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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 22 novembre 1838

(Moniteur belge du 23 novembre 1838, n°328)

(Présidence de M. Raikem)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse procède à l’appel nominal à 2 heures.

M. B. Dubus donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Renesse présente l’analyse des pièces adressées à la chambre :

« Le sieur Auguste Decoop, né en France, demeurant à Poperinghe, demande la naturalisation. »

« Le sieur Jules Blanchard, né Français, habitant en Belgique depuis son enfance, demande la naturalisation. »

- Ces pièces sont renvoyées à M. le ministre de la justice.

Projet de loi modifiant le tarif général du timbre

Discussion des articles

Article 12

M. le président – Dans la séance précédente, on a voté l’article 11 ; nous allons passer à l’article 12, conformément à une décision prise par la chambre.

Voici l’article 12 proposé par le ministre :

« Lorsqu’une lettre de change ou un billet à ordre venant de l’étranger aura été accepté ou négocié en Belgique, avant d’avoir été soumis au timbre ou au visa pour timbre, l’accepteur et le premier endosseur, résidant en Belgique, seront tenus chacun d’une amende du vingtième du montant de l’effet. »

Voici l’article 12 proposé par la section centrale :

« Lorsqu’un effet de commerce quelconque venant de l’étranger aura été accepté ou négocié en Belgique avant d’avoir été soumis au timbre ou au visa du timbre, l’accepteur ou le premier endosseur, résidant en Belgique, encourra l’amende du vingtième fixé par l’article précédent. »

M. le ministre des finances (M. d’Huart) – La disposition actuellement en discussion doit être nécessairement admise comme conséquence du vote d’hier ; vous avez adopté l’amende contre l’endosseur, l’accepteur et le souscripteur de l’effet écrit en Belgique ; il est nécessaire d’accueillir la même disposition relativement aux effets venant de l’étranger.

M. Demonceau, rapporteur – Ainsi que vient de le faire observer M. le ministre des finances, cet article est une conséquence de l’article 11 voté hier. Si la majorité qui a voté la double amende contre l’accepteur et l’endosseur veut le voter encore aujourd’hui, nécessairement l’article du ministre doit être adopté. Cependant, je crois devoir faire une observation à la chambre dans l’intérêt même de la rédaction proposée par le ministre, dans le cas où elle serait préférée. On veut établir une double amende ; mais cette rédaction ne me semble pas l’établir…

M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Comment cela ? Il est dit que l’accepteur et l’endosseur, résidant en Belgique, « seront tenus chacun… » C’est bien clair !

M. Demonceau – Je veux m’en expliquer cependant. Il arrivera de l’étranger un billet à ordre souscrit par un étranger ; le ministre ne peut obtenir d’amende que contre le premier endosseur belge. Ensuite, une lettre de change venant de l’étranger pourra y être endossée ; alors on ne trouvera même plus le premier endosseur.

M. le ministre des finances (M. d’Huart) – La rédaction est très claire. « Aura été acceptée ou négociée en Belgique » sont des expressions très précises.

- L’article 12 proposé par M. le ministre des finances est mis aux voix et adopté.

Article premier

M. le président – Veut-on s’occuper maintenant de l’article 13 ou du 2° paragraphe de l’article 1er ?

M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Il me semble que c’est le moment de revenir à la fixation du droit en commençant d’abord par les effets de commerce, pour arriver ensuite à la partie du §2 de l’article 1er concernant les billets de banque et les obligations des sociétés.

Relativement aux effets de commerce, la section centrale propose des gradations différentes des miennes ; elle demande qu’il ne soit fait qu’une catégorie des effets de 500 fr. et au-dessous ; j’en propose deux. C’est donc par la question des catégories qu’il faut commencer.

M. Demonceau, rapporteur – Je ne vois aucun inconvénient à suivre la discussion ainsi que le propose M. le ministre des finances. Il est vrai que dans le projet du gouvernement, il y a une catégorie des effets de 250 et au-dessous ; mais, pour la catégorie des effets de 500 fr. jusqu’à 250 fr., le chiffre du gouvernement est supérieur à celui que présente la section centrale ; et pour les catégories de 1,000 et les autres plus élevées, le chiffre du gouvernement est toujours supérieur à celui de la section centrale. La question des catégories n’est pas, comme vous voyez, sans importance, et je crois qu’il faut la décider d’abord.

M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Messieurs, l’honorable M. Demonceau vient de dire que le projet du gouvernement établit un droit plus élevé que celui qui est proposé par la section centrale ; cela est vrai pour les sommes élevées, mais pour les petits effets le droit proposé par la section centrale est beaucoup plus élevé que celui qui est demandé par le gouvernement. La section centrale propose de ne faire qu’une seule catégorie pour les effets de 500 francs et au-dessous, et elle fixe à 25 centimes le droit de cette catégorie ; le gouvernement propose de fixer le droit à 15 centimes pour les effets au-dessous de 250 fr. et à 30 centimes pour ceux de 250 à 500 fr. ; ainsi, vous le voyez, messieurs, si pour cette dernière catégorie le droit proposé par le gouvernement est un tant soit peu plus élevé que celui de la section centrale, il est beaucoup plus faible pour l’autre catégorie. Voilà, messieurs, le véritable état de la question. Je pense qu’il est inutile de rentrer dans des développements pour démontrer les avantages de l’établissement d’une catégorie particulière pour les effets de 250 francs et au-dessous ; chacun sait que ce sont les effets les plus nombreux, et d’après le vote émis hier, il importe de maintenir un droit modéré pour les petites sommes.

M. Demonceau, rapporteur – Je tiens, messieurs, à ce qu’on sache que la section centrale a cru faire chose utile pour le commerce et pour le trésor en proposant un timbre de 25 centimes pour des effets qui peuvent aller jusqu’à 500 francs. Je pense que ce droit n’est pas élevé, et ce qui le prouve, c’est que M. le ministre des finances a cru faire une grande réduction en proposant un timbre de 25 centimes pour les quittances, dont le plus grand nombre seront sans doute inférieures à 500 francs.

Si le timbre d’une quittance, ne fût-elle que de 25 francs, coûte 25 centimes, je ne vois pas pourquoi les effets de 500 francs et au-dessous ne paieraient pas aussi 25 centimes. Quoi qu’il en soit, on ne pourra pas dire ici que la section centrale cherche à diminuer les revenus du trésor.

M. Pirmez – Je veux bien, messieurs, que dans le système de la section centrale le droit qu’elle propose eût été convenable ; mais ce n’est pas ce système, mais celui de M. le ministre des finances que vous avez admis. Par suite de cette décision, le droit sera payé par un bien plus grand nombre d’individus, et dès-lors il convient de l’abaisser, ce qui, à son tour, en assurera encore davantage la perception. Si maintenant, au lieu de vous borner à rendre le premier endosseur passible de l’amende, vous en rendiez responsables tous les endosseurs, cela augmenterait encore considérablement le nombre des effets qui paieraient le droit ; et si alors vous abaissez encore ce droit en proportion, il en résulterait que, pour ainsi dire, plus un seul effet ne serait écrit sur papier libre, et que par conséquent, malgré l’abaissement du droit, le trésor percevrait trois ou quatre fois autant que ce qu’il perçoit aujourd’hui.

Suivant l’ancien système, qui a été soutenu par la section centrale, l’impôt n’atteignait en quelque sorte que le malheur, puisqu’il n’y a guère jusqu’ici que les billets, dans le cas d’être protestés, qui soient écrits sur timbre ; ce ne sont donc que ceux qui sont dans la gêne qui aient jusqu’aujourd’hui payé le droit ; ce mal sera diminué par l’effet de la disposition qui rend le premier endosseur passible de l’amende, et il le serait bien davantage si tous les endosseurs étaient également passibles de l’amende. Dans tous les cas, puisqu’il est certain qu’on emploiera maintenant une plus grande quantité de timbres, il est rationnel d’en diminuer le prix en proportion.

M. Demonceau – Comme rapporteur, messieurs, je dois nécessairement faire tous mes efforts pour que les conséquences du système de M. le ministre, qui a été admis par la chambre, ne soient pas fâcheuses pour le trésor. Je ne puis donc pas m’empêcher de dire que je n’ai pas confiance dans la demi-mesure qui a été proposée par M. le ministre et adoptée par la chambre ; je crains que le droit ne soit fraudé comme auparavant, et dès-lors il me semble qu’on ne peut sans danger le diminuer considérablement ; d’ailleurs, je le répète encore une fois, vous ne pouvez pas adopter un timbre de moins de 25 centimes pour les effets de 500 francs et au-dessous lorsque vous fixez à ce prix le timbre des quittances, quelque petite que soit la somme y mentionnée.

M. Gendebien – Messieurs, la meilleure sanction de toute loi fiscale, c’est la modération du droit : plus le droit est élevé, moins il y a de chances de le percevoir. Il est certain qui si l’on fait deux catégories, les petits timbres se débiteront en beaucoup plus grande quantité que s’ils étaient soumis au même droit que les grands ; voilà pour l’intérêt du trésor ; mais il serait aussi beaucoup plus juste, plus équitable de ne pas faire payer au petit commerce 25 centimes, alors qu’en général il n’a besoin que de timbres de 15 centimes. En général, tous les détaillants des campagnes, des petites villes et même des grandes villes, ne font point d’effets qui dépassent 205 fr. ; rarement même ils en font qui aillent jusque-là.

A Bruxelles même, il est bien peut de détaillants qui fassent à un même fournisseur des commandes supérieures à 50 fr. Vous allez donc contraindre toute cette classe moyenne ou presqu’infime, ou à frauder la loi, ou à payer un impôt aussi élevé que ceux qui sont en position de faire de fortes commandes. Une pareille mesure serait souverainement injuste ; elle provoquerait la fraude, d’abord parce que le droit serait trop élevé, ensuite pare qu’il pèserait précisément sur ceux qui sont le moins en positon de pouvoir le payer.

Je crois, messieurs, que si l’on se bornait à maintenir le droit, tel qu’il est fixé par la loi de l’an VII, c’est-à-dire à raison de 50 centimes par 1,000 francs, ainsi à 13 ½ p.c., soit comme au projet du gouvernement à 15 centimes pour les effets de 250 fr. et au-dessous, à 50 pour ceux de 500 à 1,000 et ainsi de suite, en augmentant de 50 c. par 1,000 francs, l’on ferait parfaitement bien dans l’intérêt du trésor comme du contribuable, et il suffit de la nouvelle sanction que le ministre a obtenue hier pour augmenter les produits de l’impôt ; je pense même que si, au lieu de majorer le droit, on l’abaissait, cela ferait encore beaucoup plus d’effet que la sanction accordée hier ; je suis persuadé que si l’on diminuait le droit de moitié, par exemple, il produirait un tiers et peut-être la moitié en sus de ce qu’il produit actuellement, et il est très-probable que dans peu les produits en seraient doublés.

J’adopterai la proposition du ministre, qui est de fixer le droit à 15 centimes pour les effets de 250 fr. et au-dessous, et je voudrais qu’on votât le chiffre de 25 centimes pour ceux de 250 à 500 francs, de 50 centimes pour ceux de 500 à 1,000 francs et ainsi de suite, en augmentant de 50 centimes pour chaque millier de francs : ce serait là un droit plus modéré que ceux qu’on nous demande. La modicité du droit est, je le répète, la seule sanction réelle d’une loi fiscale ; elle est le seule remède à la fraude, surtout à celle passée pour ainsi dire en usage général.

M. Demonceau, rapporteur – Messieurs, les observations que vient de faire M. Gendebien me rappellent une idée que j’avais oubliée de communiquer à l’assemblée. Si vous fixez le timbre des quittances à 25 centimes et que vous établissiez un droit plus faible pour les effets de commerce de 250 fr. et au-dessous, il en résultera qu’on fera les quittances sur des timbres d’effets de 250 fr., chaque fois que la somme à mentionner ne dépassera pas ce chiffre.

M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Mais ce n’est pas là un effet de commerce, ce sera une quittance.

M. Demonceau, rapporteur – On la rédigera sous la forme d’un effet.

M. A. Rodenbach – Messieurs, je ne partage pas l’opinion qui vient d’être émise par l’honorable rapporteur de la section centrale. Il faudra, a-t-il dit, avoir un timbre de commerce pour les quittances ; il me semble que cela est impossible. Je pense avec l’honorable M. Gendebien que, dans l’intérêt du petit commerce, il faut un droit peu élevé ; je crois aussi que le fisc percevra beaucoup plus en établissant un droit de 15 centimes pour 250 fr., qu’en admettant 25 centimes pour 500 francs. Quoique ce dernier droit soit minime, je suis persuadé qu’on le fraudera ; tandis que, pour la bagatelle de 25 c., tout le monde voudra que ses effets soient sur papier timbré. En résumé, je pense que, dans l’intérêt du fisc et dans celui du petit commerce, nous devons adopter le chiffre de 15 centimes.

M. le président – Je vais mettre aux voix la question de savoir si l’on fera deux catégories pour les billets au-dessous de 500 francs, c’est-à-dire une catégorie pour les billets de 250 fr. et au-dessous, et une autre pour les billets de 250 à 500 fr.

- La chambre décide qu’il y aura deux catégories pour les billets au-dessus de 500 fr.

M. le président – Nous passons maintenant à la fixation du droit. M. le ministre des finances propose 15 centimes sur les billets de la première catégorie (de 250 fr. et au-dessous)

- Ce chiffre est mis aux voix et adopté.

Le chiffre de 30 centimes, proposé par le gouvernement sur les billets de 250 à 500 fr., est ensuite mis aux voix et adopté.

La chambre adopte ensuite les chiffres suivants ;

« pour les billets au-dessus de 500 fr., jusqu’à 1,000 inclusivement, fr. 0,60 c.

« Pour ceux au-dessus de 1,000 fr. jusqu’à 2,000 inclusivement, fr. 1,20.

« Et ainsi de suite, à raison de 60 centimes par mille francs, sans fraction. »


M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Messieurs, la chambre pourrait passer maintenant aux propositions touchant les billets de banque et les obligations. Ces propositions se réduisent maintenant à deux, celle de la section centrale et celle du gouvernement.

M. le président donne lecture des deux propositions qui sont ainsi conçues :

Proposition de M. le ministre des finances :

« Le droit de timbre sur les bons de caisse, billets au porteur, obligations ou actions, et tous autres effets à terme illimité ou payables après cinq ans de leur émission, est porté :

« Pour ceux de 250 fr. et au-dessous, à fr. 0,25

« Pour ceux de 250 à 500 fr., fr. 0,50

« Pour ceux de 500 à 1,000 fr., fr. 1,00

« Pour ceux de 1,000 à 2,000, inclusivement : fr. 2,00

« Et ainsi de suite, à raison d’un franc par 1,000, sans fraction.

« Toutefois, sont exempts du timbres les coupons d’intérêts ou de dividende dépendant desdits bons ou billets, obligations ou actions. »

Proposition de la section centrale :

« Le droit de timbre sur les bons de caisse, billets ou effets au porteur, obligations ou actions, et tous autres effets à terme illimité, est porté :

« Pour ceux de 500 fr. et au-dessous, à fr. 0,50

« Pour ceux au-dessus de 500 fr. jusqu’à 1,000 fr à fr. 1,00

« Pour ceux au-dessus de 1,000 fr jusqu’à 2,000 fr. à fr. 2,00

« Et ainsi de suite, à raison d’un franc par 1,000, sans fraction. »

M. Demonceau, rapporteur – Dans une séance précédente, M. le ministre des finances a déclaré qu’il se rallierait à la proposition de la section centrale quant aux billets de banque et aux obligations des sociétés. Toute discussion me paraît dès lors inutile sur ce point.

M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Effectivement, messieurs, lorsque j’ai demandé que l’on postposât la discussion du paragraphe dont il s’agit, après celle des articles 10, 11 et 12, j’ai déclaré que je ne verrais aucune difficulté à me rallier à l’opinion de la section centrale, en ce qui concerne le droit sur les billets de banque et les obligations des sociétés. Je suis encore dans la même disposition, et voici les motifs qui m’engagent à en agir ainsi :

D’après l’amendement que j’ai eu l’honneur de soumettre à la chambre, les billets de banque d’une valeur inférieure à 250 fr. ne paieraient plus que 25 centimes, tandis que, suivant le tarif actuel, le timbre est, avec les additionnels, de 38 centimes. La section centrale a trouvé, et je suis de son avis, qu’il serait plus juste de faire payer davantage aux billets qui rapportent de notables avantages aux sociétés et qui ont le privilège de rester longtemps en circulation. Elle a pensé que si, pour les effets de commerce de 250 fr. et au-dessous, on ne demandait que 15 c., on exigerait cependant encore en réalité plus pour ces effets que pour les autres tarifés à 50 c., attendu que ces derniers restent plusieurs années en circulation, sans devoir être, comme les autres, fréquemment renouvelés. Il a paru dès-lors rationnel de frapper d’un droit plus fort les billets de banque et les obligations ou actions des sociétés que les papiers ordinaires de commerce.

Je me rallie, en conséquence, à la proposition de la section centrale sur ce point. Toutefois elle n’est pas d’accord avec moi en ce qui concerne les obligations des sociétés.

J’ai demandé que ces obligations fussent frappées de la même manière que les billets de banque, lorsqu’elles sont créées pour une durée illimitée, ou lorsque leur terme dépasse cinq ans. La section centrale n’admet la proposition que pour les obligations à terme illimité. Or, je pense que les raisons qui militent pour que vous imposiez davantage les billets de banque à long cours, viennent appuyer ma proposition tendant à faire établir un droit plus élevé pour les actions qui se renouvellent seulement après cinq ans Veuillez remarquer qu’il est nécessaire de poser une limite ; sinon, les obligations qui seraient crées pour un terme de 30 ans , par exemple, ne seraient pas frappés d’un droit plus fort que les effets ordinaires du commerce. Or, les actions de presque toutes les sociétés sont de la même durée que l’existence de la société, et cette existence est ordinairement de 25 ou 30 ans environ.

Il faut donc poser une limite et je crois qu’un délai de 5 ans n’est pas trop court.

Puisque j’ai la parole, je vais avoir l’honneur de vous soumettre une disposition additionnelle au paragraphe qui est en ce moment en discussion.

Je vous propose d’exempter complètement du timbre les obligations ou actions et coupons y attachés, résultant d’emprunts faits par les provinces et les communes.

Cette exception me paraît de nature à recevoir votre approbation. Quand les provinces et les communes contractent des emprunts, c’est pour subvenir à des besoins extraordinaires résultant d’une position financière malheureuse, ou bien c’est pour consacrer les fonds à des travaux d’utilité publique. Ce serait augmenter la détresse financière de ces provinces et de ces communes que d’exiger un droit de timbre sur les actions des emprunts qu’elles font, ou bien ce serait restreindre la disposition de fonds destinés à des travaux d’intérêt général. Ces considérations sommaires me paraissent justifier suffisamment la disposition suivante qui deviendrait la seconde partie du paragraphe 2 de l’article 1er.

« Sont également exempts de timbre les obligations, actions et coupons y attachés, résultant d’emprunts faits par les provinces et les communes. »

M. Gendebien – Je regrette que M. le ministre des finances ait abandonné sa première proposition, que je crois juste et utile. C’est encore ici le petit commerce, les moins fortunés qu’on attaque dans la proposition de la section centrale. Ils trouveraient des avantages, des facilités dans leurs relations, par la création de petits billets. Si vous ne mettez pas une juste proportion entre le droit sur les petits billets et celui sur les gros, les banques ne feront plus que de gros billets ; vous n’aurez plus ou vous n’aurez que très peu de billets de 25, de 50, de 100 et de 200 fr., si vous les soumettez au même droit que les billets de 500 fr. ; vous n’aurez plus que des billets de 500 fr. et de 1,000 fr.

La section centrale propose de fixer à 50 c. le droit de timbre sur les billets de 500 fr. et au-dessous. Le billet de 25 fr. paie autant que le billet de 500. il en résulte qu’en facilitant les négociations du haut commerce, vous entravez le petit commerce, en favorisant ceux qui opèrent sur des millions, en donnant à ceux-là seuls l’avantage de transporter du papier au lieu d’écus. Vous condamnez la classe moyenne et la classe inférieure à transporter à grands frais des écus, parce que les billets ne seront pas à leur portée.

Lors de la révolution, nous avons senti l’avantage de la circulation des petits billets. Alors, il y avait une gêne très grande quoique factice, parce que chacun tenant ses écus serrés ; nous avons, dis-je, été tellement convaincus de l’avantage qu’on aurait à avoir de petits billets en circulation que nous avons proposé à la banque d’exempter du timbre les billets de 10 à 100 francs qu’elle émettrait. Je regrette qu’elle n’ait pas profité de cette offre. Elle paiera la peine de son mauvais vouloir, si la proposition de la section centrale est adoptée. Mais il ne s’agit pas de punir la banque, il faut consulter les intérêts du commerce et faciliter ses relations les plus nombreuses.

Dans les moments de crise, voyez l’avantage qui résulte de la circulation des petits billets. Celui qui aura besoin de 100 fr. ne sera pas obligé de changer un billet de 500 fr. , il lui suffira de changer un billet de 100 fr., de la somme dont il aura besoin. On dira peut-être que je défends ici l’intérêt des banques. C’est une erreur, cat si les banques suspendaient leurs paiements, ce ne seraient pas elles qui souffriraient le plus, mais les porteurs de billets et le commerce en général ; au surplus, l’intérêt des banques se trouvent ici d’accord avec l’intérêt des porteurs de billets et de la classe la plus nombreuse des trafiquants.

Je pense que M. le ministre, en y réfléchissant, reprendra sa proposition. Il n’y a pas d’inconvénient à ce que, pour les billets de banque de 250 francs et au-dessous, les proportions soient les mêmes que pour les autres billets ; on ne fait qu’inviter par là les banques à émettre des billets en nombre suffisant, à la portée du plus grand nombre.

Si M. le ministre ne reprend pas sa proposition, je la ferai mienne, et je demanderai qu’elle soit mise aux voix

M. le ministre des finances (M. d’Huart) – Il ne faut pas se dissimuler que la proposition de la section centrale tend à faire payer aux banques un impôt, mais un impôt léger. Quant au public, il n’est pas intéressé dans la question. Les facilités du commerce ne sont nullement compromises ici. Les banques ont-elles un avantage à répandre leur papier dans la circulation ? Evidemment, oui, car c’est pour elles un moyen d’augmenter leur capital et d’employer plus de numéraire pour leurs opérations. Eh bien, je dis qu’un droit de 25 centimes pour un billet que ne se renouvelle qu’au bout de 10 à 15 ans est insignifiant.

Mais on nous oppose que si nous soumettons au même droit les billets de 500 fr. et ceux de sommes inférieures à ce chiffre, les banques n’en émettront plus que du chiffre le plus élevé ; or c’est là une grande erreur. Les banques doivent se conformer aux exigences et aux convenances du public et s’il n’existait que des billets de 500 fr. et mille francs, très peu sortiraient du porte-feuille ; car ce sont les petits billets, les billets représentant 40 ou 50 fr. qui circulent le plus. Et cela est si vrai, messieurs, que les nouvelles banques qui demandent à émettre des bank-notes, sollicitent toujours l’autorisation de les créer de la moindre valeur possible, par exemple de 20 fr., pour représenter la monnaie d’or ; mais le gouvernement n’accorde pas cette autorisation pour des billets d’aussi peu de valeur ; afin qu’il n’y ait pas trop de ce papier en circulation, et parce qu’il faut se garder d’en faciliter la création outre mesure, par la raison que dans des moments de crise, les banques seraient elles-mêmes les premières victimes d’un excès de circulation de leurs effets à vue. La prudence commende de poser une limite à cet égard, et elle est ordinairement fixée à 40 ou 50 francs, ce qui est largement suffisant pour l’exigence des transactions.

L’impôt qu’on vous propose de demander aux banques est, comme je l’ai dit tout à l’heure, très petit en proportion des bénéfices que leur procure l’émission des bank-notes, et le public n’est pas intéressé à la non-existence de cet impôt, parce que les sociétés n’essaieront jamais de restreindre le nombre de leurs petits billets, pour en avoir davantage de fortes valeurs ; ce sont les billets de petites sommes qui seuls obtiennent la vogue, et les sociétés ont trop d’avantage à en débiter beaucoup pour ne pas se conformer au gouvernement et aux facilités des personnes qui les acceptent.

J’ai déjà dit que le droit actuel est de 38 centimes pour les billets de 500 francs et au-dessous, et que la proposition de la section centrale ne le porte qu’à 50 centimes. On restera donc à peu près dans les limites du tarif actuel.

M. Gendebien – Je n’ai pas attaqué la hauteur de l’impôt, et je suis loin de la contester ; mais je demande qu’on observe dans l’établissement de cet impôt une proposition qui invite les banques à émettre plus de petits billets ; le trésor y gagnera, car la circulation du papier sera plus grande si on crée de petits billets, parce qu’il y a plus de petits preneurs que de gros.

On dit que les banques gagnent assez pour payer 50 centimes de timbre par billet : cela est vrai, mais elles gagneront davantage à émettre de gros billets qu’à en émettre de petits, puisqu’elles paieront le même droit pour les uns que pour les autres, et alors elles n’en émettront que de gros.

Je sais par expérience que quand on envoie dans les banques de gros billets pour être échangés contre des petits, on vous répond souvent qu’on n’en a pas de petits. Pourquoi les banques n’en émettent-elles pas en raison des besoins ? parce que le droit sur les petits billets n’est pas en proportion de celui sur les gros.

On a dit qu’il ne fallait pas avoir trop de papier en circulation, parce qu’en cas de gêne, il en résulterait une perturbation dans le commerce. Mais cette gêne sera plus grande s’il y a en circulation plus de gros billets, proportion gardée, que de petits ; parce que dans un moment de gêne on se bornera à changer un billet de 100 fr., si on a besoin de cette somme, tandis que s’il n’y a pas de petits billets, on sera forcé de changer un billet de 500 fr. ou de mille alors qu’on pouvait se contenter de 10 ou 20 fr. Si vous établissez un droit qui soit en proportion de la somme, les banques ne seront plus arrêtées par aucun motif, elles émettront de petits billets, et tout en agissant dans leur intérêt, vous aurez fait quelque chose d’utile au commerce, car vous aurez facilité les transactions, et vous aurez agi dans l’intérêt du trésor en augmentant la circulation du papier timbré, circulation qui n’est pas assez considérable ; car il arrive souvent, lorsqu’on va à la banque pour changer un billet de mille ou 500 fr., qu’on est obligé de prendre de l’argent faite de petits billets. Pourquoi remettre toujours de l’argent en circulation quand on pourrait y mettre des billets ?

Je crois que le fisc y gagnerait beaucoup, parce que la proportion des petits billets en circulation, n’est pas aux gros comme un est à deux, mais comme un est à dix, est à 20. On fait plus facilement circuler dix billets de 100 fr., qu’un billet de 500. Si vous mettez le droit à 25 c. pour les billets de 250 et au-dessous, le trésor y gagnera ; parce qu’on multipliera les billets de cette somme. Si on n’établit pas de différence entre les billets de 500 et ceux de 250, on n’en fera que très peu de cette dernière somme, et le trésor y perdra.

Je suis persuadé qu’en y réfléchissant un peu, on se convaincra qu’il faut maintenir la proposition du ministre.

M. Demonceau – Je regrette de ne pouvoir partager l’opinion de l’honorable préopinant dans la question qui nous occupe. A l’époque de la révolution, la banque n’a pas consenti à émettre de petits billets ; mais les temps sont changés ; il n’est pas nécessaire de provoquer des émissions de cette nature. Il n’y en a que trop. Voilà mon opinion. Répandez dans le pays une masse de billets de banque ; qu’une crise se présente, qu’aura-je avec mes chiffons de papier ? J’aurai la solvabilité de la société anonyme qui a émis les billets de banque ; mais si cette société est en dissolution, je n’aurai rien.

Je ne veux pas faire la guerre aux banques ; mais si cela dépendait de moi, je ne permettrais pas l’émission de billets de banque que permet le gouvernement.

Je conçois qu’à Bruxelles, il soit commode d’avoir des billets de banque en raison de la facilité que l’on a à les changer contre des espèces lorsqu’on le veut. Mais il n’en est pas de même hors de Bruxelles, car il arrive souvent qu’on est obligé de payer une commission pour obtenir des espèces contre un billet de banque. (Marques d’étonnement.) Je le déclare publiquement, parce que cela m’est arrivé à moi-même. J’ai dû payer une commission pour avoir les espèces contre un billet de banque.

M. Gendebien – Il y a les agents de la banque.

M. Demonceau, rapporteur – Sans doute ; mais le billet que j’avais à changer n’était pas un billet de la société générale, c’était un billet de la société de commerce ; et les agents de la société générale acquittent les billets de cette société, et non pas les billets des sociétés sans sa protection comme la société de commerce.

Au reste, ceci n’est pas la question.

Quoique le timbre soit à 40 centimes, les banques ont émis beaucoup de billets et peut-être trop de billets en circulation. Dira-t-on qu’une augmentation de 10 centimes les fera renoncer à ces émissions de billets ? Quant à moi, je ne puis le croire. Je ne puis donc qu’appuyer la proposition de la section centrale ; je remercie M. le ministre des finances de s’y être rallié.

Pour ce qui concerne la réserve que la section centrale avait mise à son amendement, les motifs qui ont engagé la chambre à adhérer au système de M. le ministre des finances n’existant plus pour la section centrale, elle doit retirer sa proposition.

Je n’exprime ici que mon opinion personnelle, n’ayant pas reçu à cet égard de mandat de la section centrale.

M. Gendebien – L’honorable préopinant est tout-à-fait à côté de la question. Il ne s’agit pas de savoir si les banques aiment beaucoup à émettre, si elles émettent beaucoup. Nous ne sommes pas appelés à restreindre les émissions de billets de banque, mais à en mettre la circulation à la portée du plus grand nombre. Mais s’il est vrai que les banques émettent beaucoup, et qu’il faille autant que possible restreindre leurs émissions, c’est un motif de plus pour encourager l’émission des petits billets ; car alors l’émission sera moins forte, tout en produisant plus pour le trésor.

Dans un moment de crise, me dit-on, s’il y a tant de billets en circulation, il en résultera une grande gêne. J’ai dit que c’est précisément l’émission de gros billets qui entraînera de la gêne, puisque pour un besoin de 100 fr. on sera obligé de change un billet de 1,000 fr. ou de 500 fr., et par conséquent de prendre au-delà de ses besoins 200 fr. ou 400 fr. qui sans cela resteraient à la disposition de la banque.

Vous voyez donc que les objections de mon honorable adversaire ne sont en aucune façon fondées.

Le commerce, dit-on, n’a pas d’avantage à la circulation des billets de banque ; c’est là une nouvelle qui doit étrangement vous surprendre. Pour moi, il me semble qu’il n’y a rien de plus agréable et de plus utile pour le commerce que d’avoir des billets au lieu d’argent à transporter. Un négociant qui autrefois était obligé de prendre 10 ou 12 mille francs d’espèces avec lui et, qui avait ainsi une charge incommode, sans parler de l’inquiétude que cela lui causait, peut mettre aujourd’hui 200,000 fr. dans sa poche, et du moment qu’elle sera bien boutonnée, il n’aura pas à craindre qu’on les lui prenne ; personne ne se doutera même qu’il est porteur de telles valeurs, et ce négociant pourra circuler sans l’ombre d’un danger.

Mais, dit-on, on fait payer une commission, pour échanger des billets de banque contre des espèces ? Je répondrai à cela que s’il n’y avait pas de billets de banque, il faudrait prendre des billets de commerce et payer des commissions bien plus fortes. D’ailleurs pour quels billets l’honorable préopinant a-t-il eu à payer un droit de commission ? Pour des billets de la société de commerce, parce que les agents de la banque ne sont pas tenus d’acquitter ces billets. C’est là un mal, j’en conviens, mais il ne résulte de cela qu’une chose, c’est que quand on veut faire usage de billets de banque ailleurs qu’à Bruxelles, on ne doit prendre que des billets de banque de la société générale, lesquels sont acquittés sans droit de commission par ses agents dans les provinces.

Je m’étonne que dans une ville commerçante comme Verviers on ait de la peine à placer des billets de banque. Dans tout le pays de Charleroy ces billets circulent sans difficulté ; je ne sache pas qu’on ait jamais fait payer de droit de commission pour aucun, de quelque nature qu’il soit.

Dernièrement, me trouvant à Liége, j’ai fait changer un billet de la société de commerce ; eh bien, je n’ai pas eu de commission à payer. On a envoyé mon billet au premier banquier venu, qui a donné l’argent sans exiger aucun droit de commission. Au reste, pour éviter cet inconvénient, rien de plus facile que de ne prendre que des billets de la société générale.

Je crois ici soutenir les intérêts du trésor et ceux du plus grand nombre, en demandant que l’on favorise la mise en circulation des petits billets, parce que, je le répète (et l’on ne m’a pas répondu), au lieu d’un billet de 500 francs que la banque souscrit, elle pourra en émettre 10 ou 20 de 100, 200 ou de 250 francs.

C’est également un service à rendre au petit commerce. On dit que la banque ne demande pas mieux que d’émettre des billets ; sans doute ; mais je dis qu’elle n’en émet pas assez de petits. En effet, de mon bureau à la société de commerce il n’y a qu’un pas. Quand il n’y a que de gros billets et qu’on a à payer des sommes moindre que 1,000 francs, on est obligé d’y aller pour changer ; eh bien, il est arrivé souvent que la société de commerce a été obligée de fournir des écus à défaut de petits billets. Il faut donc favoriser l’émission de cette espèce de petits billets. Si je demande de telles mesures, c’est dans l’intérêt du trésor et des particuliers, et abstraction faite de l’avantage que peuvent y trouver les banques avec lesquelles je n’ai aucune espèce de relation d’intérêt.

M. Dubus (aîné) – Il semblerait, à entendre l’honorable préopinant, que les billets de banque de fortes sommes et de petites sommes seraient également réclamées par le commerce. Pour moi je vois entre ces deux espèces de billets une immense différence. En effet, les billets de forte sommes sont à l’usage du commerce, tandis que les billets de petites sommes n’ont pour but que de remplacer l’argent dans les menues dépenses.

L’honorable préopinant craint que les banques n’émettent pas de petits billets ; mais si le public veut de cette espèce de billets, les banques en créeront. Elles ont trop d’intérêt à lever ainsi, sans intérêt et moyennant un impôt modéré, de l’argent qu’elles font valoir, pour ne pas le faire.

Faut-il établir le droit de manière à rendre possible l’émission de billets de 20 ou 30 francs ? je ne le pense pas. L’honorable préopinant a, parlé de la facilité de transporter de grands capitaux dans sa poche au moyen de billets de banque. A coup sûr, ces grands capitaux, ce n’est pas au moyen de petits billets, mais au moyen de gros billets qu’on les transporte.

Je ne pense pas que l’impôt soit trop élevé sur les billets de banque, je voterai donc contre l’amendement de l’honorable préopinant.

(Erratum Moniteur belge du 24 novembre 1838, n°329 : Dans le compte rendu de la séance du 22 novembre (Moniteur du 23, on fait dire à M. Dubus (aîné) : « faut-il établir le droit de manière à rendre possible l’émission de billets de 20 ou 30 francs ? Je ne le pense pas. » M. Dubus (aîné) n’a dit ni cela, ni rien de semblable. Il a au contraire soutenu que le droit actuel est déjà modique en considération de l’avantage que les banques trouvent à émettre des billets au porteur même de petites sommes ; et c’est par ce motif qu’il s’est prononcé contre une réduction de ce droit.)

M. Gendebien déclare retirer son amendement.

- La rédaction de la section centrale et les additions proposées par M. le ministre des finances à cette rédaction du paragraphe deuxième de l’article premier sont successivement mises aux voies et adoptées.

L’ensemble de l’article premier est ensuite mis aux voix et adopté.

Article 2

M. le président – Voici l’article 2 présenté par le gouvernement ;

« Art. 2. le droit de timbre des journaux et écrits périodiques sera de quatre centimes pour chaque feuille, quelle qu’en soit la dimension.

« Les feuilles de supplément jointes aux journaux et papiers-nouvelles quotidiens sont exemptés de la formalité du timbre.

« L’article 8 de la loi du 31 mai 1824 est abrogé ; en conséquence, les journaux, gazettes, ou papiers-nouvelles, ouvrages périodiques, prix-coûtants imprimés, affiches, annonces et avis, venant de l’étranger, ne seront assujettis qu’aux droits dont sont frappés les mêmes impressions dans le royaume. »

Voici maintenant l’article 2 de la section centrale :

« Le droit de timbre fixe ou de dimension pour journaux et écrits périodiques est de trois centimes pour chaque feuille de 12 et demi décimètres carrés de superficie, et de 1 centime en sus par chaque cinq décimètres carrés complets excédant la dimension du timbre.

« Le papier sera fourni par celui qui présentera le papier à timbrer.

« Les feuille de supplément jointes aux journaux et papiers-novelles paieront le droit de timbre ci-dessus comme les journaux mêmes.

« L’article 8 de la loi du 31 mai 1824 est abrogé ; en conséquence, les journaux, gazettes, ou papiers-nouvelles, ouvrages périodiques, prix-coûtants imprimés, affiches, annonces et avis, venant de l’étranger, ne seront assujettis qu’aux droits dont sont frappés les mêmes impressions dans le royaume. »

Un amendement est déposé par M. A. Rodenbach.

M. Demonceau, rapporteur – Il y a erreur dans la rédaction de la section centrale. C’est par le chiffre de 15 décimètres carrés qu’on doit commencer. C’est ainsi que nous l’avons entendu. On paierait par conséquent 3 centimes pour 15 décimètres carrés, et 1 centime de plus pour chaque 5 décimètres en sus, ou 4 centimes pour 20 décimètres, et 5 centimes pour 25 décimètres, etc.

M. le ministre des finances (M. d’Huart) – D’après la législation existante, la feuille de 25 décimètres carrés sert de base et elle paie, les additionnels compris, 6 centimes et 67 centièmes. La demi-feuille, ou celle de 12 décimètres et demi, paie 4 centimes et 8 millièmes. Il y a encore une catégorie intermédiaire ou une feuille intermédiaire à ces deux-là, et qui est de 17 décimètres et demi à 22 décimètres et demi.

La feuille de 25 décimètres est le format des journaux l’Observateur, l’Indépendant, le Courrier belge.

La demi-feuille de 12 décimètres et demi, et au-dessous est le format des journaux de province, du Belge, du Journal de la Belgique, etc.

La feuille de grandeur intermédiaire ou de 17 décimètres et demi à 22 et demi est le format du Journal de Commerce, du Journal d’Anvers, et celui qu’avait autrefois le Courrier de la Meuse.

Voilà les trois catégories qui existe réellement.

La proposition de la section centrale consiste à maintenir sur les dimensions actuelles le droit existant, moins les 26 p.c. additionnels.

L‘honorable M. A. Rodenbach propose des catégories différentes et des chiffres différents ; il développera son amendement.

Le gouvernement propose, vous le savez, un droit fixe et uniforme de 4 centimes.

M. le président – La parole est à M. A. Rodenbach pour exposer les motifs de son amendement.

M. A. Rodenbach – Je propose d’imposer les journaux dont la dimension ne dépasse pas 20 décimètres carrés, c’est-à-dire, les petits journaux, à 2 centimes ;

D’imposer les journaux dont le format n’excède pas 30 décimètres carrés, c’est-à-dire, les journaux intermédiaires, à 3 centimes ;

De faire payer 4 centimes aux grands journaux quand leurs dimensions ne dépassent pas 40 décimètres carrés ;

Et d’augmenter le droit d’un centime pour chaque augmentation qui ne dépassera pas 10 décimètres.

Le ministre des finances dit que son système est beaucoup plus simple ; mais par sa proposition les petits journaux n’obtiendront aucun avantage ; ils seront froissés dans leur intérêt. Cette proposition du ministre, c’st le droit actuel. On ne comprend pas pourquoi on favoriserait les grands journaux au détriment des petits ; aussi les journaux de petit format se sont-ils plaints.

La section centrale, de son côté, a fait une proposition contre laquelle les grands journaux ont réclamé.

Vous savez, messieurs, que les publicistes ont adressé une pétition à la chambre. Que demandent-ils ? précisément ce que j’ai proposé dans la quatrième section dont je faisais partie, et ce que j’ai encore proposé dans la section centrale ; ils demandent que les petits journaux paient 2 centimes ; que les moyens paient 3 centimes, et que les grands paient 4 centimes ; ils veulent enfin un droit proportionnel ; c’st ce qu’il y a de plus juste.

il existe dans les provinces une foule de petits journaux qui rendent de grands services. Ceux qui sont à la tête de ces établissements ne doivent payer que proportionnellement à la grandeur de leur entreprise. Dans le commerce, les patentes sont différentes selon la grandeur des établissements commerciaux. L’égalité proportionnelle est la véritable égalité en matière d’impôts. C’est celle que je voudrais qu’on introduisît dans la loi.

Je suis très porté à croire que par mon amendent le fisc percevra presque autant qu’il perçoit maintenant.

Vous savez que depuis la révolution toutes les industries ont obtenu quelque allégement d’impôt ; les publicistes sont les seuls qui n’aient obtenu aucune diminution de charges. L’impôt des grands journaux est de 40 pour cent ; celui des moyens est de 30 pour cent, celui des petits de 20 pour cent ; c’est exorbitant.

Messieurs, la presse, il faut en convenir, a puissamment contribué à la révolution ; elle a été pour beaucoup dans l’établissement de notre nationalité ; il me semble que nous devions lui en tenir quelque compte.

D’ailleurs, messieurs, si vous abaissez le droit du timbre des journaux, cet impôt produira au fisc beaucoup plus qu’il ne produit aujourd’hui ; En Angleterre, ce droit a été diminué des deux tiers, et les produits sont aussi considérables qu’auparavant ; cela est tout naturel : la diminution du prix du timbre permet de diminuer le prix de l’abonnement, et le nombre des abonnés augmenter dans la même proportion.

Dans tous les pays constitutionnels, la carrière du publiciste est favorisée ; ce n’est que chez nous qu’elle souffle, et elle souffle à tel point, que les étrangers seuls s’y livrent ; les Belges qui s’occupent de littérature commencent bien par déposer leurs idées dans les journaux, mais comme cela ne rapporte presque rien, ils entrent dans l’administration ou dans le professorat, et la carrière de journaliste est abandonnée.

Je pense donc que nous devons faire quelque chose pour l’industrie des journalistes, qui n’a rien obtenu depuis la révolution, grâce à la générosité de ceux qui s’y livrent ; car si au commencement de la révolution ils avaient voulu, ils auraient obtenu un soulagement considérable ; mais ils ont dit que le gouvernement avait besoin de toutes ses ressources, et ils ont eux-mêmes, par pur dévouement au pays, retardé le jour où justice leur serait rendue. Il me semble, messieurs, que ce jour s’est fait assez longtemps attendre, et qu’il est temps de faire droit à leurs justes réclamations. J’espère, messieurs, que vous partagerez cet avis, et que vous adopterez ma proposition.

- La proposition de M. Rodenbach est appuyée par 5 membres.

M. le président – La parole est à M. Lebeau.

M. Lebeau – Messieurs, cette question est extrêmement importante ; elle n’a pas le même caractère que celles que soulèvent les autres dispositions du projet de loi, car dans l’intention de M. le ministre des finances il ne s’agit pas ici d’une mesure purement fiscale ; je pourrais même dire que, dans sa pensée, la mesure dont nous allons nous occuper, a un but tout contraire ; qu’il s’agit de faire droit aux réclamations incessantes dont la chambre a été saisie. La question est donc grave, et je me suis proposé de la traiter assez longuement ; comme l’heure est assez avancée, je pense qu’il conviendrait de remettre la discussion à demain. Cependant, je suis prêt, et si la chambre est d’avis de continuer, je suis à ses ordres. (A demain ! à demain !)

- La séance est levée à quatre heures et demie.