(Moniteur belge n°40 du 9 février 1840)
(Présidence de M. Fallon)
M. Scheyven procède à l’appel nominal à une heure et quart.
M. B. Dubus donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La rédaction en est adoptée.
M. Scheyven donne communication des pièces adressées à la chambre :
« Le sieur Nicolas Deflene, batelier, et sa femme Marie-Anne Minet, nés Français, demandent la naturalisation. »
- Renvoi au ministre de la justice.
« Des habitants de la commune de St-Gérard (Namur) demandent l’achèvement de la route de Ligny à Dénée, ou que le gouvernement force le concessionnaire à remplir ses engagements.
- Renvoi à la commission des pétitions avec demande d’un prompt rapport.
« Le sieur Guinin Charles, batelier, et sa femme, Marie-Anne Deflene, nés français, demandent la naturalisation. »
- Renvoi au ministre de la justice.
« Des membres du conseil communal de Beveren, Flandre orientale, adressent des observations contre le projet de loi relatif à la répression de la fraude en matière de douanes. »
- Renvoi à la section centrale chargée d’examiner ce projet.
Il est fait hommage à la chambre de la deuxième livraison du tome XI de la correspondance mathématique et physique, par M. Quetelet.
- Dépôt à la bibliothèque.
M. le ministre des finances (M. Desmaisières) après en avoir exposé les motifs, donne lecture du projet de loi suivant :
« Art. 1er. La convention ci annexée, relative à l’acquisition faite par le gouvernement de 4,000 actions de la société rhénane des chemins de fer, est approuvée. »
« Art. 2. Il est ouvert au gouvernement un crédit de 837,400 francs, qui sera employé au versement à faire par lui, en 1840, pour paiement d’une partie du prix des 4,000 actions, ci-dessus mentionnées. »
- La chambre donne acte à M. le ministre de la présentation du projet dont il vient de donner lecture, en ordonnant l’impression et la distribution ainsi que des motifs qui l’accompagnent.
M. Rodenbach – Si j’ai bien entendu M. le ministre, il et question, dans le projet qui vient d’être présenté, d’une convention faite entre la société de chemin de fer rhénane et le gouvernement. Le gouvernement aurait acheté quatre mille actions qui, si je suis bien informé, sont baissées d’environ 25 p.c. Il s’agit d’un achat pour un capital de 3,337,000 francs. Cette affaire est de la plus haute importance, on doit l’examiner mûrement en section.
- Le renvoi dans les sections est ordonné.
La chambre ferme la discussion sur l’article 11 et les divers amendements qui s’y rattachent.
M. le président – Voici l’état de la question.
Dans les projet primitif, le gouvernement avait proposé la disposition suivante :
« Les chemins vicinaux sont imprescriptibles, soit en tout, soit en partie. »
Cette disposition ayant donné lieu à plusieurs débats dans la chambre, M. le ministre de l'intérieur avait proposé d’y substituer l’amendement suivant :
« Les chemins vicinaux, y compris les servitudes de passage légalement établies au profit des communes, sont imprescriptibles soit en tout, soit en partie, tels qu’ils sont reconnus et maintenus sur les plans généraux, en conformité de la présente loi. »
Cet amendement a été renvoyé à la section centrale qui ne l’a pas adopté. Elle en a proposé un autre ainsi conçu :
« Les chemins vicinaux tels qu’ils sont reconnus et maintenus par les plans généraux d’alignement et de délimitation sont imprescriptibles aussi longtemps qu’ils servent à l’usage public, sans préjudice aux droits acquis antérieurement à la présente loi.
« La servitude vicinale de passage peut être acquise par prescription. »
M. le ministre s’est rallié à cette proposition moyennant le changement de rédaction proposé par M. Dubus, c’est-à-dire qu’on comprendrait les sentiers.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Je me suis en effet rallié à l’amendement de la section centrale sous-amendé par M. Dubus, parce que cet amendement atteint le but principal que j’avais en vue, d’empêcher les usurpations sur les chemins vicinaux.
M. le président – M. Liedts s’est rallié à l’amendement de la section centrale.
M. Vandenbossche a proposé la suppression des mots : « sans préjudice aux droits acquis antérieurement à la présente loi. »
M. de Garcia conservant le fond de la disposition de la section centrale, a proposé la rédaction suivante :
« Les chemins et sentiers vicinaux, tels qu’ils sont reconnus et maintenus par les plans généraux d’alignement et de délimitation, soit qu’on les considère comme propriétés communales ou comme servitudes dues par les propriétaires riverains sont imprescriptibles aussi longtemps qu’ils servent à l’usage public.
M. Verhaegen conserve également la fin de la disposition et propose de la rédiger de la manière suivante :
« Les chemins, sentiers et servitudes de passage, à l’usage d’une ou de plusieurs communes, ou d’une fraction de commune, tels qu’ils sont reconnus et maintenus par les plans généraux d’alignement et de délimitation, sont imprescriptibles aussi longtemps qu’ils servent à l’usage public, sans préjudice aux droits acquis antérieurement à la présente loi. »
Enfin, M. Simons, ne voulant pas d’imprescriptibilité relative, mais une imprescriptibilité absolue, propose la rédaction suivante :
« Les chemins et sentiers vicinaux, tels qu’ils sont reconnus et maintenus par les plans généraux d’alignement et de délimitation, sont imprescriptibles, soit en tout, soit en partie, sans préjudice aux droits acquis antérieurement à la présente loi. »
Je vais mettre ces amendements aux voix, en commençant par celui qui s’écarte le plus de la proposition de la section centrale.
La chambre rejette successivement et dans l’ordre suivant les amendements de MM Simons, Vandenbossche, de Garcia et Verhaegen, et adopte la proposition de la section centrale sous-amendée par M. Dubus.
Cette proposition formera l’article 11 du projet.
L’article proposé par le gouvernement était ainsi conçu :
« Les dépenses relatives aux chemins vicinaux sont à la charge des communes.
« Néanmoins, les conseils provinciaux pourront statuer que ces dépenses demeureront, en tout ou en partie, à la charge des propriétaires riverains là où l’usage en est établi.
« Il n’est rien innové par le présent article aux règlements des wateringues, ni aux obligations légalement contractées ou résultant d’usages locaux. »
M. Peeters – Messieurs, je viens soutenir la suppression du deuxième paragraphe de l’article 13 du projet du gouvernement, proposé par la section centrale.
Les lois françaises promulguées en Belgique ayant mis l’entretien des chemins à charge des communes, je pense que les riverains en Flandre ne sont pas plus obligés d’entretenir les chemins vicinaux que partout ailleurs.
Pour avoir un bon résultat de la loi en discussion, il me paraît qu’elle doit être conforme pour tout le pays.
Sans cette conformité, des injustices ne pourront manquer d’exister. Je suppose un propriétaire possédant des propriétés dans les Flandres, longeant sur une grande étendue les chemins publics, et, dans une autre province, des propriétés qui n’y touchent pas ; dans les Flandres il serait obligé, comme riverain, d’entretenir exclusivement les chemins, et dans une autre province, où il ne touche pas aux chemins, il serait encore obligé de contribuer à l’entretien de ces chemins.
D’ailleurs, là où le riverain était obligé d’entretenir les chemins, il avait aussi le droit de planter, ce qui me paraît aussi un grand inconvénient ; car les plantations font souvent beaucoup de tort aux routes, surtout dans les endroits humides. Mieux vaudrait abandonner les plantations sur les chemins publics aux communes, qui y trouveraient de grandes ressources pour leurs dépenses extraordinaires.
Les administrations communales, pour ainsi dire responsables du bon entretien des routes, ne feront planter que dans les endroits où cela ne peut pas faire de tort, et où ces plantations embelliront de beaucoup les chemins.
Je vous propose donc la suppression du deuxième paragraphe du projet du gouvernement.
M. de Roo – Je crois qu’il ne faut pas insérer dans l’article les mots « ou résultant d’usages locaux. »
Il est de fait, messieurs, que les usages locaux dans les Flandres ne sont pas aussi bien constatés qu’ils le paraissent à plusieurs membres. Les chemins vicinaux dans les Flandres sont fort mal entretenus. Le plus souvent, ils sont impraticables pendant un tiers de l’année, quoi qu’en dise la députation des états des Flandres. La raison en est dans la nonchalance que les administrateurs apportent à l’exécution de ces usages, et dans le mauvais vouloir de ceux qui devaient les observer. C’est pourquoi je demanderai la suppression des derniers mots du deuxième paragraphe de l’article 12 de la section centrale, c’est-à-dire des mots : « résultant des usages locaux. »
Lorsqu’on fait une nouvelle législation sur les chemins vicinaux, il me paraît qu’il faut élaguer tout ce qui était mauvais dans la législation précédente. On a dit que cela résulte des contrats. Mais les contrats n’ont pas cet objet-là. Les contrats sont passés entre le vendeur et l’acheteur. Dans ces contrats, il se trouve souvent une phrase banale, que l’acheteur est chargé de l’entretien des chemins vicinaux. Parce que cela se trouve dans les contrats, la commune ne peut pas être autorisée à faire exécuter une chose dans laquelle elle n’est pas intervenue. C’est un contrat passé entre des tiers. La commune n’est pas intervenue, il ne doit en résulter pour elle aucune charge, ni aucun droit.
Comme vient de le dire M. Peeters et comme l’a dit hier M. Desmet, les riverains ont droit de plantation en compensation de la charge d’entretien. C’est une erreur ; il faut recourir à la source des chemins vicinaux ; on verra qu’ils sont souvent pris sur le terrain du propriétaire riverain, et que ceux-là, en laissant prescrire la servitude de passage, n’ont pas laissé prescrire le droit de planter des arbres. Ce droit, ils l’ont maintenu ; cela résulte du droit de propriété et non de la charge de devoir réparer le chemin. Cela serait contraire à tous les principes de droit et de justice. Quand une servitude est acquise, ce n’est pas le fonds servant qui doit entretenir la servitude, mais celui en faveur de qui la servitude est établie. Or, cette servitude est ici établie en faveur des habitants de la commune ; c’est donc sur les habitants de la commune ou sur la commune même que doit peser l’obligation d’entretenir le chemin.
Voyez autrement jusqu’où les choses pourraient aller : Un chemin vicinal de 3 mètres pourrait être porté à 6 mètres et mis à la charge des riverains. Evidemment ce serait un abus.
Je crois ces motifs suffisants pour déterminer la chambre à supprimer, dans le second paragraphe de l’article 13, les mots : « ou résultant d’usages locaux. » Je propose cette suppression.
M. de Langhe – C’est un usage depuis longtemps établi dans les Flandres que la réparation des chemins vicinaux est à la charge des riverains. Cet usage est-il légalement établi ? C’est une question que je ne me permettrai pas de trancher, et je voudrais que la loi ne la tranchât pas. C’est pour cela que j’avais proposé un amendement qui n’a pas été adopté. La chambre a adopté un amendement proposé par M. Gendebien et qui consiste à ajouter les mots : « ou résultant d’usages locaux. » Ainsi les usages locaux sont reconnus. Je crois, je le répète, que cette question ne devrait pas être résolue dans la loi ; elle pourrait tout au plus être du ressort des tribunaux. Je vais plus loin. Je dis que les usages locaux établissant ces servitudes, il est au pouvoir de la chambre de les supprimer. Ces servitudes n’ont pas donné aux communes un droit perpétuel que la législation ne peut changer. Je crois qu’une disposition dans ce sens serait équitable, car il en résulterait que les chemins vicinaux seraient entretenus par ceux qui en jouissent. Souvent un riverain ne fait qu’un faible usage d’un chemin vicinal ; souvent ce sont des propriétaires dont la propriété en est très éloignée qui en font le plus grand usage. Cependant c’est le propriétaire riverain qui paie les frais d’entretien ; il y a là une injustice. La chambre peut la faire cesser en retranchant, comme le propose l’honorable préopinant, les mots : « ou résultant d’usages locaux. » Alors il y aurait uniformité dans le royaume ; les chemins vicinaux seraient entretenus dans tout le royaume par les communes.
M. Verhaegen – Je pense qu’il n’est plus question du premier projet et que l’on est généralement d’accord dans la chambre pour ne pas donner aux conseils provinciaux le droit de mettre dans certaines communes les chemins vicinaux à la charge des propriétaires riverains. Personne ne soutiendra cette disposition parce qu’il est impossible qu’elle soit admise. Ce serait en effet donner aux conseils provinciaux le droit de se mettre au-dessus de la loi, puisque vous avez décidé dans l’article 13, que l’entretien des chemins vicinaux est à la charge des communes. C’est là un principe général qui doit recevoir son application dans tous les cas, à moins que la loi même ne fasse des exceptions. Je ne pense pas qu’il faille insister là-dessus, puisque les préopinants ne se sont occupés que de la disposition telle qu’elle a été adoptée par la chambre.
Quant à cette disposition telle qu’elle a été adoptée par la chambre, je ferai la même observation que je faisais hier, et vous me permettrez de revenir sur les interpellations que j’ai eu l’honneur d’adresser au ministre, et qui viendront ici plus à propos sur je puis m’exprimer ainsi.
Hier on a parlé de chemins vicinaux, de sentiers vicinaux, et on a dit que, dans les sentiers vicinaux, on avait voulu et entendu comprendre les servitudes vicinales de passage. Je crois que c’est ainsi que la chose a été expliquée et entendue. Je vous avouerai franchement que cette explication ne m’a pas satisfait. J’en suis convaincu, vous reviendrez à une définition, ou bien votre loi sera inexécutable, je vous le prédis aujourd’hui. Si vous mettez les mots « chemins et sentiers vicinaux » sans une définition, votre loi ne recevra pas l’application que vous entendez lui donner.
Voilà ce que j’avais à dire sur ce point. Je ne ferai pas d’autres réflexions pour le moment ; cette discussion se représentera au second vote.
Il s’agit maintenant de l’entretien des chemins ; mais quels sont les chemins que vous voulez faire entretenir par la commune ? Vous dites que ce sont les chemins vicinaux ; mais qu’il me soit permis de vous demander ce que vous entendez par chemins vicinaux. Pour qu’on sache ce que vous allez mettre à la charge des communes, il faut que vous disiez ce que c’est qu’un chemin vicinal. Je ne veux pas insister sur une définition, mais il importe que la chambre sache ce qu’elle va mettre à la charge des communes. Vous ne parlez que de chemins vicinaux ; j’ai don lieu de croire qu’il ne s’agit pas ici des sentiers vicinaux, ni des servitudes de passage que cette expression comprend, puisque dans un autre article, adoptant des termes plus généraux, vous avez dit : « Chemins et sentiers vicinaux » et qu’il a été entendu que le mot « sentier » comprend les servitudes de passage.
Or, je sais qu’il y a plus de raisons, et déjà un honorable préopinant vous a donné ces raisons, pour mettre l’entretien à la charge de la commune, lorsque le passage est établi sur le fonds d’autrui, que quand il est établi sur le fonds communal. Comment ! un passage sera établi sur le fonds d’un particulier, sur le fonds d’une commune, et vous n’en mettrez pas l’entretien à la charge de la commune ; vous le laisserez à la charge de ce particulier ! Ce serait une absurdité, une injustice révoltante, je demande à cet égard des explications.
M. d’Huart – Je ferai remarquer à l’honorable M. Peeters, qui propose de supprimer le deuxième paragraphe de l’article 13 du projet du gouvernement, pour faire rentrer toutes les localités sous l’empire de ce qu’il a appelé le droit commun, c’est-à-dire de l’obligation exclusive aux communes d’entretenir les chemins vicinaux, que cette suppression ne remplirait nullement son but ; en effet, les propriétaires qui sont soumis à des obligations préexistantes n’en seraient pas moins tenus de concourir à l’entretien des chemins vicinaux, conformément au paragraphe 3. L’honorable M. Verhaegen vient de rappeler les explications antérieurement données sur la portée du deuxième paragraphe. La raison pour laquelle il a été retranché au premier vote, c’est qu’il donnait au pouvoir provincial des attributions qui doivent évidemment demeurer du ressort des tribunaux, selon l’esprit de la constitution.
M. Peeters atteindrait toutefois son but en se ralliant à la proposition de M. de Roo, consistant à retrancher de la fin de l’article, les mots : « ou résultant d’usages locaux », qui se trouvaient dans la première rédaction adoptée par la chambre. Car si l’on retranchait ces mots on dégagerait les propriétaires riverains des obligations qui peuvent exister pour eux en vertu d’usages locaux pour l’entretien des chemins vicinaux.
Mais est-il bien convenable d’ôter aux propriétaires riverains cette obligation. Serait-il juste de les dégager de cette charge ? Je ne le pense pas, et je suis d’avis de s’en tenir à ce qui existe, et laisser décider par les tribunaux les contestations qui pourraient s’élever quant aux obligations résultant d’usages locaux sur l’entretien de ces chemins.
Ne vous dissimulez pas, messieurs, qu’en ôtant toute obligation préexistante aux propriétaires riverains, vous leur conféreriez peut-être, dans certains cas, une véritable faveur au détriment des communes. Qui nous garantit que là où les propriétaires sont soumis à l’obligation d’entretenir les chemins vicinaux, ils le sont à titre gratuit ? Il n’est pas démontré que cette obligation a ce caractère.
Peut-être les propriétaires, en se soumettant à l’obligation d’entretenir les chemins vicinaux, ont-ils acquis, entre autres, le droit de planter ces chemins et de profiter de ces plantations. S’il en était ainsi, vous libéreriez donc les propriétaires, au détriment des communes, d’une obligation qui ne leur aurait pas été imposées à titre gratuit, mas pour laquelle il leur aurait été accordé un véritable dédommagement.
Je trouve, messieurs, dans les motifs qu’a invoqués M. de Roo une raison pour ne pas admettre sa proposition. Il a dit que les chemins vicinaux des Flandres étaient impraticables deux tiers de l’année ; or, il importe, là surtout, de ne négliger aucun moyen de les réparer et, par conséquent, il est essentiel de ne point priver la majeure partie des communes de ces deux provinces d’un moyen juste et légitime qu’elles auraient de plus pour réparer leurs chemins.
En effet, messieurs, par la loi que nous allons voter, les communes, en général, obtiendront différentes bases de ressources pour la réparation des chemins vicinaux ; si quelques-unes d’entre elles ont à y ajouter une ressource supplémentaire qui existe aujourd’hui, en vertu d’anciens usages, savoir : l’obligation pour les propriétaires riverains de contribuer à la réparation du chemin, il importe de ne pas réduire ces moyens légaux d’exécution ; car ce serait éloigner le moment où les chemins seront mis en bon état, but de la loi que nous discutons.
J’ajouterai un mot en réponse à une observation qui a été présentée par l’honorable M. Verhaegen. Il a fait remarquer que, dans l’article en discussion, il n’est point question des sentiers, et que c’était là une lacune. Sans doute, messieurs, que le motif qui a porté la section centrale à ne point parler des sentiers dans cet article, c’est que les communes ne font aucune dépense pour la réparation des sentiers. (Réclamations.) Du moins, dans les provinces que je connais, on ne travaille jamais aux sentiers ; alors l’observation de l’honorable M. Verhaegen pourrait être fondée ; il serait nécessaire de parler des sentiers dans l’article dont il s’agit.
M. Peeters – Je n’ai pas voulu, messieurs, libérer les particuliers qui, en vertu de conventions ou de titres légaux, seraient obligés d’entretenir certains chemins ; mais j’ai trouvé que c’est par erreur que, dans les Flandres, on charge les riverains de l’entretien des chemins ; d’après les lois françaises qui ont été promulguées dans notre pays et qui forment notre droit, ce sont les communes et non pas les riverains qui doivent entretenir les chemins.
C’est pour cela que j’insiste sur la suppression du paragraphe 2.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – On se trompe, messieurs, lorsqu’on dit que c’est par erreur que l’entretien des chemins vicinaux a continué dans les Flandres d’être à la charge des riverains, et pour prouver l’exactitude de mon assertion, il me suffit de citer un avis du conseil d’Etat en date du 25 mars 1807.
La loi du 11 frimaire an VII portait, article 4 :
« Les dépenses communales sont celle : 1° de l’entretien du pavé pour les parties qui ne sont pas grands routes ; 2° de la voirie et des chemins vicinaux dans l’étendue de la commune. »
Le conseil d’Etat, consulté sur la question de savoir : « si dans les toutes les communes, le pavé des rues non grandes routes doit être mis à la charge des propriétaires des maisons qui les bordent, lorsque l’usage l’a ainsi établi, et si l’article 4 de la loi du 11 frimaire an VII n’y apporte pas d’obstacle ? » a décidé que la loi du 11 frimaire an VII, en distinguant la partie des pavés des villes à la charge de l’Etat de celles à la charge des villes, n’a pas entendu régler de quelle manière cette dépense avait été acquittée dans chaque ville, et qu’on doit continuer à suivre, à ce sujet, l’usage établi pour chaque localité, jusqu’à ce qu’il ait été statué par un règlement général sur cette partie de la police publique.
« En conséquence, que dans les villes où les revenus ordinaires ne suffisent pas à l’établissement, restauration ou entretien du pavé, les préfets peuvent en autoriser la dépense à la charge des propriétaires, ainsi qu’il s’est pratiqué avant la loi du 11 frimaire an VII. »
Il est évident que l’avis du Conseil d’Etat s’appliquait au numéro 2 aussi bien qu’au numéro 1 de l’article 4 de la loi précitée ; ceci explique comment les chemins vicinaux dans la province ont continué d’être à charge des propriétaires riverains en présence des difficultés qu’on éprouvait à en faire supporter la dépense par les communes.
M. le président – Je demanderai à M. le ministre s’il se rallie à la proposition telle qu’elle a été adoptée par la chambre.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Je n’ai pas voulu jusqu’ici m’expliquer sur ce point ; j’ai préféré laisser aller la discussion, surtout en présence des réclamations unanimes des conseils provinciaux des deux Flandres qui demandent le maintien de l’ancien état de choses.
M. de Langhe – L’honorable M. d’Huart est dans l’erreur lorsqu’il croit que l’obligation d’entretenir les chemins vicinaux serait une charge non onéreuse, qui trouverait la compensation dans le droit de plantation. Je pense aussi que cette obligation peut exister, et qu’il y aurait peut-être du danger à l’abolir entièrement, mais je suis d’avis qu’il ne faut pas trancher la question dans la loi, et qu’il faut laisser aux tribunaux le soin de décider les contestations qui peuvent s’élever à cet égard ; sous ce rapport, j’appuierai le retranchement des mots « résultant d’usages locaux », qui tranchent la question en faveur de ces usages, tandis que selon moi, la légalité des usages locaux doit être abandonnée à l’appréciation des tribunaux.
Je proposerai donc à la chambre, d’abord, de retrancher le second paragraphe, et ensuite d’en insérer un autre ainsi conçu :
« Il n’est rien innové par le présente article aux obligations légales des particuliers, ni aux règlements des wateringues. »
M. de Roo – L’honorable M. d’Huart veut maintenir l’obligation pour les propriétaires d’entretenir les chemins ; il pense que c’est là un moyen d’assurer cet entretien ; moi, je crois, au contraire, que c’est à l’état actuel de la législation qu’il faut attribuer les mauvais états des chemins dans les Flandres, car l’usage qui oblige les riverains à entretenir les chemins n’est pas fort bien établi ; il donne lieu à beaucoup de réclamations, et si nous nous référons à cet usage, il en résultera une foule de procès.
J’ai dit, messieurs, que le droit de plantation résulte de ce que les propriétaires qui ont laissé prescrire le fonds sur lequel les chemins sont établis n’ont pas laissé prescrire également le droit de planter sur ce fonds, de sorte que le droit de plantation est une suite du droit de propriété ; il en est du moins ainsi dans la plupart des cas. Après cela, il peut y avoir des cas exceptionnels om il y ait des contrats, et certainement lorsque des contrats existent, il faut les respecter.
M. Dubus (aîné) – On a représenté, messieurs, l’obligation pour les communes d’entretenir les chemins vicinaux comme une règle générale qui ne souffre d’exception que dans les Flandres ; mais je ferai remarquer à la chambre qu’il y a d’autres provinces où cette obligation a toujours été soumis à des exceptions. Pour ce qui concerne la province du Hainaut, je n’aurai qu’à mettre sous les yeux de la chambre le texte du règlement de cette province sur l’entretien des chemins vicinaux, dont l’article 18 est ainsi conçu :
« les réparations, de quelque nature qu’elles soient, sont à la charge des communes, sauf les réparations et ouvrages qui compètent à des tiers, soit par l’effet de titres, soit en vertu d’usages. »
Vous voyez donc, messieurs, que le règlement reconnaissait aussi les obligations des tiers qui résultaient non seulement des titres, mais aussi d’usages.
Aujourd’hui l’on voudrait établir l’obligation absolue pour les communes d’entretenir les chemins en repoussant même les exceptions fondées sur les usages ; ces exceptions, messieurs, nous devons les respecter.
Je fais cette observation pour qu’on ne se trompe pas sur la portée des amendements qu’on voudrait introduire dans l’article en discussion. Si l’on ne fait pas mention des usages locaux, les communes seront grevées d’obligations qui maintenant ne pèsent pas sur elles. Je ne parle pas seulement ici des deux Flandres, je parle également du Hainaut et d’autres provinces où il existe également à la décharge des communes plus d’une obligation fondée sur les usages.
La règle que la section centrale s’est prescrite me paraît fort sage ; je vous rappellerai, messieurs, ce que disait cette section dans son premier rapport.
« La section centrale, est-il dit à la page 16 de ce rapport, n’a pas cru que la loi actuelle doive décider d’une manière absolue que les chemins sont ou ne sont pas des propriétés de la communes où ils sont situés, ni qu’ils doivent être entretenus par les communes dans tous les cas où elles en sont propriétaires, car il est des chemins que les communes entretiennent quoiqu’elles n’en soient pas propriétaires, comme il en est dont elles sont propriétaires qui sont entretenus par des particuliers. Ces points n’ont pas besoin d’être réglés par la loi actuelle ; il est préférable de laisser subsister ce qui exister sans blesser les droits acquis, pourvu que l’on prenne les mesures nécessaires pour assurer la conservation des chemins et leur entretien par ceux qui en ont aujourd’hui l’obligation… Ce but sera atteint au moyen du tableau et des plans des chemins que les communes seront obligées de faire dresser en vertu de l’article 2 du projet. Ces plans et ces tableaux indiqueront ceux qui doivent être entretenus par d’autres que la commune de leur situation ; on sent que les règles et les principes absolus qu’on poserait dans la loi, ne pourraient que gêner considérablement les communes lorsqu’elles procéderont à la reconnaissance des chemins et à la confection des plans ; il surgirait inévitablement un foule de contestations sur leur application. »
Ainsi, messieurs, lorsqu’au premier vote, en posant le principe que la dépense d’entretien serait à charge des communes, on a réservé les obligations particulières, légalement contractées ou résultant d’usages locaux, on n’a fait que consacrer ce qui se trouve consacré dans les règlements actuellement en vigueur, même dans les provinces où en général l’entretien des chemins vicinaux est à la charge des communes.
L’article 13 ne parle que des chemins vicinaux. Un honorable membre a demandé pourquoi on ne parlait pas des sentiers. Messieurs, la disposition, telle qu’elle a été admise, quant à son premier paragraphe, est la proposition du gouvernement ; ainsi, le ministre pourrait dire pourquoi il n’a proposé sa disposition que quant aux chemins vicinaux, et pourquoi pas aux sentiers vicinaux. Pour moi, j’ai vérifié ce qui en était dans la province dont je suis un des mandataires, et j’ai trouvé qu’un article formel du règlement qui s’exécute sans difficulté dans le Hainaut porte que l’entretien des sentiers est à la charge des riverains. Effectivement, partout où une propriété est traversée ou bordée par un sentier, c’est le propriétaire du terrain qui maintient le sentier en bon état, et qui y a d’ailleurs un très grand intérêt, car s’il ne le faisait pas, au lieu de passer sur le sentier, on passerait sur la terre ensemencée.
Si l’on soutient qu’il en est autrement dans d’autres provinces, qu’alors on propose d’ajouter au mot « chemins » le mot « sentiers » dans l’article 13, mais ce sera une raison de plus surtout si l’on supprime le deuxième paragraphe, de maintenir le dernier paragraphe, tel qu’il a été admis l’an dernier, avec la mention expresse des « usages locaux ».
Il y a encore, par exemple, dans le Hainaut, cet usage local général que l’entretien des sentiers est à la charge des riverains. Sans doute la chambre ne veut pas libérer les riverains de cette charge, pour l’ajouter à celui que les communes supportent déjà.
Mais faut-il supprimer le deuxième paragraphe proposé par le gouvernement ?
La section centrale a proposé cette suppression. Les honorables MM. Peeters et de Roo ont appuyé cette suppression, mais ils l’ont appuyée par des motifs tous différents de ceux qui ont déterminé la section centrale ; ils vous proposent cette suppression, parce qu’ils veulent abroger les usages qui existent dans des provinces tout entières, tandis que la section centrale n’entend pas abroger ces usages ; seulement elle avait pensé qu’il ne fallait pas déférer aux conseils provinciaux le droit de décider si ces usages devaient ou non être respectés. L’opinion de la section centrale était que si ces usages étaient fondés en droit, il devaient être maintenus, mas que pour cela la dernière disposition de l’article était suffisante.
Cette dernière disposition est ainsi conçus :
« Il n’est rien innové, par le présent article, aux règlements des wateringues, ni aux obligations particulières légalement contractées. »
Cependant, dans la discussion qui a eu lieu l’année dernière, on a cru que ce n’était pas assez de réserver les « obligations légalement contractées » et qu’il fallait ajouter ces mots : « ou résultant d’usages locaux » ; cette addition a été admise par la chambre.
La chambre n’aura pas de doute sur la véritable pensée de la section centrale, si elle se reporte aux développements qui se trouvent aux pages 21, 22 et 23 du recueil qu’on nous a distribué ; je ne relirai pas ces développements, dont chaque membre a pris sans doute connaissance, mais j’appellerai encore, au sujet de la même question, toute l’attention de la chambre sur une pièce écrite au nom du conseil provincial de la Flandre occidentale, et qu’on trouve aux pages 80 et suivantes du même recueil.
Ceux qui ont lu ces développements peuvent apprécier la gravité de la question, et combien il y aurait de la légèreté, pour ne pas dire plus, à vouloir changer brusquement les usages locaux, et de grever les communes, en libérant un grand nombre de particuliers qui ont acheté leurs propriétés sous la charge qui les grève actuellement, qui les grève depuis plusieurs siècles. Avant de libérer les propriétaires des charges qui leur incombent, il me paraît qu’il faut examiner de près la question, et si l’on ne veut pas que ce soient les conseils provinciaux qui décident, que tout au moins on laisse aux communes la faculté d’en référer aux tribunaux.
Ce n’est pas seulement le conseil provincial de la Flandre occidentale qui réclame tout entier ; c’est aussi le conseil provincial de la Flandre orientale. Il y a pour ainsi dire unanimité dans ces deux provinces pour faire maintenir l’usage. Ainsi, pourquoi irions-nous abroger un usage dont ces deux provinces demandent la conservation ?
On vous dit que c’est le moyen que les chemins vicinaux soient bien entretenus, et on ajoute qu’ils le sont mal dans les Flandres. Cette assertion est fortement contredite par une des pièces que je viens d’indiquer. On y dit formellement :
« On a dit que le mode suivi dans la Flandre nuit au bon état des chemins, parce que les propriétaires riverains cherchent tous les moyens de se soustraire à l’obligation d’entretien qui est souvent très onéreuse.
« C’est là une grave erreur. Et d’abord, si le règlement met l’entretien à charge des propriétaires ou occupeurs riverains, ceux qui connaissent la province savent que ce sont de fait ces derniers qui exécutent les réparations à leurs frais. D’un autre côté, ils n’ignorent pas non plus que les chemins vicinaux des Flandres ne se trouvent pas en plus mauvais état que ceux des autres provinces. »
Il me paraît qu’on a les mêmes moyes de contraindre à l’entretien des chemins vicinaux, soit que l’obligation pèse sur les particuliers, soit qu’elle pèse sur les communes ; je crois même qu’il doit être plus facile de contraindre les particuliers, car on s’est toujours plaint de la difficulté qu’il y avait à faire exécuter les obligations par les communes ; mais, en ce qui concerne les particuliers, cela est certainement plus facile ; je ne comprends donc pas comment il serait plus difficile d’obtenir des chemins en bon état de viabilité, parce que la charge d’entretien pèserait sur les particuliers.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Messieurs, on a demandé pour quel motif l’article 13 du projet du gouvernement ne faisait pas mention des sentiers. La raison en est toute simple : aucun article du projet du gouvernement ne fait mention expresse des sentiers, parce que dans l’article primitif l’on avait proposé une définition du chemin vicinal, qui comprenait les sentiers et les servitudes, à l’instar de ce qui s’était pratiqué dans tous les règlements provinciaux sur les chemins vicinaux. Cependant on a reconnu dans le sein de la section centrale qu’une définition était extrêmement difficile à faire ; l’on a prévu les longues discussions auxquels un projet de définition pouvait donner lieu, et par ces motifs, je me suis rallié à l’avis de la section centrale, et j’ai consenti à la suppression de la définition. La définition ayant été supprimée, il a bien fallu poser une énumération ; mais maintenant on a reconnu qu’une énumération présente d’autres difficultés, et l’on s’est réservé de revenir sur ce point, lors du second vote. Mais il était dans la pensée du gouvernement que les sentiers vicinaux soient compris dans la dénomination « chemins vicinaux » ; nous sommes donc parfaitement d’accord avec la section centrale en ceci, que l’entretien des sentiers vicinaux doit être à charge des communes, lorsque cet entretien n’est pas à la charge des propriétaires.
M. Cools – Messieurs, M. le ministre de l'intérieur ne s’est pas prononcé jusqu’à présent sur la question de savoir s’il adopterait la proposition de la section centrale, ou bien le projet primitif du gouvernement. Le doute qui l’arrête, c’est la crainte de heurter l’opinion de la Flandre. Je dois, comme un des représentants de cette province, donner quelques explications.
Je dirai d’abord que je me rallie à la motion de l’honorable M. de Roo. Je demanderai également la suppression des mots : « usages locaux. » Lors de la première discussion de la loi qui a eu lieu l’année dernière, le système qui paraît avoir été adopté par la chambre, a été de ne pas maintenir les usages des Flandres, et de faire entretenir les chambre par la généralité. Je tire cette conséquence de ceci, que MM. Verhaegen et Gendebien ont parlé dans le même sens ; ils ont prétendu qu’il ne fallait pas maintenir ces usages ; ils ont demandé la suppression du paragraphe 2, suppression qui a été votée par la chambre ; seulement l’honorable M. Gendebien a proposé alors un amendement consistant en ces mots : « ou résultant d’usages locaux. »
Mais la portée de cet amendement n’a pas alors été saisie par la chambre, et cela est tellement vrai qu’en ayant parlé au commencement de la discussion avec quelques membres, tous m’ont dit qu’il avait été décidé que l’entretien serait à charge de la généralité. Il s’agit donc de se prononcer sur le maintien des mots : « usages locaux », dont aujourd’hui seulement on saisit la portée.
En ce qui concerne la Flandre orientale, je dirai que les six commissaires voyers se sont unanimement prononcés contre le système de l’entretien à charge des riverains.
Il y en avait un seul qui voulait qu’on laissât l’entretien à la charge des riverains, mais il s’est rangé plus tard à l’opinion de ses collègues. Je peux en parler pertinemment, car les avis des commissaires voyers ont été envoyés au conseil provincial dont je faisais partie. Les agents chargés de l’exécution de la loi ont donc été unanimes pour ne pas mettre l’entretien à la charge de des riverains. Pour ce qui regarde la Flandre occidentale, je n’ai pas de renseignements aussi positifs ; mais, à en juger d’après des entretiens que j’ai eus avec quelques-uns de mes collègues de cette province, on n’y est pas plus disposé à laisser l’entretien des chemins vicinaux à la charge des riverains ; d’ailleurs les observations de M. de Roo vous le démontrent assez.
Cet usage est mauvais surtout en ce qu’il fait naître une masse de contestations entre voisins. Les riverains de droite et de gauche élèvent des contestations sur le point de savoir jusqu’où ils doivent aller. Dans les Flandres, cette question d’entretien est d’autant plus importante que le terrain est plat et qu’il faut mettre des bois. On ne s’entend pas sur le point de savoir s’il faut mettre ces bois de demi largeur du chemin ou de largeur entier.
Il y a une autre difficulté : en laissant l’entretien à la charge du riverain, il faut aller le prévenir, il est ou malade ou absent, un retard s’ensuit, la moisson arrive et la réparation ne se fait pas. Le plus grand inconvénient est cependant celui-ci : lorsque vous laissez l’entretien à la charge du riverain, vous mettez le bourgmestre, qui est chargé de faire exécuter la mesure, en contact continuel avec les propriétaires, souvent plus puissants que lui, et qu’il croit devoir ménager en vue des élections. Cela s’attache à notre organisation constitutionnelle. Vous n’aurez jamais un bon entretien, si vous voulez que les bourgmestres donnent l’ordre de le faire aux grands propriétaires.
Si, dans la suite de la loi, vous conservez les prestations personnelles, il y aura bien encore contact entre le bourgmestre et l’électeur ; mais cette charge là, répartie sur la généralité, est infiniment moins pesante pour chaque contribuable ; et dès lors, elle suscitera beaucoup moins d’opposition. Le but essentiel de la loi, c’est d’avoir des chemins en bon état. Si vous voulez que l’agent du gouvernement donne des ordres, souvent à plus puissant que lui, vous n’aurez jamais de chemins bien entretenus.
Je crois pouvoir prouver que cet usage est injuste. Il y a des riverains en première, en deuxième et en troisième ligne ; les riverains en deuxième et troisième ligne se servent du chemin, tout aussi bien que le riverain en première ligne, et ils ne contribuent en rien à l’entretien. Il est évident que c’est une charge injuste. Si on fait entretenir le chemin par le riverain en première ligne, on devrai faire également contribuer les autres à cet entretien.
On a parlé de cadeau qu’on ferait aux riverains. Je ne comprends pas cette expression. Si on entend par cadeau dégrever des particuliers pour mettre sur la généralité, je dirai que nous faisons cela à chaque moment ; quand nous faisons des lois d’accises, par exemple, on fait des cadeaux à des individus, ou a des corporations pour répartir la charge sur les voies et moyens. C’est la tendance de la législation moderne ; et quand on a supprimé la dîme, les tailles et les corvées, on a fait les cadeaux pareils à des individus ou à des corporations. Jamais on ne s’est arrêté à ces considérations quand on a fait des lois. Je concevrais l’objection si on grevait des particuliers au profit de la généralité ; mais c’est ici la généralité qu’on grève au profit des particuliers. Il faut mettre la charge sur la généralité ; c’est ainsi que j’appuiera la proposition.
M. Demonceau – Je dois commencer par déclarer, avec M. Verhaegen, qu’il y a nécessité de s’exprimer plus clairement en ce qui concerne les dépenses relatives aux chemins vicinaux. Dans les séances précédentes, il a été souvent question des chemins et senties vicinaux ainsi que des servitudes vicinales de passage ; je vous ai dit, pour mon compte, que j’envisageais comme servitude vicinale de passage le droit que peut avoir une généralité d’habitants de passer sur le terrain d’autrui. Vous comprenez combien est générale cette définition : elle embrasse les passages de toutes espèces, à pied, avec chevaux, charrettes, etc. il peut se faire que ces servitudes dans beaucoup de localités, sont entretenues par les communes. Je pourrais même en indiquer.
Quant aux sentiers, il est des localités à ma connaissance, où les frais d’entretien sont à la charge des communes. Ce sera facile à concevoir quand on saura que dans certaines provinces on s’était borné à donner la seule qualification de « chemins vicinaux » à tout espèce de chemin autre que les routes de l’Etat ou de la province. Il me semble qu’il serait prudent de dire que les dépenses relatives aux chemins et sentiers vicinaux sont à charge des communes, je crois même qu’il conviendra lors du second vote, d’ajouter les servitudes vicinales de passage.
Voilà pour ce qui concerne cette partie.
Maintenant je vais donner, si je me souviens bien, les véritables causes qui ont déterminé le rejet du deuxième paragraphe proposé par le gouvernement. Ce paragraphe n’avait pas spécialement pour but de maintenir certains règlements dans les Flandres, mis il donnait aux conseils provinciaux en général le droit de mettre à la charge des particuliers propriétaires riverains les réparations des chemins vicinaux en tout ou en partie.
Je n’ai pas pris part à la discussion, mais je me souviens qu’il a été reconnu qu’un droit pareil serait exorbitant entre les mains des conseils provinciaux. Il est certain que c’était leur donner le droit de déclarer que tout riverain était obligé de réparer, entretenir les chemins vicinaux ; il fut par suite reconnu qu’il valait mieux laisser le pouvoir judiciaire, juge des cas où il devait en être ainsi ; et par ce motif, je pense, un honorable collègue (je crois M. Gendebien) proposa l’adjonction, qui fut admise, des mots : « ou résultant d’usages locaux. »
Voici comment on expliqua cet amendement. Je raisonne toujours d’après mes souvenirs. Les usages locaux doivent, autant que possible, être respectés ; s’ils établissement pour les riverains l’obligation d’entretenir et réparer les chemins, la commune pourra les contraindre, et, en cas de contestation sur le droit, les tribunaux pourront être saisi de la contestation qui doit être de leur ressort.
Ceux qui demandent la suppression de ce paragraphe et qui ne veulent pas des mots « ou résultant d’usages locaux » voudraient-ils faire décider, par le pouvoir législatif, que les communes ont perdu le droit qu’elles peuvent tenir, soit de transactions, soit d’usages constants de faire supporter, par des riverains, la charge de l’entretien ? Car il existe, nous devons bien le croire, plusieurs chemins qui ont été concédés ou que les communes ont acceptés en échange d’autres chemins, à charge par les propriétaires de les entretenir.
Dans notre position de législateurs, nous ne devons pas raisonner pour telle localité, mais faire des lois qui s’appliquent à la généralité du pays. Quel inconvénient trouve-t-on d’adopter les systèmes admis lors de la première discussion ? Vous voulez avoir, dites-vous, des chemins bien entretenus ; les administrations communale et provinciale doivent vouloir la même chose. Eh bien, si ces administrations pensent qu’en mettant les frais d’entretien et de réparations à charge des riverains, ainsi qu’elles pensent en avoir le droit, par suite d’un usage constant, le but en peut être atteint, il leur sera libre de mettre ces dépenses à charge de la commune. Mais il peut se faire que les communes aient de très fortes raisons pour exiger que les riverains fassent la dépense de l’entretien. En adoptant les mots : « non résultant d’usages locaux » et en ajoutant les mots : « obligations particulières légalement contractés », nous laissons les communes libres de faire ce qu’elles veulent ; nous n’ôtons à personne des droits acquis. C’est là, je crois, justifier logiquement la disposition. Si les communes trouvent qu’il y a danger à vouloir imposer la charge d’entretenir les chemins à des riverains, elles ne le feront pas. Elles seront maîtresses d’agir comme elles l’entendront. C’est à elles à régler leur intérieur, sous la surveillance de l’autorité supérieure. Vous craignez dites-vous, les procès auxquels cette disposition pourra donner lieu ; mais vous pourrez aussi en faire naître en la rejetant.
La proposition de la section centrale amendée me paraît donc acceptable, et j’en voterai l’adoption.
M. Dubus (aîné) propose d’ajouter un dernier paragraphe de l’article ces mots : « ou résultant d’usages locaux. »
M. F. de Mérode – Il peut se faire que par la loi que nous faisons les obligations des riverains se trouvent augmentées. Il y a différentes manières d’entretenir les chemins vicinaux. Autrefois on ne faisait pas d’autres réparations que de creuser des fossés et combler les ornières, du moins dans certains pays. Peut-être d’après la loi que nous allons voter, il y aura accroissement, qu’on voudra empierrer, qu’on ne se contentera pas de séparations qui servent pendant la bonne saison, mais qui n’empêchent pas ses chemins d’être tout à fait impraticables pendant l’hiver. Je désire savoir comment on entend appliquer aux riverains cette obligation d’entretenir les chemins vicinaux.
Si une commune décide qu’elle empierrera un chemin vicinal, le propriétaire riverain sera-t-il obligé d’empierrer la partie du chemin qui longe sa propriété. (Dénégations.)
En général, je trouve que cet entretien, par les propriétaires riverains, est un matière assez sujette à difficultés et à procès. Ne serait-il pas préférable qu’il fût pourvu à tous les entretiens, par tous les habitants de la commune ? J’avoue, du reste, que je ne sais trop comment me prononcer sur une question aussi complexe. On a dit que, dans les Flandres, l’entretien des chemins vicinaux est à la charge de propriétaires riverains ; pourquoi les Flandres sont-elles dans cette position exceptionnelle ? je n’ai pas mes apaisements à cet égard. Je voudrais savoir aussi si la loi française, votée récemment sur cette matière, a maintenu les usages locaux.
M. Verhaegen – La loi française est générale.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – On a demandé si l’on pouvait aggraver les charges des propriétaires riverains. Il n’est nullement question de cela ni dans le projet du gouvernement, ni dans celui de la section centrale.
On s’est demandé ensuite ce qui arriverait si une commune voulait empierrer un chemin vicinal. Dans ce cas l’obligation du propriétaire riverain se borne à l’entretien des fossés et des accotements.
Il est une remarque à faire, qui n’est peut-être pas sans importance, c’est qu’il n’y a pas de province où il y ait autant de chemins vicinaux pavés que dans les Flandres. D’où vient cette circonstance ? Ne peut-on l’attribuer à ce que, ans ces provinces, les communes n’ont pas la charge d’entretien des chemins vicinaux. Cette charge pèse sur les propriétaires riverains. Dès lors les communes peuvent dépenser d’autant plus de fonds pour paver de pareilles communications. Si maintenant on dégrevait les propriétaires riverains de cette obligation, les communes n’auraient plus les mêmes ressources.
On a dit que les administrations communales craignent d’exiger des propriétaires riverains l’accomplissement de leurs obligations, surtout lorsque les propriétaires sont des électeurs. Mais cette même difficulté se représente, quelque mode que vous adoptiez pour l’entretien des chemins vicinaux ; car toujours les administrateurs communaux craignent de grever leurs administrés d’une charge qu’ils trouveront mauvaise et de provoquer ainsi contre eux un vote défavorable.
Le devoir des administrateurs communaux est de faire comprendre à leurs administrés leur propre intérêt et l’intérêt de la commune, de déraciner les préjugés.
M. Milcamps – Messieurs, j’adopterai l’article tel qu’il est proposé par la section centrale ; cet article établit, en règle générale, que l’entretien des chemins vicinaux est à la charge des communes ; contient une exception dans le cas de convention ou d’usages locaux. Je trouve dans cette obligation la garantis des droits de la commune.
Je pense qu’il faut ajouter à l’expression « chemins » le mot « sentiers » et dire : « les dépenses relatives aux chemins et sentiers vicinaux sont à la charge des communes. »
Cette addition, messieurs, est nécessaire pour coordonner différentes dispositions de la loi. Elle ne doit pas effrayer, car il n’y aura de chemins, de sentiers vicinaux que ceux qui seront portés comme tels dans les plans généraux.
Quand la commune croira avoir des motifs de considérer un chemin ou un sentier comme vicinal, elle l’indiquera, et dans ce cas, il sera naturel d’en conclure qu’elle en mettra la dépense à la charge de la commune, à moins d’usages locaux contraires.
Quant aux chemins qui sont des servitudes, elle les indiquera également dans les plans généraux.
Nous examinerons alors si sous les mots « sentier vicinal » on pourrait comprendre les sentiers de servitude. On peut le soutenir, mais c’est fort douteux, et je donnerai au second vote mes raisons de douter, non pas pour prétendre que les servitudes ne doivent pas être imprescriptibles, mais quant à leur vicinalité. J’ai eu occasion ce matin de trouver ce point traité, mais j’en remets la discussion au second vote.
M. Vandenbossche – On doit bien savoir que, dans les deux Flandres, et peut-être dans d’autres provinces, c’est un usage général que la réparation des chemins vicinaux est à la charge des propriétaires riverains. Vu cet usage général que beaucoup de localités désirent voir supprimer, si nous ajoutons à l’article, comme le propose la section centrale, qu’il n’est en rien innové aux usages locaux, la loi devient inutile pour les Flandres. Dans ce cas, si on veut faire exception pour quelques communes, je préfère de beaucoup la disposition du second paragraphe de l'article du gouvernement qui ne fait exception que pour le cas où les communes auraient réclamé. Mais si vous maintenez dans la loi les mots : « ou résultant d’usages locaux » il sera impossible d’appliquer la loi dans les Flandres, puisque l’entretien des chemins vicinaux par les propriétaires riverains est un usage général dans ces provinces. Ainsi de toute nécessité il faut retrancher ces mots.
M. Verhaegen – L’honorable M. Vandenbossche vient de toucher la véritable question ; je vais me permettre, moi, de la développer.
Je n’examinerai pas s’il convient de mettre les dépenses d’entretien des chemins vicinaux à la charge des communes ou des propriétaires riverains ; tout ce que je vois, c’est qu’il s’agit d’intérêts divers. Dans les Flandres, il s’est maintenu d’anciens usages qui sont corrélatifs. Là, c’est un usage de mettre l’entretien des chemins à la charge des riverains ; il y a un autre usage qui donne aux riverains le droit de planter le chemin. C’est le propriétaire qui plante et c’est le fermier qui paie l’entretien. Voilà le fin mot ; mais je ne m’occupe pas de cela ; il ne m’importe qu’une chose : c’est que, quand je fais une loi, je n’en abandonne pas les premiers caractères. Je ne veux pas faire une loi qui manque aux premiers principes d’une loi. Je commence par me demander ce que c’est qu’une loi ; la discussion actuelle nous conduit là. Est-ce bien une disposition générale qui concerne tout le royaume, ou bien une loi s’applique-t-elle à quelques provinces à l’exclusion des autres ?
Dans les Flandres, il y a des usages et même des usages écrits, car les coutumes ne sont que les usages constatés par écrit ; il y a des usages qui mettent l’entretien de tous les chemins à la charge des riverains ; ainsi la coutume d’Alost met à la charge des riverains l’entretien de tous les chemins et même l’entretien de la Dendre. Si vous dites ; « sans préjudice des usages locaux », vous déclarez que votre loi n’est pas applicable aux provinces où ces usages existent, vous rentrez dans les coutumes, vous divisez le pays en coutumes ; vous aurez bien vouloir le pallier, cela est inévitable ; Eh bien, messieurs, je ne veux pas assumer la responsabilité d’un pareil système.
Je veux bien admettre l’amendement de l’honorable M. de Langhe qui consiste à dire : « sans préjudice aux droits légalement acquis », parce qu’en effet une loi ne peut pas enlever des droits acquis, mais je ne puis pas admettre un amendement qui consiste à dire : « sans préjudice aux usages existants », car ce serait rentrer dans le système coutumier. Vous avez dans les Flandres des usages, vous avez dans le pays d’Alost des usages écrits, des coutumes ; vous allez les rétablir ; vous avez peut-être dans le Luxembourg, dans le Limbourg, dans le pays de Liége, des usages tout à fait différents de ceux qui existent dans les Flandres ; vous allez également les rétablir ; vous aurez donc une législation différente pour chaque province, que dis-je ? pour chaque commune ; vous aurez même des communes dont les usages seraient contraires aux usages généraux de la province. La petite Belgique sera donc de nouveau régie par le droit coutumier, et ce sera une législature belge qui aura rétabli ce beau système ?
Croyez-vous, messieurs, que la loi française ait maintenu le système coutumier ? il y avait aussi en France des usages ; eh bien, croyez-vous qu’on ait dit là ce que l’on veut dire ici : « sans préjudice aux usages locaux » ? Non, messieurs, la loi française est générale.
Je ne veux pas toujours aller chercher des exemples en France, mais quand il s’y trouve quelque chose de bon, je ne sais pas pourquoi nous n’en profiterions pas. Or, en fait de législation, je ne crains pas de le dire, là nous trouvons nos maîtres. Quand j’ai parlé hier du code civil, dont on voulait abroger une disposition parce que disait-on, « l’on avait vu à regret que le législateur avait fait disparaître des dispositions préexistantes », j’ai dit, comme je le dirai toujours, que le code civil a été fait par des gens qui s’y connaissaient et qu’il faudrait avoir de graves motifs pour faire une loi qui fût en désaccord avec celle-là.
Vous voulez, messieurs, maintenir les usages locaux, eh bien, c’est faire autant de lois qu’il y a d’usages différents, de coutumes différentes ; ce sera comme si vous disiez : « dans la province du Brabant et dans telle et telle autre province, l’entretien des chemins vicinaux sera à la charge des communes ; dans les Flandres cet entretien sera à la charge des riverains ; » et ainsi de suite.
Je vous le demande, messieurs, est-ce qu’une pareille loi serait tolérable ? Je vous l’avoue, messieurs, il me ferait peine d’avoir fait partie d’une législature qui aurait admis un semblable principe. Eh bien, messieurs, ce que vous ne voudriez sans doute pas insérer dans la loi d’une manière aussi positive, on vous propose de l’y insérer d’une manière indirecte, en maintenant les usages locaux et en leur donnant ainsi force de loi.
Ce qui fait que quelques membres versent dans cette erreur, c’est qu’ils confondent les conventions légalement faites avec les usages ; mais je prie ces membres de ne pas perdre de vue la différence immense qu’il y a entre des conventions légalement faites et des usages : une convention légalement faite donne des droits et pour le passé et pour le futur, mais l’usage ne donne de droits que pour le passé, car ce sera sans doute faire une large concession que de dire que, dans certains cas, les usages ont la même force que la loi ; or, la loi ne donne pas de droits pour le futur.
Il y a plus, messieurs, si vous adoptiez le système que nous combattons, vous dérogeriez à un principe constitutionnel : Qu’est-ce donc que l’entretien des chemins par les riverains ? Mais c’est une véritable charge, un véritable impôt communal ; vous allez donc, dans certaines localités, frapper les riverains d’un impôt pour l’entretien des chemins vicinaux ; mais avez-vous oublié qu’en matière d’impôts, il ne peut y avoir de privilège ? cependant vous frapperiez les riverains dans les Flandres d’un impôt dont ils ne seraient pas frappés dans les autres provinces.
Je croirais, messieurs, faire injure aux lumières de la chambre si j’insistais davantage sur ce point ; je suis persuadé qu’elle comprendra que faire une loi comme celle qu’on nous propose, ce serait pécher contre les premières notions en matière de législation.
M. Demonceau – A entendre l’honorable M. Verhaegen, il semblerait que nous proposons une monstruosité ! Je le demande, messieurs, à quiconque connaît le code civil, n’y trouve-t-on pas une foule de dispositions où le législateur renvoie aux usages locaux ? or, que disons-nous dans l’article en discussion ? nous disons que si, d’après les usages des lieux, les riverains doivent pourvoir en tout ou en partie à la réparation des chemins, les communes pourront contraindre les riverains à faire ces réparations ; et quelle est l’autorité que nous voulons voir appeler à juger de la force de ces usages ? l’autorité judiciaire. Est-ce là une chose si extraordinaire ? mais nous ne faisons que ce qu’ont fait les auteurs du code civil ; en vérité, messieurs, j’en suis fâché pur l’honorable préopinant, mais je croirais, à mon tour, manquer à la chambre si je lui répondais plus longuement.
M. Dubus (aîné) – Messieurs, l’honorable M. Verhaegen a voulu rendre odieux le vote que l’année dernière vous avez émis une très forte majorité, sur la proposition de l’honorable M. Gendebien. Ce vote, messieurs, vous n’avez pas à le regretter, comme l’honorable membre devrait regretter l’écart assez étrange, selon moi, qu’il vient de faire ; il a inculpé en quelque sorte la résolution de cette chambre, résolution qu’il est aisé de justifier. L’honorable membre a perdu de vue qu’il existe des dispositions tout à fait semblables dans le code civil. Oui, messieurs, il y a des usages respectables ; il y a des usages locaux qu’un législateur sage doit respecter, et à l’égard desquels il fait bien de ne pas froisser les habitants de telle ou telle localité ; cela a toujours été reconnu par les sages législateurs, et dans beaucoup de circonstances ils ont eu égard à de semblables usages sans penser que lorsqu’ils les consacraient formellement par la loi, il se couvraient de honte, sans penser que par là ils faisaient une loi monstrueuse.
Je citerai au hasard une ou deux disposions semblables qui se trouvent dans le code civil par une foule d’autres de la même nature. On lit dans l’article 671 de ce code :
« 671. Il n’est permis de planter des arbres de haute tige qu’à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants, ou par les usages constants et reconnus ; et, à défaut de règlements et usages, qu’à la distance de deux mètres de la ligne séparatrice des deux héritages pour les arbres à hautes tiges, et à la distance d’un demi-mètre pour les autres et haies vives. »
Ces usages peuvent varier selon les provinces et les communes et dans le fait ils varient ; le législateur n’a pas pensé pour cela qu’il restait dans le droit coutumier, qu’il faisait une loi monstrueuse, mais il a cru que sur ce point il était utile de respecter les usages locaux.
Toute la question se borne donc, en pareille matière, à celle de savoir s’il convient de respecter les usages locaux, et c’est précisément là la question dans laquelle l’honorable membre a déclaré qu’il ne voulait pas entrer ; il a commencé par dire qu’il ne voulait pas examiner la question de convenance, mais il a posé des règles générales qui, selon lui, ne souffrent aucune exception et auxquelles le législateur ne pourrait pas déroger sans se déshonorer ; il voudrait que toutes les dispositions de la loi, quelque minime qu’en fut l’objet, fussent toujours placées sous le niveau de l’uniformité.
Voici, messieurs, encore une disposition du code civil, c’est celle de l'article 674 :
« 674. Celui qui fait creuser un puits ou une fosse d’aisance près d’un mur mitoyen ou non ; celui qui veut y construire cheminée ou âtre, forge, four ou fourneau, y adosser une étable, ou établir contre ce mur un magasin de sel ou amas de matières corrosives, est obligé de laisser la distance prescrite par les règlements et usages particuliers sur ces objets, ou à faire les ouvrages prescrits par les mêmes règlements et usages, pour éviter de nuire au voisin. »
Vous avez une disposition semblable pour les murs de clôture ; vous en avez une foule d’autres dans lesquelles le législateur se réfère aux usages locaux, et qui ne concernent que les localités où de semblables dispositions n’existent pas.
Ce n’est donc pas chose étrange qu’on renvoie aux usages locaux alors qu’il y a utilité des les maintenir, or, c’est précisément la question d’utilité que l’honorable membre n’a pas voulu accorder.
Et lorsqu’ont été faits les règlements relatifs aux chemins vicinaux, on y a aussi inséré le renvoi aux usages locaux, témoin le règlement des états du Hainaut, approuvé en 1824. le conseil du Hainaut a reconnu aussi dans ce règlement qu’il était utile de respecter les usages, et de les consacrer par la disposition que ce collège a prise.
D’après l’honorable membre, il faudrait donc abroger tous les usages contraires à la disposition générale qui met les réparations des chemins et sentiers à charge des communes. Il en résulterait que quels que soient les usages qui existent dans toutes les provinces, non seulement tous les chemins, à quelque classe qu’ils appartiennent, mais encore tous les sentiers, seraient à la charge des communes. Voilà une charge pour la commune, qu’il est difficile peut-être d’apprécier, et notamment en ce qui touche le sentier. Et à cet égard je prie la chambre de considérer un instant la position des communes.
Dans le Hainaut, une disposition formelle met les réparations des sentiers à charge des riverains ; cet entretien serait donc à charge des communes. Mais qu’arrive-t-il ? il arrive que, pour peu que le sentier soit en mauvais état, on passe à côté, et on a le droit de passer à côté, en vertu d’une loi française de 1792, je pense ; mais en même temps, lorsqu’il s’agit des chemins à charge des communes, cette loi ouvre encore aux particuliers une action en indemnité contre les communes, pour le cas où le mauvais entretien des chemins forcerait de passer sur les terres ensemencées. Chaque année, les communes sont exposées à de semblables procès, eh bien, si vous insérez dans la loi une disposition générale, qui mette les sentiers mêmes à charge des communes, vous allez attirer sur les communes une foule d’actions en indemnité, et beaucoup de communes seront ruinées par ces procès.
Je ne reviendrai pas sur beaucoup d’autres raisons qui ont été données mais j’insiste plus que jamais sur l’amendement que je reproduis et qui n’est que l’amendement qu’avait proposé l’honorable M. Gendebien.
On a mis en doute la portée de cet amendement ; mais, messieurs, je n’ai qu’à lire un passage de l'opinion de l'honorable M. Gendebien, pour établir clairement la portée de son amendement. J’avais pris la parole l’an dernier pour répondre à ceux qui voulaient abroger les usages qui ont été respectés jusqu’ici dans les Flandres, et voici comment l’honorable M. Gendebien m’a répondu :
« M. Gendebien – Messieurs, lorsqu’une loi est restée pendant 40 ans sans être exécutée, il y a lieu, j’en conviens avec M. Dubus, de rechercher les causes de cette non-exécution. Je ne prétends pas approfondir la question de fait. Je ne pourrais la traiter d’une manière complète ne connaissant pas assez les Flandres ni les raisons particulières qu’elles ont pu avoir de ne pas exécuter la loi, mais je dirai, encore avec M. Dubus, qu’il y a lieu d’avoir égard à ce fait de la non-exécution d’une loi pendant 40 ans et de ménager l’usage qui a remplacé cette loi ; mais c’est précisément pour cela que je propose de statuer qu’il n’est rien innové aux obligations particulières légalement contractées, « ou résultant d’usages locaux » et que dans tous les cas, les tribunaux auront à décider si l’usage existe réellement et dans quelle étendue.
« Je crois, messieurs, que c’est là le meilleur moyen de faire respecter un usage qui, aux yeux de l’honorable M. Dubus, paraît si respectable. »
Je crois que ce passage ne peut laisser aucun doute sur la portée de l’amendement de l’honorable M. Gendebien.
M. Verhaegen (pour un fait personnel) – Messieurs je viens d’être l’objet d’une attaque de la part de deux honorables préopinants, comme si j’avais mis le salut de la patrie en danger ! Ces honorables membres m’ont supposé une idée que je n’ai pas émise, m’ont prêté des mots qui ne sont pas sortis de ma bouche. J’en appelle aux souvenirs de tous mes honorables collègues qui m’entendent. Ai-je dit, moi, que la législature se déshonorerait, qu’elle se couvrirait de honte ? j’ai dit que ce serait manquer aux premières notions du droit que d’adopter la disposition que j’ai combattue, j’ai dit que je ne voudrais pas assumer la responsabilité qui résulterait de la confection d’une loi qui serait contraire aux premières notions de législation. Voilà ce que j’ai dit et je le maintiens.
Messieurs, je ne suis pas responsable de ce qu’a dit l’honorable M. Gendebien, en développant son amendement. M. Gendebien avait son opinion, moi, j’ai la mienne, et vous savez, au reste, messieurs, dans quelles circonstances les premiers articles du projet de loi ont été votés l’année dernière. Maintenant il ne faut pas vous le dissimuler, tout ce que j’ai dit se résume en ce peu de mots : si vous adoptez le projet, vous maintenez les coutumes, et vous faites de la Belgique un pays coutumier.
L’article 602 du code civil qu’on a cité, et qui parle des plantations d’arbres, n’a aucun rapport avec le cas actuel. Il ne s’agit là que de mesures de police. Si le législateur avait dit dans cet article qu’il serait permis de planter des arbres dans telle partie du pays, et de n’en pas planter dans telle autre, il aurait fait alors ce que vous voulez faire et ce que je combats.
M. Dubus (aîné) – Messieurs, l’honorable préopinant se plaint d’une attaque, mais ce qu’il appelle une attaque, n’était qu’une réponse. En effet, il y avait attaque, non seulement contre ceux qui partagent l’opinion qu’avait M. Verhaegen l’année dernière, et qu’il paraît avoir abandonnée, mais encore contre la chambre qui a consacré par son vote la disposition qu’il combat.
J’appose à M. Verhaegen ce qu’il a dit l’année dernière :
« M. Verhaegen – Quant à l’amendement de M. Gendebien, il est la conséquence du dernier paragraphe ; il est la conséquence de tout ce que nous venons de dire pour démontrer la nécessité de retrancher le deuxième paragraphe.
Si nous ne voulons pas abandonner aux conseils provinciaux le droit de décider un question de propriété, nous ne voulons pas non plus enlever aux tribunaux le droit de juger la question quand elle se présentera.
Il peut exister des usages locaux établis par la loi ; c’est aux tribunaux qu’il faut laisser le droit de reconnaître ceux qui ont ce caractère (…) »
Vous voyez qu’alors l’honorable membre n’était pas aussi hostile aux principes locaux qu’il l’est aujourd’hui.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Je veux uniquement présenter à la chambre l’opinion qui a été émise par les conseils provinciaux des deux Flandres sur la question qui nous occupe.
Voici un passage d’une lettre du gouvernement de la Flandre occidentale.
« Vous remarquerez par ces dernières pièces, M. le ministre, que le conseil, à l’unanimité des voix, à chargé la députation permanente en premier lieu, d’insister pour le maintien de l’article 13 du projet du gouvernement (…) »
Le conseil provincial de la Flandre orientale émet la même opinion. Voici un extrait du procès-verbal de la séance du 20 juillet 1838 de ce conseil :
« M. De Smet propose que le conseil émette l’avis qu’il soit ajouté au projet des dispositions concernant les plantations et fossés des chemins vicinaux et les cours d’eau, en rapport avec ces chemins, ainsi qu’une disposition qui laisserait aux conseils provinciaux la faculté de statuer que les dépenses d’entretien de ces fossés et cours d’eau demeureront, en tout ou en partie, à la charge des propriétaires riverains, là où l’usage se trouve établi ; ainsi que cette faculté est laissée audit conseil par le paragraphe 2 de l’article 12 du projet, pour ce qui concerne la dépense de l’entretien des chemins.
« Cette proposition est adoptée à l’unanimité. »
Ainsi, voilà les deux conseils provinciaux qui, à l’unanimité, ont approuvé le projet du gouvernement, et regardé de la proposition de la section centrale comme insuffisante. L’amendement de M. Gendebien, adopté dans la dernière session, répondait en grande partie au but que s’était proposé le gouvernement, et c’est pour ce motif que je n’ai plus insisté pour l’adoption du projet du gouvernement.
Je viens de faire cette lecture, pour faire voir que ces usages ne devraient pas être si préjudiciables à l’entretien des chemins vicinaux ; car il n’est pas possible que les conseils de ces deux provinces, composés de députés cantonaux, aient émis à l’unanimité un avis semblable, si les usages étaient réellement si préjudiciables. Ceci mérite toute l’attention de la chambre, car c’est un fait remarquable que cette unanimité des deux conseils provinciaux, en présence surtout de l’opinion contraire de la section centrale de la chambre des représentants.
M. Desmet – Messieurs, l’honorable M. Cools a déjà répondu à l’avis émis par le conseil provincial de la Flandre orientale, et je crois que M. Verhaegen y a aussi implicitement répondu.
Messieurs, vous n’avez qu’à consulter nos fermiers, et vous verrez que tous se plaignent avec raison de l’injustice qu’on commet à leur égard, en faisant retomber sur eux cette charge, qui est un véritable impôt extraordinaire.
Je ne veux pas entrer dans des détails sur le vote du conseil provincial, mais ce vote me paraît fort aisé à expliquer ; je crois qu’on n’y a pas bien examiné toute la charge qui incombait aux autres cultivateurs, qui n’est déjà que trop surchargé par les hauts fermages.
Les commissaires de district sont plus à même de connaître l’opinion des fermiers ; ils prennent des informations chez les bourgmestres, et ils savent quels sont les besoins des campagnes ; et, comme vous l’a très bien fait remarquer l’honorable M. Cools, les six commissaires de district de la province de Flandre orientale ont tous émis l’avis de supprimer la charge aux propriétés riveraines pour l’entretien des chemins vicinaux. Qu’on veuille consulter les campagnes, on saura de suite de quel côté penche la grande majorité et combien de vœux on ne fait pas pour décharger les Flandres de cette charge extraordinaire.
On semble croire que ce sont des usages locaux qui dans les Flandres ont donné un droit acquis aux communes. Cela ne s’est pas passé ainsi ; chez nous, messieurs, depuis plusieurs siècles l’entretien des chemins se trouvait à charge des propriétaires. On a déjà fait remarquer à cet égard que l’entretien des grandes routes aussi bien que les sentiers, les rivières même, était une charge riveraine. Ce n’était pas un passage local, mais la loi et les coutumes en ordonnaient ainsi. Nous avons, depuis 1505, un édit qui règle cette matière. Il ne peut donc être question ici d’un droit acquis en faveur des communes ; elles n’ont jamais pu acquérir aucun droit à ce sujet ; car comme on l’a déjà dit, ce sont toujours des décrets, des édits, qui ont réglé l’entretien des chemins et qui en ont chargé la propriété riveraine ou les occupants de cette propriété, car, qu’on veuille y prendre attention, ces mêmes décrets en chargeait spécialement les occupants des terres riveraines et non les propriétaires.
Ce n’est pas dans les Flandres seules qu’existait cette législation, mais presque dans toutes nos provinces, avant la réunion à la France ; et aujourd’hui, dans le Brabant, le règlement contient encore qu’une partie des chemins vicinaux sont à la charge des propriétaires riverains. Si vous établissez une semblable exception dans la loi, vous allez voir surgir une multitude de procès ; les communes vont croire qu’il y a droit acquis en leur faveur, et porteront les questions devant les tribunaux. Nous savons que la charge sera forte, si les frais d’entretien sont supportés par les communes. Mais il n’y a aucune raison, aucun motif pour mettre les Flandres hors de la loi commune, et de leur faire supporter une charge dont les provinces voisines sont déchargées. Ce serait, et je ne puis assez le dire, une exception de criante injustice, et un privilège en faveur d’une partie du pays. Tout le monde demande une loi générale ; et je ne puis concevoir quels seraient les motifs d’établir une exception si monstrueuse.
M Cools vous a fait remarquer que maintenant les chemins sont mal entretenus. Il est vrai que les parties sablonneuses des chemins sont toujours bonnes ; mais les parties argileuses sont constamment mauvaises ; et c’est la majeure partie de nos chemins. Presque partout on réclame pour que l’entretien de ces chemins soit mis à la charge des communes. Qu’est-ce qui arrive maintenant ? Que l’un répare et que l’autre ne fait rien ou fait mal, jette de la mauvaise terre sur le chemin, au lieu d’en mettre de la bonne. C’est pour cela que les chemins sont si mauvais et que le vœu général dans les Flandres est que leur entretien soit mis à la charge de la commune.
L’honorable M. Verhaegen a fait observer que par les mots « chemins vicinaux », on ne savait pas exactement quels chemins il s’agissait d’entretenir. Vulgairement, on appelle vicinal un chemin de commune à commune. Il est vrai que dans notre loi, tous les chemins publics qui sont pas grandes routes, ou routes provinciales, sont des chemins vicinaux.
Le chemin vicinal n’est pas seulement un simple chemin de commune à commune ; en France on a bien compris cela, on a distingué le chemin vicinal du chemin communal. Un chemin vicinal traverse d’une grande route à une autre grande route ; souvent il ne fait que traverser le territoire d’une commune. On a eu la précaution de mettre ces chemins à la charge de l’arrondissement. Je dois encore vous faire remarquer qu’en France cette distinction est faite dans la dernière loi ; on y trouve une catégorie qu’on nomme chemins vicinaux « de grande communication », qui ne sont pas à charge de la commune, et qui sont immédiatement sous l’autorité des préfets. C’est à l’égard de ces chemins qu’il faut apporter une grande attention ; il y aurait injustice à mettre ce chemin de traverse à la charge de la commune. Il faut faire une distinction entre le chemin purement communal et le chemin purement vicinal. Le chemin communal sert à la commune seule, mais le chemin vicinal sert non seulement au canton, mais à l’arrondissement tout entier.
Quand la province verra que l’entretien est trop lourd pour une commune, elle pourra accorder un subside. Le gouvernement lui-même voyant qu’un chemin exige de grandes dépenses d’entretien et que le subside de la province ne suffit pas, pourra venir aussi au secours de la commune.
Le sentier est aussi bien un chemin public que le chemin vicinal et le chemin communal. On l’a déjà fait observer, il faut ajouter le mot « sentier ». Quelquefois il s’étend à plusieurs communes : nous avons un sentier qui va de Gand jusqu’à Ath. C’est un chemin public. Si vous établissez, en règle générale, que les chemins publics, qui ne sont ni grandes routes ni routes provinciales, sont à la charge de la commune, il faut aussi comprendre le sentier.
On a dit qu’un riverain avait toujours intérêt à réparer un sentier ; c’est une erreur ; un sentier qui doit avoir plusieurs pieds, souvent n’en a que deux, et le blé le couvre de telle façon qu’on ne peut pas passer. Les sentiers s’ont d’un grand usage, non seulement pour les piétons, mais pour les chevaux. Quand il n’a pas la largeur suffisante, il est vrai qu’on passe à côté, mais on doit passer dans les terres labourées, et certes ce n’est pas très commode.
M. le ministre de l'intérieur vous a dit que dans les Flandres, il y avait une foule de chemins vicinaux pavés. Ce n’est pas une charge que se sont imposées les communes : les communes ont fourni le marteau et le sable, et ce sont les châtellenies qui ont construit les pavés.
Je crois donc que vous ne pouvez pas faire d’exceptions pour les Flandres, les mettre hors la loi. Si vous voulez que l’entretien des chemins vicinaux soit une charge communale, il faut que ce soit pour tout le pays. Il y aurait une grande injustice à excepter les Flandres quand vous établissez cette mesure pour les autres provinces ; et surtout vous ne devez pas laisser la décision de cette question aux conseils provinciaux. Cet entretien est un impôt plus lourd que l’impôt foncier.
Je pense donc que vous admettrez la suppression du paragraphe 2 proposé par le gouvernement.
M. Vandenbossche – M. Dubus persiste à maintenir les usages locaux, et à l’appui de son opinion, il cite les exemples du code civil : entre autres celui où il se réfère aux usages locaux pour la permission de planter des arbres. Il n’y a pas identité complète entre les cas. Le code civil est un code de droit, parlant de servitudes. Il s’est référé aux usages locaux quant à la plantation des arbres ; mais je demanderai s’il ne se réfère pas à une loi spéciale sur la plantation des arbres. Ici nous faisons une loi spéciale sur les chemins vicinaux pour déroger aux usages locaux. Si nous déclarons que nous ne dérogeons pas à ces usages, nous n’avions pas besoin de faire de loi. Nous avions des usages locaux pour l’entretien des chemins vicinaux, c’est parce que ces usages ne conviennent plus que tout le monde attend une loi sur la matière. Ainsi, incessamment on doit déroger aux usages. Ce serait les maintenir que d’admettre à la fin de la disposition que c’est sans rien innover à ces usages. Ce n’est pas seulement dans les Flandres, mais partout, que les usages locaux se retrouverions maintenus. Consultez d’abord l’opinion des Flandres et vous verrez qu’elles désirent et espèrent que vous supprimerez ces usages. La grande majorité des communes partage cette opinion.
M. Peeters – Je crois que nous devons maintenir simplement ce qu’a proposé la section centrale, c’est-à-dire le premier et le dernier paragraphe de l’article proposé par le gouvernement.
Plusieurs voix – La clôture ! la clôture !
Plusieurs voix : On n’est plus en nombre.
M. le président – On mettra la clôture aux voix par appel nominal pour le constater.
- On procède à cette opération.
Les membres présents répondent oui.
Ce sont : MM. Cools, de Behr, de Florisone, de Garcia de Langhe, de Man d’Attenrode, F. de Mérode, Demonceau, de Nef, de Roo, Desmet, de Theux, de Villegas, d’Hoffschmidt, d’Huart, Doignon, Dubois, Dubus (aîné), B. Dubus, Eloy de Burdinne, Lange, Lys, Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Peeters, Puissant, Raikem, A. Rodenbach, Scheyven, Sigart, Simons, Smits, Vandenbossche, Vandenhove, Vandensteen, Vanderbelen, Wallaert, Willmar et Fallon.
La chambre n’étant plus en nombre, la discussion est continuée à lundi.
La séance est levée à 4 heures et un quart.