, en déférant à la cour de cassation les décisions des députations provinciales sur cette matière, comme on a déjà déféré à cette cour des décisions administratives en matière d'élections et, si je ne me trompe, de garde civique.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - La question soulevée par l'honorable M. Lebeau est d'une grande importance. Mais je demandé qu'elle fasse l'objet d'une discussion spéciale.
L'honorable M. Lebeau a proposé un projet de loi. Mon prédécesseur, l'honorable M. Nothomb, en a également présenté un. Je désirerais qu'il fût fait un rapport sur ces deux propositions. J'accepterais immédiatement la discussion ; car je désire voir mettre un terme à cette diversité de jurisprudence.
Jusqu'ici, il n'a pas été fait rapport sur ces deux projets de loi ; ils ne sont pas à l'ordre du jour. Je ne crois pas qu'il faille en compliquer la discussion.
M. Veydt. - Messieurs, l'honorable rapporteur, dans son premier rapport du 8 mai 1845, conclut à l'ajournement du projet présenté par le gouvernement. Cet ajournement avait été prononcé à l'unanimité par la section centrale, qui motiva cette décision sur plusieurs considérations et entre autres sur ce qu'il fallait une loi plus complète, sur l'absence d'opportunité, attendu que le tirage au sort avait déjà eu lieu, et enfin sur ce dédale inextricable que présentent nos lois sur la milice, qui ont besoin d'une révision vraiment urgente.
J'avais espéré que ces motifs si fondés auraient engagé le gouvernement à présenter un projet de loi plus complet. Cependant après un assez long délai, la section centrale s'est vue obligée de se réunir de nouveau et de s'occuper du projet primitif, sans aucune amélioration.
Mon intention n'est pas de demander un nouvel ajournement. La crainte de reculer toute révision à un temps indéfini me force, en quelque sorte, à admettre ou du moins à examiner les propositions partielles qui nous sont aujourd'hui soumises, parce que c'est un acheminement vers un meilleur ordre de choses dans la législation qui régit la milice. Mais je me suis demandé, messieurs, si, en attendant la présentation d'un projet de loi de révision générale, il ne conviendrait pas de mettre encore en évidence quelques-unes des lacunes que présente cette législation. Si la chambre croit la chose opportune, je me permettrai de fixer, un instant, son attention sur plusieurs dispositions des lois actuelles, qui sont vicieuses, incohérentes et que les conseils de milice et les députations permanentes des provinces appliquent vraiment à regret. (Parlez ! parlez !)
Et tout d'abord je me rallie aux observations de l'honorable M. Lebeau, qui a rappelé la nécessité d'instituer un tribunal suprême pour lui déférer les décisions en matière de milice et parvenir à une jurisprudence uniforme.
Les opinions doivent être fixées à ce sujet et je pense qu'une résolution pourrait être prise, même dans cette discussion. Voici d'autres observations, ou plutôt d'autres critiques.
Messieurs, le paragraphe CC de l'article 94 de la loi de 1817 confère une exemption provisoire au frère unique de celui ou de ceux qui sont atteints de paralysie, de cécité, etc.
Puisque ce frère valide est considéré comme fils unique, il conviendrait de le traiter comme les fils uniques dont il est question à l’article 15 de la loi de 1820, et de ne lui accorder une exemption qu'autant qu'il justifiât qu'il est le soutien de ses parents.
Cette disposition a bien certainement échappé à l'attention du législateur de 1820 ; car l'article 91 de la loi de 1817 étant modifié à l'égard des fils uniques, la disposition ci-dessus aurait dû nécessairement l'être.
L'article 21 de la loi de 1817 est fort mal conçu, et l'article 3 de celle de 1820 ne l'a pas rendu meilleur.
Comment, se demande-l-on, un milicien incorporé peut-il acquérir une exemption définitive en vertu de l'article 94 qui n'en accorde que de provisoires ? Un exemple rendra ceci plus clair.
Une famille a plusieurs fils ; l'aîné est incorporé. Six mais après, le père meurt et, par ce décès, le milicien devient le soutien de sa mère.
Si son père fût mort six mois auparavant, ce fils de veuve n'eût obtenu qu'une exemption provisoire que lui eût conférée le conseil de milice, tandis qu'après son incorporation en service actif ou en réserve, il obtient un congé définitif.
Supposons maintenant que dans cette famille il existe trois fils ; vous allez voir, messieurs, qu'ils seront tous les trois exemptés définitivement ; ce cas s'est présenté deux fois la même années dans la province d'Anvers.
J'indique les trois fils sous les lettres A, B et C.
A, désigné pour le service, est incorporé dans la réserve pour deux ans ; il perd son père six mois après. L'année suivante, il est reconnu soutien de sa mère veuve et on lui accorde son congé définitif.
Plus tard, vient le tour de B de se faire inscrire ; il prouve au conseil de milice qu'ils ne sont que trois frères, dont l'aîné a fait son temps de service, bien qu'il n'ait pas servi du tout et B est exempté définitivement.
Même résultat pour le troisième fils C.
(page 1154) Ainsi voilà tous les fils d'une seule famille favorisés outre mesure par l'effet d'une disposition de la loi, mal conçue ou appliquée d'une manière erronée.
D'après l'article 23 de la loi du 27 avril 1820, le milicien qui s'est fait remplacer peut se libérer de la responsabilité qui pèse sur lui, à raison du service de son remplaçant, en versant à la caisse de l'Etat une somme de 150 fl. (fr. 317).
Puisque le milicien qui se fait substituer après son incorporation, est aussi responsable de son substituant pendant toute la durée de son service, ii serait juste que la même faculté lui fût accordée.
« Les conseils de milice accordent une exemption soit provisoire soit définitive aux miliciens qui prouvent y avoir des droits, sur la production de certificats délivrés dans la forme prescrite (Loi du 8 janvier 18l7). »
Plusieurs fonctionnaires ont pensé que ces conseils devaient simplement se borner à s'assurer, avant de disposer sur une demande d'exemption, de la validité du certificat produit, et non s'enquérir si le fait attesté régulièrement était susceptible d'être contesté. En d'autres mots, l'on a prétendu que dès l'instant que l'attestation requise était produite, l'exemption devait nécessairement être octroyée.
Il conviendrait que l'on fît disparaître toute incertitude sur un point si important.
L'article 56, paragraphe 5, de la loi du 8 janvier 1817 est ainsi conçu : « Les enfants alimentés et ceux qui se trouvent dans les établissements de bienfaisance seront inscrits dans la commune où ces établissements existent, ou dans laquelle ils sont alimentés. »
Cette disposition a été interprétée de diverses manières.
D'abord un arrêté royal, du 26 juin 1820, a statué que les enfants alimentés et ceux qui se trouvent dans les établissements de bienfaisance, devaient être inscrits dans la commune qui comprend ces établissements ou les administrations qui font les frais d'alimentation. C'est ainsi que de 1820 à 1834, l'on a interprété la loi sans réclamation, et c'est à cette dernière époque qu'une circulaire ministérielle est venue sabrer l'arrêté royal du 20 juin 1820, et poser un principe contraire.
Par cette circulaire, qui porte la date du 15 juillet 1834, l'on prétend que l'arrêté royal prescrivait une chose contraire à la loi ; que la disposition dont il s'agit avait prévu deux cas, celui où l'enfant se trouve à l'établissement, puis celui où il est alimenté dans une commune : que dans le premier cas l'inscription devait indubitablement se faire dans la commune où est situé l'établissement, tandis que, dans l'autre, l'inscription devait avoir lieu dans la commune où l'enfant est alimenté.
Des réclamations ont été adressées au département de l'intérieur contre cette interprétation du paragraphe 5 de l'article 56. Elles étaient fondées, et avec raison, suivant moi, sur ce que les élèves des hospices sont placés sous la tutelle des administrateurs de ces établissements charitables, et sur la considération que la loi organique de la milice consacre le principe que l'inscription des enfants abandonnés, n'ayant point d'état, aura lieu dans la commune où leur père, mère, tuteur ou curateur auront eu leur domicile. N'en résulte-t-il pas nécessairement que les élèves des hospices doivent être inscrits dans le lieu où se trouvent les établissements qui accordent l'entretien, alors même que ces élèves seraient placés dans d'autres localités ?
Les réclamants ont encore fait valoir qu'il serait équitable que, quand une commune a pourvu aux dépenses d'entretien de ces jeunes gens depuis leur enfance, ceux-ci, parvenus à l'âge où la milice les réclame, fussent tenus de concourir aux charges que la loi impose, avec les habitants de la localité qui les a vus naître et les a entretenus jusqu'à dix-huit ans.
D'ailleurs, n'ayant point atteint l'âge de la majorité à l'époque de l'inscription de la milice, ils n'ont d'autre domicile que celui de leurs père et mère, ou, à défaut de parents, celui de l'administration qui les alimente ou les a alimentés.
Le département de l'intérieur, tout en persistant à croire que l'interprétation donnée par la circulaire de 1834 est conforme à la loi, a déclaré que les observations que je viens d'avoir l'honneur d'exposer ne seraient pas perdues de vue, lorsque l'on s'occuperait d'une révision de la loi sur la milice.
La modification est facile à introduire. Il suffirait, en effet, de dire au paragraphe 5 de l'article 56 précité que : « Les enfants alimentés par les établissements de bienfaisance, qu'ils reçoivent, ou non, leur alimentation dans ces mêmes établissements, seront inscrits dans la commune où ceux-ci existent. L'on atteindrait également le but que j'ai en vue, en supprimant dans le paragraphe 5 les mots « ou dans laquelle ils sont alimentés. »
Aux observations critiques qui précèdent je n'en ajouterai plus que deux, quoiqu'il me serait facile de les multiplier.
L'une est relative à l'article 10 de la loi du 27 avril 1820, dont voici le texte : « Ceux qui, avant le 28 janvier de l'année pendant laquelle cette obligation reposait sur eux, ne se seront pas fait inscrire, seront arrêtés sur-le-champ et transportés au chef-lieu de la province afin d'y être examinés par le gouverneur et deux membres des états députés. S'ils ne sont pas reconnus incapables de servir pour cause de maladie ou de défauts corporels, ils seront remis immédiatement au commandant provincial pour être incorporés en déduction du contingent. Les retardataires seront en même temps condamnés au double de l'amende ou, en cas d'indigence absolue, a un emprisonnement de quatre jours à six semaines. »
Cet article est par trop sévère. Parmi les jeunes gens qui ne se sont point fait inscrire, je crois que je serais très près de la vérité en affirmant qu'il n'en est pour ainsi dire aucun qui ait commis cette contravention dans le but de se soustraire à ses obligations.
Le plus souvent, l'omission est le fait des employés des administrations locales, qui induisent les miliciens en erreur sur l'époque de leur naissance.
En définitive, ces omissions sont involontaires, et ce sont toujours les individus omis qui s'annoncent eux-mêmes de bonne foi, l'année qui suit celle où ils auraient dû se présenter, et ce dans la ferme croyance qu'ils appartiennent à la levée de milice pour laquelle ils requièrent l'inscription.
Parmi les individus dont l'inscription n'a point eu lieu, il en est un certain nombre, nés le dernier de décembre, et dont l'acte de naissance n'a été reçu que le 1er ou le 2 janvier, circonstance qui donne lieu à l'erreur ; car, en général, les familles ne s'attachent qu'à la date de l'acte de l'état civil.
Il serait donc de toute justice que, lorsqu'il est constaté que la non-inscription est involontaire, et lorsque surtout le retardataire se présente lui-même pour se soumettre à ses obligations, on put l'admettre à un tirage supplémentaire, et qu'il fût rétabli dans ses droits de milicien ordinaire.
J'ai déjà appelé, dans une autre occasion, l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'observation par laquelle je termine. Les élèves aux frais de l'Etat dans les deux établissements érigés en vertu de l'arrêté du 21 mai 1816, pour la formation d'instituteurs dans les écoles primaires, sont exemptés pour un an. Telle est la disposition de la loi du 8 janvier 1817, article 94, FF. Elle a cessé de recevoir son application depuis la loi organiques de l'enseignement primaire.
Ne serait-il pas juste de faire jouir de la même faveur les élèves instituteurs des écoles normales de Lierre et de Nivelles, établissements qui ont remplacé les écoles du gouvernement de 1816 ?
Dernièrement des conseils de milice ont accordé des exemptions à des élèves des écoles normales, tandis que d'autres les ont désignés pour le service.
Ceux-ci se sont renfermés dans la stricte application des conditions requises par la loi ; les premiers ont plutôt consulté l'esprit qui l'a dictée. Le législateur de 1817 a voulu avantager les jeunes gens qui se consacrent à la carrière si honorable, mais si pénible, de l'instruction primaire. Les mêmes motifs d'encouragement existent encore ; mais il est nécessaire que la loi s'en explique.
M. d’Hoffschmidt. - Messieurs, j'ai demandé la parole, lorsque j'ai entendu l'honorable rapporteur vous proposer de nous circonscrire dans le projet de loi et de ne pas proposer d'amendements.
Je ne partage nullement l'opinion de l'honorable rapporteur à en égard. Je regrette même que le projet qui nous est soumis ne soit pas plus complet, qu'il se borne à quelques améliorations. Pourquoi ne pourrait-on pas en ajouter un plus grand nombre à une législation qui est reconnue si vicieuse ? L'honorable préopinant vient entre autres de vous signaler beaucoup de vices aux dispositions qui concernent entre autres les exemptions. L'honorable M. Lebeau, de son côté, avait proposé il y a quelques années un projet tendant à soumettre à la cour de cassation toutes les décisions prises par les conseils de milice et par les députations permanentes, de manière à avoir une législation uniforme ; et je crois que le motif de l'ajournement de la discussion du projet présenté par l'honorable M. Lebeau a été précisément celui que met maintenant en avant l'honorable rapporteur : c'est qu'il faut attendre l'époque où l'on présentera une loi générale sur la milice.
Messieurs, il y a peut-être dix ans que cette proposition est enfouie dans les cartons de la chambre, et il en serait peut-être de même en ce qui concerne toutes les améliorations qui pourraient être proposées dès maintenant si on les ajournait à une révision générale. Or, il y a de ces améliorations qui pourraient être reconnues nécessaires, indispensables, celles qui, par exemple, ont été signalées un grand nombre de fois par les députations permanentes.
Ainsi j'appelle, quant à moi, toute l'attention des membres de la chambre qui sont versés dans cette matière ; je les engage à proposer des dispositions nouvelles au projet qui nous est soumis, afin de faire disparaître les vices les plus marquants de cette législation.
Il est vraiment regrettable, messieurs, de voir une législation aussi embrouillée. Nous avons déjà, si je ne me trompe, six projets de loi concernant la milice. Nous allons en avoir un septième. Eh bien ! qu'au moins ce septième projet soit aussi complet que possible !
Je désire, quant à moi, qu'une nouvelle législation, réformant nos lois sur la milice, nous soit présentée le plus promptement possible. Je la désire vivement, et je faisais partie de la section centrale qui avait ajourné le projet actuel, dans le but d'engager le gouvernement à nous soumettre un semblable projet de loi.
Mais je conviens cependant que cette matière est difficile ; que nous ne savons combien de temps nous devrons attendre encore une révision générale, et c'est pourquoi je suis d'avis d'apporter dans la loi actuelle toutes les améliorations qui seront reconnues nécessaires et urgentes.
Je signalerai à M. le ministre de l'intérieur une modification qu'il serait, ce me semble, important d'apporter dans la législation actuelle. Je veux parler de la fixation de l'époque de la première réunion des conseils de milice. Celle époque est fixée au second lundi du mois de février. Je crois, messieurs, que c'est un mal, que dans certaines provinces, comme dans le Luxembourg, il en résulte de très graves inconvénients pour les miliciens.
En effet, le commencement du mois de février est ordinairement le flagrant de l'hiver ; c'est une époque où les routes, où les chemins vicinaux (page 1155) surtout sont souvent encombrés de neige, et où les militaires ne peuvent se rendre au chef-lieu du district qu'avec de très grandes difficultés. Ils y arrivent en quelque sorte exténués, où ils doivent loger en route, ce qui leur occasionne des frais considérables.
Je crois, messieurs, qu'on pourrait éviter ces inconvénients en autorisant le gouvernement à fixer une autre époque lorsqu'il le jugerait nécessaire. Ce serait là une faculté importante, pour le Luxembourg surtout, où les districts sont d'une grande étendue et ou le mois de février rend ordinairement les chemins impraticables.
J'engage M. le ministre de l'intérieur à vouloir réfléchir à ces observations, et si on ne soulève pas d'objection trop sérieuse à une proposition semblable, je serais d'avis de la soumettre à la chambre. J'attendrai cependant la réponse de M. le minisire. Je n'ai pas fait depuis longtemps une étude assez approfondie des lois sur la milice, pour être certain que d'autres motifs ne viennent pas peut-être s'opposer à cette modification.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, le département de l'intérieur aurait sans doute le plus grand intérêt à se rendre au vœu émis par plusieurs orateurs, et à diverses reprises, pour la révision des différentes lois sur la milice. Car l'application de ces lois est une source de réclamations et d'embarras. Mais, messieurs, vous le comprendrez facilement, si une semblable loi était mise à l'ordre du jour, elle prendrait une grande partie d'une session ; et dans ce moment nous avons des objets tellement importants et urgents, qu'il n'a pas été possible d'y songer.
Cependant je fais préparer une révision générale de la loi sur la milice, pour que le gouvernement soit à même de soumettre un pareil projet à la chambre aussitôt qu'elle pourra convenablement s'en occuper.
Messieurs, on a insisté de nouveau sur la nécessité d'une uniformité de jurisprudence. Je me borne à répéter ce que j'ai déjà dit à la chambre ; c'est que je m'associe à ce vœu.
Mais je demanderai à la chambre de ne rien improviser sur cette matière, parce que les dispositions à intervenir doivent être parfaitement coordonnées pour qu'elles ne donnent lieu à aucun inconvénient pratique. Je demanderai donc qu'on s'occupe spécialement de deux projets de loi, l'un relatif à la création d'un conseil pour aviser en dernier ressort, l'autre qui défère les jugements à la cour de cassation. D'un autre côté, je me concerterai avec M. le ministre de la justice, et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour faciliter la solution de ces questions. Mais il y aurait un véritable danger à improviser des dispositions sur cette matière.
L'honorable M. Veydt a parlé de différents inconvénients qui résultent du système des exemptions. Je ne suivrai pas l'honorable membre sur ce terrain, parce que je n'ai pas parfaitement saisi toutes les objections qu'il a présentées ; mais je les examinerai. Dans tous les cas, le système de l'exemption est encore assez compliqué pour ne pas nous en occuper accidentellement. C'est un système qui doit encore être revu dans son ensemble.
Il y a cependant une observation qui a un mérite d'actualité ; c'est celle qui concerne les élèves des écoles normales de l'Etat. Messieurs, il est pourvu à ce besoin par des congés temporaires que le département de la guerre accorde, de manière qu'il n'y a pas encore urgence de traiter accidentellement cette question.
L'honorable M. d'Hoffschmidt a demandé si l'on ne pourrait pas changer l'époque de la première réunion des miliciens. Messieurs, pour autant que je puisse apprécier les motifs qui ont guidé le législateur, je dois supposer qu'on a choisi l'époque du mois de février, parce qu'alors les campagnes sont généralement dépourvues de travaux, et que si l'on fixait cette réunion à une époque plus avancée, ce serait distraire une quantité de campagnards de leurs travaux. Ensuite cela s'arrangerait aussi mal pour l'époque d'inscription.
Du reste, cette question sera examinée. Mais il n'arrive pas toujours que les chemins vicinaux soient assez mauvais au mois de février pour exiger un changement dans l'époque des réunions. Je prendrai à cet égard l'avis des gouverneurs de province, et, après les avoir consultés, nous pourrons voir s'il y a lieu de comprendre cette mesure dans la révision générale.
Mais pour moi, messieurs, j'insisterai aussi sur l'observation présentée par l'honorable rapporteur. J'invite la chambre à ne pas s'engager dans des questions étrangères au projet de loi, parce que toutes ces questions de milice sont extrêmement compliquées, se lient les unes aux autres, et qu'il est à craindre qu'au lieu d'améliorer, on n'arrive à détériorer.
M. de Lannoy. - La législation sur la milice est reconnue vicieuse par tout le monde, mais elle a été rarement condamnée en termes plus formels, que ceux consignés dans le rapport qui vous a été présenté il y a quelques jours, au nom de la section centrale chargée d'examiner le projet en discussion.
Elle qualifie de dédale inextricable la foule de lois, arrêtés, interprétations, dépêches et instructions ministérielles sur la matière, et émet le vœu qu'une révision vienne doter enfin la Belgique d'une législation unique, claire, compréhensible.
Le projet de loi qui vous est présenté vient-il apporter une amélioration notable à l'état actuel des choses ? Notre législation sur la milice ne sera-t-elle plus, après l'adoption de ce projet, une des plus vicieuses que nous ayons ? Sera-t-elle plus claire, plus compréhensible ? Je ne le pense pas. Ce n'était pourtant pas trop demander.
Le projet de loi renvoyé à l'examen de la section centrale est celui qui a été présenté en 1844 par l'honorable M. Nothomb, alors ministre de l'intérieur. Dans l'exposé des motifs de ce projet, il reconnaissait aussi la nécessité d'une révision complète : il n'attendait, disait-il, pour l'entreprendre qu'une expérience, qui ne demandait pas un temps considérable. Cette expérience n'est-elle pas faite maintenant ? Etait-ce bien le moment de rechercher dans les cartons de la chambre un projet qui date de près de trois ans ? Un projet, qui, examiné alors dans les sections, fut écarté après un rapport présenté par la section centrale sur une résolution unanime de ses membres comme tout à fait insuffisant ?
M. le ministre de la guerre, lors de la discussion de son budget au sénat, répondant à une interpellation qui lui était faite, a déclaré qu'un projet de loi nouveau faisait l'objet de ses études ; projet par lequel il s'agirait de supprimer tout à fait le remplacement ; que le service serait personnel, mais qu'on aurait la faculté de s'en libérer avant le tirage au sort, en versant dans une caisse particulière une certaine somme.
En présence de semblable déclaration, si on ne jugeait pas convenable d'ajourner toute discussion, ne devrions-nous pas nous borner à poser quelques principes généraux, qui pourraient trouver place dans la loi nouvelle : tels que la durée du service, l'âge auquel il devra commencer, les obligations des étrangers ? Ne devrions-nous pas nous abstenir d'en poser de nouveaux, qui à peine mis en pratique seraient probablement détruits par la loi nouvelle ?
Je veux parler des dispositions qui regardent la répartition du contingent entre les communes et le remplacement.
Mais laissant à part la question d'opportunité, j'examinerai les mesures en elles-mêmes. Je reconnais que la nouvelle répartition proposée du contingent serait une amélioration, mais pourtant pas aussi complète que l'on pourrait le désirer. L'ancienne répartition était basée sur le chiffre de la population des communes, ce qui consacrait une injustice criante. On a reconnu qu'il était injuste de demander toujours à deux communes d'une égale population, un même nombre de miliciens, tandis que dans certaines années le mouvement de cette population fournissait un nombre fort différent de personnes ayant atteint l'âge du tirage au sort, de sorte que quand l'une fournissait son contingent avec le quart de ses inscrits valides, l'autre devait, pour compléter le sien, reprendre des hommes sur la classe antérieure.
On aurait dû reconnaître, en vertu des mêmes raisons qui ont motivé la modification proposée, qu'elle laisse encore subsister une injustice. S'il n'est pas équitable de demander un nombre égal de miliciens à deux communes de même population, qui ont un nombre d'inscrits différent, l'est-il davantage de demander le même nombre de miliciens à deux communes qui ont un nombre égal d'inscrits, tandis que, dans l'une, il y en aura la moitié plus que dans l'autre de réformés ou d'exemptés, et de faire incorporer un individu qui a obtenu un bon numéro, parce que son voisin est bossu, bègue, privé de ses dents incisives, ou affligé d'une des infirmités dont l'arrêté royal du 15 janvier 1821 nous donne le triste catalogue ?
Si l'on trouve nécessaire d'apporter en ce moment une amélioration à la partie de la législation qui règle la répartition du contingent, qu'elle soit la plus complète possible, qu'elle ne répare pas une injustice en en laissant subsister une autre. Modifions l'article 6, proposé par la section centrale et admettons pour base de la répartition le nombre des jeunes gens reconnus aptes au service militaire, et non celui des jeunes gens inscrits pour la levée.
La seule objection que j'ai entendu faire contre ce système est, que dans le but de soustraire le plus de personnes possible au service de la milice, on pourrait se montrer trop facile dans l'examen des motifs d'exemption : mais je trouve que cette objection ne doit pas nous arrêter ; il faut chercher les moyens de parer à l'inconvénient que l'on craint, au lieu de renoncer, de peur de le voir surgir, à une mesure que l'on reconnaît plus équitable que celle qui vous est proposée.
Une autre objection que je prévois encore est, qu'il serait difficile d'adopter en ce moment la disposition que je propose parce qu'elle entraînerait d'obligation la révision de plusieurs articles de la loi de 1817 qui règlent les séances et les attributions des conseils de milice chargés d'examiner les motifs d'exemption.
Je reconnais cette objection comme fondée, mais elle vient à l'appui de l'opinion que j'ai émise en commençant, que nous devrions nous borner en ce moment à poser quelques principes généraux qui pourraient trouver place dans la loi nouvelle, que nous attendons avec tant d'impatience.
Pour les mêmes raisons d'opportunité, que j'ai fait valoir tout à l'heure, je ne pourrais donner mon assentiment aux articles qui vous sont proposés par la section centrale et qui apportent des modifications au système de remplacement. Je crois pouvoir le faire avec d'autant plus de raison que nous avons lieu d'espérer, d'après les paroles de M. le ministre de la guerre que je vous ai citées tout à l'heure, que dans le nouveau projet de loi sur la milice le remplacement ne sera plus admis ; et cette mesure fera cesser en même temps tous les inconvénients que nous avons cru devoir signaler lors de la discussion du budget du département de la guerre.
Je trouve un motif de plus de m'opposer à l'adoption des mesures qui vous sont proposées : c'est qu'elles semblent descendues aux minces proportions d'une question de personne, qui ne doit point trouver place dans nos discussions et encore moins dans la confection de nos lois.
A mes yeux, les articles proposés semblent dirigés uniquement contre la société pour l'encouragement du service militaire.
Cette société a été attaquée, il y a quelque temps, dans une de nos discussions, avec une violence qui a dû peiner tous ceux d'entre nous (page 1156) qui ont connaissance des noms respectables qui figurent dans le conseil d'administration.
Une lettre adressée à MM. les ministres, et qui vous a été distribuée, est venue rectifier les faits : vous aurez tous, comme moi, rendu justice à l'extrême modération avec laquelle ce document a été rédigé.
On a presque toujours, dans la discussion, attaqué les actes de la société, considérée comme société de remplacement, tandis que son but est l'encouragement au service militaire. Ce but a-t-il été rempli ? La société a-t-elle rigoureusement observé les conditions qui lui sont imposées par ses statuts et par l'arrêté royal du 9 septembre 1836 qui a autorisé sa formation ? Je ne saurais en juger. Ce soin est confié par le même arrêté royal à MM. les ministres de l'intérieur et de la guerre : ils devraient, le cas échéant, provoquer l'exécution de l'article-2 de cet arrêté qui est ainsi conçu : « Ces autorisations et approbation seront retirées si les statuts ne sont pas rigoureusement observés ».
Je vous demanderai la permission d'ajouter quelques mots qui ne se rattachent pas précisément à la discussion, afin de recommander à l'examen de M. le ministre une disposition qui devra être maintenue dans la loi nouvelle et qui aurait grand besoin d'amélioration.
C'est le mode de délivrance des certificats pour les exemptions par les autorités communales.
Vous savez que, d'après l'article 185 de la loi de 1817, les attestations et certificats, prescrits par la loi, sont délivrés par le président de l'administration locale ou, à son défaut, par celui qui le remplace dans ses fonctions, conjointement avec deux membres du conseil communal.
Ces deux membres sont nommés tous les ans par le gouverneur sur la présentation des conseils communaux. Mais comme cette charge expose ceux à qui elle est confiée à une foule de désagréments, on doit souvent tirer au sort pour pouvoir faire ces présentations. Or, comme les conseillers communaux de beaucoup de villages n'ont pas tous une instruction fort étendue, et qu'il en est même de fort peu lettrés, c'est un premier inconvénient qu'il est inutile de détailler.
Un second inconvénient, c'est que les certificats ne sont délivrés qu'après le tirage au sort, et que l'ordre des numéros étant connu, on sait qu'en donnant un certificat à tel individu, on fera partir tel autre. Les conseillers communaux chargés de signer les certificats sont en butté à une foule de persécutions : les intérêts, les parentés, les amitiés se trouvent en présence, et l'obscurité de la loi vient mettre les consciences à l'aise.
Les certificats qui donnent lieu au plus de difficulté et qui sont délivrés avec le plus d'inégalité sont ceux donnés à des miliciens comme pourvoyant à la subsistance de leurs parents. Malgré toutes les instructions du gouvernement, il y a tant de différence dans la position des individus qui réclament semblables certificats, qu'en dernière analyse, chaque personne chargée de les signer interprète à sa manière les mots : « Pourvoyant à la subsistance », et l'on voit quelquefois, dans la même commune, obtenir un certificat par un milicien qui se trouve exactement dans la même position qu'un autre à qui on en a refusé un semblable l'année précédente.
La loi, il est vrai, a cherché à prévenir les fraudes ; l'article 191 de la loi de 1817 prescrit la poursuite d'office par les procureurs du roi, des signataires de certificats renfermant des faits contraires à la vérité : l'article 49 de la loi de 1820 détermine des peines d'amende et même de prison ; malgré cela des certificats où la faveur a grande part sont assez communs, et les poursuites sont nulles. Il ne saurait en être autrement : si on faisait quelques poursuites, on ne trouverait plus personne pour, signer.
Si la loi pouvait atteindre tous les abus de délivrance de certificats, il en est un qui restera toujours hors de sa portée et qui est tout aussi grave, c'est le refus de certificat fait à un individu qui est en droit d'en obtenir un et au moyen duquel on arrive au même but.
Je crois qu'un remède efficace à ces abus serait de faire délivrer les certificats par délibération des conseils communaux avant le tirage au sort.
Revenant au projet de loi en discussion, je conclus en répétant que je ne puis donner mon approbation aux dispositions qui regardent la répartition du contingent, et le remplacement, telles qu'elles nous sont proposées par la section centrale : et si elles sont maintenues, je me verrai forcé de voter contre l'ensemble de la loi.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je ferai d'abord une observation par forme de motion d'ordre, c'est qu'il serait à désirer que les articles nouveaux présentés par la section centrale touchant le remplacement, c'est-à-dire les articles 7 et 8, fussent discutés séparément, et qu'il y eût une discussion générale et spéciale à l'occasion de ces articles, que l'on écartât de la discussion actuelle tout ce qui concerne l'association du remplacement militaire ; sans cela il y aurait une grande confusion dans nos débats.
Je m'expliquerai sur les intentions du gouvernement relativement aux amendements proposés par la section centrale.
D'abord, le gouvernement ne peut pas se rallier à l'article premier du projet de la section centrale, parce que, de fait, il enlève une classe de la réserve.
M. le ministre de la guerre entrera à cet égard dans des développements particuliers.
En ce qui concerne l'amendement proposé à l'article 3 du projet du gouvernement, nous pouvons nous rallier au paragraphe premier de l'article 2 de la section centrale. Le paragraphe 2 devient inutile. Cela devait être subordonné à des arrangements internationaux à conclure.
Quant aux amendements proposés aux articles 4 et 6 du projet du gouvernement, ils sont de peu d'importance et nous nous y rallions.
Quant à l'amendement proposé à l'article 7, M. le ministre de la guerre a des observations à présenter. La députation permanente jugeant instance d'appel devrait être assistée de deux médecins militaires, pour que les intérêts de l'armée y soient suffisamment défendus si l'article est admis.
Quant à l'article additionnel qui tend à exclure tous les fonctionnaires et employés tant civils que militaires de toute participation à des entreprises de remplacement, nous croyons, messieurs, que cette exclusion doit être limitée, en ce qui concerne les employés civils, à ceux qui ont une influence quelconque sur les affaires de milice, mais qu'il n'y a aucun motif d'étendre cette exclusion aux employés des autres catégories. J'ai rédigé un amendement dans ce sens que je déposerai sur le bureau et qui pourra être imprimé pour demain.
Quant à l'article 8 relatif aux militaires rengagés, nous nous y rallions complètement.
M. Nothomb. - En demandant tout à l'heure la parole, je croyais prendre part à la discussion de l'espèce de motion d'ordre qu'a présentée l'honorable rapporteur.
L'honorable M. Lebeau vous a rappelé une proposition qu'il a faite le 16 février 1837. On vous a dit aussi que, depuis, le gouvernement avait fait une proposition dans le même but, le 11 mars 1839. Nous sommes d'accord qu'il faut arriver à un moyen d'établir l'uniformité dans l'application de la loi, en matière de milice. L'honorable M. Lebeau vous a proposé d'instituer le pourvoi en cassation.
J'avais proposé, au nom du gouvernement, d'instituer un pourvoi auprès du Roi.
Je me permettrai de donner lecture de la proposition de l'honorable M. Lebeau, qui est très courte. On peut dire qu'elle consiste en un seul article. Cet article est ainsi conçu :
« Les ordonnances des conseils provinciaux rendues sur l'appel interjeté contre les décisions des conseils de milice et des conseils cantonaux de la garde civique, sont sujettes au recours en cassation. »
Le projet de loi est plus étendu ; il comprend dix articles. Il est plus étendu, parce qu'il renferme une procédure. Sous ce rapport, l'honorable M. Lebeau voudra bien en convenir, il y a une lacune dans sa proposition.
Il y aurait donc à résoudre une première question ; ce serait celle-ci : « Y aura-t-il, à l'effet d'assurer l'uniformité de la jurisprudence, pourvoi au gouvernement ou à la cour de cassation ? J'avoue que la réponse m'est assez indifférente, pourvu qu'on veuille bien prendre une décision, en un mot qu'on veuille bien trouver un moyen d'arriver à l'uniformité :
Je ne sais si le gouvernement, que je n'ai pas l'honneur de représenter en ce moment, partage mon indifférence à ce sujet.
Si, comme le propose M. Lebeau, on instituait le pourvoi en cassation, il resterait à adopter une procédure.
Je pense que dans ce cas on pourrait emprunter quelques dispositions au projet de loi qui a été présenté, il y a huit ans, par le gouvernement.
La chambre est restée saisie de ces deux propositions. J'ignore pourquoi aucun rapport n'a été fait. Ceci semble démontrer que si la chambre était saisie d'un projet de révision générale des lois sur la milice, il faudrait probablement attendre quelques années avant d'obtenir un rapport. Il faudrait d'abord supposer que le gouvernement eût préparé une législation nouvelle. Je lui accorde volontiers une année pour élaborer un projet de loi ; je crois même que ce ne serait pas assez.
On pourrait m'accuser de manquer d'égards envers la chambre si, pour calculer le temps qu'il faudra pour obtenir un rapport sur un projet de révision générale des lois sur la milice, je me basais sur ce qu'il a fallu 7 ans et plus pour avoir un rapport sur un projet de loi d'un seul article.
En faisant ces observations je n'ai qu'un but, c'est d'engager la chambre à voter le projet de loi dont elle est saisie sans trop en agrandir le cadre.
Le mieux est l'ennemi du bien. C'est le cas de répéter cet adage. Le projet de loi dont vous vous occupez en ce moment consacre d'utiles améliorations. C'est à ce point de vue qu'il faut nous placer. Si nous avons la conviction qu'il consacre d'utiles améliorations, je crois que nous ferons bien de le voter.
La chambre pourrait renvoyer la proposition de M. Lebeau et le projet présenté par le gouvernement soit à une commission, soit aux sections.
J'ignore quelle sera la marche qu'on suivra pour cette discussion. Je, suis disposé à admettre celle qui a été indiquée par M. le ministre de l'intérieur, c'est-à-dire la discussion article par article
Je compte prendre part à la discussion de plusieurs articles et notamment à la discussion de l'article additionnel, relatif, je ne dirai pas à la société pour l'encouragement du service militaire, mais au remplacement ; et je me permettrai d'appeler l'attention de la chambre sur les vices que présente notre législation, et que présentera toute législation qui admet le remplacement, vices que je considère comme les chances de gain pour toute entreprise relative au remplacement. Ce sont ces idées que je développerai, quand nous serons arrivés à la discussion des articles additionnels nouveaux.
M. Lebeau. - Messieurs, je viens appuyer la motion d'ordre qui a (page 1157) été indiquée par l'honorable M. Nothomb ; je demande que la chambre renvoie à l'examen d'une commission le projet de loi que j'ai eu l'honneur de présenter, il y a quelque dix ans, et celui que l'honorable M. Nothomb a présenté en 1839, en sa qualité de ministre des travaux publics. Je ne comprends pas comment un projet de loi émané du gouvernement n'a été suivi d'aucun effet. Je demande donc que cet oubli soit réparé pour les deux projets de loi et qu'une commission soit nommée.
Si les débats qui vont s'ouvrir se prolongeaient pendant quelques jours, il ne serait pas impossible, et j'en forme le vœu, que la section centrale présentât un projet d'amendement qui serait inséré dans la loi actuelle. La question est si simple.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je me range très volontiers à cette proposition ; cela accélérera l'examen. Toutefois, je ne désire pas que la discussion actuelle se prolonge assez, pour qu'on puisse attendre le rapport de la commission.
Il n'y aurait aucun avantage à confondre les deux propositions dans la loi actuellement en discussion. Aussitôt que le rapport sera présente, je m'engage à accepter la discussion.
- La chambre décide que les deux projets de loi dont il s'agit seront renvoyés à l'examen d'une commission qui sera nommée par le bureau.
Elle ordonne ensuite la réimpression des deux projets.
M. Lejeune. - Messieurs, personne, sans doute, ne regarde comme complet ou suffisant le projet de loi en délibération. S'il y avait quelques doutes à cet égard, les discours que vous avez entendus les feraient disparaître. Mais ces discours prouvent aussi que, si la nécessité d'une révision générale de la loi est démontrée, cette révision est dans ce moment impossible. Je pense qu'après avoir attendu aussi longtemps, nous ferons bien de prendre quelque chose, en attendant mieux. C'est dans ces idées que j'accepterai le projet de loi qui nous est soumis, quelque restreint qu'il soit.
Messieurs, je suis un de ceux qui ont toujours manifesté le désir d'arrîver à l'uniformité dans la jurisprudence. La motion que vient de faire l'honorable M. Lebeau et que la chambre a adoptée, je comptais la faire ; je comptais aussi demander la réimpression et le renvoi de la proposition faite par M. Lebeau en 1837 et du projet présenté par le gouvernement en 1839, soit aux sections, soit à une commission. Je ne conçois réellement pas comment la chambre est restée aussi longtemps en demeure d'examiner une question sur laquelle tout le monde est d'accord ; tout le monde convient qu'il faut assurer par la loi les moyens de rétablir l'uniformité de la jurisprudence en matière de milice.
Je crois cependant qu'il ne sera pas bien possible d'insérer cette disposition dans la loi de milice elle-même ; il sera nécessaire, ainsi que la section centrale l'a indiqué, d'en faire l'objet d'un projet de loi spécial.
Dans les discussions en section centrale du budget des voies et moyens, cette question a été aussi soulevée en des termes plus généraux, non pas seulement pour la milice, mais pour plusieurs autres matières, dans lesquelles les députations permanentes jugent en dernier ressort, sans aucun recours. Dans toutes ces matières, il peut s'établir autant de jurisprudences différentes qu'il y a de provinces. Il est indispensable que cet état de choses soit régularisé. On a pensé alors qu'on pourrait peut-être présenter un projet de loi qui comprît tous les cas ; et je crois même me rappeler que l'on nous a dit que le gouvernement s'occupait d'un pareil projet. Il serait à désirer que le gouvernement examinât cette question, en même temps que la commission spéciale va s'occuper de ce qui concerne la milice.
J'ai demandé la parole pour appeler l'attention du gouvernement sur un autre point.
On a proposé quelques dispositions nouvelles en matière de remplacement, j'en avais signalé une, dont on n'a pas cru devoir tenir compte. J'ai fait remarquer, dans une séance précédente, que le remplacé reste responsable de son remplaçant ; que cette responsabilité est très inquiétante et très onéreuse, et qu'il est impossible de s'en dégager envers l'Etat, si ce n'est au bout de 18 mois, en versant une somme de 150 florins.
Il existe un seul moyen de racheter de prime abord cette responsabilité, et ceux qui veulent se dégager complètement doivent nécessairement recourir à ce moyen unique : c'est de s'adresser à l'association pour l'encouragement du service militaire. Beaucoup de personnes qui trouvaient d'autres occasions moins onéreuses de se faire remplacer, ont recours à la société et payent un prix très élevé, afin de racheter cette responsabilité.
J'aurais voulu qu'on trouvât un autre moyen pour que tout le monde pût racheter cette responsabilité auprès du gouvernement, dès l'origine du remplacement. Je pense que la somme que la loi fait verser actuellement au bout de 18 mois serait suffisante pour couvrir toutes les dépenses qui résulteraient de ce chef. Si elle n'était pas suffisante, il serait à désirer qu'on examinât jusqu'à quel chiffre elle devrait s'élever, et qu'on pût se libérer complètement du service, lorsqu'on aurait fourni un remplaçant accepté et incorporé.
Je fais cette observation dès à présent, afin que le gouvernement puisse en faire l'objet de son attention, avant la discussion des articles qui concernent le remplacement.
M. d’Hoffschmidt. - Messieurs, j'ai signalé tout à l'heure à la chambre une modification qu'il serait utile d'apporter aux dispositions relatives aux conseils de milice. M. le ministre de l'intérieur n'a pas repoussé cette modification ; mais il m'a annoncé qu'il se proposait de consulter les gouverneurs et d’introduire ensuite cette disposition dans la (page 1157) loi générale qui doit nous être présentée dans un certain nombre d'années.
Si cependant la modification est utile, s'il y a réellement un intérêt d'humanité pour les miliciens, je crois que nous ne devons pas accepter un semblable ajournement. Or, il y a réellement un intérêt d'humanité de le faire, et si, comme moi, messieurs, vous aviez eu sous les yeux, à diverses reprises, ces miliciens qui arrivent par des temps affreux au conseil de milice, qui doivent loger en route, faire des frais, qui sont quelquefois malades, il en est même qui sont morts des fatigues causées par de semblables voyages, vous reconnaîtrez qu'on ne doit pas ajourner un changement qui a pour objet de faire cesser un pareil état de choses. On veut nous circonscrire dans le projet présenté. L'honorable M. Nothomb lui-même, qui accepte cependant la proposition de M. Lebeau, ne veut pas qu'on étende la portée du projet de loi ; cependant la loi sur la milice n'est pas tellement nouvelle qu'on ne puisse pas connaître les modifications à y introduire.
Les députations permanentes des conseils provinciaux ont signalé à différentes reprises les vices de cette loi ; ils ont même été unanimes sur plusieurs. Je me rappelle que quand je siégeais à la députation permanente du Luxembourg, il y a douze années, déjà nous signalions les vices de certaines dispositions de la loi que nous révisons aujourd'hui. Pourquoi ces dispositions reconnues vicieuses, dont la modification serait aussi utile que celles qu'on vous propose, seraient-elles maintenues jusqu'à la révision générale qui nous arrivera peut-être dans dix ou vingt années ?
M. le ministre ne m'a pas fait connaître pour quel motif on ne changerait pas l'époque de la première réunion du conseil de milice ; il m'a dit seulement qu'on avait choisi cette époque dans l'intérêt des classes ouvrières, parce que c'était le moment où elles avaient peu de travail. Je trouve, moi, qu'on a dans ce cas fort mal entendu leurs intérêts et qu'on leur ferait infiniment de tort en maintenant cette époque, du moins, comme je viens de le démontrer, pour la province du Luxembourg.
Je n'ai pas été persuadé par ce qu'a dit M. le ministre ; et si on ne m'oppose pas d'autres raisons, je me croirai obligé de présenter un amendement ayant pour objet d'autoriser le gouvernement à changer, selon les circonstances, l'époque de la première réunion du conseil de milice. Déjà, d'après la loi, le gouverneur a le droit d'avancer l'époque de cette réunion ; pourquoi ne lui accorderait-on pas aussi le droit de la retarder ? Je n'y vois pas le moindre inconvénient.
D'ailleurs, cette première réunion est moins importante que les autres ; il ne s'agit que d'examiner les miliciens exemptés l'année précédente. Le nombre n'en est pas considérable. On objecte l'incorporation ; mais rien n'empêche de la différer, car après l'incorporation, on renvoie le milicien dans ses foyers pour un temps plus ou moins long. Il n'y a donc aucune difficulté à changer dans telle ou telle province l'époque de la première réunion du conseil de milice ; et il y a pour les miliciens avantage à ce que ce que changement se fasse ; il y a même des raisons d'humanité pour le faire.
Je crois donc devoir insister pour qu'on introduise cette modification dans la loi. Si, dans le cours de la discussion, on ne m'oppose pas, je le répète, des raisons plus fortes que celles présentées par M. le ministre de l'intérieur, je croirai devoir présenter l'amendement que j'ai indiqué.
M. Eloy de Burdinne. - Je partage l'opinion des honorables collègues qui pensent que le moment n'est pas opportun pour entamer la révision de toute notre législation sur la milice. Ses vices sont nombreux, et elle est tellement défectueuse, si peu claire, que tout le monde sait que les autorités qui doivent l'appliquer sont dans le plus grand embarras. Ce n'est pas pour provoquer une discussion sur tous les vices de cette loi que je demande la parole, mais pour signaler une difficulté que présente la délivrance des certificats aux fils pourvoyant aux besoins de leur mère. Vous savez que la loi en vigueur veut, pour qu'un fils pourvoyant soit exempt du service, que la mère ne reçoive aucun subside du bureau de bienfaisance. Eh bien, le certificat constatant que le fils d'une veuve pourvoit à l'alimentation de sa mère, renferme encore une déclaration que la veuve ne reçoit aucun secours du bureau de bienfaisance. Quand on présente ce certificat à signer à des pères de famille, ils ne peuvent les faire sans commettre un faux. Cependant ce fils pourvoyant ne peut être exempté qu'autant qu'il fournit ; il en résulte que le fils pourvoyant n'est pas exemple et que sa mère est privée de son principal moyen d'existence. Cependant, si ma mémoire est fidèle, la chambre a décidé précédemment qu'un fils pourvoyant, alors même que sa mère obtiendrait quelque secours du bureau de bienfaisance, jouirait de l'exemption.
J'appelle l'attention du gouvernement sur ce point pour qu'il fasse en sorte que les certificats soient rédigés de manière qu'on n'y mentionne plus ces secours.
Je connais une localité où un malheureux ayant trois enfants dont l'aîné est appelé à faire partie de la milice, qui n'a d'autre ressource qu'il a modique secours et ce que gagne ce fils, et ne peut pas trouver de père de famille qui lui signent un certificat ; ils lui répondent : Nous ne pouvons pas signer, parce que nous devons attester en même temps que vous ne recevez aucun secours du bureau de bienfaisance, et il est à connaissance de tout le monde que vous en recevez : ces subsides ne sont pas la centième partie du produit du travail du fils. J'appelle l'attention du gouvernement sur ce point fort important qui est de nature à fausser l'esprit de la législation.
(page 1158) Je demanderai à M. le ministre s'il ne pourrait pas, par une circulaire, porter remède à cet état de choses.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - J'examinerai ce qu'il y aura à faire à cet égard.
- La séance est levée à 4 heures et demie.