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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 14 mai 1836

(Moniteur belge n°137, du 16 mai 1836)

(Présidence de M. Raikem.)

La séance est ouverte à une heure et demie.

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Dechamps procède à l’appel nominal.

M. Schaetzen lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Dechamps fait connaître l’objet des pièces suivantes adressées à la chambre.

« L’administration communale d’Hyon, près Mons et des propriétaires d’usines, fermes et habitations de la même commune, demandent qu’il leur soit permis de faire de nouvelles constructions dans le rayon de la forteresse. »

- Cette pétition est renvoyée à la commission des pétitions chargée d’en faire le rapport.

Composition des bureaux de section

M. Dechamps fait connaître la composition des bureaux des sections pour le mois de mai 1836.

Première section.

Président : M. Desmaisières

Vice-président : M. de Roo

Secrétaire : M. Van Hoobrouck

Rapporteur des commissions : M. Zoude


Seconde section.

Président : M. Coppieters

Vice-président : M. Liedts

Secrétaire : M. C. Vuylsteke

Rapporteur des commissions : M. Raymaeckers


Troisième section.

Président : M. Dubus aîné

Vice-président : M. Vanderbelen

Secrétaire : M. Troye

Rapporteur des commissions : M. Doignon


Quatrième section.

Président : M. Duvivier

Vice-président : M. Stas de Volder

Secrétaire : M. Kervyn

Rapporteur des commissions : M. Dequesne


Cinquième section.

Président : M. Desmanet

Vice-président : M. Legrelle

Secrétaire : M. Berger

Rapporteur des commissions : M. de Terbecq


Sixième section.

Président : M. Andries

Vice-président : M. d’Hoffschmidt

Secrétaire : M. Beerenbroeck

Rapporteur des commissions : M. Mast de Vries

Projet de loi autorisant un transfert de crédit au sein du budget du ministère de la justice

Dépôt

Projet de loi abrogeant l'arrêté-loi du 9 septembre 1814

Dépôt

M. le ministre de la justice (M. Ernst) monte à la tribune, et dépose deux projets de loi, dont l’un est relatif à un transfert à opérer au budget de 1835 ; et dont l’autre concerne l’abrogation de l’arrêté-loi du 9 septembre 1814.

- Ces projets seront imprimés et distribués et sur la demande de M. le ministre de la justice, chacun d’eux sera renvoyé à une commission spéciale à nommer parle bureau.

Projet de loi qui autorise le gouvernement à contracter un emprunt de trente millions de francs

Dépôt

M. le ministre des finances (M. d'Huart) remplace à la tribune M. le ministre de la justice, et donne lecture d’un projet de loi autorisant le gouvernement à contracter un emprunt de 30 millions.

- Ce projet sera imprimé et distribué, et la chambre décide qu’il sera renvoyé aux sections.

Proposition de loi relative aux droits d'entrée sur les houilles de la Sarre

Rapport de la section centrale

M. Troye, rapporteur de la section centrale chargée de l’examen de la proposition de M. de Puydt, relative à des houilles de la Sarre, monte à la tribune, et se dispose à lire son rapport. (L’impression ! l’impression !)

M. Dams. - Je désirerais que M. le rapporteur fît connaître à la chambre le résultat des délibérations de la section centrale.

M. Troye, rapporteur. - Si la chambre le désire, je donnerai lecture du rapport. Je dois toutefois faire observer qu’il n’éclairera pas beaucoup la chambre, car la section centrale a été d’avis que la proposition de M. de Puydt devait recevoir une instruction plus complète ; elle propose de renvoyer le projet à la commission d’industrie, en émettant le vœu que cette commission s’éclaircît des avis des chambres de commerce qui se trouvent dans les provinces intéressées.

M. Dams. - Messieurs, il y a nécessité de statuer le plus tôt possible sur le projet de M. de Puydt.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Messieurs, il me paraît que tout le monde est d’accord sur l’utilité de consulter les diverses autorités dont il est parlé dans le rapport.

On pourrait dès lors délibérer immédiatement sur les conclusions de la section centrale, l’on gagnerait du temps, et l’on arriverait plus promptement au but indiqué par l’honorable M. Dams, savoir à la discussion dans le plus bref délai possible du fond même de la proposition de M. de Puydt.

M. le président. - En ce cas il faudrait donner lecture du rapport.

M. de Puydt. - Messieurs, la section centrale, chargée de l’examen de ma proposition, a proposé de la renvoyer à la commission d’industrie, avec invitation de s’éclairer des avis des chambres de commerce de diverses provinces. Pour moi, je n’ai aucune objection à faire contre ces conclusions.

Toutefois, je crois devoir faire quelques observations sur ce qui s’est passé au sujet de ma proposition.

Quand j’ai présenté cette proposition, mon désir était qu’elle fût renvoyée à une commission spéciale, parce qu’une commission de cette nature est plus à même d’examiner, en pleine connaissance de cause, un projet qui se rattache à un objet tout spécial. Lorsqu’on renvoie une proposition aux sections, elles déclarent ordinairement qu’elles ne sont pas suffisamment éclairées, et renvoient le tout à la section centrale qui devient dès lors une espèce de commission spéciale.

L’avantage qu’il y a de renvoyer d’abord un projet de l’espèce à une commission spéciale, c’est que le plus souvent l’auteur de la proposition est nommé membre de la commission, ou du moins il est appelé dans son sein, pour y donner tous les renseignements qu’il a dit nécessairement recueillir, comme auteur du projet.

Messieurs, j’aurais désiré que la section centrale m’eût demandé des renseignements autres que ceux qui sont développés dans ma proposition, si, à son avis, ceux-ci n’étaient pas suffisants ; elle aurait pu alors présenter des conclusions en parfaite connaissance de cause.

Quoi qu’il en soit, j’appuie le renvoi de ma proposition à la commission d’industrie, et je demande de faire partie de cette commission pour cette fois et cet objet seulement.

M. le président. - La chambre désire-t-elle qu’on donne lecture du rapport.

M. Liedts. - Il faut décider d’abord si l’on discutera les conclusions du rapport.

M. Dams. - Messieurs, je le répète, il y a urgence à discuter le projet, et j’engage la commission d’industrie à faire son rapport le plus tôt possible.

M. le président. - La chambre peut mettre le rapport à l’ordre du jour de lundi ; dans l’intervalle, il sera imprimé et distribué. Est-on d’accord sur ce point ?

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Messieurs, je ne vois pas à quoi servirait l’impression du rapport ; le rapporteur vient d’en faire l’analyse en deux mots.

Les sections et la section centrale ne sont pas suffisamment éclairées sur la proposition et ont émis le vœu qu’elle fût renvoyée à la commission d’industrie.

Il suffirait donc d’ordonner le renvoi à cette commission, avec invitation de prendre immédiatement tous les renseignements nécessaires près des chambres de commerce dans les provinces intéressées ; il n’y a rien d’irrégulier dans cette manière de procéder.

Je le répète : l’impression du rapport me paraît inutile, et je pense que nous gagnerons trois ou quatre jours en adoptant purement et simplement les conclusions de la section centrale.

M. Van Hoobrouck de Fiennes. - Mais, au moins, qu’on donne lecture du rapport.

M. Gendebien. - Veut-on passer au-dessus du règlement en toute occasion ? Je ne vois aucun motif d’urgence, pour prendre en ce moment une décision ; nous pouvons sans inconvénient attendre à lundi, que le rapport soit imprimé dans le Moniteur, ou séparément, et de cette manière, nous procéderons au moins régulièrement.

- La chambre décide que le rapport sera imprimé dans le Moniteur et que les conclusions de ce rapport seront mises à l’ordre du jour de lundi.

Projet de loi portant création d'un conseil des mines

Second vote des articles

Titre premier. Du conseil des mines

Article premier

M. le président. - La discussion est ouverte sur l’article premier qui a été amendé ; il est ainsi conçu :

« Art. 1er. Les attributions conférées au conseil d’Etat par la loi du 21 avril 1810 sur les mines (à l’exception des demandes en concession ou en extension de concession de mines de fer), seront exercées par un conseil des mines, composé d’un président et de trois conseillers nommés par le Roi ; un greffier, également nommé par le Roi, sera attaché à ce conseil.

« Le conseil pourra réclamer le concours des ingénieurs des mines, lorsqu’il le jugera convenable. »

M. Pirson remplace M. Raikem au fauteuil.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je demande la conservation dans l’article premier, de ce paragraphe : « le Roi pourra, en outre nommer deux conseillers honoraires, à l’effet de suppléer les membres effectifs, en cas d’empêchement. »

Seulement, au lieu de deux, je propose de mettre trois conseillers honoraires. D’après les dispositions que vous avez adoptées, il se peut que deux ne suffisent pas.

M. Gendebien. - Messieurs, vous voyez où vous êtes enfin arrivés après une longue et laborieuse discussion qui a absorbé 12 ou 13 de vos séances ; vous êtes forcés de revenir sur vos pas ; et même de dénaturer votre propre ouvrage.

On avait d’abord proposé un conseil des mines composé de trois membres, plus deux suppléants ; on a proposé ensuite un conseil composé de quatre membres, en demandant la suppression des suppléants.

La discussion a fait apercevoir toute l’inanité d’un conseil formé de trois personnes amovibles ; d’un autre côté on a senti la nécessité d’admettre des récusations. Dès lors, le conseil pouvant être décimé, il était nécessaire d’avoir les moyens de remplacer les membres forcés de s’abstenir, et l’on est revenu à l’idée, d’abord écartée, des conseillers honoraires.

Et cependant, messieurs, veuillez remarquer lorsqu’on a rejeté au premier vote l’institution des conseillers honoraires, c’était parce qu’on avait reconnu qu’il était impossible d’avoir la même confiance dans des conseillers honoraires que dans des conseillers effectifs ; or, toute l’économie, tout l’esprit de la loi est dans l’extrême confiance que nous devions avoir, disait-on, dans le personnel du conseil des mines.

Pour rendre la composition de ce personnel un peu moins mauvaise, ou plutôt pour mieux captiver les suffrages de la chambre, en faveur de l’article premier, on a supprimé les conseillers honoraires, maintenant qu’on a obtenu tout l’effet qu’on attendait de cette concession, on les propose de nouveau, et au lieu de deux, on demande trois suppléants.

Messieurs, je vous le demande, peut-on admettre un pareil conseil composé de quatre personnes, pouvant délibérer au nombre de trois avec faculté de substituer trois suppléants aux trois conseillers effectifs ! Et dans quelle intention le gouvernement vous présente-il ce conseil ? Dans l’intention d’améliorer la loi du 21 avril 1810 sur les mines ! C’est une véritable dérision.

Qu’on veuille bien ne pas oublier que la loi de 1810 était en rapport avec le conseil d’Etat de France, dont le personnel d’Etat successivement accru jusqu’au nombre de 50 membres, et qui ne pouvait prononcer que lorsque les deux tiers des membres effectifs étaient présents.

Et vous voulez remplacer ce corps compose de 30 à 40 membres par un conseil qui prononcera au nombre de 3 conseillers effectifs et éventuellement un conseiller effectif et deux conseillers honoraires

Veuillez remarquer que quand le conseil d’Etat était saisi de questions de mines, elles avaient passé au préalable au creuset d’un comité spécial des mines qui avait été institué par un décret impérial du 18 novembre 1810, lequel devait, aux termes de l’art. 46, donner son avis motivé sur les demandes en concession, en concurrence, en extension et sur les oppositions, enfin sur tout ce qui était relatif aux mines. Ainsi, autrefois, les demandes en concession passant par la filière des administrations locales et départementales, elles arrivaient ensuite au conseil des mines qui donnait son avis ; et dès qu’il y avait des contentieux, l’affaire était renvoyée à une section spéciale du conseil d’Etat présidée par le grand juge, le ministre de la justice ; cette section du contentieux faisait son rapport ; la section de législation l’examinait ; et ensuite le conseil d’Etat siégeant au nombre de 30 à 40 membres prononçait. Aujourd’hui, que reste-t-il de ces garanties ? Rien, pas même de conseil des mines qui ne faisait qu’aviser et après lui deux autorités encore examinaient l’affaire et faisaient un rapport. Vous ne pouvez pas même comparer votre conseil des mines à celui qui existait autrefois, bien qu’il ne fût que le rouage le moins important de toute cette juridiction.

J’ajouterai encore que dans tous ces corps, il y avait une procédure spéciale qui régularisait tous les actes. A chaque pas ces corps trouvaient une règle, à chaque pas les intéressés trouvaient une garantie.

Aujourd’hui vous n’en donnez aucune. Alors il y avait moyen de revenir contre les erreurs du conseil d’Etat, il y avait un recours contre les décrets impériaux rendus sur l’avis du conseil d’Etat, comme pour les requêtes civiles, en matière ordinaire ; on s’adressait au conseil d’Etat soit pour pièces fausses produites, soit pour pièces décisives retenues par la partie intéressée. Il y avait, je crois, encore d’autres cas pour lesquels on pouvait revenir au conseil d’Etat. Aujourd’hui le conseil des mines prononcera souverainement, sans instruction préalable, si ce n’est celle de la province qui ne fait que remplacer les anciennes administrations départementales.

Franchement, est-ce bien sous le régime constitutionnel de 1831, qu’à prétexte d’améliorer la loi de 1810 sur les mines, on peut franchir toutes les anciennes juridictions administratives, mettre de côté toutes les garanties qui se rattachaient à ces juridictions, pour juger à huis clos, sans contradicteurs, sans contrôle, sans degré de juridiction ?

Veuillez remarquer une chose, c’est que le conseil d’Etat de France a été constitué en vertu de la constitution de l’an VIII.

C’était une juridiction légale, constitutionnelle. Malgré cela, aucune précaution n’était négligée ; il y avait divers degrés d’instruction, il y avait recours en cas d’erreur. Aujourd’hui, vous voulez, sous une constitution qui repousse toute juridiction exceptionnelle quelconque, vous voulez en établir une composée de trois conseillers amovibles, et éventuellement de trois suppléants, qui aspireront à des emplois de l’administration ; en un mot, de trois complaisants ; car on ne briguera les fonctions de conseiller honoraire, que dans l’espoir d’arriver quelque part. Quand on brigue des fonctions honoraires, c’est ordinairement à défaut de mérite réel pour arriver d’emblée à quelque chose de positif.

Ce sont donc des services, des actes de complaisance qu’on demandera de ces hommes, car l’homme incapable qui veut avancer, à défaut de capacité, rend des services, et se laisse aller à toute espèce d’acte de complaisance ; c’est là l’histoire de tous les ambitieux, de tous les nécessiteux qui s’attachent aux gouvernements. Voilà les hommes qui nous jugeront, qui jugeront en dernier ressort sur des millions ; tandis que quand il s’agit d’une contestation de la valeur de mille et un francs, et qui, quand elle est indéterminée, peut n’être que de deux ou trois cents francs, on soumet l’affaire à la juridiction du juge de paix en conciliation ; l’instance est ensuite portée devant le juge d’arrondissement, puis en appel devant la cour et enfin devant la cour de cassation en cas de violation de la loi.

Et pour une affaire aussi importante que celle d’une concession de mines et de tout ce qui s’y rattache, non seulement vous voulez la faire juger, non plus par des jurisconsultes, comme vous l’aviez dit mais par des apprentis administrateurs. Cela n’est pas tolérable, cela est révoltant.

Je dirai encore que sous l’empire on pouvait être contraint, sans trop murmurer, à discuter ses droits devant un conseil d’Etat, mais c’était en vertu d’une constitution, en vertu de la constitution de l’an VIII.

Aujourd’hui que la constitution garantit à chacun la juridiction des tribunaux ordinaires pour la connaissance de tous les droits civils, comment voulez-vous établir une juridiction exceptionnelle ? En matière de grande voirie, il y avait une juridiction administrative pour la répression des contraventions. La cour d’appel de Liége et la cour d’appel de Bruxelles ont décidé formellement que depuis la constitution l’autorité administrative n’avait plus rien à y voir et que la connaissance de ces contraventions appartenait aux tribunaux ordinaires. La cour de cassation a confirmé ces arrêts.

Veuillez remarquer que c’est sur un pourvoi, dans l’intérêt de la loi, que la question a été décidée.

Vous savez que la partie publique est seule en présence de la cour, et par conséquent il y a toute chance que la cour n’aura pas cédé à un mouvement d’éloquence, à l’influence de moyens extraordinaires employés par les avocats. Le plaidoyer est tout simple, il est reproduit en trois ou quatre pages d’un volume in-8° qui en a rendu compte. Veuillez remarquer une chose : c’est que le procureur-général près la cour de cassation partageait avec la cour l’opinion que je soutiens, car il dit en demandant la cassation d’un jugement d’un tribunal de première instance qui s’était déclaré compétent en matière de contravention de grande voirie, « la question n’aurait souffert aucun doute si la poursuite avait eu pour objet un droit civil, car l’article 92 de la constitution déclare que les contestations de cette matière sont exclusivement du ressort des tribunaux, mais il s’agissait d’une contravention et de sa répression. Aussi n’est-ce pas dans cet article mais dans l’art. 94 que la cour d’appel a cru trouver la disposition inconciliable avec l’existence de la juridiction administrative. »

C’est un arrêt de la cour de Bruxelles qui était dénoncé. Je me suis trompé en disant qu’il s’agissait d’un jugement. Voici quelques passages des considérants de l’arrêt de la cour de cassation qui a fait justice complète du système qu’on veut adopter aujourd’hui.

Vous avez vu, d’après la lecture que je viens de vous faire, que le procureur général n’était pas opposé à mon système, qu’au contraire, il reconnaissait l’application de l’art. 92 et ne s’appuyait que sur la circonstance qu’il ne s’agissait pas d’un droit civil, mais d’une contravention et d’une répression.

Or, il ne s’agit pas de contravention dans les questions de mines, mais de droits acquis, de droits civils.

Voici au surplus l’arrêt de la cour de cassation :

« Attendu qu’il résulte de l’ensemble et du rapprochement des articles 30, 92, 93, 94 et 138 de la constitution que le congrès national, en traçant la démarcation des différents pouvoirs, a voulu restituer au pouvoir judiciaire toutes ses véritables attributions, et faire disparaître les divers empiètements successivement introduits au profit du pouvoir administratif, entre autres, en matière de grande voirie, par des lois, arrêtés et décrets émis à partir du consulat, lesquels avaient attribué à l’autorité administrative, la répression des contraventions et de certains délits en matière de grande voirie, en opposition directe avec le principe consacré par la loi d’organisation des 10 et 11 septembre 1790, portant que la police de conservation tant pour les grandes routes que pour les chemins vicinaux, appartiendra aux juges de district ;

« Attendu que cette intention du pouvoir constituant est clairement manifestée dans le rapport fait par la section centrale sur le chapitre III de l’art. 3 de la constitution ;

« Qu’on y remarque que l’art. 103 du projet de la commission est ainsi conçu : « Toutes les contestations qui ont pour objet des droits politiques et civils sont du ressort des tribunaux civils, sauf les exceptions établies par la loi, » a été remplacé sur les observations faites dans les sections par les articles 68 et 69 du projet de la section centrale qui sont textuellement les mêmes que les articles 92 et 93 de la constitution ;

« Que le soin apporté d’insérer dans le premier de ces deux articles le mot exclusivement et de circonscrire dans ce deuxième pouvoir du législateur en lui laissant seulement la faculté d’établir des lois exceptionnelles au principe que les contestations qui ont pour objet des droits publics sont du ressort des tribunaux et de lui interdire cette faculté respectivement à la règle que les contestations qui ont pour objet des droits civils sont du ressort des tribunaux, démontre bien évidemment que le pouvoir constituant a voulu, hors les cas où il a jugé le contraire absolument indispensable, faire disparaître ces anomalies en législation et cette confusion de pouvoirs qui transformaient sans nécessité un administrateur en juge, et au mépris de la règle qui veut que les juges soient inamovibles. »

Je n’en dirai pas davantage. Ainsi, vous voyez donc, messieurs, qu’au congrès on avait d’abord fait un seul article, qui était le n°103, dans lequel on mettait sur la même ligne les droits civils et les droits politiques. On admettait des exceptions sur les deux points. Toutes les sections ont été unanimes pour faire deux articles de la disposition et pour déclarer dans les articles 92 et 93 que les droits civils seraient exclusivement et sans exception aucune du ressort des tribunaux, et que pour les droits politiques on ferait des exceptions. Cette exception était nécessaire ; car la chambre, par exemple, est appelée, dans les vérifications de pouvoirs, à juger des questions de droits politiques.

Les articles 92 et 93 de la constitution sont ainsi conçus :

« Art. 92. Les contestations qui ont pour objet des droits civils sont exclusivement du ressort des tribunaux. »

« Sont exclusivement du ressort des tribunaux ; » rien n’est plus explicitement attributif de la juridiction ordinaire.

L’exception établie après réflexion et discussion, l’art. 93, confirme la généralité de l’art. 92, et exclut jusqu’à la possibilité d’une exception.

Voici l’art. 93 :

« Les contestations qui ont pour objet des droits politiques sont du ressort des tribunaux, sauf les exceptions établies par la loi. »

La constitution n’admet donc d’exception à la juridiction ordinaire que pour les contestations en matière de droits politiques. Vous ne pouvez donc établir par votre loi aucune exception à l’égard des droits civils.

Eh bien, quelles sont les questions qui seront soumises au conseil des mines ? D’abord ce sont les oppositions motivées sur la propriété. D’après la loi de 1810, le conseil d’Etat, institution constitutionnelle, pouvait connaître de toutes les questions relatives aux mines, excepté les questions de propriété qu’il examinait pour prononcer sur la compétence comme il en avait le droit ; et vous allez saisir, en premier ordre, le conseil des mines de la solution des questions qui naissent des oppositions motivées sur la propriété, tandis que vous n’avez pas le droit de saisir le conseil d’aucune autre juridiction, et que la constitution, au lieu de créer un conseil d’Etat, l’a exclu ainsi que toute juridiction exceptionnelle quelconque.

De plus vous allez l’appeler à décider sur tous les droits acquis, sur tous les droits civils quelconques qui se rattachent directement ou indirectement aux mines.

Quelqu’un prétendra avoir un droit à la préférence : vous savez que les demandes en préférence doivent être faites dans les quatre mois de la publication ; qu’après ce délai elles ne sont plus recevables et que par conséquent il y a droit acquis en faveur du demandeur ; voilà un droit civil ; cependant c’est encore le conseil des mines et le gouvernement qui vont décider définitivement sur un tel droit.

Il en sera de même enfin de toutes les questions qui pourront se présenter. Vous savez que j’en ai fait l’énumération et qu’elles sont en grand nombre. Le conseil des mines va les juger conjointement avec le pouvoir exécutif. Et pour soutenir ce système absurde, pour le justifier de l’accusation de violer la constitution, on a été obligé de reconnaître que même après le décret royal de concession, on pouvait saisir les tribunaux des questions de propriété et de tous droits civils quelconques qui seraient méconnus par le décret de concession. Mais alors à quoi bon un conseil des mines qui ne peut rien faire de positif et de définitif, et si les tribunaux jugent après comme avant le décret de concession ?

Si le gouvernement prononce sur une demande en concession, sur une opposition ou sur la fixation d’une indemnité, sur un droit de préférence, et si les intéressés peuvent se présenter devant les tribunaux, après comme avant la décision du gouvernement, il pourra en résulter deux décisions contradictoires, l’une par l’autorité administrative, l’autre par l’autorité judiciaire ; et ces décisions se présenteront toutes deux appuyées d’un titre exécutoire au nom du Roi. Que ferez-vous en ce cas ? Je désire qu’on me réponde, car c’est un argument qui me paraît péremptoire, auquel on n’a jamais répondu, et auquel je désire, pour la vingtième fois, de répondre.

En résumé il faut en revenir à la constitution ; il faut renvoyer aux tribunaux ordinaires les attributions déférées par la loi d’avril 1810 au conseil d’Etat. Moyennant ce renvoi les difficultés signalées par les exploitants de Mons et de Charleroy dans leurs pétitions aussi énergiques que judicieuses disparaissent ; les exploitants sont unanimes sur cette question.

L’honorable M. Frison, qui vient de ces contrées, a entendu leurs doléances. Il confirme à l’instant que tous les propriétaires de mines sont unanimes.

Moi-même, j’ai reçu depuis notre première délibération des lettres où l’on me dit que si le temps n’avait pas manqué, tous les exploitants des mines du couchant de Mons auraient signé les pétitions que j’ai déposés sur le bureau de la chambre.

Dans les discussions précédentes vous avez perdu beaucoup de temps, car si vous aviez adopté le principe que j’avais proposé, la loi eût été faite en quelques heures. Il n’était plus question de procédure ; il n’était plus question de tous ces embarras que vous éprouvez pour voter l’appendice de procédure qu’on vous présente ; vous vous êtes mis dans une position tellement fausse, que vous allez jusqu’à remettre au ministre la décision sur les demandes en récusation des membres du conseil.

Je ne pense pas qu’il y ait un pays civilisé où on ait imaginé quelque chose d’aussi absurde en matière de procédure, où on ait donné un si monstrueux exemple de bouleversement de toutes les idées en cette matière.

Il y a plus : à côté des trois conseillers effectifs appelés à se prononcer, il y a trois conseillers honoraires ; lorsque les premiers déplairont on les récusera, et le ministre prononcera sans appel et en dernier ressort.

Ainsi, il dépendra toujours du ministre de composer le conseil comme il le voudra. Il suffira de faire faire une demande en récusation, fondée ou non, le ministre admettra cette récusation et il décidera souverainement ; il remplacera par conséquent les conseillers par des hommes de son choix, c’est-à-dire par des hommes servilement dévoués à ceux qui doivent les faire sortir de leur position de suppléants ou plutôt de suppliants, et il les remplacera pour se faire des créatures, par des protégés, par des courtisans adroits, par des hommes toujours prêts à rendre des services au pouvoir aux dépens des libertés de leur pays, et qui doivent en être largement récompensés ; car telle est la coutume de nos jours.

Mais, s’est-on écrié, jamais le ministre n’aura recours à de pareils expédients. Je le veux bien ; mais qui nous dit qu’il sera encore ministre demain ? Quand on crée des institutions il faut faire abstraction des hommes ; ce sont les principes qu’il faut considérer. Vous faites une loi ; réfléchissez-y bien, elle est perpétuelle de sa nature, les hommes peuvent changer dès demain ; et vous, législateurs, pouvez-vous consciencieusement décider qu’il n’y aura pas de ministre prévaricateur ? Mais cela n’est pas possible ; il faut faire les lois non en raison des hommes que vous jugez dignes de votre confiance, mais en raison des difficultés qui peuvent se présenter, et des hommes qui peuvent être chargés de les résoudre.

Vous ne connaissez pas le ministre qui sera demain ; pouvez-vous lui donner le droit de composer le conseil comme il le voudra ? Tout à l’heure le ministre a dit que les récusations avaient été posées dans la loi, sur des bases si larges qu’il fallait trois suppléants. Messieurs, veuillez réfléchir au danger, dans le conseil des mines, des complaisants du pouvoir, et à la grande facilité de faire ces substitutions d’après l’aveu même du ministre. Quand il s’agissait de vous faire admettre le conseil des mines, on vous disait : Ce conseil doit offrir les plus grandes garanties sous le rapport de la capacité et de la probité ; il devait être composé de jurisconsultes, d’hommes infaillibles, et c’est pour arriver à ce résultat qu’on a écarté les suppléants, c’était pour répondre à mes observations que les suppléants seront des apprentis administrateurs qui n’arriveront là que dans l’espoir d’arriver plus haut, ils chercheront, disais-je, tous les moyens de plaire au pouvoir, soit pour être placés dans le conseil, soit pour être placés ailleurs ; aujourd’hui que vous avez obtenu la création d’un conseil, à l’aide de ce subterfuge, vous revenez aux suppléants que vous avez proclamés vous-mêmes comme dangereux. Pouvez-vous abandonner ainsi au hasard, à l’ignorance ou à l’intrigue la fortune des familles ?

Si vous adoptiez le renvoi devant les tribunaux, tout serait réglé selon la constitution et d’après des lois positives. Vous trouveriez là trois hommes capables de donner un avis, et qui seraient compétents, et seuls compétents pour juger toutes les questions de propriété ou de droits civils quelconques. S’ils se trompent, on appelle de leur décision à un tribunal supérieur ; et la cour de cassation est appelée au besoin à redresser l’erreur que pourrait commettre la cour d’appel.

Dans votre projet, après avoir soutenu longtemps que vous n’aviez pas besoin de procédure, vous avez senti enfin la nécessité de faire de la procédure ; mais c’est quand vous aurez adopté l’art. 1er définitivement que vous comprendrez la nécessité d’établir cette procédure ; car elle n’est pas même ébauchée dans la loi, vous n’y avez rien prévu. Vous vous en apercevrez au premier pas dans l’exécution.

Je n’en dirai pas davantage sur ce point, je craindrais d’abuser des moments de la chambre.

Je vous adjure, messieurs de réfléchir au vote que vous allez émettre ; vous n’oublierez pas, messieurs, que tous les propriétaires de mines repoussent l’établissement d’un conseil qu’ils considèrent comme une calamité, et auquel la pétition de Mons a donné la véritable qualification qu’il mérite, en l’appelant un tribunal d’inquisition et non une magistrature constitutionnelle.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Messieurs il n’a pas été dans notre pensée de nommer des hommes sans instruction, des apprentis pour conseillers honoraires ; car dans notre pensée il faut au contraire que les conseillers honoraires soient dans une position aussi élevée que les conseillers effectifs et cela ne sera pas impossible à établir de cette manière. Par l’adjonction d’un quatrième conseiller, l’appel des conseillers honoraires deviendra plus rare, ils auront peu de travail par conséquent, et il sera facile d’en trouver dans une position très élevée qui donneront leurs soins aux affaires quand il en sera besoin. Les conseillers honoraires présenteront sous le rapport de la capacité autant de garanties que les conseillers effectifs.

Je ne reviendrai plus sur la question de la compétence des tribunaux dans cette matière, parce que cette question a été épuisée. Je ferai seulement remarquer en deux mots que l’institution d’un conseil spécial des mines doit être envisagée comme une véritable amélioration. Les conseillers des mines étant exclusivement occupés de ces importantes matières, je crois que ces objets seront mieux traités que quand ils étaient jugés par des hommes appelés à s’occuper indistinctement de toutes sortes de matières.

On a dit qu’il n’y avait pas non plus de publicité. C’est encore là une erreur, car on a introduit dans la loi les garanties de publicité que nous comptions introduire dans le règlement d’exécution de la loi.

Ces garanties ne laissent rien à désirer. Il y a la publicité du rapport fait au conseil et la faculté accordés aux parties de faire des réclamations contre ce rapport. Il y a en outre la latitude laissée au conseil d’entendre de nouvelles observations sur les réclamations des parties. Je crois donc que tous les moyens de publicité ont été épuisés.

Je me bornerai à ces seules observations.

M. Verdussen. - Déjà une première fois les observations que j’ai eu l’honneur de faire sur la nécessité de rendre toujours certaine l’existence du conseil des mines ont peut-être amené la chambre à sentir la nécessité de nommer des suppléants.

Aujourd’hui M. le ministre vient de dire qu’il se bornait à demander qu’il y eût 3 suppléants, au lieu de 2 qu’il avait proposés dans le projet. Mais, avant de m’expliquer sur cette proposition, j’ai besoin d’un éclaircissement que je prierai M. le ministre de l’intérieur de me donner.

Je puis supposer que ces suppléants seront à peu près les mêmes que les suppléants des cours et des tribunaux. Mais je voudrais savoir si les suppléants seront nommés à toujours, ou seulement pour une ou plusieurs affaires déterminées.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Il est bien certain que dans l’esprit de notre proposition les conseillers honoraires seront nommés une fois pour toutes, et seront appelés au conseil dans l’ordre de leur nomination. Aussi l’on ne pourra prétendre qu’ils sont appelés par préférence et pour telle ou telle affaire spéciale.

M. Verdussen. - Je m’attendais à l’explication de M. le ministre de l’intérieur. Il était dans la nature des choses qu’il en fût ainsi. Cependant il est une chose qui domine tout l’article ; c’est la nécessité de l’existence possible du conseil des mines, à l’aide des 3 conseillers honoraires.

On s’est référé à l’art. 374 du code de procédure pour établir les cas de récusation. Il faut ensuite ajouter les cas d’empêchement pour cause de maladie, absence, etc. D’après cela n’est-il pas possible que, sur 7 membres qui composent la totalité du conseil, 5 soient empêchés ou récusés ? Dès lors vous ne pourrez plus composer le conseil ; car il doit être composé de 3 membres pour s’occuper d’une affaire. Que ferez-vous dans une pareille position ? Il faudra nécessairement qu’on y pourvoie.

Pour cela ne pourrait-on pas adopter une disposition ainsi conçue :

« Le Roi peut, en outre, nommer des conseillers honoraires à l’effet de suppléer les membres effectifs pour les cas d’empêchement. »

Je sais que l’on pourra m’objecter que le gouvernement pourra nommer tantôt un membre tantôt un autre dans le conseil, et le former comme il jugera convenable. Mais il ne semble qu’avant tout il faut rendre nécessairement possible l’existence du conseil des mines.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Le conseil sera composé de 4 membres effectifs et de 3 membres honoraires. Il n’est pas à prévoir que sur ce nombre plus de 4 membres soient empêchés. Je ne pense donc pas qu’il y ait d’inconvénient dans la disposition telle qu’elle est présentée.

M. Gendebien. - Le ministre de l’intérieur vous a dit que le projet de loi était une véritable amélioration. Que cela soit dans son esprit, cela est probable, puisqu’il le dit. Mais il me semble que pour apprécier ces améliorations, il n’y a pas de meilleurs juges que les intéressés ; or, tous les intéressés repoussent le projet de loi comme une vexation, comme une violation de la constitution.

Quelles que soient les intentions du ministre, alors même que les appréhensions des intéressés ne reposeraient sur rien, qu’elles ne seraient que dans leur esprit, dans leur imagination, pourquoi encore leur faire violence ? On ne fait jamais violence aux gens, même pour leur faire du bien, et on repousse rarement un bien réel. Ici il ne s’agit pas de faire du bien aux exploitants malgré eux ; ils invoquent la constitution. On ne peut la leur enlever. Je ne sais pas de quel droit on soustrairait à la connaissance des tribunaux tout ce qui est relatif à la propriété ou aux droits civils, ou qui résulte de droits acquis sur les mines.

On vous a dit (c’est l’honorable ministre de l’intérieur) qu’on ne nommerait pas des hommes sans instruction, qu’on ne prendrait que des hommes instruits et ayant une haute position sociale. Mais encore une fois je ne doute pas des intentions du ministre. J’admets même qu’il puisse les réaliser. Mais le ministre de l’intérieur est-il bien certain de vivre 24 heures ? Est-il bien certain de rester 24 heures ministre ? Après lui qui viendra ? Personne ne le sait. Aurons-nous une confiance assez facile, assez aveugle pour l’accorder à un être imaginaire, à un être que nous ne connaissons pas ?

Remarquez que le conseil étant amovible, il dépendra toujours d’un ministre de bouleverser toutes les bonnes intentions de son prédécesseur, et de faire précisément le contraire de ce qu’aura fait son prédécesseur.

J’accorde au ministre le plus de probité, le plus de capacité pour faire de bons choix, mais il peut se tromper. Est-il sûr d’ailleurs que les hommes qu’il nommera, si honnêtes, si intègres qu’ils soient, le seront toujours, surtout lorsqu’ils auront à s’occuper de matières qui seront l’objet de la convoitise de tous les hommes à argent, de tous les intrigants ?

Ensuite votre conseil des mines ne pourra-t-il pas se tromper ? Des erreurs ont été commises sous le conseil d’Etat de France, sous le conseil d’Etat du roi Guillaume. Sous le conseil d’Etat de France, malgré l’instruction départementale, l’instruction d’un conseil spécial des mines, d’un comité spécial du conseil d’Etat, et enfin l’instruction et la décision du conseil d’Etat tout entier, des erreurs ont été commises.

J’en ai cité une, qui a eu assez de retentissement ; on a plaidé pendant 15 ans ; des erreurs ont également été commises sous le roi Guillaume. Pourquoi les mêmes erreurs ne se reproduiraient-elles pas ? Pourquoi exposer le gouvernement à l’affront de voir sa décision ou l’arrêt d’une cour souveraine sans exécution possible, car l’un des deux, en cas de conflit, ne sera pas exécuté. C’est un affront que le gouvernement se prépare volontairement et sciemment.

Pourquoi ? Pour avoir un conseil des mines pour enlever aux tribunaux la connaissance de questions pour la décision desquelles ils sont seuls compétents ; car l’honorable M. Fallon a fait dans une autre séance une longue nomenclature des contestations dont le conseil d’Etat serait saisi ; et j’ai prouvé immédiatement que tout cela rentrait dans les attributions judiciaires ; j’ai prouvé que les affaires n’en iraient que plus vite, parce que vous auriez huit corps au lieu d’un pour s’en occuper, et que devant des huit magistratures compétentes la procédure aurait lieu comme en matière urgente et selon les règles de la procédure civile.

Après cela, il y aura dans le système adopté double instruction, car le conseil des mines sera obligé de renvoyer devant les tribunaux toutes les fois qu’un droit civil sera invoqué par les intéressés. Il aura examiné l’affaire et il sera obligé de la renvoyer aux tribunaux. Quand on viendra devant les tribunaux, il faudra une nouvelle instruction, et les tribunaux ne pourront instruire par urgence ; il faudra subir toutes les lenteurs de la procédure ordinaire, et quand l’affaire reviendra au conseil des mines, il sera forcé de recommencer une nouvelle instruction, un nouveau travail.

L’honorable M. Verdussen a demandé si les conseillers honoraires seraient nommés une fois pour toutes ou pour chaque affaire. M. le ministre de l’intérieur lui a répondu qu’ils seraient nommés une fois pour toutes. Mais cette réponse ne signifie rien. Car les conseillers effectifs ou honoraires étant amovibles, demain ils pourront n’être en fonctions, ni les uns, ni les autres. Il dépendra du ministre de nommer des conseillers honoraires ou effectifs, selon son bon plaisir, et même pour telle ou telle affaire. Ainsi la réponse de M. le ministre de l’intérieur ne fait nullement droit aux scrupules soulevés par l’honorable M. Verdussen.

On a demandé comment et dans quel ordre seraient appelés les conseillers honoraires pour siéger au conseil en cas d’empêchement des conseillers effectifs. M. le ministre de l’intérieur a répondu qu’ils seraient appelés selon l’ordre de date de leur nomination. Mais il faudrait le dire nettement dans la loi ; or, il n’y a pas un mot de cela dans la loi. C’est l’unique article à ajouter à votre code de procédure.

Au reste, il me serait facile de démontrer que vous n’avez pas fait, en ce qui concerne la procédure, le dixième de ce que vous avez à faire, si vous voulez donner aux justiciables belges, depuis la constitution, les mêmes garanties qu’ils trouvaient autrefois devant le conseil d’Etat ; et je vous défie, dussiez-vous discuter pendant cinq jours, de compléter cette procédure.

Il faudra que vous finissiez par adopter le règlement du conseil d’Etat.

Vous serez obligés d’en venir à une juridiction contentieuse administrative, complète et flanquée d’un code de procédure. Vous vous êtes dissimulé les difficultés de votre projet ; vous vouliez établir avant tout un conseil des mines, mais vous ne voyiez pas que c’était admettre une juridiction contentieuse administrative, un tribunal exceptionnel en dehors de la constitution. Vous avez dit d’abord, pour mieux cacher les vices et la nature de votre projet, qu’il n’y aurait pas de procédure. Maintenant, forcés d’en reconnaître la nécessité, vous commencez à en établir une ; mais vous n’êtes encore qu’à mi-chemin, si vous voulez sincèrement donner aux intéressés les garanties promises.

Veuillez réfléchir à ce que vous allez faire si vous adoptez l’article premier.

Vous allez violer la constitution. Vous allez porter la désolation parmi les industriels les plus nombreux, les plus dignes d’intérêt, et qui ont le plus grand besoin des garanties et des sécurités constitutionnelles, pour se mettre à l’abri de l’intrigue qui trouve trop souvent un accès facile auprès des juridictions administratives.

Je proteste contre l’adoption de l’article premier.

M. le président. - M. Gendebien présente l’amendement suivant :

« Les attributions conférées au conseil d’Etat par la loi générale du 21 avril 1810 sur les mines sont déférées aux tribunaux ordinaires. »

M. Fallon, rapporteur. - Cet amendement ne peut être mis aux voix. Le principe en a été rejeté au premier vote par la disposition qui a été adoptée et qui forme l’art. 1er.

M. Gendebien. - Je persiste à maintenir mon amendement. Je demande que l’on formule la fin de non-recevoir qu’on m’oppose.

M. Fallon, rapporteur. - C’est la question préalable que je soulève.

L’amendement de M. Gendebien a été rejeté au premier vote par l’adoption de l’art. 1er. L’honorable membre ne peut plus le reproduire.

M. Gendebien. - Messieurs, mon amendement a été rejeté implicitement, dit M. Fallon, par l’adoption de l’art. 1er, Mais ce serait une chose extraordinaire qu’alors que l’on est obligé de remettre en question l’art. 1er, alors qu’on est obligé de le dénaturer, je ne puisse revenir sur mon amendement en raison même des changements que l’on a introduits à l’art. 1er et dans tous les articles qui sont en corrélation avec lui.

L’adoption de l’article 1er repousse mon amendement, dit-on, mais les modifications que vous avez établies dans ce même article, me rendent mon droit de présenter le même amendement.

Veuillez examiner toutes les altérations que la loi a subies. L’on avait écarté les suppléants, on propose de les rétablir et d’en augmenter le nombre. Tous les membres du conseil devaient être jurisconsultes. Cette garantie devait, selon nos adversaires, faire tomber toute espèce de doute dans les questions de propriété. Les récusations qui n’existaient pas dans le projet primitif ont été admises, et vous donnez au ministre le droit exorbitant de les juger seul ; vous voyez bien que tout l’article 1er a été modifié. Vous avez enlevé toutes les garanties que devait nous faire espérer la composition du conseil.

Enfin, messieurs, vous avez étendu maintenant la juridiction de cette institution. Vous avez donné à ce conseil l’autorisation de se prononcer sur l’indemnité à accorder au propriétaire de la surface. L’on avait d’abord établi une échelle de 25 centimes à un franc. L’on disait qu’il ne s’agissait pas de juger qu’il y avait une échelle établie. Je répondais : il y a toujours un jugement dans les limites de l’échelle.

Maintenant il n’y a plus d’échelle. Il y a un minimum. Mais le conseil est libre de faire monter, s’il le veut jusqu’à 100 francs l’indemnité par hectare. Il en est de même pour la redevance proportionnelle, pour la juridiction.

Vous exigez que le propriétaire soit indemnisé, et vous ne déterminez pas d’une manière précise le taux de l’indemnité.

Vous touchez donc aux droits civils, et vous voulez que ce soit un conseil administratif qui juge ces droits civils que vous reconnaissez comme ayant été acquis avant votre loi, et même avant la promulgation de la constitution. Car ces droits ont été créés par les articles 6 et 42 de la loi de 1810 ; vous l’avez reconnu, car vous avez même dit que la loi avait été mal appliquée, que la loi veut que la redevance proportionnelle soit payée sur le produit des mines, et non pas une redevance fixe. Vous avez donc reconnu qu’il y avait droit acquis, et vous voulez que le conseil se prononce sur ces droits acquis, sur ces droits civils ? Vous voulez que l’art. 1er soit admis sans retour, après avoir été forcés de reconnaître qu’il établit une juridiction administrative qui aura à juger des questions de droit civil ; vous prétendez qu’il est resté ce qu’il était au premier vote, alors qu’il est complètement dénaturé, et vous écartez mon amendement par la question préalable !

J’irai plus loin ; votre proposition elle-même n’est qu’un amendement à la loi de 1810. L’honorable M. Fallon, faisant les fonctions de rapporteur, n’a-t-il pas dit dans la séance du 9 mai :

« Nous avançons péniblement parce qu’on oublie toujours qu’il ne s’agit pas de réviser la loi de 1810, mais d’améliorer son exécution dans quelques points. »

Vous ne révisez pas la loi de 1810 ; vous ne faites pas une nouvelle loi des mines : vous améliorez, dit M. Fallon : vous amendez donc, car améliorer c’est amender. Pourquoi dès lors ne pourrais-je pas faire aussi une amélioration, présenter un amendement ? Ce n’est pas une loi proprement dite, de sont des amendements réunis en articles.

Je ne sais donc pas pourquoi mon amendement ne serait pas soumis à un second vote.

Votre article 1er est un véritable amendement à la constitution. C’est même une violation de la constitution. Car s’il est vrai, et personne n’oserait le contester, que l’art. 92 met à l’abri de toute juridiction contentieuse administrative tous les droits civils quelconques, vous violez la constitution en déférant des droits civils à la décision d’un conseil administratif.

Ainsi donc, messieurs, cette fin de non-recevoir que je ne qualifiais pas de chicane, comme on l’a dit récemment, vous la mettez en présence de la constitution mise en question par l’article 1er, et vous aurez le courage d’émettre un vote formel, et c’est sur ma proposition.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Il est un point de fait à vérifier, c’est de savoir si l’amendement de M. Gendebien a été proposé et rejeté dans une première discussion. Voici ce que dit le procès-verbal :

« M. Gendebien propose l’amendement suivant :

« Les attributions conférées au conseil d’Etat par la loi générale du 21 avril 1810 sur les mines sont déférées aux tribunaux ordinaires. »

Et plus bas je lis :

« L’amendement de M. Gendebien est mis aux voix et rejeté. »

C’est un fait incontestable que l’amendement qui vient d’être donné aujourd’hui a été soumis à une première discussion et a succombé à un premier vote. L’honorable député de Namur avait donc raison de dire que l’amendement ne pouvait plus être remis en discussion. Il y a lieu à la question préalable.

M. Gendebien. - Ce n’est pas répondre à mes observations. J’ai raisonné dans l’hypothèse que mon amendement avait été rejeté. M. Fallon avait dit que mon amendement avait été rejeté par l’adoption de l’article, et je démontrerai que je pouvais le reproduire, attendu que l’art 1er a été complètement dénaturé.

Messieurs, n’ayons pas recours, je ne dirai pas à de misérables chicanes, mais à de pitoyables fins de non-recevoir. Il faut aller aux voix sur l’art. 1er, amendement ou non. Que la chambre rejette cet article. Qu’en résultera-t-il ? C’est que l’on fera une nouvelle proposition, que ce soit la mienne ou une autre.

Si donc je vous démontre que vous ne pouvez accepter l’article premier sans violer la constitution vous devez le rejeter.

Mettez aux voix l’article 1er. Si la chambre pense qu’il viole la constitution, comme j’en ai l’intime conviction, elle le rejettera. Alors vous n’aurez qu’un seul article à faire. Il suffira de dire que les attributions du conseil d’Etat sont déférées aux tribunaux en ce qui concerne les mines, et que ceux-ci suivront la marche établie pour les causes urgentes et les procédures écrites. Autrement je vous réponds que dans six jours vous n’aurez pas complété cette loi.

M. Fallon, rapporteur. - Au début de la séance, M. Gendebien a commencé par dire qu’il fallait observer le règlement. L’art. 45 dit positivement qu’un amendement rejeté ne peut être soumis à un second vote. J’ignorais que l’amendement de M. Gendebien eût été formellement rejeté. Aussi j’avais dit qu’il l’avait été implicitement par l’adoption de l’art. 1er qui institue un conseil spécial des mines et lui confère les attributions du conseil d’Etat.

Il est donc maintenant souverainement jugé par la chambre que les attributions du conseil d’Etat relatives aux mines doivent être déférées à un conseil spécial. Mais, dit l’honorable M. Gendebien, vous avez dénaturé votre proposition première par l’adoption de plusieurs dispositions accessoires. Peu importent ces dispositions accessoires, il s’agit ici de la disposition principale que vous voulez renverser par votre amendement. Or, il a été décidé définitivement qu’un conseil des mines serait créé. Nous allons établir maintenant de quelle manière sera formé ce conseil. Nous allons voir s’il doit être composé de trois ou de quatre membres, et s’il doit y avoir des suppléants ou non. Ceci ne touche pas à la proposition principale, celle de savoir s’il y aura un conseil des mines : cette question est décidée.

M. Gendebien. - Puisque dans une question aussi importante on invoque le règlement pour m’opposer une fin de non-recevoir, je vais l’invoquer à mon tour. Je ferai d’abord une observation générale, c’est que quand la constitution a prononcé, comme la constitution est plus forte que le règlement, vous ne pouvez pas la violer à prétexte d’observer le règlement. Mais tenons-nous sérieusement au texte du règlement, et ne ravalons pas la question aussi bas qu’on l’a placée.

Le dernier paragraphe de l’art. 45 est aussi clair pour mon système que mon honorable contradicteur prétend qu’il l’est pour le sien.

« Dans le second vote, dit l’avant-dernier paragraphe de l’art. 45, sera soumis à une discussion le vote définitif des amendements adoptés et des articles rejetés. Il en sera de même des nouveaux amendements qui seraient motivés sur cette adoption ou ce rejet. Tous amendements étrangers à ces deux points sont interdits. » Mon amendement, tout rejeté qu’il est, je le présente comme conséquence de l’amendement qu’on présente aujourd’hui, et des amendements que vous avez adoptés. Vous avez adopté d’abord un conseil composé de quatre conseillers en rejetant les conseillers honoraires ; je propose mon amendement pour répondre à l’amendement du ministre, qui propose d’ajouter trois conseillers honoraires. Vous avez repoussé les conseillers honoraires, parce que, vous disait l’honorable M. Fallon, on ne pouvait pas avoir la même confiance dans les conseillers honoraires que dans les conseillers effectifs. Tous les orateurs qui ont voté dans le même sens ont parlé de la même manière.

C’est pour cela qu’on a porté de trois à quatre le nombre des conseillers effectifs, et écarté les conseillers honoraires ; et c’est même par ce moyen qu’on a écarté mon amendement. Maintenant on propose de nommer autant de conseillers honoraires que de conseillers effectifs.

Mon amendement même, en interprétant judaïquement l’article 45 du règlement, est admissible, puisqu’il dit qu’il en sera de même, qu’on soumettra à une nouvelle discussion les amendements motivés sur un article rejeté ou un amendement adopté. Le règlement ne fait pas de distinction entre les amendements qui ont été déjà présentés et rejetés et ceux qui ne l’ont pas été ; je puis toujours présenter ou reproduire un amendement, dès qu’il est motivé sur un changement à la loi.

Si vous changiez toute la loi dans votre système, il n’y aura plus moyen de revenir sur les amendements qui auraient été rejetés. Il faudrait alors rejeter toute la loi et en représenter une nouvelle plutôt que d’adopter un amendement qui concilierait tout.

Sans reprendre les différentes dispositions qui ont dénaturé notre premier vote je dis qu’il est évident que mon amendement est la conséquence de l’amendement présenté aujourd’hui par le ministre et des autres amendements adoptés après le rejet de mon amendement. Rien de tout cela n’existait quand on a voté l’art. 1er.

Vous avez été obligés de rentrer dans les règles de la procédure ordinaire en matière de judicature ordinaire ; vous avez adopte dix articles nouveaux qui changent toute l’économie de la loi, et je ne pourrais être admis à reproduire ma proposition ! (La clôture ! la clôture !)

- La discussion est close.

La question préalable est mise aux voix. Elle est adoptée.

L’amendement du ministre de l’intérieur est mis aux voix et adopté.

L’ensemble de l’article 1er est mis aux voix.

Cinq membres demandent l’appel nominal.

On procède à cette opération dont voici le résultat :

Nombre des votants, 59.

Ont répondu oui, 48.

Ont répondu non, 11.

En conséquence l’art. 1er est adopté.

Ont répondu oui : MM. Andries, Beerenbroeck, Bekaert, Berger, Coppieters, Cornet de Grez, Dechamps, de Longrée, F. de Mérode, Demonceau, de Muelenaere, de Puydt, Dequesne, de Roo, de Sécus, Desmet, de Terbecq, de Theux, Devaux, d’Hoffschmidt, d’Huart, B. Dubus, Duvivier, Ernst, Fallon, Keppenne, Lebeau, Lejeune, Liedts, Morel-Danheel, Pirmez, Pirson, Polfvliet, Raymaeckers, A. Rodenbach, Schaetzen, Scheyven, Simons, Smits, Stas de Volder, Vandenhove, Verdussen, Vergauwen, Van Hoobrouck, H. Vilain XIIII, Vuylsteke, Wallaert, Watlet et Zoude.

Ont répondu non : MM. Dams, Desmaisières, Doignon, Frison, Gendebien, Jadot, Quirini, Seron, Trentesaux, Vanderbelen.

Articles 2 à 7

M. le président. - Nous allons passer à l’art. 2. Mais dans plusieurs séances l’assemblée a manifesté l’intention de diviser cet article.

M. Fallon, rapporteur. - Je proposerai d’en faire 4 articles.

M. le président. - Nous vous proposerons de le diviser en davantage d’articles.

M. Fallon, rapporteur. - M. le ministre de la justice a fait une observation pleine de justesse en demandant que le dernier paragraphe, concernant les ingénieurs, soit renvoyé dans les dispositions générales.

M. le président. - L’art. 2, d’après notre proposition, serait formé des paragraphes suivants :

« Art. 2. Les membres du conseil des mines cessent de prendre part aux délibérations, si eux ou leurs épouses, ou leurs parents en ligne directe, sont intéressés dans une exploitation de mines.

« Ils sont censés démissionnaires, si eux-mêmes, leurs épouses, ou leurs parents en ligne directe, conservent pendant plus de six mois un intérêt dans une exploitation.

« Ils ne peuvent exercer la profession d’avocat ; ils, ne peuvent prendre part aux délibérations relatives aux affaires sur lesquelles ils auraient été consultés avant heur nomination.»

- Cet article est adopté.


M. le président. - L’art. 3 serait ainsi conçu :

« Art. 3. Le conseil ne peut délibérer qu’au nombre de 3 membres. Son avis sera motivé. »

- Cet article est adopté.


M. le président. - Voici quel serait l’art. 4.

« Art. 4. L’avis du conseil sera précédé d’un rapport écrit fait par l’un de ses membres.

« Ce rapport contiendra les faits et l’analyse des moyens,

« Il sera déposé au greffe ; la notification du dépôt sera faite aux parties intéressées, par huissier, en la forme ordinaire, à la requête du président, et aux frais du demandeur en concession, maintenue ou extension de concession. Les parties seront tenues d’élire domicile à Bruxelles. Les notifications seront faites à ce domicile.

« Dans le mois de la signification du dépôt, les parties seront admises à adresser leurs réclamations au conseil qui pourra, selon les circonstances, accorder des délais ultérieurs pour rencontrer les réclamations produites. »

- Cet article est adopté.


M. le président. - Voici l’art. 5 :

« Art. 5. Le conseil sera tenu de donner, par la voie du greffe et sans déplacement, communication aux parties intéressées de ses délibérations et de toutes les pièces qui concernent, soit les demandes en concession, en extension ou en maintenue de concession, soit les oppositions ou les interdictions. »

M. Gendebien. - Il me semble que cet article n’est pas complet. Il faut donner une garantie que toutes les pièces seront remises aux parties. Il faudrait pour cela qu’il y en eût inventaire signé par le greffier, et qu’elles fussent paraphées par le ministre. Sans cette formalité on pourrait ne remettre aux parties qu’une partie des pièces et cacher les autres. Dans les affaires ordinaires les pièces sont paraphées par les officiers publics ; ici vous n’avez rien de semblable.

M. le président. - Proposez-vous un amendement ?

M. Gendebien. - Je ne proposerai pas d’amendement ; arrangez votre loi comme vous l’entendez.

- L’article 5 est adopté.


M. le président. - Voici l’art. 6 :

« Art. 6. Tout membre du conseil des mines peut être récuse pour les causes qui donnent lieu à la récusation des juges aux termes de l’article 378 du code de procédure civile.

« La récusation sera proposée par acte signifié au ministre de l’intérieur, avant que le conseil n’ait émis son avis.

« Le ministre, après avoir entendu le membre récusé, statuera sans recours ultérieur. »

- Cet article est adopté.


M. le président. - Voici de quoi serait formé l’art. 7 :

« Art. 7. Les délibérations du conseil des mines sont soumises à l’approbation du Roi.

« Aucune concession, extension ou maintenue de concession ne peut être accordée contre l’avis du conseil. »

- Cet article est adopté.


M. le président. - Le dernier paragraphe de l’article est ainsi conçu :

« Les ingénieurs des mines ne pourront être intéressés dans des exploitations de mines situées dans leur ressort. »

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - La pensée de la chambre a été de donner toute l’extension possible à cette disposition.

Je crois qu’on atteindra mieux ce but en la renvoyant aux dispositions générales.

- Le dernier paragraphe de l’article est renvoyé aux dispositions générales.

Article 8

L’article 3 (qui devient l’art. 8), n’ayant pas été amendé, n’est pas mis aux voix ; il est ainsi conçu :

« Art. 8. Le traitement des conseillers est de 6,000 fr., celui du président de 8,000 et celui du greffier de 5,000. »


M. Pirson, doyen d’âge, remplace M. Raikem au fauteuil.

Titre II. Des indemnités et de l’obtention des concessions

Article 9

« Art. 9. L’indemnité réservée aux propriétaires de la surface par les articles 6 et 42 de la loi du 21 avril 1810, sera déterminée au moyen d’une redevance fixe et d’une redevance proportionnelle au produit de la mine.

« La redevance fixe sera déterminée par l’acte de concession.

« Elle ne sera pas moindre de 25 centimes par hectare de superficie.

« La redevance proportionnelle est fixée à un pour cent, sans pouvoir dépasser 3 p. c. du produit net de la mine, tel que ce produit est arbitré annuellement par le comité d’évaluation, soit sur les renseignements qui sont fournis par les exploitants et les ingénieurs des mines, soit par forme d’imposition ou d’abonnement. Cette indemnité est également répartie entre les propriétaires de la surface, en raison de la contenance en superficie des terrains appartenant à chacun d’eux, telle que cette contenance est indiquée dans le plan de concession.

« Le recours des propriétaires de la surface contre l’évaluation du produit net telle qu’elle a été déterminée par le comité d’évaluation, sera exercé, instruit et jugé conformément aux dispositions existantes pour l’assiette de la redevance proportionnelle due à l’Etat.

« Celui qui se trouve aux droits des propriétaires de la surface, quant à la mine, jouira de l’indemnité réservée à celui-ci par le présent article. »

- Cet article est définitivement adopté.

Article 10

- L’art. 10 n’ayant pas été amendé n’est pas mis aux voix ; il est ainsi conçu :

« Art. 10. Dans le cas où la redevance proportionnelle établie sur les mines au profit de l’Etat, serait supprimée ou modifiée dans son assiette, la redevance proportionnelle accordée aux propriétaires de la surface, en exécution de la présente loi, pourra être modifiée ou remplacée en vertu de dispositions d’une loi nouvelle. »

Article 11

« Art. 11 (précédemment art. 6.) Le propriétaire de la surface dont l’étendue est reconnue suffisante à l’exploitation régulière et profitable de la mine, obtiendra la préférence pour les concessions nouvelles, s’il justifie des facultés nécessaires pour entreprendre et conduire les travaux de la manière prescrite par la loi.

« Il en sera de même si cette surface appartient à plusieurs propriétaires réunis en société et qui offriront les mêmes garanties.

« Néanmoins, le gouvernement pourra, de l’avis du conseil des mines, s’écarter de cette règle dans le cas où les propriétaires de la surface se trouveraient en concurrence, soit avec l’inventeur, soit avec un demandeur en extension.

« En cas que l’inventeur n’obtienne pas la concession d’une mine, il aura droit à une indemnité de la part du concessionnaire ; elle sera réglée par l’acte de concession.

« Celui qui se trouve aux droits du propriétaire de la surface, quant à la mine, jouira de la préférence accordée à celui-ci par le présent article. »

M. Raikem. - J’ai demandé la parole pour faire une observation sur le dernier paragraphe de l’art. 11 (précédemment art. 6) en discussion.

Il porte : « Celui qui se trouve aux droits du propriétaires de la surface, quant à la mine, jouira de la préférence accordée à celui-ci par le présent article. »

On a retranché de la rédaction proposée par le gouvernement le mot : « substitué. » Par ce retranchement on donne une plus grande latitude à l’article.

Celui qui, en vendant son fonds, se sera réservé la propriété de la mine, jouira de la préférence quant à la mine qu’il se sera réservée. Mais il peut se présenter d’autres cas, celui où, sans être propriétaire de la surface, sans même avoir tous les droits du propriétaire sur la mine, et notamment la redevance qui se payait à celui-ci, on aurait cependant, soit par des moyens que les coutumes locales autorisaient, soit par prescription, ou de toute autre manière, acquis des droits à l’exploitation de la mine.

Je pense que dans ces cas il y aurait lieu à la maintenue en concession, que l’on devrait maintenir dans son droit celui qui, sous l’empire des lois anciennes, aurait acquis des droits à exploiter une mine.

Cependant il pourrait peut-être se présenter des difficultés dans le conseil des mines, si l’on voulait induire de l’article en discussion qu’il faut avoir tous les droits du propriétaire sur la mine.

Je conçois d’un autre côté que l’article ne s’appliquerait qu’aux concessions nouvelles, comme l’énonce la première disposition de ce même article ; que dans le cas où il y a d’anciens droits acquis à l’exploitation de la mine, il s’agit plutôt d’une maintenue en concession ; que les droits acquis doivent être respectés, et que l’interprétation restrictive qu’on aurait pu induire du mot substitué, se trouve écartée par le retranchement de ce mot ; qu’ainsi la préférence serait applicable a celui qui aurait eu acquis le droit d’exploiter la mine, quoiqu’il fût obligé à une redevance envers le propriétaire ; ou plutôt qu’il s’agirait alors de maintenir des droits ayant toute la force et vigueur d’une ancienne concession.

Toutefois, je pense qu’on pourrait lever la difficulté au moyen d’une légère addition. J’attendrai à cet égard les éclaircissements que voudra bien donner l’honorable rapporteur.

M. Fallon, rapporteur. - On a retranché du dernier paragraphe de l’article 6 le mot « substitué, » précisément pour éviter que la disposition ne fût limitée aux conventions. On a voulu attribuer les droits à la préférence de l’exploitation de la mine à celui qui se trouve aux droits du propriétaire de la surface, quant à la mine ; c’est bien dans cette pensée que l’on a admis la proposition de M. Raikem, tendant à supprimer le mot « substitué. »

Mais je ne vois pas de difficulté à rendre la disposition plus précise en y ajoutant quelques mots ; elle serait alors ainsi conçue :

« Celui qui se trouve aux droits du propriétaire de la surface, quant à la mine, ou qui avait acquis des droits à la mine par conventions, prescriptions ou usages locaux antérieurs à la publication de la loi du 21 avril 1810, jouira de la préférence réservée par le présent article au propriétaire de la superficie. »

M. Raikem. - Cette rédaction remplit mes intentions : je ne vois donc aucune difficulté à l’adopter.

- L’art. 6 est mis aux voix et adopté.

Article 12

« Art. 7 (ancien). Le gouvernement, sur la proposition du conseil des mines, pourra déclarer qu’il y a utilité publique à établir des communications dans l’intérêt d’une exploitation de mines

« La déclaration d’utilité publique sera précédée d’une enquête. Les dispositions de la loi du 17 avril 1835, sur l’expropriation pour cause d’utilité publique et autres lois sur la matière, seront observées, l’indemnité due au propriétaire sera fixée au double.

« Lorsque les biens ou leurs dépendances seront occupés par leurs propriétaires, les tribunaux pourront prendre cette circonstance en considération pour la fixation des indemnités. »

- Adopté.

Article 9 (ancien)

« Art 9 (ancien). Les demandes en concession, extension, maintenue de concession ou d’exploitation ancienne, à l’égard desquelles il y a preuve de l’accomplissement, avant le 1er janvier 1831, des formalités prescrites par les art. 22 à 26 de la loi du 21 avril 1810, seront, au fur et à mesure qu’elles parviendront au ministère de l’intérieur, publiées de nouveau, par trois insertions consécutives, de quinzaine en quinzaine, dans le Moniteur et dans un des journaux de la province où la mine est située.

« Elles seront également affichées pendant trois dimanches consécutifs, de quinzaine en quinzaine, dans le chef-lieu de la province, dans celui de l’arrondissement judiciaire où la mine est située, et dans toutes les communes sur lesquelles elle s’étend. »

Article 16

« Art. 12 (qui devient l’art. 16). Les oppositions seront faites par simple requête, sur timbre, et adressées au ministère de l’intérieur qui en donnera récépissé ; elles seront notifiées aux parties intéressées, à moins que déjà elles ne l’aient été. »

- Adopté.

Article 18

M. Pirson., président. - C’est après l’art. 17 que doit être placé le paragraphe du deuxième article, que la chambre a décidé de reléguer dans les dispositions générales.

Ce paragraphe est celui-ci :

« Les ingénieurs des mines ne peuvent être intéressés dans l’exploitation des mines situées dans leur ressort. »

- Ce paragraphe est définitivement adopté.

Il formera l’art. 18.

Article 19

« Art. 14 (ancien) (art. 19 nouveau). Les dispositions des lois antérieures qui seraient contraires à la présente loi sont abrogées. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble du projet

La chambre procède au vote par appel nominal sur l’ensemble du projet.

Voici le résultat du vote ; 58 membres y ont pris part

48 ont répondu oui.

10 ont répondu non.

En conséquence le projet de loi est adopté et sera transmis au sénat.

Ont répondu oui : MM. Beerenbroeck, Bekaert, Berger, Coppieters, Cornet de Grez, Dams, Dechamps, de Jaegher, de Longrée, F. de Mérode, Demonceau, de Muelenaere, de Puydt, Dequesne, de Renesse, de Sécus, Desmet, de Terbecq, de Theux, Devaux, d’Hoffschmidt, B. Dubus, Ernst, Fallon, Frison, Keppenne Lebeau, Lejeune, Liedts, Morel-Danheel, Pirmez, Pirson, A. Rodenbach, Schaetzen, Scheyven, Smits, Stas de Volder, Troye, Vandenhove, Vanderbelen, Verdussen, Vergauwen, Van Hoobrouck, Vilain XIIII, C. Vuylsteke, Wallaert,Watlet et Zoude.

Ont répondu non : MM. Desmaisières, Desmanet de Biesme, Eloy de Burdinne, Gendebien, Jadot, Quirini, Seron, Simons, Raikem.

Pièces adressées à la chambre

M. Schaetzen donne lecture d’une lettre par laquelle M. le ministre de la justice adresse à la chambre toutes les pièces relatives aux demandes en naturalisation.

M. le président. - Ces pièces seront renvoyées à la commission des naturalisations.

- La séance est levée à 4 heures et demie.