Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Documentation Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 30 mars 1838

(Moniteur belge n°90, du 31 mars 1838)

(Président de M. Raikem.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. B. Dubus procède à l’appel nominal à une heure.

M. Lejeune donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. B. Dubus donne communication de la pièce suivante adressée à la chambre.

« Le conseil communal de Jemeppes demande que cette commune soit détachée du canton de Hollogne-aux-Pierres pour être réunie à celui de Seraing. »

- Renvoi à la commission chargée de l’examen du projet de loi relatif aux circonscriptions cantonales.

Rapports sur des pétitions

M. Zoude dépose le rapport de la commission du cadastre sur les pétitions des inspecteurs provinciaux du cadastre, concernant les indemnités variables que leur avait allouées l’ancien gouvernement et que la chambre a refusé d’admettre.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

Projet de loi qui suspend les effets des engagements contractés par les provinces de Liége et du Limbourg relatvement à la construction du canal de Maestricht à Bois-le-Duc

Discussion générale

M. Heptia. - Vous savez qu’à l’époque où la construction du canal de Bois-le-Duc fut décidée, les provinces de Liége et du Limbourg consentirent à concourir à la dépense en raison des avantages commerciaux qu’on leur présenta comme devant résulter pour elles de la construction de ce canal. Ces résultats étaient obtenus en partie au moment de la révolution. Mais alors le canal aboutissant à la ville de Maestricht a été fermé, il a même été mis à sec dans une grande partie de son étendue. Depuis lors le bénéfice résultant du canal a été nul pour les provinces de Liége et du Limbourg.

Depuis 1830, la province de Liège a continué à percevoir des centimes additionnels votés pour la construction du canal.

La province de Liége avait versé entre les mains du gouvernement une somme provenant de sept annuités perçues, quand l’année dernière elle a demandé que cette somme fût mise à sa disposition. Une contestation est intervenue. La province, pour se faire restituer la somme qu’elle réclamait, disait qu’elle n’avait consenti à concourir à la construction du canal de Bois-le-Duc, qu’en vue des avantages commerciaux qu’elle était appelée à recueillir. Elle disait que c’était entre elle et le gouvernement précédent un contrat bilatéral d’après lequel elle ne devait concourir à la construction du canal de Bois-le-Duc que pour autant que les avantages promis seraient réalisés.

Le gouvernement ne semble pas vouloir reconnaître la validité de ces raisons. Il dit qu’étant subrogé aux droits de l’ancien gouvernement relativement à la construction du canal de Bois-le-Duc, c’est en ses mains que la somme votée par la province de Liége doit rester, en attendant la liquidation avec la Hollande.

C’est une question que nous ne sommes pas appelés à décider, que celle de savoir si les provinces de Liége et du Limbourg sont encore obligées de payer les centimes additionnels affectés au paiement des intérêts et de l’amortissement de la somme pour laquelle elles se sont engagées à concourir à la construction du canal de Bois-le-Duc. Cette question, on vous propose de la trancher en deux mots, on veut faire dire à la législature que ces provinces sont encore obligées. Cela est écrit d’une manière très explicite à la fin de l’article 2 du projet.

Il est vrai qu’on ne demande pas qu’on sanctionne d’une manière complète l’obligation de ces provinces de continuer à payer. On vous propose une espèce de transaction, de sanctionner que le gouvernement restera possesseur de la somme actuellement dans ses caisses, qui sera employée à l’achat de bons du trésor ; et pour l’avenir, les provinces pourront employer les sommes votées par elles à la construction de routes d’intérêt général. On met même encore une restriction ; on dit : sans toutefois qu’elles soient déliées desdits engagements, dont les effets ne seront que suspendus. Je trouve que ce n’est pas à la législature à venir trancher la question très ardue de savoir si une transaction doit avoir lieu entre ces provinces et le gouvernement. Je trouve que le projet ne serait pas juste, parce que si le gouvernement avait le droit de faire payer les sommes votées, ce ne serait qu’à condition de faire jouir des avantages promis comme équivalent de ces sommes. Or, ces avantages, on ne peut plus les donner à ces provinces.

Je crois donc que la chambre ne peut pas donner son assentiment à la loi, si on veut y conserver la restriction ou plutôt la reconnaissance formelle d’une obligation de la part des provinces.

Si le projet devait être accueilli par la chambre, ce ne serait que sous la réserve expresse des droits des provinces, sans préjuger si les provinces sont encore ou non obligées. C’est en ce sens que je propose que l’article 2 soit modifié.

M. le ministre des finances (M. d’Huart). - Quoique les observations de l’honorable préopinant se rapportent spécialement aux articles, je répondrai maintenant si la chambre le désire. Je vous ferai d’abord remarquer, messieurs, que les provinces intéressées n’ont aucunement réclamé contre le projet du gouvernement, et qu’elles y ont vu au contraire le moyen de mettre fin à des difficultés assez sérieuses qui s’étaient élevées entre elles et le gouvernement. Les fonds perçus par la province de Liège, en conformité des obligations qui résultent pour elle de la loi de 1824, ne sont pas destinés à devenir la propriété pure et simple de l’Etat ; ils sont places à intérêts en bons du trésor, pour ces intérêts s’accumuler au profit de la province de Liège et être employés au même usage que le capital.

L’objection de M. Heptia, sur la nature de l’engagement contracté par les provinces de Liége et du Limbourg en vertu de la loi de 1824, ne me paraît point sérieuse.

L’article 2 du projet ne tranche pas la question de validité de l’engagement dont il s’agit, si celui-ci est réel et positif, il continuera à subsister ; si au contraire il est contestable et si les provinces peuvent loyalement et légalement s’y soustraire, la disposition n’est pas de nature à y porter obstacle. Nous n’avons d’autre but, en rappelant les obligations à résulter de la loi de 1824, que d’éviter que l’on vienne prétendre plus tard que la charge attribuée dans le principe aux provinces de Liége et du Limbourg doit incomber au trésor belge, et qu’elles les remplissent.

L’honorable membre a commis une grave erreur en disant que le canal de Bois-le-Duc serait désormais inutile aux provinces de Liège et du Limbourg. Quand nos relations avec la Hollande seront rétablies, ce canal redeviendra très utile à ces deux provinces et comme nous proposons de suspendre jusqu’à ce moment l’exécution de la loi de 1824 en ce qu’elle renferme d’onéreux pour ces provinces, les dispositions que nous proposons sont évidemment conçues absolument dans leur intérêt.

Veuillez remarquer, messieurs, qu’aussi longtemps que la loi de 1824 subsiste, nous devons tenir à son exécution, et que si la chambre rejetait le projet en discussion, nous serions obligés de porter d’office les sommes au budget des deux provinces. Un tel rejet rendrait une nouvelle force à la loi de 1824, tellement que le Limbourg lui-même ne pourrait plus continuer à être dispensé de son exécution.

Ces considérations vous démontreront suffisamment que le projet doit nécessairement répondre aux vœux des provinces intéressées, et que ce ne serait point du tout les servir que de ne pas adopter ce qui vous est proposé.

- La discussion générale est close.

Discussion des articles

Article premier

« Art. 1er. Les sommes provenant des centimes additionnels aux contributions de l’Etat, perçus ou à percevoir par la province de Liége pendant les exercices 1830 à 1837 inclusivement, celles à percevoir par la province du Limbourg pour les mêmes exercices, et destinées à faire face à leur part contributive dans les dépenses du canal de Maestricht à Bois-le-Duc, pourront être provisoirement employées en achat de fonds nationaux portant intérêts, lesquels seront joints chaque année aux sommes principales, et suivront la même destination que ces sommes. »

- Adopté.

Article 2

« Art. 2. Jusqu’à disposition contraire, les provinces de Liége et du Limbourg pourront, sous l’approbation du Roi, appliquer à des travaux d’utilité publique les sommes qu’elles continueront à recouvrer, à partir de 1838, en exécution des engagements contractés par elles pour la construction du canal précité, sans toutefois qu’elles soient déliées desdits engagements dont les effets ne sont que suspendus par la présente loi. »

M. Heptia propose de modifier la fin de l’article 2 de la manière suivante :

« Sans toutefois qu’il soit rien préjugé sur les engagements desdites provinces, dont les effets ne sont que suspendus par la présente loi. »

M. le ministre des finances (M. d’Huart).- Il me semble que l’article 2, expliqué comme je l’ai fait, est la même chose au fond que l’amendement de M. Heptia ; s’il y a des engagements et qu’ils soient valides, ils demeureront à ceux qui les ont contractés ; s’il n’y a plus d’engagements, c’est-à-dire si les provinces de Liége et du Limbourg peuvent se soustraire, sans préjudice pour le trésor belge, aux conséquences de la loi de 1824, elles pourront faire valoir leurs droits.

La rédaction du projet, quoique ne renfermant point de réserves explicites, me paraît donc répondre au but que s’est proposé M. Heptia .

M. Heptia. - Si M. le ministre des finances attache à sa rédaction le même sens que j’attache à la mienne, nous ne devons tenir ni l’un ni l’autre à notre rédaction, puisque nous sommes d’accord au fond. Je ne vois donc pas le motif pour lequel j’insisterais, comme je ne verrais pas le motif pour lequel M. le ministre des finances insisterait pour faire préférer sa rédaction à la mienne. Je dirai seulement que dans notre situation actuelle, à propos d’un projet de loi qui peut-être n’a pas été examiné par tous les membres avec toute l’attention qu’on pourrait donner à des objets d’un intérêt général, on ne doit pas laisser se glisser dans la rédaction des expressions qui pourraient donner lieu à des difficultés. Toutefois je ne tiens pas à ma rédaction et je me rallierai volontiers à la rédaction de M. le ministre des finances, puisqu’il est entendu que nous sommes du même avis et que c’est dans le sens que j’ai expliqué que la loi sera entendue.

M. Simons déclare reprendre et faire sien l’amendement de M. Heptia.

M. le ministre des finances (M. d’Huart). - Je crains que l’amendement de M. Heptia n’ait la portée de préjuger quelque peu la question dans le sens extrême des observations qu’il a présentées. Pour donner satisfaction à l’honorable membre sans compromettre les intérêts de l’Etat, je proposerai de modifier la rédaction de l’article 2 et de le terminer comme il suit : « sans qu’il soit rien innové auxdits engagements, dont les effets ne sont que suspendus par la présente loi. »

- L’amendement de M. Heptia, repris par M. Simons, est mis aux voix ; il n’est pas adopté.

Le changement de rédaction proposé par M. le ministre des finances est mis aux voix et adopté.

L’article 2 est mis aux voix et adopté avec ce changement de rédaction dans les termes suivants :

« Art. 2. Jusqu’à disposition contraire, les provinces de Liége et de Limbourg pourront, sous l’approbation du Roi, appliquer à des travaux d’utilité publique les sommes qu’elles continueront à recouvrer, à partir de 1838, en exécution des engagements contractés par elles pour la construction du canal précité, sans qu’il soit rien innové auxdits engagements dont les effets ne sont que suspendus par la présente loi.

Vote sur l’ensemble du projet

On procède à l’appel nominal sur l’ensemble de la loi.

62 membres y prennent part.

60 votent l’adoption.

1 vote le rejet.

1 s’est abstenu.

En conséquence la loi est adoptée et sera transmise au sénat.

Ont voté l’adoption : MM. Bekaert, Berger, Corneli, de Brouckere, de Florisone, de Jaegher, de Langhe, de Man d’Attenrode, Félix de Mérode, de Muelenaere, de Nef, de Perceval, de Puydt, de Renesse, de Roo, Desmanet de Biesme, Desmet, de Terbecq, de Theux, d’Hoffschmidt, d’Huart, Doignon, Donny, Dubois, B. Dubus, Dumortier, Duvivier, Eloy de Burdinne, Fallon, Heptia, Hye-Hoys, Kervyn, Lebeau, Lecreps, Lejeune, Mast de Vries, Mercier, Milcamps, Morel-Danheel, Pirmez, Polfvliet, Raikem, Raymaeckers, C. Rodenbach, Rogier, Seron, Stas de Volder, Thienpont, Trentesaux, Troye, Ullens, Vandenbossche, Vandenhove, Vanderbelen, Van Hoobrouck, Vergauwen. Verhaegen, Vilain XIIII, Willmar, Zoude.

M. Simons a voté le rejet.

M. Beerenbroeck s’est abstenu parce qu’il ignore si l’amendement du ministre des finances offre assez de garantie aux provinces, l’amendement présenté par M. Heptia lui paraissant préférable.

Projet de loi sur les pensions militaires

Discussion générale

M. le président. - La discussion générale est ouverte sur le projet.

M. Doignon. - Je demande la parole pour faire remarquer à la chambre l’absence du rapporteur : y a-t-il ici quelque personne ayant fait partie de la section centrale et qui puisse le remplacer ? Je crois que trois des membres de cette section ne font plus partie de la chambre, que les trois autres sont absents ; M. le ministre ne rencontrera pas d’opposition si la discussion commence ; cependant la loi est importante ; elle comprend environ 40 articles.

M. de Brouckere. - L’observation faite par M. Doignon n’est pas sans fondement, mais si on ne discute pas le projet aujourd’hui, la remise sera-t-elle indéfinie ? Trois des membres de la section centrale ne font plus partie de la chambre, les autres sont absents, et M. le rapporteur est près de son fils malade ; cependant il faudrait avoir la loi sur les pensions avant la fin de la session. M. Doignon n’a pas fait de proposition ; je demanderai si quelque membre ne pourrait pas se charger de remplacer M. le rapporteur ?

M. Doignon. - Mon intention n’est pas de proposer d’ajournement indéfini ; cependant il y a inconvénient à discuter sans la présence de quelqu’un capable de soutenir l’opinion de la section centrale. Je ferai encore remarquer que nos bancs se dégarnissent, et que si demain nous ne sommes pas en nombre, il y a lieu de craindre que lundi et les jours suivants nous ne soyons plus en nombre. Je ne veux pas d’ajournement indéfini ; mais, dans l’état des choses, il y a convenance de renvoyer la discussion après les vacances de Pâques. Je propose formellement de renvoyer la discussion après Pâques.

M. F. de Mérode. - Je ne vois pas que nous soyons en nombre moins considérable qu’ordinairement. Quant aux vacances, je sais très bien que, vers Pâques, la chambre suspendra ses travaux ; mais est-il bien certain qu’après Pâques ils seront repris ? C’est ce que j’ignore. Si l’on avait terminé la loi sur les pensions avant Pâques, il ne serait peut-être pas nécessaire de nous réunir encore. La loi n’est pas difficile à comprendre ; la divergence entre les propositions de la section centrale et celles du gouvernement n’est pas grande ; il s’agit de quelques années de service de plus, et de quelques centaines de francs de moins sur les pensions des généraux ; tout le monde peut entendre cela sans la présence de M. le rapporteur.

M. Dumortier. - Il est certain que le projet de loi concerne une matière tout à fait spéciale, et pour laquelle il est nécessaire que nous soyons entourés des lumières des membres qui l’ont examiné en section centrale ; or, pas un seul de ces membres n’est présent ; et si la délibération commençait actuellement, la loi serait réellement votée sans examen ; ce serait de plus renoncer à l’examen préalable qu’exige le règlement ; car qui voudrait soutenir les amendements de la section centrale sans connaître ce qui s’est passé dans cette section ? Cette loi d’ailleurs n’est pas sans connexité avec les pensions civiles, et peut-être serait-il plus sage de discuter simultanément ces deux lois.

Mais, dit M. de Mérode, li faut savoir si l’on se rassemblera après Pâques ; est-ce comme membre du cabinet ou comme député qu’il a parlé ? Dans les circonstances actuelles, nous devons savoir quelle est la pensée du gouvernement à cet égard, parce que si nous ne devions plus être réunis, nous présenterions maintenant les observations que nous nous proposons de présenter plus tard. La chambre connaît trop ses devoirs pour ne pas se rendre ici après Pâques. Il y a huit semaines que les députés sont réunis, il est donc simple que l’on désire de prendre un congé ; et la chambre reprendra avec d’autant plus d’activité ses travaux qu’elle aura pris un repos bien mérité.

M. F. de Mérode. - L’honorable M. Dumortier a demandé si c’est comme membre du cabinet que j’ai pris la parole ; c’est comme représentant que j’ai parlé ; j’ai fait une simple observation que chacun de nous aurait pu faire comme moi.

M. de Brouckere. - Je crois, messieurs, devoir insister pour que la chambre passe immédiatement à la discussion du projet de loi, et je crois devoir vous faire remarquer que les difficultés que présente ce projet ne doivent pas être grandes, puisque pas un seul membre n’a pris la parole dans la discussion générale, ce qui prouve qu’il n’y a pas d’observations à faire sur l’ensemble du projet, qu’il ne peut donner lieu qu’à des observations de détail. « Mais, dit-on, si vous discutez aujourd’hui, c’est dire que vous voulez voter sans examen préalable. » C’est là une erreur, messieurs ; il y a eu un examen préalable, puisque la section centrale a discuté le projet et qu’elle nous a présenté un rapport, qui est parfaitement bien fait et dans lequel elle explique tous les amendements qu’elle a cru devoir introduire dans le projet ministériel. Nous avons donc un examen préalable qui ne laisse absolument rien à désirer.

On objecte encore la connexité qu’il y aurait entre la loi sur les pensions militaires et la loi sur les pensions civiles ; d’abord si la chambre admettait une semblable manière de voir, ce serait véritablement ajourner le projet de loi d’une manière indéfinie ; or tout le monde en reconnaît l’urgence ; ensuite, si l’on veut dire qu’il y a connexité entre pensions et pensions, on a raison ; mais il est certain qu’il y a une différence immense entre les pensions qui doivent être données aux militaires et celles auxquelles des fonctionnaires civils peuvent avoir droit ; il y a d’autres règles et d’autres conséquences qu’il faut en tirer ; on pourrait contester les droits des fonctionnaires, mais il est impossible de contester ceux des militaires qui ont un certain nombre d’années de service, et qui sont dans une certaine position ; la loi des pensions militaires et celle des pensions civiles sont donc deux objets distincts qui doivent être traités séparément.

Quant à l’absence des membres de la section centrale, qu’on a également objectée, je ne pense pas que ce soit là un empêchement suffisant, que ce soit là un motif qui puisse déterminer la chambre à ne pas donner suite à ses travaux.

J’insiste donc pour que nous passions outre à la discussion du projet de loi sur les pensions militaires.

M. Dumortier. - Je ferai remarquer à la chambre que je n’ai point dit qu’il fallait examiner la question de savoir s’il y a lieu oui ou non à accorder des pensions militaires ; je n’ai prononcé aucune parole dont on puisse tirer cette conséquence ; seulement j’ai fait remarquer qu’il serait tout à fait irrégulier de discuter le projet de loi dont il s’agit, en l’absence de tous les membres de la section centrale. Mais, dit l’honorable préopinant, il y a un rapport. Je ne pense pas, messieurs, que cela suffise ; il faut bien qu’il y ait quelqu’un pour défendre ce rapport, pour en justifier les conclusions ; car si M. le ministre tient à son projet, il le soutiendra, il combattra les amendements de la section centrale, et si personne n’est là pour lui répondre, nous n’entendrons qu’une seule opinion ; ce ne sera pas là une discussion.

L’honorable préopinant a cru trouver un argument en faveur de la discussion immédiate en ce qu’il n’a point été fait d’observations dans la discussion générale ; je trouve là, moi, un motif pour conclure dans un sens tout à fait contraire, car si l’on n’a pas fait d’observations dans la discussion générale, c’est précisément parce qu’aucun des membres de la section centrale ne se trouvait ici ; et si l’on passe à la discussion des articles, elle pourrait très bien, par le même motif, se passer comme la discussion générale, c’est-à-dire que toute la loi pourrait être votée sans que personne pût prendre la parole, car très peu de membres de la chambre ont pu établir le projet dont il s’agit. Or, je pense, messieurs, que ce serait en quelque sorte un véritable scandale si on votait sans examen un projet de loi d’une telle importance : c’est ce que je veux éviter, et c’est pour cela que je demande, non pas que la discussion soit ajournée indéfiniment, mais qu’elle soit remise jusqu’à ce que le rapporteur, ou tout au moins un membre de la section centrale, sont ici pour y prendre part.

M. le ministre de la guerre (M. Willmar). - Je ne puis pas m’opposer fortement à la proposition de l’honorable M. Doignon, parce que j’ai l’intention de combattre beaucoup de détails du projet de la section centrale, et qu’il convient par conséquent à ma position de ne pas insister pour que le projet soit discuté en l’absence du rapporteur ; mais je pense que si M. le rapporteur se trouve dans l’impossibilité de venir à la séance, la chambre pourrait charger une commission spéciale d’examiner les amendements que je proposerai au projet de la section centrale ; cette commission pourrait nous faire son rapport lundi, et nous pourrions alors nous occuper mardi de la discussion du projet.

M. Doignon. - Je me rallie à la proposition de M. le ministre de la guerre ; mais il y a lieu d’espérer que M. le rapporteur se trouvera ici pour le jour auquel la discussion aura été fixée.

M. le ministre de l’intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Je pense, messieurs, que la proposition de M. le ministre de la guerre est de nature à recevoir l’assentiment de tous les membres de la chambre ; la commission pourra comparer le projet de la section centrale avec les amendements qui seront proposés par M. le ministre de la guerre, et soutenir alors celui des deux projets qui lui paraîtra le plus convenable.

M. le ministre de la guerre (M. Willmar). - J’ajouterai que les amendements pourront être imprimés aujourd’hui et distribués demain.

M. le ministre de l’intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Je demanderai que la commission puisse faire imprimer son rapport sans décision ultérieure de la chambre ; alors la chambre pourrait s’occuper en sections demain et lundi ; on pourrait examiner les différents projets dont les sections sont saisies ; ce serait du travail préparé pour la reprise de la session après Pâques.

Ainsi, je proposerai qu’on travaille demain et lundi dans les sections, et que dans l’intervalle la commission rédige son rapport et le fasse imprimer, de manière à ce que la chambre puisse s’en occuper mardi.

M. de Brouckere. - Je viens proposer que la discussion du projet de loi sur les pensions militaires soit fixée à mardi prochain, que les séances de demain et de lundi soient fixées à deux heures, et que l’ordre du jour se compose des pétitions et des naturalisations (Appuyé !)

M. Mast de Vries. - Ne serait-il pas possible que M. le ministre fît imprimer les amendements ce soir ? Alors la commission pourrait se réunir demain.

M. Lebeau. - Comme les amendements ne doivent pas être renvoyés aux sections, mais à une commission, le ministre peut se dispenser de les faire immédiatement imprimer, sauf à les faire imprimer plus tard pour l’usage de la chambre. (C’est juste !)

M. le ministre de la guerre (M. Willmar). - Je remettrai les amendements à la commission, dès qu’elle se réunira.

M. de Langhe. - Je ferai observer que si l’on fixait la séance de demain seulement à 2 heures, et que si nous ne nous réunissions qu’à 3 heures, il n’y aurait qu’un simulacre de séance. Je demande qu’on fixe la séance à une heure pour commencer à deux heures. (On rit.)

- La chambre consultée décide que la discussion du projet de loi relatif aux pensions militaires aura lieu mardi prochain.

La chambre décide ensuite que les amendements de M. le ministre de la guerre seront renvoyés à une commission à nommer par le bureau.

Ordre des travaux de la chambre

M. Fallon. - Comme l’heure de la séance n’est pas très avancée, nous pourrions encore nous occuper d’un feuilleton de naturalisations.

M. Dumortier. - Mais nous n’avons pas par-devers nous nos feuilletons, et il n’y en a pas suffisamment au greffe, de manière qu’il y a impossibilité matérielle à nous occuper de cet objet.

M. le président. - La chambre pourrait s’occuper de la prise en considération d’une demande en grande naturalisation ; la lecture du rapport mettrait chaque membre à même de voter en connaissance de cause. (Appuyé.)

M. Lebeau. - Je demande qu’on fixe maintenant l’ordre du jour de demain, car à la fin de la séance nous ne serons plus en nombre.

M. le président. - Demain la chambre pourra s’occuper de naturalisations et de pétitions. (Appuyé.)

Il s’agira aussi de savoir quels projets de loi l’on mettra à l’ordre du jour dans les sections.

M. Desmet. - Messieurs, je proposerai qu’on mette à l’ordre du jour le projet de loi relatif à la canalisation de l’Escaut et de la Lys.

M. Dumortier. - Messieurs, le projet de loi concernant la canalisation de l’Escaut et de la Lys est un projet extrêmement grave pour les intérêts des localités que la chose concerne. Je suis informé que des communes intéressées doivent faire parvenir à la chambre des pétitions relatives à cette question. Il me semble qu’avant de s’occuper de cet objet, nous devons au moins consulter l’opinion publique dans les localités que la chose concerne. Je puis déclarer que, dans l’arrondissement de Tournay, l’on considérerait comme une grande calamité la canalisation de l’Escaut.

M. Desmet. - Messieurs, je ne m’oppose pas à ce que l’on prenne des renseignements sur le projet de loi ; mais un fait constant, c’est que le projet a été présenté par le gouvernement, et que M. le ministre des travaux publics a insisté pour qu’il fût mis à l’ordre du jour.

Je répondrai maintenant à l’honorable M. Dumortier que si dans l’arrondissement de Tournay on ne désire pas la réalisation du projet dont il s’agit, les Flandres attendent cette mesure avec impatience.

Je persiste à demander que le projet de loi soit mis à l’ordre du jour dans les sections.

M. Fallon. - Je ferai observer qu’il est toujours d’usage que le bureau, de concert avec les présidents des sections, règle l’ordre des travaux des sections.

- Cet incident n’a pas de suite.

Prise en compte d'une demande en grande naturalisation

Demande en grande naturalisation du sieur François Fleury, préposé des douanes.

Il est né à Mussy-l’Evêque, département de l’Aube (France), le 2 avril 1801, et est entré en Belgique au commencement de la révolution, comme officier dans la légion belge-parisienne. Il est actuellement préposé de douanes. Il résulte des pièces qu’il produit que, le 13 décembre 1830, il a été nommé sous-lieutenant ; que, déjà le 15 décembre suivant, il a été, à sa demande, démissionné ; qu’il a obtenu alors des témoignages flatteurs de la part des autorités militaires ; que plus tard, il a été employé comme piqueur principal aux travaux exécutés à Gand par le génie militaire, et ensuite comme surveillant aux travaux en maçonnerie et en terrassement exécutés dans la même place, et qu’il s’est acquitté de toutes ces fonctions avec zèle, activité et probité.

On ne voit pas à quelle époque il est entré dans le service de la douane ; mais on assure que, dans sa qualité actuelle, il a su mériter l’estime de ses supérieurs.

- On procède à l’appel nominal sur la prise en considération de cette demande.

Nombre des votants, 52.

Boules noires, 46.

Boules blanches, 6.

En conséquence la demande du sieur Fleury n’est pas prise en considération.


Composition de la commission chargée de l’examen des amendements proposés par le ministre de la guerre au projet de loi sur les pensions militaires.

MM. Raikem, de Puydt, Desmanet de Biesme, Mast de Vries, Desmaisières, Simons et de Renesse.

- La séance est levée à 4 heures.