(Moniteur belge n°256, du 22 décembre 1843)
(Présidence de M. Liedts)
M. de Renesse fait l’appel nominal à midi et demi.
M. Dedecker donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.
« Plusieurs fabricants de tabac de Bruxelles demandent que l’exemption de l’accise sur le sel soit maintenue pour leur industrie. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur le sel.
« Le sieur Sitler, curé à Velleraille-le-Sec, atteint d’une grave infirmité, demande une augmentation de traitement. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Duria, journalier à Hallembaie, demande que son fils unique Thomas, qui fait partie de la levée de 1842, soit exempté du service militaire. »
- Même renvoi.
Par message en date du 20 décembre, le sénat informe la chambre qu’il a adopté le projet de loi sur les eaux-de-vie étrangères.
- Pris pour notification.
M. de Garcia informe la chambre qu’une indisposition l’empêche d’assister à la séance.
M. Maertens, au nom d’une section centrale, dépose le rapport sur le budget du département de l’intérieur.
La chambre met ce budget à l’ordre du jour après les budgets de la justice et des finances.
M. Pirson, au nom de la section centrale du budget du département de la guerre, donne lecture du rapport suivant :
« La section centrale a examiné le projet de loi relatif à un crédit provisoire de fr. 4,000,000 pour le service du département de la guerre, à valoir sur l’exercice 1844. »
Prenant en considération l’impossibilité où se trouvera la chambre de discuter le budget de la guerre à une époque rapprochée, elle vous propose, à l’unanimité, d’adopter ce projet, sous la réserve toutefois que son adoption ne préjuge aucune des questions qui se rapportent à l’organisation de l’armée et au budget définitif de la guerre pour l’exercice 1844.
Des membres demandent la discussion immédiate du rapport.
- Cette proposition est adoptée.
M. le président. - La discussion générale est ouverte.
M. de Brouckere. - Je demanderai si la section centrale chargée de l’examen du budget de la guerre sera bientôt à même de présenter son rapport. Il serait à désirer que ce rapport fût soumis à la chambre dans les premiers jours du mois de janvier, sinon nous serons dans la nécessité de voter une seconde fois des crédits provisoires pour le ministère de la guerre.
M. Rodenbach. - La section centrale sera dans l’impossibilité de faire son rapport dans les premiers jours de janvier. Quatre sections veulent qu’avant l’examen du budget de la guerre, on examine la loi d’organisation de l’armée ; or, dans quelques sections, ce dernier examen n’est pas encore terminé. Le rapport ne pourra être déposé et discuté qu’à la fin de février ou au commencement de mars.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, je viens appuyer la motion de l’honorable M. de Brouckere. J’ai déjà fait observer, dans une autre séance, que plusieurs économies proposées dans le budget du département de la guerre, ne pourront être réalisées immédiatement, si le budget n’est pas voté dès le commencement de l’année ; ces économies seront retardées, et par là l’équilibre sera encore une fois rompu entre les recettes et les dépenses de l’Etat. J’insiste donc pour que les sections qui n’ont pas encore nommé leurs rapporteurs, veuillent bien terminer l’examen du budget de la guerre le plus tôt possible. En votant ce budget, on ne préjugera rien, quant à l’organisation de l’armée.
M. Osy. - Plusieurs sections ont nommé leurs rapporteurs, pour le budget de la guerre, lesquels n’ont d’autre mission que de déclarer à la section centrale qu’elles ne s’occuperont de ce budget qu’après le vote de la loi d’organisation de l’armée. Il faudra qu’à la section centrale on se mette d’accord sur la marche à suivre.
M. de Brouckere. - S’il n’existe pas d’accord entre la section centrale et une ou plusieurs sections sur la marche à suivre, qu’on fasse un rapport à la chambre qui décidera si elle examinera d’abord le budget de la guerre ou le projet d’organisation, où si elle examinera simultanément les deux projets ; mais la chambre ne peut pas être arrêtée par la décision de la minorité.
Un membre. - Il y a quatre sections qui ont fait la déclaration.
M. de Brouckere. - Soit ! ces quatre sections ne peuvent pas être considérées comme la majorité de la chambre ; car en calculant le nombre des personnes qui ont émis ce vote dans les autres sections, vous n’arriverez qu’à la moitié du nombre des membres de la chambre. Eh bien, que la question soit soumise à la chambre ; qu’un rapporteur vienne, au nom de la section centrale, signaler la difficulté, et la chambre alors se prononcera.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, est-il vrai que dans plusieurs sections on ait déclaré qu’on ne discuterait le budget de la guerre qu’après l’adoption de la loi d’organisation de l’armée ? Si je ne me trompe, on a, dans une section seule, manifesté l’intention de n’examiner le budget de la guerre qu’après la présentation de la loi d’organisation de l’armée.
M. le président. - Je vais mettre la chambre au courant de l’état de choses.
Jusqu’ici les diverses sections se sont occupées avec beaucoup d’activité. Ce n’est qu’hier que le budget du département de l’intérieur a été définitivement adopté. Il n’a pas encore été possible de convoquer la section centrale du budget du département de la guerre. Les rapporteurs sont nommés, et par conséquent, dès demain, si des travaux plus urgents ne s’y opposent pas, la section centrale du budget de la guerre sera convoquée, et il sera fait ensuite rapport à l’assemblée sur les conclusions que prendra la majorité de la section centrale, soit qu’elle se prononce pour l’examen immédiat du budget de la guerre, soit qu’elle subordonne cet examen à la discussion préalable de la loi d’organisation de l’armée.
M. de Brouckere. - C’est précisément la marche qu’il faut suivre.
M. Osy. - Je demanderai au gouvernement si son intention est de réduire la solde des soldats, à partir du 1er janvier.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, j’ai répondu d’avance à la demande de l’honorable membre. J’ai insisté sur une prompte discussion du budget de la guerre, par cette raison que M. le ministre de la guerre ne pourra pas réaliser les économies qui sont proposées dans ce budget, avant qu’il n’ait reçu l’assentiment de la chambre.
- La discussion générale est close.
On passe à la discussion des articles.
« Art. 1er. Il est ouvert au ministère de la guerre un crédit provisoire de quatre millions de francs, à valoir sur le budget des dépenses du département de la guerre de l’exercice 1844. »
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. »
Ces deux articles sont successivement mis aux voix et adoptés.
On procède à l’appel nominal. Le projet de loi est adopté à l’unanimité des 60 membres qui ont pris part au vote.
Un membre (M. Van Volxem) s’est abstenu, parce qu’il n’a pas assisté à la discussion.
Ont répondu oui : MM. Angillis, Cogels, Coppieters, David, de Brouckere, Dechamps, de Chimay, Dedecker, de Foere, de la Coste, Delehaye Delfosse, de Man d’Attenrode, de Meer de Moorsel, de Meester, de Mérode, de Nef, de Renesse, de Roo, de Saegher, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, Devaux, de Villegas, d’Hoffschmidt, Donny, Dumont, Dumortier, Duvivier, Eloy de Burdinne, Fleussu, Goblet, Henot, Huveners, Lebeau, Lesoinne, Lys, Maertens, Malou, Manilius, Mast de Vries, Mercier, Morel-Danheel, Nothomb, Osy, Peeters, Pirmez, Pirson, Rodenbach, Savart, Scheyven, Sigart, Simons, Thyrion. Troye, Van Cutsem, Vandensteen, Vilain XIIII, Zoude et Liedts.
M. de Saegher. - Messieurs, au nom de la commission des pétitions, j’ai l’honneur de vous présenter un rapport sur les pétitions de plusieurs officiers pensionnés pour services rendus aux Indes orientales.
(Nous donnerons ce rapport.)
La commission propose le renvoi de ces pétitions à M. le ministre des finances, avec demande d’explications.
- La chambre ordonne l’impression et la distribution de ce rapport.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, la loi qu’il s’agit de proroger est ainsi conçue :
« Article unique. Le gouvernement est autorisé à réduire les péages des canaux et rivières, perçus au profit de l’Etat :
« 1er : Sur les productions du sol ou de l’industrie du pays qui sont exportées ;
« 2° : Sur les matières premières exotiques servant à l’industrie nationale. »
J’ai deux observations à soumettre à la chambre sur la portée de cette loi. Il est d’abord dit que le gouvernement est autorise à réduire les péages des canaux et rivières, perçus au profit de l’Etat, mais la loi ne dit pas de quelle manière se fera cette réduction, si elle se fera par quotité fixe ou par tantième. Je m’explique. Il s’agit principalement de l’exportation de la houille en Hollande. C’est ce cas que je prendrai pour exemple, afin de faire comprendre pourquoi je ne puis pas adhérer à la proposition de la section centrale.
Pour exporter du charbon de Charleroy vers la Hollande et arriver jusqu’à Anvers on paie de 5 à 6 fr. Pour exporter du charbon de Mons en Hollande et arriver à Anvers, on paie environ un franc. Vous voyez de quelle importance est l’alternative que j’ai indiquée. Si le gouvernement réduisait les droits d’un franc, le bassin de Charleroi paierait encore 5 fr. et le bassin de Mons ne paierait plus rien du tout. Aussi le gouvernement a-t-il réduit les péages par tantième et non par quotité fixe ; il a dit : on réduira les péages d’un cinquième, d’un sixième. Il en est résulté qu’en réduisant d’un cinquième, il n’y a eu pour le bassin de Mons qu’une réduction de 5 à 10 centimes, tandis que la réduction pour le bassin de Charleroi a été d’un franc. Dans le bassin de Mons on prétend que ce mode d’exécution est injuste. Moi je prétends qu’on ne peut pas procéder autrement.
Ou me dit qu’il faut mettre d’accord Mons et Charleroi. Si c’est là le motif de la proposition de la section centrale, je n’hésite pas à dire dès à présent qu’on ne mettra pas Mons et Charleroi d’accord. J’ai vu entre Mons et Charleroi plus d’un désaccord de ce genre, et jamais on n’est parvenu à les faire cesser.
L’intention de la section centrale, en proposant l’ajournement d’une décision définitive sur le projet de loi, est celle d’insérer dans la loi que les réductions se feront par quotité. S’il en est ainsi, j’annonce dès aujourd’hui que je m’opposerais à cette insertion, car ce système ne serait pas susceptible d’exécution.
M. Osy. - M. le ministre veut-il me permettre de lui donner une explication ?
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je le veux bien ; je reprendrai la parole.
M. Osy, rapporteur. - Messieurs, la loi du 30 juin 1842 expire au 31 décembre 1843. La section centrale s’est occupée à plusieurs reprises de l’examen du projet de prorogation présenté par M. le ministre de l’intérieur. On ne s’est pas trouvé d’accord, d’abord sur l’adoption du projet ou les changements à y faire. La section centrale continuera à s’occuper de ce projet ; mais, comme il ne pourra pas être voté avant le 1er janvier, pour éviter une lacune, en autorise le gouvernement à proroger la loi de 1842 jusqu’au 30 juin. Rien ne sera ainsi préjuge sur la proposition de M. le ministre de l’intérieur, et d’ici au premier juin nous pourrons arriver à la solution des difficultés qui nous arrêtent.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je regrette que la section centrale ne m’ait fait aucune communication ; si elle m’avait signalé la difficulté que j’ai eu l’honneur de soumettre à la chambre je lui aurais donné des éclaircissements, je lui aurais démontré l’impossibilité d’exécuter la loi autrement que ne l’a fait le gouvernement. La difficulté porte sur une mesure d’exécution. Le gouvernement a-t-il bien ou mal exécuté la loi de 1842 ? Je dis que le gouvernement a exécuté cette loi comme elle devait l’être. Si le gouvernement, comme je l’ai déjà dit, avait accorde une réduction fixe d’un franc, le bassin de Mons n’aurait plus rien eu à payer pour arriver à Anvers, et le bassin de Charleroi aurait encore payé cinq francs. J’aurais pu pousser plus loin ma démonstration en l’appliquant au bassin de Liége, mais comme on n’a cité que la difficulté entre le bassin de Mons et celui de Charleroi, c’est de celle-là que je vous ai entretenus de préférence.
Cette question a été longuement examinée, nous l’avons traitée avec la députation du Hainaut et les intéressés.
Un deuxième point, qui a frappé quelques personnes, est celui-ci :le gouvernement est autorisé à accorder une réduction sur deux objets : 1° sur les productions du sol ou de l’industrie du pays qui sont exportées ; 2° sur les matières premières exotiques servant à l’industrie nationale. Le premier a reçu son application, mais le deuxième est resté sans application. Le gouvernement doit-il à l’avenir appliquer cette deuxième disposition ? C’est ce que le gouvernement examine ; c’est là une question d’exécution. Si on veut rester dans le système de la loi de 1842 on peut, sans rien compromettre, la proroger pour trois ans. Si la section centrale veut substituer un autre système, je regrette qu’elle ne l’ait pas communiqué, car si les changements qu’elle veut introduire sont ceux que j’ai indiqués, j’aurais combattu ses propositions.
Le gouvernement vous demande une prorogation de 3 ans, il vous a dit de quelle manière la loi a été exécutée, il vous a démontré que le trésor public, dont nous devons nous préoccuper, n’a rien perdu, que le montant des recettes, à tout prendre, est resté le même. Faut-il maintenant dans l’exécution changer de système, réduire par quotité au lieu de le faire au marc le franc ? J’ai démontré que c’était impossible. Faut-il aller plus loin dans les réductions, les appliquer aux matières premières exotiques, servant à l’industrie nationale ? C’est ce que le gouvernement examine ; et en définitive, ce sont là deux questions d’exécution qu’il faut laisser au gouvernement, à moins qu’on ne veuille changer le système de la loi de 1842.
La section centrale, dit-on, propose une loi transitoire. Mais c’est aussi une loi transitoire que propose le gouvernement. La différence consiste en ce que la durée serait de 3 ans, au lieu de 6 mois. Pourquoi le gouvernement a-t-il proposé une durée de 3 ans ? Pour que l’expérience puisse être complète. Je soutiens qu’un terme moins long ne vous met pas dans la possibilité de faire une véritable expérience. Comment voulez-vous qu’en six mois les exploitants de la Belgique fassent de véritables affaires ? Comment voulez-vous que dans l’incertitude où on sera sur la prorogation ultérieure de la loi, on puisse préparer des affaires sur lesquelles les péages et les frets exercent une grande influence ? C’est dire : vous ne ferez des affaires que pendant six mois, C’est là une considération capitale ; je suis étonné qu’elle n’ait pas frappé le rapporteur de la section centrale. (Interruption.)
Vous n’êtes pas tombés d’accord, dites-vous, c’est ce qu’on répète sans cesse ; mais vous ne tomberez jamais d’accord, vous n’obtiendrez jamais du bassin de Mons qu’il reconnaisse qu’il faut faire la réduction comme on l’a faite jusqu’à présent, de même que jamais le bassin de Charleroi n’adoptera le système que voudrait faire prévaloir le bassin de Mons. C’est là un problème insoluble, il faut vous y résigner.
Il faudra un jour faire une loi définitive sur les péages des canaux et rivières. Cette loi définitive devient surtout nécessaire puisque nous avons reconstitué le domaine public, quant aux voies navigables.
Le gouvernement se, trouvera bientôt en possession de tous les canaux, de toutes les rivières du pays. Vous avez récemment rendu au domaine le canal de Mons à Condé. Il faudra faire une loi définitive, il faudra faire disparaître certaines inégalités, certaines anomalies que présente le tarif des péages sur les rivières et canaux. Mais pour présenter cette loi, il faut que le gouvernement puisse étudier ces questions fort délicates, il faut que le gouvernement fasse une véritable expérience. Pour faire cette expérience, il faut un terme plus long que six mois. C’est un bienfait qu’on veut accorder à l’industrie minière ; le bienfait n’existe pas, si vous ne prorogez la loi que pour six mois.
M. Vandensteen. - Je crois qu’il faut qu’il soit bien établi comment la section centrale a été contrainte par l’urgence à présenter seulement un rapport provisoire, comme elle l’a fait. Le projet de loi a été soumis à la chambre le 23 novembre. Les sections s’en sont occupées dans les premiers jours de décembre. La section centrale s’est réunie 2 ou 3 fois. La dernière réunion a eu lieu hier. Après avoir discuté différentes objections qui se sont produites dans la section centrale, on a posé les questions qu’on voulait soumettre au gouvernement ; on a reconnu qu’il était impossible d’avoir ces réponses assez tôt pour pouvoir présenter un rapport détaillé avant la fin de cette semaine, c’est-à-dire en temps utile, puisque la chambre paraît disposée à se séparer samedi.
D’autre part, comme la loi expire le 31 décembre, il y avait urgence de prendre une décision. C’est ce qui fait l’objet du projet de loi en discussion et qui ne préjuge aucune question.
La section centrale se réserve de présenter, dans le plus bref délai possible, un rapport détaillé ; mais pour ne pas nuire aux intérêts du commerce, on propose de proroger la loi à six mois.
Voilà la proposition de la section centrale : c’est le seul objet qui doive être discuté. Maintenant la chambre veut-elle, nonobstant cette déclaration, aborder le fond de la question, comme le veut M. le ministre de l’intérieur ? Soit, mais alors la chambre sera obligée de statuer sur un projet, sans avoir pu consulter le rapport que la section centrale est chargée de faire.
M. Sigart. - La section centrale a désiré juger le fond de la question. Elle n’a pas pensé que le ministre avait fait un bon ou un mauvais usage de la loi. Elle a voulu que ce fût examiné. Pour l’examiner, elle a demandé au gouvernement, dans sa première réunion, des renseignements qui ne lui sont pas parvenus. A la vérité, hier soir, M. le ministre des travaux publics m’a communiqué officieusement quelques renseignements, mais ils étaient incomplets. La section centrale n’a donc pu statuer sur la question Le 1er janvier approchait. M. le président nous a réunis hier matin, et nous avons pris la résolution de vous proposer la prorogation de la loi au 30 juin, pour avoir le temps d’ici là d’examiner la question dans tous ses détails.
M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Relativement aux renseignements que la section centrale a demandés au gouvernement, je ne les ai reçu, en effet, qu’hier des bureaux, et je les ai communiqués officieusement à quelques membres de la section centrale. Mais je dois ajouter que ces renseignements ne pourraient nullement éclairer la discussion actuelle.
La section centrale a demandé quelle est l’importance des exportations de chacun des bassins houillers vers la Hollande, avant la révolution, et depuis le traité. D’après les renseignements qui m’ont été fournis, le gouvernement n’est en possession que de renseignements très incomplets de cette nature pour l’exportation vers la Hollande avant la révolution. Les archives des ingénieurs n’étaient pas tenues alors avec autant d’exactitude que maintenant. D’un autre côté, la Belgique et la Hollande ne formant à cette époque qu’un même pays, on n’a pas pu consigner le mouvement des transports des bassins houillers vers le Hollande, ce mouvement ayant lieu dans l’intérieur du pays même.
Quant aux importations du bassin de Charleroi vers la Hollande, le gouvernement n’a aucun renseignement à sa disposition.
Pour le bassin de Liége, l’administration n’a que très peu de documents. D’après certaines notes qu’a tenues l’ingénieur en chef de cette province, avant la révolution les exportations de houille vers la Hollande se seraient élevées, pour les années 1828, 1829 et 1830, à 221,000 tonneaux.
Pour le bassin de Mons, nous n’avons qu’un renseignement approximatif de même nature, qui évalue les exportations vers la Hollande au quart des expéditions totales.
Ainsi les renseignements que le gouvernement a à sa disposition ne peuvent nullement éclairer le débat ; ils ne peuvent avoir aucune influence sur l’espèce de motion indirecte d’ajournement que fait la section centrale.
Je ferai maintenant quelques observations sur le fond du débat.
Lorsque, les années précédentes, la chambre avait cru devoir limiter à un terme assez court l’application de la loi, la question qui était agitée était uniquement celle qui concerne le trésor public. On se demandait si l’expérience prouverait qu’effectivement le trésor public n’aurait rien à craindre de la réduction des péages pour l’exportation. L’expérience, à ce point de vue, a été faite.
Vous avez vu par les renseignements fournis par le gouvernement que le trésor public n’a rien perdu depuis l’adoption de ces mesures, et que la richesse publique a considérablement augmenté.
La question agitée entre le bassin de Mons et le bassin de Charleroi avait peu préoccupé la chambre jusqu’ici. L’an passé, les représentants du district de Mons n’avaient pas insisté sur ce point ; ils avaient renoncé à faire valoir cette considération.
L’honorable M. Sigart, qui seul, je pense, avait pris part à la discussion, avait déclare qu’en tout état de choses, si le bassin de Mons ne tirait pas un grand profit actuel de cette disposition, il n’en recevrait au moins aucun détriment, puisqu’il conservait sa position ancienne, et que dès lors il ne s’opposait pas à ce que les bassins de Charleroi et de Liége puissent profiter de cette mesure.
En effet, comme l’a dit l’honorable ministre de l’intérieur, cette question ne peut être éclaircie par de nouveaux renseignement et par un ajournement. Ce sont deux systèmes en présence. Faut-il adopter comme base de la réduction des péages ou un tantième, ou une quotité fixe ?
Si vous adoptez le système des quotités fixes, il est évident que le chiffre de la réduction devra être assez élevé pour déterminer les exportations pour les trois bassins, et dans ce cas ce chiffre devra être supérieur au droit total payé par le bassin de Liége, qui est de 6 centimes, et à celui payé par le bassin de Mons, qui est de 92 centimes. Ce serait donc une prime accordée à ce bassin, en constituant en perte le trésor public. Si le taux de la réduction ne s’élève qu’à la hauteur du chiffre des droits payés par Liége et par Mons, Charleroi n’exportera plus, et l’équilibre sera rompu de ce côté.
Vous arriveriez ainsi à un résultat opposé à celui que la chambre avait toujours voulu atteindre augmenter le nombre des transports sans perte pour le trésor public. Il est certain que vous ne pouvez augmenter les transports du bassin de Mons vers la Hollande qu’au détriment du trésor public, ou bien en frappant un autre bassin ; cela est évident. Tout ce que l’on ajouterait n’avancerait pas d’un pas cette discussion.
Il faut envisager la question d’un peu plus haut. Il y aura toujours pour le bassin de Mons avantage à ce que les bassins de Liège et de Charleroi trouvent un nouveau débouché en Hollande. La Hollande s’habituerait à préférer la houille belge aux houilles de la Prusse et de l’Angleterre. Tous les bassins houillers ont le même intérêt à ce point de vue. D’un autre côté, plus l’exportation de la houille de Liège et de Charleroi prendra de l’extension vers la Hollande, moins le charbon de Mons rencontrera leur concurrence sur le marché intérieur.
M. Osy, rapporteur. - D’après les explications de MM. les ministres, ils semblent croire que la section centrale propose le rejet de la proposition du gouvernement. Il n’en est rien. Elle propose de proroger la loi au 30 juin, parce qu’elle expire à la fin de ce mois. Mais elle reste chargée de l’examen du projet de loi, et vous fera à ce sujet son rapport avant le 30 juin.
Si le ministre croit qu’il faut aborder le fond de la discussion, et si la chambre partage son avis, je ne m’y oppose pas. Mais avant tout, il faut décider si l’on veut se borner à la discussion du rapport provisoire de la section centrale.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, du moment que le gouvernement ne se rallie pas à la proposition de la section centrale, il faut que la discussion porte sur le projet tel qu’il a été présenté par le gouvernement.
M. Osy, rapporteur. - Il n’y a pas de rapport.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Il n’y a pas de rapport. Mais rendons-nous bien compte de la question telle qu’elle se présente. Le gouvernement vous demande une prorogation pour trois ans ; la section centrale vous demande une prorogation pour six mois.
M. Osy, rapporteur. - Pour examiner.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Pour examiner, soit. Je continue.
Pour examiner quelle question ? L’espèce de conflit qui existe entre Mons et Charleroi. Car on ne nous indique pas d’autre difficulté.
Nous n’avons pas obtenu les renseignements, dit-on. Ces renseignements, M. le ministre des travaux publics vient de vous les fournir. Mais la question entre Charleroi et Mons, la section centrale ne l’avait pas même signalée an gouvernement. Elle est maintenant signalée. Je vous ai dit que cette question est insoluble. Que voulez-vous davantage ? Voulez-vous le renvoi de cette question à la section centrale ? Mais elle ne vous dira pas plus que vous ne savez à présent. Mons voudrait la réduction par quotité fixe, Charleroi demande la réduction par tantième. Nous trouvons qu’il faut une réduction par tantième ; que si vous accordez une réduction par quotité fixe, il faut qu’elle soit au moins de 90 centimes à 1 fr. Dès lors, il y aurait remise de tout droit pour le bassin de Mons, et le bassin de Charleroi paierait environ 5 fr.
Nous avons fait une réduction par tantième. Il en est résulté un soulagement considérable pour le bassin de Charleroi il est vrai que le soulagement est moindre pour le bassin de Mons ; mais celui-ci se trouvait déjà dans une position meilleure que le bassin de Charleroi.
J’insiste sur la considération très importante que j’ai présentée à la chambre. Une prorogation de six mois présente ce grand inconvénient que nos exploitants ne pourront pas faire de véritables affaires avec la Hollande.
M. de Brouckere. - C’est cette dernière considération qu’a fait valoir M. le ministre de l’intérieur, qui me déterminera à demander que la loi qu’il est question de proroger le soit pour trois ans et non six mois.
M. Devaux. - Je demande la parole pour une motion d’ordre.
M. de Brouckere. - Messieurs, si vous ne prorogez la loi que pour six mois, vous ne rendrez aucun service à l’industrie, au commerce, parce que l’incertitude dans laquelle vous laisserez les commerçants et les industriels que la chose intéresse, sur ce qui arrivera après les six mois, les empêchera d’engager des affaires qui peut-être ne pourraient pas être continuées après ce délai.
Mais je me demande quelles considérations pourraient empêcher que nous ne prorogeassions la loi pour trois ans. Se plaint-on que le gouvernement ait fait abus de la faculté que la loi lui donne ? Non.
M. Osy, rapporteur. - Oui.
M. de Brouckere. - Non, généralement on ne se plaint pas de la manière dont le gouvernement a appliqué la loi, et la preuve, c’est que le gouvernement vous demande d’articuler les plaintes, qu’on n’en signale qu’une seule ; elle émane du bassin de Mons. Or, cette plainte, il a été répondu ; on vous a donné aujourd’hui les renseignements sur cette difficulté ; tout ce que l’on pourra vous dire en section centrale, tous les écrits qu’on pourra vous transmettre n’avanceront pas la question d’un pas.
D’un autre côté, messieurs, le trésor a-t-il souffert, par suite de la disposition qu’il est question de proroger ? S’il a souffert, c’est dans une si petite proportion, que cette considération ne doit pas entrer en ligne de compte. Mais en fait, je crois que le trésor n’a pas souffert.
Reste une seule objection ; on dit : la section centrale n’a pas fait son rapport sur le fond de la question ; allez-vous la trancher sans avoir ce rapport ? Messieurs, je crois que la chambre est suffisamment éclairée sur la question, et je ne vois pas pourquoi elle ne pourrait pas se prononcer. Mais si l’on tenait à avoir un rapport, je demanderais alors que la section centrale fût invitée à nous le présenter dans la séance de demain ou au plus tard dans celle de samedi. Elle pourrait avoir une séance à laquelle elle inviterait MM. les ministres de l’intérieur et des travaux publics de vouloir assister ; mais, je le répète, j’ai la conviction que cette séance n’amènerait aucun résultat. C’est parce que j’ai cette conviction, que je suis tout disposé à voter le projet du gouvernement sans attendre un second rapport.
M. Devaux. - Je regrette de voir qu’au milieu de la discussion d’une loi très compliquée, au milieu d’un article à moitié discuté, qu’on vienne s’intercaler une discussion non préparée, fort confuse, à ce qu’il paraît, et très irrégulièrement introduite. Je crois que l’on n’aurait pas mis à l’ordre du jour, au milieu de la discussion du projet de loi sur le sel, un autre projet, si l’on n’avait cru qu’il s’agissait, comme pour le contingent de l’armée, d’un projet transitoire, qui ne soulèverait aucune discussion.
Maintenant on ouvre une discussion qui promet d’être très longue, et probablement de ne nous mener à aucun résultat. Car vous ne pouvez discuter une loi sur laquelle il paraît qu’il y a une grande divergence d’opinions, sans qu’il vous ait été fait un rapport. Or, la section centrale ne vous en a pas fait sur le projet du gouvernement. Les membres de la chambre d’ailleurs ne sont pas préparés, parce que, je le répète, on ne s’attendait pas à une discussion quelque peu importante.
Il faut donc que nous ayons un rapport, et qu’on nous donne le temps de nous préparer. Ainsi, si l’on veut discuter le fond avant la fin du mois, il faut inviter la section centrale à faire un rapport ; sinon qu’on se contente d’une loi transitoire. Sans cela, il est probable que nous allons perdre un temps considérable sans résultat, et cela faute de régularité dans la marche qu’on a adoptée.
Je demande donc que la chambre s’occupe de la question de savoir si elle invitera la section centrale à faire un rapport nouveau, ou si elle se contentera du rapport actuel ; mais que, dans tous les cas, on ne discute pas le fond de la question dans ce moment.
M. Pirmez. - Si la proposition de l’honorable M. Devaux est adoptée, il faut aussi adopter la proposition de l’honorable M. de Brouckere ; c’est-à-dire que la section centrale serait chargée de faire un rapport samedi au plus tard.
Les pouvoirs donnés au gouvernement expirent au 4 janvier prochain ; vous devez donc renouveler la loi avant cette époque.
La section centrale vous propose de la proroger seulement pour six mois ; mais M. le ministre de l’intérieur et l’honorable M. de Brouckere vous ont fait contre cette proposition des observations extrêmement fortes et qui doivent avoir une grande influence sur vos esprits ; c’est qu’il n’est pas possible qu’avec un délai si court on entreprenne des affaires avec la Hollande. Les opérations en houille se traitent longtemps à l’avance ; ces opérations sont souvent considérables et ne se font pas en un jour ; souvent la marchandise n’est pas sur les lieux, elle doit être extraite. En présence de cet état de choses, je crois que vous ne pouvez laisser les exploitants dans l’incertitude.
On dit que la section centrale doit avoir des renseignements ; mais la seule difficulté qui se soit présentée, est le conflit entre le bassin de Mons et le bassin de Charleroi. Mais cette difficulté existait déjà avant le premier projet.
Des renseignements, vous en avez eu. On vous a dit que le trésor n’avait éprouvé aucun préjudice de la loi, et notez bien que vous ne perdez rien sur une navigation qui donne un revenu immense, un revenu de 1,300,000 de fr. Quelles autres explications voulez-vous avoir ?
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, il n’y a pas d’autre difficulté que la question entre le bassin de Mons et le bassin de Charleroi. On n’en a pas signalé d’autre jusqu’à présent. Cette question est ancienne ; je l’ai signalée à la chambre dans le travail qui lui a été présenté le 18 mars 1842. La chambre a été saisie deux fois de cette loi, et chaque fois on a accompagné le projet de nombreux documents.
Le gouvernement vous a dit dans quel sens il entendait faire la réduction ; il vous a dit qu’il voulait la faire par tantième et non par quotité fixe. La question, je le répète, est très ancienne, et à mes yeux elle est insoluble, en ce sens que vous ne mettrez jamais Mons et Charleroi d’accord.
M. Mast de Vries. - Il faut au moins l’examiner.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Il faut au moins l’examiner, dit-on ; mais vous ferez tel examen que vous voudrez, vous ne changerez pas l’état des choses ; c’est la force des choses qui a créé cette position entre Mons et Charleroi. Il se trouvait que Mons était déjà dans une situation extrêmement favorable : elle ne paie que 92 centimes pour arriver à Anvers. Charleroi paie environ 6 fr. Voilà, messieurs, une situation qui est le résultat de la force des choses, vous ne pouvez rien y changer ; tant que cette situation existera, la question se présentera.
Je crois qu’il faut continuer à faire la réduction comme elle l’a été jusqu’ici, c’est-à dire par tantième et non par quotité fixe.
M. Delfosse. - Je ne vois pas pourquoi le gouvernement ne se rallie pas à la proposition qui est faite par la section centrale, il n’a aucun intérêt à la repousser.
Que veut le gouvernement ? que la loi soit prorogée ; eh bien, c’est aussi ce que la section centrale propose. La seule différence qu’il y ait entre la proposition du gouvernement et celle de la section centrale, c’est que le gouvernement demande la prorogation pour deux ans, tandis que la section centrale ne l’accorde que pour six mois. Mais cette proposition de la section centrale ne préjuge rien ; avant l’expiration des six mois, elle fera un nouveau rapport, et alors la chambre pourra, si elle le trouve bon, accorder la prorogation telle qu’elle est demandée par le gouvernement. Le gouvernement devrait faire cesser toute difficulté en se ralliant à la proposition de la section centrale. Il est impossible que la chambre statue sur le projet présenté par M. le ministre de l’intérieur, sans avoir un rapport complet de la section centrale.
L’honorable M. de Brouckere propose à la chambre d’inviter la section centrale à faire un rapport complet dans la séance de demain. Mais il serait impossible à la section centrale de faire un rapport complet dans un terme aussi court. Le projet soulève des questions qui sont beaucoup plus difficiles que MM. les ministres ne le pensent. Il y a la question de savoir si la loi, dont on demande la prorogation, n’a pas détruit l’équilibre qui existait précédemment entre les divers bassins houillers.
On paraît croire que la question n’est qu’entre Mons et Charleroi, mais elle est aussi entre le Hainaut et la province de Liége. Si Mons se plaint de ce que Charleroi obtient une réduction trop forte, Liège pourrait se plaindre à son tour des avantages accordés à Mons et à Charleroi. La réduction, messieurs, est beaucoup plus forte pour Mons et Charleroi que pour Liége. Je ne veux pas examiner la question en ce moment, mais je demande qu’elle puisse être examinée par la section centrale, je demande que le gouvernement fournisse à la section centrale les documents dont elle a besoin pour s’éclairer ; je demande que le gouvernement fournisse les renseignements nécessaires pour faire connaître quelle influence la réduction a exercée sur nos exportations en Hollande.
Il est encore une autre question que l’on pourrait soulever à l’occasion de ce projet de loi, et dont on n’a pas parlé jusqu’à présent. On obtient une réduction sur les péages, mais on n’obtient cette réduction que par voie de restitution. Les industries qui exportent soit du charbon soit d’autres matières pour lesquelles la réduction est accordée, doivent commencer par payer le droit entier ; ce n’est que longtemps après qu’ils obtiennent la restitution du montant de la réduction, et pour l’obtenir, ils sont obligés de remplir des formalités tellement gênantes que bien des industriels renoncent à la réduction pour ne pas se soumettre à ces formalités. C’est encore là une question sur laquelle le gouvernement devra donner des renseignements à la section centrale ; il est bon qu’elle puisse examiner s’il ne conviendrait pas d’accorder la réduction directement, au lieu de l’accorder par voie de restitution.
Je ne veux rien préjuger, messieurs ; je demande seulement que la chambre ne prenne pas une résolution définitive avant d’avoir pu examiner attentivement les questions que je viens d’indiquer.
Si l’on entre aujourd’hui dans l’examen du fond, la discussion pourra être fort longue, et il nous sera impossible de reprendre l’examen du projet de loi sur le sel, la discussion du budget de la justice sera renvoyée après les vacances. La prudence exige que le gouvernement se rallie à la proposition de la section centrale.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Sans doute, messieurs, s’il s’agit d’opter entre ne rien obtenir du tout et obtenir la prolongation à 6 mois, il vaut mieux obtenir la prorogation à 6 mois ; mais j’ai cru, pour la responsabilité du gouvernement, devoir faire connaître à la chambre pourquoi la prorogation à 6 mois présente de grands inconvénients maintenant que ces inconvénients sont connus, la chambre décidera.
Je croyais même qu’après les explications que j’ai données sur la seule question que soulève le projet, la question entre Mons et Charleroy…
M. Osy. - Nous pourrions en citer d’autres.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Eh bien, qu’on les cite ; Nous les examinerons.
La question qui a été citée par l’honorable M. Delfosse, a été examinée avec le plus grand soin par le ministère des finances, sur la demande du ministère de l’intérieur ; mais, encore une fois, rien n’a été demandé au gouvernement. Quand j’ai pris tout à l’heure la parole, je croyais, et je continue à croire que la question qui a arrêté la section centrale, est la question entre Mons et Charleroy. Or, j’ai donné à cet égard toutes les explications que je pouvais donner, et je crois qu’après ces explications la section centrale peut adhérer au projet du gouvernement. Si elle ne croit pas pouvoir le faire, le chambre décidera ; mais, je le répète, ii vaut mieux six mois que rien.
M. Osy, rapporteur. - M. le ministre de l’intérieur croit, messieurs, qu’il n’y a d’autre difficulté que la rivalité qui existe entre les différents bassins. Il en est d’autres, messieurs, et en voici une dont je prie M. le ministre de prendre note : plusieurs sections ont demandé que la loi ne fût prorogée définitivement que pour un an, parce qu’elles pensent que si l’on ajoute encore une année aux 18 mois pendant lesquels le gouvernement a pu faire des expériences, il sera possible, à l’expiration de ce délai, de présenter un tarif définitif.
Ainsi, messieurs, la question est assez compliquée, et il faudra dès lors quelque temps à la section centrale pour l’examiner. L’honorable M. de Brouckere croit que nous pourrions faire un rapport dans la séance de demain ; vous avez vu, messieurs, les difficultés qu’il s’agit de résoudre, et vous comprendrez sans peine qu’il est impossible d’éclaircir tout cela d’ici à demain.
Je dois faire remarquer, messieurs, que si la section centrale n’avait pas fait de rapport, l’ancien tarif aurait été remis en vigueur au janvier prochain, et alors le gouvernement aurait eu à se plaindre.
Maintenant, si la chambre adopte notre proposition, nous demandons à rester chargés de l’examen de la question et avoir le temps de la mûrir.
M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Vous avez pu, messieurs, à la lecture de l’exposé des motifs, vous apercevoir que le gouvernement a instruit cette question avec le plus grand soin. De nombreux renseignements vous ont été fournis ; les chambres de commerce ont été consultées. Lorsque ces chambres de commerce sont venus demander la prorogation à un terme plus éloigné, vous comprenez que le gouvernement a dû accéder à ce vœu presque unanime, en vous proposant de proroger la loi pour trois ans, afin de rendre l’expérience plus complète, plus définitive, Il est à regretter, j’en conviens, que la section centrale n’ait pas eu assez de temps pour faire un rapport complet sur cette question ; je pense que le gouvernement aurait pu lui fournir sans délai tous les renseignements nécessaires pour la mettre à même de se prononcer en connaissance de cause, d’autant plus qu’elle n’avait à s’occuper que d’un seul point réellement susceptible de controverse, la question posée entre Mons et Charleroy.
Comme on l’a déjà dit, à plusieurs reprises, messieurs, l’inconvénient qu’il y aurait à ne proroger la loi qu’à six mois, c’est l’incertitude dans laquelle vous jetteriez les industries qui peuvent profiter de cette loi. L’exploitation charbonnière doit être dirigée, dès le commencement de l’année industrielle, de manière à être en rapport avec une vente probable et connue d’avance. Une prorogation à 6 mois seulement placerait l’industrie dans une incertitude excessivement fâcheuse, elle entravera le mouvement industriel que la loi avait développé.
Si la chambre croit ne pas pouvoir discuter à fond la question sans que nous soyons saisis d’un rapport plus complet de la section centrale, je pense qu’elle doit cependant proroger la loi pour un terme plus long que celui de 6 mois ; dans tous les cas, si le projet du gouvernement n’est pas adopté, il doit être bien entendu que la section centrale fera dans l’intervalle à la chambre un rapport détaillé ; sans cela vous jetteriez de l’indécision et du découragement dans les opérations commerciales que la loi a pour but de favoriser.
M. le président. - Je dois demander une explication à M. Devaux sur son amendement ; entend-il que la chambre décide si elle ajournera le projet du gouvernement ? Si le gouvernement insiste pour que la chambre se prononce sur son projet, je ne pense pas que nous ayons le droit de l’ajourner.
M. Devaux. - Je n’ai pas l’habitude de gêner la prérogative royale, et je pense que ma proposition la respecte complètement. il ne s’agit pas de savoir si l’on ajournera définitivement le projet du gouvernement. Comme je prévois que l’on ne pourra pas discuter ce projet avant la fin de l’année, et que dans ce cas il faut bien recourir a un projet transitoire, je demande à la chambre, non pas qu’elle ajourne le projet du gouvernement, mais qu’elle décide si elle s’occupera aujourd’hui du projet transitoire présente par la section centrale ou du projet définitif présenté par le gouvernement. Je crois que c’est là une question qui entre parfaitement dans les attributions de la chambre de décider.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - C’est une question de priorité ; on pourrait la poser en ces termes : « Accordera-t-on la priorité au projet de la section centrale ou au projet du gouvernement ? » (Aux voix ! aux voix !)
M. Cogels. - Je n’ai que deux mots à dire : vous voyez, messieurs, qu’il est impossible que la section centrale vous présente avant la fin de l’année un rapport complet, un rapport qui puisse vous éclairer sur le projet du gouvernement. D’autre part, MM. les ministres et l’honorable M. de Brouckere ont fait remarquer que la prorogation à six mois seulement entraînerait des inconvénients, dans ce sens que le commerce n’aurait pas assez de sécurité et que les expéditions en charbon surtout exigent une préparation assez longue, que par conséquent il faudrait proroger la loi à un terme plus éloigné.
Je crois, messieurs, que je mettrai tout le monde d’accord en proposant à la chambre d’accorder la prorogation pour un an, au lieu de ne l’accorder que pour six mois ; de cette manière l’exploitation charbonnière aura devant elle ce qu’on nomme une campagne complète ; d’un autre côté, comme le gouvernement avait jugé en 1842, qu’une expérience de dix-huit mois serait suffisante, je pense que nous rendrions l’expérience complète en ajoutant encore une année à ces dix-huit mois. Alors la chambre pourra prendre une décision en connaissance de cause.
Je propose donc, par amendement au projet de la section centrale, de fixer au 31 décembre 1844, le terme de la prorogation.
M. Lange. - D’après les explications qui ont été données, je me rallie à l’opinion de M. Devaux.
- La chambre, consultée, décide qu’elle accorde la priorité au projet de la section centrale.
M. Osy. - Je ne m’oppose pas à l’amendement proposé par l’honorable M. Cogels. Mais il est bien entendu sans doute que la section centrale restera chargée de l’examen du projet de loi. (Oui ! oui !)
M. Fleussu. - L’observation que je voulais faire, rentre dans celle que vient de présenter l’honorable M. Osy. Je crois que si l’on admet même la proposition de l’honorable M. Cogels, la section centrale doit rester saisie du projet de loi, et en faire son rapport. (Oui ! oui ! cela est entendu.) Car, sans cela, il arriverait l’année prochaine ce qui arrive cette année-ci, c’est-à-dire, qu’il faudrait présenter un nouveau projet de loi, et que le temps nous manquerait encore pour l’examiner avec maturité.
- La discussion générale est close.
On passe aux articles.
L’art. 1er est ainsi conçu :
« La loi du 30 juin 1842 (Bulletin officiel, n° 51) est prorogée jusqu’au 30 juin 1844.
M. Cogels propose de proroger le délai jusqu’au 31 décembre 1844.
- L’art. 1er ainsi amendé est mis aux voix et adopté.
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. »
- Adopté.
Le gouvernement s’étant rallié à l’amendement introduit dans l’article 1er, il est procédé à l’appel nominal pour le vote sur l’ensemble du projet de loi.
Le projet est adopté à l’unanimité des 75 membres présents, qui sont MM. Angillis, Castiau, Cogels, Coghen, Coppieters, David, de Baillet, de Brouckere, Dechamps, de Chimay, Dedecker, de Florisone, de Foere, de la Coste, Delehaye, Delfosse, d’Elhoungne, de Meer de Moorsel, de Meester, de Mérode, de Muelenaere, de Nef, de Renesse, de Roo, de Saegher, de Sécus, Desmaisières, de Terbecq, de Tornaco, Devaux, de Villegas, d’Hoffschmidt, Donny, Dumont, Duvivier, Eloy de Burdinne, Fleussu, Goblet, Henot, Huveners, Jadot, Jonet, Kervyn, Lange, Lebeau, Lesoinne, Lys, Maertens, Malou, Manilius, Mast de Vries, Mercier , Morel-Danheel, Nothomb, Osy , Peeters , Pirson , Pirmez , Rodenbach, Rogier, Savart, Scheyven, Sigart, Simons, Thienpont Thyrion, Troye, Van Cutsem, Van den Eynde, Vandensteen, Van Volxem, Verwilghen, Vilain XIIII, Zoude, Liedts.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, dans votre dernière séance, un honorable député d’Anvers a fait une observation qui m’a paru fondée, et à laquelle je vais faire droit par une modification au 2ème § du litt. E de l’art.
L’honorable M. Cogels a signalé les difficultés que pouvait éprouver le déclarant à indiquer la densité, par mention expresse, sur la déclaration au moment de puiser l’eau de mer. Voici la modification que je propose :
« Au moment de puiser l’eau de mer, le déclarant en indiquera la densité par mention expresse faite sur la déclaration, à moins qu’en faisant sa déclaration il n’ait demandé à faire constater la densité par les agents de l’administration. »
Je pense qu’au moyen de cette modification toute difficulté sera levée.
Ainsi, par exemple, pour l’eau de mer qui sera puisée sous Lillo, la déclaration se fera au bureau de Lillo, et les agents de l’administration dans ce bureau iront constater la densité, si la personne intéressée ne veut pas elle-même faire cette déclaration.
D’un autre côté, il résulte de renseignements qui ont été pris par le département des finances, que les bâtiments qui servent à transporter l’eau de mer, ne doivent pas recevoir un chargement complet, c’est-à-dire, que dans la cale il reste un certain vide. J’ai cru, pour cette raison devoir accorder une réduction de 20 p. c. sur la capacité de la cale ; ainsi le § 4 serait modifié dans sa rédaction de la manière suivante :
Au lieu de : « de la capacité pleine de la cale de chargement, » Je propose : « de la capacité de la cale de chargement sous déduction de 20 pour cent. »
Par suite de cette modification, un autre changement doit être fait au même paragraphe ; au lieu des mots : ou celle des barriques, il faut mettre ceux-ci : ou la capacité pleine des barriques.
Un honorable membre a demandé hier si, en effet, la fraude serait à craindre, si l’on dépassait Lillo. Les agents de l’administration, dans ce cas, la redouteraient fortement, il serait à craindre que les navires échappant à la surveillance de l’administration, du sel même ne soit introduit dans l’eau de mer. Ce sel, descendant au fond de l’eau, il serait très difficile d’en découvrir des traces, car on ne pourrait sans peine remuer des masses d’eau comme celles qui composeraient le chargement d’un navire ; il serait souvent impossible de reconnaître le degré de densité de l’eau de mer mélangée avec le sel ; d’autres fraudes pourraient d’ailleurs se perpétuer à l’occasion du transport de l’eau de mer. Il me paraît, en conséquence, qu’il y a lieu à maintenir la disposition du projet de loi.
Toutefois, si l’honorable M. Vilain XIIII proposait de substituer aux mots : en-deçà de Lillo, ceux-ci en-deçà de la frontière belge, je pourrais me rallier à cet amendement, parce que aussi longtemps qu’on ne dépasse pas l’extrême frontière, il n’est pas impossible d’exercer la surveillance sur les bateaux qui transportent l’eau de mer.
M. de Foere. - Messieurs, ce qui domine la discussion sur l’emploi de l’eau de mer, ce sont les avantages que les uns attribuent à cet emploi, et que les autres lui contestent. Il me semble donc que la discussion sera utilement resserrée dans ce cercle.
Les avantages qu’ont les sauniers à proximité des côtes maritimes, résultent-ils de l’emploi de l’eau de mer ? ou résultent-ils d’autres causes ?
Je vais tâcher d’établir que réellement les sauniers des côtes maritimes ont des avantages, mais que ces avantages ne résultent en aucune manière de l’emploi de l’eau de mer, et, quoi que vous fassiez, vous ne pourrez jamais leur enlever ces avantages.
Remarquez bien, messieurs, que la discussion de toute question consiste particulièrement bien rattacher les effets à leurs causes ; lorsque les effets signalés ne se rattachent pas à leurs causes, et que cependant vous preniez une décision conforme à ces effets, il en résulte que vous prenez une résolution erronée.
Nos adversaires, pour prouver qu’il y a un grand avantage à l’emploi de l’eau de mer, vous disent : « Une vingtaine de sauneries sont tombées à l’intérieur. Aussi est-il prouvé par ce fait que les sauniers des côtes maritimes placent leur sel raffiné à 7, 8 et 9 p. c. meilleur marché que les sauniers à l’intérieur. »
Je vais énumérer les causes qui donnent un avantage aux sauniers des côtes maritimes.
La première cause, c’est que ces sauniers achètent le sel brut de première main Ce sel leur est rendu directement devant leurs magasins, tandis que les sauniers de l’intérieur sont obligés d’acheter leur sel aux négociants maritimes. Il en résulte que les sauniers des côtes maritimes ont, en premier lieu, cet avantage qu’ils obtiennent par l’achat du sel brut de première main. Ensuite le transport de ce sel par mer leur coûte moins, ils affrètent ordinairement un navire qui exporte à Liverpool des écorces, des lins et d’autres matières, et le retour se fait en sel brut, de sorte que le fret de cette importation ne pèse qu’à moitié sur les sauniers des côtes maritimes.
Voilà un premier avantage que les sauniers de l’intérieur n’ont pas.
Le deuxième avantage consiste en ce que les sauniers de l’intérieur sont obligés d’acheter le sel brut des grands négociants en sel, des armateurs, de le faire transporter des ports d’Ostende et de Bruges dans l’intérieur, et même de le faire transporter par chariot là où il n’y a pas de canal. Voilà un deuxième désavantage que subissent les sauniers de l’intérieur : le transport du sel brut jusqu’à leur usine. Ensuite il faut ajouter à ce désavantage du transport celui du chargement, du déchargement et des pesées nombreuses que les sauniers des côtes maritimes n’ont pas. De là résulte en partie, messieurs, que le prix de revient des sauniers de l’intérieur est plus élevé que celui des sauniers établis sur la côte.
L’honorable M. Delehaye a dit hier que les pétitionnaires de Courtrai ne connaissaient pas leur profession, parce que leur prix de fabrication pour 100 kilog. était de 3,50, tandis que les autres fabriquaient à deux francs. Cette différence provient en partie des causes que j’ai indiquées tout à l’heure.
Il y a un troisième avantage, en ce que les sauniers des côtes maritimes opèrent sur une masse beaucoup plus grande que les sauniers de l’intérieur. Il n’y a personne qui ignore qu’une usine qui opère sur le double ou le triple n’ait, quant au prix de revient, un grand avantage sur une usine qui opère sur le tiers, car les frais de fabrication, d’établissement, de main-d’œuvre, n’augmentent pas en raison de la quantité de produits qu’on fabrique. Eh bien, cette différence de coût, par suite de la différence des quantités fabriquées, est très grande. La grande saunerie d’Ostende consomme, terme moyen, 500 mille kilog. de sel brut ; les deux grandes sauneries de Bruges, qui sont sur le canal, qui font arriver le sel brut directement de Liverpool et jouissent ainsi du bénéfice du négociant, consomment, terme moyen,75 mille kilog. de sel brut et le maximum de ce que consomment les fabriques de sel de l’intérieur de la Flandre occidentale est de 60 mille kilog. Voilà une troisième cause d’où résultent des avantages pour les sauniers des côtes maritimes sur les sauniers de l’intérieur.
Messieurs, on vous a fait accroire que la chute de quelques sauneries établies à l’intérieur était due aux avantages de l’emploi de l’eau de mer pour la fabrication du sel. J’ai déjà dit les causes pour lesquelles les sauneries de l’intérieur ne pouvaient pas lutter avantageusement contre les sauniers des côtes maritimes. Mais il y avait une autre cause de ruine pour elles, c’est l’excès de production. Vous savez que quand la production n’est pas au niveau de la consommation, il arrive un moment où la production doit s’arrêter jusqu’à ce que ce niveau soit rétabli. Aujourd’hui la population de la Flandre occidentale, par suite de l’état de souffrance de l’industrie, est forcée de réduire sa consommation en toute espèce de denrée, la consommation du sel comme toute autre s’est trouvée restreinte, et comme vous le savez, moins la consommation est grande, plus la production éprouve de gêne. La même cause a produit les mêmes effets à Ostende et à Bruges. Malgré l’emploi de l’eau de mer, sur 10 sauneries qu’il y avait à Ostende, il n’y en a plus que cinq, et la grande saunerie, qui travaillait à dix chaudières, ne travaille plus qu’à cinq. A Bruges, sur huit sauneries travaillant toutes à l’eau de mer, il n’y en a plus aujourd’hui que cinq.
Ainsi l’argument qu’on a produit contre l’emploi de l’eau de mer tombe, puisque les mêmes faits se sont représentés à Ostende et à Bruges.
Vous me demanderez maintenant, puisque les avantages des sauniers des côtes maritimes ne se rattachent pas à l’emploi de l’eau de mer, pourquoi on attache tant d’importance à pouvoir s’en servir. Voici la réponse : c’est que l’emploi de l’eau de mer au-dessous de 3 degrés, dont les sauniers demandent exclusivement l’emploi, a pour effet de produire un sel plus blanc, plus pur, mieux cristallisée et en second lieu, c’est que les sauniers sur les côtes de la mer n’ont réellement pas d’autre eau convenable pour travailler. Le fait a été vérifié à Ostende et à Bruges. Voilà les seuls avantages qui se rattachent à l’eau de mer, c’est donc pour eux une nécessité de l’employer.
Les sauniers des côtes maritimes ne demandent qu’à pouvoir employer l’eau de mer au-dessous de trois degrés. Il en résulte que l’échafaudage sur lequel la pétition d’Audenaerde est basée tombe entièrement, car cette pétition est basée sur la densité de l’eau de mer qu’elle porte à 5, 6 degrés, et même plus. Puisque les sauniers établis à Ostende et à Bruges demandent seulement l’emploi de l’eau de mer au-dessous de trois degrés, vous devez convenir que la base sur laquelle se fonde la pétition d’Audenaerde est fausse.
Il faut considérer ensuite que les avantages qui peuvent se rattacher à l’emploi de l’eau de mer, sont largement compensés, comme le démontreront les observations que je vais avoir l’honneur de vous soumettre. Les sauniers sont d’abord obligés de faire les frais d’un bateau pour aller chercher l’eau de mer, d’avoir des citernes qui entraînent aussi de grands frais de construction et d’entretien, ils sont obligés de faire encore d’autres dépenses. Ensuite, parce qu’ils produisent un sel mieux cristallisé, plus blanc, il en résulte que le sel est plus léger. Ils perdent sur le poids ; il en résulte que le sel qui serait raffiné à Courtrai donnerait 50 kilog., tandis que celui raffiné à Ostende ou à Bruges, n’en donnerait que 40. Si les sauniers de Courtrai vendaient leur sel au poids, ils auraient un avantage sur les sauniers des côtes maritimes. Mais l’usage, l’habitude est de vendre à la mesure ; il en résulte que l’avantage tourne contre eux.
Si vous persistez à croire qu’en raison de la densité de l’eau de mer il y a grand avantage à l’employer, adoptez l’amendement que vous a présenté (erratum Moniteur belge n°362, du 28 décembre 1843 :) l’honorable M. Osy, qui prohibe formellement l’emploi de l’eau de mer au-dessus de trois degrés. Devant cet amendement doivent nécessairement tomber toutes les réclamations fondées sur les avantages résultant de l’emploi de l’eau de mer, et il devient inutile de l’imposer au-dessous de trois degrés.
J’ai établi que les avantages des sauniers des côtes maritimes sur les sauniers de l’intérieur ne résulte pas de l’emploi de l’eau de mer mais uniquement, exclusivement d’autres causes que j’ai eu l’honneur de développer, et ces avantages vous ne les leur enlèverez pas.
M. le président. - M. Vilain XIIII a déposé l’amendement qu’il a développé, il est ainsi conçu : « Je propose au § 2 de l’art. 5 de substituer aux mots : « ou dans l’Escaut en-deçà de Lillo, » ceux-ci : « ou dans l’Escaut en-deçà de la frontière. »
Cet amendement a été développé, il est appuyé, il fera partie de la discussion.
M. Van Cutsem. - Messieurs , après plus de deux jours de discussion sur l’influence de l’eau de mer dans la fabrication du sel, il me sera impossible de dire quelque chose à l’assemblée dont ne lui ont pas parlé d’autres membres de cette chambre ; aussi me serais-je dispensé de prendre la parole dans les débats auxquels a donné lieu l’examen de l’art. 5 qui s’occupe spécialement de l’eau de mer, si les attaques dirigées par certain membres de cette assemblée contre la chambre de commerce de Courtrai, contre les sauniers de l’arrondissement qui m’a envoyé dans cette enceinte, ne m’en faisaient un devoir. Je commencerai par vous dire que j’ai vu avec peine le nouveau sous-amendement de M. le ministre des finances à l’article 5 du projet de loi sur le sel, parce qu’il ne fait cesser qu’en partie le privilège accordé indirectement, par la loi de 1822 , aux sauniers qui se servent de l’eau de mer dans leurs usines, tandis qu’en leur enlevant entièrement cette exemption de droits, en faisant payer à l’eau de mer un impôt proportionné à la quantité de sel qu’elle contient, on faisait justice aux sauniers de l’intérieur, on rendait hommage à la constitution qui veut que l’impôt soit réparti d’une manière égale sur tous les citoyens belges, et on faisait rentrer dans les caisses de l’Etal un argent qui y est si nécessaire pour faire face à tous les besoins de notre administration.
Les concessions que M. le ministre fait aux sauniers qui se servent de l’eau de mer dans la fabrication du sel sont donc bien grandes, et si une chose doit étonner, c’est de ne pas les voir accepter avec reconnaissance par tous les défenseurs des usines qui font usage de cette matière première ; toute la gratitude du député d’Ostende pour une mesure aussi favorable à la localité qui l’a envoyé au milieu de nous, ne lui promet qu’une chose, c’est de ne pas combattre le nouvel amendement de M. le ministre des finances, pour ne pas s’exposer à voir maintenir la première disposition de l’art. 5.
Les appréhensions de l’honorable représentant d’Ostende ne prouvent-elles pas qu’il craint qu’en se séparant de M. le ministre des finances dans la discussion de sa dernière proposition, ce dernier forcé de le combattre ferait voir à la chambre les avantages immenses que sa localité retirera de son nouveau sous-amendement et pourrait la porter ainsi à maintenir dans le projet de loi l’article 5 primitif ? La peur de voir mettre ces avantages trop en évidence et non la crainte de faire de vains efforts pour obtenir mieux, a donc seule empêché l’honorable représentant d’Ostende de combattre ce dernier amendement de M. le ministre des finances ; et pour peu qu’on ait étudié la question que nous agitons en ce moment, on est forcé de se dire que l’honorable M. Donny est satisfait du dernier amendement de M. le ministre des finances, et qu’il se dit, tout bas, que la lutte continuera, à l’avenir comme par le passé, entre les sauniers de l’intérieur et des ports de mer, au grand avantage de ces derniers et au détriment des premiers.
L’honorable représentant d’Ostende nous a dit que la chambre de commerce de Courtray avait mis de l’exagération dans les réclamations qu’elle a adressées à la représentation nationale, parce qu’elle y avait dit qu’un hectolitre d’eau de mer à 3 degrés contient trois kilog. 30 décag. de sel, tandis que le chimiste Berzelius prétend que certaine eau de mer ne contient que deux tiers de kilog. de sel, en déclarant, il est vrai, qu’il y avait de l’eau de mer qui en renfermait huit kilog. ; ne tenant aucun compte du minimum et du maximum de sel trouvé dans l’eau de mer par Berzelius, l’honorable représentant d’Ostende s’écrie : Berzelius a dit qu’il y avait de l’eau de mer qui contenait deux tiers de kilog. de sel à l’hectolitre, partant la chambre de commerce de Courtray, en disant que l’eau de mer de nos côtes contenait 3 kilog. 50 décag. de sel à l’hectolitre, a versé dans l’exagération, a été à côté de la vérité. Voila, messieurs, avec quels arguments on confond d’exagération des hommes désintéressés, qui, en vous adressant leurs réclamations n’ont pas défendu leur propre industrie, mais celle de leurs concitoyens ; voilà avec quels raisonnements on cherche à vous faire croire que la meilleure des causes est mauvaise.
L’honorable M. Donny a accusé la chambre de commerce de Courtray d’exagération, l’honorable M. Delehaye a quelque chose de plus flatteur encore à adresser aux sauniers de la même ville, il leur dit : qu’ils ne connaissent pas leur métier ; et pourquoi fait-il contre eux une imputation aussi grave ? Parce qu’ils prétendent que la fabrication de 100 kilogrammes de leur sel leur coûtent 3 fr. 50, et que des sauniers d’autres localités lui ont assuré que la fabrication de leur sel ne leur revenait qu’à 2 francs. Pour pouvoir dire aux sauniers de Courtrai, avec quelque fondement, qu’ils sont des ignorants, il faudrait d’abord admettre comme constant que la fabrication qu’ils font à raison de 3 francs 50 est bien la même que celle que font à deux francs les sauniers dont parle M. Delehaye ; il faudrait encore admettre comme démontré, que les habiles sauniers dont parle M. Delehaye lui aient dit l’exacte vérité, en portant le chiffre de revient de leur fabrication de 1 à 2 francs ; il faudrait encore que M. Delehaye établît d’une manière détaillée le prix de revient de cette fabrication à bon marché. En attendant que tout cela soit prouvé par lui, l’honorable M. Delehaye me permettra de croire que les sauniers de Courtrai connaissent leur état, libre à lui d’ajouter foi aux déclarations des sauniers avec lesquels il s’est abouché et d’avoir en son particulier telle opinion qu’il voudra de personnes qu’il ne connaît pas assez pour les juger aussi mal qu’il l’a fait.
La chambre de commerce de Courtrai, a dit toujours le même représentant, a tort quand elle attribue la ruine de ses sauneries à l’emploi sans impôt de l’eau de mer dans les localités où on s’en sert ; ce qui le prouve, c’est que plusieurs de nos salines chôment à Ostende comme à Courtrai. Vous avez, je ne le conteste pas, vu depuis quelques années aussi diminuer le nombre de vos sauniers, mais la cause du chômage de vos usines est connue, elles n’ont cessé de travailler que parce que vous avez perdu votre commerce d’exportation de sel ; les nôtres, au contraire, n’ont cessé de travailler, alors que dans notre ville et dans ses environs la quantité de sel qu’on y consomme va toujours croissant avec l’augmentation de la population ; que parce que vous nous faites une concurrence désastreuse avec votre eau de mer libre d’impôt ; s’il y avait une autre cause à donner à la stagnation de nos usines, veuillez l’indiquer ; quant à moi, je vous confesserai que je n’en connais pas.
Quand la chambre de commerce de Courtrai a dit que l’eau de mer à trois degrés, prise sur les côtes de la Belgique, contenait trois kilog. 50 décagram. de sel, elle a invoqué l’autorité du célèbre chimiste belge Van Mons, qui s’est explique d’une manière formelle sur la quantité de sel que contient la mer qui baigne nos côtes et non pas sur l’autorité d’un chimiste qui, avec tout le talent qu’on lui donne, n’a peut-être jamais fait l’analyse de l’eau de mer employée dans nos salines. Qui est digne de foi ? l’honorable député d’Ostende avec son auteur étranger, ou la chambre de commerce de Courtrai qui s’appuie sur l’illustre chimiste Van Mons.
L’honorable député d’Ostende ne se borne pas à taxer la chambre de commerce de Courtrai d’exagération. il dit encore que l’eau de mer prise à Ostende, dans une place qu’il indique, n’a pas un degré de saumure, et il en tire la conséquence que toute l’eau de mer dont on se sert dans ce port ne renferme que cette quantité de sel ; comme s’il n’était pas loisible aux sauniers de la prendre ailleurs qu’à la place où l’eau de mer contient le moins de sel à Ostende.
La chambre de commerce de Courtrai, dit toujours le même représentant, a tort quand elle attribue la ruine de ses sauneries à l’emploi sans impôt de l’eau de mer dans les localités où on s’en sert ; ce qui le prouve, c’est que plusieurs de nos salines chôment à Ostende comme à Courtrai. Vous avez, je ne le conteste pas, vu depuis quelques années aussi diminuer le nombre de vos sauniers, mais la cause du chômage de vos usines est connue, elles n’ont cessé de travailler que parce que vous avez perdu votre commerce d’exportation de sel ; les nôtres, au contraire, n’ont cessé de travailler, alors que dans notre ville et dans ses environs la quantité de sel qu’on y consomme va toujours croissant avec l’augmentation de la population ; que parce que vous nous faites une concurrence désastreuse avec votre eau de mer libre d’impôt ; s’il y avait une autre cause à donner à la stagnation de nos usines, veuillez l’indiquer ; quant à moi, je vous confesserai que je n’en connais pas.
L’eau de mer à trois degrés employée sans droits, comme le demande l’honorable M. Osy dans l’amendement qu’il a soumis hier à votre examen, serait une concession, pour ceux qui s’en servent, de 10 p. c. ; s’ils ne peuvent plus en jouir avec la même faveur, que lorsqu’elle aura un peu moins d’un degré, l’avantage qu’ils ont aujourd’hui sera réduit de deux tiers ; cet avantage, qui est déjà bien grand par lui-même, le devient encore plus, parce que cette exemption d’impôts n’est pas seulement imputable sur la valeur intrinsèque du sel brut, qui n’est que de 3 et 1/2 centimes par kilogramme, mais encore sur un impôt qui dépasse 5 et 1/2 fois cette même valeur intrinsèque, puisqu’il est de 18 centimes par kilogramme, ce qui rendra encore bien difficile toute concurrence entre les sauniers des côtes et ceux de l’intérieur.
Ce premier bénéfice, le saunier qui se sert de l’eau de mer l’augmente encore en donnant plus de densité à son eau de mer, en été, par le soleil ; en hiver, par la congélation ; en toute saison, par le feu, et en fournissant à la consommation un sel cristallisé.
Le distillateur ne peut employer le lavage des raffineries de sucre parce qu’il contient un peu d’alcool ; la loi sur ces distilleries défend, pour le même motif, l’existence d’une brasserie et d’une distillerie dans le même local ; pourquoi permettrait-on au saunier d’employer l’eau de mer sans droit, quand cette eau contient beaucoup plus de sel que le lavage des raffineries ou des brasseries ne renferme d’alcool.
L’excessive et injuste faveur accordé par la loi aux sauniers de nos côtes de se servir des eaux marines, a déjà produit de déplorables résultats ; les sauniers de Bruges, Gand et Ostende envahissent nos villes et nos campagnes ; ils vendent leur sel cristallisé à raison d’un prix équivalant à peu près à celui de revient des sauniers de l’intérieur.
Pour balancer ces avantages, on dit que les sauniers de l’intérieur ont le combustible à plus bas prix ; si les sauniers de certaines villes de l’intérieur peuvent acheter le combustible à plus bas prix que celui auquel peuvent se le procurer ceux de ports de mer, ce léger avantage est compensé par les frais de transport du sel des ports de mer à l’intérieur et par le déchet que ce transport fait éprouver au sel ; si l’avantage d’avoir le combustible à la main était si grand, la saline établie, il y a peu de temps, à Warcoing, près des lieux d’extraction du charbon, n’aurait-elle pas dû faire de brillantes affaires ?
Elle n’a cependant pas pu continuer à soutenir la lutte contre les salines des ports de mer, elle chôme en attendant que l’eau de mer soit imposée. Ostende et Bruges, pour obtenir l’exemption d’impôt pour l’eau de mer, font valoir le haut prix du combustible dans ces villes ; mais ce prix est moins élevé qu’a Courtrai, puisqu’il est constant que les bateliers aux houillères prennent charge pour Bruges et Ostende à 10 centimes de moins par hectolitre que pour Courtrai.
L’eau de mer procure un bénéfice insignifiant, disent les défenseurs des sauniers de Bruges et d’Ostende ; si cela était vrai, enverraient-ils des navires à grands frais pour les en approvisionner ? Si l’eau de mer ne donnait pas des avantages immenses aux sauniers de Lierre, auraient-ils, comme nous l’a dit l’honorable M. Mast de Vries, onze barques uniquement occupées à fournir leurs usines d’eau de mer à 20 centimes l’hectolitre ? Vous ne le croirez pas plus que moi. L’eau de mer doit être imposée ; elle doit l’être, parce qu’il résulte des renseignements recueillis par l’honorable ministre de finances, que l’eau de mer et l’abus des exemption et des déductions accordées par la législation actuelle fournissent, à peu de chose près, les seules quantités de sel livrées à la consommation sans acquittement de l’accise ; en effet, ces sauniers éludent les dispositions de la loi de 1822, qui impose l’eau de mer soumise à l’évaporation dans des ateliers à ce destinés ; ils lui font subir cette évaporation dans leurs chaudières et obtiennent ainsi à peu de frais de fortes quantités de sel raffine soustraites à l’impôt.
Le droit qu’une grande partie des localités de l’intérieur réclame sur l’eau de mer, avait déjà reçu en mars 1843 l’approbation de la section centrale, qui l’imposait, comme M. le ministre des finances le faisait avant son dernier amendement, à 20 centimes par hectolitre.
L’impôt que M. le ministre des finances nous propose sur l’eau de mer, s’il ne rend pas pleine justice aux sauniers de l’intérieur, s’il ne fait pas rentrer dans les caisses de l’Etat toutes les sommes que les sauniers des ports devraient y verser, opérera cependant, je l’espère, quelque bien, et c’est pour ce motif que je l’accepte en attendant
M. le président. - M. Zoude est inscrit avant M. Devaux ; mais je suppose que l’intention de la chambre est que je donne alternativement la parole à un orateur pour et à un orateur contre. (Adhésion.)
La parole est à M. Devaux.
(Moniteur belge n°357, du 23 décembre 1843) M. Devaux. - Les industriels qui emploient l’eau de mer jouent vraiment de malheur. Il y a quelques mois que le gouvernement présenta un projet de loi qui les satisfaisait complètement ; il plaida leur cause dans la section centrale, avec beaucoup de zèle. Une réunion de sauniers eut lieu à Malines, et, autant que ma mémoire me le rappelle, l’emploi de l’eau de mer, sans taxe, n’excita aucune réclamation. Les voilà donc en grande sécurité. Le gouvernement était pour eux. Tous leurs concurrents étaient pour eux. Par malheur, le ministère change, voilà le gouvernement contre eux et la chance tournée. Voyez à quoi tient la fortune d’une industrie. Si le sort, ou toute autre circonstance, avait prolongé de quelques mois la fortune ministérielle de M. Smits il est probable que les sauniers dont je parle pourraient encore maintenant dormir en pleine sécurité.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Je demande la parole.
M. Devaux. - Aujourd’hui, le gouvernement adoptant les vues de la section centrale, veut taxer l’eau de mer. Quel a été le motif de la section ? C’est que les sauniers qui emploient l’eau de mer font aux autres sauniers une concurrence ruineuse et trop facile ? Examinons donc quelle est cette concurrence.
Dans tout ce que j’ai à dire dans cette discussion, je n’aurai qu’une seule chose à faire, c’est de faire justice des exagérations qui ont été émises tant en faveur des sauniers qui n’emploient pas l’eau de mer, qu’en faveur du fisc.
Et d’abord pour ce qui regarde la concurrence, restreignons-la aux limites dans lesquelles elle est circonscrite. En fait de sel raffiné, il ne peut s’agir d’une concurrence de province à province. Le transport du sel raffiné est trop difficile ; il prend beaucoup plus de place, il coûte beaucoup plus de transport que le sel brut. Il n’est pas possible de le transporter à une grande distance. La concurrence n’est donc pas entre provinces, mais entre districts qui se touchent, concurrence toute naturelle d’ailleurs.
Il est tout naturel que les sauniers de Bruges rencontrent, à la limite du rayon très peu étendu où ils placent leurs produits, la concurrence des sauniers de Courtray. Il est naturel aussi que les sauniers de Courtray désirent que ceux de Bruges et d’Ostende ne leur fassent pas concurrence, que la loi force ceux-ci à produire à des conditions plus onéreuses, à abandonner l’emploi de l’eau de mer, ne fût-ce que pour jeter la perturbation parmi eux et leur imposer le sacrifice des capitaux qu’ils ont consacrés à ce mode de fabrication.
Les sauniers qui emploient l’eau de mer soutiennent que l’avantage qu’ils en retirent ne consiste pas à augmenter la quantité de sel que produit le raffinage, mais à rendre la cristallisation plus énergique et le sel plus blanc.
Leurs adversaires prétendent, au contraire, que l’eau de mer augmente considérablement la quantité de sel que produit le raffinage. Suivant eux, l’eau de mer contient une grande quantité de sel, quantité qui, pour celle qu’on puise dans la mer même, s’élève, suivant eux, à 3, 4 ou 5 kilog. par hectolitre. Ainsi, la mer est réellement une espèce de mine de sel.
Un seul fait détruit ces assertions. S’il était vrai que l’eau de me présente de tels avantages, n’irait-on pas puiser celle qui en présente le plus ? L’eau la plus dense, celle qui contient le plus de sel, est celle qu’on puise dans la mer même. Qu’arrive-t-il, au contraire ? Que les sauniers d’Ostende, qui ont l’eau de mer à leur porte, au lieu de la prendre à la mer, là où elle est le plus dense, la prennent à l’intérieur, là où elle est mêlée à l’eau douce. Voyez comme ils comprennent leurs intérêts !
Pour ceux de Bruges, c’est bien pis. Eux qui ont des bateaux, qui pourraient aller à la mer, prendre l’eau ; c’est en deçà de l’Ecluse. Ils arrivent tout près de la mer, et ils s’arrêtent pour prendre l’eau qui contient le moins de sel, ils la puisent dans le chenal, là où il n’y a plus qu’un mélange d’eau douce et d’eau de mer. Croyez-vous, s’il y avait un si grand avantage à prendre l’eau en mer, qu’ils n’iraient pas jusque-là ?
Il y a un si grand avantage, dit-on, à l’emploi de l’eau de mer, et à Anvers, à Bruges, à Gand, les uns se servent de l’eau de mer, les autres ne s’en servent pas. Car ceux qui n’emploient pas l’eau de mer soutiennent, dans la même localité, la concurrence avec ceux qui en font usage. Où donc est l’avantage ? Evidemment, il y a là une extrême exagération.
Je vois que l’une des pétitions que l’on a citées pour obtenir l’imposition de l’eau de mer émane de la chambre de commerce d’Ypres. En voyant cette pétition, je me suis demandé si la ville d’Ypres est dans le Luxembourg, si elle n’a pas accès à la mer. Mais Ypres est en communication directe avec la mer par un canal ; Ypres peut prendre l’eau de mer à Nieuport, s’il y a un peu plus loin de la mer que de Bruges, il y a moins loin que pour les sauniers de Gand, qui se servent d’eau de mer. S’il y avait un si grand avantage à l’usage de cette eau, les sauniers d’Ypres, au lieu de faire des pétitions à la chambre, feraient venir de l’eau du chenal de Nieuport et adopteraient le mode de fabrication de leurs confrères de Bruges et d’Ostende.
On avait d’abord avancé que c’était Ostende qui écrasait toute concurrence, que les sauniers d’Ostende abattaient autour d’eux tous leurs rivaux. Il suffit à l’honorable M. Donny de citer un seul fait pour réduire cette exagération à sa juste valeur. Le nombre des sauneries d’Ostende, loin de s’accroître, est considérablement diminué. Les sauneries dont on veut se défaire ne se vendent pas. L’honorable M. Rodenbach s’est écrié : Ce n’est pas Ostende, c’est Bruges qui tue les autres sauneries. Malheureusement pour Bruges et pour l’argument, Bruges est dans la même situation qu’Ostende. Il y avait 8 sauniers à Bruges ; il n’y en a plus que 5. Quand on veut s’en défaire, on n’y parvient pas. Il y a peu de temps encore, il en a une qui a cessé son commerce, faute de trouver des acquéreurs qui voulussent le continuer.
Savez-vous quelle est cette immense production de sel raffiné à Bruges, dont on se plaint à Courtray, à Ypres ? Il est de la faible quantité de 750,000 à 800,000 kilog. par an. Or, vous savez qu’en Belgique on consomme 6 kilog. de sel par individu. D’après l’honorable rapporteur de la section centrale, on consomme beaucoup plus. Mais je ne veux supposer qu’une consommation de 6 kilogrammes. Le seul district administratif de Bruges, qui n’a qu’un rayon de 3 ou 4 lieues, qui ne comprend, outre Bruges, que les campagnes les plus voisines de la ville et une seule ville, Thourout ; ce district, dis-je, a une population de 160,000 habitants, officiellement, mais qui, en réalité s’élève, dit-on, à 200,000 habitants. Sa consommation, qui appartient naturellement aux sauniers de Bruges, serait donc, à 6 kilog. par tête, de 900,000 à 1,200,000 kilog. Eh bien, les sauneries de Bruges ne produisent que 750,000 à 800,000 kilog. Evidemment donc, bien loin que les sauniers de Bruges empiètent considérablement sur le rayon de Courtray, ils ne fournissent pas même à toute la consommation qui se fait aux portes de la ville, à celle du district administratif qui n’a qu’un rayon de 3 ou 4 lieues ; la population du district consomme un tiers ou deux tiers de sel de plus que n’en produisent les sauneries de Bruges.
L’honorable M. Rodenbach dit : mais il y a des sauneries qui tombent dans nos communes, et il attribue leur chute à l’eau de mer. Mais à ce compte, elles seraient tombées depuis longtemps, car on se sert d’eau de mer de temps immémorial. Elles ne se seraient jamais élevées, si l’eau de mer était la cause de leur chute. On m’a expliqué la cause de l’érection de ces sauneries. On m’a dit qu’au temps de l’empire, alors que le sel brut ne pouvait arriver par mer, et qu’il arrivait à grands frais par terre, il s’était élevé le long de la route de France des sauneries qui avaient l’avantage sur celles de Bruges, d’être moins éloignées. Cet avantage, elles l’ont naturellement perdu depuis que la navigation est ouverte. Mais la disparition de cet avantage ne résulte pas de l’emploi de l’eau de mer.
M. le ministre des finances, dans la dernière séance, a traité d’absurde la manière de faire des sauniers qui emploient de l’eau de mer
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Ce ne sont pas les sauniers, mais la loi que j’ai qualifiée ainsi.
M. Devaux. - Soit. Je n’aime pas à me servir de cette expression. Mais puisqu’on l’a employée, je demande si elle ne serait pas bien autrement absurde, la législation qui proclamant qu’il y a une grande quantité de sel dans l’eau de mer, que nous avons une mine de sel à nos portes où il est possible à chacun de puiser, en prohibe l’entrée et l’usage, afin qu’on soit oblige de payer le sel brut à l’étranger, d’aller le chercher en Angleterre ? S’il est vrai que l’emploi de l’eau de mer présente tant d’avantages, la loi qui en prohiberait l’entrée ne serait-elle pas déraisonnable ?
Outre l’imposition injuste en elle-même, ce qu’on vous propose est une source de vexations. On l’a déjà senti, déjà, dans cette séance, M. le ministre des finances en a été frappé. Il a été obligé de modifier une partie des mesures d’exécution de son projet. Mais ce qu’il en reste donnera encore lieu aux mesures les plus vexatoires, et cela pour un résultat à peu près nul quant au fisc.
Il faudra donc vérifier si l’eau contient 2 degrés ou un degré ; or comme, ainsi qu’on vous le disait l’autre jour, la densité de l’eau peut changer suivant les saisons, les lunaisons et mille autres circonstances, il faudra à chaque instant repeser pour savoir si l’eau est exempte de droit, si elle doit payer dix centimes, si elle doit payer 20 centimes, ou si elle n’a rien à payer du tout. Il y a plus, dans le même bateau tel tonneau donnera une densité, et tel autre tonneau donnera une autre densité, parce que, suivant que l’eau est puisée à une plus ou moins grande profondeur, elle sera plus ou moins dense. Ainsi, pour avoir une vérification exacte, il faudra vérifier hectolitre par hectolitre. Cela est singulièrement vexatoire, il faut en convenir.
L’amendement proposé par M. le ministre des finances fait monter le droit jusqu’à 20 centimes par hectolitre. Or, il a été dit dans cette discussion, qu’il faut 3 hectolitres d’eau de mer, pour produire avec le sel brut, cent kilog. de sel. La valeur de 100 kilog. de sel, si je fais abstraction des droits d’accise, est d’environ 6 francs.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Non ; elle est moindre.
M. Devaux. - Je parle du sel raffiné. En imposant les 3 hectolitres à raison de 20 centimes, cela fera 60 centimes sur une valeur de 6 francs, c’est-à-dire 10 p. c. ; je ne crains pas de dire que si les sauneries qui existent aujourd’hui à Ostende et à Bruges pouvaient se passer d’un tel bénéfice, d’un bénéfice de 10 p. c., leur prospérité dans ce moment serait telle qu’évidemment elles se multiplieraient, au lieu de décroître en nombre, évidemment elles seraient en très grande activité et non dans l’état où elles se trouvent.
On me fait observer que le prix du sel raffiné n’est pas de 6 francs. J’ai dit : abstraction faite de la valeur de l’accise ; je prends ce prix précisément dans les documents qui nous ont été fournis. Il y est dit que les sauniers vendaient le sel de 24 à 25 centimes par kilog. Si l’on déduit l’accise, qui est de 18 centimes, il reste 6 à 7 centimes par kil., et, par conséquent, 6 à 7 francs par 100 kilog.
Messieurs, il ne faut pas se tromper sur l’industrie du raffinage du sel. Ce n’est pas une grande industrie, ce n’est pas une riche industrie. L’industrie du raffinage du sel opère d’abord en général, comme je viens de vous le prouver, dans un rayon très peu étendu ; elle opère sur une matière première de peu de valeur ; elle opère, par conséquent, avec de petits capitaux et elle fait de très petits bénéfices.
Je viens de vous dire tout à l’heure que la production du raffinage du sel à Bruges était évaluée entre 700 ou 800 mille kilog. par an. Si vous déduises ce qui revient au gouvernement en droits d’accises, cela fait une valeur de 50,000 francs par an ; cette valeur répartie entre 5 sauneries, donne 10,000 fr. par an pour chaque saunerie. Songez quel peut être le bénéfice. Et c’est cependant sur ce bénéfice qu’on veut les imposer à raison d’à peu près 1,000 fr. chacune.
Vous concevez, messieurs, que quand une industrie est aussi modeste, quand elle a besoin de se contenter d’aussi petits bénéfices, le moindre choc la renverse ; et vous comprenez aussi très bien pourquoi il se fait que des sauneries périssent à chaque instant dans les localités où elles sont réputées les plus prospères.
Mais, dit-on, si l’avantage d’employer l’eau de mer est si peu de chose, pourquoi y tient-on tant ? Messieurs, on y tient tant, encore une fois, parce que cette industrie n’est pas une industrie riche, que le raffinage à l’eau de mer est une fabrication qu’on connaît depuis longtemps, qu’on a fait des sacrifices pour l’établir, que l’on a construit des réservoirs à grands frais, que l’on a acheté des bateaux, et que si l’on vient à perdre ces capitaux, on perd une grande partie de la valeur de son usine.
M. le ministre des finances a dit hier formellement que ce qu’il voulait, c’était restreindre l’emploi de l’eau de mer. Cet aveu, messieurs, prouve que la loi amènera une perturbation chez ces industriels. Car il est impossible de restreindre l’usage de l’eau de mer sans interdire à ces industriels l’emploi de cette eau, sans, par conséquent, leur imposer le sacrifice des capitaux qu’ils ont consacrés à établir leur fabrique et leur mode de fabrication.
Et pourquoi veut-on amener cette perturbation ? Dans un intérêt réellement nul pour le fisc. Car c’est pour le fisc que M. le ministre des finances a parlé dans la séance d’hier ; ce n’est plus la concurrence qu’il a alléguée.
Messieurs, je dis que pour le fisc le résultat est nul, il est tellement peu de chose que, si j’en fais le calcul, vous verrez que cela se réduit à presque rien.
Je vous disais tout à l’heure qu’on évalue la production de Bruges à 70,000 kilog. ; celle d’Ostende a à peu près la même importance. Mettons un million et demi de kilogrammes pour Ostende et Bruges. Je vais faire, je crois, une concession bien large ; je suppose que dans le reste du pays, on fabrique, au moyen de l’eau de mer, deux fois autant de sel qu’à Bruges et Ostende, c’est-à-dire 3,000,000 de kil. Cela fera pour tout le pays 4 millions et demi de kilogrammes.
Quel produit cela donnera-t-il au fisc ? Il faut, dit-on, trois hectolitres d’eau de mer pour produire cent kilog. de sel ; ainsi, d’après ce calcul, pour produire 4 millions de kilog., il faudra 435,000 hectolitres d’eau de mer. D’après l’échelle que propose M. le ministre des finances, l’eau de mer ne payera rien au-dessous d’un degré, elle payera 10 centimes de 1 à 2 degrés, et 20 centimes de 2 à 3 degrés. La moyenne ainsi serait 10 centimes, mais prenons 15 centimes pour la moyenne du droit. Ce serait donc 15 centimes sur 135,000 hectolitres, c’est-à-dire 20,000 fr. Voilà le produit probable de toute l’imposition sur l’eau de mer. Est ce 20,000 fr. net ? Oh non ! vous aurez vos frais de surveillance, et, notez-le, il faudra très bien surveiller ; car il faudra peser et repeser sans cesse ; il faudra à chaque marée voir si la densité de l’eau n’a pas varié. Ce sera un excellent moyen pour absorber vos employés, quand on voudra les distraire de quelque fraude plus importante. On introduira peut-être de l’eau-de-vie d’un côté, pendant que les employés s’amuseront à préempter de l’eau claire. (On rit.)
En vérité, messieurs, ce qui restera au fisc vaudra à peine ce que nous avons dépensé en frais de discussion et d’impressions, pour les pétitions, les rapports et les discours relatifs à l’eau de mer.
Je vous le demande, est-ce la peine de bouleverser d’anciennes et modestes industries, qui vivent réellement bien inoffensives dans le petit rayon qu’elles exploitent, et qui ne vivent, il faut le dire, qu’à force d’ordre et d’économie ? Est-ce la peine d’être vexatoire dans le mode de perception, et de se montrer plus fiscal que ne l’a été le gouvernement hollandais et aucun de ses prédécesseurs ?
Messieurs, je voterai pour l’amendement de l’honorable M. Osy, le seul qui me paraisse juste. Si la chambre ne l’adoptait pas, au moins subsidiairement, je demande que les sauniers ne soient pas exposés aux mesures vexatoires qui résulteraient de l’échelle proposée par M. le ministre des finances, et qu’on les impose à raison d’un droit fixe de dix centimes par hectolitre. Je vais rédiger cet amendement.
(Moniteur belge n°356, du 22 décembre 1843) M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs je me hâte de dire qu’il n’est pas exact que les seuls motifs pour le gouvernement de se rallier aux propositions de la section centrale soient l’intérêt du trésor. Le gouvernement a pensé qu’il devait avoir égard aux justes réclamations d’un très grand nombre de sauniers, de tous les sauniers de l’intérieur qui se plaignent, avec raison selon moi, que leurs concurrents, qui se trouvent sur le littoral de la mer, à proximité des rives de l’Escaut, jouissent d’un véritable privilège à leurs dépens et au préjudice du trésor public.
Messieurs, dans la séance d’hier, des honorables membres ont prétendu que les sauniers qui faisaient usage de l’eau de mer, n’y trouvaient aucun avantage, ou du moins que ce n’était pas à cause du sel qu’ils tiraient de l’eau de mer qu’ils employaient cette eau. Aujourd’hui cependant on convient que cette eau renferme une certaine quantité de sel et que cette quantité vient s’ajouter aux produits obtenus par le raffinage. Du reste, il serait difficile de soutenir qu’il n’y a pas de sel dans l’eau de mer ; ce serait réellement nier l’évidence. Ainsi, il ne s’agit plus aujourd’hui de nier qu’il y ait du sel dans l’eau de mer, mais on conteste la quantité qui en est obtenue. Des expériences faites par des agents de l’administration ont constaté que l’eau de mer à 3 degrés, donnant près de 3 kil. de sel par hectolitre. J’ai entendu l’honorable M. Donny nous donner des résultats moins élevés. D’après Berzelius, dit cet honorable membre, ce serait seulement environ 2 kil. et un tiers. Eh bien ! en admettant qu’il eu soit ainsi, l’impôt qui devrait frapper l’hectolitre d’eau de mer ayant à peu près 3 degrés de densité, devrait être de plus de 40 centimes.
Or, messieurs, pour cette eau de mer qui a 2 à 3 degrés, le gouvernement ne propose qu’un droit de 20 centimes ; cette proposition est extrêmement modérée, il faut l’avouer. On vient maintenant proposer un droit uniforme de 10 centimes ; eh bien, messieurs, si vous voulez un droit uniforme, c’est le chiffre de 20 centimes qu’il faut adopter, car un droit uniforme de 20 centimes est encore bien au-dessous de celui qui devrait frapper l’eau de mer alors même qu’elle n’a que 2 degrés.
Je maintiens ma proposition qui tempère celle de la section centrale, bien que celle-ci soit encore au-dessous de ce qui devrait être admis, si l’on voulait imposer l’eau de mer en raison du sel qu’elle contient.
Il faut bien, messieurs, que les avantages de l’emploi de l’eau de mer soient considérables, puisque l’on consent à faire d’aussi grands frais pour se la procurer. Je ne parle pas ici des sauniers d’Ostende, mais de ceux de Boom, de Tamise et d’autres localités , qui vont chercher l’eau de mer bien au-delà de Lillo, et qui font pour l’obtenir des frais tels, qu’elle leur coûte 16 fr. 66 c. les cent hectolitres. C’est en effet ce qui résulte des calculs que j’ai établis, sur les données de l’honorable M. Mast de Vries. Ceci répond, messieurs, à une observation d’un honorable préopinant qui a dit qu’il y aurait absurdité à empêcher les sauniers de puiser un produit naturel qu’ils ont à leur porte ; je prétends qu’il serait bien plus absurde, qu’il serait contraire aux plus simples notions de l’économie politique d’encourager des industriels à dépenser 16 fr. 66 c. pour se procurer 100 kilog. de sel, qu’ils peuvent obtenir au prix ordinaire de 4 fr.
On craint, dit-on, les vexations. Mais, messieurs, à chaque loi d’impôt j’entends faire la même objection. Sans doute, il serait à désirer qu’il n’y eût aucun impôt de consommation ; alors toute vexation serait impossible et l’on ne paierait rien. Le système de surveillance que l’on appelle quelquefois vexatoire, est inhérent à tous les impôts de consommation, mais il faut aussi avoir quelque confiance dans l’administration, et je ne crois pas qu’on puisse lui reprocher d’être vexatoire (Interruption). J’entends un honorable membre qui semble ne pas approuver ces paroles. Eh bien, je le déclare, jamais une vexation n’est dénoncée à l’administration supérieure, sans être sévèrement réprimée.
Un honorable orateur, l’honorable M. de Foere, est véritablement venu à mon aide dans cette discussion. Accordez, nous a-t-on dit, l’exemption au sel que l’on retire de l’eau de mer, vous donnerez par là à ceux qui en font usage une compensation des frais qu’ils sont obligés de faire pour se procurer le combustible que leurs concurrents de l’intérieur se procurent à des conditions moins onéreuses… Eh bien, messieurs, l’honorable M. de Foere a prouvé que déjà, sans cette exemption, les sauniers qui habitent le littoral de la mer ou les rives de l’Escaut jouissent d’avantages bien plus grands que ceux de l’intérieur du pays.
Il a énuméré ces avantages, qui sont de trois ou quatre espèces ; d’abord, a-t-il dit, le sel est conduit devant la porte de leurs magasins ; ils ont donc bien moins de frais à supporter que les sauniers de l’intérieur. Ensuite, ces derniers doivent acheter le sel dans les ports de mer ; ils doivent payer la commission, les profits du négociant, et ils sont par conséquent, sous ce rapport encore, dans une position bien plus défavorable que ceux du littoral. En troisième lieu, les sauniers de l’intérieur ont à supporter de nombreux frais de pesées, de chargement, de déchargement, etc.
Enfin l’honorable membre a cité une quantité d’avantages dont sont en possession les sauniers du littoral à l’exclusion de ceux de l’intérieur, et c’est à ces avantages qu’il attribue la facilité qu’ils ont de fournir le sel à un prix moindre que celui auquel leurs concurrents de l’intérieur du pays peuvent le livrer.
D’après l’honorable membre qui vient de parler, la concurrence entre les différentes salines peut bien exister de localité à localité, mais non de province à province, c’est encore là, messieurs, une erreur ; la concurrence s’exerce avec succès de province à province et de nombreuses réclamations ont été adressées par les sauniers de l’intérieur qui affirment que leur prix de revient est supérieur au prix auquel les sauniers du littoral vendent leurs produits. Ainsi, le sel venant des bords de l’Escaut de Tamise, par exemple, se vend à Louvain à un prix moins élevé que celui auquel les sauniers de Louvain peuvent le livrer sur les lieux.
On nous objecte que l’impôt proposé ne donnera pas au trésor un produit considérable. Cela est vrai, messieurs, mais l’administration aura par là un moyen de surveillance qui lui manque aujourd’hui. D’un autre côté, ceux qui sont éloignés des lieux où l’on puise l’eau de mer, ne se serviront plus de cette eau, et dès lors ils acquitteront l’intégralité de l’accise sur une quantité de sel équivalente à celle qu’ils obtiennent aujourd’hui à grands frais de l’eau de mer.
Si tous les sauniers employaient l’eau de mer, et que cette eau eût effectivement trois degrés, l’Etat perdrait de ce chef 3 à 400,000 fr. Le trésor ne fait pas une perte aussi considérable, pourquoi ? parce qu’il y a privilège pour les uns à l’exclusion des autres, parce que l’eau de mer est à la portée des uns et qu’elle n’est pas accessible aux autres sans perte ; ce n’est qu’à la faveur de l’exemption du droit que certains sauniers peuvent en faire usage ; c’est là qu’est le privilégié qu’il importe de faire cesser ; c’est là qu’est l’avantage pour les uns et le préjudice pour les autres. Or, la loi qui consacre une pareille irrégularité est, je le répète, contraire à tous les principes d’une saine économie et d’une sage administration.
M. le président donne lecture de l’amendement suivant qui a été déposé par M. Devaux :
« Dans le cas où l’amendement de M. Osy serait rejeté, je propose de réduire le droit à 10 cent. par hectolitre. »
- La clôture est demandée.
M. de Villegas. - Je m’oppose formellement à la clôture. Depuis longtemps j’avais demandé la parole pour repousser le reproche d’exagération que deux orateurs de la Flandre occidentale ont lancé contre une pétition fort intéressante, dont la lecture a été autorisée hier et qui est venue fort à propos dans la discussion. Je tenais à prouver que l’opinion des pétitionnaires est consciencieuse et qu’ils n’ont en aucune façon mérité le reproche qu’on leur a fait !
M. Zoude, rapporteur. - Je désirerais répondre à plusieurs observations qui ont été faites ; il me semble que la chambre doit d’autant plus m’entendre que j’ai cédé mon tour de parole à d’autres membres.
- La clôture est mise aux voix et prononcée.
La chambre décide qu’elle votera d’abord sur l’amendement de M. Osy ; cet amendement, destiné à remplacer l’article, est ainsi conçu :
« § 1er. Les raffineurs pourront employer l’eau de mer sans être assujettis, de ce chef, à l’impôt, si elle marque moins de 3 degrés à l’aréomètre de Baumé, pourvu qu’elle ait été puisée dans le chenal des ports d’Ostende ou de Nieuport, ou dans l’Escaut, en-deçà de Lillo.
« § 2. Aucun établissement pour l’évaporation de l’eau de mer ne pourra être érigé. »
Des membres. - L’appel nominal !
On procède à l’appel nominal.
- Avant que le bureau proclame le résultat de l’appel nominal, M. d’Hoffschmidt qui, à l’appel de son nom, a répondu oui, demande la parole, et s’exprime en ces termes - Messieurs, j’étais à donner un renseignement à un honorable membre de cette chambre, pendant qu’on faisait l’appel nominal, et il en est résulté que je me suis trompé dans mon vote. Au lieu de dire non, comme c’était bien mon intention, j’ai dit oui. Comme on ne vote pas par surprise, je suppose que la chambre accueillera cette rectification.
M. de Theux. - Messieurs, l’honorable M. d’Hoffschmidt vient de déclarer que c’est par erreur qu’il a dit oui, que son intention était de dire non. Je ne sais si le bureau peut changer le résultat du vote. Je crois qu’il importe d’appeler l’attention de la chambre sur ce point. Si un membre de la chambre, à l’appel de son nom, dit par erreur oui ou non, je conçois qu’à l’instant même il puisse réclamer ; mais quand le scrutin est fermé, je pense qu’on ne peut plus se prévaloir de l’erreur qu’on a commise. Aujourd’hui, la rectification serait sans conséquence, mais dans d’autres circonstances, ce précédent pourrait avoir des conséquences graves.
M. le président. - Comme le fait ne doit actuellement exercer aucune influence sur le résultat du vote, je crois qu’il est désirable que la chambre tranche aujourd’hui la question ; la décision qu’elle prendra fera précédent pour l’avenir. L’honorable M. d’Hoffschmidt ayant attendu que l’appel nominal fût terminé pour déclarer qu’il s’était trompé, c’est à l’assemblée de décider si le bureau doit tenir compte de cette déclaration.
De toutes parts. - Non ! Non ! Le vote est acquis à la chambre.
M. de Brouckere. - Messieurs, je partage l’opinion de l’honorable M. de Theux : quand un membre a émis son vote, ce vote est acquis à la chambre ; le membre ne peut plus se rétracter. Vous comprenez quelles seraient les conséquences de l’opinion contraire. C’est que l’un des membres qui se serait prononcé l’un des premiers, pourrait, à la fin du vote, en cas de partage, ou dans le cas où la majorité ne serait que d’une voix, venir changer une décision qui serait acquise à l’opinion en faveur de laquelle il se serait prononcé.
Cela est de toute impossibilité. Quand un membre a dit oui ou non, s’il ne se rétracte pas immédiatement, s’il attend, pour réclamer que l’appel nominal soit terminé, son vote est acquis à la chambre, et il ne lui appartient plus de se rétracter. On n’est pas admis à s’excuser, en disant que l’on s’est trompé ; cette excuse ne peut pas être accueillie par la chambre. Il faut que les membres de la chambre fassent attention et qu’ils écoutent, lorsque la question est posée ; et s’il y a doute chez eux, il faut qu’ils demandent à l’instant même qu’on lève ce doute.
M. d’Hoffschmidt. - Je ne crois pas que la chambre veuille se livrer à une longue discussion à l’occasion de l’observation présentée par l’honorable M. de Theux. On est généralement d’accord là-dessus, et je pense que, comme la chambre avait déjà manifesté son assentiment, le discours que vient de prononcer l’honorable M. de Brouckere était assez inutile. Quant à moi, j’ai désiré faire connaître quelle avait été mon intention, et je n’ai pas eu dessein d’exercer de l’influence sur le résultat du vote (non ! non ! Nous en sommes persuadés), mon vote n’ayant aucune valeur cet égard, puisqu’une majorité considérable s’est prononcée contre l’amendement de l’honorable M. Osy. Je tenais cependant à déclarer à cette chambre et au pays, quelle était ma manière de voir. Maintenant voici comment il s’est fait que j’ai commis cette erreur. J’étais occupé à donner des renseignements à un honorable député de cette chambre, à l’honorable M. Castiau, qui venait de rentrer et qui voulait savoir quel était l’amendement sur lequel on votait ; c’est pendant que je le lui expliquais qu’on a appelé mon nom et que j’ai, préoccupé d’autre chose, émis un vote contraire à mon intention. Je ne m’oppose pas du tout au mode de procéder indiqué par l’honorable M. de Theux, et je ne suis pas contraire non plus à l’opinion que vient de manifester l’honorable M. de Brouckere. Je n’insiste donc point davantage sur cet incident.
M. Devaux. - Puisque la chambre est à établir un précédent, je demanderai à lui faire une observation que j’avais déjà voulu présenter il y a longtemps. C’est le discours de l’honorable M. de Brouckere, qui la rappelle à mon souvenir. L’honorable membre vient de dire qu’un membre qui aurait voté le premier et qui demanderait à rétracter son vote, pourrait changer la majorité.
A ce sujet. je demanderai si nous ne suivons pas un mode vicieux d’appel nominal ? je crois que le mode que l’on suit dans d’autres pays est plus convenable. A chaque appel nominal, on commence par une autre lettre de l’alphabet ; ainsi le premier jour, par la lettre A, le second jour par la lettre B, et ainsi de suite. Ce serait préférable.
M. le président. - Je pense qu’il convient de décider d’abord la première question, à savoir si le bureau aura égard à la réclamation de M. d’Hoffschmidt.
M. de Brouckere. - Je pense aussi qu’il faut mettre cette question aux voix. L’honorable M. d’Hoffschmidt doit comprendre que ce n’est pas de lui que j’ai parlé. D’abord dans cette circonstance, que l’honorable membre ait dit oui ou non, la question reste tranchée dans le même sens. Mais c’est pour prévenir un antécédent qui pourrait avoir plus tard des conséquences fâcheuses, c’est pour empêcher qu’un membre ne cherche à rétracter son vote, que je demande qu’on mette aux voix la question de savoir si l’honorable M. d’Hoffschmidt peut, oui ou non, revenir sur son vote.
M. d’Hoffschmidt. - Je crois que c’est une question de principe et non une question de personne qu’il faut mettre au voix. (Sans doute !)
- La chambre décide que lorsqu’un membre fera une réclamation au sujet du vote émis par lui lors d’un appel nominal, le bureau n’aura pas égard à la réclamation, si elle n’a pas été faite par le membre à l’instant même.
M. le président. - Maintenant il reste à voter sur la question de savoir si le bureau prendra une lettre différente à chaque appel nominal.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, le précédent cité par l’honorable M. Devaux est exact. Dans d’autres pays, on ne suit pas invariablement l’ordre alphabétique pour les appels nominaux. On tire au sort, chaque fois, la lettre par laquelle on commencera l’appel nominal, Il y a longtemps que je me proposais de faire la même observation à l’assemblée, et je suis heureux que l’honorable M. Devaux ait bien voulu prévenir ma pensée.
Je trouve qu’il y a d’autant plus de raison d’admettre ce précédent, que chez nous les appels nominaux se font à haute voix, tandis qu’en d’autres pays, en France, par exemple, où l’on vote au scrutin secret, on tire au sort la lettre par laquelle on commencera l’appel nominal.
M. le président. - Je me permettrai de faire une observation à l’assemblée ; cet incident ne va-t-il pas nous faire perdre beaucoup de temps ?
M. de Brouckere. - J’appuierai la proposition de l’honorable M. Devaux si tant est qu’il regarde comme proposition l’observation qu’il a faite. Je désire qu’à l’avenir on suive, pour le vote par appel nominal, l’ordre qu’il vient d’indiquer. Chaque jour où il y aura un vote par appel nominal, on tirerait au sort la lettre par laquelle on commencerait, et cette lettre serait celle par laquelle on commencerait tous les appels nominaux qu’il pourrait y avoir pendant la séance.
M. le président.- On pourrait avoir au bureau une urne dans laquelle seraient toutes les lettres de l’alphabet.
M. de Theux. - J’ai demandé la parole pour appeler l’attention de la chambre sur la question de savoir si on peut décider cela par une simple motion d’ordre.
M. le président. - Le règlement ne dit rien à cet égard, je ferai observer en outre que ce mode a été quelquefois suivi par les secrétaires du congrès.
M. Delehaye. - On a parlé de tirer au sort la lettre par laquelle on commencerait. Je pense qu’il vaudrait mieux tirer le nom, l’urne contenant les noms des membres est au bureau, et à partir d’un nom désigné par le sort on descendrait, puis on remonterait. Si on procédait par lettre, comme il y a beaucoup de noms commençant par la même lettre, le D, quand cette lettre sortirait, ce serait toujours par le même nom que l’on commencerait et que l’on finirait.
M. de Theux. - Pour que la proposition ait son effet, il faut que le tirage ait lieu au moment du vote. Cet effet serait manqué si le tirage avait lieu à l’ouverture de la séance.
M. le président. - La proposition serait ainsi conçue :
« Chaque jour, avant de procéder au premier vote par appel nominal, on tirera au sort le nom du membre par lequel on commencera cet appel. Si d’autres appels nominaux ont lieu dans la même séance, ils se feront de la même manière. »
- Cette proposition est adoptée.
Voici le résultat de l’appel nominal :
76 membres répondent à l’appel ;
57 répondent non ;
19 répondent oui.
En conséquence, l’amendement de M. Osy n’est pas adopté,
M. le président. - L’honorable M. Devaux, dans la supposition du rejet de l’amendement de M. Osy, a déposé l’amendement suivant :
« Je propose de réduire à 10 c. par hectolitre le droit proposé sur l’eau de mer par la section centrale. »
- Cet amendement n’est pas adopté.
L’amendement de M. le ministre est mis aux voix et adopté, paragraphe par paragraphe, dans les termes suivants
« § 1er. Il est établi un droit d’accise sur l’eau de mer marquant, à l’aréomètre de Beaumé, un degré jusqu’au-dessous de trois degrés.
« Ce droit est fixé, par hectolitre d’eau de mer :
« De un degré inclusivement à deux degrés exclusivement, à 10 centimes ;
« De deux degrés à trois degrés exclusivement, à 20 centimes.
« L’eau de mer marquant trois degrés ou plus sera considérée comme saumure et imposée selon la densité reconnue, d’après les bases indiquées à l’art. 9.
« §. 2 L’eau de mer ne pourra être puisée que de jour, pour l’usage des raffineurs de sel, et dans le chenal des ports d’Ostende ou de Nieuport, ou dans l’Escaut en deçà de la frontière. Ceux qui procéderont à cette opération seront porteurs d’une déclaration, préalablement visée par le receveur du bureau d’Ostende, de Nieuport ou de Lillo, laquelle énoncera :
« a. Le nom du voiturier, batelier ou conducteur ;
« b. Les jours et heures auxquels on commencera et ceux auxquels on cessera de puiser l’eau de mer ;
« c. L’endroit où cette opération aura lieu ;
« d. Le mode de transport, avec mention du nombre et de la capacité des barriques, ou du nom du bateau et de la contenance de sa cale de chargement
« e. Le nom et le domicile du raffineur auquel l’eau de mer est destinée.
« Au moment de puiser l’eau de mer, le déclarant en indiquera la densité par mention expresse faite sur cette déclaration, à moins qu’en faisant cette déclaration il n’ait demandé à faire constater cette densité par les agents de l’administration.
« § 3. L’accise devra être payée avant que le transport de l’eau de mer puisse commencer. La quittance des droits sera frappée d’un timbre de 25 centimes ; elle indiquera le délai fixé pour sortir du rayon des douanes ou pour se rendre à la raffinerie, lorsqu’elle est établie à Ostende ou à Nieuport, ou dans le territoire réservé à la douane.
« § 4. La capacité pleine de la cale de chargement, d’après le certificat de jaugeage qui en sera délivré, ou celles des barriques, servira de base à l’accise. Les barriques porteront, en chiffres peints à l’huile, l’indication de leur contenance, et les mots : eau de mer.
« § 5. Les déclarations ne seront pas admises pour des quantités inférieures à 10 hectolitres. Les fractions de l’hectolitre seront négligées dans la liquidation des droits.
« § 6. Toute communication souterraine ou clandestine, entre les raffineries et les lieux où l’eau de mer peut être puisée, est interdite. Celles qui existeraient seront immédiatement détruites.
« § 7. Aucun établissement pour l’évaporation de l’eau de mer ne pourra être érigé.
« § 8. Les raffineurs de sel qui font usage de l’eau de mer ne peuvent l’employer qu’à la fonte du sel brut ; il leur est interdit de l’évaporer au préalable. Leurs chaudières seront accessibles aux employés. »
L’ensemble de l’article est également adopté.
« Art. 6. § 1er. L’importation du sel brut n’est admise que par des navires venant directement de la mer et jaugeant au moins 50 tonneaux.
« § 2. Il est interdit de déposer du sel ailleurs que dans la cale de chargement.
« § 3. Sauf le cas de force majeure, dûment constaté par les employés convoyeurs, les navires ne pourront s’arrêter ou stationner, décharger ou alléger, ni communiquer avec les rives ou avec des embarcations, dans le parcours des rivières et canaux. »
M. Cogels. - Messieurs, d’après le projet de loi présenté à la séance du 16 juin 1842, l’importation du sel se trouvait restreinte à deux ports : Anvers et Ostende. Dans la section dont je faisais partie, j’avais moi-même combattu cette disposition ; je pensais qu’il était convenable d’étendre la faculté d’importer le sel brut au port de Bruges, parce que, pour Bruges comparativement à Anvers, les importations de sel forment une branche de commerce extrêmement importante. J’avais fait le sacrifice des autres ports, parce que pour eux la chose me paraissait insignifiante ; j’avais pensé que, dans l’intérêt de la surveillance, dans l’intérêt du trésor, ils auraient pu renoncer à cette industrie très faible pour eux.
D’après le nouveau projet du ministre, les importations se trouvent facultatives pour tous les ports de mer, je dirai même qu’il n’y a plus de ports de mer désignés. Ce n’est pas là ce que je veux combattre ; je ne veux pas priver les villes de Louvain, de Nieuport, de Bruxelles de la faculté d’importer du sel brut. Mais je demande comment M. le ministre entend la disposition, car je ne sais plus ce qu’on entend par port de mer depuis que je les vois tous les jours reculer vers l’intérieur. Je désire savoir si les importations pourront avoir lieu dans les ports de mer seulement ou dans toute l’étendue du pays. D’après le projet de loi, on exige seulement que les navires viennent directement de la mer et soient du port de 50 tonneaux. Or ces petits navires de 50 tonneaux peuvent circuler à peu près sur toutes nos eaux. C’est une explication que je voulais demander à M. le ministre.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - La proposition du gouvernement tend a nous laisser dans la même situation où nous trouvons sous la loi actuelle, c’est-à-dire, que le gouvernement a le droit d’autoriser les importations directes vers les ports de l’intérieur, mais seulement vers les ports où il y a des entrepôts qui peuvent recevoir des marchandises d’accise ; en d’autres termes, nous sommes, sous ce rapport, sous le régime établi par la loi générale des douanes, nous ne faisons que revenir à ce régime, dont le premier projet s’écartait.
M. Desmet. - Le dernier paragraphe de l’article concerne seulement les canaux et rivières, mais y a-t-il dans la loi générale une disposition qui concerne les côtes de mer, qui prévoit le cas où, par force majeure, on devra aborder à la côte pour s’alléger ou décharger. Je fais cette observation, parce que l’expérience a prouve que dans ce cas il peut y avoir fraude. L’exemple que j’ai cité hier en est la preuve.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Dans le cas dont vient de parler l’honorable membre, c’est à l’administration à apprécier s’il y a force majeure, ou s’il y a fraude. Elle en jugera d’après les circonstances. La loi n’autorise le débarquement que dans les ports de mer. Les cas de force majeure ne peuvent être prévus. S’ils se présentent, on les appréciera ; mais il faudra qu’ils soient bien reconnus pour légitimer l’exemption des pénalités.
- L’art. 6 est mis aux voix et adopté.
L’art. 7, avec l’amendement de la section centrale, auquel le gouvernement se rallie, est ainsi conçu :
« Art. 7. § 1er. Immédiatement après l’arrivée du navire au premier bureau d’entrée, il sera procédé à l’apposition des plombs ou cachets, sur chacune des écoutilles, panneaux ou cloisons mobiles donnant accès à la cale de chargement, et qui seront indiqués aux employés par le capitaine et le second.
« § 2. Lors d’importation en destination d’un autre bureau dans l’intérieur, il sera placé trois gardiens à bord, pour convoyer le transport. Le trajet du premier bureau d’entrée, à Anvers, devra s’effectuer dans un délai de dix-huit heures, sauf le cas de force majeure.
« § 3. L’entrée dans les bassins de commerce aura lieu à la première ouverture des écluses après l’arrivée du navire, à moins d’empêchement dûment constaté. »
- Cet article est adopté.
« Art. 8. § 1er. Le déchargement du sel ne pourra s’opérer que dans les bassins de commerce, et après que les navires auront été placés à quai aux endroits, à designer par le contrôleur, de concert avec l’autorité locale compétente.
« § 2. S’il arrivait qu’un chargement dût être transbordé, les allèges devront s’éloigner du navire de mer, lorsque les travaux de chaque jour seront terminés. Elles seront ensuite amarrées aux endroits à désigner également par le contrôleur, et ne pourront accoster le navire qu’à la reprise des travaux de la journée suivante. »
- Adopté.
« Art. 9. § 1er. En cas d’immersion du sel constatée avant ou pendant la vérification du chargement, la saumure provenant de la liquéfaction sera recueillie. Les employés évalueront la quantité de sel qu’elle contiendra, à raison de 55 kilogrammes par hectolitre de saumure à 25° de l’aréomètre de Beaumé, et pour les degrés inférieurs, en proportion de cette base, d’après la pesanteur spécifique qu’ils représentent.
« § 2. Il est toutefois permis de faire couler cette saumure dans le port : alors la partie de sel perdue sera exemptée du droit ; mais les employés en constateront la quantité, afin d’établir une comparaison entre la déclaration et le chargement du navire. »
- Adopté.
« Art. 10. § 1er. Dans toutes les circonstances où la vérification est prescrite par la présente loi, elle sera effectuée par pesée intégrale, et les employés seuls en auront la police.
« Ils sont tenus :
« 1° D’inviter, avant le commencement de leurs opérations, les parties intéressées ou leurs fondés de pouvoir à y être présents ;
« 2° De placer les balances à quai. Le contrôleur pourra, lorsque les circonstances le rendront nécessaire, autoriser le placement de la balance sur le pont du navire ; mais il est formellement interdit de procéder à la pesée dans la cale de chargement ;
« 3° D’effectuer les pesées au poids uniforme de 50 kilogrammes ;
« 4° De renfermer le contrepoids d’ajustage des balances dans une boîte fermée à clef ;
« 5° D’apposer, après chacune de leurs vacations et jusqu’à la fin du déchargement, des plombs ou cachets sur les écoutilles ou autres issues qui ont dû être ouvertes pour la pesée ;
« 6° De ne laisser opérer aucun déchargement ni aucune vérification entre le coucher et lever du soleil ;
« 7° De dresser acte :
« a. Du refus, ou de l’acceptation des parties intéressées ou de leurs fondés de pouvoirs, d’assister aux vérifications ;
« b. De l’apposition et de la levée des plombs ou cachets ;
« c. Des quantités constatées à chaque vacation ;
« d. Des incidents qui peuvent se présenter pendant le déchargement ou la vérification.
« § 2. Les parties intéressées apposeront leur signature sur les actes de vérification dressés par les employés et sur les permis de déchargement, afin de reconnaître l’exactitude des opérations.
« § 3. Dans le cas où les parties intéressées ne pourront signer ou refuseront de le faire, il en sera fait mention ainsi que de la cause qui les empêcherait de signer. »
M. Desmaisières. - J’ai à présenter quelques observations sur les n 2 et 3° du § 1er de cet article.
La disposition du n°2 établit, pour règle, que les balances doivent être placées à quai ; elle admet quelques exceptions dont elle laisse juge le contrôleur. Je crois qu’il n’y a guère cependant que deux cas à prévoir. Dès lors, plutôt que de les laisser à l’arbitraire de l’administration, il vaut mieux que la loi les prévoie.
Quand la balance doit-elle être placée sur le pont du navire ? Je crois que c’est seulement lorsqu’il s’agit de transborder le sel sur des allèges. Quand la balance doit-elle être placée à quai ? Lorsqu’il s’agit de décharger le sel pour le transborder sur des voitures qui doivent le transporter, sur un point quelconque du pays.
Je crois donc que la loi doit prévoir les deux cas ; que, dans le cas du transbordement sur des allèges, la balance doit être placée sur le navire, que, quand il s’agit des autres déchargements, la balance doit être placée à quai.
Le n° 3° prescrit la pesée par poids uniforme de 50 kilog. Si je ne me trompe, la pesée a lieu actuellement par 100 kil.
M. Delehaye. - Il y a un amendement qui fait droit à cette observation.
M. Desmaisières. - Je m’y rallie.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Le péage s’opère sur le pont du navire chaque fois que cela sera nécessaire. Mais l’administration a pensé qu’elle devait se réserver la faculté de faire peser sur le quai, alors que des abus seraient à craindre. Nous croyons qu’il ne faut pas donner un droit absolu au commerce ; cette faculté que nous réclamons pour l’administration est toute dans l’intérêt de la régularité et du trésor, dans l’intérêt de la répression de la fraude. Pour éviter l’arbitraire c est à un fonctionnaire supérieur de la localité qu’on a laissé à décider si le pesage aura lieu sur le pont ou sur le quai.
Du reste, je puis déclarer d’avance que l’on obtempérera autant que possible, je dirai même presque toujours, au vœu du commerce
M. Delehaye. - J’avais demande la parole pour faire l’observation qu’a présentée l’honorable M. Desmaisières, à laquelle je n’ajouterai qu’un mot.
Mais auparavant, je veux répondre à M. le ministre des finances. Je crois qu’il est de l’intérêt de la loi même qu’elle prévoie tous les cas possibles. Si vous ne faisiez pas droit à l’observation de l’honorable M. Desmaisières, vous accorderiez à l’administration, que je veux croire bien intentionnée, les moyens de vexer les intéressés, ce qui est fort inutile.
Vous savez qu’à Gand, Anvers et Ostende, la plupart des magasins sont construits au bord de la rivière. Le bord opposé forme quai. Si vous admettez la proposition du gouvernement, on exigera que la balance soit placée sur le quai ; et il faudra ensuite traverser la rivière pour transporter le sel dans les magasins. Vous voyez combien par là vous vexeriez le commerce.
D’un autre côté, le gouvernement n’a rien à craindre lorsqu’on pèse le sel sur le pont, et qu’on le transporte ensuite dans le magasin. Je proposerai donc la modification suivante :
« De placer la balance sut le quai pour le sel qui serait transporté par voiture, et sur le pont des navires pour tout sel qui sera transbordé et en allège ou porté à dos d’hommes. »
Messieurs, pour justifier ma proposition relativement au transbordement dans des allèges, je vous dirai qu’il arrive quelquefois que la pesée se fait à une certaine distance du magasin : c’est ce qui arrive à Anvers. Alors le sel se transporte de la balance dans une allège qui le conduit directement au magasin.
Vous voyez qu’avec cet amendement vous ne pouvez aucunement craindre la fraude.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, les observations de l’honorable membre m’étaient connues avant que sa proposition n’eût été faite. Il était parvenu au département des finances une réclamation sur plusieurs points, et entre autres sur celui dont il s’agit. J’ai fait droit à tout ce qui m’a paru juste et conciliable avec la régularité des opérations de l’administration, à tout ce qui ne devait pas être préjudiciable aux intérêts du trésor.
Messieurs, des abus ont été constatés ; il est arrivé que des tentatives de fraude se sont faites au moyen de tel ou tel mode de pesage. L’administration veut être à même de déjouer toute manœuvre de ce genre ; je puis toutefois déclarer que toutes les fois que des abus ne seront pas à craindre, on obtempérera aux vœux du commerce.
Il faut donc mieux conserver la faculté de peser soit à quai, soit sur le pont que de forcer l’administration à procéder toujours d’après un mode déterminé.
M. Devaux. - Messieurs, c’est une grande affaire pour le sel que la pesée. Remarquez bien que le sel arrive par grands bateaux, par vaisseaux, mais qu’il se transborde et est transporté par de petits bateaux dans l’intérieur.
D’après l’art. 10, la règle générale serait que, quand le vaisseau arriverait, il faudrait transporter le sel à quai, le peser, et puis, par un second chargement, le porter dans l’allège. Cela, messieurs, entraînerait des frais considérables. Ayez égard au grand volume de la marchandise et à son peu de valeur ; vous verrez que cela pourrait augmenter considérablement le prix du sel.
M. le ministre des finances fait cependant la règle générale du pesage à quai. Evidemment, en cas de transbordement, ce doit être l’exception.
Que M. le ministre veuille que l’administration ait dans certains cas la faculté de faire peser à quai, je le conçois jusqu’à un certain point. Mais c’est que la disposition de l’article en fait une loi aux employés. Cet article dit : « Les employés sont tenus de peser à quai, et ce n’est qu’en cas de nécessité qu’ils peuvent peser sur le pont du navire. » La loi ne dit donc pas ce que le ministre des finances veut lui faire dire.
Je voudrais que l’amendement de l’honorable M. Delehaye fût adopté pour le cas de transbordement. Je ne suis pas autant éclairé pour le transport à dos d’hommes. Mais pour le transbordement, il faut que la règle générale soit la pesée sur le pont du navire. Vous pouvez, si vous le voulez faire une exception pour le cas de circonstances graves ; c’est déjà beaucoup que cette exception mais il ne faut pas aller au-delà.
M. Delehaye. - Je suis heureux qu’on ait trouvé que la première partie de mon amendement présentait certains avantages. Je ferai remarquer que, pour le transport à dos d’hommes, il a de l’importance aussi. Dans les rivières très peu larges, le transport se fait à dos d’hommes. On prend le sel sur la balance et on le transporte à dos d’hommes au moyen d’une planche qui communique du pont au bord de la rivière. Au contraire, quand la rivière est plus large, comme à Anvers, le transport se fait, comme je l’ai dit, au moyen d’allèges ?
Messieurs, je pense réellement que l’administration ne peut qu’applaudir la mesure que je propose, parce qu’elle va se mettre à l’abri de toute contestation de la part des intéressés.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, les choses se passeront réellement comme le veulent les deux honorables membres.
L’administration croit qu’il est de l’intérêt du trésor qu’elle ne soit pas liée, parce qu’elle pourra alors empêcher les abus. Je dois avouer que l’observation de l’honorable M. Devaux a quelque fondement. L’article aurait pu être rédigé d’une manière moins impérative, et de telle sorte que l’administration eût eu la simple faculté de faire peser selon le mode qu’elle eût jugé le plus convenable.
Mais je pense qu’une déclaration du gouvernement au moment de la discussion de la loi peut suffire et qu’il sera bien entendu que c’est ainsi que l’article devra être exécuté.
M. Desmaisières. - Messieurs, je suis heureux de voir que l’honorable ministre des finances trouve que les observations que nous avons présentées, sont fondées. Mais il croit que nous devons nous contenter de la simple déclaration qu’il fait au nom du gouvernement, que les choses se passeront selon nos vœux. Messieurs, nous ne pouvons pas nous contenter de cette déclaration. Du moment que M. le ministre des finances ne voit pas d’inconvénient à ce que notre opinion soit adoptée, je crois qu’elle doit inscrite dans la loi même.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, je ne trouve pas d’inconvénients à accorder, dans presque tous les cas, ce que le commerce désirera, quant au pesage, mais j’en trouve de très grands à lier l’administration. Voilà la déclaration que j’ai faite ; elle est très différente de l’opinion que l’honorable membre a supposé que j’ai manifestée.
M. Desmaisières. - Messieurs, je crois qu’on pourrait concilier l’opinion de M. le ministre des finances avec la nôtre, en établissant comme la règle ce que le projet établit comme exception, et vice-versa.
Je propose donc par amendement de rédiger ainsi le 2° de l’art. 10 :
« 2° De placer les balances sur le pont du navire. Le contrôleur pourra, lorsque les circonstances le rendront nécessaire, exiger le placement de la balance à quai ; mais il est formellement interdit de procéder à la pesée dans la cale de chargement. »
M. Savart-Martel. - Je voulais faire remarquer à M. le ministre des finances qu’il est nécessaire que les termes de la loi expliquent la pensée du législateur, parce que les tribunaux jugent toujours selon les termes de la loi.
M. Zoude, rapporteur. - Je proposerai de rédiger comme suit le 2°de l’art. 10 :
« Les balances seront placées à quai ou a bord du navire selon les circonstances, qui seront appréciées par l’administration ; mais il est formellement interdit de procéder à la pesée dans la cale de chargement. »
M. Delehaye. - Remarquez bien, messieurs, que l’amendement de M. Zoude dit absolument la même chose que la proposition du gouvernement ; le gouvernement propose de laisser à l’administration la faculté de décider où l’on placera la balance : l’amendement de M. Zoude donne à l’administration la même faculté ; eh bien, c’est ce que nous ne voulons pas, parce que cela donne lieu à des contestations incessantes entre l’administration et les intéressés. Cela est démontré par l’expérience ; il ne se passe pas de jour sans qu’il y ait de ces contestations. Il vaut bien mieux fixer une règle générale, comme je le propose, et cela ne peut donner lieu à aucune espèce d’inconvénient. En effet, si vous adoptez ma proposition, la balance sera placée sur le pont chaque fois que le sel sera transporté par allège ou à dos d’hommes. Eh bien, cela ne peut aucunement donner lieu à la fraude, à moins que l’on ne suppose que la fraude se commettra sous les yeux mêmes des employés.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Messieurs, je préfère l’amendement proposé par l’honorable rapporteur de la section centrale, car si le projet primitif présentait l’inconvénient de poser comme règle générale le placement de la balance à quai, l’amendement de M. Desmaisières tombe dans l’inconvénient contraire, en posant comme règle générale le placement de la balance sur le pont du navire. L’amendement de M. Zoude les évite tous deux ; il laisse à l’administration la latitude dont elle a besoin pour empêcher la fraude. Je conviens que l’amendement de M. Desmaisières laisse aussi quelque latitude à l’administration, mais elle est beaucoup plus restreinte. Dans tous les cas l’amendement contre lequel je m’élève le plus fortement, c’est celui de l’honorable M. Delehaye, qui lie positivement l’administration et peut entraver son action. En résumé je désire que la chambre accueille l’amendement de l’honorable rapporteur de la section centrale.
M. Desmet. - Messieurs, nous voulons éviter les abus, non seulement ceux que commettent les contribuables, mais aussi ceux qui peuvent résulter de la connivence des employés. Eh bien, si vous avez la faculté de peser sur le pont du navire, il dépend d’un seul contrôleur d’ordonner que le pesage se fasse ainsi. Cela me paraît fort dangereux. Il me semble qu’il faut fixer une règle générale et ne permettre une exception que quand il y a nécessité absolue de le faire.
M. Manilius. - Je proposerai un sous-amendement à l’amendement de M. Desmaisières ; je demande qu’après les mots « De placer les balances sur le pont, » l’on ajoute : « ou sur le quai, au choix du déclarant. » Viendraient ensuite la dernière disposition proposée par M. Desmaisières : « Le contrôleur pourra, lorsque les circonstances le rendront nécessaire, exiger le placement des balances sur le quai. »
- L’amendement de M. Delehaye est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
Le sous-amendement de M. Manilius et l’amendement de M. Desmaisières sont successivement mis aux voix ; ils ne sont pas adoptés.
L’amendement de M. Zoude est ensuite mis aux voix et adopté.
M. Coghen. - Il est bien entendu que l’on maintient la dernière partie du paragraphe : mais il est formellement interdit de procéder à la pesée dans la cale de déchargement.
De toutes parts. - Oui ! oui !
Les autres dispositions de l’article sont mises aux voix et adoptées.
« Art. 11. § 1er. Les capitaines de navires, négociants et raffineurs pourront réclamer la contre-vérification des quantités constatées, pour autant qu’elles soient restées sous la surveillance non-interrompue des employés préposés au déchargement ou à la vérification.
« § 2. Aucune quantité de sel ne sera enlevée avant l’achèvement de la vérification, à moins d’une autorisation du contrôleur, ou, en son absence, de l’employé qui préside à l’opération. »
« Art. 12. § 1. Le sel brut importé en quantité de 2,500 kilogrammes au moins, pourra être emmagasiné :
« a. Par dépôt dans les entrepôts généraux de libre réexportation.
« b. Sous crédit permanent pour l’accise ;
« c. Sous termes de crédit pour l’accise.
« § 2. Toute quantité inférieure sera soumise au payement des droits an comptant. »
- Ces articles sont adoptés sans discussion.
« Art. 13. § 1er. Les mouvements à l’entrée et à la sortie des entrepôts généraux de libre réexportation sont réglés de la manière suivante :
« Les comptes seront débités des quantités de sel brut :
« a. Importées directement ;
« b. Transcrites dans le même entrepôt au compte d’un autre négociant.
« Ils seront déchargés des quantités ;
« a. Déclarées pour la consommation ;
« b. Déclarées sous crédit permanent ou sous crédit à termes ;
« c. Transcrites dans le même entrepôt au compte d’une autre négociant ;
« d. Déclarées à la reexportation.
« § 2. La réexportation du sel brut devra se faire en vrac par des navires de mer jaugeant au moins 50 tonneaux et par quantité de 10,000 kilogrammes et plus. Les autres mouvements autorisés par le présent article n’auront pas lieu en quantité inférieure à 2,500 kilogrammes, à moins que ce ne soit le restant des diverses prises en charge.
« § 3. Les livraisons à des particuliers pourront s’effectuer en quantités de 50 kilogrammes et plus, sous payement de l’accise au comptant.
« § 4. Les transports sur entrepôts s’effectueront sous passavant-à-caution. »
- Cet article est adopté sans discussion
« Art. 14. § 1er. Le crédit permanent pourra être accordé dans l’intérieur du royaume, ainsi que dans les villes fermées, les forts et les communes dont la population agglomérée est de 2,000 âmes au plus, placés dans la distance de 5,500 mètres de la frontière de terre et des côtes maritimes, pourvu qu’il existe, dans les endroits où l’on se propose d’établir les magasins de sel, un receveur chargé de la perception des droits d’accises. »
- Cet article est adopté sans discussion.
« Art. 15. § 1er. Les magasins de crédit permanent seront voûtés ou plafonnés, et n’auront d’autre issue que celle donnant immédiatement sur la voie publique. Toutes les autres ouvertures seront maçonnées.
« § 2. Il sera tenu un compte particulier pour chacun des magasins de sel brut appartenant au même négociant.
M. le ministre des finances (M. Mercier) a proposé l’amendement suivant au 1er § de cet article :
« Dans des circonstances particulières, et sauf révocation en cas d’abus, l’administration pourra autoriser l’existence d’une issue ne donnant pas immédiatement sur la voie publique, pourvu que cette issue soit fermée au moyen d’un cadenas apposé par elle. »
M. Delehaye. - Messieurs, je pense, d’après ce qu’a dit M. le ministre des finances, qu’il est bien entendu que ces mots : « voie publique, » s’étendent aussi aux rivières ; il est beaucoup de magasins qui n’ont pas d’autre issue que sur une rivière !
Je demanderai aussi à M. le ministre des finances si l’on a jamais constaté quelque fraude commise par ceux qui ont des magasins et des crédits permanents. Cela est impossible, puisque les employés ont la clef de ces magasins et qu’ils y ont accès à toute heure, de nuit comme de jour. Je ne vois donc pas pourquoi, lorsqu’on a aggravé les charges des sauniers, il faut encore leur imposer l’obligation de construire de nouveaux magasins voûtés et plafonnés. Je le répète, il est impossible qu’il y ait fraude, puisque les employés ont la clef des magasins.
Un membre. - Et si on enlève le plancher ?
M. Delehaye. - Mais, messieurs, il y a un cautionnement. Je connais un intéressé qui a donné un cautionnement de 400,000 fr. en immeubles. Comment vouiez-vous que des personnes qui présentent de semblables garanties, se livrent à la fraude ?
M. Zoude, rapporteur. - L’honorable membre demande si des fraudes ont été commises. Je lui en citerai une : il y avait à la maison anséatique à Anvers un million de kilog. de sel ; on y est entré par un souterrain, on a enlevé tout le sel, et lorsque les agents de l’administration sont arrivés pour faire la vérification, ils n’ont plus rien trouvé. Je crois donc que les mesures de précaution proposées par le gouvernement doivent être adoptées.
- L’article tel qu’il est amendé par M. le ministre des finances est mis aux voix et adopté.
« Art. 16. § 1er. Quiconque voudra jouir du crédit permanent pour l’accise sur le set brut devra :
« a. Faire à cet effet la demande au directeur dans la province ;
« b. Décrire exactement chaque magasin ;
« c. Fournir à la satisfaction du receveur, un cautionnement suffisant.
« § 2. Le crédit sera accordé après que l’état et l’étendue des locaux auront été constatés. »
« Art. 17 §1er. Le sel brut déposé dans les magasins de crédit permanent devra être représenté en tout temps à la réquisition des employés.
« § 2. La vérification par recensement aura lieu sur l’autorisation par écrit de l’inspecteur dans l’arrondissement.
« Il y sera procédé par mesurage métrique.
« La contre-vérification, si elle est réclamée, s’effectuera par pesée.
« § 3. La pesée est obligatoire lorsque le résultat du mesurage métrique présente une différence au-delà de 2 p. c. de la balance du compte.
« § 4. Toute quantité excédant celle qui devrait exister en magasin, sera prise en charge au compte nouveau à ouvrir aux négociants. Quant aux manquants, les droits seront acquittés immédiatement. »
« Art. 18. § 1er. Les comptes seront débités des quantités de sel brut.
« a. Importées directement ;
« b. Expédiées des entrepôts généraux de libre réexportation ;
« c. Transférées d’autres magasins de crédit permanent.
« Ils seront déchargés des quantités :
« a. Déclarées sous paiement de l’accise au comptant ou à termes de crédit ;
« b. Transférées sur d’autres magasins de crédit permanent.
« § 2. Les mouvements autorisés par le présent article n’auront pas lieu en quantité inférieure à 2,500 kilogrammes, à moins que ce ne soit le restant des diverses prises en charge ou sous paiement de l’accise au comptant. »
« Art. 19. § 1er. Les transports sur les magasins de crédit permanent s’effectueront sous passavant-à-caution.
« § 2. En cas de transfert du sel sur un autre magasin de crédit permanent, le passavant-à-caution pourra être délivré sur le vu d’un certificat de garantie et de prise en charge provisoire, conformément à l’article 146 de la loi générale du 26 août 1822. (Journal officiel. N° 38). »
- Ces articles sont adoptés sans discussion.
« Art. 20. § 1er. Les raffineurs obtiendront crédit pour les droits sous caution suffisante.
« § 2. La redevabilité résultant de chaque prise en charge sera divisée en 3 termes égaux, échéant de trois en trois mois.
« § 3. Les termes de crédit commenceront à courir de la date à laquelle l’emmagasinage dans la raffinerie aura été reconnu. »
« Art. 21. § 1er. Les comptes seront débités des quantités de sel brut :
« a. Importées directement ;
« b. Sorties des entrepôts généraux de libre réexportation ;
« c. Sorties des magasins de crédit permanent.
« § 2. La prise en charge aura lieu au moyen d’un passavant-à-caution, qui sera déchargé par le receveur du lieu de la destination. »
« Art. 22. § 1er. L’apurement des comptes ouverts aura lieu :
« a. Par payement des termes échus ;
« b. Par exportation du sel raffiné avec décharge de l’accise ;
« c. Par transfert du sel raffiné sur les magasins de crédit permanent des armateurs à la pêche nationale.
« § 2. L’exportation et les transferts autorisés par le paragraphe précédent n’auront pas lieu en quantité inférieure à 2,500 kilogrammes. »
- Ces articles sont adoptés sans discussion.
« Art. 23. § 1er. L’exportation du sel raffiné avec des charges de l’accise aura lieu par les bureaux à désigner par le gouvernement. Les colis devront avoir un poids brut de 50 kilogr. ou plus. L’exportation du sel en vrac n’est permise que par mer.
« § 2. La décharge de l’accise résultant du sel raffiné exporté sera calculée à raison de fr. 18 75 c. et imputée sur le terme de crédit dont l’échéance est la plus prochaine. Elle sera réduite à 18 fr., si la Hollande venait à supprimer la déduction qu’elle accorde pour perte au raffinage.
« § 3. La décharge de l’accise ne sera pas accordée pour l’exportation du sel raffiné mélangé de sel brut ou de matières hétérogènes.
- Cet article est adopté sans discussion.
« Art. 24. Il sera concédé aux armateurs à la pêche nationale et aux fabricants de sulfate de soude, des magasins de crédit permanent pour le dépôt du sel brut employé par eux en exemption de l’accise. Les dispositions du chapitre IV ci-dessus leur sont applicables. »
M. le président. - Par suite de la suppression de l’exemption en ce qui concerne les fabriques de sulfate de soude, il faudra retrancher de cet article les mots : « et aux fabricants de sulfate de soude, » sauf à les rétablir au second vote, s’il y a lieu.
- L’article est adopté avec cette suppression.
« Art. 25. Les quantités de sel raffiné livrées aux armateurs en vertu de l’art. 22,§ c. de la présente loi, seront déposées dans leurs magasins de crédit permanent pour sel brut, et prises en charge aux mêmes comptes. La décharge accordée aux raffineurs sera calculée à raison de 18 fr., et imputée sur le terme de crédit dont l’échéance est la plus prochaine. »
- Cet article est adopté sans discussion.
« Art. 26. § 1er. Les dépôts de sel brut devront, dans toute l’étendue du royaume, être justifiés par des documents valables.
« § 2. Les transports du sel brut devront également, dans toute l’étendue du royaume, être couverts :
« a. Par un passavant-à-caution si le sel est dirigé sur un entrepôt, sur un magasin de crédit permanent ou sur une raffinerie ;
« b. Par un passavant pour toute quantité supérieure à 5 kilogrammes jusqu’à 2,000 kilogrammes ;
« c. Par un acquit-à-caution pour toute quantité plus forte, le tout après justification de l’existence légale, conformément à la loi générale du 26 août 1822. (Journal officiel, n° 38.)
« § 3. Ces documents seront soumis à la vérification des employés, tant au lieu de départ qu’à celui de destination, et devront, le tout sous peine de nullité, être représentés aux lieux de passage, sur la route à parcourir et à désigner sur les documents.
« § 4. Le § 2, litt. b et c, et le § 3 du présent article, sont applicables aux transports du sel raffiné dans le rayon réservé à la douane.
«§ 5. Quand le sel raffiné arrivera de l’intérieur, le permis de circulation sera levé sans justification, soit au bureau du lieu du départ, soit au dernier bureau de passage en deçà de la ligne de douane.
« § 6. La circulation de la saumure, quelle que soit sa densité, est interdite dans le territoire réservé. Celle de l’eau de mer destinée aux raffineries de sel est toutefois permise, sous les conditions prescrites à l’art. 5. »
« Art. 27. Les acquits-à-caution sont soumis au droit de timbre de 50 centimes. Les passavants en sont exempts. »
« Art. 28. § 1er. Les possesseurs ou régisseurs de sauneries établies sur le territoire réserve obtiendront un duplicata des documents servant à la prise en charge à leur compte de crédit à terme. Ils seront soumis aux recensements à l’effet de reconnaître en tout temps si les quantités en magasins sont dûment justifiées.
« § 2. La quantité de sel que contiendra la saumure trouvée lors de ces recensements sera évaluée, selon la densité reconnue, d’après les bases indiquées à l’art. 9. »
- Ces articles sont adoptés sans discussion.
« Art. 29. Les auteurs des faits ci-après détaillés encourront, savoir :
« 1° Pour infraction aux conditions imposées aux fabricants ou armateurs jouissant de l’exemption de l’accise, le retrait de la concession en franchise de l’impôt et le paiement immédiat des droits sur la quantité de sel en magasin ;
« 2° Pour déclaration inexacte dans le cas prévu au paragraphe 2 de l’art. 5, et pour défaut des indications requises sur les barriques d’eau de mer, une amende de 50 francs ;
« 3° Pour circulation d’un à dix hectolitres d’eau de mer dans le territoire réservé, et dans les villes d’Ostende et de Nieuport ; et pour circulation de plus de dix hectolitres d’eau de mer, sans le document requis, une amende de 100 fr., outre la confiscation des moyens de transport ;
« L’amende sera doublée si le transport a lieu après le coucher ou avant le lever du soleil ;
« 4° Pour l’introduction illégale de l’eau de mer, quelle qu’en soit la quantité dans les raffineries établies à Ostende ou à Nieuport, ou dans le territoire réservé de la douane, une amende de 400 fr., outre la confiscation des moyens de transport. L’amende sera doublée si l’introduction a eu lieu par des conduits souterrains, ou au moyen d’une communication avec les maisons et bâtiments attenants à la raffinerie.
« 5° Pour l’érection d’un établissement d’évaporation de l’eau de mer, une amende de 800 fr., indépendamment de la confiscation des ustensiles, de la saumure et du sel fabriqué ou en cours de fabrication.
6° Pour infraction à la défense portée au § 2 de l’art. 6, une amende, à charge du capitaine, du quintuple de l’accise, outre le payement immédiat des droits sur la quantité de sel déposée dans le navire ailleurs que dans la cale de chargement ;
« 7° Pour infractions aux dispositions du § 3 de l’art. 6 ; pour avoir dépassé le délai mentionné au § 2 de l’art. 7 ; et pour avoir retardé, sans nécessité absolue, l’entrée du navire dans les bassins de commerce, une amende de 800 fr., à charge du capitaine ;
« 8° Pour défaut de plombage d’une issue quelconque à la cale de chargement, une amende de 800 fr., solidairement à la charge du capitaine et du second ;
« 9° Pour infraction aux dispositions du § 2 de l’art. 8, une amende de 200 fr., à charge du patron de l’allège ;
« 10° Pour manquant constaté à l’emmagasinage lors de transfert d’un magasin de crédit permanent sur un autre, le recouvrement immédiat de l’accise due sur le manquant, et en outre une amende du quintuple des droits, s’il dépasse 2 p. c. des quantités reprises aux documents ;
« 11° Pour manquant reconnu aux vérifications par recensement dans les magasins de crédit permanent, supérieur à 2 p. c. des quantités prises en charge depuis le dernier règlement de compte, une amende égale au quintuple de l’accise sur le manquant ;
« 12° Pour le mélange de sel brut avec du sel raffiné, ou de substances hétérogènes avec le sel brut ou raffiné, le payement immédiat de l’accise sur les quantités reprises aux documents ou débitées au compte de crédit permanent. Toutefois, en ce qui concerne le sel brut, il est admis, quant au mélange de substances hétérogènes, une tolérance de 8 p. c. pour le sel brut de France et de 2 p. c. pour toute autre espèce de sel. Cette proportion sera vérifiée, au besoin , en faisant dissoudre un kilogramme de sel dans cinq litres d’eau ;
« 13° Pour défaut de décharge ou pour la non-reproduction dans les lieux et dans les délais fixés dans les acquits-à-caution, une amende de 20 centimes pour chaque kilogramme de sel indiqué dans ces documents ;
« 14° Pour refus d’exercice, une amende de 800 fr. ;
« 15° Pour l’existence illégale d’un, dépôt de sel brut, une amende du quintuple de l’accise sur les quantités de sel saisies, indépendamment du payement des droits et de la confiscation du sel. »
M. le ministre des finances (M. Mercier), par suite du nouvel art. 5, propose par amendement :
1° De rédiger ainsi le n° 2 :
« Pour défaut de déclaration dans le cas prévu au § 2 de l’art. 5 ; pour inexactitude dans la déclaration faite ; et pour omission des indications requises sur les barriques d’eau de mer, une amende de deux cents francs ; »
2° De placer entre les n° 4 et 5, un nouveau numéro ainsi conçu :
« Pour l’existence d’un conduit souterrain ou d’une communication clandestine avec les lieux où l’eau de mer peut être puisée, une amende de huit cents francs ; »
3° De rédiger ainsi le n°5 :
« Pour évaporation de l’eau de mer et pour l’érection d’un établissement formé à cette fin, une amende de huit cents francs. En outre, dans ce dernier cas, la confiscation des ustensiles, de la saumure et du sel fabriqué ou en cours de fabrication. »
- Ces amendements sont successivement adoptés.
L’ensemble de l’article ainsi modifié est adopté.
« Art. 30. En cas d’abus constaté dans les magasins de crédit permanent, l’administration pourra retirer la faveur du crédit pour tout ou partie des magasins de sel appartenant au délinquant. »
- Adopté.
« Art. 31. Les dispositions de la loi générale du 26 août 1822 (Journal Officiel n° 38), et celles des lois du 18 juin 1836 (Bulletin Officiel n° 35) et du 6 avril 1843 (Bulletin Officiel n° ) sont maintenues, en tant qu’elles ne sont pas modifiées par la présente loi. »
« Art. 32. Les raffineurs, négociants et capitaines de navires, sont tenus de faciliter aux employés de l’administration l’exercice de leurs fonctions. Ils devront fournir, chacun en ce qui, le concerne, les moyens d’opérer les visites, les vérifications, les pesées et le mesurage, à défaut de quoi, il sera rédigé procès-verbal de refus d’exercice. »
« Art. 33. Les frais d’apposition de plombs et cachets, dans les cas prévus par la présente loi, seront remboursés par les raffineurs, négociants ou capitaines de navires, à raison de 25 centimes par plomb ou cachet. »
« Art. 34. § 1er. Sont prohibés :
« a. L’importation de la saumure, quelle que soit sa densité ;
« b. Le transit, le cabotage et le transport, avec emprunt du territoire étranger, du sel brut ou raffiné, de la saumure et de l’eau de mer.
« 2. Le gouvernement pourra toutefois autoriser le transport du sel brut par la Meuse à travers Maestricht. »
« Art. 35. Les lois des 2 août 1822 (Journal officiel, n°35) et 23 décembre 1829 (Journal officiel, n° 74) sont abrogées, ainsi que les paragraphes f et g de l’art. 4 de la loi du 24 décembre 1829. (Journal officiel, n°76).
- Adoptés.
« Art. 36. § 1er. La présente loi sera exécutoire 20 jours après la date de sa promulgation.
« Pendant les trois jours qui précéderont sa mise en vigueur, il sera procédé au recensement des magasins de crédit permanent des raffineurs et des débitants de sel raffiné.
« § 2. Aucun document à l’entrée ou à la sortie de ces magasins ne sera délivré pendant les trois jours indiqués ci-dessus. Le sel brut ou raffiné, en cours de transport à cette époque, à destination d’un raffineur ou d’un débitant, sera pris en charge à termes de crédit ou déposé dans les magasins de crédit permanent d’un négociant en gros. Ce dernier mode de prise en charge n’est applicable qu’au sel brut.
« § 3. Les droits sur les manquants reconnus au recensement seront acquittés immédiatement, d’après le montant de l’accise établie par la loi du 22 août 1822 (Journal officiel, n° 35).
« § 4. Le règlement des comptes de crédit permanent ouvert aux raffineurs sera opéré, après ce recensement, suivant les dispositions de ladite loi du 22 août 1822 (Journal Officiel, n° 35), modifiée par celle du 24 décembre 1829 (Journal Officiel, n° 76) et celle du 24 septembre 1842 (Bulletin Officiel, n° 82. »
« Art. 37. § 1er. Les quantités de sel raffiné ou en cours de fabrication, constatées an recensement prescrit par l’article précédent, seront soumises au payement de l’accise ou prise en charge sous crédit à termes au compte d’un raffineur.
« § 2. Les quantités de sel brut seront portées dans un compte spécial qui restera soumis, pendant un mois, au régime du crédit permanent. A l’expiration de ce délai, le compte devra être apuré par transfert du sel sur le magasin de crédit permanent d’un négociant en gros, par prise en charge sous crédit à termes ou par payement des droits au comptant.
« § 3. Les droits seront liquidés d’après le montant de l’accise fixée à l’art. 1er. »
- Adoptés.
« Art. 38. Dans le délai de deux mois à partir de la mise à exécution de la présente loi, les négociants en gros, les fabricants de sulfate de soude et les armateurs à la pêche nationale devront avoir rempli les obligations imposées par les chapitres IV et VI. »
M. le président. - A cet article comme aux articles précédents, on supprimera ce qui est relatif au sulfate de soude, sauf à y revenir s’il y a lieu.
- L’art. 38 est adopté avec cette modification.
« Art. 39. Les autorisations d’emmagasinage du sel en exemption de l’accise sont rapportées à dater de la promulgation de la présente loi, sauf celles accordées aux armateurs à la pêche nationale. Elles seront renouvelées, s’il y a lieu, en faveur des fabricants de sulfate de soude. »
- Cet article est adopté avec la suppression de la dernière phrase relative au sulfate de soude, sauf y revenir au deuxième vote.
« Art. 40. les cautionnements fournis pour les comptes de crédit permanent conserveront leur valeur et continueront à garantir les droits dont les raffineurs et les négociants sont débiteurs, jusqu’à ce qu’ils se soient conformés aux dispositions de la présente loi. Ces cautionnements pourront également garantir les comptes de crédit a termes, pendant le délai fixé aux articles 57 et 58, sous la condition que les intéressés devront, avant qu’il soit expiré, passer de nouveaux actes de cautionnement à la satisfaction des receveurs. »
- La section centrale propose la suppression de cet article.
M. le ministre des finances (M. Mercier) adhère à cette proposition.
- La suppression est ordonnée.
« Art. 41 devenu art. 40. Les capitaines, tant des navires étrangers entrant pour la première fois dans le royaume, que des navires belges sortis avant la promulgation de la loi, et rentrés après cette époque, n’encourront pas l’amende comminée pour infraction au § 2 de l’article 6, pourvu cependant qu’ils aient déclaré les endroits, autres que la cale de chargement, où ils auront placé du sel. »
- Adopté.
M. le président. - Comme il y a eu des amendements, le second vole aura lieu après-demain.
Demain séance publique à midi. Discussion du budget de la justice, et s’il y a lieu, discussion des budgets des finances et de l’intérieur.
M. Verhaegen. - Le rapport du budget des finances n’est pas distribué.
M. le président. - On propose d’attendre la distribution du rapport sur le budget des finances avant d’en fixer la discussion.
M. de Brouckere. - Il est probable que le budget de la justice prendra toute la séance de demain.
M. le président. - Si la séance n’était pas remplie, je proposerais des feuilletons de naturalisation. (Adhésion).
M. le ministre des finances (M. Mercier) - L’époque avancée de l’année, ne permettant pas de discuter le budget des travaux publics avant le 1er janvier, le Roi m’a chargé de prés enter à la chambre une demande de crédit provisoire.
Le projet de loi est ainsi conçu :
« Art. 1er. Il est ouvert au département des travaux publics un crédit provisoire de 2,002,524 fr, à valoir sur l’exercice 1844. »
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. »
- La chambre donne acte à M. le ministre de la présentation de ce projet de loi, en ordonne l’impression, la distribution et le renvoie a la section centrale chargée de l’examen du budget des travaux publics.
La séance est levée à 5 heures.