(Moniteur belge n°46, du 15 février 1843)
(Présidence de M. Raikem)
M. Kervyn procède à l’appel nominal à midi et quart.
M. Scheyven lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. Kervyn fait connaître les pièces qui ont été adressées à la chambre.
« Le sieur Frédéric Philips, fabricant de tabacs, à Liège, né Zalt-Bommel (Pays-Bas) demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« Le conseil communal de Ninove présente des observations concernant le projet de loi sur la circonscription cantonale. »
- Renvoi à la commission chargée d’examiner le projet de loi sur la circonscription cantonale.
« Plusieurs propriétaires de Mons demandent une majoration de droits à l’entrée des bois sciés venant de l’étranger. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur les droits d’entrée.
« Les membres de l’administration communale de Maeseyk présentent des observations contre l’art 8 du projet de loi sur la répression de la fraude, article adopté par la chambre. »
M. Huveners. - Messieurs, par la pétition dont on vient de faire l’analyse, le conseil communal de Maeseyck expose que depuis l’exécution du traité de Londres, cette ville se trouve dans la plus fâcheuse position ; qu’aux termes de l’art. 179 de la loi générale, tout commerce en gros y est interdit, et qu’il ne lui reste que le petit débit journalier.
L’administration de la ville de Maeseyck s’est adressée en vain au gouvernement, afin que l’exception de l’art. 178 de la loi générale fût rendue applicable à cette localité, située d’un côté à plus d’une lieue de la frontière, tandis que de l’autre côté elle en est séparée par la Meuse, qui certes présente une barrière plus insurmontable à la fraude que la distance voulue par la loi.
Elle demande donc que les bénéfices que l’art. 8 du projet accorde aux villes fermées et aux places fortes situées à plus de 5,000 mètres de la frontière, soient étendus aux localités qui se trouvent séparées du territoire étranger par un fleuve ou une rivière d’une largeur de plus de 60 mètres.
J’ai l’honneur de demander que cette pétition reste déposée sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur la répression de la fraude, et d’appeler toute l’attention du gouvernement sur la position exceptionnelle de la ville de Maeseyck et sur la pétition que, dans sa sollicitude le conseil communal de cette ville vient de nous adresser ; car si le gouvernement doit rechercher les moyens de réprimer la fraude, il a un autre devoir aussi impérieux à remplir, c’est de rendre le commerce possible, c’est de donner toutes les garanties désirables à l’honnête commerçant, c’est d’adoucir autant que possible le sort des habitants du rayon réservé qui ne sont que trop à plaindre, c’est de prévenir toute gêne, tout embarras qui ne soit pas strictement nécessaire et réclamé dans l’intérêt général, c’est surtout de punir sévèrement toute espèce de vexations de la part de ses subordonnés.
Je demande le dépôt de la pétition sur le bureau pendant la discussion du projet de loi qui nous occupe.
- Cette proposition est adoptée.
« Il est fait hommage à la chambre, par M. Oseray, homme de lettres, d’un opuscule, relatif à l’ancien duché de Bouillon. »
- Dépôt à la bibliothèque.
M. Delfosse. - Je demanderai à M. le ministre de l’intérieur pourquoi il ne fait pas publier les nominations des bourgmestres et échevins. Il est possible, il est probable même que nous aurons des interpellations à lui adresser au sujet de ces nominations et il doit sentir que nous ne pourrons les faire que lorsqu’elles nous seront connues officiellement.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Il est toujours entré dans mes intentions de faire insérer les nominations dont il s’agit dans le Moniteur. Ces nominations peuvent être considérées sous deux rapports : sous le rapport politique et sous le rapport local. Quant à ce dernier rapport, tout ce que l’intérêt local exige est fait, c’est-à-dire que, dans chaque commune, les nominations sont connues. Si au contraire, ou veut considérer ces nominations sous le rapport politique, il faut que toutes soient publiées ; il fallait donc que toutes fussent faites avant une insertion quelconque au Moniteur ; sans cela il serait impossible de les considérer dans leur ensemble. Il entre dans mes intentions de faire insérer prochainement au Moniteur toutes les nominations, province par province.
M. Lebeau. - Messieurs, sous quelque rapport que l’on envisage ces nominations, il importe que le public et les chambres en soient instruits. Un prédécesseur de M. le ministre, l’honorable M. de Theux, lors de la mise à exécution par la loi du 30 mars 1836, s’est empressé de publier, non pas in globo, mais à mesure qu’elles étaient faites, par province, les nominations de bourgmestres et d’échevins. J’ai même eu l’occasion de constater qu’il ne s’est pas écoulé trois jours et souvent pas plus de 24 heures entre la date où les arrêtés avaient été revêtus de la sanction royale et la publication par le Moniteur.
A cette occasion il me sera peut-être permis, messieurs, d’émettre un doute (ce n’est qu’un simple doute). Je ne sais pas si la publication au Moniteur suffit. D’après les termes de la constitution, je ne suis pas bien certains si la publication dans le Bulletin Officiel n’est pas rigoureusement nécessaire en ce qui concerne certaines parties des fonctions exercées par les administrations locales, notamment celles qui ont rapport à l’état civil. J’ai dernièrement relu le texte de la constitution et la discussion qui se rapportent à cette question, et je suis tenté d’en conclure que la nomination d’un fonctionnaire exerçant une juridiction, donnant le caractère authentique à leurs actes, ne peut avoir d’effet sans qu’elle ait été publiée dans le Bulletin Officiel. Je ne fais ici, je le répète, qu’émettre un doute, et les précédents sont même contraires à l’opinion vers laquelle j’incline. En effet, jusqu’ici l’on n’a pas publié ces sortes de nominations dans le Bulletin Officiel ; on s’est borné à les insérer au Moniteur qui n’a aucun caractère officiel, légalement parlant.
Quant à l’insertion au Moniteur, je demande que l’on se conforme aux précédents posés par l’honorable M. de Theux. Il a souvent fait publier les nominations des bourgmestres de toute une province, 24 heures après qu’elles étaient signées.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Voici, messieurs, ce qu’a fait l’honorable M.de Theux : il a, en effet, fait insérer les nominations au Moniteur, dans un très bref délai ; mais il a reconnu les inconvénients de cette manière de procéder car il y a eu des refus et il est inutile de mettre le public dans ces sortes de confidences. Par suite de ces inconvénients toute publication de nomination de bourgmestre ou d’échevins a été abandonnée ; vous savez tous que le Moniteur ne publie plus aucune nomination de cette espèce, depuis les nominations générales de 1836.
C’est dans cet état de choses que j’ai trouvé le ministère de l’intérieur. Depuis 20 mois il a été fait un grand nombre de nominations et d’après les errements consacrés, ces nominations n’ont pas été insérées au Moniteur. Il s’agit donc de changer les errements de l’administration, de faire de nouveau les publications. C’est ce que je me propose de faire ; je me propose d’insérer au Moniteur toutes les nominations, aussitôt qu’elles seront toutes faites et qu’on pourra, par conséquent, les juger dans leur ensemble.
J’examinerai aussi s’il ne faudrait pas, à l’avenir, publier les mutations qui surviennent dans les collèges des bourgmestres et échevins.
Quant au Bulletin officiel, si ma mémoire est fidèle, on n’y a jusqu’ici inséré aucune nomination ; je me propose aussi d’insérer au Bulletin officiel les nouvelles nominations, c’est une période nouvelle qui s’ouvre, et je désire que le commencement de cette période soit bien constaté. Nous verrons s’il faudra ensuite insérer soit au Moniteur soit au Bulletin officiel, les mutations partielles.
M. Fleussu. - Je suppose que, lorsque M. le ministre de l’intérieur publiera les nominations des bourgmestres, il fera connaître en même temps quels sont les bourgmestres pris en dehors du conseil.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Chacun recherchera quelles sont les nominations faites en dehors du conseil, mais le gouvernement ne peut pas, dans la partie officielle du il, dire qu’un tel est bourgmestre nouveau ou un tel bourgmestre ancien, qu’un tel est pris dans le sein du conseil, un tel en dehors du conseil. Toutefois, j’examinerai s’il y a lieu de donner une espèce de statistique générale sans noms propres dans la partie officielle du il ; je me demande, du reste, si l’on veut transporter l’administration dans la chambre.
M. le président. - La discussion continue sur l’art. 27, ainsi conçu :
« Art. 27. Dans tous les cas de fraude, la complicité sera punie comme la fraude même.
« Les condamnations à l’amende et aux frais seront toujours prononcées solidairement contre les délinquants, les complices et les personnes civilement responsables. »
M. Demonceau a proposé de remplacer cet article par la disposition suivante :
« Par extension de l’art. 207 de la loi générale, ceux qui seraient convaincus d’avoir participé comme assureurs, comme ayant fait assurer, ou comme intéressés d’une manière quelconque à un fait de fraude, seront passibles des peines établies contre les auteurs. »
M. le ministre des finances a déclaré reproduire la proposition primitive du gouvernement, ainsi conçu :
« Les condamnations à l’amende et aux frais seront toujours prononcées solidairement contre tous les délinquants. »
M. Vanden Eynde. - Messieurs, dans la séance d’hier, l’honorable M. Verhaegen a contesté que les amendes en matière de douane étaient une réparation civile. Si j’avais recours au mode suivi ordinairement pour l’interprétation des lois, mode qui consiste à interpréter les lois par les lois antérieures, j’établirais que les lois françaises en matière de douanes regardent l’amende comme une réparation civile et que la jurisprudence des cours a toujours été uniforme sur ce point ; la cour de cassation de Paris et les cours d’appel de France ont toujours décidé que l’amende en matière de douane est une réparation civile.
L’amende en matière de douane se distingue des amendes comminées par le code pénal, par différents caractères. Ainsi, d’après les lois françaises, l’administration pouvait transiger en ce qui concerne les amendes, chose qui est défendue pour les amendes comminées par le code pénal ; ainsi, pour appliquer les amendes en matière de douane, on n’a pas besoin d’examiner la moralité des faits ; dès que l’administration a prouvé qu’un individu a importé des objets soumis aux droits sans avoir fait sa déclaration, que cet individu ait agi de bonne ou de mauvaise foi, l’amende est applicable ; les tribunaux n’ont pas le droit d’examiner la question intentionnelle.
Mais, il y a plus, messieurs, il y a dans notre loi générale du 26 août 1822, des articles formels qui établissent d’une manière incontestable que l’amende en matière de douane est une réparation civile. D’abord le paragraphe 2 de l’art 23 de cette loi porte : « Dans le cas où les négociants et autres personnes, plus amplement dénommées ci-dessus, seraient repris pour fraudes ou autres contraventions à la présente loi ou aux lois spéciales, et qu’ils voulussent avancer, pour leur justification, que ladite fraude ou contravention aurait eu lieu par leurs employés, domestiques ou ouvriers, sans qu’ils en eussent connaissance ; ces premiers n’encourront pas moins, et sans égard à leur ignorance du fait, l’amende prononcée contre lesdites contraventions. »
Vous voyez, messieurs, que là le maître est rendu responsable des faits de son ouvrier, de son domestique. Cela prouve déjà que l’amende est une réparation civile. Mais il y a plus encore ; l’art. de la même loi générale permet à l’administration de transiger sur les amendes. Cependant, l’art. 73 de la constitution confère au roi le droit de grâce, le droit de réduire la peine ou d’accorder remise de la peine entière ; l’amende comminée par la loi du 26 août 1822 ne peut donc pas être considérée comme une véritable peine ; car, s’il en était ainsi, l’art. 229 de la loi de 1822 constituerait une infraction à la constitution.
Il résulte ainsi de la combinaison de cet article avec l’art. 73 de la constitution que l’amende, en matière de douane, est une simple réparation civile.
Pour un autre caractère encore, l’amende comminée par la loi en matière de douane, doit être envisagée comme une réparation civile.
Vous savez, messieurs, que les peines font l’objet d’une action publique ; elles ne peuvent être appliquées par les tribunaux que sur la réquisition du ministère public.
Or, d’après l’art. 247 § 4 de la loi générale, l’amende en matière de douane est prononcée par les tribunaux sur les simples conclusions de l’administration ; dans cet article même, la loi générale a si bien distingué entre la peine proprement dite et l’amende qui n’est qu’une réparation civile, que chaque fois qu’il s’agit d’appliquer aux fraudeurs la peine de l’emprisonnement, la loi a exigé que l’application de cette peine soit faite à la réquisition directe du ministère public, tandis que l’amende est prononcée à la simple réquisition de l’administration, le ministère public entendu.
Cette distinction prouve encore une fois que l’amende comminée par la loi générale est une véritable réparation civile.
Messieurs, il est encore un autre article de la loi générale qui vient appuyer l’opinion que je défends. C’est l’art. 311, § 2. Cet article statue que l’amende est formée par le montant des droits et des accises dus pour l’objet fraudé ; de manière que l’article déclare positivement que l’amende n’est autre chose qu’une réparation vis-à-vis de l’administration pour des faits commis par des fraudeurs.
L’art. 314, § 2, porte :
« De même, partout où le montant des droits et accises se trouve fixé comme amende, cette fixation se rapporte uniquement aux droits et accises, et ne comprend point les centimes additionnels ni le droit du syndicat. »
Ainsi, l’amende est formée par le montant des droits et des accises dus pour l’objet fraudé.
Messieurs, il résulte de ces diverses citations et des arguments que je viens d’avancer, que la section centrale, en proposant l’article 27, a étendu la responsabilité civile à d’autres cas que ceux prévus par la loi générale, et qu’elle n’a pas introduit un principe nouveau ; elle a simplement appliqué les principes proclamés par toutes les lois de douanes qui ont régi la Belgique. Voilà, messieurs, ce que j’avais à dire sur la question soulevée par l’honorable M. Verhaegen.
Une autre question a été soulevée à l’égard du même article, par l’honorable M. Orts.
L’honorable M. Orts a prétendu que les faits de complicité commis en matière de douane, étaient régis par l’article 60 du code pénal.
Je crois qu’en avançant cette doctrine, l’honorable membre n’a pas réfléchi que l’art. 484 du code pénal établit d’une manière positive que ce code n’est pas applicable aux matières spéciales qui sont réglées par des lois spéciales.
Messieurs, en supposant même que cela pût être contesté, il y a encore un autre argument qui établit d’une manière évidente, à mon avis, que la disposition de l’art. 60 du code pénal ne peut en aucun cas être appliquée à la complicité en matière de douanes.
L’art. 207 de la loi générale a prévu les cas de complicité. Or, il est de principe en jurisprudence que les lois spéciales dérogent à la loi générale.
Je dis que l’art. 207 a prévu le cas de complicité ; voici cet article :
« Art. 207. Si, par l’instruction d’une affaire de la nature de celles auxquelles les dispositions des deux premiers paragraphes de l’art. 205 et celles de l’art. 206, sont applicables, il conste que les délinquants se sont laissés séduire ou employer sous promesse d’une récompense extraordinaire, ou de toute autre manière, par des personnes tierces appréhensibles dans le royaume, ces dernières, si elles soit reconnues coupables, de ce chef, en justice, seront également soumises aux peines prononcées par lesdits articles, et, en pareil cas, il sera laissé à l’arbitrage du juge, de mitiger la peine portée contre les premiers, suivant que ceux-ci auront plus ou moins contribué à la découverte ou conviction obtenue à l’égard des autres ; sauf toutefois que cette peine ne pourra être réduite à un emprisonnement moindre d’un mois. »
Il est bien clair que le législateur s’occupe du fait de complicité en matière de douane ; or, ce procès étant réglé par une loi spéciale, il est évident qu’on ne peut pas avoir recours à la loi générale, pour l’interpréter.
Ensuite, il y a une considération très puissante pour écarter la disposition de l’art. 60 du code pénal. Si vous deviez appliquer l’art. 60, vous devriez examiner la question de moralité, car le fait de complicité constituerait alors un des délits prévus par le code pénal ; or, en matière de douanes, l’administration n’est pas obligée de rechercher la moralité du fait, il suffit qu’elle en prouve la matérialité.
Je pense donc que l’honorable M. Orts a eu tort de soutenir un principe qui ne se justifie ni par le code pénal, ni par la loi générale. J’ai dit.
M. le ministre des finances (M. Smits) - J’avouerai, messieurs, que c’est avec quelque hésitation, avec quelque méfiance que je me hasarde de répondre à l’opinion d’un jurisconsulte, sur une question de droit aussi controversée que celle dont il s’agit ; mais, quelle que soit la valeur de celle qui vient d’être émise par l’honorable M. Vanden Eynde, elle me paraît, dans tous les cas, être trop exclusive dans cette circonstance.
L’honorable membre ne veut attribuer aux amendes, en matière de douane, qu’un caractère purement de réparation civile ; il leur ôte entièrement le caractère de peine, chose que nous ne pouvons pas admettre, comme étant à la fois contraire, dans notre opinion, et à la loi générale, et à la jurisprudence des tribunaux.
L’honorable préopinant a cité à l’appui de son opinion l’art. 231 de la loi générale ; mais, messieurs, lorsque l’art. 231 condamne certains particuliers, certains industriels comme civilement responsables, de quels industriels a-t-on entendu parler ? On a entendu parler des brasseurs, des distillateurs, des raffineurs ; en général, de tous les industriels qui, d’après nos lois, sont assujetties aux droits d’accises, et qui, trafiquant chez eux ou par eux-mêmes, doivent être considérés, par la nature même de leur industrie, comme délinquants.
Ainsi, un brasseur, un distillateur serait nécessairement civilement responsable, si son domestique refusait aux employés de l’administration des douanes de faire les exercices prescrits par les lois. Voilà des cas où des particuliers sont responsables ? Ils sont encore responsables dans le rayon des douanes, alors qu’ils se refusent à se soumettre aux visites des employés ; mais dans tous les cas de fraude ordinaire, en matière de douane, c’est-à-dire en cas d’importation, d’exportation ou de transit, les personnes civilement responsables aux termes du droit civil, la responsabilité civile n’existe pas, ou du moins n’a jamais été invoquée par l’administration.
Que les amendes en matière de douane sont des peines, cela me paraît résulter d’une manière évidente de l’art. 207 de la loi générale, portant à son paragraphe 3 que pour les contraventions, fraudes ou délits en matière de droits d’entrée, de sortie et d’accises la loi prononce des peines.
Si, comme le croit l’honorable M. Vanden Eynde, les amendes fixées en matière de douane, n’étaient point des peines et qu’elles constituassent une réparation purement civile, alors, messieurs, les amendes devraient être versées dans les caisses du trésor public ; or, il n’entre pas un centime des amendes dans les caisses du trésor ; une partie du produit des amendes est distribuée entre les employés, une autre partie est versée dans la caisse de retraite. Aussi, il n’y a pas action en réparation civile, puisque le trésor n’en profile pas.
Je crois, messieurs, qu’on a été trop exclusif dans cette question, et c’est précisément parce que la section centrale a été trop loin que nous avons cru devoir proposer à la chambre de supprimer les trois derniers mots de l’article, en sorte que le dernier se réduirait à ces mots :
« Les condamnations à l’amende et aux frais seront toujours prononcées solidairement contre les délinquants et les complices. »
Si l’on ajoutait les mots : « et les personnes civilement responsables », ce serait positivement dire qu’il y a ici réparation civile ; et nous craindrions de compromettre toute l’économie de la loi générale, et, cette économie, il faut la laisser subsister tant que nous ne serons pas parvenus à la révision de la loi générale dans son ensemble. On s’occupe de cette révision ; elle ne pourra être complétée que quand nous saurons par expérience quelles modifications il y aura lieu d’y introduire par suite de nouvelles communications à ouvrir vers la France et vers la Prusse.
Je maintiens donc la proposition de retrancher du dernier paragraphe de l’article les mots : « Et les personnes civilement responsables. »
M. Orts. - Je prie la chambre de vouloir bien fixer un instant son attention sur un point important. C’est que si l’amendement de M. Demonceau était accueilli tel qu’il est formulé sans y ajouter quelque chose, vous tomberiez dans ce danger, que tous les cas de complicité autres que ceux prévus par l’art. 207 de la loi générale et par l’amendement de l’honorable député de Verviers resteraient impunis en matière de fraude. Je ne sais si c’est là l’intention de la chambre. J’espère vous démontrer en peu de mots que tel serait le résultat de l’adoption de la disposition proposée. Il me suffira pour cela de la mettre en présence de l’art. 27 du projet et de l’art. 207 de la loi générale. Que porte l’amendement de M. Demonceau ? Remplacer le § 1er de l’art. 27 par la disposition suivante :
Que dit le § 1er de l’art. 27 qui doit disparaître ?
« Dans tous les cas de fraude, la complicité sera punie comme la fraude même. »
Ainsi, vous faites disparaître ce principe, qu’en cas de fraude, la complicité sera punie comme la fraude même. Et vous le remplacez par la disposition suivante :
« Par extension de l’art. 207 de la loi générale, ceux qui seraient convaincus d’avoir participé comme assureurs, comme ayant fait assurer, ou comme intéressés d’une manière quelconque à un fait de fraude, seront passibles des peines établies contre les auteurs.»
Je ne m’oppose pas cependant à l’amendement de M. Demonceau, par la raison que ce qui abonde ne vicie pas.
Mais, remarquez-le bien : l’art. 207 de la loi générale ne s’occupe que d’un cas spécial de complicité, savoir de celle qui résulte de ce que par promesse extraordinaire ou de toute autre manière, on aurait cherché à séduire des individus pour les déterminer à frauder. C’est le seul caractère de l’art. 207.
L’honorable auteur de l’amendement l’a senti ; il est allé plus loin ; il a dit : Il faut également frapper les individus qui participent au délit comme assureurs, ou comme ayant fait assurer ou comme intéressés d’une manière quelconque à un fait de fraude. Mais comme au ministère public incombe le devoir de prouver, quand il prétend qu’un complice est intéressé, quel genre d’intérêt il a, il pourrait se faire que le ministère public se trouvât souvent en défaut d’atteindre sa preuve à charge de l’individu poursuivi comme complice.
Je pense que nous devons comprendre dans la complicité tous ceux qui participent à la fraude, sans qu’il soit nécessaire que le ministre public prouve le genre ou le degré d’intérêt, qu’y ont les individus qui y prennent part.
Je proposerai donc d’ajouter la disposition présentée par M. Demonceau les mots suivants : « et sans préjudice aux dispositions des articles 59, 60 et 62 du code pénal. »
L’art. 59 punit la complicité comme le délit ; l’art. 60 détermine tous les modes de complicité par coopération et l’art. 62 contient une disposition très importante, puisqu’elle frappe ceux qui sciemment ont recelé tout ou partie des objets obtenus à l’aide du délit de fraude.
Voilà ce que je demande. Je pense que si nous agissions autrement, il pourrait arriver que, devant les tribunaux, on vînt à dire au ministère public : celui que vous traduisez comme complice, est-il dans le cas déterminé par l’article 207 de la loi générale ; dans celui formulé par l’amendement de l’honorable M. Demonceau, et si le prévenu de complicité ne se trouvait ni dans l’un ni dans l’autre de ces cas, on l’acquitterait parfaitement bien, puisque vous auriez fait disparaître le premier paragraphe de l’article 27.
Dans cette chambre, je pense qu’il n’est personne qui veuille laisser impuni le receleur en matière de fraude. On dit vulgairement : pas de receleurs, pas de voleurs, on peut dire avec autant de raison que s’il n’y avait pas de receleurs, il n’y aurait pas de fraudeurs. Il faut donc atteindre celui qui se rend complice de la fraude, soit en y poussant, soit en prêtant son domicile pour servir de réceptacle aux objets fraudés.
Maintenant je ne dirai plus qu’un mot sur l’applicabilité du code pénal. Je maintiens que toutes les fois qu’une loi pénale spéciale ne contient pas de disposition dérogatoire à la loi pénale générale, c’est le code pénal qu’il faut appliquer. En effet, une loi pénale spéciale ne dirait rien de la tentative, de la complicité, de la force majeure à laquelle cède un individu qui dans cette position commet un délit, ne dirait rien enfin de la récidive, de la question de discernement, soutiendra-t-on que dans ces diverses hypothèses vous seriez réduits à dire : comme cette loi pénale est une loi spéciale, qu’elle ne se réfère à aucun des principes généraux du droit criminel, ces principes ne sont pas applicables ? Cela n’est pas possible. Le code pénal est applicable aux lois pénales spéciales toutes les fois que ces lois n’y dérogent pas. On vous en a donné hier une preuve, en vous citant l’art. 5, qui porte que les dispositions du présent code ne sont pas applicables aux contraventions, délits ou crimes militaires. On vous a dit : a contrario sensu, les contraventions, crimes ou délits en matière de lois pénales spéciales, autres que les délits militaires tombent sous les dispositions du code pénal de 1810.
On a cité tout à l’heure l’art. 463 du code pénal, qui est relatif aux circonstances atténuantes, Mais c’est le plus fort argument qu’on puisse apporter à l’appui de mon amendement. L’art. 463 statue que toutes les fois que la peine de l’emprisonnement est portée par le présent code, etc.
N’est-il pas clair que c’est précisément parce que le législateur savait que le code pénal, dans ses dispositions générales, était applicable aux lois pénales spéciales qu’il a voulu que le pouvoir discrétionnaire donné aux juges de réduire les peines fût restreint aux cas prévus par le code, pour que les juges ne puissent pas appliquer à des délits en matière de douane, d’accise ou d’octroi les dispositions de l’art. 463. Si cette disposition que je viens de citer n’existait pas, on appliquerait, à toutes les lois pénales spéciales les dispositions de l’art. 463.
Toutes les fois donc que la loi pénale spéciale ne déroge pas au code pénal, les principes généraux sur la complicité établis dans le code pénal sont applicables, cela me paraît de la dernière évidence.
C’est d’ailleurs l’opinion des meilleurs criminalistes. La plupart des auteurs qui ont écrit sur le code pénal ont soutenu qu’il était applicable toutes les fois que les lois spéciales n’y ont pas dérogé.
Je ne ferai plus qu’une observation sur ce qu’on a dit que l’amende en cette matière spéciale aurait le caractère de réparation civile. M. le ministre des finances me paraît avoir rétabli la question dans son véritable sens. Je vais poser un exemple qui fera voir que l’amende ne peut être envisagée autrement que comme une peine. Le Roi a-t-il le droit de remettre une amende encourue pour un délit en matière de fraude ? Je crois qu’en vertu de l’art. 73 de la constitution, le roi pourrait remettre cette amende si c’est une peine, mais si c’était une réparation civile, je vais vous prouver qu’il ne le pourrait pas.
Aux termes de l’art. 73 de la constitution, il est évident que le Roi ne peut faire remise que de ce qui est véritablement une peine. L’art. 73 est ainsi conçu :
« Art. 73. Il a le droit (le Roi) de remettre ou de réduire les peines prononcées par les juges, sauf ce qui est statué relativement aux ministres. »
Maintenant si vous considérez l’amende comme une réparation civile, le Roi n’aurait pas le droit d’en faire la remise, parce que d’après l’art. 112 de la constitution, vous devriez la regarder comme un impôt, et aux termes de cet article, il ne peut être établi de privilège, d’exemption ou de modération en matière d’impôt que par la loi : Si l’amende est un impôt, le Roi ne peut pas en accorder l’exemption ou la modération. Pourquoi le Roi peut-il accorder une grâce en matière d’amende ? Parce que c’est une peine et non une réparation civile, et que dès lors cela rentre dans l’art. 73 de la constitution.
Un article du code pénal statue qu’en matière de simple contravention de police, l’amende sera toujours prononcée au profit de la commune. L’art. 466 porte : Les amendes pour contraventions pourront être prononcées, depuis un franc jusqu’à quinze francs inclusivement, selon les distinctions et classes ci-après spécifiées, au profit de la commune où la contravention aura été commise.
Ainsi toutes les contraventions quelconques des trois catégories dont parle le code pénal, sont punies d’une amende au profit de la commune. A-t-on envisagé cela comme une réparation civile ? Pas du tout ; il a été soutenu que le Roi avait le droit de faire grâce en matière de contravention. Il y a plus, vous avez la loi générale sur l’octroi. Celle-là porte que l’amende en matière d’octroi se partage entre les pauvres, l’employé et la commune. Eh bien, la question s’est élevée de savoir si cette amende était une peine ou une réparation.
M. le ministre de l’intérieur a fait un travail sur cette matière et prouvé clairement que le Roi pouvait faire grâce pour les amendes en matière d’octroi municipal comme pour les autres. La section du contentieux du conseil communal de Bruxelles a été saisie de cette question qui est très grave, et elle a été d’avis que le Roi avait le droit de grâce. Nous espérons que le Roi ne fera pas un fréquent usage de cette prérogative, parce qu’il en résulterait un grand encouragement pour les fraudeurs et un préjudice notable pour les communes.
Voilà ce que j’avais à dire pour prouver qu’on devait considérer l’amende comme une peine et non comme une réparation civile. Je n’ai rien à ajouter pour appuyer le retranchement des mots « des personnes civilement responsables, » aux termes de l’art. 1384.
M. le président. - L’amendement présenté par M. Orts tend à ajouter à l’amendement de M. Demonceau, après les mots « par extension de l’art. 207 de la loi générale » les mots suivants « et, sans préjudice des dispositions des articles 59, 60 et 62 du code pénal. »
M. Dubus (aîné). - Deux amendements sont présentés à l’article en discussion ; l’un par la section centrale, l’autre par mon honorable ami M. Demonceau.
La section centrale propose une disposition qui met l’amende en matière de douane à la charge des personnes civilement responsables. On a attaqué cette proposition de la section centrale comme contraire aux principes, parce que l’amende est une peine, et que ce ne sont que les frais et les dommages intérêts, et non les peines qui peuvent être mis à la charge des personnes civilement responsables.
Je conviens que l’amende est une peine, que dans toute loi où l’on commine une amende, l’emploi de cette expression implique que l’on commine une peine. Je conviens encore qu’en principe on n’a pas d’action contre les personnes civilement responsables pour recouvrer une amende. De là il résulte seulement qu’a défaut de disposition spéciale dans une loi pénale, les personnes civilement responsables ne pourront être poursuivies pour l’amende. Mais le législateur peut-il, dans certaines matières spéciales, par des motifs particuliers, accorder une action pour l’amende à la charge des personnes civilement responsables ? La législation qui nous a été commune avec la France nous en fournit des exemples ; et tout à l’heure on nous a cité un article de notre loi générale du 22 août 1822, l’art. 231, comme ayant consacré, mais dans un cercle plus restreint que ne l’a fait la section centrale, cette dérogation aux principes : Point de doute donc qu’on ne puisse déroger au principe sus-énoncé, dans certains cas spéciaux, par des motifs particuliers. La question est de savoir s’il y a des motifs suffisants pour y déroger. Puisque c’est une peine, il résulte de là que nonobstant une dérogation semblable, cette peine pourra être remise par le Roi, en vertu de son droit constitutionnel, et que les autres dispositions relatives aux peines y demeurent applicables.
En France, où la loi commine des amendes, non seulement comme en Belgique, mais plus qu’en Belgique, en matière de douane, des dispositions formelles de la loi ont mis le recouvrement des amendes à la charge des personnes civilement responsables. Pourquoi ? Dans le but d’obtenir une meilleure répression de la fraude. On a considéré l’amende comme contribuant à indemniser l’Etat du tort que lui font les fraudeurs. C’est en l’envisageant sous ce point de vue, et d’ailleurs afin d’atteindre le but que je viens d’indiquer, que l’on a rendu dans tous les cas, en matière de douane, l’amende recouvrable à la charge des personnes civilement responsables ; nous devons, me semble-t-il, admettre la même disposition ; car assurément nous voulons, autant qu’on le veut en France, la répression de la fraude.
Cependant je ferai remarquer une différence entre la loi française et la nôtre, en ce qui concerne l’amende comminée par la loi de douane. En France, dans les cas de fraude, il y a toujours amende. Il paraît qu’en Belgique, quand il y a fraude, il n’y a pas d’amende. Il y a bien dans notre loi de 1822 certaines dispositions qui supposent que, quand il y a fraude, il y a amende. Mais quand on recourt à l’article qui concerne la fraude, on trouve qu’elle est punie de la confiscation ; mais on cherche vainement l’amende comminée. Il n’y a d’amendes prononcées que pour certaines contraventions ; c’est là une différence assez notable entre la loi française et la nôtre, surtout si l’on considère que c’est surtout la fraude que l’on doit avoir à cœur d’atteindre.
M. Mercier, rapporteur. - Le projet de loi actuel commine des amendes pour les cas de fraude.
M. Dubus (aîné). - Eh bien puisque maintenant nous comminons aussi l’amende pour les cas de fraude, dés lors nous avons le même intérêt qu’on peut avoir en France à autoriser le recouvrement de ces amendes contre les personnes civilement responsables. L’avantage qui en résultera c’est qu’au lieu d’un débiteur presque toujours insolvable, ou aura dans bien des circonstances un débiteur solvable.
Mais je pense que si l’on admet la proposition de la section centrale, il n’en demeurera pas moins constant que l’amende est une peine, et qu’il pourra, le cas échéant, être fait remise de cette peine par le Roi, conformément à son droit constitutionnel ; il n’en demeurera pas moins constant que le décès du coupable éteint l’action relative à l’amende, puisque le décès du coupable (cela est de jurisprudence) éteint l’action même à charge d’un tiers, même à charge de personnes civilement responsables.
Je viens maintenant à l’amendement proposé par l’honorable M. Demonceau. Cet amendement a pour but d’étendre la disposition de l’art. 207 de la loi générale, qui n’a pas paru assez explicite, et de déterminer d’une manière formelle que « ceux qui seraient convaincus d’avoir participé comme assureurs, comme ayant fait assurer ou comme intéressés d’une manière quelconque à un fait de fraude, seront passibles des peines établies contre les auteurs.» Une disposition semblable se trouve dans la loi française. En France, cependant, on a le même code pénal qu’en Belgique et les mêmes dispositions générales relatives à la complicité. On y a cru prudent, toutefois, de stipuler dans les lois de douanes certaines dispositions particulières contre « tous ceux qui seraient convaincus d’avoir participé à la fraude comme assureurs, comme ayant fait assurer, ou comme intéressés d’une manière quelconque à un fait de fraude. »
Il me semble que nous devons être aussi prudents qu’on l’a été en France, et que nous ne devons pas nous fier aux pénalités des dispositions maintenant en vigueur, et qui vous ont été présentées comme inapplicables, ou insuffisantes. Ce qui donne du poids à cette assertion, c’est qu’on ne pourrait citer l’exemple d’un assureur condamné en Belgique comme complice de fraude. Pour moi, je n’en connais aucun exemple. Il semble dès lors que l’administration n’a pas cru pouvoir trouver dans la loi en vigueur le moyen d’établir ce cas de complicité.
On a paru craindre que par cette disposition on ne restreigne les lois en vigueur au lieu de les étendre, que l’on ne dérogeât aux articles 59, 60 et 62 du code pénal. Telle n’est certes pas la portée de la disposition proposée, telle qu’elle est rédigée, puisqu’elle ne fait qu’étendre la disposition actuellement en vigueur de la loi générale. Ainsi elle n’a pas plus que l’art. 207 de la loi générale, la portée qu’on lui suppose. Sous ce rapport, je ne suis pas touché des observations qui ont été faites. Elles viennent d’ailleurs à tomber, si l’on adopte l’amendement de l’honorable député de Bruxelles, où il rappelle expressément les articles du code pénal qu’il craint de voir abroger, en ce qui concerne la douane.
On a supposé que ces articles ne sont pas applicables en matière de douane. J’avoue que je ne suis pas convaincu qu’il en soit ainsi. J’incline, au contraire, à penser que ces articles étant des dispositions générales, sont applicables dans tous les cas où il n’y pas de dérogation expresse.
On a dit que ces articles supposent la question intentionnelle, qui ne peut être soulevée en matière de douane. Je ferai remarquer que la question intentionnelle, au cas actuel, ne peut être écartée, puisqu’il s’agit de la participation d’un tiers à un délit commis par un prévenu principal. Or la participation au fait d’un tiers, implique toujours la volonté, l’intention. La question d’intention est toujours tranchée, dès qu’on suppose la complicité. Je ne comprends pas de complicité sans intention.
La disposition même de l’art. 207 suppose nécessairement la volonté, et par suite l’intention. Car il parle de délinquants qui se sont laissés séduire ou employer sous promesse ou récompense. Comment ceux qui les ont ainsi séduits, ou qui leur ont fait des promesses pour les déterminer à commettre le délit de fraude, n’avaient-ils pas eu l’intention de participer au délit ?
De même la disposition que propose l’honorable M. Demonceau implique aussi l’intention. « Ceux qui seraient convaincus d’avoir participé comme assureurs, comme ayant fait assurer, ou comme intéressés d’une manière quelconque à un fait de fraude. » Participés comme intéressés. Il faut donc qu’ils soient intéressés ; de manière que cela emporte participation à un fait de fraude. Or, cette participation n’existe pas, s’il n’y a pas eu intention.
En tous cas, messieurs, il me paraît utile de rappeler comme applicables les articles 59, 60 et 62 du code pénal, et c’est par ce motif que j’appuie le sous-amendement en même temps que l’amendement.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, je n’ai pas du tout contesté à la législature le droit de changer la législation et de donner à l’amende le caractère de réparation civile. Certes, la législature peut changer la législation sous ce rapport ; mais ce que j’ai contesté, c’est l’opinion trop absolue de la section centrale, ainsi que celle qui a été émise tout à l’heure par l’honorable M. Vanden Eynde, qui donnent à l’amende ce caractère de réparation civile exclusivement.
D’après la législation actuelle, d’après la jurisprudence des tribunaux et notamment d’après un arrêt de la cour de cassation de Bruxelles, du 3 janvier 1827, l’amende a été et continue encore à être considérée comme peine et pas autrement. Si maintenant on veut en changer le caractère, eh bien ! on pourra le faire lors de la révision de la loi générale.
Mais lui donner ce caractère actuellement, ce serait, je le répète déranger complètement l’économie de cette loi, et cela pourrait, messieurs, donner lieu à beaucoup d’inconvénients. Je persiste donc à demander le retranchement des trois derniers mots du second paragraphe de l’art. 27 proposé par la section centrale.
Quant à l’amendement de l’honorable M. Demonceau, je crois qu’il améliore singulièrement l’art. 207 de la loi générale qui est peu clair et qui, je crois, n’a pas encore reçu d’application quant aux assureurs de fraude. Or, il importe d’atteindre ces derniers et l’on y parviendra peut-être en adoptant l’amendement de l’honorable M. Demonceau, tel qu’il est formulé.
M. Verhaegen. - Messieurs, une extinction de voix ne me permettra que de vous dire quelques mots et je crains fort de ne pas me faire entendre ; je conviens, avec l’honorable M. Dubus, que l’on peut déroger à des principes généraux par une loi spéciale. Toute la question se réduit donc à savoir si dans l’espèce il convient de déroger aux principes du droit commun ; et la négative me paraît évidente : Dans le système de notre législation, telle qu’elle existe et telle que nous voulons la compléter, l’amende reste une peine.
Pour que l’opinion de l’honorable M. Dubus pût être accueillie, il faudrait que, d’après les changements que nous allons introduire dans la législation existante, l’amende ne soit plus considérée comme une peine. Or, elle continue à être considérée comme une peine et je le prouve : S’il y a des circonstances aggravantes, si, par exemple, la fraude se fait en bandes ou au moyen de cachettes, c’est l’emprisonnement qui remplace l’amende. L’amende reste donc une peine dans le sens de la loi qui nous régit. En cas d’insolvabilité, le délinquant est condamné à l’emprisonnement, considéré comme équivalent de l’amende, et encore une fois dans le système de la législation actuelle, l’amende est considérée comme une peine.
Maintenant, messieurs, et je voudrais bien qu’on pût me répondre à cet argument ; car si les honorables membres dont je combats l’opinion, voulaient y persister, ils devraient apporter un changement à l’amendement de la section centrale, si un délinquant meurt avant la condamnation, et s’il laisse des héritiers insolvables, ceux-ci seront-ils condamnés à l’emprisonnement ? On me fait un signe négatif ; cependant les héritiers seraient civilement responsables de l’amende, et à défaut de payer l’amende, on devrait les mettre en prison ; telle au moins, serait la conséquence du système de la section centrale. Il suffit d’exposer ce système pour le saper par sa base.
Messieurs, dans le système de la législation que nous discutons et que vous voulez améliorer, vous avez considéré l’amende comme une peine. Donc, pour rester d’accord avec vous-même, vous ne pouvez pas vouloir que l’on applique l’amende à des personnes civilement responsables.
Si vous adoptez l’opinion de la section centrale, un domestique pourra ruiner son maître, un mineur pourra ruiner son père, sans qu’il y ait la moindre faute à reprocher au maître ni au père. Pareille opinion est-elle admissible ? Mais, me dira-t-on, un maître pourra profiter de la fraude que fera pour lui son domestique, le père pourra profiter de la fraude que fera son fils. Mais, messieurs, s’il en était ainsi, ce ne serait plus comme civilement responsable qu’il faudrait poursuivre le maître ou le père, mais il faudrait le poursuivre comme complice, comme auteur de la fraude.
Ainsi, vous n’avez pas besoin, dans ce cas, de la responsabilité civile, vous n’en avez besoin que dans le cas où le maître n’a aucune connaissance de la fraude de son domestique, où le père n’a aucune connaissance de la fraude de son fils et voyez alors les conséquences ; je suppose qu’un individu demeurant près de la frontière envoie son domestique faire une commission, celui-ci revient et fraude pour son compte, sans que le maître n’en sache rien aux termes de la disposition proposée par la section centrale le maître sera responsable. Est-ce là ce que vous voulez ? Ayez le courage de le dire, si c’est là votre système, je me permets de le qualifier d’exorbitant. Il est d’ailleurs contraire, je le répète, aux principes du droit commun auxquels, il est vrai, vous pouvez déroger, mais auxquels il ne convient pas de déroger pour toutes les raisons que j’ai développées.
M. Demonceau. - Messieurs, je n’ai rien à ajouter à ce que vient de dire l’honorable M. Dubus pour justifier la proposition que j’ai faite. Je n’ai entendu en aucune manière, en faisant cette proposition, restreindre l’application des articles du code pénal en ce qui concerne la complicité ; j’ai voulu lever un doute que j’avais trouvé dans la disposition de l’art. 207 de la loi générale, rien de plus. Et si mes honorables collègues pensent qu’il convient d’adjoindre à mon amendement la proposition faite par l’honorable député de Bruxelles, pour mon compte je m’y rallierai volontiers, parce que je veux rendre la loi la plus claire possible.
Quant à ce qui concerne la proposition faite par la section centrale, je vous ai dit hier que rien ne s’opposait à ce que dans une loi spéciale vous établissiez le principe qu’elle consacre. Mais la question est de savoir s’il convient d’établir ce principe. Je crois que maintenant la loi générale dans ses dispositions telles qu’elles sont conçues aujourd’hui et telles qu’elles sont appliquées par les tribunaux, il convient de ne rien changer ; je pense que cela sera prudent pour éviter à l’administration des procès qui pourraient l’entraîner plus loin qu’on ne pense. Il serait donc préférable de supprimer les mots « et les personnes civilement responsables ». Ainsi, messieurs, toutes les opinions qui se sont fait jour dans cette enceinte pourront se faire jour devant les tribunaux, et ceux-ci verront s’il faut faire application de la loi générale dans le sens que lui attribuent les uns ou dans le sens que lui attribuent les autres.
- La discussion est close.
M. le président. - L’honorable M. Demonceau s’étant rallié au sous-amendement de M. Orts, je mets sa proposition sous-amendée aux voix ;
- L’amendement de M. Demonceau sous-amendé par M. Orts est adopté et remplacera le 1er § de l’art. 27 du projet de la section centrale.
- La suppression au second paragraphe des mots « et les personnes civilement responsables », est mise aux voix, elle est adoptée.
Le second paragraphe ainsi modifié ainsi que l’ensemble de l’article sont adoptés.
« Art. 28. Les deux premiers paragraphes de l’art. 247 de la loi générale sont abrogés.
« Le mot autres, au commencement du 3ème paragraphe du même article est supprimé.
« Si, dans les cas prévus par le deux paragraphes qui précèdent, la marchandise saisie est susceptible de dépérissement, l’administration pourra faire procéder à la vente sur-le-champ. »
- Cet article est adopté.
« Art. 29. Les articles 252 et 253 de la loi générale sont abrogés.
« Toute saisie de marchandises opérées à charge d’inconnus et dont la valeur n’atteindra pas cent francs, sera valable sans jugement, si, dans un délai de deux mois, à partir de la clôture du procès-verbal, il n’a pas été fait d’opposition de la part du propriétaire de ces marchandises.
« Il en sera de même des saisies faites à charge de personnes connues, pourvu que la valeur de la marchandise ne dépasse pas cinquante francs, et que l’administration ne réclame pas l’application de la peine d’emprisonnement ou le payement d’une amende. »
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, la section centrale a admis la rédaction du gouvernement, mais elle y ajoute un paragraphe nouveau pour permettre que la marchandise saisie dans les cas des deux paragraphes précédents et qui serait susceptible de dépérissement, puisse être vendu immédiatement. Il me semble, messieurs, que les deux premiers paragraphes de l’article ne donnent pas assez de latitude à l’administration, notamment quand il s’agit d’une saisie de poisson, par exemple. Il peut arriver qu’on saisisse une quantité de poisson dont la valeur excède 50 ou 100 francs, et dans ce cas, l’administration n’aurait plus aucun moyen de s’assurer des droits acquis au trésor. Il me paraît, d’après cela, qu’il faudrait rendre le troisième paragraphe moins limitatif, L’art. 243 de la loi générale suffit pour les objets de mode, mais il ne s’étend pas aux objets dont je viens de parler, aux objets qui sont susceptibles de s’avarier promptement. Je proposerai, en conséquence, à la chambre de remplacer le troisième paragraphe de la section centrale par une rédaction plus générale, et de dire :
« Par modification à l’article 243 de la loi générale, le directeur ordonnera la vente immédiate de toutes les marchandises saisies susceptibles de dépérir par un dépôt de quelques jours. »
- La proposition de M. le ministre des finances est mise aux voix et adoptée.
L’article ainsi amendé est également mis aux voix et adopté.
« Art. 30. Tout employé démissionnaire ou destitué pour quelque cause que ce soit, sera tenu de rester à son poste jusqu’à ce que sa démission ou sa révocation lui aura été notifiée par l’administration, et devra, avant de le quitter, remettre à son chef immédiat, sa commission, ses armes, boutons, schako et autres signes distinctifs de l’uniforme.
« Toutefois le prix de ses armes, boutons, schako et autres signes distinctifs, si le tout est devenu sa propriété, lui sera payé d’après estimation à faire par l’administration.
« L’employé destitué ou démissionnaire, qui contreviendrait aux dispositions du 1er § du présent article, sera puni d’un mois d’emprisonnement. »
« Art. 31. Les frais de déchargement, de rechargement, de déballage et de plombs, faits par suite de vérification à l’entrée ou à la sortie du royaume et des entrepôts, ainsi que les frais des vérifications qui précèdent la réexportation, sont à la charge des déclarants. »
« Art. 32. Les ouvriers, porte-faix et hommes de peine employés en douane par le commerce, devront être agréés par les directeurs qui auront toujours le droit de les révoquer. »
- Ces trois articles sont adoptés sans discussion.
M. le président. - La chambre passe à l’article additionnel proposé par M. Dubus (aîné), et qui est ainsi conçu :
« Art.... Tout employé de l’administration des douanes qui, directement ou indirectement, aura participé à un fait ou tentative de fraude, soit en aidant ou assistant les auteurs ou complices dans les faits qui l’auront préparé ou facilité, ou dans ceux qui l’auront consommé, soit en se concertant avec les auteurs ou complices, soit en agréant des offres ou promesses ou en recevant des dons ou présents, soit en laissant se consommer la fraude, lorsqu’il pouvait l’empêcher, soit de toute autre manière, sera puni d’un emprisonnement de 2 à 5 ans et, en outre, déclaré incapable à jamais d’exercer aucune fonction publique. »
M. Dubus (aîné). - Pour justifier la proposition que j’ai eu l’honneur de vous soumettre, messieurs, je dois d’abord appeler votre attention sur l’état de la législation actuelle, en ce qui concerne les employés des douanes.
Quant à la loi générale sur les droits d’entrée et de sortie, je n’y ai trouvé d’autres dispositions que celle de l’art. 318, qui est ainsi conçu :
« Les employés devront se contenter des revenus qui leur sont ou seront accordés par nous ; et ne pourront rien recevoir au-delà de ce qui leur est légalement alloué, nonobstant les offres qui leur seraient librement ou volontairement faites à cet égard, ni sous quelque prétexte que ce soit ; le tout sous les peines prononcées par les lois et indépendamment de la destitution, suspension et telles autres dispositions administratives que les circonstances pourront rendre nécessaires. »
Cette disposition, messieurs, ne prévoit point directement les cas prévus par ma proposition, et elle renvoie du reste aux lois : « Le tout, y est-il dit, sous les peines prononcées par les lois. »
Il faut donc recourir aux lois antérieures ; à défaut de loi spéciale, il faut recourir au code pénal. Or, voici les dispositions du code pénal qui sont relatives à la matière :
D’une part l’art. 60 de ce code prescrit de punir comme complice « ceux qui auront, avec connaissance, aidé ou assisté l’auteur ou les auteurs de l’action dans les faits qui l’auront préparés ou facilités, ou dans ceux qui l’auront consommés. »
Cet article punit encore comme complice « ceux qui ont provoqué à l’action qualifiée crime ou délit, ou donné des instructions pour la commettre. »
Voilà pour la participation active ; la peine n’est autre que la peine portée contre l’auteur même du délit, c’est-à-dire dans le cas de la loi actuelle, contre le fraudeur. Ainsi, l’employé prévaricateur qui aurait participé lui même à la fraude qu’il avait mission de réprimer, ne serait pas punie plus sévèrement qu’un fraudeur ordinaire.
D’une autre part, l’art 177 du code pénal porte :
« Tout fonctionnaire de l’ordre administratif et judiciaire, tout agent ou préposé d’une administration publique, qui aura agréé des offres ou promesses, ou reçu des dons ou présents pour faire un acte de sa fonction ou de son emploi, même juste, mais non sujet à salaire, sera puni du carcan, et condamné à une amende double de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues, sans que ladite amende puisse être inférieure à deux cents francs. La présente disposition est applicable à tout fonctionnaire, agent ou préposé de la qualité ci-dessus exprimée qui, par offres ou promesses agréées, dons ou présents reçus, se sera abstenu de faire un acte qui entrait dans l’ordre de ses devoirs. »
Ainsi, si la prévarication de l’employé consistait simplement à s’être abstenu moyennant le prix qu’il aurait reçu, cet employé serait beaucoup plus puni que s’il avait coopéré lui-même activement à la fraude ; il serait puni de la peine du carcan, tandis que dans l’autre cas, il ne serait puni que comme les fraudeurs ordinaires.
C’est donc lorsque le délit serait plus grand que la peine serait moindre, et lorsque l’employé se serait simplement abstenu et serait puni de la peine du carcan, que l’on désire voir rayer du code pénal, et que vous avez, messieurs, effacée déjà vous-mêmes d’un article de la loi générale relative aux droits d’entrée, de sortie et des accises, article dans lequel vous avez, en ce qui concerne les fraudeurs en récidive, remplacé la peine du carcan par celle de l’emprisonnement, qui est beaucoup plus efficace. En effet, messieurs, la peine du carcan qui répugne à nos mœurs, amènerait presque certainement un acquittement devant le jury, tandis que la peine d’emprisonnement sera appliquée toutes les fois que le prévenu sera convaincu.
S’il fallait donc s’en tenir aux dispositions du code pénal que je viens d’indiquer, il y aurait déjà un double motif pour les remplacer par une disposition nouvelle ; d’abord parce qu’il n’y a point d’harmonie entre les peines pour les différents cas auxquels ces dispositions s’appliquent ; en second lieu, parce que pour un de ces cas il y a une peine qui n’amènera point une impression véritable, puisque cette peine répugnant à nos mœurs, amènerait presque nécessairement un acquittement.
Mais il y a des dispositions spéciales antérieures ; et en effet, une loi du 13 floréal an XI, dans son art. 6, a prévu aussi le cas de prévarication des préposés des douanes. Il est ainsi conçu :
« Tous préposés des douanes et toutes personnes chargées de leur prêter main forte, qui seraient convaincus d’avoir favorisé les importations ou exportations d’objets de contrebande, même sans attroupements et port d’armes, seront punis de la peine des fers, qui ne pourra être prononcée pour moins de cinq ans ni pour plus de quinze. Ils seront punis de la peine portée au § 1er de l’article 4 ci-dessus, si la contrebande qu’ils auront favorisée a été faite avec attroupements et port d’armes. »
La peine portée au § 4, est la peine de mort, de sorte que la loi du 13 floréal an XI qui a le même objet que la disposition que je propose, prévoit le cas où les préposés des douanes seraient convaincus d’avoir favorisé les importations ou les exportations, et les punit soit de la peine des fers depuis 5 jusqu’à 15 ans, soit de la peine de mort. La peine des fers n’est plus dans notre code pénal et y est remplacé par les travaux forcés. Cc sont donc encore ici des peines tout à fait exorbitantes et auxquelles il y a nécessité, si l’on veut une répression véritable de cette sorte de délits, d’en substituer d’autres.
Du reste, la loi du 13 floréal an XI, est-elle encore en vigueur ? c’est ce dont ou pourrait douter. Je remarquerai toutefois qu’elle a survécu au code pénal de 1810. Voici en effet ce que porte l’article 484 de ce code :
« Dans toutes les matières qui n’ont pas été réglées par le présent code et qui sont régies par des lois et règlements particuliers, les cours et les tribunaux continueront de les observer. »
Et les orateurs du gouvernement qui ont soutenu la discussion de cet article devant le corps législatif, ont formellement compris les lois de douane parmi les lois et règlements particuliers qui demeureraient en vigueur.
D’après cela, il me paraît qu’on doit tenir que la loi du 13 floréal an XI, qui a été en vigueur en Belgique, puisque la Belgique faisait partie de la France quand la loi a été promulguée, est demeurée en vigueur, si l’on ne rencontre une disposition postérieure publiée en Belgique, qui serait incompatible avec cette loi ou qui l’aurait formellement abrogée. Je confesse que je ne connais aucune disposition semblable.
Et il résulte de la loi française du 21 avril 1818 sur les douanes, que cette loi de l’an XI était aussi considérée comme demeurée en vigueur en France ; car l’article 39 de cette loi française porte :
« Les peines prononcées par l’art. 6 de la loi du 13 floréal an XI, contre les préposés des douanes qui favorisent la contrebande, sont communes à ceux qui, avant d’avoir été rayés des contrôles, seraient surpris portant eux-mêmes de la contrebande. »
Cet article, comme on voit, suppose manifestement que l’art. 6 de la loi du 13 floréal an XI est demeuré en pleine vigueur en France, et en détermine même l’application dans le cas particulier qu’il avait pour objet.
Messieurs, s’il fallait également chercher, dans les lois antérieures sur la douane, des dispositions applicables aux cas pour lesquels j’ai recouru tout à l’heure à l’art. 177 du code pénal, c’est-à-dire, le cas où les employés auraient reçu quelques dons ou présents pour s’abstenir, je trouve une disposition semblable dans une loi sur la douane, publiée aussi en Belgique, la loi du 4 germinal an II, dont l’art. 4 est ainsi conçu :
« Si les préposés des douanes reçoivent directement ou indirectement quelques récompenses, gratifications ou présents, ils seront condamnés aux peines portées par le code pénal contre les fonctionnaires qui se laissent corrompre. »
La peint comminée par le code pénal d’alors, est la dégradation civique ; c’était donc encore une peine criminelle.
Quant à moi, j’ai pensé qu’il fallait se borner à comminer une peine correctionnelle ; j’ai pensé aussi qu’une disposition du code pénal nous indique en quelque sorte la peine applicable.
J’ai proposé d’appliquer ici la peine portée par l’art. 171 du code pénal. Les articles 169, 170 et 171 du code pénal sont relatifs aux percepteurs, aux commis aux perceptions et à tous les comptables publics, qui auraient détourné ou soustrait des deniers publics, etc., qui sont entre leurs mains en vertu de leurs fonctions.
L’employé qui a mission de réprimer la fraude et qui, au contraire, la favorise, me paraît pouvoir être tout à fait assimilé au percepteur qui a mission de recevoir et de conserver les deniers publics et qui les détourne.
La peine comminée contre le percepteur, est graduée dans les articles 169, 170 et 171, selon l’importance de la somme soustraite.
L’art. 171 porte :
« Si les valeurs déterminées ou soustraites sont au-dessous de trois mille francs, la peine sera un emprisonnement de deux ans au moins et de cinq ans au plus, et le condamné sera de plus déclaré à jamais incapable d’exercer aucune fonction publique. »
Il m’a paru qu’une semblable peine était tout à fait suffisante, et je crois aussi qu’elle amènera une répression efficace, si tant est qu’il doive se rencontrer des employés prévaricateurs,
Quant à la première partie de l’article, elle a pour objet de déterminer dans quels cas la peine sera applicable. Je n’ai pas adopté le libellé de l’art. 6 de la loi du 15 floréal an XI, qui m’a paru extrêmement vague. La peine était portée contre tout préposé convaincu d’avoir favorisé les exportations ou les importations. J’ai cru qu’il était utile d’entrer dans quelques développements pour préciser de quelle manière l’employé avait favorisé les importations où les exportations.
J’ai donc proposé d’appliquer la peine à l’employé qui aura participé à un fait ou tentative de fraude : c’est là l’expression qui domine soit l’article, soit l’énumération : « soit en aidant ou assistant les auteurs ou complices, etc., soit en se concertant avec les auteurs ou complices, soit en agréant des offres ou promesses ou en recevant des dons ou présents, soit en laissant se consommer la fraude, lorsqu’il pouvait l’empêcher, soit de toute autre manière. »
La peine n’est applicable que lorsque par l’un ou l’autre de ces moyens, l’employé a participé à un fait ou tentative de fraude ; ce qui, comme je le disais tout à l’heure, implique nécessairement la question intentionnelle.
Ainsi toutes les énonciations de l’article sont dominées par celle- ci : que l’employé aura participé à un fait ou tentative de fraude. Je crois que l’article ainsi expliqué ne peut donner lieu à aucun abus dans son application. Je pense que dans tous les cas où par l’un ou l’autre des moyens indiqués, l’employé aura participé à un fait ou à une tentative de fraude, il méritera bien la peine que l’article commine ; quant à une peine plus forte, je craindrais qu’elle ne fût pas appliquée. S’il fallait déclarer un pareil fait un fait criminel, et prononcer des peines exorbitantes comme sont celles qui sont portées par les lois que j’ai citées, les peines ne seraient pas appliquées.
- L’amendement est appuyé.
M. Cools. - Je demande s’il ne faudrait pas étendre cette disposition aux brigades mixtes qui servent également à la répression de la fraude, concurremment avec les employés de la douane.
Des membres. - Les brigades n’existent plus.
M. Cools. - Alors mon observation tombe.
M. Demonceau. - Il peut se faire que dans des circonstances données, il y ait des brigades mixtes ; mais alors comme tous les individus faisant partie de ces brigades sont commissionnés, ils tombent sous l’application de la disposition proposée par l’honorable M. Dubus.
L’amendement de M. Dubus aîné est mis aux voix et adopté.
La chambre passe à l’art. 33 du projet de la section centrale. Cet article est ainsi conçu :
« Art. 33. L’art. 224 du code pénal est applicable à l’outrage fait par paroles, gestes ou menaces, aux agents de l’administration des douanes et accises dans l’exercice de leurs fonctions. »
M. le président. - Reste le dernier article (art. 41), du projet du gouvernement, article dont la section centrale propose la suppression. Quelqu’un demande-t-il la parole sur cette proposition ?
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, la section centrale propose la suppression de l’art. 41 qui est ainsi conçu :
« Toutes les dispositions légales en vigueur, non spécialement abrogées par les présentes demeurent maintenues. »
Nous croyons utile de maintenir cet article en présence de tant de dispositions diverses que contient la loi générale. Si nous ne le maintenions pas, nous courrions risque de ne pas avoir des moyens coercitifs suffisants pour réprimer la fraude. Il y a une foule de cas pour lesquels il est important d’exprimer cette réserve dans la loi.
M. Mercier, rapporteur. - La section centrale avait considéré cet article comme inutile, mais non comme pouvant nuire. Puisque M. le ministre pense qu’il peut en résulter quelques inconvénients, je crois devoir renoncer à la proposition de le supprimer qu’avait faite la section centrale.
M. Savart-Martel. - Messieurs, lors de la discussion de la loi sur les vins, et lors de la convention avec l’Espagne, j’ai dit et répété, qu’entourée de voisins puissants, rivaux et jaloux de nos industries, la Belgique ne devait compter sur aucune concession avantageuse ; par voie de conséquence, et comme tous ou presque tous les membres de cette chambre, je me suis donc présenté avec la ferme volonté d’assurer au moins nos marchés intérieurs aux produits de notre pays.
Mais, je le dis à regret, plus nous avancions dans la discussion, plus je vis d’imperfection dans le projet qui nous est soumis.
Imposer de nouvelles gênes au commerce, tel est le seul résultat de la loi ; je me trompe, il en est encore deux, c’est d’augmenter singulièrement le pouvoir discrétionnaire de l’administration douanière, et d’ajouter à la loi monstre de 1822 de nouvelles complications.
Le principe que dans tout le pays le transport des marchandises doit être justifié par des passavants, dès qu’elles sont soumises à des droits d’entrée ou de sortie, s’applique en fait à toute ou presque toutes les marchandises.
Il est rigoureux, la nécessité me le faisait admettre ; mais après avoir écrit que les exceptions seraient exactement établies par la loi, art. 3, et après avoir effectivement indiqué ces exceptions, article 10, la pénultième finale de ce même article laisse à l’administration de la douane une latitude qui facilite la règle qu’une loi expresse serait nécessaire pour créer des exemptions.
On est d’accord que le cas de force majeure ne peut être imputé aux cautions ou consignataires, art, 6, et on refuse de l’écrire dans la loi.
On accorde à l’administration communale le droit de déléguer un préposé, là où il n’y a point de bureau, pour décharger les acquits ; on ne prévoit pas le cas d’absence de ce préposé, et on refuse à l’administration qui peut déléguer le droit de faire elle-même la décharge.
L’article 8, qui permet à l’administration de refuser la circulation aux marchandises étrangères dont les acquits auraient plus d’un an de date, a une immense portée, car cet article frappe de prohibitions et met irrévocablement hors du commerce les marchandises entrées depuis plus d’un an, quoiqu’il fût justifié de l’acquit des droits.
J’y vois des difficultés d’exécution inextricables et une rétroactivité odieuse, en ce qui concerne les marchandises étrangères qui déjà existent en Belgique.
S’il est vrai que, sur ma demande, l’art. 10 ait été augmenté d’un paragraphe qui laisse au gouvernement un pouvoir (dont il peut user ou non) pour le cas de changement de domicile ou de déménagement, il reste vrai que les effets des voyageurs, leurs habillements, voire même les effets les plus indispensables, n’ont aucune exemption dans la loi.
Il reste vrai que l’exemption accordée aux menus comestibles et denrées, n’a lieu qu’au profit des habitants.
En vain dit-on que, suivant les localités et les circonstances, l’administration pourra, dans l’intérêt de l’industrie, du commerce, des fabriques ou de l’agriculture, étendre l’exemption à d’autres denrées ou marchandises. C’est là une violation manifeste de l’art. 3, qui accroît le principe qu’il n’y aura point d’exception que celle exactement établie par la loi.
Ce que le pouvoir exécutif même ne pourrait ordonner, on le laisse à l’administration.
Des établissements industriels existaient avant 1822 sur le territoire qu’on a réservé depuis lors ; et à la volonté du gouvernement ils seraient fermés, ruinés et annihilé pour la plus légère contravention, sans que vous permettiez même aux tribunaux d’apprécier les circonstances.
La raison qu’on a donnée à cet égard est remarquable, elle est déplorable et souverainement injuste.
C’est, dit-on, que le gouvernement est plus à même que les tribunaux d’apprécier l’utilité de cette suppression ; voilà donc ce qu’on considérera : non la gravité de la fraude ou de la contravention, mais l’intérêt de la douane.
Quant à l’intérêt du père de famille qui sera vexé et ruiné pour une peccadille, on ne s’en inquiétera point, on ne le mettra point dans la balance. Cependant la suppression d’un établissement antérieur à la loi de 1822, d’un établissement érigé sous la foi d’une entière liberté, est une peine ; les tribunaux seuls peuvent donc l’appliquer.
Il paraît qu’en matière de douane, les plus grands principes ne méritent aucun respect.
Mais ce qu’il y a de plus déplorable, c’est la faculté (art. 15), laissée aux employés de l’administration, de pénétrer de jour, comme de nuit, sans aucune autorisation ou assistance, même hors du territoire réservé dans tel domicile que ce soit, sous prétexte d’y avoir vu introduire des marchandises poursuivies. Ce droit odieux qui ouvre aux derniers agents du fisc à toute heure, à tout moment la demeure du père de famille, et qui permettra à pareil employé de visiter tous les coins et recoins d’une habitation, sans la moindre garantie, n’a jamais existé, même sous les droits réunis. Par cet article on s’est trop occupé des fraudeurs, et pas assez de ceux qui ne fraudent point. Je ne retracerai point ici les graves inconvénients de ce droit de visite à domicile, ni les rixes, les excès, les malheurs que je prévois, j’en appelle à vos réflexions, et à la possibilité de son exécution, chez chacun de vous à la campagne surtout. J’avais invoqué le grand principe constitutionnel, portant que le domicile est inviolable, qu’il ne peut être fait aucune visite que dans le cas prévu par la loi et dans les formes quelle prescrit, pour démontrer non pas que jamais on ne puisse faire de visite domiciliaire ; mais au moins il fallait respecter le principe et suivre les formes qu’avait même consacrées la loi de 1822, mais on s’est mis à côté de la question pour me répondre.
Si le mépris des principes les plus élevés, si l’odieux des mesures laissées à la fiscalité amenaient un grand bien dans l’intérêt commercial, on pourrait peut-être s’en consoler, mais il n’en est rien.
La majorité des chambres de commerce avait rejeté l’ensemble du projet ; celles même qui l’adoptaient ne l’avaient fait qu’avec des modifications qui ont été rejetées.
Cette loi ne contentera peut-être.
Ni le commerce d’Anvers qui ne connaissant que ses intérêts ne sont point suffisamment protégés contre le trafic interlope, ne trouvera aucune amélioration sensible dans la loi nouvelle, mais de nouveaux embarras en pure perte ;
Ni le commerce de Gand qui voulait l’estampille et la visite intérieure ;
Ni Liége, ni Saint-Nicolas qui, au lieu de nouvelles gênes, voulaient une augmentation du personnel douanier ;
Ni Bruges qui voulait, à juste titre et presque uniquement, que le zèle des employés saisissants reçût sa récompense immédiate ;
Ni Verviers, dont les produits si dignes d’une haute protection n’obtiennent rien par la loi nouvelle, ou fort peu de chose ;
Ni Bruxelles, ni Louvain qui ont en horreur les gènes, embarras et formalités de la douane, auxquelles ces villes ne sont guère habituées ;
Ni Mons, ni Charleroy, qui ont prévu que la loi nouvelle, malgré ses mesures vexatoires et presque impraticables, n’atteindrait point le but désiré ;
Ni Ostende, dont la chambre de commerce a déclaré le projet gênant et nuisible pour un port de mer ;
Il ne contentera ni le commerce d’Ypres, ni celui de Courtray, qui ont fortement désapprouvé les innovations en proclamant l’insuffisance de la loi, et qui, au lieu d’un essai, ont demandé de refondre la loi pitoyable de 1822 ;
Ni enfin le commerce de Tournay, qui s’est plaint de l’omnipotence de la douane, susceptible de mille abus, au moyen de termes élastiques ; qui trouve d’une sévérité inadmissible la suppression des fabriques ou débits pour un seul fait de contravention, comme aussi la peine d’emprisonnement pour de simples dépôts.
Je crains, je le répète, que ce nouvel œuvre ne contentera aucune localité et en mécontentera beaucoup, surtout lors de l’exécution.
On nous dit, il est vrai, que c’est à titre d’essai ; mais une loi générale à titre d’essai, c’est une anomalie, c’est un non sens ; c’est avouer une faiblesse qui ne doit pas exister. Le commerce ne réclame point d’essai, il ne vit pas de provisoire, il lui faut une bonne loi, une loi qui ait de l’avenir ; sinon mieux vaut il attendre. Il n’est permis de faire d’essai que là où il n’y a rien à perdre ; experimentum in animâ vili.
Une loi générale doit être immuable. Si l’on en prévoit l’inutilité ou l’insuffisance, mieux vaut-il s’en abstenir. Le commerce n’a rien à gagner à cette législation qu’on fait défait et refait périodiquement, de manière que les citoyens ont à peine le temps de connaître leurs droits et obligations.
J’avais eu l’espoir de voir accueillir le vœu émis par la chambre de Courtray pour une loi d’ensemble qui comprit tout le système ; l’essai qu’on nous propose ne peut qu’éloigner le terme de cette loi nécessaire au pays.
Aujourd’hui, le citoyen, l’administration et les tribunaux auront à consulter non plus seulement la déplorable loi de 1822, mais la loi nouvelle et les lois intermédiaires qu’il faudra faire coordonner, enfin tant d’écritures qu’il y en aurait à suffisance pour chauffer un four.
Ce qu’il faudrait, c’est une loi courte et claire, composée de trois chapitres, exigeant à peine 30 à 40 articles, au lieu de 4 à 500 qui nous régissent en ce moment, et qui vont s’augmenter encore de la loi qu’on nous donne à titre d’essai.
Le premier aurait établi le principe que toute provenance de l’étranger serait prohibée, sauf les rares exceptions à faire spécifiquement dans la loi, des tarifs qui grèveraient, suivant les temps et les circonstances, les marchandises étrangères reconnues nécessaires ou utiles.
Le 2ème chapitre aurait traité des droits et obligations des citoyens et de la douane.
Le 3ème aurait traité des pénalités.
Dans mon opinion, la prohibition eût été la règle ; la loi générale eût été immuable ; les tarifs seuls, contenant les exceptions, auraient pu varier.
Et, pour donner main-forte à cette législation, j’aurais doublé le personnel inférieur de l’administration, de manière à faire autour de notre pays une espèce de cordon sanitaire.
Que nous donne-t-on aujourd’hui ? Une loi qui, au lieu de protéger le commerce, va doubler, tripler les entraves ; une loi qui expose les habitants à des contraventions dont ils ne se doutent point. Cette loi sera mise à peine à exécution que les réclamations surgiront de toutes parts.
Contre la vexation possible, on oppose, il est vrai, la bienveillance, la sollicitude du fisc, que dis-je ? sa tendresse pour le contribuable. L’honorable M. Cogels a suffisamment répondu à cette tendresse du fisc pour les contribuables ; il a consulté les entrailles du fisc, il les mis à découvert ; il n’y a rien trouvé de paternel.
D’ailleurs l’homme du fisc, faisant son devoir consciencieusement, doit être esclave de la loi. Laisser entre ses mains des mesures arbitraires, c’est le gêner lui-même.
Le ministère n’est, pas plus que nous, désireux de vexations ; mais, par la force naturelle des choses, il doit abandonner l’exécution à des employés très subalternes. On ne peut point espérer qu’ils aient tous son aptitude ni ses sentiments.
Voyez la loi sur le colportage. Au lieu de s’en servir en faveur du commerce, on tracasse, on vexe d’honnêtes fabricants qui adressent leurs produits dans de petites villes pour être délivrés aux marchands mêmes. De bas employés n’admettent point la différence entre des ventes faites à des marchands et celles qui seraient faites à des particuliers. Que serait-ce d’ailleurs d’un pays où la tranquillité du foyer domestique, la fortune, l’honneur et la liberté d’un citoyen dépendraient du zèle plus ou moins entendu d’un employé très subalterne, souvent dans le besoin, et intéressé à la vexation ?
S’il faut faire un sacrifice, que ce soit au moins en faveur d’une forte loi vraiment utile au commerce. Celle qu’on nous propose ne peut qu’être nuisible ; c’est un palliatif, mais non pas un remède ; c’est un palliatif d’autant plus dangereux, qu’il reculera une loi forte et puissante que nous désirons tous. Il en sera de ce besoin du commerce comme des lois de finances, comme des mesures propres à prévenir les abus du cumul, comme de la révision de la législation des faillites et sursis, comme du code pénal militaire et des autres codes. Le congrès national a déclaré l’urgence ; il nous a ordonné d’y pourvoir de suite, il y a eu douze ans le 7 de ce mois.
Dans l’intérêt même du commercé je voterai donc contre une mauvaise loi pour en obtenir une bonne.
M. le président. - Je mets aux voix l’article 4 du gouvernement qui devient l’art. 34 :
« Art. 34. Toutes les dispositions légales en vigueur non spécialement abrogées par les présentes, demeurent maintenues. »
- Adopté.
M. le président. - Comme il y a eu des amendements, le second vote du projet de loi sur la fraude est remis à jeudi.
M. Zoude, rapporteur. - Vous avez renvoyé à la commission une pétition des marchands d’os de Tournay, avec invitation de présenter un rapport avant la discussion sur les droits de sortie, c’est ce rapport que j’ai l’honneur de présenter.
(Nous donnerons ce rapport.)
M. David m’a chargé de vous faire connaître son opinion relativement à cet objet. Comme son discours est un peu long, je demanderai la permission de le faire imprimer au Moniteur. (Adhésion.)
L’honorable membre se proposait, quand on en serait à cet article de la loi, de proposer un amendement portant le droit à 100 francs. Comme la section centrale n’a fait aucun accueil au droit de 60 francs qu’on avait proposé, pour ne pas perdre le temps de la chambre en discussions inutiles, je me dispenserai de présenter l’amendement de M. David.
M. Zoude, rapporteur. - Vous avez, messieurs, renvoyé à votre commission une pétition relative aux charbons de bois sur laquelle je vais avoir l’honneur de vous présenter le rapport.
(Nous donnerons ce rapport.)
- Conformément aux conclusions de la commission, la chambre ordonne le renvoi de la première pétition à MM. les ministres de l’intérieur et des finances et le dépôt de la seconde sur le bureau pendant la discussion de la loi sur les droits de sortie, et ensuite le dépôt au bureau des renseignements.
M. de Brouckere. - Je demanderai la permission de faire une motion d’ordre. Il serait à désirer qu’on fixât dès aujourd’hui le jour de la discussion de la loi sur les sucres. M. le ministre a demandé qu’on lui accordât pour se préparer, deux jours après la discussion de la loi sur la fraudé. Maintenant je demanderai, dans l’intérêt d’un très grand nombre de personnes qui se rendent à Bruxelles, incertaines du moment où commencera la discussion de la loi sur les sucres à laquelle il leur importe d’assister, qu’on détermine un jour fixe pour cette discussion.
M. le ministre des finances (M. Smits) - La chambre a bien voulu consentir à ce qu’il me fût donné deux jours francs après le vote de la loi sur la fraude, pour examiner le rapport de la section centrale sur les dernières propositions relatives à la question des sucres. Ce rapport a été distribué dimanche ou lundi dernier, et depuis lors, la chambre s’est occupée de la répression de la fraude, de manière qu’il m’a été impossible de me livrer à l’examen de ce long travail. Si la chambre maintient la décision qu’elle a prise, si elle consent toujours à m’accorder les deux jours francs que j’ai demandés, nous arrivons à lundi, car nous sommes mardi aujourd’hui, et après-demain doit avoir lieu le deuxième vote de la loi que nous venons de discuter, Pour prévenir toute nouvelle remise, je demanderai donc que la discussion de la loi sur les sucres soit fixée à lundi.
M. le président. - Si personne n’y fait opposition la proposition de fixer la discussion de la loi sur les sucres à lundi est adoptée.
M. Cools. - On paraît embarrassé pour mettre quelque chose à l’ordre du jour d’ici à lundi ; je ferai observer que nous avons un rapport de M. Mast de Vries sur des créances arriérées. Je demande que ce rapport soit mis à l’ordre du jour après les projets de loi sur les droits d’entrée et de sortie.
M. Mast de Vries. - Ce rapport est plein de chiffres ; il ne pourra pas être imprimé.
M. le président. - Nous passons à l’ordre du jour.
M. le président. - Je demande à M. le ministre s’il se rallie aux propositions de la section centrale
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Ce sont deux dispositions additionnelles que j’ai proposées moi-même, concernant les cuirs et les munitions de guerre.
J’engagerai les honorables membres à avoir sous les yeux les pièces qui leur ont été distribuées relativement au projet dont il s’agit, ils y trouveront le tableau comparatif du tarif nouveau et du tarif ancien des droits de sortie ; ils y verront, par exemple, que les 100 kilogrammes d’alun payent à la sortie 81, 80 c. Je propose de réduire ce droit à 5 c. Les bières en cercle paient aujourd’hui 21, 20 c. Nous proposons de le réduire à 5 c. et ainsi de suite.
Plusieurs membres. - Nous n’avons pas nos pièces.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je regrette que messieurs les membres n’aient pas ce tableau sous les yeux. Toute la question est là.
M. Rodenbach. - Je demande la remise à demain. Nous n’avons pas sous les yeux les documents dont parle le ministre ; il faut pouvoir lire les pièces avant de les discuter.
M. Lebeau. - Je demanderai s’il n’est pas possible de mettre un projet à l’ordre du jour, après le projet de loi que nous venons de discuter, pour employer le temps qui va s’écouler, jusqu’à la discussion de la loi sur les sucres. Si nous ne le faisons pas, il va arriver ce qui a déjà eu lieu l’autre semaine, la moitié de la semaine sera perdue, et cela en présence d’un nombre considérable de projets urgents que nous avons à discuter et dans une session qui devra être abrégée, par cette circonstance que des élections doivent avoir lieu. Si on continue, cette session sera d’une stérilité affligeante. Je demande s’il n’y aurait pas moyen d’utiliser le reste de la semaine, afin de ne pas rester encore trois jours sans rien faire.
Il y a une loi sur les droits d’entrée, le rapport est fait. On dit que si on commence cette discussion. Il est possible qu’on ne puisse pas la terminer avant lundi. J’aime mieux, pour ma part, qu’on commence cette discussion, sauf à la scinder si elle n’est pas terminée avant lundi, plutôt que de perdre le reste de la semaine. Il y va de la dignité de la chambre ; je crois ne pas exagérer en m’exprimant ainsi.
Je demande donc qu’on mette à l’ordre du jour la loi sur le droit d’entrée ou tout autre.
M. Orts - J’en connais une dont le rapport est fait, c’est la loi sur l’augmentation des traitements de l’ordre judiciaire.
M. de Garcia. - Les deux projets de loi indiqués suffisent pour nous occuper d’ici à lundi.
M. Savart-Martel. - Je demande qu’on s’occupe des traitements de l’ordre judiciaire, si on ni peut pas discuter la loi sur les droits d’entrée ;
M. Rogier. - Je m’oppose à la mise à l’ordre du jour du projet de loi relatif à l’augmentation des traitements des membres de l’ordre judiciaire avant le projet de loi sur les sucres. Avant de créer de nouvelles dépenses, il faut songer à créer des recettes ; la loi dés sucres peut avoir cette destination.
Je regrette que M. le ministre des finances ait cru devoir demander un nouvel ajournement. Voilà le vingtième ajournement que l’on demande pour cette loi dont toutes les opinions reconnaissent l’urgence. M. le ministre a demandé deux jours francs pour examiner le rapport très court de la section centrale. En accordant ces deux jours nous pouvons commencer la discussion vendredi prochain. Si l’on aborde la discussion de la loi relative aux droits de sortie, il faudra que le ministre se prépare à la discussion, qu’il étudie ; ainsi il ne pourra pas étudier la loi sur les sucres.
Je propose de revenir sur la décision qui vient d’être prise, et de fixer la discussion de la loi sur les sucres à vendredi, pour que le ministre des finances ait le temps de se préparer. D’ailleurs, c’est une question que M. le ministre des finances a parfaitement étudiée. Ce n’est pas le deuxième rapport de la section centrale qui doit entraver la discussion. M. le ministre des finances entendra sans doute plusieurs orateurs avant de parler lui-même, avant de formuler un système définitif ; car nous ne connaissons pas encore le système du gouvernement. Il faut qu’enfin l’on aborde cette discussion. Beaucoup d’intérêt sont en souffrance. Voilà assez longtemps que nous retardons cette discussion, réclamée par toutes les opinions, par tous les intérêts.
Je demande donc que la chambre revienne sur sa décision, et fixe à vendredi la discussion de la loi sur les sucres.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Je dois réclamer contre l’assertion de l’honorable préopinant. Je n’ai pas demandé divers délais pour m’occuper de la question des sucres. J’ai demandé le temps de répondre au rapport de la section centrale. J’y ai répondu par un travail que la chambre a pu apprécier et qui ne sera pas inutile dans la discussion.
Lorsqu’il y a 15 jours, la loi sur les sucres a été mis à l’ordre du jour pour la séance d’hier, on pensait que la loi sur la fraude ne tiendrait qu’une séance ou deux ; or, voilà la huitième séance qu’on y consacre. Obligé de m’occuper le matin et le soir des affaires du ministère et de donner 5 ou 6 heures par jour à la chambre, qu’il a été impossible d’étudier le dernier rapport de la section centrale. Certes, je ne demande pas trop en sollicitant deux jours francs pour examiner ce travail. C’est aujourd’hui mardi. Après-demain jeudi, deuxième voté de la loi sur la répression de la fraude, qui prendra une ou deux séances. Je n’aurai donc pas même deux jours pour étudier le rapport de la section centrale.
Du reste, je consens volontiers à ce que la discussion de la loi sur les sucres soit mise à l’ordre du jour de vendredi prochain si l’on veut remettre le deuxième vote de la loi sur la fraude après la discussion de la loi sur les sucres.
M. de Garcia. - La loi sur les sucres est une des lois les plus importantes. Je crois que le ministre doit avoir un certain délai pour en apprécier toute l’importance. Cela est d’autant plus important que, par les écrits qu’on a publiés, on a plutôt cherché à embrouiller qu’à éclaircir la question ; car je crois que cette matière pourrait être présentée sous un point de vue beaucoup plus simple qu’elle ne l’a été.
Je suis étonné d’entendre proposer de revenir sur une décision qui a été prise. On paraît être d’accord pour s’occuper cette semaine des deux projets de loi sur les droits de sortie et d’entrée, projets qui doivent être votés le plus tôt possible. Nous arriverons ainsi à la fin de la semaine ; il n’y aura pas eu de temps perdu. M. le ministre des finances aura eu un délai convenable pour étudier une question aussi grave que celle des sucres, et lundi nous pourrons abréger la discussion de cette loi.
M. Rogier. - Je ferai observer que M. le ministre consent à ce que la discussion soit fixe à vendredi. Je n’ai fait ma proposition que parce que j’ai vu qu’on était embarrassé pour remplir les séances jusqu’à lundi. Nous reconnaissions l’importance d’utiliser nos séances jusqu’à lundi, si nous ne nous occupions pas de la loi sur les sucres. M. le ministre adhère à ma proposition ; il consent à l’ajournement du deuxième vote de la loi sur la répression de la fraude. Il me semble que dès lors tout le monde doit être d’accord.
M. Delfosse. - Je crois, comme l’honorable préopinant, que la proposition de M. le ministre des finances est de nature à rallier toutes les opinions ; M. le ministre des finances demande deux jours francs pour étudier le rapport de la section centrale sur la loi des sucres, il est juste de les lui accorder, et il les aura si la loi des sucres est mise à l’ordre du jour de vendredi et si le second vote de la loi sur la répression de la fraude n’a lieu qu’après le vote de la loi des sucres. Il n’y a nul inconvénient à différer de quelques jours le second vote de la loi sur la répression de la fraude, puisqu’il se passera plusieurs semaines avant que le sénat soit réuni. L’honorable M. de Garcia propose de ne commencer la discussion de la loi des sucres que lundi prochain et de discuter, en attendant, la loi sur les droits d’entrée Je. ferai remarquer que cette dernière loi est de nature a soulever des questions très graves, M. le ministre des finances devra les étudier et alors il n’aurait pas, d’ici à lundi, les deux jours qu’il demande pour étudier le rapport de la section centrale sur la loi des sucres ; il est temps, messieurs, d’en finir avec la loi des sucres, il n’y a déjà eu que trop d’ajournement.
Je demande donc, comme M. le ministre des finances et comme l’honorable M. Rogier, que la loi sur les sucres soit mise à l’ordre du jour de vendredi prochain.
M. Eloy de Burdinne. - Si l’on met à l’ordre du jour la discussion du projet de loi relatif aux droits d’entrée, M. le ministre des finances devra prendre part à la discussion ; il ne pourra donc se préparer à la discussion de la loi sur les sucres, et cette discussion devra être postposée. Je demande donc que l’on ne mette à l’ordre du jour que des projets de loi dont le ministre des finances n’ait pas à s’occuper.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Il ne s’agit que des droits de sorties sur lesquels tout le monde est d’accord. Je regrette que l’on n’ait pas les pièces ; on aurait voté la loi aujourd’hui.
M. Savart-Martel renonce à la parole.
M. Dubus (aîné). - La proposition qui est faite tend à renvoyer à une époque indéfinie le deuxième vote de la loi de répression de la fraude. Ce long intervalle entre le premier et le deuxième vote peut présenter des inconvénients. Nous avons eu une discussion extrêmement longue. Maintenant cette matière est présente à nos esprits. Dans quelques semaines, cette impression sera effacée ; la discussion va recommencer. Je préférerais que le deuxième vote eût lieu de suite.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Soit !
M. le ministre des finances (M. Smits) - Il serait préférable, sans doute, de s’occuper immédiatement du deuxième vote de la loi de répression de la fraude, parce que les dispositions de cette loi sont présentes à l’esprit de tout le monde. Dans ce cas, je demanderai que la discussion de la loi sur les sucres soit fixée à samedi.
M. le président. - Il est impossible que le projet de répression de la fraude, avec les amendements, soit imprimé pour demain.
Plusieurs membres. - Eh bien, que ce soit mis à l’ordre du jour de la séance d’après-demain.
M. Osy. - Nous pourrions mettre à l’ordre du jour de la séance d’après-demain le projet de loi relatif aux péages sur l’Escaut.
M. le ministre des finances (M. Smits) - J’avais proposé de mettre la loi des sucres à l’ordre du jour de vendredi mais dans ce cas le deuxième vote de la loi sur la fraude aurait été renvoyé après la loi sur les sucres.
Maintenant on demande que l’on s’occupe immédiatement de la loi sur la répression de la fraude. Je conviens que c’est utile, parce que la discussion est présente à l’esprit de tout le monde. Mais dans cette hypothèse, je prie la chambre de décider que la discussion de la loi sur les sucres soit mise à l’ordre du jour pour samedi.
Si la chambre vent mettre aussi à son ordre du jour le projet de loi relatif aux péages de l’Escaut, il n’y aurait aucun inconvénient à maintenir pour lundi la discussion de la loi sur les sucres, car la semaine serait dans ce cas utilisée dans son entier.
M. Demonceau. - Nous discutons beaucoup pour gagner un jour ; car la différence entre samedi et lundi n’est que d’un jour.
On parle de s’occuper immédiatement du second vote du projet de loi relatif à la répression de la fraude. Mais il est possible qu’en rapprochant les dispositions de ce projet de loi de celles de la loi générale, le gouvernement reconnaisse la nécessité de répéter certaines dispositions de la loi générale. Je crois qu’il est nécessaire que M. le ministre des finances fasse faire cette comparaison avant le vote définitif. Je ferai remarquer que cette loi n’est pas moins importante que celle des sucres. Je pense donc qu’il conviendrait de renvoyer le second vote à vendredi.
Vous pensez que le projet de loi sur les droits de sortie contentera tout le monde ; mais il est possible qu’il y ait des objections. Il est avantageux sans doute à certaines industries, soit ; mais il est préjudiciable au trésor. Je vois toujours que l’on se presse de voter les lois qui réduisent les revenus du trésor. Malheureusement on n’a pas le même empressement pour les lois qui peuvent augmenter les ressources du trésor.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - C’est pour cela qu’il faut voter la loi sur les sucres.
M. de La Coste. - Le projet de loi relatif aux péages de l’Escaut peut, comme dans les sections, donner lieu à de longues discussions.
Cette loi n’a donc pas d’urgence, parce qu’il a été décidé que la chambre devrait s’occuper de la révision. Elle reste en vigueur quand même la chambre ne s’en occuperait pas. Le délai fixé n’est pas un délai fatal pour le remboursement du péage, c’est simplement un délai dans lequel la discussion peut avoir lieu. Ainsi, je le répète, il n’y a point urgence.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, je ne puis admettre la dernière opinion exprimée par l’honorable préopinant. Il est dit dans la loi qu’avant le 1er juin de cette année la législature sera saisie d’un projet de loi tendant à examiner s’il faut ou non maintenir le bénéfice des remboursements en faveur des pays avec lesquels il ne sera pas intervenu d’arrangements de commerce ou de douane. Le gouvernement a rempli cette obligation. Si la session actuelle était close sans que la chambre eût statué sur le projet de prorogation, la loi du 5 juin 1839 n’en subsisterait pas moins.
M. de La Coste. - C’est ce que j’ai dit.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Vous me pardonnerez ; si je vous ai bien compris, vous avez dit qu’il fallait que la chambre statuât d’ici au mois de juin. (Interruption.)
En un mot, messieurs, c’est une loi comme celle dont le gouvernement en France, dont le gouvernement en Belgique doit saisir la chambre, lorsque dans l’intervalle de deux sessions, on fait un changement au tarif des douanes. Il faut que dans la session suivante on saisisse la chambre d’un projet destiné à remplacer l’ordonnance ; mais si la chambre ne statue par sur le projet, l’ordonnance n’en subsiste pas moins.
Si cette opinion est admise, il n’y a pas urgence pour que la chambre s’occupe, même dans cette session, du projet relatif au péage de l’Escaut. Mais je tenais à faire cette observation pour qu’il n’y eût ni surprise ni malentendu.
M. de La Coste. - Je demande la parole pour un fait personnel.
M. le ministre a paru combattre mon opinion, mais il a émis précisément les arguments que j’avais fait valoir et sur lesquels je m’étais fondé pour établir qu’il n’y avait pas urgence.
M. de Mérode. - Messieurs, si on ne doit pas s’occuper du projet relatif au remboursement du péage sur l’Escaut, il me semble qu’on peut fixer la discussion du projet de loi sur les sucres à vendredi, comme l’avait proposé d’abord M. le ministre des finances.
On dit qu’un retard d’un jour n’est rien. Mais un jour est beaucoup ; car une session se compose de jours, et nous en perdons une quantité. Nos séances sont très courtes ; le samedi on part de bonne heure ; le lundi on vient très tard, de sorte que nous n’avons de véritables séances que quatre jours par semaine, et encore ne peuvent-elles souvent commencer à l’heure indiquée.
Quant à moi, je tiens à ne pas perdre un jour ; je pense qu’il faut arriver le plus tôt possible à la discussion de la loi des sucres ; qu’on la commence vendredi, si c’est possible ; sinon, samedi. Nous ne pouvons encore avoir des jours sans séances ; car plus on s’absente, plus on veut s’absenter.
M. Cools - Messieurs, quant à moi, de toutes les propositions qui sont faites, je donne la préférence à celle qui doit amener le plus promptement possible la discussion de la loi sur les sucres. Messieurs, nous avons besoin de ressources, tout le monde en convient, et nous ne faisons rien pour nous en procurer. Nous sommes saisis d’une dizaine de projets d’impôts nouveaux ; le rapport sur un seul de ces projets est fait, et je ne sais par quelle fatalité, la discussion en est toujours retardée.
Messieurs, je crois que si nous ne pouvons commencer cette discussion vendredi, il vaut l’aborder samedi. M. le ministre veut examiner le rapport de la section centrale ; eh bien, il en aura le temps, surtout si nous retardons le second vote du projet relatif à la répression de la fraude. Si on ne commence pas cette semaine la discussion de la loi sur les sucres, on s’en ira à la fin de la semaine et peut-être ne serait-on pas en nombre lundi. J’insiste pour qu’on fixe cette discussion à samedi prochain,
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, comme la loi sur la répression de la fraude ne peut-être imprimée pour demain, on pourrait s’occuper du second vote de cette loi après-demain et commencer samedi la discussion du projet de loi sur les sucres. (Oui ! oui !) J’en fais la proposition formelle.
M. Osy. - D’après les explications qui ont été données par M. le ministre de l’intérieur, je retire ma proposition de mettre à l’ordre du jour le projet de loi relatif au remboursement du péage sur l’Escaut.
- La chambre fixe à samedi la discussion du projet de loi sur les sucres, et à jeudi le second vote du projet de loi relatif à la répression de la fraude.
M. le président. - Je proposerai de fixer la séance de demain à une heure, pour que les commissions puissent travailler plus longtemps.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Ne pourrait-on ouvrir aujourd’hui la discussion générale du projet de loi relatif aux droits de sortie ?
Plusieurs membres. - Oui ! oui !
M. le président. - La discussion générale est ouverte.
M. Rogier. - Messieurs, dernièrement une pétition nous est arrivée de la part des briquetiers de Boom, de Niel et autres communes de la province d’Anvers. Cette pétition avait pour but de demander une augmentation de droits à l’entrée des tuiles étrangères et une diminution de droits à la sortie des tuiles indigènes. M. le rapporteur de la section centrale m’a dit qu’il n’avait pas eu cette pétition.
M. Zoude, rapporteur. - Je viens encore d’en parler à M. le greffier. Une seule pétition nous est arrivée de Boom, elle tend à obtenir une augmentation de droits à rentrée des tuiles hollandaises ; mais je ne me rappelle pas d’y avoir rien vu qui fût relatif aux droits de sortie. Du reste, demain, je ferai mon rapport sur cette pétition.
M. Rogier. - Si M. le rapporteur vent bien nous faire demain son rapport sur cette pétition, je n’ai plus rien à dire. Je prierai cependant le gouvernement d’examiner si on ne peut pas admettre une réduction de droits à la sortie des tuiles.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - D’ici à demain j’examinerai quels sont les droits actuels à la sortie des tuiles, et s’il y a lieu de faire une proposition, je la présenterai immédiatement.
M. Desmet. - Messieurs, il est parlé dans le rapport de la section centrale d’une contre-enquête, qui aurait eu lieu relativement à la sortie des lins. Vous savez qu’il y a deux ans une enquête avait été faite sur cet objet par le département de l’intérieur ; elle concluait à l’établissement d’un certain droit à la sortie des fins. Mais aujourd’hui je vois dans le rapport de la section centrale qu’il y a eu une seconde enquête, et que celle-ci conclut qu’il n’y a pas nécessité d’établir de droits la sortie des lins. Je demanderai à M. le ministre de l’intérieur s’il peut nous donner quelques renseignements sur cette seconde enquête, et nous dire comment elle a eu lieu.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je donnerai demain ces renseignements à la chambre. Tout cela peut trouver et trouvera mieux sa place dans la discussion des articles.
M. Hye-Hoys. - Je saisis cette occasion pour demander à M. le ministre de l’intérieur, s’il n’y a pas nécessité d’examiner s’il ne faudrait pas établir des droits à l’entrée du lin.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je ferai remarquer qu’il ne s’agit pas des droits d’entrée en ce moment ; mais seulement des droits de sortie.
M. Hye-Hoys. - Je le sais bien ; mais je demande s’il ne conviendrait pas d’examiner cette question
- La discussion générale est close.
La séance est levée à trois heures trois quarts.