(Moniteur belge du 4 décembre 1838, n°339)
(Président de M. Raikem)
M. de Renesse fait l’appel nominal à 2 heures et un quart.
M. B. Dubus lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse présente l’analyse des pièces adressées à la chambre :
« Deux légionnaires de Gand demandent le paiement de l’arriéré de leur pension. »
« Le sieur Jamotte, détenu à l’hôpital de St-Jean, demande sa mise en liberté »
« La chambre de commerce et des fabriques de Bruges demande que le traité de navigation et de commerce avec la France soit soumis à l’avis des chambres de commerce du pays. »
« Les élèves de l’université de Gand adressent, pour renseignements, des observations sur l’enseignement supérieur. »
« Des marchands de bois de la ville de Bruges demande que la chambre réduise le droit d’importation sur les bois étrangers, adopté par le sénat. »
« Les professeurs du conservateur royal de musique de Bruxelles demande une augmentation de traitement. »
M. le président – La pétition de la chambre de commerce de Bruges pourrait être renvoyée à la commission chargée de l’examen des projets de loi concernant les traités de commerce.
M. Smits – Messieurs, si j’ai bien compris, la chambre de commerce de Bruges demande que le traité qui a été fait avec la France soit renvoyé aux chambres de commerce. S’il en est ainsi, je m’afflige et je m’étonne d’une pareille demande. Si aucune publication n’avait été donnée à ce traité, je comprendrais la réclamation jusqu’à un certain point ; mais lorsque la convention a été publiée par tous les journaux du pays, j’avoue que je ne la comprends pas du tout. Si la chambre de commerce de Bruges a des observations à faire valoir dans l’intérêt du pays sur ou contre ce traité, eh bien, elle peut les soumettre à la chambre et au gouvernement. Jamais des observations n’ont été écartées. Mais lorsque le Roi a agi dans la plénitude de ses prérogatives, je crois, vous me permettrez de le dire, qu’il serait non seulement de la plus haute inconvenance de renvoyer le traité à l’avis des chambres de commerce, mais que ce serait, en outre, un acte de nature à blesser u puissant et utile allié.
Je pense, en conséquence, qu’il faut maintenant passer à l’ordre du jour sur la pétition. D’ailleurs, il y a à remarquer qu’il y a un délai fatal pour la ratification définitive du traité. La moitié de ce délai est déjà passé ; si l’on consultait les chambres de commerce, ce délai final pourrait s’écouler et le traité serait annulé de fait.
M. Lebeau – Toute discussion me paraît prématurée ; il n’y a pas de rapport de la commission des pétitions.
M. le président – Je demande à la chambre si elle voulait renvoyer la pétition à la commission chargée de l’examen du projet de loi relatif au traité de commerce.
M. Smits – Je ne demande pas davantage.
M. de Foere – J’aurais désiré aussi que les traités de réciprocité, conclus avec la Porte Ottomane et la France, eussent été envoyés aux chambres de commerce du pays, afin que la chambre des représentants eût pu s’éclairer de leurs avis. M. Smits dit que ce serait contraire à tous les usages pratiques en pareille occasion. Ce qu’il y a de contraire à tous les usages, pratiqués même par les gouvernements absolus, c’est d’avoir négocié et conclu ces traités, comme a fait le gouvernement belge, sans consulter préalablement aucun corps constitué sur les bases de ces conventions. Le ministre a même étouffé la discussion sur cette matière à la chambre au mois de mars dernier. Si le gouvernement s’est cru suffisamment éclairé sur ces questions importantes, il n’en est pas de même de la chambre des représentants. Elle a le droit de s’entourer de tous les renseignements propres à éclairer son opinion et son vote. Mais comme, conformément au règlement, la pétition de la chambre de commerce de Bruges doit être envoyée préalablement à la commission des pétitions, je consens que la chambre chargée de l’examen des traités de réciprocité en soit saisie. C’est à elle à voir s’il est de sa dignité et de l’intérêt du pays, ou non, de demander les avis des chambres de commerce, afin que la chambre des représentants puisse s’éclairer de leurs enseignements.
- La chambre décide que la pétition de la chambre de commerce de Bruges sera envoyée à la commission chargée des projets de loi relatif aux traités de commerce.
Sur la proposition de M. de Renesse, la pétition des professeurs du conservatoire de Bruxelles est renvoyée à la section centrale du budget de l’intérieur.
La pétition des élèves de l’université de Gand sera jointe aux autres pétitions relatives au même objet, et sur lesquelles il a été demandé un prompt rapport.
Les autres pétitions seront renvoyées à la commission des pétitions.
M. Gendebien informe la chambre que des affaires urgentes, dont l’ajournement est impossible, le forcent de quitter Bruxelles et ne lui permettent pas d’assister à la séance du 3 décembre.
Pris pour notification.
M. d’Hoffschmidt dépose le rapport de la commission de comptabilité.
- L’impression en est ordonnée.
M. Demonceau dépose également un rapport sur la proposition du ministre des finances, tendant à imposer 15 centimes additionnels sur les contributions directes.
- L’impression de ce rapport est également ordonnée.
« Art. 1er. Les droits de timbre, dus en raison de la dimension du papier, déterminée par la loi du 13 brumaire an VII, et ceux gradués en raison des sommes, seront perçus aux taux ci-après :
« § 1er. Droits de timbre en raison de la dimension du papier.
« La feuille de grand-registre (hypothèques), fr. 2 50
« La feuille de grand registre, fr. 2 40
« La feuille de grand papier, fr. 1 60
« La feuille de papier moyen, fr. 1 20
« La feuille de petit papier : fr. 0 90
« La demi-feuille d ce papier, fr. 0 45.
« Il sera créé un timbre pour le quart de feuille (moitié de la demi-feuille du petit papier).
« Le droit en est fixe à c. 25.
« Ce papier ne pourra servir qu’aux quittances ; il est assimilé au papier libre pour tout autre écrit. »
« Les notaires ne pourront faire usage de timbres de moins de 90 c. pour les actes dont ils conservent minute.
« Sont exempts du timbre les quittances pour la comptabilité des hospices et des bureaux de bienfaisance, et les certificats de vie délivrés pour pensions de 600 fr. et au-dessous.
« §2. Droits de timbres gradués en raison des sommes
« Le droit sur les effets négociables ou de commerce, billets et obligations non négociables et sur les mandats à terme, ou de place en place, est fixé :
« 1° Pour ceux de 250 fr. et en-dessous, à c. 15
« Pour ceux de plus de 250 fr. jusqu’à 500, à c. 30
« Pour ceux au au-dessus de 500 fr., jusqu’à 1,000 inclusivement, à c. 60.
« Pour ceux au-dessus de 1,000 fr. jusqu’à 2,000 inclusivement, à fr. 1 20.
« Et ainsi de suite, à raison de 60 centimes par 1,000 francs, sans fraction. »
« 2° Le droit de timbre sur les bons de caisse, billets au porteur, obligations ou actions, et tous autres effets à terme illimité ou payables après cinq ans de leur émission, est porté :
« Pour ceux de 500 fr. et au-dessous, à fr. 0 50
« Pour ceux au-dessus de 500 fr. jusqu‘à 1,000 fr., à fr. 1 00
« Pour ceux au-dessus de 1,000 francs jusqu’à 2,000 francs, à fr. 2,00
« Et ainsi de suite, à raison d’un franc par 1,000, sans fraction.
« Toutefois, sont exempts du timbres les coupons d’intérêts ou de dividende dépendant desdits bons ou billets, obligations ou actions. »
« 3° Sont également exempts du timbre les obligations, actions et coupons y attachés, résultant d’emprunts faits par les provinces et les communes.
« 3° Le timbre créé par l’article 27 de la loi du 31 mai 1824, sur les effets, récépissés, obligations, certificats ou actions résultant d’emprunts ouverts en Belgique au profit d’étrangers, est :
« Lorsque le capital est de 500 fr. et au-dessous, de fr. 1 50
« Lorsque le capital est de 500 fr. à 1,000 fr. inclus, de fr. 3 00
« Et pour les sommes au-dessus de 1,000 francs, à raison de 3 francs par 1,000 sans fraction. »
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Messieurs, dans le premier paragraphe que vous avez admis, le nouveau papier créé pour le timbre des quittances a été fixé à 25 centimes. Le gouvernement n’avait proposé de réduire ainsi le droit sur le timbre des quittances que dans la prévision de l’adoption du paragraphe 3 de l’article 10 qui rendait solidaires pour le droit et l’amende, les personnes qui auraient écrit ou accepté des quittances sur papier libre, contrairement à la loi. L’on conçoit aisément que si cette sanction efficace pour la perception du droit sur le timbre des quittances eût été admise, il y aurait eu convenance à admettre une réduction notable sur le prix de ces quittances, tandis que dans le cas contraire il y avait lieu de maintenir le droit actuel.
Dans la discussion assez longue qui a eu lieu à cet égard j’ai déclaré que je me serais rallié volontiers à un amendement qui aurait réduit à 10 centimes le droit sur les quittances, pour le cas où l’on aurait admis le paragraphe 3 de l’article 10. Mais la chambre ayant rejeté à une assez forte majorité ce paragraphe 3, je suis fondé à demander, comme une conséquence de ce rejet, le maintien de l’ancien droit sur le petit nombre de quittances qui continueront, comme par le passé, a être écrites sur timbre. Nous devons avoir tous en vue, dans la rédaction de la loi actuelle de soigner les intérêts du trésor, et je suppose qu’il n’y aura aucune opposition à ce qu’on retranche ce qui concerne la création d’un nouveau timbre de 25 centimes, qui amènerait une réduction certaine des produits sans compensation.
M. Dubus (aîné) – Messieurs, je viens m’opposer à la proposition de M. le ministre des finances, qui paraît craindre qu’on ne fraude le droit sur le timbre des quittances ; mais c’est précisément lorsqu’on portera ce droit de timbre à 45 centimes qu’il pourra y avoir fraude. Si l’on craint que l’on fraude le droit de 25 centimes, à plus forte raison doit-on craindre que la fraude n’ait lieu, quand le droit sera de 45 centimes. D’un autre côté, je prierai la chambre de remarquer que, sous prétexte de ne pas voter une diminution de droit sur les quittances, M. le ministre propose une augmentation ; car il y a une autre disposition qui a été admise au premier vote, non sans contradiction, il est vrai : c’est celle qui a rompu la juste proportion, quant aux chiffres, entre les différentes espèces de papier ; tandis que la feuille de grand format paie un franc 60 centimes ; la feuille petit papier, qui est précisément la moitié de la feuille grand papier, paie 90 centimes, au lieu de payer 80 centimes, et les demi-feuilles paient 45 centimes au lieu de 40. Or, on sait que le papier de timbre le plus généralement employé est la feuille et la demi-feuille de petit papier ; ce petit papier vous l’augmentez ; si maintenant vous supprimez la disposition particulière concernant les quittances, vous aurez augmenté le timbre des quittances au lieu de le diminuer.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Je ferai remarquer à l’honorable préopinant que je n’ai pas dit que je ne craignais pas qu’on fraudât le droit sur les quittances, mais que du moment où la sanction qui était proposée à l’article 10 a été rejetée, j’ai été sûr qu’on frauderait presque toujours l’impôt et qu’on continuerait à n’écrire comme actuellement les quittances sur du timbre que quand il serait indispensable, c’est-à-dire quand les intéressés sauront qu’elles pourraient être vues par les agents du fisc.
Partant de cette certitude qu’en règle générale on fraudera le droit, qu’il soit de 40, de 25 ou même de 10 centimes, s’il n’y a pas de sanction, je propose de supprimer la disposition qui réduit de 15 centimes sur 40 le timbre qui sera désormais employé pour le petit nombre de quittances légalement écrites.
M. Dubus a fait observer qu’il y avait dans quelques autres dispositions de la loi une augmentation de droits qui compenserait la perte qui pourra résulter pour le trésor de la réduction du timbre des quittances ; mais, messieurs, nous arriverons tout-à-l’heure à un article, l’article, 2, qui absorbera à lui seul une partie notable des majorations qui nous avons adoptées. La réduction sur le timbre des journaux, dont nous allons nous occuper, soit qu’on maintienne le premier vote, soit qu’on adopte un amendement, sera considérable. Je vous prie donc d’en tenir compte pour assurer au trésor une compensation de la perte certaine qui en résultera.
M. Angillis – Messieurs, je pense, comme l’honorable M. Dubus, qu’il n’y a pas lieu d’admettre l’amendement de M. le ministre des finances. L’article le établit des augmentations considérables dont on n’a pas encore parlé. Il y est dit que les actes dont les notaires conservent minute devront être faits sur des timbres de 90 centimes. Je ferai observer que, d’après la loi française, la plupart de ces actes sont faits sur des timbres de 42 centimes. Voilà une augmentation qui compensera largement la perte qui résultera pour le trésor de la réduction sur le timbre des journaux.
Une autre augmentation a été introduite dans la loi. La feuille de petit papier, y compris les additionnels, coûtait 81 centimes, on la porte à 90 ; vous avez là une augmentation de 9 centimes. La demi-feuille de ce même papier est de 42 centimes, vous la portez à 45. ici l’augmentation est peu importante. Si vous allez encore augmenter le timbre des quittances, votre droit ne sera plus perçu que sur le petit nombre de quittances qu’on prévoit devoir être produites en justice. Le trésor ne percevra presque rien. Par ces motifs je m’oppose à la proposition de M. le ministre des finances, et je demande qu’on maintienne jusqu’à présent le premier vote.
M. de Brouckere – J’entends parler d’augmentation sur le timbre des quittances. Je demanderai à M. le ministre des finances si par sa proposition le droit actuel serait augmenté.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – En supprimant purement et simplement la disposition de l’article 1er relative aux quittances, il y aurait une augmentation de 5 centimes. Mais je ne m’oppose pas à ce qu’on laisse les choses comme elles sont, c’est-à-dire qu’on fixe à 40 centimes le timbre pour les quittances ; mais est-il assez important, pour une différence de 5 centimes, qu’il soit établi une distinction dans la loi ? Cependant si cela devait compromettre le fond de la proposition, je ne ferai pas de difficulté à stipuler un timbre spécial de quittance à 40 centimes.
Il me semble, messieurs, que l’on devrait moins se préoccuper des augmentations probables des produits de la loi que nous discutons, car en supposant qu’elle procure cent mille francs et même davantage en plus au trésor que la loi actuelle, nous devrions nous en féliciter. Il n’y a pas nécessité d’abaisser par une balance exacte les augmentations au niveau des réductions. Il importe surtout de faire rapporter à l’impôt du timbre ce qu’il peut convenablement produire, alors qu’on est dispose à diminuer ce qu’il a d’exorbitant sur certaines base que nous examinerons tout à l’heure.
M. Dubus (aîné) – Pour le cas où la suppression demandée par M. le ministre des finances serait admise, je demanderais qu’on fixât à 80 et 40 centimes la feuille et la demi-feuille de petit papier au lieu de 90 et 45centimes.
- La suppression de la partie de l’article premier, relative aux quittances est mise aux voix.
Deux épreuves étant douteuses, il est procédé à l’appel nominal.
En voici le résultat :
Nombre de votants, 71.
Pour la suppression, 35.
Contre, 38.
En conséquence, la suppression n’est pas adoptée
Ont répondu oui : MM. Beerenbroeck, Berger, Corneli, de Brouckere, de Jaegher, de Longrée, de Muelenaere, de Nef, de Perceval, Dequesne, de Renesse, d’Huart, Dolez, Donny, Dubus (Bernard) Eloy de Burdinne, Ernst, Fallon, Heptia, Liedts, Mercier, Pirmez, Pirson, Raymaeckers, Scheyven, Simons, Smits, Ullens, Vandenhove, Van Volxem, Verdussen, et Raikem.
Ont répondu non : MM. Angillis, Bekaert-Baeckelandt, Brabant, Coppieters, Dechamps, de Florisone, de Foere, de Langhe, de Meer de Moorsel, Demonceau, de Roo, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, Doignon, Dubois, Dubus (aîné), Dumortier, Frison, Kervyn, Lebeau, Lecreps, Metz, Peeters, Polfvliet, A Rodenbach, C. Rodenbach, Rogier, Seron, Stas de Volder, Trentesaux, Troye, Vandenbossche, Van Hoobrouck Verhaegen, H. Vilain XIII, Wallaert, Zoude.
Sur l’interpellation de M. Verdussen portant sur le paragraphe suivant de l’article 1er : « Sont également exempts du timbre les obligations, actions et coupons y attachés, résultant d’emprunts faits par les provinces et les communes », M. le ministre des finances déclare que la loi en discussion maintient la législation existante sur les emprunts faits par des étrangers en Belgique, d’après laquelle l’administration n’exige pas le timbre pour les coupons de ces emprunts en général, mais seulement pour les obligations de ces emprunts et pour les coupons qui sont présentés séparés.
La chambre adopte ensuite les autres paragraphes de l’article 1er et les amendements qu’elle a introduits dans ces paragraphes.
La chambre passe à la discussion de l’article 2 ainsi conçu :
« Art. 2. Sont abrogés les articles 4 et 8 de la loi du 31 mai 1824. »
M. Dumortier – Je crois superflu de rentrer dans la discussion générale sur l’article qui nous occupe. Je pense que chacun sent la nécessité d’accorder un dégrèvement à la presse périodique. Je ne vous parlerai donc ni de son importance, ni des services qu’elle a rendus au pays ; j’arrive directement à la question et au fond même de la question. Il est certain que la réduction est trop faible pour réparer, par une augmentation dans le nombre des abonnements, la perte qu’elle cause au trésor. Vous avez voté la suppression des centimes additionnels. Par suite, les journaux d’un peu moins de 30 décimètres paieront de moins par année 3 fr 37 c.
C’est là pour le trésor public un préjudice réel qui n’est réparé par rien, parce que les journaux ne pourront faire, sur le prix de l’abonnement, une réduction assez forte pour que le trésor répare, par une augmentation dans le nombre des abonnements et des timbres, le préjudice causé par la réduction du droit de timbre.
Il est indispensable pour réparer ce préjudice, de voter un chiffre plus bas que celui qui a été admis. Je prends pour base le chiffre de 3 centimes que l’honorable M. Rogier avait proposé, mais comme droit uniforme. Je crois que ce chiffre offrirait de grands avantages. Les journaux de 30 décimètres paient aujourd’hui 6 centimes et demi. Si vous réduisez le droit à 3 centimes comme le proposait M. Rogier, ce sera une réduction de 3 centimes et demi par numéro, ou de 12 francs par an.
Si ce chiffre est admis, ces journaux pourront faire une réduction de 10 fr. sur le prix de l’abonnement. Il est probable qu’alors le nombre des abonnés augmentera, et que le trésor récupérera ainsi ce qu’il aura perdu par la réduction du droit de timbre.
Je crois que c’est là le système qu’il faut suivre. Il faut, je pense, accorder à la presse périodique une réduction assez forte pour que les lecteurs en profitent. Si la réduction n’est que de 3 ou 4 francs, elle sera sans effet sur le public ; tandis que si vous adoptez une réduction qui va de 11 à 12 fr., tout le public pourra en profiter, et le nombre des abonnés ira en augmentant.
Je crois qu’il faut faire une réduction pour la presse intérieure. Je proposerai, d’après ces considérations, l’amendement suivant :
« 2 centimes sur les journaux de 22 décimètres carrés et au-dessous ;
« 3 centimes sur les journaux de 22 décimètres carrés, jusqu’à 30 décimètres carrés, mais sans y atteindre ;
« 4 centimes sur les journaux de 30 décimètres carrés et au-dessus. »
Je pense, messieurs, que ce que j’ai dit, suffit pour justifier la proposition que j’ai l’honneur de vous soumettre. Vous avez tous la conviction qu’il faut apporter une amélioration aux journaux du pays.
On dira peut-être que je n’ai pas tenu compte de la proportionnalité. On ne peut, en effet, se dissimuler que la diminution ne sera pas proportionnelle dans la pratique. Ce droit qui paraît très juste d’après les bases de mon amendement n’aura plus la même justesse dans l’exécution, c’est-à-dire, qu’il ne donnera pas une réduction proportionnelle sur les journaux ; cela tient aux prix des abonnements qui existent aujourd’hui. Ainsi, un journal de grand format coûte 60 fr. par abonnement ; un journal de moyen format, qui ne paie que 4 centimes, ou un cinquième de moins que le journal de grand format, coûte 54 fr. par abonnement ; et le petit format qui paie aujourd’hui 3 centimes fait payer son abonnement 48 fr. : de cette façon les droits ne sont pas en proportion avec les abonnements, et les petits journaux ont beaucoup d’avantage sur les grands ; ce sera pour eux un avantage aussi de ne payer que deux centimes.
Toutefois, l’essentiel est qu’il y ait une échelle, et qu’il y ait une augmentation dans le nombre des abonnés, parce que, par cette dernière condition, le trésor récupérera les pertes qu’occasionnera la diminution du chiffre du timbre des journaux.
M. Demonceau, rapporteur – Messieurs, on aperçoit facilement que l’honorable préopinant, tout en voulant servir la presse, va la desservir. Son amendement descend beaucoup plus bas qu’aucun de ceux qui ont été rejetés du premier vote. Comment peut-il espérer obtenir actuellement la majorité ? Pour moi, je ne me reconnais plus : M. Dumortier a voté, comme moi, dans le sein de la section centrale, le maintien des droits existants…
M. Dumortier – Cela n’est pas exact !
M. Demonceau, rapporteur – Je veux bien faire quelque chose pour la presse, mais pas autant que M. Dumortier.
J’ai fait tout ce qui était possible de faire pour rapprocher les diverses opinions. Je me suis encore entendu avec le ministres des finances, qui a rédigé un amendement que je le prie de déposer sur le bureau. Cet amendement fera peut-être cesser les divergences.
M. Dumortier – Je suis singulièrement étonné que l’honorable préopinant vienne ici vouloir tenir compte de ce qu’il appelle les votes émis dans la section centrale. Il doit savoir que cela n’est pas dans les usages parlementaires ; que les votes de la section centrale sont des votes de la section centrale, et rien de plus. Quoi qu’il en soit, sa mémoire le trompe, elle est en défaut ; j’ai voté pour l’amendement de M. A. Rodenbach, qui n’a pas été admis par la majorité de la section centrale.
L’honorable rapporteur prétend que l’amendement que je présente descend plus bas que tous ceux qui ont été rejetés ; c’est encore une inexactitude, puisque cet amendement est à peu près celui de M. A. Rodenbach. La différence entre ma proposition et celle de M. Rodenbach porte sur le point de départ ; M. Rodenbach part de 20 décimètres carrés, et moi je pars de 22 décimètres carrés.
J’espère que la chambre comprendra qu’il est nécessaire de donner son assentiment à l’amendement que j’ai déposé. J’ai lieu de croire que la partie de l’assemblée qui a appuyé les amendements de MM. Dubus et Rodenbach appuiera ma proposition.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Ainsi que vient de le dire M. le rapporteur, l’amendement de M. Dumortier présente une grande différence, en moins, sur tous les amendements mis en discussion dans vos séances précédentes. Il ne diffère, dit son auteur, de l’amendement de M. Rodenbach que par deux décimètres et demi pour le point de départ ; mais c’est précisément entre 20 décimètres carrés et 22 décimètres et demi que se trouve le format de tous les journaux de moyenne dimension. Voici quelles sont les superficies de plusieurs journaux publiés dans la capitale :
Le Journal de la Belgique a en décimètres 14,10 ; le Belge, 17,34 ; le Charivari, 17,34 ; le Lynx, 22,23 ; l’Annonce, 22,40 ; le Commerce, 22,40.
Ainsi, vous voyez que précisément l’amendement de M. Dumortier range dans la même catégorie les petits journaux et les moyens ; donc il introduit une réduction considérable sur les amendements précédemment rejetés, et surtout sur celui de M. Dubus, dont le point de départ était 15 décimètres.
Les journaux de grand format, l’Indépendant, l’Observateur, le Courrier, l’Emancipation, l’Eclair, se rapprochent de 30 décimètres ; ils ont depuis 29,25 décimètres jusqu’à 29,93.
Messieurs, avant de soumettre à la chambre, l’amendement dont vous a parlé M. le rapporteur de la section centrale je dois rectifier une erreur qui paraît s’être propagée parmi les représentants et les journalistes. Il semble que l’admission de la proposition de la section centrale n’aurait amené qu’une réduction insignifiante ; elle est cependant très importante. Ce n’est pas que je veuille vous engager à vous en tenir à cette réduction, je vais vous proposer moi-même quelque chose de plus.
Les journaux de petit format, avec la proposition de la section centrale, admise par la chambre, retireraient, par mille abonnés et 360 jours, une réduction de 3,624 francs.
Les journaux de format moyen retireraient, par mille abonnés, une réduction de 4,832 fr. 61.
Ceux de grand format ou de 29 décimètres et 25 ou 3 centièmes auraient, sur mille abonnés, une réduction de 6,040 fr.
Vous voyez donc que la mesure adoptée n’est pas aussi insignifiante qu’on veut le dire, et que, d’après un nombre d’abonnés égal seulement à 500, il existerait encore une réduction notable au profit des journalistes.
Maintenant, messieurs, quoique demeuré persuadé que le système du gouvernement pour le timbre des journaux était le meilleur de tous ceux qu’on a présentés, je ne veux pas aujourd’hui revenir sur ce projet, parce que la majorité qui l’a rejeté était à peu près triple de la minorité, et qu’ainsi j’occuperais sans doute inutilement les moments de la chambre, si je voulais reproduire ce système. Mon but doit donc être d’arriver à une sorte de transaction qui apporte aux journalistes une réduction suffisante et qui se rapproche des principes que j’ai soutenus.
Voici l’amendement que je présenterai pour parvenir à ce résultat :
« Le droit de timbre sur les journaux et écrits périodiques est fixé ainsi qu’il suit :
« A 2 ½ centimes pour chaque feuille de 17 décimètres carrés et demi de superficie et au-dessous (17 décimètres et demi sont le maximum des petits journaux).
« A 3 ½ centimes pour chaque feuille au-dessus de 17 décimètres et demi carrés, jusqu’à 23 décimètres, inclusivement (c’est-à-diire pour les journaux de moyenne grandeur).
« A 4 centimes pour chaque feuille de dimension supérieure à 25 décimètres carrés (c’est-dire que je n’aurais plus de progression, et que je laisserais pour les journaux au-dessus de 25 décimètres le droit de 4 centimes quelle que soit leur superficie) »
Le motif, messieurs, de ce temps d’arrêt, dans le système de catégories, c’est que vous pourrez permettre aux journaux de 25 décimètres et au-dessus de publier des suppléments sans timbre ; sans cela vous ne le pourriez pas, attendu que tous les journaux adopteraient le plus petit format et donneraient dans un ou plusieurs suppléments toutes les matières qu’ils voudraient publier et que le journal ne pourrait contenir.
Je pense qu’il n’est pas nécessaire que je m’étende de nouveau sur l’utilité qu’il y a à permettre autant que possible, aux journaux, de publier des suppléments ; chacun de vous, messieurs, sera d’accord avec moi sur ce point. Je sais toutefois que l’on fait au système que je propose une objection ; on craint que certains journaux ne prennent un format beaucoup plus grand que 30 décimètres, au détriment des autres journaux de cette dimension qui ne trouveraient pas convenable de s’agrandir. Mais je puisera dans la loi postale de 1835 une réponse qui tranquillisera tout le monde à cet égard ; c’est que l’article 10 de cette loi fixe le port, pour les journaux de 12 à 30 décimètres, à deux centimes de port, et que ceux qui voudraient s’agrandir au-delà de 30 décimètres, devra en payer le double. Il y a dans cette différence du prix de transport une garantie dont je ne me félicite point, mais qui existe, que les journaux ne prendront pas une dimension supérieure à 30 décimètres. Ma proposition ne présente donc aucun sujet de critique ; elle aura l’avantage immense de mettre les journaux de grand format dans la possibilité de publier des comptes rendus complets des discussions des chambres, des débats devant les tribunaux, des actes administratifs, de toutes les pièces enfin dont la connaissance peut-être utile au public.
Je proposerai donc de dire :
« Les feuilles jointes aux journaux et papiers-nouvelles quotidiens sont assujettis au même timbre que les imprimés auxquels elles sont jointes ; toutefois les suppléments annexés aux journaux d’un format de plus de 25 décimètres son exempts de timbre. »
L’article 4 de la loi du 31 mai 1824, concernant l’obligation d’écrire sur papier timbré les minutes des annonces et avis à insérer dans les journaux se trouve abrogé par le premier vote de la chambre, et je pense qu’il y a lieu de maintenir sur ce point la première décision. J’avais proposé aussi d’abroger purement et simplement l’article 8 de la loi concernant le timbre des journaux étrangers ; depuis la séance où cette dernière abrogation a été admise par la chambre, j’ai remarqué qu’il pourrait y avoir des doutes sur l’existence d’un droit quelconque sur les journaux, si l’on s’en tenait à la rédaction adoptée provisoirement. Le but de la chambre ayant été d’assimiler les journaux étrangers aux journaux belges, j’ai cru que pour éviter toute espèce de contestation à cet égard, il faudrait ajouter à l’article 2 le paragraphe suivant :
« Les journaux, gazettes, papiers-nouvelles, ouvrages périodiques, prix-courants imprimés, affiches, annonces et avis venant de l’étranger, sont assujettis aux droits dont sont frappées les mêmes impressions dans le royaume. » Ceci complète, messieurs, l’amendement que j’ai eu l’honneur de vous soumettre comme article 2 ; s’il devait soulever une grande discussion, je serais au regret de l’avoir déposé, car je l’ai rédigé principalement dans le but de concilier les différentes opinions.
M. Verhaegen – Messieurs, nous sommes arrivés au second vote, et ce que nous allons faire sera définitif pour nous ; nous avons eu l’occasion de voir que, lors du premier vote, nous nous étions trompés, car tout le monde paraît être d’accord qu’il faut proposé en ce moment deux amendements ; il importe de les bien examiner et de bien les mûrir, car ces amendements improvisés pourraient encore nous induire en erreur, et s’il en était ainsi, nous aurions le regret de ne plus pouvoir revenir sur notre vote.
L’honorable M. Dumortier croit servir la presse en proposant son amendement ; l’honorable M. Demonceau pense au contraire que cet amendement est défavorable à la presse ; M. le ministre des finances propose aussi un amendement et il le croit très-utile ; quant à moi, messieurs, je déclare franchement que dans la circonstance actuelle, je n’oserais pas émettre un vote. Je viens donc proposer à la chambre d’ordonner l’impression des deux amendements qui viennent d’être déposés, et d’en renvoyer la discussion à demain. L’objet est assez important pour qu’on laisse à chacun de nous le moyen de se former une opinion, et ce ne sera pas à la fin d’une séance que la chambre ira se prononcer sur des propositions qu’elle n’aura pas eu le temps d’examiner et s’exposer ainsi à traiter la presse beaucoup plus mal encore qu’elle n’a été traitée jusqu’à présent.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Je crois, messieurs, qu’il n’y a aucun inconvénient à adopter la proposition de l’honorable M. Verhaegen ; nous pourrions nous occuper pendant le reste de cette séance des amendements qui ont été introduits dans les autres articles du projet.
- La proposition de M. Verhaegen est adoptée.
La chambre conforme ensuite par son vote les amendements apportés aux articles 3, 4 et 6. Les articles 5 et 7, n’ayant pas été amendés, ne sont pas soumis à un second vote.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Je proposerai, messieurs, de réunir les articles 8 et 9 et d’en modifier la rédaction de la manière suivante :
« Les droits de timbre seront exempts de centimes additionnels.
« La majoration de 6 p.c. établie par la loi du 30 décembre 1832, pour différence monétaire, ne sera plus ajoutée au montant des droits dont la quotité reste réglée par les lois en vigueur sur le timbre, ni au montant des amendes fixés pour contravention aux lois sur la même matière. »
Vous vous rappelez, messieurs, qu’il a été manifesté la crainte que l’on n’appliquât la disposition de l’article 9 au timbre spécial des douanes et accises ; pour éviter toute espèce de doute à cet égard, je proposerai, quand nous serons parvenus à la fin de la loi, un article aux termes duquel les dispositions du projet qui nous occupe ne seront pas applicables au timbre spécial des douanes et accises.
M. Brabant – Messieurs, j’ai demandé une explication à M. le ministre des finances sur la proposition qu’il vient de présenter. Il exempte de l’application des principes contenus dans l’article 1er du projet de loi le timbre des quittances en matière de douanes et accises. J’aurai l’honneur de faire observer qu’il y a des timbres spéciaux, perçus au profit du gouvernement sur les quittances délivrées relativement aux taxes municipales. Ce serait une augmentation très forte qui équivaudrait quelquefois au droit, si l’on voulait assujettir au droit de timbre de 25 centimes les quittances qui concernent les objets introduits dans les villes.
M. Demonceau, rapporteur – Messieurs, je ne pense pas qu’il soit entré dans l’intention de personne de frapper du timbre de 25 centimes les quittances que les villes ont l’habitude de délivrer. Il est certain que les mêmes motifs qui ont dicté la proposition de M. le ministre des finances existent pour exempter le timbre des quittances en matière d’octrois.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Messieurs, si les quittances pour droit de villes sont assujetties au droit de timbre, les administrations municipales auront l’avantage de jouir d’une réduction de 15 centimes sur 40, et ce sera là un avantage notable. Si les quittances ne se délivrent pas aujourd’hui sur timbre, cet état de choses continuera de subsister. Je pense que ces sortes de quittances doivent être sur timbre, lorsqu’elle se rapportent à des sommes au-dessus de 10 fr. ; mais, quel que soit le timbre, la disposition que j’ai proposée concerne exclusivement le timbre spécial créé pour l’administration des douanes et accises, timbre qui ne s’applique pas par l’administration du timbre, mais par l’administration même des douanes et accises. Quant aux villes, je le répète, le seul risque qu’elles courent, c’est de gagner, dans certains cas, 15 centimes sur 40, et certes elles n’auront pas à se plaindre.
M. Brabant– Messieurs, je ne sais s’il y a une loi particulière relative au timbre des quittances délivrées pour l’octroi des villes ; mais ce que je sais pertinemment, c’est que pour certains objets, tels que comestibles, lorsque le droit perçu ne dépasse pas 10 fr., la quittance est délivrée sur papier non timbré ; mais il y a une foule d’autres objets pour lesquels une quittance sur papier timbré est délivrée, lors même que le droit est inférieur à 10 fr. Je puis citer un exemple : un millier de briques paie à Namur 2 francs de droit ; outre ces deux francs, il doit payer 5 centimes pour le droit de quittance. Il serait exorbitant que ce droit fût porté à 25 centimes. Je demande donc qu’il ne soit rien dérogé, à cet égard, à l’état de choses actuellement existant.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – On n’y déroge pas du tout.
M. Brabant – Mais si ; vous venez de dire que les pièces de l’espèce seraient astreintes au droit général de quittance qui, d’après le projet de loi, est de 25 centimes.
M. Donny – Messieurs, je pense que l’honorable M. Brabant se trompe ; il n’y a pas de timbre de 5 centimes pour les quittances d’octroi ; mais voici ce qui existe : Pour les objets dont le droit est inférieur à 10 fr., on délivre la quittance sur papier non timbré, mais la quittance est détachée d’une souche qui est timbrée elle-même du timbre de dimension. Il résulte que l’on fait payer à chacune de ces quittances non-timbrées elles-mêmes une portion du timbre de dimension appliquée sur la souche. (C’est cela !)
- Personne ne demandant plus la parole, M. le président met aux voix les articles 8 et 9 réunis ; la chambre adopte.
On passe à l’article 10, ainsi conçu :
« Seront solidaires, pour les droits de timbres et les amendes :
« tous les signataires pour les actes synallagmatiques :
« les prêteurs et les emprunteurs pour les obligations. »
(On a supprimé le dernier paragraphe du projet du gouvernement, consistant en ceci : les créanciers et les débiteurs pour les quittances.)
M. Dubus (aîné) – Je désire savoir comment M. le ministre des finances entend appliquer le paragraphe de cet article, relatif aux prêteurs et aux emprunteurs pour les obligations. Où le ministre prétendra-t-il poser la preuve contre le prêteur dans les obligations ? D’ordinaire, l’obligation n’est signée que par l’emprunteur ; est-ce que, d’après le ministre des finances, il suffira qu’il existe une obligation sous seing-privé, signée d’un emprunteur peut-être insolvable, pour que cela fasse preuve contre le prêteur ? Je ne pense pas que M. le ministre entende aller jusque là. Il faudra prouver autrement que le prêteur a concouru à l’acte, sinon, il serait injuste de le soumettre à payer le droit et l’amende.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – L’obligation se trouvera entre les mains du prêteur, et le prêteur ayant accepté cette obligation sera passible de l’amende, parce qu’il aura concouru à la contravention. L’emprunteur a signé la pièce, il est vrai, mais le prêteur l’a entre les mains, par cela seul qu’il l’a entre les mains, il est évident qu’il a prêté la somme. Du reste, le prêteur aura un moyen très-simple d’éviter l’amende ; ce sera de dire que l’obligation n’est pas réelle, que c’est un titre supposé. Vous sentez au surplus que l’application de l’article ne souffrira jamais de difficultés, et qu’en définitive les tribunaux prononceront sur les contestations qui pourraient surgir à cet égard.
- L’article tel qu’il a été modifié au premier vote, est définitivement adopté.
On passe à l’article 13 ainsi conçu :
« Aucune des amendes prononcées par les articles 11 et 12 ci-dessus pour le paiement du droit, sauf le recours de celui qui en aura fait l’avance pour ce qui ne sera pas à sa charge personnelle. »
Lors du premier vote, on a supprimé dans le deuxième paragraphe, les mots : « et des amendes », qui se trouvaient après ceux-ci : « pour le paiement du droit. »
M. Verdussen – Messieurs, quoique, lors du premier vote, je n’aie pas réussi à faire supprimer le second paragraphe en entier, et qu’on ait maintenir la solidarité quant au droit, je me permettrai de faire encore quelques remarques à ce sujet, et de prouver, la loi de brumaire an VII à la main, qu’il y aura lieu de demander deux fois l’amende et deux fois le droit.
On a supprimé les mots : « et des amendes. » M. Verhaegen avait demandé la suppression de tout le paragraphe, et ne voulait de solidarité ni pour le droit ni pour l’amende ; la chambre n’a pas admis la solidarité pour les amendes mais elle l’a admise pour le droit. Quand j’ai fait observer qu’alors il y aura deux droits à payer, plusieurs membres se sont levés et ont prétendu que le double droit ne serait jamais exigé. Mais vous savez que le dernier article porte que toutes les lois antérieures sont maintenues pour autant que la loi actuelle n’y déroge pas expressément. Or, je trouve dans la loi de brumaire an VII, article 26 : « Il est prononcé une amende de 15 fr., en cas de contravention » » etc., et à la fin : « Les contrevenants, dans tous les cas ci-dessus, paieront les droits du timbre. »
Nous avons établi deux contrevenants. Dès lors que la loi de brumaire n’a pas été abrogée, il est certain que non seulement les contrevenants sont passible de l’amende encourue, mais qu’indépendamment de cela ils devront encore payer le droit.
Vous voyez qu’il n’y a pas lieu de maintenir la solidarité pour le droit, quand vous avez reculé devant la solidarité de l’amende, quand vous avez reconnu qu’on ne devait pas rendre responsable d’une faute un individu qui y était étranger. C’est pas ces motifs que je demande qu’on ne se borne pas çà supprimer les mots « et des amendes », mais qu’on supprime le paragraphe tout entier.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Le seul inconvénient qui pouvait résulter, selon M. Verdussen, du maintien du deuxième paragraphe de l’article 13, c’est que le fisc pourrait exiger deux droits ; or, cet inconvénient n’est pas possible avec les termes de la loi. Pour les amendes, on a demandé, avec quelque raison, le retranchement de la solidarité, parce que ces amendes personnelles portaient séparément sur les deux contrevenants. Mais je suppose que l’un d’eux soit insolvable, il faut bien que l’administration puisse exiger le droit intégral de l’autre. M. Verdussen a fini par reconnaître que le deuxième paragraphe de l’article ne présentait d’autre inconvénient que celui d’une redondance avec la disposition d’une loi déjà existante ; mais j’indique une utilité pratique, dans la disposition dont il s’agit, et je ne vois pas pourquoi dès lors elle ne serait pas maintenue à raison du simple doute qu’il y aurait double emploi.
J’ai démontré précédemment, messieurs, que cette disposition existait dans la loi française, et il faut bien admettre qu’elle n’y a pas été introduite sans motif.
M. Demonceau – Si M. le ministre s’oppose à ce que la proposition de M. Verdussen fût mise aux voix, il est dans son droit, car il s’agit d’un article du gouvernement qui n’a pas été amendé. Mais qu’on adopte ou qu’on n’adopte pas cette proposition, le droit sera toujours payé intégralement par celui qui sera atteint par l’administration du fisc, parce que le droit est indivisible solutione.
- La proposition de M. Verdussen n’est pas adoptée.
L’article 13 est définitivement adopté tel qu’il a été admis au premier vote.
Les articles 14, 15, 16 et 17 n’ayant pas subi d’amendement, ne sont pas remis aux voix.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) propose, après l’article 17, un article nouveau ainsi conçu :
« Les dispositions de la présente loi ne sont pas applicables au timbre spécial des douanes et des accises. »
M. Demonceau, rapporteur – Afin de pouvoir s’assurer qu’on ne change rien à la comptabilité de l’octroi des villes, je demande l’impression et le renvoi à demain de l’article proposé ; nous aurons le temps de voir si les observations de M. Brabant sont fondées. Nous ne pouvons pas refuser cette satisfaction à un honorable magistrat qui avance un fait.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Il m’est assez indifférent qu’on remette à demain le vote de cet article ; mais, véritablement, je ne comprends pas qu’on veuille confondre l’octroi des villes avec les douanes et accises. Nous ne touchons ni ne voulons toucher en rien à ce qui concerne les octrois.
Un honorable membre a, d’ailleurs, démontré que le timbre des quittances de droits de ville n’était pas tel que le croyait l’honorable député de Namur ; il paraît que du talon un registre à souche, timbré, on détache les récépissés, mais que les quittances elles-mêmes, ne sont pas timbrées. Quoi qu’il en soit, nous ne touchons pas autrement au timbre des quittances d’octroi ; que si ceux-ci doivent actuellement donner des quittances sur des timbres de 40 centimes, à l’avenir ils ne devraient plus les faire que sur des timbres de 25 centimes.
En présence de ce seul résultat possible de l’adoption des dispositions de la loi, je ne comprends pas comment, dans l’opinion de M. Brabant, on pourrait motiver le renvoi à demain de l’article que je propose.
M. de Perceval – Les explications de M. le ministre des finances me rassurent ; je suis persuadé que les droits sur les quittances des octrois des villes ne seront pas changés. Il serait irrationnel de porter à 23 centimes le droit sur des quittances détachées d’un livre à souche, et qui aujourd’hui ne paient que 2 ½ ou 5 centimes.
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Je déclare que nous ne parlons ici que du timbre des quittances, et que dans aucun cas il ne subira d’augmentation par le fait des dispositions proposées.
- L’ajournement n’est pas adopté.
L’article proposé est adopté.
M. Van Volxem propose un article additionnel ainsi conçu :
« Il sera fait restitution aux éditeurs de journaux et écrits périodiques soumis au timbre de tout ce que chacun d’eux aura payé, à partir du 1er janvier 1839, au-delà du droit fixé par la présente loi. »
M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Je me proposais de présenter une disposition semblable. Je propose d’en renvoyer la discussion à demain après le vote de l’article 2. (Oui ! oui !)
- La séance est levée à 4 heures et demie.