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Chambres des représentants de Belgique
Séance du lundi 21 février 1842

(Moniteur belge n°53, du 22 février 1842)

(Présidence de M. Fallon)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse fait l'appel nominal à 2 heures.

M. Dedecker donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Renesse présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le sieur François Rayner, mécanicien et fabricant de papier à Corroy-le-Grand, habitant la Belgique depuis 1829, demande la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi à M. le ministre de la justice.


« Sept habitants de Fouron-le-Comte à Liége adressent des observations contre le projet contenant des modifications à la loi communale. »

- Renvoi à la section centrale chargée de l'examen du projet de loi.


« Les administrations communales des communes de Baeygem, Grave et Wurste, Melsen, demandent que la commune de Bottelaere soit désignée pour chef-lieu dn canton d'Oosterzeele. "

« Les membres du conseil communal d'Achel demandent que cette commune soit maintenue chef-lieu du canton de ce nom. »

- Renvoi à la commission pour la circonscription cantonale.


« Le sieur Kloth, à Gand, signale une prétendue soustraction d'une lettre contenant 50 francs en billets de banque, affranchie à la poste de Gand, le 31 janvier. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le conseil communal d'Auvelais (Namur) adresse des observations sur la loi relative aux chemins vicinaux. »

M. de Garcia.- Messieurs, la pétition dont on vient de vous faire l'analyse, a trait à quelques dispositions de la loi que nous avons votée sur les chemins vicinaux, dispositions qui souffrent des inconvénients dans l'application.

Je demande que cette pétition soit renvoyée à la commission des pétitions avec invitation de nous faire un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


« Les sieurs Vandenbergh et Vandekerkhove, à Thielt, adressent à la chambre un recueil imprimé de lettres sur l'industrie linière. »

- Dépôt à la bibliothèque et au bureau des renseignements.

Composition des bureaux de section

M. de Renesse, secrétaire, fait connaître la composition des bureaux des sections pour le mois de février :

Première section

Président : Rogier

Vice-président : Verhaegen

Secrétaire : Van Cutsem

Rapporteur des pétitions : Zoude


Deuxième section

Président : Osy

Vice-président : d’Hoffschmidt

Secrétaire : de Villegas

Rapporteur des pétitions : de Garcia


Troisième section

Président : Raikem

Vice-président : Lys

Secrétaire : Huveners

Rapporteur des pétitions : Lange


Quatrième section

Président : Sigart

Vice-président : Jonet

Secrétaire : Cools

Rapporteur des pétitions : de Florisone


Cinquième section

Président : Dubus (aîné)

Vice-président : Duvivier

Secrétaire : Mast de Vries

Rapporteur des pétitions : Morel-Danheel


Sixième section

Président : Vanderbelen

Vice-président : Vandenhove

Secrétaire : Hye-Hoys

Rapporteur des pétitions : de Potter

Rapport sur une pétition

M. Kervyn. - Messieurs, dans la séance du 17 novembre dernier, vous avez renvoyé à la section centrale chargée de l’affaire du canal de Zelzaete une requête des administrations des villes de Deynze et de Nevele, et de treize autres communes qui demandent que le canal de Nevele au canal de Gand à Bruges soit prolongé jusqu’à Deynze, en d’autres termes, que la Lys soit reliée au canal de Bruges, afin d’opérer plus promptement l’évacuation des eaux de la Lys, dont les inondations sont une véritable calamité pour les contrées qu’elle traverse. C’est sur cette requête, messieurs, que je suis chargé de vous présenter des conclusions.

Un des besoins qui se fait le plus sentir dans les deux provinces de Flandre est, sans contredit, celui de préserver l’agriculture du fléau des inondations. Dans d’autres provinces, on demande avec instance le creusement de canaux destinés à l’irrigation des terres ou à la navigation, tandis que dans les Flandres cette branche des travaux publics doit avoir surtout pour but l’assèchement et l’écoulement plus prompt et plus certain des eaux surabondantes. Il serait oiseux de discuter ici les causes qui rendent, d’année en année, les inondations plus désastreuses. On peut les attribuer :

1° aux travaux hydrauliques et de canalisations qui ont été exécutés en France ;

2° aux progrès de l’agriculture, qui par l’entretien mieux soigné des fossés et rigoles, pousse en moins de temps qu’autrefois une plus grande masse d’eaux dans les voies d’écoulement.

3° à l’ensablement successif de nos débouchés à la mer. Quoi qu’il en soit de ces causes et de beaucoup d’autres qui ont déjà été signalées, le mal existe à un très haut point dans les Flandres et fixe l’attention générale. De là est né le projet du canal de Zelzaete, de là encore le projet actuel qui a été approuvé à l’unanimité par le conseil provincial de la Flandre orientale dans sa dernière session, et qui, quoique moins important que le premier, mérite toutefois l’attention du ministre des travaux publics.

Les pétitionnaires commencent par vous exposer le tableau des dégâts qu’ils éprouvent par les inondations de la Lys, principalement dans la partie qui s’étend de Gand à Deynze, et qui a été couverte d’eau à cinq reprises pendant l’année dernière. Ces crues extraordinaires ont lieu à toutes les époques, après le dégel, comme au milieu de la fenaison et de la moisson, au printemps comme à l’automne.

Dans le but d’y porter remède, ils proposent d’achever l’ouvrage commencé en 1751 par Marie-Thérèse et repris en 1829 par le gouvernement précédent, ouvrage qui consiste en un canal de jonction de la Lys au canal de Bruges, qui aurait une étendue de 13,000 mètres.

Il faut remarquer que ce n’est pas un ouvrage nouveau, qu’il est même achevé sur la moitié de son étendue, et que son action serait très efficace, puisque les eaux de la Lys, à commencer de Deynze n’auraient que 5,000 mètres à parcourir, tandis que le parcours actuel est au moins de 40,000 mètres.

Envisageant leur projet de canal sous un autre point de vue, les pétitionnaires le présentent comme pouvant servir de voie de petite navigation, pendant les eaux moyennes.

Quant aux dépenses de construction et de creusement, les pétitionnaires les évaluent à 158,000 fr., et ils se livrent à différents calculs pour prouver que, sous ce rapport, leur projet est encore préférable en ce qu’il rendrait inutiles d’autres travaux à la Lys projetés par le gouvernement, la construction de nouveaux aqueducs, devenus indispensables, etc., et dont le devis est,, d’après les pétitionnaires, de 440,000 fr.

Voilà, messieurs, le résumé de cette pétition. Elle a été également adressée au sénat, qui, dans une de ses dernières séances a ordonné le renvoi au département des travaux publics avec demande de renseignements.

La section centrale pour le canal de Zelzaete, qui a été chargé de l’examiner, ne se croyant pas la mission de se prononcer sur le mérite des vues exposées par les pétitionnaires, se borne également à vous proposer le renvoi au département des travaux publics et le dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget de ce département.

M. Desmet. - Je viens appuyer le renvoi qui vous est proposé ; quand on considère qu'avec une somme de 100,000 fr. on pourra achever un ouvrage qui a un double intérêt et qui est de d'une première nécessité.

Le petit canal dont il s'agit est, d'un côté, d'une grande utilité pour le transport des engrais dans une contrée, qui est essentiellement agricole et qui, en ce moment, est privée de route, voie facile pour le transport.

D'un autre côté ce petit canal, qui sera en même temps un canal de dérivation et de dessèchement, sera de même d'une grande utilité pour faire couler en temps les eaux de la vallée gauche de la Lys entre Deynze et au delà, et Gand, qui souffre annuellement des inondations désastreuses.

Il est un fait constant que l'écoulement par la rivière ne suffit pas, il faut nécessairement qu'il y ait une autre voie qui puisse venir en aide ; celle qu'on vous propose est d'autant plus importante, qu'elle chassera les eaux d'une partie de la vallée de la Lys, sans qu'elles doivent passer par la ville de Gand, qui fait toujours obstacle à un bon écoulement de ces eaux sauvages qui arrivent dans les saisons pluvieuse en grande abondance de France et qui viennent faire des torts considérables sur notre territoire.

- Les conclusions de la section centrale sont adoptées.

Motion d'ordre

Mesures de soutien de l'industrie linière

M. de Roo. - Parmi les pétitions dont on vous a présenté l'analyse, il en est une relative à l'industrie linière ; on demande une loi de protection en faveur de cette industrie.

Messieurs, personne ne peut disconvenir de l'état déplorable dans lequel se trouve cette industrie dans les Flandres ; il est urgent que nous adoptions des mesures à cet égard.

Si ma mémoire est bonne, le 30 avril 1834, la section centrale vous avait proposé une loi sur l'industrie linière. Cette loi était divisée en trois parties. La première partie concernait les droits à établir sur les lins ; la seconde était relative aux fils de lin, et le troisième aux toiles.

C'est cette dernière partie qui a été discutée en 1834. Quant à la seconde partie, celle relative aux fils de lin, on vient de s'en occuper. Reste donc la première partie, celle relative aux lins.

Dans la séance du 9 mars 1841, on a proposé à la chambre un projet de loi séparé relatif aux lins et aux étoupes. Je demanderai à la chambre de bien vouloir mettre à l'ordre du jour cette partie de la loi relative à l'industrie linière, pour être discutée immédiatement après le budget des travaux publics.

M. Delfosse. -Il me semble qu'il serait bon que M. le ministre de l'intérieur fût ici avant de mettre ce projet à l'ordre du jour.

M. Rogier. - Il ne peut être question de changer l'ordre du jour arrêté antérieurement. Il a été décidé qu'immédiatement après le budget des travaux publics on s'occuperait du projet de loi relatif aux indemnités.

M. Rodenbach. - Je pense avec l'honorable préopinant qu'il ne faut pas intervertir l'ordre du jour. Mais je ferai remarquer que voilà plusieurs années que le rapport sur le projet relatif aux lins est fait. Il me semble qu'on pourrait mettre à l’ordre du jour, immédiatement après le projet sur les indemnités, la proposition de loi sur laquelle il vous a été fait rapport par la section centrale.

M. Le ministre des finances (M. Smits) - On a mis à l'ordre du jour, après les indemnités, le projet de loi sur le canal de Zelzaete.

M. le président. - On pourra statuer sur la proposition de M. de Roo, lorsque M. le ministre de l'intérieur sera présent.

M. Rodenbach. – Lorsque M. le ministre de l'intérieur sera ici, nous renouvellerons notre proposition.

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l'exercice 1842

Discussion du tableau des crédits

M. le président. – L’ordre du jour appelle la discussion des articles du budget des travaux publics.

M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Messieurs, dans votre précédente séance, j'ai annoncé à la chambre que je déposerais sur le bureau la carte du projet d'affluents du chemin de fer, qui a été tracé par les fonctionnaires de mon département. J'ai ici des exemplaires de cette carte ; il y en a un pour chaque section, Les honorables membres de la chambre pourront consulter cette carte et je les engage à me transmettre les observations que leur suggérera son examen.

Je joints en même temps une copie du rapport du conseil des ponts et chaussées qui m'a été transmis relativement à cette carte, le 23 janvier dernier. Ces documents resteront déposés sur le bureau pendant la discussion de mon budget.

- Plusieurs membres demandent l'impression de ce rapport.

La chambre décide qu'il sera imprimé.

M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Puisque j'ai la parole, je dirai quelques mots en réponse à la motion que l'honorable M. de Roo a faite dans la séance d'avant-hier.

L'honorable M. de Roo vous a rappelé, dans cette séance, qu'une pétition avait été renvoyée par la chambre au ministre des travaux publics concernant la requête des habitants de Thielt, qui demandent que le chemin de fer passe par leur localité. Messieurs, je me suis fait reproduire cette pétition, et après avoir sommairement examiné la question (car on comprend bien que depuis samedi je n'ai pu l'étudier complètement), je dois dire que si nous en étions encore au principe, c'est-à-dire si nous en étions encore à construire le chemin de fer de Gand sur Ostende et de Gand sur Courtray, bien certainement il faudrait, pour arriver à Ostende et à Courtray, passer également par Thielt.

Thielt, messieurs, forme le centre de gravité d'un triangle presque équilatéral dont les trois sommets sont Courtray, Gand et Bruges. De Gand à Bruges il y a, par chemin de fer, environ neuf lieues, et de Gand à Courtray il y a également à peu près neuf lieues ; cela fait donc 18 lieues de chemin de fer. Si on était allé de Gand sur Thielt et de Thielt sur Bruges et sur Courtray, on n’aurait eu environ que quinze lieues de chemin de fer à construire.

Ensuite de cela, messieurs, les voyageurs venant de Courtray sur Bruges et Ostende n'auraient pas eu à faire comme aujourd'hui un très grand détour par Gand. Il en eût été de même pour les voyageurs venant de Bruges et Ostende allant vers Courtray.

Il est donc bien démontré que si nous en étions encore à construire ces lignes, il faudrait nécessairement passer par Thielt. Mais, aujourd'hui, en présence de l'exécution des embranchements du chemin de fer de Gand sur Ostende et sur Courtray, la question devient beaucoup plus difficile. Il y a à examiner s'il faut laisser les choses dans l'état actuel ou bien enlever une partie du chemin de fer de Gand jusqu'à un point indéterminé entre Bruges et Bloemendael pour l'appliquer, de Deynze par Thielt, sur ce même point entre Bruges et Bloemendael et ensuite enlever la partie construite entre Deynze ct Haerlebeke pour l'appliquer entre Thielt et Haerlebeke ; ou bien enfin si, attendu qu'il n'y a maintenant qu'une seule voie entre Gand et Bruges, et entre Gand et Courtray (je dois cependant faire observer que les terrassements et les ouvrages d'art sont exécutés de manière à y placer deux voies), on ne pourrait pas, avec le concours des localités intéressées, ou par concession, arriver à construire la seconde voie en prenant pour point central Thielt, d'où on se dirigerait sur un point à déterminer entre Bruges et Bloemendael d'un côté, et sur Deynze et Harlebeke des deux autres côtés.

Ce sont là les deux questions qu'il faut établir. Il faut aussi se mettre en rapport avec les localités pour savoir les sacrifices auxquels elles voudraient consentir. Je ne puis, quant à présent, que promettre d'examiner cette affaire avec soin et de faire un rapport à la chambre lorsque l'étude en sera complète.

M. de Roo. - Si j'ai bien entendu M. le ministre des travaux publics, il résulterait de ce qu'il vient de dire qu'une grave erreur a été commise dans la direction du chemin de fer de Gand à Ostende. Il aurait fallu le faire arriver à Thielt et de là à Courtray et à Bruges. Il y aurait eu un bénéfice considérable sur la distance et aussi par suite des relations des communes populeuses qu'il aurait traversées.

Mais, d'après M. le ministre des travaux publics, il y aurait moyen de remédier à la faute que l'on a commise en établissant la seconde voie de fer par Thielt.

M. de Theux. - Cette question doit faire l'objet d'une discussion spéciale.

M. de Roo. - J'attendrai le rapport que nous promet M. le ministre des travaux publics ; j'espère qu'il ne nous le fera pas attendre longtemps. Voilà deux ou trois ans qu'on s'occupe de cette question. J'espère que M. le ministre pourra nous communiquer son rapport dans le courant de celle session.

Chapitre premier. Administration centrale.

Articles 1 à 3

« Art. 1. Traitement du ministre : fr. 21,000. »


« Art. 2. Traitement des fonctionnaires, employés et gens de service : fr. 91,850. »


« Art. 3. Loyer de l'hôtel du ministère : fr. 9,000. »

- Ces articles sont adoptés.

Article 4

« Art. 4. Fournitures de bureau, impression, achats et réparations de meubles, chauffage, éclairage, menues dépenses : fr. 22,000. »

La section centrale propose de porter le chiffre de cet article à 31,600 fr.

M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) se rallie à la proposition de la section centrale.

Le chiffre de 31,600 fr. est mis aux voix et adopté.

Article 5

« Art. 5. Frais de route et de séjour du ministre, des fonctionnaires et employés de l'administration centrale : fr. 6,000. »

Adopté.

Chapitre II. Ponts et chaussées ; canaux, rivières, polders ; ports et côtes ; bâtiments civils ; personnel des ponts et chaussées

Discussion générale

La chambre passe à la discussion du chapitre II.

(Moniteur belge n°54, du 23 février 1842) M. Lange. – Messieurs, un des premiers actes mémorables du congrès national fut le décret du 6 mars 1831, qui fit revivre, quant aux routes pavées et empierrées, la disposition de l’ancienne loi fondamentale de 1815, pour le royaume des Pays-Bas, qui avait été foulée aux pieds par la loi du 27 décembre 1827. Au nombre des dispositions de ce décret se trouve celle-ci :

« Une loi déterminera ultérieurement la classification des routes. »

Voilà bientôt 11 ans, messieurs, que le congrès national a porté le décret dont il s’agit et jusqu’ici aucun projet de loi n’a été présenté en exécution de la disposition de ce décret que j’ai citée. La législature aurait-elle, depuis 1833, décrété l’abrogation de cette disposition ? Non, messieurs, loin de là. Si nous recourons au rapport fait par l’honorable M. de Jaegher dans la séance du 2 mars 1838, au nom de la commission spéciale chargée de l’examen du projet de loi relatif à la taxe des barrières, nous y lirons le passage suivant :

« Une objection contre les baux à longs termes, est basée sur la prétendue imperfection de la classification des routes, et le placement arbitraire des poteaux.

« Les baux une fois passés, dit-on, il ne serait plus question de loi générale, plus question de nouvelle classification des routes, plus question de révision de l'emplacement des poteaux… »

Votre commission n'a d'abord pas pu confondre la classification des routes avec la loi qui détermine le taux de la taxe.

Cette classification doit faire l'objet d'une loi spéciale, tout à fait indépendante qu'elle est de l'impôt.

Dans votre séance du 8 mars de la même année, M. le ministre des travaux publics d'alors, l'honorable M. Nothomb, invité à faire connaître à la chambre s'il partageait sur ce point l'opinion de la commission, s'est exprimée en ces termes :

« Je pense, comme la commission, que la classification des routes est indépendante de la taxe des barrières. Lorsque le gouvernement aura recueilli toutes les données statistiques dont il a besoin et qui sont loin d'être rassemblés aujourd'hui, il procédera à cette classification, comme il y est obligé par l'une des lois du 18 mars 1833 ; car il est à remarquer que l'art. 4 de l'une de ces lois porte : qu'une loi déterminera la classification des routes.

« Je le répète, je suis d'accord avec la commission que la classification des routes est indépendante de la taxe qui est uniforme sur toutes les routes, quelle que soit la classe à laquelle elles appartiennent. »

Ainsi donc, messieurs, le principe fut consacré en 1831, sanctionné de nouveau s'il en était besoin en 1833, reconnu formellement encore en 1838 ; à quoi donc attribuer les longs retards apportés par le gouvernement dans la présentation d'un projet de loi sur la classification des routes ?

Il est vrai que dans cette même séance du 8 mars 1838, M. le ministre des travaux publics d'alors, disait :

« C'est une mesure qu'un de mes prédécesseurs a tentée, il y a quatre ans ; mais il a été reconnu alors que les renseignements étaient loin d'être complets.

« En ce moment (mars 1838), il y a un grand nombre de routes en cours d'exécution ; d'autres ont encore été décrétées cette année ; et ce ne sera probablement que l'année prochaine qu'on pourra songer à l'étude définitive de la classification des routes. »

Il est vrai encore qu'en 1839, le même ministre, répondant à la députation permanente du conseil provincial du Hainaut, qui réclamait que la classification des routes ordonnée et par le décret du 6 mars 1831 et par la loi du 18 mars 1833, eût lieu le plus tôt possible ; il est vrai, dis-je, que le même ministre répondit à cette députation que ce travail, fort délicat en lui-même, n'était pas encore arrivé à un degré de maturité tel qu'il fût possible de soumettre, dans le cours de cette session, un projet de loi à la législature.

En effet, messieurs, la session de 1839 à 1840 s'est écoulée sans qu'un projet ait été présenté ; il en a été de même de la session de 1840 à 1841, en sera-t-il encore de même de la présente session ?

Je n'ignore pas qu'aux termes de l'art. 78 de la loi provinciale, le classement des routes provinciales et de l'Etat, est réglé par la loi, sur l'avis préalable des conseils provinciaux. Je sais aussi que d'après l’art. 41 de la même loi, les conseils provinciaux ne s'assemblent de plein droit, chaque année, que le premier mardi de juillet en session ordinaire ; mais, aux termes du paragraphe de cet article, le Roi peut convoquer ces conseils en session extraordinaire.

J'appelle en conséquence l'attention sérieuse de M. le ministre des travaux publics sur cet objet important, qui doit faire taire les récriminations qui se soulèvent sans cesse au sein de la chambre au sujet de la répartition du fonds destiné à l'entretien, à l'amélioration des routes existantes et à la construction de routes nouvelles ; objet qui doit concilier tous les intérêts ; objet qui doit en un mot, faire la juste part de chacun, selon son droit.

M. Angillis. - Il y a trois ans, messieurs, qu'on a établi une nouvelle route pavée de Roulers à Iseghem. Cette route est une des plus fréquentées de toutes celles qui existent dans la province ; elle complète le système de grandes communications, elle joint la route d'Ostende vers la France par Menin, et celle qui se dirige de Bruges vers le Hainaut par Courtray.

Mais en établissant une route d'une si grande utilité, on a eu la malheureuse idée de ne lui donner qu'une largeur de 3 mètres de pavé ; il en résulte que lorsque deux voitures se rencontrent (chose qui arrive à chaque instant), l'une ou l'autre de ces voitures doit abandonner le pavé ; de là des disputes, des voies de fait, des inconvénients de toute espèce.

Dans la traverse du bourg de Rumbeke, où le terrain est tant soit peu accidenté, on a pavé la route sur la même largeur ; les pluies incessantes de l'été dernier ont rendu les chemins de terre qui se trouvent à côté de la route tellement mauvais que la circulation est devenue extrêmement dangereuse et même impraticable ; dans cet état de choses, j'écrivis à M. le ministre des travaux publics pour lui faire connaître la situation de la route et le danger qu'elle présentait pour la circulation.

Huit jours après, un conducteur des ponts et chaussées se rendit dans la commune de Rumbeke pour constater le fait, et il convint avec moi, que la route devait être élargie d'un mètre, et qu'il fallait établir des rigoles à côté de la route pour faire écouler les eaux pluviales dans le ruisseau qui se trouve un peu plus loin ; on dressa un rapport dans ce sens, qui fut approuvé par l'ingénieur en chef, mais rien ne se fit.

De mon côté, convaincu que lorsqu'on voit une apparence de danger, on doit voir en même temps une pensée de prévoyance administrative, je me suis cru forcé d'ordonner les réparations nécessaires aux frais de la commune.

Il y a là, messieurs, de la part du gouvernement, négligence ; il y a même quelque chose de plus que de la négligence, et que je ne veux pas qualifier.

Pour vous donner, messieurs, une idée des obligations qui incombent au gouvernement, je vous dirai que toute la route, qui a une longueur de une lieue et 1/2 à peu près, a coûté 145,900 fr., y compris les expropriations et que dans cette somme l'Etat n'a payé que 65,900 francs ; de plus, le gouvernement a vendu les parcelles de l'ancienne route que nous lui avions cédées, et il en a retiré une somme de 2,300 fr.

Voilà donc toute la somme payée par le gouvernement ; elle s'élève seulement à 65,900 francs ; la province a contribué dans la dépense pour 25,000 fr., et les trois communes situées sur la route pour 55,000 fr. ; nous avons abandonné la route en toute propriété au gouvernement. Il ne s'agit donc pas ici d'une route communale ou provinciale, mais d'une route gouvernementale, Eh bien, en ce moment, le gouvernement reçoit pour l'argent qu'il y a mis, un intérêt de 9 p. c. Quand on obtient un intérêt aussi énorme, on doit savoir remplir loyalement ses obligations. Je ne peux qualifier une telle conduite, j’abandonne à M. le ministre lui-même le soin de la qualifier.

J’ai deux mots à dire sur un autre objet.

On a placé à la sortie de Rumbeke…, contre une maison d’une assez belle apparence et qui appartient à l’administration charitable. On n’a pas voulu exproprier cette maison, parce que l’on s’est imaginé que l’administration charitable aurait fait démolir la maison pour la faire rebâtir à la distance requise, et ainsi faire disparaître un obstacle permanent à la libre circulation sans bourse délier. L’administration charitable n’a rien fait, et par le roulement continuel des voitures et le choc des brancards et des attirails des voitures attelées de plusieurs chevaux, la maison tombe en ruine ; elle est devenue inhabitable, et depuis un an elle n’est plus habitée. Ainsi, par le fait du gouvernement, l’administration charitable perd un budget de 200 francs par an, et son hôpital périt.

J’ai fait des instances extraordinaires, j’ai écrit, et l’on s’obstine toujours à ne pas exproprier les maisons, parce que l’on s’imagine que l’un ou l’autre jour, le bureau de bienfaisance les fera démolir et rebâtir.

Je dois dire que l’administration charitable n’a pas les moyens de démolir et de rebâtir cette maison, mais elle aura le moyen d’attaquer en justice le gouvernement pour lui faire payer des dommages-intérêts. Je sais que MM. les ministres attachent peu d’importance aux actions judiciaires, parce qu’ils plaident ou font plaider avec l’argent du peuple. Mais ils ne doivent pas oublier que tout procès entre les citoyens et le gouvernement provoque les murmures du peuple ; que les murmures du peuple doit perdre au gouvernement la confiance du peuple, et que la confiance dans le gouvernement, une fois entamée, est détruite.

En me résumant, je demande 1° que M. le ministre fasse élargir d’un mètre toute la route de Roulers jusqu’à Iseghem ; 2° qu’il fasse établir de suite des rigoles dans la traverse du bourg de Rumbeke, et 3° qu’il paie au bureau de bienfaisance de cette commune la somme de 2,000 fr., somme pour laquelle on consentira à laisser démolir la maison, bien qu’elle vaille le double.

Je dois encore faire observer que, dans la transaction que nous avons faite avec le gouvernement, il a été convenu que nous partagerions pendant dix ans les produits des barrières, sauf à déduire les frais de réparation et des améliorations ; or ce sont des améliorations que je réclame ; en les faisant nous payerons les 2/3 dans ces frais, puisque nous avons payé une somme dans cette proportion.

(Moniteur belge n°53, du 22 février 1842) M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - La chambre comprendra que la classification des routes n'ayant jamais été déclarée urgente, je n'ai pas pu m'en occuper, vu le pu de temps que j'ai l'honneur d'être au ministère des travaux publics, où j'ai beaucoup d'autres occupations de toute espèce. Je porterai mon attention sur cet objet le plus tôt possible et j'examinerai s'il y a lieu de faire droit aux observations de l'honorable préopinant.

M. Zoude. - Messieurs, une loi a ordonné que le Luxembourg serait rattaché, par un chemin de fer, aux lignes principales de la Belgique.

Cette loi devait recevoir son exécution dans le Luxembourg comme dans les autres provinces, la direction seule en avait été réservée à la législature. Mais les députés de cette province, mus par un désintéressement qui ne fut guère approuvé par la généralité de leurs commettants, ont eu la pensée généreuse de déclarer à la chambre, qu'effrayés de la dépense dans laquelle cette construction entraînerait l'Etat, ils consentaient à y renoncer, parmi une indemnité bien légère, si on la compare à la somme que le chemin de fer eût coûté.

Cependant, notre renonciation n'ayant été que conditionnelle, la loi subsiste dans toute sa force jusqu'à l'accomplissement de nos conditions, qui n'ont rencontré d'autre opposition à la chambre que celle de l'opportunité, et notre demande fut, d'ailleurs, reconnue comme fondée de tout point.

L'honorable ministre des travaux publics d'alors déclara que si la chambre revenait sur le vote qui a donné une section à notre province, il serait de toute justice d'appliquer à des routes pavées la somme primitivement destinée à la construction d'une section en fer.

L'honorable M. de Brouckere ajouta qu'il était vrai que la chambre avait décidé qu'un chemin de fer relierait le Luxembourg aux grands chemins de la Belgique, mais que les députés y renonçant, il était incontestable qu'une compensation leur était due.

L'honorable M. Dumortier combattit aussi en faveur du chemin de fer que la loi avait décrété pour le Luxembourg.

Enfin, aucun des membres qui prit alors la parole ne contesta la légitimité de notre demande, mais qu'il fallait des renseignements pour apprécier l'importance des routes que nous avions indiquées.

Cette indication, messieurs, nous l'avions faite d'après la connaissance que nous avions des besoins des localités ct de l'utilité qui en résultait pour la Belgique, pour lui fournir, à un prix avantageux pour elle, nos produits nombreux en bois de construction de toute espèce, et en ardoises dont la qualité est au moins égale, si pas supérieure à tout ce que .l'Europe produit de meilleur : nous taisons les autres produits moins importants, nous nous bornons à dire que les routes que nous avons demandées seraient immédiatement utiles aux consommateurs de la Belgique, aux producteurs luxembourgeois et au trésor tout à la fois.

Ainsi, par la construction que nous demandons, il est remarquable que tout le monde y gagnera immédiatement.

Nous sommes cependant loin de ne pas appuyer de tous nos efforts la demande du Limbourg, qui a partage avec nous l'infortune du déchirement, nous appuyons de même celle d'Anvers.

L'honorable M. Doignon vous disait, dans la séance de samedi, que la Campine était une nouvelle province à acquérir ; nous ajoutons que la Campine anversoise, limbourgeoise et le Luxembourg ajouteront un accroissement notable au royaume.

Réduits par le traité de paix à un territoire exigu, nous devons l'agrandir par le développement de toutes nos ressources agricoles et industrielles qui résulteront nécessairement de l'augmentation de la population.

Or, les bruyères qui couvrent une partie des provinces d'Anvers, du Limbourg et du Luxembourg composent la septième partie du royaume.

Dans les provinces du Hainaut et du Brabant on compte deux habitants sur un hectare de terrain ; dans les Flandres il y en a deux et demi sur une même étendue. Ainsi, lorsque les Flandres, sur un terrain donné, comptent plus de six habitants, nos provinces mal traitées n'en ont qu'un. Jugez, d'après cela, messieurs, de l'augmentation considérable que le royaume peut acquérir si, au moyen de routes, les engrais pouvaient aider au défrichement de ces immenses bruyères ; et qu'on ne croie pas que ce défrichement soit une entreprise chimérique, l'expérience s'est chargée de la démonstration de la réussite.

Je connais un petit coin dans le Luxembourg où, au dire des habitants du voisinage, les terres y étaient condamnées à une stérilité perpétuelle ; et en, effet, dans la situation où j'ai connu cette propriété, à peine pouvait-elle suffire à l'entretien d'une ou deux vaches étiques, d'un mauvais cheval, et à la nourriture d'un misérable petit ménage. Eh bien, à la faveur d'un travail guidé par l'étude du terrain et le courage de l'entrepreneur, cette même propriété pourvoit aujourd'hui à la nourriture de plus de 40 bêtes à cornes, à l'entretien de 20 chevaux, un nombreux ménage y vit et vend des denrées. Cependant cela s'est opéré lorsqu'il n'y avait aucune route pavée pour se procurer la chaux, le plus puissant des amendements.

Construisez des routes, vous obtiendrez le même résultat dans toute la province, et la population augmentera dans une progression étonnante, parce que, ainsi que l'a dit Montesquieu, partout où il se trouve une place où deux personnes peuvent vivre commodément, il se fait un mariage.

La nécessité de l'établissement de ces routes résulte, d'ailleurs, de l'influence qu'elles out exercée dans les provinces qui en sont les mieux dotées et où sur 2 à 3,000 hectares, il y a une lieue de chemin pavé, tandis que dans le Limbourg et le Luxembourg, il en existe à peine une sur 6,000. Je dois à la vérité de dire que la province d'Anvers n'est guère mieux traitée ; là on ne trouve qu'une lieue pavée sur 4,800 hectares.

On a demandé avec quels fonds on construirait ces routes. L'honorable M. de Renesse les a trouvées dans l'économie à faire dans les constructions des chemins de fer où le luxe si coûteux n'ajoute rien à la solidité. Il les a trouvés dans la réduction du traitement des employés de ce service, qui sont beaucoup plus fortement rétribués que ceux des autres ministères. Il les a encore trouvés dans les suppressions des frais d’inauguration qui devraient bien être à la charge des villes qui profilent de l'avantage de l'ouverture des sections. Et, à ce sujet, l'honorable M. d'Hoffschmidt nous a fait remarquer que le projet de loi sur les chemins de fer en France établit que les localités intéressées doivent fournir la prestation gratuite des 2/3 de terrain, indépendamment d'un subside en argent ; mais comme nous ne pouvons plus leur imposer cette condition, laissons-leur au moins la part des frais d'inauguration qui devront être considérables cette année, par le nombre et l'importance des sections qui seront livrées à la circulation.

Le même orateur blâme aussi ces stations monumentales, qu’on érige à grands frais et qui n'attirent ni plus de voyageurs, ni plus de marchandises.

En effet, messieurs, ce luxe de monument peut flatter l’ambition de celui qui les a créés, mais le ministre qui se borne à la dépense nécessaire pour assurer la solidité des constructions, et qui emploie le superflu aux dépenses qui peuvent vivifier des contrées abandonnées, ce ministre méritera bien du pays et jouira d’une gloire plus modeste, mais plus durable, celle d'avoir employé productivement les deniers publics qui lui auront été confiés.

On a parlé assez souvent de la part que notre province avait eue dans les emprunts ; mais qu'on veuille y faire attention, le Luxembourg, avant le fatal morcellement, était d'une étendue double de celle de plusieurs autres provinces, et il dépasse encore aujourd'hui de 68,000 hectares la province la plus grande du royaume.

Il est une autre considération bien importante encore, c’est qu’une partie considérable de ce fonds a été employée dans la partie cédée qui n'oubliera jamais le bienfait dont elle a été l'objet ; c’est un monument qui, l'espérons-nous, portera un jour ses fruits, car le temps présent est encore gros de l'avenir, et la reconnaissance se grave profondément dans le cœur des Luxembourgeois ; cet éloge ne sera pas suspect dans ma bouche, je ne suis pas né parmi eux ; mais depuis 40 ans qu'ils m'ont adopté, je le déclare hautement, je n'y ai jamais rencontré qu'un seul exemple d’ingratitude, je dirai même de perfidie, mais c'est une exception unique.

Eh bien, messieurs, après distraction de la part que le pays cédé a obtenue, il ne nous est guère resté dans les emprunts qu'une somme de 1,500,000 francs, et c'est à la demande d'un semblable crédit que nous réduisons maintenant le chiffre que nous avions réclamé de l’équité de la chambre.

Nous le demandons dans l'intérêt du chemin de fer, qui n'a généralement employé jusqu'ici que des billes de bois de médiocre qualité qu'on a déjà dû renouveler plusieurs fois, tandis qu'au moyen de la facilité des communications, il en obtiendra dans le Luxembourg en en bois de chêne qui ne lui coûteront pas plus cher que celles de bois blanc qu'il a été en grande partie forcé d'employer jusqu'ici.

Cette économie est si considérable que je la crois suffisante pour indemniser le trésor de la somme de 1,500,000 francs que nous demandons pour l'achèvement de nos routes ; et lorsque nous aborderons l'article du budget qui concerne le chemin du fer, je prierai M. le ministre de vouloir fournir à la chambre le calcul de cette économie.

Après l'intérêt du chemin de fer ; j'invoquerai celui du royaume entier qui obtiendra promptement pour les nombreuses bâtisses une réduction considérable dans le prix de, nos ardoises dont la durée est séculaire.

M. Rodenbach. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour appuyer ce que vient de dire l'honorable M. Angillis.

Il est très vrai que la route de Roulers à Iseghem rapporte au gouvernement 9 pour cent. Plusieurs de nos honorables collègues demandent en faveur de leurs localités des routes et des canaux. Mais, messieurs, je dois le déclarer, lorsque, dans notre province, et notamment dans le district de Roulers, nous réclamons des routes, des canaux agricoles et autres travaux, nous donnons des subsides considérables. Je pense que cet exemple devrait être suivi dans les autres provinces. C'est aussi, comme l’a dit l'honorable M. Angillis, pour la route dont il s’agit, les trois communes intéressées qui ont fourni 330,000 francs ; et elle n'a coûté que 163,000 fr. Il s'en suit que le gouvernement place en quelque sorte son argent avec usure, puisqu'il perçoit 9 pour cent, ce qui est sans doute un bénéfice quelque peu usuraire.

Messieurs, lorsqu’il y a 3 ans l'honorable M. Nothomb, en sa qualité de ministre des travaux publics, a voyagé dans le district de Roulers, il est convenu que le pavé de trois mètres était trop étroit, qu’il était nécessaire d’y ajouter un quatrième mètre, pour éviter les malheurs, l’écoulement des eaux ne pouvant pas avoir lieu. Il est étrange que lorsqu’une route rapporte à l’Etat 9 p.c., le gouvernement laisse s’écouler trois ou quatre ans sans exécuter une promesse qu’il a faite. J’invite donc M. le ministre à tenir la main à ce qu’on donne une prompte suite à la demande de l’honorable M. Angillis.

La route dont je parle est la plus fréquentée de la province. Il est donc urgent de prendre les mesures nécessaires pour prévenir les malheurs. Le Roi lui-même, lorsqu’il est allé assister à l’inauguration du chemin de fer de Courtray, a été obligé de s’arrêter sur cette route. J’invite donc instamment M. le ministre des travaux publics à faire exécuter promptement ce quatrième mètre. Le devis est prêt.

J’ai dit tout à l’heure que nos localités contribuaient pour de forts subsides dans la construction des routes, canaux, etc. J’en citerai encore un exemple. La seule ville de Roulers a voté une somme de 100,000 fr. pour un canal agricole qui ne doit coûter que 275,000 fr. Quand on vote de 53,000 fr. et des 100,000 fr., on a le droit d’avoir des routes et de canaux.

M. de Man d’Attenrode. - Messieurs, c’est avec étonnement, et sans pouvoir m’en rendre compte, que je vois que le chiffre de l’entretien des routes, loin de diminuer, va toujours croissant. C’est ainsi que le prix d’entretien est augmenté de 250,163 fr. 10 c. depuis 1836.

Cependant l’établissement du chemin de fer ayant réduit à peu de chose le roulage et le service des messageries, le peu d’activité qui règne sur nos grandes routes doit en avoir de beaucoup diminué les dégradations. D’une autre part on procède à présent pour l’entretien au moyen de baux à longs termes reconnus plus avantageux et pour les entrepreneurs et pour le trésor ; ce sont cependant les stipulations nouvelles de ces baux que l’on invoque comme la cause de l’élévation du prix d’entretien, il y a là une contradiction que je ne parviens pas à m’expliquer.

D’ailleurs les stipulations nouvelles ne me semblent avoir produit jusqu’ici aucune amélioration pour l’entretien. Je remarque toujours avec peine que l’entretien des routes de l’Etat se fait mal et en mauvaise saison. J’ai vu l’année dernière commencer les réparations en octobre avec le mauvais temps, j’ai remarqué que l’on pavait dans la fange ; des travaux pareils n’ont aucune durée. Puis les entrepreneurs pour économiser le nombre de pavés à poser, et augmenter leurs bénéfices, ne les serrent pas suffisamment les uns contre les autres. Aussi le premier chariot chargé qui passe a bientôt détruit tous les travaux. Il me semble, cependant, que le voyageur qui parcourt nos routes, en acquittant des péages nombreux, à quelque droit à un bon entretien.

Une section a demandé si le nouveau règlement avait été mis à exécution pour les préposés des bascules ; il s’agit, à ce qu’il paraît, de ne plus les intéresser dans les contraventions.

Quant à moi, je crois le système des bascules très défectueux. On croit avoir remédié au mal en n’intéressant plus les préposés aux contraventions ; qu’en résultera-t-il ? c’est que les contraventions seront moins nombreuses, ne seront-elles pas peut-être trop rares ? car il n’en restera pas moins vrai qu’un préposé faiblement rétribué, qui n’a que 756 francs pour exister, est sans cesse tenté de laisser passer sans contraventions les charretiers surchargés, qui lui offriront des avantages.

Je voudrais un système de surveillance qui se pratiquât en plein air, qui fût patent pour tout le monde, à l’exécution duquel tous les agents de la force publique pussent contribuer. Ce système consisterait à établir une proportion entre le nombre des chevaux et la largeur des jantes des roues. Une proportion sagement établie entre le tirage et la largeur des roues me semblerait suffisante pour prévenir les dégradations, et établirait un mode de surveillance facile.

Messieurs, dans la séance précédente on a rappelé au gouvernement la justice, la convenance d’améliorer les communications de la Campine ; on nous a dit qu’il dépendait de nous de créer une province nouvelle, j’appuie ces demandes de toutes mes forces, j’espère que le gouvernement nous proposera enfin un système de communication en faveur de la Campine. Ce système devant nécessairement se rattacher aux routes des provinces voisines, je me permettrai de signaler à M. le ministre des travaux publics la construction d’une route d’Aerschot vers celle de Diest à Turnhout. Au moyen d’un pavé de 7 kilomètres, Turnhout et la Campine seraient mises en communication avec Louvain, avec Tirlemont et la province de Liège et cela par une route qui va être exécutée d’Aerschot à Tirlemont par la province de Brabant ; cette communication de Turnhout à Aerschot serait plus importante encore que celle de Turnhout à Diest, qui est en construction ; un petit embranchement de 7 kilomètres suffirait, je le répète. Je demanderai à M. le ministre de vouloir prendre note de cette communication, afin qu’elle soit comprise dans le système à créer dans la Campine.

M. de Renesse. - Messieurs, je crois devoir présenter quelques observations sur le rapport déposé par M. le ministre des travaux publics, et qui est relatif à la construction des routes considérées comme les affluents du chemin de fer. Je ne contesterai pas leur utilité, je ne m’opposerai pas à leur construction, mais il me paraît que le gouvernement devrait, avant d’accorder des subsides à ces routes, faire droit aux justes réclamations des provinces ou parties de provinces qui ont peu ou aucun avantage de la route ferrée ; si l’on accordait encore la priorité aux routes considérées comme les affluents des chemins de fer, il en résulterait évidemment, avec le peu de ressources que le gouvernement a à sa disposition, que toutes les autres routes en projet, et réclamées par les besoins de certaines provinces, qui seraient plus ou moins éloignées de la voie ferrée, devraient être indéfiniment ajournées. C’est contre cet ajournement que je viens m’opposer ; il me semble que déjà les localités et les provinces où passe le chemin de fer, ont obtenu d’assez grands avantages pour qu’elles puissent s’imposer actuellement quelques sacrifices, si elles veulent l’établissement de ces routes, se dirigeant vers le chemin de fer ; c’est à elles à se créer les ressources nécessaires et le gouvernement n’y devrait intervenir que pour autant qu’il soit fait droit aux réclamations fondées des localités qui, jusqu’ici, sont froissées dans leurs intérêts, parce que le gouvernement continue d’ajourner les projets qui leur sont véritablement utiles et nécessaires, pour améliorer leur bien-être matériel. Si les provinces qui ont été favorisées sous le rapport de constructions d’utilité publique, doivent encore obtenir, par préférence, les routes qui doivent se diriger vers le chemin de fer, ce serait établir un véritable privilège à l’avantage d’une partie du royaume, tandis que l’autre partie, toujours repoussée dans ses justes demandes, devrait patiemment contribuer dans toutes les charges de l’Etat, sans obtenir aucun avantage pour les sacrifices qui lui ont été imposés depuis 1830.

Si je n’obtenais l’assurance positive que les provinces froissées dans leurs intérêts, par la fatal morcellement de leurs territoires, obtiendront dorénavant une part plus équitable ; en compensation des sacrifices imposés dans les fonds destinés aux travaux publics, je me verrai forcé à regret de voter aussi longtemps, contre le budget des travaux publics, que les griefs de ces provinces existeraient, lorsque surtout le gouvernement leur a promis de réparer leurs pertes, en améliorant leurs moyens actuels de communications. Je ne veux plus continuellement voter des millions à l'avantage d'autres localités, déjà très avantagées, sous tant de rapports, depuis la révolution, lorsque surtout l'on commet l'injustice envers les provinces morcelées, de ne point faire droit à leurs justes réclamations.

M. d’Hoffschmidt. - Messieurs, l'honorable M. Zoude vous a rappelé une proposition que les députés da Luxembourg, auxquels s'étaient joints des députés des provinces voisines, avaient présentée à la chambre, tendant à ce que la promesse qui avait été faite au Luxembourg d'être rattaché au chemin de fer, soit remplacée par une compensation consistant en deux millions de francs pour construction de routes dans cette province.

Sur la demande de quelques membres de la chambre, notre proposition fut renvoyée aux sections. J'ignore ce qu'elle est devenue dans les sections ; ce que je sais, c'est qu'aucun rapport spécial n'a été fait sur la proposition. Nous avons bien vu dans un rapport sur le budget des travaux publics, qu'on avait parlé incidemment de la demande que nous avions faite, mais il me semble que, pour une proposition de cette importance, il serait nécessaire qu'il y eût un rapport spécial avec des conclusions.

Je désirerais donc que cette proposition fût de nouveau examinée, qu'elle fût renvoyée aux sections, que les sections nommassent des rapporteurs, et qu'un rapport spécial, accompagné de conclusions, fût présenté à la chambre. Nous voudrions enfin savoir si cette promesse qu'on a faite au Luxembourg, d'un embranchement du chemin de fer, n'était qu’un leurre, une déception, ou bien si on veut la réaliser au moyen de la modique compensation que nous avons demandée.

Le conseil provincial du Luxembourg a approuvé la demande que les députés de cette province avaient faite. La députation provinciale s'est encore, je pense, adressée cette année à M. le ministre des travaux publics, pour obtenir enfin une solution. La chambre et le gouvernement ne peuvent pas reculer devant cette solution : il faut qu'il y ait solution ; car, on ne peut se le dissimuler, cela causerait beaucoup de mécontentement dans la province de Luxembourg, si on ne daignait pas au moins s'occuper d'une proposition aussi juste, aussi légitime.

Ainsi, je le répète, je demande que notre proposition, telle qu'elle a été formulée en 1840, lorsqu'on a discuté la dernière loi d'emprunts, soit renvoyée de nouveau en sections et qu'elle y soit l'objet d'un prompt examen.

L'honorable M. de Renesse vient de présenter quelques observations concernant les travaux que M. le ministre se propose de faire exécuter pour les routes, qui forment des affluents au chemin de fer. Je pense avec mon honorable collègue qu'il résultera du travail que ces routes, situées dans des provinces déjà extrêmement favorisées par le chemin de fer, seront pour elles une nouvelle faveur et que celles qui en sont éloignées n'en auront presque pas.

Je sens cependant très bien que c'est un moyen de rendre le chemin de fer plus productif. Mais, avant d'en venir là, je demande qu'on fasse droit aux justes réclamations élevées dans cette enceinte et que nous ne cesserons de renouveler en faveur de la Campine et du Luxembourg, que quand on y aura fait droit.

Qu'on nous accorde donc la priorité dans le travail des routes qu'on se propose de faire. Quand on aura accordé au Luxembourg les deux millions pour construction de routes promis, et à la Campine les travaux que tout le monde reconnaît nécessaires et utiles, alors qu'on fasse des routes nouvelles, soit ; nous y consentirons volontiers

Cependant, si M. le ministre venait à s'occuper des affluents du chemin de fer, je lui signalerais un petit bout de route qui serait fort utile, dans les provinces de Liége et de Luxembourg et qui unirait le canton de Vieil-Salm à Verviers où il y aura une station du chemin de fer.

Pour atteindre Vieil-Salm, il n'y aurait que 12,134 mètres de route à faire, savoir : de cette localité à Trois-Ponts**, en suivant le lit de la Salm, où l'on aurait l'avantage de trouver des carrières qui donneraient des matériaux en abondance. Ce travail ne coûterait qu'environ une centaine de mille francs ; ce qui est très peu de chose en raison de l'utilité de cette communication ; car elle rattacherait au chemin de fer un canton très industrieux. Je signale donc cette communication à l'attention toute spéciale de M. le ministre des travaux publics.

M. de Theux. - Je ne réclame pas en faveur de la province du Limbourg la priorité pour des routes dont l'utilité est reconnue. J'imiterai l'exemple du conseil provincial qui, en exprimant ses vœux, s'en est rapporté à la sagesse du gouvernement.

Le gouvernement, dans la construction des routes nouvelles, doit être guidé par deux considérations : d'abord les produits qu'on peut en espérer et ensuite une bonne justice distributive, la nécessité de faire quelque chose pour les localités qui, jusqu'à présent, n'ont rien obtenu. Ces deux considérations, je les recommande à M. le ministre des travaux publics, persuadé qu'il y aura égalité dans la répartition des fonds.

Depuis 1830 jusqu'à présent, le Limbourg n'a obtenu que 11 lieues de routes aux frais de l'Etat. Vous conviendrez que c'est extrêmement peu pour une province qui est pauvre de communications, qui n'est pas industrielle, mais qui est exclusivement agricole. Tout ce que le gouvernement peut faire de mieux dans l'intérêt du Limbourg, c'est la création de communications dont il est dépourvu.

Je réclame donc une faveur spéciale de ce chef pour cette province. J'appuie les considérations qu'ont fait valoir les honorables collègues qui ont rappelé qu'une indemnité a été promise au Limbourg en compensation des sacrifices que cette province a été obligée de subir dans l'intérêt général du royaume.

M. Peeters. - Lorsque, pour ainsi dire, tous les membres de la chambre viennent vous demander des routes, je dois, à mon tour, faire entendre ma voix, car c'est sans doute le rapporteur de la section centrale qui a le plus de motifs à faire valoir pour attirer votre attention sur sa localité. Oui, messieurs, c'est bien contre mon gré que j'ai dû me charger une seconde fois du rapport sur le budget des travaux publics. Cette besogne est un véritable supplice de Tantale pour moi. (Hilarité générale.) Je me trouve au milieu des millions à distribuer sans savoir attraper la moindre part pour la partie du pays que j'al l'honneur de représenter, qui en a un si grand besoin et qui n'a, pour ainsi dire, rien obtenu jusqu’ici. Aussi ai-je dû me rappeler, en me chargeant de nouveau de ce rapport, l'art. 52 de la constitution, que nous avons tous juré d'observer, et qui nous dit que nous représentons le pays et non la localité qui nous a envoyés ici.

J'espère que mes honorables collègues et surtout MM. les ministres voudront bien se rappeler à leur tour qu'ils sont, par conséquent, les représentants de la Campine.

J'ai vu avec plaisir, dans la discussion d'avant-hier, que l'affaire de la Campine fait du progrès ; aussi tous les orateurs ont parlé en faveur de cette localité, et je ne saurais presque rien ajouter à ce que mes honorables collègues et amis vous ont dit pour prouver, non seulement l'utilité, mais la nécessité même de doter de nouvelles voies de communications un pays qui, pendant notre réunion à la Hollande, était resté dans un oubli complet pour les travaux publics, et qui a été fort mal partagé depuis.

Ainsi que j'ai eu l'honneur de vous le faire remarquer l'année dernière, il y avait, en 1830, 705 lieues des routes pavées en Belgique, et la province d'Anvers, qui est cependant une des celles qui paient le plus de contributions à l'Etat, n'en avait à cette époque que 56 lieues.

Veuillez, messieurs, parcourir le relevé exact des dépenses d’entretien ordinaire des routes en 1841, d'après les baux en vigueur, qui se trouvent annexés au rapport sur le budget, p. 7, et vous serez convaincus qu'une disproportion bien grande existe encore aujourd'hui pour les routes pavées entre les différentes provinces ; vous y remarquerez, comme moi, que l'entretien ordinaire des routes dans la province d'Anvers n'y est porté que pour une somme de 44,759 francs, tandis que dans quelques provinces cet entretien se monte à 271,000 fr., et dans d'autres jusqu'à 373,000 fr. par an. Ce qui, selon moi, est une preuve évidente que cette province n'a jusqu'ici que le quart des routes pavées qu'elle serait en droit de réclamer en proportion de son étendue, de sa population et des contributions payées par elle ; aussi j'appelle toute l'attention du gouvernement sur cet objet.

Si, avant le traité de paix avec la Hollande, le gouvernement a dû négliger ou remettre la construction de plusieurs routes pavées dans la Campine, par suite de l'opposition du génie militaire, il est de son devoir aujourd'hui de redoubler de zèle pour regagner le temps perdu, en dotant le pays de plusieurs routes qu'il est en droit de réclamer. Aussi j'ai appris avec plaisir que M. le ministre des travaux publics, en répondant à mon honorable ami M. de Nef, s'est engagé à s'entendre avec son collègue le ministre de la guerre pour faire lever l'opposition contre la construction de la route de Turnhout vers Tilburg, opposition qui n'est nullement fondée dans un pays tel que la Campine, comme on vient de vous le prouver.

Je dois, en outre, faire remarquer à M. le ministre que la province d'Anvers, qui, jusqu'ici, est en possession d'un nombre si minime de routes pavées, et qui a dépensé près d'un million pour la canalisation de la petite Nèthe, sans subside de l'Etat, est en droit de réclamer, comme subside, au moins la moitié des dépenses pour les routes provinciales qu'elle pourrait construire par la suite.

A cette occasion, je ne puis m'empêcher de recommander à l'attention toute particulière de M. le ministre, une combinaison de routes que la province aura soin de lui proposer pour rattacher à la route de Turnhout à Diest les importantes communes de Moll, Meerhout, Olmen et Balen, qui contiennent une population d'environ vingt mille habitants et qui se trouvent privées jusqu'à ce jour de tous moyens de communication ; les dépenses que le gouvernement pourrait faire dans ces localités de la Campine produiront, je ne dis pas directement mais indirectement, plus de 15 p.c. à l'Etat. Oui, messieurs, et je m'explique, quelques petites routes provinciales, projetées et exécutées seulement en partie, ont eu tant d'influence sur la prospérité du pays, que les produits d'enregistrement sont plus que doublés dans quelques cantons.

Le bureau d'enregistrement de la commune de Westerloo, lequel, d'après des chiffres dont j'ose attester l'authenticité, n' a rapporté, depuis 1820 à 1830 que la somme de 183,679 fr., a produit, de 1830à 1840, la somme de 479,224 fr.

De manière que ce produit a triplé les bureaux de Gheel et de Herenthals qui ne rapportaient en 1836 que la somme de 61,343 fr. ont produit :

en 1837, 76,245 fr.

en 1838, 81,890 fr.

en 1839, 92,359 fr.

en 1840, 94,006 fr.

en 1841, 103,351 fr.

Il en résulte que ce produit est doublé en six années, par suite de la construction de quelques routes provinciales et que l'augmentation seule du droit d'enregistrement dans ce canton indemnise largement l'Etat des dépenses qu'il pourrait y avoir faites ; et si dans les localités telles que celles dont il s'agit ici, où la culture était déjà assez avancée avant la construction de ces routes, l'augmentation du produit d'enregistrement a été considérable, l'on peut soutenir sans exagération que les sommes que le gouvernement pourrait dépenser pour réunir à la route de Turnhout à Diest les communes que j'ai citées plus haut, où la culture est moins avancée, rapporteront au moins un intérêt de 15 p.c. à l'Etat, par suite de l'augmentation seule des droits d'enregistrement.

Pour vous convaincre davantage et vous faire sentir la sincérité de ce que j'avance, j'aurai l'honneur de vous lire un extrait authentique de quelques ventes de bruyères dans la commune de Gheel, avant et après les constructions des routes qui parcourent aujourd'hui cette commune ; vous y venez que la valeur des bruyères est décuplée dans cette localité ; ce résultat vous l'obtiendrez partout, lorsque vous commencerez à travailler dans les communes entourées de bruyères. Voici l'extrait dont il s'agit :

« L'administration communale de Gheel, province d'Anvers déclare, que les bruyères communales ont été vendues publiquement, savoir :

« En 1822, 492 hectares 55 ares 99 centiares, pour la somme de 7,972 fr. 48 c.

« En 1828, 209 hectares 64 ares 73 centiares, pour la somme de 5,299 fr. 46.

« En 1830, 76 hectares 59 ares 60 centiares, pour 3,683 fr. 10

« En 1841, 571 hectares 22 ares 35 centiares, pour la somme de 90,556 fr. 70 c.

« Gheel, le 7 décembre 1841.

« Le bourgmestre. C.-T. LE BON.

« Par ordonnance ;

« Le secrétaire, C. VANDEPOEL. »

Voilà un résultat bien avantageux et qui doit engager le gouvernement à porter ses regards vers une partie du pays qui payera de grands intérêts au trésor pour l'argent que l'on voudra bien y dépenser. Aussi ai-je vu avec regret dans les cartes que M. le ministre vient de déposer au bureau de la chambre que les localités éloignées ont encore été oubliées ; il paraît qu'on donne toujours beaucoup à ceux qui ont beaucoup, et que l'on ne donnera jamais rien à ceux qui n'ont rien.

M. de Muelenaere**.** - Messieurs, je dois appuyer de quelques mots les observations qui ont été soumises à M. le ministre des travaux publics par mes honorables amis, MM. Angillis et Rodenbach. L'élargissement de la route de Roulers à Iseghem est indispensable, le gouvernement lui-même en a déjà compris la nécessité ; cette route, comme on nous l'a dit, n'a coûté au gouvernement qu'une somme d'environ 60,000 fr., et le gouvernement retire de cette route à peu près 10 p. c. En raison des sacrifices faits par les communes intéressées, il a été passé entre le gouvernement et les communes un contrat d'après lesquelles ces communes doivent avoir une part dans le produit des barrières. Cependant tout ce produit peut être employé en entretien et amélioration de la route. Or, comme l'a fait observer l'honorable M. Angillis, l'élargissement de la route doit être considéré comme une amélioration, et s'il s'exécute à présent, les communes contribueront encore pour une part dans cette dépense, car sans cela elles recevraient une part quelconque dans le produit des barrières.

Je me permettrai de soumettre une autre observation à M. le ministre des travaux publics. La route de Roulers à Iseghem était la troisième section d'un grand projet qui avait été conçu, je veux parler de la route de Pervyse à Iseghem. La première partie, celle de Pervyse à Dixmude, est exécutée ; la troisième, celle de Roulers à Iseghem l'est également ; mais la section intermédiaire, celle de Roulers à Dixmude, ne l'est pas encore. Cependant l’instruction est terminée, depuis longtemps les communes ont voté les fonds nécessaires, et le gouvernement n'a encore pris aucune décision.

J'inviterai M. le ministre des travaux publics à examiner mûrement ce projet de construction et à prendre le plus tôt possible une décision sur la demande qui lui a été soumise.

M. d’Huart. - L'honorable M. d'Hoffschmidt a demandé que la proposition des députés du Luxembourg du 5 juin 1840, qui a été renvoyée aux sections, subît enfin un examen et fût l'objet d'un rapport spécial à la chambre. Je viens appuyer cette demande. Elle doit rencontrer d'autant moins de difficulté que déjà le renvoi a été ordonné, que l'intention de la chambre a été exprimée. Il suffit d'engager les sections à s'en occuper et à présenter un rapport le plus tôt possible. Il ne peut même pas y avoir d'opposition puisqu'il y a chose jugée. Ainsi je me joins à M. d'Hoffschmidt pour demander que les sections s'occupent de l'examen de cette proposition et qu'un rapport soit fait le plus tôt possible. Je pense qu'il y a lieu de faire ce rapport dans un bref délai, car M. le ministre des travaux publics vous propose de construire une quantité de routes comme affluents du chemin de fer dont la dépense probablement sera payée sur les produits des barrières, puisqu'il ne présente pas d'autres moyens pour la couvrir. Ce serait donc sur les moyens ordinaires, sur l'excédant du produit des barrières. Si le rapport relatif à la construction des routes affluents du chemin de fer a votre approbation, la construction de ces routes absorbera tout l'excédant du produit des barrières, et le Limbourg, le Luxembourg, la Campine qui ne profitent pas du chemin de fer, et à qui des routes ont été promises à titre de compensation, n'auront pas cette compensation. Le projet de M. le ministre des travaux publics tend à remettre à bien longtemps la compensation dont il s'agit.

Je me bornerai pour le moment à demander le renvoi aux sections de la proposition de M. Zoude. Lorsqu'un rapport spécial aura été fait, ce sera le moment d'examiner les raisons qui militent pour son adoption. J'appuie donc la demande de MM. d'Hoffschmidt et Zoude ; je craindrais d'affaiblir ce qu'ils ont dit, en y ajoutant quoi que ce soit.

M. de Theux. - La proposition a été renvoyée aux sections, il me semble qu'il faudrait d’abord savoir à quel degré d'instruction elle est parvenue.

M. le président. - La proposition a été renvoyée aux sections ; mais il n'a pas été fait de rapport.

M. Peeters, rapporteur. - Voici ce que la section centrale du budget des travaux publics a dit sur cette proposition dans son rapport de l'an dernier :

« Quant à la proposition faite par plusieurs députés du Luxembourg, tendant à employer la somme nécessaire pour l'embranchement du chemin de fer qui leur était accordé, à la construction de plusieurs routes pavées, la section centrale pense que, si le gouvernement, d'accord avec la province, renonce à la construction de cet embranchement, il pourra, lorsque le moment lui paraîtra favorable, présenter d'autres projets plus utiles pour cette province, et que la chambre aura soin d'examiner, mais qu'on ne peut aucunement s'occuper de pareilles propositions à l'occasion d'un budget. »

M. d’Hoffschmidt. - C'est incidemment que la section centrale du budget des travaux publics a dû s'occuper de notre proposition. Mais cette proposition a été renvoyée aux sections ; les sections doivent nommer leurs rapporteurs. Ces rapporteurs doivent se constituer en section centrale, laquelle fait son rapport et présente des conclusions. Tels sont les précédents de la chambre ; je demande que l'on s'y conforme ; je demande que les sections s'occupent le plus tôt possible de cette proposition.

M. d’Huart. - La proposition a été renvoyée aux sections de juin 1840 ; depuis lors plusieurs membres ont cessé de faire partie de la chambre. Je crois qu'il vaudrait mieux renvoyer la proposition aux sections de ce mois. C'est, du reste, une affaire de forme. Pour le fond, c'est la même chose.

- La chambre consultée renvoie la proposition de MM. Zoude et consorts à l'examen des sections de février.

M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Des observations ont été faites par plusieurs honorables membres de la Flandre occidentale sur la route d'lseghem.

L'honorable M. Angillis s'est plaint particulièrement de deux faits : l'un que la route aurait été construite avec une largeur trop étroite. Quant à ce fait, il ne m'appartient pas, puisque la route était construite avant mon entrée au ministère. Il est vrai que c'est parce qu'il n'y avait pas de rigoles suffisantes pour l’écoulement des eaux qu'il y a eu des dégâts assez considérables, dégâts dont j'ai ordonné la réparation immédiate.

En ce qui touche la maison de charité qui se trouve à un demi-mètre de la route, et dont les hospices ne pourront tirer le même parti qu'ils en auraient tiré autrement, je ne crois pas avoir reçu de renseignements qui tendent à faire croire que les agents des ponts et chaussées se soient laissés aller à en faire en quelque sorte l'objet d'une spéculation au profit de la route et aux dépens de la maison de charité, en ce sens que les agents savaient bien que cette maison de charité se trouverait fort gênée par l'établissement de la route à une distance aussi rapprochée, qu'on devrait se décider à l’abattre, et que l'administration des ponts et chaussées forcerait le bureau de bienfaisance à tenir, dans la nouvelle construction, la façade sans indemnité à la distance voulue par les règlements.

L'honorable M. de Muelenaere a appelé mon attention sur une autre route de la même province, la route de Roulers à Dixmude ; plusieurs tracés ont été proposés pour cette route, et il s'est élevé, à l'égard de ces divers tracés, des discussions très graves entre les divers intéressés. Les habitants de Dixmude et des environs ont adressé de vives réclamations au département des travaux publics pour avoir un tracé qui passe par Zarren. Mais le domaine qui est aussi fortement intéressé à cette route a demandé, avec un propriétaire d'une autre partie de bois touchant à ceux du domaine, que la nouvelle route traversât les bois du domaine, afin de rendre ces bois mieux exploitables. Dans ce moment, une dernière instruction a lieu ; le conseil des ponts et chaussées s'occupe actuellement de ces routes, et avant peu de jours, il doit se réunir pour s'en occuper encore. Après cette dernière enquête, le gouvernement se prononcera sur la direction à adopter.

L'honorable M. de Man d'Attenrode s'est plaint de ce que les routes ne seraient pas entretenues suffisamment, de ce que les entrepreneurs se borneraient, dit-il, à rassembler les pierres et à les joindre presque sans sable, de manière que la réparation ne tienne que très peu de temps. Mais par cela même il a fait l'éloge du bail à long terme que l'administration conclut avec les entrepreneurs de l'entretien des routes ; car si l'entrepreneur doit entretenir la route pendant un long terme, il fera de bonnes réparations ; il s'interdira ces petites réparations qu'il faut refaire à tout bout de champ.

Il a parlé aussi du système de bascule. Le département des travaux publics a demandé dans un précèdent budget une majoration de ce chef d'environ 8,000 fr. Cette majoration, il l'a demandée afin de pouvoir accorder successivement, au fur et à mesure que l'organisation, d'après le nouveau système adopté pourrait se faire, des traitements fixes aux préposés des bascules. On sait que ces préposés sont fort isolés, qu'il est très difficile de les surveiller, et que, s'ils n'ont pas des traitements fixes assez élevés, ils finissent par s'adonner à des prévarications.

Jusqu'ici, messieurs, six préposés nouveaux ont été pris comme on se propose de le faire à l'avenir, parmi d'anciens conducteurs des ponts et chaussés, auxquels cet emploi peut être donné convenablement comme retraite. Ce sont des hommes dont la moralité a été éprouvée ; car, pour remplir ces fonctions d'une manière satisfaisante, la première condition est la moralité.

Eh bien ! l'expérience que l'on a faite par la nomination de ces six préposés nouveaux, jouissant de traitements fixes qui peuvent aller jusqu'à 1,500 fr. selon l'importance de la bascule à laquelle ils sont préposés, a produit des résultats très satisfaisants. On a pu remarquer que ce sont ces employés qui ont rempli leurs devoirs avec le plus d'exactitude et qui constatent le plus grand nombre de contraventions.

Je ne pense pas que l'honorable membre ait voulu critiquer la majoration de 8,000 fr. qui a été accordée les années précédentes pour ce service. Car il doit reconnaître que, bien que l'administration ancienne fût très défectueuse, cependant ces bascules donnaient au trésor un produit assez considérable, et c'est à tel point que l'administration des messageries Van Gend a dû payer 23,000 fr. d'amende dans l'espace d'environ vingt mois.

Messieurs, d'honorables députés du Limbourg, de la Campine et du Luxembourg vous ont entretenus des intérêts de leurs localités, qui sans doute exigent toute notre sollicitude. Ces localités, par leur situation, sont privées des bienfaits du chemin de fer, et je dois reconnaître, avec les honorables membres, qu'ils ont bien quelques droits à une compensation. Aussi, messieurs, ai-je voté avec eux pour que les sections s'occupent instantanément de la proposition qui a été déposée dans une autre session par plusieurs de ces honorables députés.

J'aurai aussi égard, autant qu'il appartiendra aux observations qui déjà ont été faites par plusieurs honorables membres, sur la carte des routes affluents du chemin de fer que je viens de déposer sur le bureau ; et, je le répète, j'engage de nouveau tous les membres de cette chambre à vouloir bien me transmettre leurs observations le plus tôt possible, afin que je puisse m'occuper définitivement de ce travail.

Je ferai, à cet égard, remarquer à un honorable député du Luxembourg que mon intention n'est pas d'employer tout le fonds spécial des routes, résultant de l'excédant du produit des barrières à la construction des affluents du chemin de fer. Je crois que pour que la plupart de ces affluents soient construits, il faut nécessairement que les localités y interviennent pour une part considérable. Cc n'est que dans ce cas que je me déciderai a leur construction, à laquelle je ne doute pas d’ailleurs que les localités intéressées s'empresseront de concourir, afin de jouir des grandes facilités de communication que présentent nos railways.

Je ferai remarquer en même temps à la chambre que le rapport que j'ai déposé sur le bureau, fait voir qu'en se bornant aux affluents proposés par le conseil des ponts et chaussées, il y aurait 971.000 fr. à dépenser pour les affluents considérés comme d’intérêt général, 600,000 pour ceux considérés comme d'intérêt provincial, et 700,000 fr. pour ceux considérés comme d'intérêt communal ; en tout 2,271,000 fr.

(Moniteur belge n°54, du 23 février 1842) M. Angillis. - Messieurs, il m’est excessivement pénible de devoir prendre la parole deux fois sur la même question. Cependant ce que vient de dire M. le ministre des travaux publics m’oblige à entrer de nouveau dans quelques détails.

M. le ministre m’a fait dire que les employés des ponts et chaussées auraient fait une spéculation pour obtenir un terrain des pauvres gratis. Je n’ai pas parlé de cela. J’ai dit que le gouvernement s’était imaginé d’obtenir la démolition de la maison en question sans bourse délier ; et cela résulte des pièces adressées à moi-même par le ministère des travaux publics.

D’abord, sur ma première réclamation, on me répondit que, d’après l’opinion de M. l’inspecteur général des ponts et chaussées, la saillie de la maison n’était pas assez rapprochée du pavé. J’ai répondu à cela en envoyant un plan pour démontrer que la maison ne se trouvait qu’à un demi-mètre du bord du pavé. Alors on m’a répondu qu’un peu plus tôt un peu plus tard, l’administration des ponts et chaussées serait obligée de faire les réparations et qu’alors il y aura moyen d’obtenir le terrain nécessaire pour faire le passage de la route sans exproprier la maison.

Quand je cite des lettres, je ne fais pas comme un député français, je ne parle pas de lettres qui n’existent pas, car je puis les produire.

Ensuite, M. le ministre dit qu’il n’a pas eu connaissances des dégâts causés par les pluies de l’été dernier.

M. le ministre est dans l’erreur. J’ai adressé des réclamations à M. le ministre. Huit jours après on a envoyé sur les lieux un ingénieur des ponts et chaussées. Mais voyant qu’on ne faisait rien, j’ai fait faire les réparations aux frais de la commune. Sur mes nouvelles réclamations, M. le ministre m’a fait l’honneur de me dire qu’il avait écrit à l’ingénieur en chef pour qu’on fît les réparations que j’avais demandées avec de vieux rebuts. J’ai fait remarquer à M. l’ingénieur en chef que nous avions payé la large part dans la construction de cette route ; je ne voulais pas de vieux rebuts pour un ouvrage de cette importance. Nous avons payé, dis-je, 80,000 francs dans la dépense, bien qu’elle ne regarde pas la commune, mais le gouvernement seul, car cette route est une voie de communication des plus importantes. Chaque jour elle est parcourue par six diligences qui vont conduire les voyageurs de Renaix à Courtray par le chemin de fer. C’est donc une route purement gouvernementale et non provinciale, et encore moins communale.

Il résulte de ce que je viens de dire que M. le ministre a eu connaissance de ce fait. Il peut l’avoir perdu de vue ; mais il ne doit pas m’accuser de faits qui n’existent pas. Du reste, je maintiens ce que j’ai dit et je suis prêt à le prouver.

(Moniteur belge n°53, du 22 février 1842) M. de Muelenaere**.** - Messieurs, il importe peu de savoir sous quelle administration la route de Roulers à Iseghem a été construite. Ce n'est point un reproche que nous avons adressé à l'administration, c'est une nécessité que nous lui avons signalée. Car, il est de fait que la nécessité d'élargir cette route a été reconnue par les deux prédécesseurs de M. le ministre des travaux publics ; et je suis persuadé que, lorsqu'il se serra fait rendre compte des faits, il en reconnaîtra aussi la nécessité.

Lorsque cette route a été construite, les ingénieurs n'étaient pas d'accord sur la largeur à lui donner. La raison en est assez simple ; c'est qu'on ne pouvait prévoir les relations qui s’établiraient sur cette route, et sous ce rapport toutes les prévisions de l’administration des ponts et chaussées ont été dépassées ; de manière que la nécessité de l'élargir est devenue urgente.

Quant à la route de Roulers à Dixmude, il est vrai qu'il existe plusieurs tracés. Il y en a notamment trois qui ont été soumis à une longue instruction. Mais il est à remarquer que la province et les communes interviennent dans la construction de cette route pour les deux tiers. Lorsqu'elle sera achevée, ce sera une route de l'Etat puisque ce sera une des grandes communications du pays, et malgré cela la province et les communes supporteront les deux tiers de la dépense.

Il y a deux tracés sur lesquels toutes les parties intéressées paraissent d'accord. Et quand je dis les parties intéressées, je veux parler des communes, de la province et de l'administration des ponts et chaussées elle-même.

Mais il y a un autre tracé qui est repoussé à l'unanimité, et par l'administration des ponts et chaussées et par les communes et par la province. Ce tracé-là, messieurs, est réclamé par des individus qui paraissent avoir un intérêt particulier dans la construction de la route, et, en autre, par le domaine. Eh bien, je désire que cette question soit éclaircie par ce dernier ; car je suis convaincu que lorsqu'elle aura été mûrement examinée, le domaine reconnaîtra qu'il est désintéressé dans cette affaire. Il y a d'ailleurs un autre moyen qui a été proposé ; ce serait de faire des embranchements qui seraient tout à fait dans l'intérêt du domaine. Mais le troisième tracé, tel qu'il avait été proposé et admis par le conseil provincial, ne pouvait lui être d'aucune utilité.

Quoi qu'il en soit, puisque M. le ministre des travaux publics a bien voulu nous dire qu'il s'occupera prochainement de cette affaire, je me bornerai à exprimer le désir qu'elle soit mûrement examinée et qu'une décision puisse être prise dans le plus bref délai possible.

M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Comme j'ai perdu de vue ce qui a été fait à l'égard de la route dont il s'agit, il est possible que je me sois trompé tout à l'heure en répondant à l'honorable M. Angillis, et je crois très volontiers à la véracité de cet honorable membre. Quant à l'objet de ses réclamations en lui- même je l'examinerai dans le plus bref délai possible.

L'honorable M. de Muelenaere vient de vous entretenir de nouveau de la route de Dixmude à Roulers. A cet égard, je ne puis que répéter ce que j'ai dit tout à l'heure, c'est qu'en ce moment une dernière construction a lieu, ou au moins va avoir lieu sous peu de jours. Cette construction sera complète, tous les intéressés seront appelés par leurs délégués à défendre leurs intérêts ; si le domaine (qui cependant, je dois le dire, persiste à croire que le tracé qui traverse les bois domaniaux lui est extrêmement avantageux), si le domaine se désiste de ses prétentions, ce sera une très grande difficulté de moins pour l'adoption du tracé de cette route.

Quant à l'embranchement dont a parlé l'honorable membre, je dois dire que c'est moi qui en ai eu le premier l'idée. Il y a, messieurs, un petit pavé qui part de Poel Cappelle (route d'Ypres à Bruges) pour aboutir au centre d'une exploitation forestière appartenant à un riche propriétaire et qu'il s'agirait seulement de prolonger à travers le bois jusqu'à la route de Roulers a Dixmude, qui serait alors construite d'après ou du moins à peu près d'après le tracé n°2. Si le domaine, et les propriétaires auxquels j'ai fait allusion, consentent à contribuer dans les frais de construction de cet embranchement, je crois que toutes les difficultés s'aplaniront sans peine.

M. Eloy de Burdinne, - On demande, messieurs, une somme de 50,000 francs pour continuer les plantations qui sont commencées ; je vois par le rapport que différentes essences sont employées à ces plantations. Dans différentes localités que j'ai parcourues, la plus grande partie des arbres qui bordent les routes sont des sorbiers ; je crois que, dans ces localités, on pourrait planter avec beaucoup d'avantage des mélèzes. En outre, il ne s'agit pas toujours de mettre des arbres en terre pour les faire croître ; il faut que l'on soigne les plantations ; il faut non seulement que le gouvernement choisisse des arbres qui conviennent aux localités, il faut encore que ces arbres aient reçu les soins nécessaires dans les pépinières ; on a vu souvent, par exemple, planter des frênes qu'on avait été arracher dans les bois ; ces frênes languissaient, parce que cette espèce d'arbres surtout a besoin d'être soignée dans les pépinières.

Je ferai remarquer aussi à M. le ministre que dans bien des endroits, là, par exemple, où il y a de grands déblais et remblais, on pourrait avec avantage planter des arbres sur les bords du chemin de fer. Mais, comme je l'ai dit tout à l'heure, il faut que ces travaux soient dirigés par des hommes qui s'y entendent, car sans cela vous ferez beaucoup de dépenses sans obtenir de résultat.

M. Vandensteen. - J'appellerai l'attention de M. le ministre sur la nécessité qu'il y a faire activer l'exécution des travaux sur les routes en voie de construction lorsque ces travaux ont été mis en adjudication. La lenteur que l'on apporte quelquefois dans l'exécution nuit non seulement au trésor, mais encore aux intérêts des particuliers et des localités qui contribuent pour de fortes sommes dans les frais de construction.

Je ne signalerai qu'un fait qui est à ma connaissance ; je veux parler de la route d'Huy à Stavelot ; cette route a été autorisée par arrêté royal du 30 juin 1839 ; le 7 septembre 1840 la première section a été adjugée ; l'étendue est de deux lieues ; eh bien, dans le moment actuel les travaux effectués sont presque nuls eu égard à ce qui reste encore à faire.

Je sais bien que dans tous les cahiers des charges on stipule la clause de force majeure, mais les entrepreneurs comptent tellement sur l'effet de celle clause, qu'ils laissent les travaux en souffrance et il en résulte que l'administration est dans l'impossibilité de livrer les routes à la circulation à l'époque convenue, de sorte que les localités sont privées beaucoup plus longtemps qu’elles ne devraient l’être des avantages que doivent leur procurer les communications.

Je prie M. le ministre de bien vouloir faire attention aux inconvénients que je signale, notamment en ce qui concerne la première section de la route d'Huy à Stavelot, cette voie de communication étant d'un haut intérêt pour l'arrondissement de Huy.

M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Je répondrai à l'honorable préopinant que si l'on a mis de la lenteur dans la construction de quelques routes, et notamment dans la construction de la route de Huy à Stavelot, c'est entièrement contre mes intentions, et je remercie même l'honorable membre des avertissements qu'il a bien voulu me donner à cet égard. Je remercie également l'honorable M. Eloy de Burdinne des observations agronomiques qu'il a bien voulu faire sur les plantations.

- La discussion du chapitre II est close.

La séance est levée à 4 heures et 1/2.