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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 2 décembre 1835

(Moniteur belge n°337, du 3 décembre 1835)

(Présidence de M. Raikem.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse fait l’appel nominal à une heure.

M. Schaetzen donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Renesse fait connaître les pièces adressées à la chambre.

« Le sieur Huysen, ex-volontaire louvaniste, demande que la chambre prenne en considération sa position malheureuse. »

« Les bourgmestres des communes composant le district de Dixmude demandent la construction d’une route de Dixmude à Furnes. »

« Le major retraité Bavier, né Suisse, demande à être exempté de payer aucune contribution en sa qualité d’étranger. »

« Le sieur Huber Mineur, ex-employé des douanes, jouissant d’une pension de la caisse de retraite et d’une pension militaire, se plaint d’une décision de l’administration des finances qui lui retire cette pension. »

- Ces pétitions sont renvoyées à la commission chargée d’en faire le rapport.


M. Frison demande un congé de huit jours.

- Ce congé est accordé.

Projet de loi accordant des indemnités aux victimes des événements de la révolution

Motion d'ordre

M. Quirini. - Si j’avais été présent lorsqu’il s’est agi du rapport sur le projet de loi relatif aux indemnités, j’aurais pu donner des explications sur ce rapport. La section centrale s’occupait activement de l’examen de cette loi, lorsque la clôture de la session est venue interrompre son travail. A la reprise de la session, la section centrale a repris son travail et m’a chargé de présenter son rapport. J’ai commencé ce travail ; mais je me suis bientôt aperçu que plusieurs procès-verbaux des sections particulières me manquaient. Deux de ces rapports seulement m’avaient été remis.

Cependant plusieurs membres de la section centrale avaient cessé d’appartenir la chambre ; dès lors il m’était devenu impossible de présenter le rapport à la section centrale, puisque cette section centrale n’existait plus, car les deux MM. Dellafaille avaient cessé de faire partie de la chambre.

Je crois maintenant que, pour avoir un rapport dans un bref délai, il serait nécessaire de nommer une commission spéciale. J’en fais la proposition formelle.

M. Jullien. - J’ai de la peine à concilier ce que vient de dire l’honorable député de Louvain, avec ce qui avait été dit à la séance d’avant-hier. Avant-hier on prétendait qu’il serait possible d’avoir sous peu un rapport sur les demandes en indemnités. D’après ce que vient de dire l’honorable membre, il n’existe plus de section centrale, car plusieurs des membres qui la composaient ne font plus partie de la chambre.

S’il en est ainsi, comme j’ai lieu de le croire, je demanderai, comme M. Quirini, la nomination d’une commission pour examiner le projet et faire son rapport le plus promptement possible.

M. le président. - Les faits énoncés par M. Quirini sont exacts. Effectivement deux membres de la section centrale chargée d’examiner la loi relative aux demandes en indemnités ont cessé de faire partie de la chambre.

M. Pirson. - Je pense que ce n’est pas une commission nouvelle qu’il faudrait nommer. Les membres qui faisaient partie de la section centrale s’étant beaucoup occupés de la loi dont il s’agit, ayant la connaissance des faits, peuvent apporter de grandes lumières dans la nouvelle commission. Je demanderai donc qu’on se borne à charger le bureau de nommer deux membres pour remplacer ceux qui ont cessé de faire partie de l’ancienne section centrale.

- M. le président met aux voix la proposition de M. Pirson. Elle est adoptée.

Loi sur l'enseignement universitaire

Interpellation

M. H. Vilain XIIII. - Messieurs, l’objet sur lequel je compte interpeller le ministère paraîtra peut-être un peu étranger à la matière que nous discutons, mais il est d’une telle importance pour l’avenir du pays et la prospérité future de deux des plus grandes villes du royaume, que je crois nécessaire de demander une explication au ministère.

Il s’agit de l’installation de nos deux universités. Déjà, depuis le 27 septembre dernier, la loi est promulguée. Depuis cette époque nous avons vu que les deux universités libres se sont organisées et ont été installées. Je désirerais qu’on nous fît connaître les motifs qui ont pu retarder l’installation des deux universités du royaume et l’époque à laquelle il compte les installer.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je pense que personne n’ignore la cause du retard qu’a éprouvé l’installation des deux universités du royaume : le travail était préparé, on sait pour quel motif il n’a pas été soumis à la sanction du Roi. Sa majesté est arrivée hier, je me suis empressé de soumettre le travail à sa signature. (Note du webmaster : l’allusion dont il s’agit fait référence à ce qui est relaté dans le Moniteur belge n°324, du 20 novembre 1835 : « On lit dans l’Indépendant : On nous écrit de Paris, 17 novembre (9 heures du soir) : « Le Roi Léopold a fait, en montant un escalier, une chute, dans laquelle le genou gauche a frappé contre une marche. Il en est résulté une légère contusion à l’articulation et une plaie superficielle à la peau qui recouvre la rotule. On a fait une application de sangsues autour du genou, et on l’a entouré de compresses imbibées d’eau froide. Dans peu de jours, S. M. sera entièrement remise de cet incident. »)

M. H. Vilain XIIII. - Je désirerais que M. le ministre nous informât de l’époque à laquelle il se propose d’installer les deux universités.

Je ferai ensuite observer que pendant l’absence du Roi on nous a présenté des projets ayant plus d’importance qu’une nomination de professeurs. L’absence de sa majesté n’était pas un motif pour retarder l’installation des universités.

- M. Raikem cède le fauteuil à M. Fallon, vice-président.

Ordre des travaux de la chambre

M. Desmet. - Dans la séance d’hier j’avais déposé une proposition ayant pour objet de fixer le jour de la discussion du projet de loi relatif à la péréquation cadastrale. Je ne sais pourquoi M. le ministre de l’intérieur a demandé le renvoi de ma proposition à la séance d’aujourd’hui.

Je propose de fixer la discussion de la loi relative à la péréquation cadastrale immédiatement après le vote de la loi sur l’entrée du bétail.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - La proposition faite par M. Desmet n’a pas été examinée hier, parce que l’honorable membre ne se trouvait pas présent. Nous aurions pu déjà lui répondre ce que nous lui répondrons aujourd’hui, que nous nous sommes entendus avec le ministre de l’intérieur, et que nous ne voyons aucun inconvénient à ce qu’on s’occupe de la discussion de la péréquation cadastrale dans le plus bref délai et avant la loi d’organisation communale, parce que nous ne pourrions pas espérer de mener à fin avant la nouvelle année la loi de péréquation cadastrale, les voies et moyens et la loi communale, projets dont les deux premiers doivent être votés par les deux chambres avant le renouvellement de l’exercice.

M. Desmanet de Biesme. - Je crois qu’il est impossible de fixer dès à présent le jour de la discussion de la loi relative à la péréquation cadastrale. Le ministre vient de dire qu’on ne pouvait pas s’occuper maintenant de la loi communale. Il me semble que nous ne pouvons pas davantage nous occuper de la péréquation cadastrale. Le ministre attend, pour présenter le budget des voies et moyens, que cette loi soit votée ; mais vous ne pouvez pas douter qu’elle donnera lieu à de longues discussions. Je suis le premier à reconnaître que les Flandres ont droit de se plaindre de l’état de choses qui a existé jusqu’à présent. Cependant ces provinces ne peuvent pas accuser la chambre de ne pas vouloir leur rendre justice, puisque déjà elle a diminué le contingent que ces provinces payaient précédemment.

Depuis dix jours nous nous occupons d’une loi qui ne paraissait pas devoir donner lieu de grands débats. Si nous entamons la discussion sur la péréquation cadastrale, comment espérer d’avoir terminé les voies et moyens avant la fin de l’année, si le sénat doit s’être prononcé sur la péréquation cadastrale avant qu’on ne s’occupe du budget des voies et moyens. Le sénat se plaint avec raison de ce qu’on ne lui donne la loi des voies et moyens à discuter que dans les derniers jours de l’année, ce qui rend son contrôle illusoire.

Je ne crois pas que, pour cette année, il soit possible que le vote de la loi sur la péréquation cadastrale précède celui du budget des voies et moyens. Je pense même qu’avant de nous occuper de la péréquation, il serait bon de soumettre le travail aux conseils provinciaux qui seront nommés en vertu de la loi d’organisation que nous avons votée.

On nous a toujours dit et répété que l’administration du cadastre n’avait reçu que des compliments et même des bénédictions pour son travail. Cette opinion, je crois, est loin d’être partagée par tout le monde. C’est pour cela que je pense qu’il serait à désirer que les conseils provinciaux fussent consultés avant que la chambre n’aborde la discussion.

Je dis qu’il est impossible que le budget des voies et moyens soit voté pour la nouvelle année si on s’occupe de la péréquation cadastrale. Je demande en conséquence que la proposition du député d’Alost ne soit pas admise.

M. Desmet. - L’honorable préopinant s’oppose à ma proposition afin de soumettre le travail du cadastre aux conseils provinciaux avant de le discuter dans cette enceinte. Je ferai observer que cette question a été examinée par la section centrale, qui a trouvé la chose impossible et sans utilité. On dit qu’on n’a pas le temps de s’en occuper et de discuter ensuite le budget des voies et moyens ; mais n’avons-nous pas encore un mois devant nous ?

On pense ensuite que ce projet de loi donnera lieu à de longues discussions ; c’est une erreur. Dans la section centrale, on avait aussi cette pensée, mais en 2 ou 3 séances on est tombé d’accord pour adopter le projet du gouvernement, sauf quelques modifications. Je suis persuadé qu’il ne donnera pas lieu à plus de difficultés dans la chambre.

M. Jullien. - Depuis quinze jours, la chambre passe un temps infini à faire et à défaire. Après les bestiaux qui nous ont conduits un peu loin et avec lesquels on peut espérer qu’on en finira, si pas demain, du moins après-demain, je pense que nous devrons nous occuper de la loi communale que le pays attend depuis 5 ans et qui semble fuir devant nous ; car chaque fois que nous sommes sur le point de l’aborder, quelque chose vient en arrêter la discussion.

La chambre doit se souvenir que cette loi a déjà été discutée longuement et à plusieurs reprises dans cette enceinte. Ceux qui ont pris part à ces discussions ont déjà parlé 7 ou 8 fois, et devront parler avec autant de précision que possible ; par conséquent, cette loi ne pourra plus donner lieu à de longues discussions, à l’exception de deux ou trois questions irritantes, telles que la nomination des bourgmestres et des échevins et deux ou trois autres articles. Sur le reste la chambre se mettra facilement d’accord. Je demande donc qu’on maintienne à l’ordre du jour après les bestiaux la loi sur l’organisation communale.

Aujourd’hui c’est pour la péréquation cadastrale, un autre jour c’est pour un autre projet, et constamment on nous fait perdre notre temps à discuter l’ordre de notre travail et ensuite à le changer.

M. A. Rodenbach. - Messieurs, voilà 40 ans que les Flandres sont surchargées de 800 mille francs d’impôt. Voilà donc près de 40 millions dont on les a grevées.

M. Vergauwen. - Dites spoliées.

M. A. Rodenbach. - Oui, spoliées, vous avez raison. L’expression est très juste.

Je pense que, puisque la chambre veut discuter la loi communale, comme cette loi a déjà été discutée plusieurs fois, et qu’on abrégera les discours, les trois ou quatre points contestés ne donneront pas lieu à de bien longs débats. On pourrait, après la loi communale, discuter la péréquation générale. Je demande donc qu’on fixe la discussion de la péréquation générale après la loi communale ; nous pourrons encore discuter les budgets avant la fin de l’année, car nous avons encore un mois devers nous.

M. Desmanet de Biesme. - Il est imprudent de se lier aussi longtemps à l’avance pour son ordre du jour. On propose de mettre la discussion sur la péréquation cadastrale après la loi communale. Je vous prie de remarquer les projets urgents que nous avons à voter : les voies et moyens et le budget de la guerre, qui, j’espère, donnera lieu à de longues observations. Vous devez les avoir votés avant la fin de l’année, sous peine de rentrer dans les crédits provisoires que nous avons justement flétris

Je pense que nous devons commencer la loi communale, sauf à l’interrompre si elle n’est pas terminée quand nous pourrons commencer les budgets.

M. Desmet. - Je ferai observer que la discussion de la loi communale durera au moins 15 jours.

Quant à ce qu’on a dit que les communes attendent la loi communale depuis 5 ans je répondrai que les Flandres sont en souffrance depuis 40 ans.

M. le président. - Trois propositions sont faites : 1° de fixer la discussion de la péréquation cadastrale après le vote de la loi relative à l’entrée du bétail ; 2° de fixer cette discussion après la loi communale, et en troisième lieu l’ajournement de toute décision.

M. Jullien. - La chambre doit savoir, dans le cas où on changerait l’ordre du jour et où on substituerait la péréquation cadastrale à la loi communale, si immédiatement après on reviendrait à la loi communale, parce que si, après la discussion de la perception cadastrale, il fallait encore discuter ce qu’on mettra à l’ordre du jour, la loi communale serait rejetée à je ne sais quel temps.

La chambre, par une décision formelle, l’a mise à l’ordre du jour ; elle est vivement réclamée par les communes, il faut qu’elle ait son tour.

Je demande si telle est l’intention de ceux qui réclament la priorité pour la péréquation cadastrale.

M. Dubus. - Je ne demande pas qu’on discute immédiatement la péréquation cadastrale. Je désire qu’elle soit examinée avec maturité, mais je souhaite que l’honorable membre qui demande l’ajournement, nous dît s’il ne pense pas qu’on nous présente un budget des voies et moyens dont l’article premier suppose la péréquation cadastrale.

S’il en était ainsi, on viendrait nous dire qu’il faut voter cette loi en une demi-heure ; nous n’aurions pas le temps de la discuter, parce qu’il faudrait que le budget fût voté avant le 1er janvier. S’il devait en être ainsi, je demanderais qu’on mît immédiatement à l’ordre du jour la péréquation cadastrale, afin que chacun pût développer son opinion, car il y aura beaucoup à dire sur ce projet de loi.

Il faut qu’on s’entende bien sur l’ajournement, si on veut ajourner ou non après le 1er janvier. Si la discussion devait avoir lieu avant le vote du budget des voies et moyens, ce serait avancer le travail que de discuter de suite la péréquation cadastrale.

Je prie l’honorable M. Desmanet de Biesme de vouloir bien expliquer ce qu’il entend par l’ajournement qu’il propose.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Le budget des voies et moyens sera présenté pour la contribution foncière, comme les années précédentes, en un seul article pour tout le royaume. Nous ne pouvons pas présenter la chose différemment, avant que la loi de péréquation ait été votée par la chambre.

Comme on l’a demandé, il sera ajouté pour l’article de la contribution foncière un état de développement dans lequel on présentera deux systèmes de répartition de la péréquation, l’un en deux années comme le propose la section centrale, et l’autre en trois ans comme l’avait proposé le gouvernement.

Vous pourrez donc délibérer sur les voies et moyens sans vous occuper préalablement de la péréquation.

Cependant, il ne faut pas nous dissimuler que si la chambre se décidait à appliquer la péréquation cadastrale à l’exercice de 1836, il serait indispensable que cette loi fût votée d’urgence, parce que la perception des impôts ne peut pas être trop longtemps différée, et il faut que le gouvernement sache bientôt d’une manière définitive comment dresser les rôles pour percevoir l’impôt foncier en 1836.

Nous devrions peut être nous occuper avant tout de la fixation d’un jour prochain où on discuterait la question de savoir si la péréquation cadastrale sera appliquée à partir du 1er janvier 1836 on non.

On pourrait en effet décider très convenablement et d’une manière certaine, sans être obligé d’y revenir, que la péréquation sera mise à exécution seulement en 1837 ou à partir du 1er janvier de cette année.

Si vous décidez que la loi de péréquation ne sera appliquée que plus tard, par exemple à partir du deuxième semestre de 1836, vous pourrez en différer la discussion.

Ne croyez pas, messieurs, qu’en ne nous opposant pas à la proposition de M. Desmet, nous ayons voulu retarder la discussion de la loi communale. Nous appelons la discussion de cette loi de tous nos vœux. Car il est nécessaire que les communes, comme le gouvernement, connaissent leurs droits et leurs devoirs respectifs, et que ces droits et ces devoirs soient nettement tracés dans une loi pour que les affaires marchent régulièrement.

Vous remarquerez, d’un autre côté, que le gouvernement est désintéressé dans la question soulevée par l’honorable M. Desmet, car l’impôt rentrera également, soit qu’on vote ou qu’on ajourne la loi de péréquation cadastrale. C’est une affaire qui regarde les provinces entre elles. On ne peut donc tirer aucun argument contre le gouvernement, de l’opinion qu’il émet sur la mise à l’ordre du jour de cette loi.

M. Desmanet de Biesme. - Je demande la parole pour expliquer comment j’entends l’ajournement que je propose. Je croyais m’être suffisamment expliqué en disant que les états provinciaux devaient être consultés sur la péréquation cadastrale avant que ce travail ne soit soumis à la chambre.

J’avais été frappé des inconvénients qu’il y aurait à le discuter maintenant, et ces inconvénients n’auront échappé à personne. C’est que vous devez d’abord finir la loi sur le bétail, ensuite discuter le budget de la guerre qui exigera de longues discussions, et en troisième lieu les voies et moyens. Je demande s’il est possible avant la nouvelle année d’avoir terminé ces lois, et de plus une loi sur la sortie des os, et de discuter avec maturité la loi sur la péréquation cadastrale.

Je crois, comme l’a dit M. Jullien, que la loi communale est ce qu’il y a de plus pressé pour le pays. Le sénat ne veut pas s’occuper de la loi provinciale avant d’avoir la loi communale, et cependant l’administration de la province ne peut pas marcher avec des députations incomplètes, résultat de l’ordre de choses qui existait avant la révolution.

Les tribunaux sont accablés d’ouvrage, parce qu’on ne peut pas remplir les vacatures. Je crois qu’il y a beaucoup de raisons pour que la chambre ne s’occupe pas de la péréquation cadastrale. Elle doit rester maîtresse de déterminer son ordre du jour quand nous serons arrivés à la nouvelle année.

M. Dumortier. - Je demanderai d’abord au gouvernement quand aura lieu la présentation du budget des voies et moyens ; il est temps que cette présentation soit faite ; puisque S. M. est de retour, il me semble qu’il n’y a plus de motif de retard.

J’aurai l’honneur de faire remarquer que ce budget doit être mûrement examiné cette année, et que la loi sur la péréquation cadastrale est, comme le dit le ministre, peu importante au gouvernement, puisque le chiffre global est le même.

Indépendamment du budget des voies et moyens, vous aurez encore à voter le budget de la guerre ; il est très probable qu’il occasionnera de grandes discussions, et de très grandes discussions. Vous aurez aussi à voter sur la loi concernant le contingent de l’armée, et sur d’autres lois qui ne peuvent être retardées ; vous avez dans ce nombre la loi sur le jury d’examen.

Cependant vous prendrez des vacances aux fêtes de Noël, en sorte qu’il ne vous reste que trois semaines de séance dans le cours de ce mois. Je vous laisse à juger si ces trois semaines pourront vous permettre de discuter la loi cadastrale, loi qui mettra tous les intérêts en présence, et qui sera incontestablement aussi longue que la fameuse loi sur les bêtes à cornes, dont nous nous occupons (bruit) : toutes les fois qu’il s’agit de lois d’intérêt local, de lois de province, elles deviennent interminables dans cette enceinte, vous en avez l’expérience.

Eh bien, la loi cadastrale est une loi d’intérêt de paroisse, comme l’a dit très bien l’honorable membre qui est devant moi (M. le comte Félix de Mérode) ; je crois donc qu’il faut la renvoyer au commencement de l’année.

J’invite le ministre des finances à déposer sur le bureau de la chambre le budget des voies et moyens, afin que nous puissions nous en occuper dans les sections, et ensuite en séance publique.

La discussion générale du budget de la guerre dura peut-être quatre ou cinq jours, car vous savez qu’il y a des griefs très vifs contre ce budget ; on aura encore occasion de s’occuper de ces griefs lors de la discussion du budget des voies et moyens ; nous n’aurons donc aucun instant de reste, si nous voulons terminer la besogne la plus urgente et la plus indispensable.

Je prie donc messieurs des Flandres de n’être pas si pressés, ils ont attendu quarante ans, dit-on, ils attendront bien encore (bruit). Je ne suis pas aussi convaincu que ces MM. de la réalité des motifs de leurs plaintes. Quoi qu’il en soit, ce ne sont pas les lois d’argent que je considère comme étant ici les plus urgentes ; ce sont les lois organiques ; c’est la loi communale et la loi provinciale.

Le sénat a déclaré qu’il ne s’occuperait pas de la loi provinciale sans avoir la loi communale et il a fait cette déclaration malgré la constitution qui prescrit le vote de ces deux lois ; notre devoir à nous serait de faire en sorte que le sénat votât la loi provinciale ; Or, quel est le moyen à employer pour cela ? C’est de n’accorder la loi cadastrale qu’après qu’on nous aura donné la loi provinciale.

MM. les sénateurs sont tous de grands propriétaires, et pour avoir la péréquation cadastrale, ils s’empresseront de nous donner la loi provinciale. Remarquez que le sénat laisse en souffrance les intérêts du pays et méconnaît la constitution,

M. F. de Mérode. - Mais cette accusation retombe aussi sur vous, puisque vous n’accordez pas au pays la loi communale également recommandée par la constitution.

M. Dumortier. - Nous avons maintenant une organisation communale telle quelle ; du moins, elle est conforme à l’esprit de la constitution ; mais il n’y a pas d’organisation provinciale ; tous les agents de cette administration n’ont plus de mandat. Le congrès n’en voulait plus, et il pensait qu’on doterait le pays d’une nouvelle loi sur cet objet dans la plus prochaine législature. Je le répète, je crois qu’il faut saisir l’occasion que nous présente la loi sur la péréquation cadastrale pour forcer en quelque sorte le sénat à s’occuper de la loi provinciale.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - J’ai déjà eu l’honneur de dire à la chambre comment il se faisait que je n’avais pas encore déposé le budget des voies et moyens sur le bureau. Hier, avant le retour de S. M., j’avais déjà demandé la convocation du conseil des ministres pour arrêter définitivement le travail relatif à la loi dont il s’agit. Le Roi ayant convoqué le conseil pour ce soir, j’ai lieu d’espérer que demain le budget des voies et moyens pourra vous être présenté.

Je ne veux pas suivre M. Dumortier dans toutes les parties de son discours ; je me bornerai à répondre au seul projet de ce discours où il a jugé à propos d’attaquer une autre chambre, tout à fait indépendante de celle-ci ; une chambre qui a ses attributions qu’il faut respecter si nous voulons qu’on respecte les nôtres.

Comment, messieurs, on se permet de supposer que les grands propriétaires qui siègent dans le sénat discuteraient la loi provinciale si vous leur faisiez attendre celle sur la péréquation cadastrale, à laquelle ils sont, dit-on, intéressés ! Comment peut-on faire de pareilles suppositions contre un corps qui s’est toujours montré dévoué au pays et qui s’est toujours conduit d’une manière si désintéressée ! Le sénat désire discuter simultanément la loi communale et la loi provinciale ; ces deux lois sont également utiles, elles sont également urgentes et recommandées par la constitution, et il importe qu’elles soient mises en vigueur simultanément : vous voulez que le sénat discute la loi provinciale ; eh bien, vous en avez un moyen : c’est de discuter prochainement la loi communale et de la lui envoyer ; le pays ainsi que le sénat désire la mise à exécution de ces deux lois organiques, et le vœu du pays est encore qu’il ne s’établisse aucune scission entre deux grands pouvoirs de l’Etat.

M. Desmet. - J’ai demandé qu’après la loi en délibération on commençât la discussion sur la péréquation cadastrale ; et qu’ensuite on discutât le budget des voies et moyens, puis la loi communale.

M. de Jaegher. - Plus nous discutons, et plus nous nous éloignons du but que nous voulons atteindre. L’honorable M. Desmet nous propose d’aborder la discussion sur la loi concernant la péréquation cadastrale après la loi sur les bestiaux. Je me sens disposé à appuyer cette proposition. Un autre membre a demandé que l’on s’occupât de la loi communale avant la loi de finance ; mais nous aurons probablement de longues discussions sur la loi communale, et si nous en commençons la délibération actuellement, il faudra l’abandonner pour se livrer à la discussion du budget. Le budget prend déjà un long temps dans la section centrale ; il nécessitera, par conséquent, un travail assez long, et de la part de cette section, et de la part de la chambre ; ainsi, je crois que l’on doit commencer par la loi cadastrale, parce qu’elle offre moins de chances pour nous faire perdre du temps.

M. d'Hoffschmidt. - J’avais demandé la parole, mais j’y renonce, parce que je vois que nous perdons beaucoup de temps. Il est déplorable de voir que tous les jours nous employions un temps précieux au commencement des séances pour discuter sur quoi nous discuterons. Quand la loi sur le bétail sera terminée, nous verrons ce qu’il y à faire. Pour plaire à je ne sais quels électeurs, on fait chaque jour des motions d’ordre qui portent le trouble dans nos délibérations. (Bruit.)

M. Gendebien. - Je suis fâché que l’on vienne intempestivement interrompre l’ordre du jour. Nous avons assez de projets urgents et importants à discuter pour ne pas perdre notre temps à délibérer pour savoir ce que nous ferons. Il y a urgence de voter le budget des voies et moyens et le budget des dépenses du département de la guerre particulièrement, et bien d’autres projets dont on vient de vous parler. Quand nous aurons achevé cette besogne, nous entendrons les honorables membres sur la nécessité de voter telle ou telle loi.

Je bornerai là mes observations, mais je dois une réponse au ministre des finances. Il nous invite à voter la loi communale : je trouve cela très bien ; mais ce que je trouve très mal, c’est que depuis deux ans et demi aucun ministre n’ait fait sentir au sénat la nécessité de délibérer sur la loi provinciale qui est bien autrement urgente.

On nous parle de l’urgence de la loi communale ; mais l’administration communale est organisée conformément aux principes de notre constitution et de notre révolution, et on n’a pas de motifs pour en demander le prompt changement ; mais il n’en est pas de même de l’organisation provinciale qui date d’une époque antérieure, et qui est basée sur des principes que le peuple a repoussés.

Nous ne respectons pas les prérogatives de l’autre chambre ! Mais si un des corps de l’Etat a montré peu de respect et même du mépris pour les prérogatives de l’autre, c’est bien le sénat. Comment ! la chambre des représentants, saisie d’un projet de loi, le discute et le transmet à l’autre chambre du pouvoir législatif ; et le sénat déclare publiquement qu’il ne s’en occupera pas, et qu’il ne s’en occupera qu’autant que la loi communale lui sera présentée !

De quel droit arrête-t-il le résultat de nos délibérations, quand la constitution lui fait un devoir de s’occuper immédiatement de la loi provinciale ?

Il a pris pour prétexte de ce retard la nécessité de discuter les deux lois en même temps. Mais le sénat s’est donné un démenti à lui-même en discutant une partie de la loi communale sans être saisi de l’ensemble. Il y a donc eu dérogation à sa décision. Messieurs, croyez-vous tromper le public sur le résultat de cette marche que je n’hésite pas à qualifier de tactique ?

Voulez-vous savoir en définitive le but que l’on se propose ? Le gouvernement veut d’abord organiser l’administration communale à son profit, afin de composer l’administration provinciale sur un pied tel qu’il puisse en disposer de la même manière. Quand on aura pris de l’influence sur l’administration communale, en se donnant le droit de destituer les bourgmestres ou en menaçant de les destituer, on organisera alors l’administration provinciale. Voilà toute l’affaire.

Lorsque le congrès a maintenu un simulacre d’autorité provinciale, c’est dans la pensée que cette administration serait réorganisée promptement. Et quand la constitution a fait un devoir à la législature de s’occuper de la loi provinciale et de la loi communale, il est certain qu’elle voulait qu’on commençât le travail par l’administration dont l’organisation s’éloignait le plus des principes de la révolution. Maintenant on veut faire le contraire ; la raison en est toute simple, c’est que depuis longtemps on a renié la révolution, et l’on s’en écarte tous les jours le plus qu’on peut.

Et puisque le sénat a déclaré qu’il ne s’occuperait de la loi provinciale que quand il serait saisi de toutes les deux, c’est un motif légitime pour les députés d’employer tous les moyens en leur pouvoir, afin d’obliger le sénat à remplir les devoirs qui lui sont imposés par la constitution : ce n’est pas nous qui voulons abuser de nos prérogatives, c’est au contraire par abus des siennes que le sénat prive la nation de l’exercice des droits qu’elle a conquis.

Je le répète, je regrette que depuis deux ans et demi, aucun ministre ne se soit senti le courage de rappeler le sénat au devoir que lui impose la constitution.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je suis véritablement étonné de l’attaque de l’honorable orateur. Il a perdu de vue qu’un projet de loi plus ancien a été adopté par le sénat, transmis à cette chambre qui, cependant, ne s’en est pas occupée. Le sénat, dans cette circonstance a montré plus de modération qu’on n’en montre actuellement ; il ne s’est pas plaint de ce qu’on laissait de côté cette loi.

- Plusieurs membres. - La loi sur le conseil d’Etat !

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je ne me prononce pas sur le mérite du projet de loi qui nous a été transmis ; je ne discute qu’un principe, et il est le même dans un cas comme dans l’autre.

Quant à la loi communale, n’avait-il pas été décidé que l’on interromprait la discussion de la loi provinciale, pour s’occuper de la loi communale, dès qu’elle serait en état d’être mise en délibération ? Ainsi la chambre a reconnu elle-même qu’il était plus urgent de porter la loi communale que de porter la loi provinciale. Ce n’est donc pas seulement dans le sénat que l’on a eu l’opinion que les deux lois provinciale et communale dussent marcher de front ; c’est dans cette chambre que cette opinion a été partagée.

Quant à moi, je ne puis qu’insister pour que la chambre s’occupe de la loi communale, afin que l’on puisse doter le pays de deux lois également urgentes et importantes.

M. Dubus. - Les ministres ont pris la parole pour justifier le sénat du refus qu’il a fait de s’occuper du projet de loi dont nous avons reconnu l’urgence, et que nous lui avons soumis après des discussions très laborieuses. A en croire les ministres, ce refus est très bien fondé. J’avoue que j’ai été étonné que MM. les ministres aient été jusque-là que de prétendre qu’un tel refus peut être fondé.

Quel motif nous a-t-on allégué ? c’est que le sénat ne pouvait se prononcer sur la loi communale que quand il aurait en regard la loi provinciale telle que nous votée : mais cette loi ne sera jamais qu’un projet pour le sénat ; et le sénat ne devrait mettre en regard de la loi provinciale que la loi communale, qu’il votera lui-même, et non celle que nous voterons.

L’insuffisance des raisons qu’on nous donne montre que l’on veut faire un système complet d’administration intérieure, et voter dans la loi provinciale les principes que l’on veut faire prévaloir dans la loi communale.

Si c’était notre vote que le sénat voulût connaître, il ne serait pas d’accord avec lui-même, puisqu’il a voté la partie du système communal concernant le personnel, et cela pendant que nous votions sur les attributions des magistrats communaux ; on a coupé la loi en deux ; on lui en a envoyé un lambeau, et il a trouvé alors qu’il pouvait convenablement voter sur ce lambeau, sans que nous ayons voté le reste ; cependant il y a bien plus de relation entre les deux parties de la loi communale qu’entre la loi communale et la loi provinciale : explique qui pourra ces contradictions qui, à mes yeux, subsisteront toujours.

Le motif que l’on a mis en avant n’est pas le véritable ; il ne peut qu’y avoir qu’un but machiavélique, et ce but a été signalé par l’honorable M. Gendebien.

En votant la loi provinciale, on ferait jouir le peuple d’une liberté proclamée par la constitution, tandis qu’en votant la loi communale nous lui ôterons une liberté qu’il avait acquise ; mais il paraît que beaucoup de députés sont plus portés à restreindre les libertés qu’à les étendre.

J’ai dit que la loi provinciale est urgente puisqu’elle donnera au peuple des libertés dont il a été privé ; et si la chambre comprenait comme moi sa dignité et avait comme moi le sentiment de ses devoirs, elle refuserait de s’occuper de la loi communale jusqu’à ce qu’on eût promulgué la loi provinciale, c’est-à-dire jusqu’à ce que le peuple fût en possession des libertés qu’il devrait avoir depuis cinq ans.

Le ministre de l’intérieur vient de récriminer contre la chambre. Vous avez, a-t-il dit, autant de torts que le sénat ; vous ne vous êtes pas occupés d’une loi qu’il vous a transmise (la loi sur le conseil d’Etat). Mais ici il y a un motif plausible, c’est que tout le temps de nos sessions a été complètement employé à l’examen de nombreuses et urgentes lois dont on nous a surchargés ; nous avons toujours plus de projets à faire que nous n’avons de temps à consacrer à nos travaux législatifs. Que devons-nous faire alors ? c’est d’examiner les projets les plus urgents.

C’est parce que le projet de loi relatif au conseil d’Etat est le moins urgent, parce que le vote de cette loi n’est pas prescrit par la constitution, que nous avons pensé que nous devions nous occuper auparavant d’organiser ce que la constitution a voulu expressément que nous organisions.

Quant au sénat, en est-il de même ? Lorsque le sénat n’a plus que la loi provinciale à examiner et à discuter, il trouve qu’il n’a plus rien à faire, et MM. les sénateurs retournent chez eux ; de sorte que c’est un véritable déni de justice, un déni de se prononcer. Pour nous, on ne peut nous adresser aucun reproche ; car, pendant toute la durée des sessions, nous nous occupons dans les sections, dans les sections centrales et en séance publique, des projets de loi dont nous sommes surchargés.

Je tenais à donner cette réponse à M. le ministre de l’intérieur qui s’est fait l’organe de la récrimination.

Quant à l’objet à mettre à l’ordre du jour, je rappellerai une observation que j’ai faite dans cette enceinte : une question qu’il est, selon moi et d’autres membres, urgent de résoudre, est celle de savoir si la loi de péréquation cadastrale doit être votée, de manière à être mise à exécution dans le courant de l’exercice prochain. Quant à moi, je ne le pense pas ; je trouve que nous ne l’examinerions pas avec assez de maturité. Je crois donc que vous devez décider si elle sera mise à exécution à partir du 1er janvier prochain ; car si vous le décidez ainsi, je serai le premier à demander qu’on s’en occupe de suite, parce que nous n’aurons pas trop de temps pour la discuter.

Je demande donc que l’on mette à l’ordre du jour la question de savoir si la loi de péréquation cadastrale sera ajournée à l’année prochaine, ou si elle sera discutée de manière à être mise à exécution à partir du 1er janvier. Il faut trancher cette question de suite, sinon vous ne pouvez régler convenablement votre ordre du jour.

M. F. de Mérode, ministre d’Etat. - Il se passe ici une singulière chose on parle constamment de constitution, de libertés, de droits réservés à chacun par la constitution, et on se met des injures contre un corps indépendant de cette chambre.

En France, quand cela arrive, le président rappelle aux membres que les actes de l’autre chambre ne peuvent être l’objet d’une discussion ou d’une censure, parce qu’elle n’a personne qui ait la mission de répondre en son nom. Il est ridicule, en effet, d’attaquer un corps dans une enceinte qui n’a pas un mandataire pour repousser ces attaques. Quant à moi je prends ce rôle, pour répondre dans le même sens que l’ont fait MM. les ministres de l’intérieur et des finances.

La constitution porte : Dispositions supplémentaires, article 139. Le congrès déclare qu’il est nécessaire de pourvoir par des lois séparées, et dans le plus court délai possible, aux objets suivants : 1° la presse ; 2° l’organisation du jury ; 3° les finances ; 4° l’organisation provinciale et communale, etc.

La constitution ne dit pas : « 4° l’organisation provinciale ; 5° l’organisation communale » Mais ces deux lois sont placées sous le même numéro. Cela ne justifie-t-il pas l’opinion que ces deux lois ne peuvent être mises à exécution l’une sans l’autre ?

Maintenant on parle toujours des libertés du peuple. Il semble que ceux qui ne partagent pas les opinions de MM. Dubus, Gendebien et autres, ne s’occupent pas des libertés du peuple. Mais ces libertés sont-elles donc si respectées avec le régime qui est établi maintenant ? Dans combien de communes les bourgmestres ne sont-ils pas de petits tyranneaux, qui oppriment le peuple ? Ils se sont fait élire par intrigue, et ils vexent leurs administrés qui ne peuvent se débarrasser d’eux.

Si d’autres ont oublié ce qui s’est passé dans une des premières villes du royaume, pour moi je me le rappelle ; et je sais que cet état d’anarchie administrative existe encore dans d’autres communes. Je pense donc qu’il est dans l’intérêt des libertés du peuple que la loi communale soit discutée et mise en vigueur.

En finissant, je répète qu’il est de la dernière inconvenance d’attaquer un corps indépendant, qui ne s’est jamais permis aucune attaque contre cette chambre. Je proteste contre cette inconvenance.

M. Desmet. - Je me rallie à la proposition de l’honorable M. Dubus. Je demande que l’on mette à l’ordre du jour de demain la question de savoir si la loi de péréquation cadastrale sera discutée de manière à être mise à exécution à partir du 1er janvier.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Laissez au moins finir la loi sur le bétail.

M. Desmet. - J’ai demandé la parole, pour me rallier à la motion que vient de faire l’honorable M. Dubus, qui consiste à fixer le jour immédiatement après la discussion du projet qui est à l’ordre du jour, pour mettre en délibération si le projet de loi sur la nouvelle péréquation cadastrale sera mis à exécution pour l’année prochaine ou non ; je me rallie à cette motion parce que je ne doute pas que la chambre l’adoptera sans aucune difficulté, surtout qu’elle vient d’un membre qui, je crois, n’est pas grand partisan du nouveau projet de péréquation.

Et comme vous avez remarqué comme moi que l’honorable M. Liedts, qui est rapporteur de ce projet, n’est pas en séance, je demanderai que le bureau daigne avoir la complaisance de faire connaître à cet honorable membre que cette discussion aura immédiatement lieu.

Comme j’ai la parole, vous me permettrez, messieurs, que je relève un fait personnel qui, je dois l’avouer, m’a été assez sensible : c’est quand l’honorable député de Bastogne a voulu soupçonner que la motion que j’avais faite pour le cadastre était faite en but de plaire à mes électeurs. J’ignore si l’honorable membre, quand il fait quelque motion ou proposition, les fait pour plaire à ses commettants ; pour ce qui me regarde, j’ose, messieurs, vous prendre tous en témoignage que ce n’est pas mon habitude de parler pour plaire, soit aux électeurs, soit aux ministres ; que toujours j’ai eu le bonheur de parler et d’agir d’après ma conscience et ma conviction. A cet égard je ne devrais pas vous citer une preuve convaincante, vous connaissez trop que ma trop grande franchise m’a rendu à un certain point victime d’un ministère qui ne faisait aucun scrupule de violer la constitution.

Non, messieurs, ce n’est pas pour plaire aux électeurs de mon district que j’ai pris la liberté de déposer ma proposition, mais c’est pour obtenir le redressement d’un grief, et d’un grief qui pèse depuis quarante ans sur les provinces de Flandre et d’Anvers ; et j’ai droit, messieurs, de trouver très étrange que, pour un objet si important, et quand la moitié de la population entière du royaume souffre d’une si criante injustice, on cherche et on fait valoir des fins de non-recevoir pour repousser et ajourner indéfiniment l’époque que justice sera faite, et qu’un grief sera redressé.

M. d'Hoffschmidt. - Je demande la parole.

M. le président. - M. A. Rodenbach l’a demandée avant vous.

- Un grand nombre de membres. - La clôture ! la clôture !

M. A. Rodenbach. - J’ai déposé une proposition…

M. Lardinois. - Je demande l’exécution du règlement. Plus de dix membres se sont levés pour la clôture. Je prie M. le président de la mettre aux voix.

M. A. Rodenbach. - Je demande la parole contre la clôture. J’avais déposé une proposition tendant à ce que la loi de péréquation cadastrale fût discutée après la loi communale. Mais je me rallie à la proposition de M. Desmet. Toutefois je dis que si on ne discute pas la loi du cadastre, nous serons obligés de faire des amendements au budget. Nous serons obligés de demander que l’on diminue de 25 p. c. l’impôt foncier ; nous serons peut-être même forcés de rejeter le budget ; car les Flandres sont surchargées, et c’est à juste titre qu’elles se plaignent.

- La chambre consultée prononce la clôture de la discussion.


M. Desmanet de Biesme. - Je retire ma proposition. Je demande que la chambre maintienne l’ordre du jour, tel qu’elle fixé précédemment.

- La proposition de M. Desmanet de Biesme est mise aux voix et adoptée ; en conséquence, la chambre décide qu’elle maintient l’ordre du jour.

Projet de loi transférant un crédit au sein du budget du ministère de la justice

Rapport de la commission

M. de Behr dépose le rapport de la commission chargée de l’examen d’un projet de loi relatif à un transfert demandé par le département de la justice.

- La chambre ordonne l’impression et la distribution de ce rapport et en fixe la discussion après le vote du projet de loi relatif à l’entrée des bestiaux étrangers.

M. Raikem remonte au fauteuil.

Projet de loi relatif aux droits sur les bestiaux

Discussion des articles

Article 2

M. le président. - La discussion continue sur la partie de l’article 2 relative à l’étendue des frontières.

M. Smits. - Je demande la parole pour un fait personnel.

Quand j’ai l’honneur de porter la parole dans cette chambre, je tâche toujours de mesurer mes termes à la hauteur de la dignité de cette assemblée, et j’espère que mes collègues voudront bien me rendre cette justice que jamais un mot, une parole ne sont venus effleurer mes lèvres, qui ne fussent conformes à la politesse et à l’urbanité parlementaires.

Cependant nos adversaires ne paraissent pas avoir avec nous les mêmes ménagements ; et souvent, dans cette enceinte, depuis le commencement de la discussion actuelle, j’ai été personnellement en butte à quelques attaques auxquelles je dois répondre, surtout d’après ce qui s’est passé hier pendant mon absence

Le premier adversaire qui m’a combattu est un honorable député d’Alost. Je rends grâce à la modération de ses paroles. Cependant il m’a reproché de faire une opposition systématique contre toutes les lois qui tendent à favoriser l’industrie. Ce reproche, je dois le repousser, en raison de ma double position, en demandant à l’honorable membre où il a trouvé l’opposition systématique à laquelle il a fait allusion.

Est-ce dans la loi sur les toiles ? Mais j’ai été le premier à réclamer une protection pour l’industrie linière. ; car je l’ai demandée, non pas seulement en 1833, mais en 1829. Alors, le premier peut-être en Belgique, j’ai demandé que le tarif de l’industrie linière fût majoré de 10 p. c. Pourquoi me suis-je opposé au dernier tarif ? parce que j’étais convaincu que le droit s’élèverait à 21 p. c. J’avais raison : le droit s’est élevé à 21 p. c. Depuis, la fraude s’est chargée de nous importer les tissus étrangers ; et le trésor ne reçoit plus rien ou peu de chose.

Est-ce dans la loi des céréales ? Mais cette loi, pourquoi l’avons-nous repoussée ? Parce qu’elle établit un maximum et un minimum, système contraire à l’industrie agricole et à toutes les industries en général, ainsi que je l’ai déjà démontré.

Est-ce dans la loi relative à l’industrie cotonnière ? Cependant j’ai été un des premiers (j’en appelle à tous mes collègues de la commission d’industrie) à demander protection pour l’industrie cotonnière. Pourquoi avons-nous repoussé la loi ? parce qu’elle voulait établir un système prohibitif sans restriction ; parce qu’elle donnait le droit de visite et d’estampille, et celui de la recherche à l’intérieur.

Est-ce enfin dans la loi actuelle ? J’ai encore été le premier à déclarer, comme je le déclare encore, que je voulais une protection sage et modérée pour l’industrie agricole. Mais je ne la voulais pas précisément comme le projet tend à l’établir.

Je n’ai donc pas fait une opposition systématique, mais une opposition de raison, de devoir et de conscience, ayant pour but la défense des intérêts généraux.

Un autre orateur que je regrette de ne pas voir présent à la séance, m’a attaqué avec la finesse qui le caractérise. (Les regards se portent vers la place qu’occupe ordinairement l’honorable M. Eloy de Burdinne). Mais quand il a dit que nous raisonnions agriculture comme il raisonnerait alcoran, il n’a prouvé qu’une chose, c’est qu’il n’est pas Turc. (On rit.)

Un troisième adversaire est venu hier avec un ton déclamatoire et violent (je parle d’après ce qu’on m’a dit ; car je n’assistais pas à la séance) me reprocher d’avoir travesti des chiffres. Ce reproche, messieurs, est grave ; c’est une question d’honneur, et je ne permettrai à personne de la résoudre contre moi. Je demanderai d’abord à ce membre, qui a infirmé les faits que j’ai avancés, sur quoi il se fonde pour soutenir que les chiffres que j’ai cités sont inexacts. S’il prouve cela, je n’ai plus rien à dire. Je demande cette démonstration ; j’espère qu’il me la donnera. J’attendrai ses explications pour répondre.

M. Desmet. - Il est vrai que j’ai fait à l’honorable préopinant le reproche dont il vient de vous entretenir ; et, messieurs, je crois que ce n’est pas moi seul des membres de cette chambre qui ont remarqué, je pense, que l’opinion de l’honorable député d’Anvers n’a jamais varié, depuis qu’il est membre de cette assemblée, sur ce qu’il voulait protéger, ou le commerce externe, autrement dit le haut commerce, ou l’industrie nationale ; et le pays en entier a déjà fait cette remarque, et de tous côtés on se plaint que le chef du bureau de l’industrie et d’agriculture, et que moi je nomme le bureau du commerce extérieur, a à cet égard une opinion systématique.

Si l’honorable membre se bornait à discuter et défendre son opinion par des raisonnements, je ne me serais pas permis de lui faire le reproche d’avoir une opinion systématique sur le commerce et l’industrie ; mais vous savez, messieurs, que l’honorable membre se sert toujours, dans sa défense, des données statistiques, et je ne crains pas de dire qu’il nous communique ces renseignements statistiques non seulement comme membre de la chambre, mais comme chef du bureau de l’industrie et de l’agriculture : et c’est pour ce motif que j’ai cru avoir le droit de lui faire un reproche.

Messieurs, veuillez prendre attention que, chaque fois que l’honorable membre nous a communiqué les renseignements statistiques, il les a pour ainsi dire, tenus en réserve, pour nous surprendre. Car une chose qui doit nous étonner, c’est qu’il paraît, comme nous avons vu dans la discussion du projet qui nous occupe, que l’honorable membre, chef du bureau de l’industrie et de l’agriculture, n’a pas donné communication même à son ministre des renseignements qu’il a fait valoir ; quoique membre de la commission à laquelle vous aviez envoyé le projet du gouvernement, il n’a pas non plus trouvé bon de lui communiquer ces mêmes renseignements.

Quand on voit tout cela, que peut-on conjecturer de l’opinion de l’honorable M. Smits, et ne pourrais-je avec droit lui reprocher qu’il a une opinion systématique contre tout projet qu’on présente pour protéger les diverses branches de l’industrie du pays, et je déclare, avec ma franchise ordinaire, qu’une telle opinion dominante est très dangereuse dans le bureau de l’industrie et de l’agriculture.

M. Desmaisières, rapporteur. - (Erratum inséré au Moniteur belge n°338, du 4 décembre 1835 :) L’honorable M. Smits est mécontent de ce que je me suis servi du mot « travesti » à propos des données statistiques qu’il a produites.

D’abord, je conviens que le mot est un peu dur; mais tous ceux qui étaient présents hier à la discussion, savent que ce mot m’a été arraché par des interruptions continuelles. Et maintenant je déclare ne pas avoir dit que M. Smits aurait travesti des données statistiques; mais j’ai dit que deux ministres avaient prouvé, l’un après l’autre, que les données qu’il avait produites étaient des données statistiques travesties. J’ai dit qu’ils avaient prouvé, que M. Smits s’était servi du mot « pièces, » afin de comprendre toute espèce de bétail, le menu bétail, les petits cochons, etc., comme le gros bétail; et qui sait? Peut-être même les pièces et morceaux. (On rit.)

Maintenant, je viens à l’objet en discussion.

J’ai demandé la parole, parce qu’un honorable député du Limbourg m’a fait une interpellation, à la fin de la séance d’hier. Je crois que cette interpellation serait mieux à son adresse, si elle était faite au ministère, au lieu de l’être au rapporteur. Cependant, comme il vient d’insister pour que je donne quelques éclaircissements, je vais essayer de les donner.

Cette interpellation est relative au rayon autour de Maestricht mentionné dans l’article 2 de la loi. L’honorable membre élève des doutes sur l’étendue réelle de ce rayon, et je crois qu’il a raison d’avoir des doutes ; car l’arrêté qui définit ce rayon, ou plutôt qui ne le définit pas, et qui est du 30 janvier 1832, porte :

« Art. 2. Dans l’étendue de 5,500 aunes (mètres) à partir en ligne droite du périmètre du circuit occupé par les troupes ennemies, et qui, par ce fait, se trouvent hors de la juridiction du gouvernement belge, le rayon limitrophe de territoire qui, sous cette juridiction, entoure ou avoisine ce périmètre, est déclaré provisoirement territoire réservé. »

Ainsi le rayon existe à partir en ligne droite du périmètre du circuit, etc. Cette phrase est un peu inintelligible.

Je ne connais que deux espèces de rayons : le rayon kilométrique, qui se trouve dans une place forte, à partir de la tête des glacis (dans ce rayon on ne peut faire aucune excavation ou bâtisse, aucun déblai ou remblai, sans l’autorisation du département de la guerre : et lorsque cette autorisation est accordée, c’est à la condition que l’on remettra les choses dans l’état primitif, dans les deux fois vingt-quatre heures où on aura été requis) ; ensuite, le rayon stratégique et de défense.

Ce rayon, lorsqu’on est réellement en guerre, s’étend indéfiniment, parce que les troupes se portent où elles veulent. Mais, lorsqu’il y a une trêve ou un état de quasi-paix, alors ce rayon doit être limité, mais toujours en vertu d’une convention. C’est ce que l’arrêté de 1832 aurait dû prévoir.

(Addendum inséré au Moniteur belge n°338, du 4 décembre 1835 :) Il aurait donc dû s’en rapporter à la convention qui a dû être faite pour limiter le territoire qui pourrait être occupé par les troupes ennemies, et dans lequel elles pourraient exercer la surveillance nécessaire à la défense de la place.

Je ne sais pas s’il existe une pareille convention qui détermine les limites du rayon défensif autour de Maestricht. Je prie M. le ministre des finances de nous le dire. Ce sera le seul moyen de terminer ce débat.

M. Pirson. - Messieurs, la discussion de la loi qui nous occupe se prolonge d’une manière qui devrait fatiguer les membres de toutes les opinions.

- Plusieurs voix. - Sans doute.

M. Pirson. - Il faudrait tâcher de s’entendre et d’en venir à une solution. Nous discutons maintenant la question de savoir à quelle frontière s’appliqueront les mesures douanières que nous avons votées dans une séance précédente. Des questions de localités ne manqueront pas de se présenter. Je voudrais, pour éviter la perte de temps qu’elles nous occasionneraient, que la chambre décidât que la législation nouvelle sur le bétail s’appliquera à toutes les frontières indistinctement. De cette manière on ne pourra nous reprocher de faire une loi de haine. Ce sera une loi générale pour toute la Belgique. Il y aurait une clause à ajouter. Nous autoriserions le gouvernement à faire l’application de ces mesures aux frontières qu’il jugera convenable. Vous me direz que c’est accorder au gouvernement une grande confiance.

Moins que tout autre je suis disposé à lui donner une trop grande latitude. Mais encore faut-il lui accorder quelque confiance. Il est évident que le gouvernement n’appliquera pas les mesures douanières à la frontière de France. Il ferait une dépense inutile puisqu’il ne nous vient pas de bétail de ce côté-là. Je vais rédiger un amendement dans ce sens.

M. Dubus. - La question relative aux frontières me paraît ne pouvoir être résolue qu’au moyen de certaines explications que pour mon compte je désirerais obtenir de M. le ministre des finances.

Je désirerais savoir quelle facilité la route militaire ouverte en vertu de la convention de Zonhoven donne à la fraude. Je crois que de la frontière hollandaise à Maestricht il y a 7 à 8 lieues, à peu près autant de Maestricht à la frontière prussienne. Il me semble que si nous ne pouvons empêcher les Hollandais de faire circuler sur cette route ce qui leur plaît, le moyen de faire la fraude des bestiaux est tout trouvé. Les bestiaux s’achemineront de Hollande en Prusse et rentreront en Belgique par la frontière de la province de Liége. Je prie M. le ministre des finances de fixer son attention sur ce point et de me donner des renseignements indispensables, selon moi, pour que je me prononce sur l’étendue de la frontière à laquelle s’appliqueront les mesures de répression de la fraude telles que nous les avons votées.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je répondrai à l’honorable M. Dubus que le transit est effectivement libre sur la route dont il a parlé, mais seulement sous le rapport militaire, en ce qui concerne la garnison de Maestricht, en vertu d’une convention dont vous avez eu connaissance ; ainsi le transit, en ce qui concerne la garnison de Maestricht, existe en vertu d’une convention qui nous lie.

Quand nous parlons de la prohibition du transit, il ne peut être question de déroger à une convention politique et militaire, qui doit continuer à nous lier jusqu’à ce que l’état politique de Maestricht soit changé à notre égard.

Quant aux consommateurs mêmes de cette ville, le transit n’est pas libre pour eux. Nous serions donc dans notre droit en prohibant le transit pour les habitants de Maestricht.

M. Dubus. - Je ne suis pas tout à fait satisfait des explications données par M. le ministre des finances.

J’ignore encore si les Hollandais peuvent faire circuler librement du bétail depuis la frontière hollandaise jusqu’à la Prusse, par la route militaire, en traversant Maestricht. S’ils le peuvent, le projet de loi est insuffisant.

Il y a nécessité de comprendre la frontière prussienne dans la partie de la frontière à laquelle seront applicables les mesures répressives.

Je comprends que l’on ne puisse empêcher des bestiaux dans Maestricht ; mais notre gouvernement a-t-il été assez imprévoyant pour s’être mis dans la position de ne pouvoir empêcher les Hollandais d'envoyer des bestiaux vers la Prusse, en traversant la route militaire, et de se créer ainsi un transit auquel nous ne puissions nous opposer?

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je croyais avoir répondu catégoriquement à la demande de l’honorable M. Dubus, en disant qu’en ce qui concerne l’approvisionnement militaire de Maestricht, nous sommes liés par une convention qui a été soumise à la ratification des chambres et qui est la conséquence de la nécessité où nous nous sommes trouvés. Nous sommes liés par cette convention, et à moins de nous mettre en guerre immédiate avec la Hollande, nous ne pouvons nous empêcher d’exécuter les clauses de cette convention en ce qui concerne l’approvisionnement de la garnison de Maestricht. Les marchandises importées par la Hollande et par la Prusse, et destinées à la garnison de Maestricht, peuvent transiter librement par les routes dont on a parlé. Sous tout autre rapport, nous sommes dans la même position que vis-à-vis de la Prusse et de la France, c’est-à-dire libres de faciliter ou d’empêcher le transit. (fin de l’addendum.)

M. le président. - M. Pirson propose l’amendement suivant :

« Je propose d’appliquer à toutes les frontières du royaume le tarif que nous avons décrété. Quant aux mesures spéciales pour empêcher la fraude, je propose de m’en rapporter au gouvernement, qui les appliquera en but ou en partie à telle partie de la frontière qu’il jugera nécessaire. »

M. Pirson. - Il ne pourra être question dans aucun cas d’appliquer les mesures à la frontière de France, puisque nous ne recevons point de bétail de ce côté. Quant à la frontière prussienne, d’après le tarif, le bétail qui nous viendra de ce côté ne paiera guère que 21 fr. par tête. Ma proposition tend donc à diminuer le droit actuel.

Quant à la nécessité de réprimer la fraude, elle est évidente. On dit que l’on ne porte pas un bœuf sur ses épaules comme un ballot de soie. Mais, voici comment la fraude s’opère : un habitant de la frontière qui est d’intelligence avec l’introducteur du bétail étranger, conduit son bétail hors de la frontière. Là les deux troupeaux se mêlent et entrent dans le pays comme si la totalité appartenait au propriétaire belge. Je défie la douane, si nombreuse qu’elle puisse être, de réprimer la fraude avec les moyens actuels qu’elle possède. Il n’y a que le recensement et la marque des bestiaux qui puissent la prévenir.

M. Gendebien. - Je voulais faire remarquer à M. le ministre des finances qu’il n’a pas répondu à la question posée par l’honorable M. Dubus, Cet honorable membre n’a pas seulement demandé si le bétail pouvait circuler en Belgique par la route militaire jusqu’à Maestricht, il a demandé si de Maestricht ce bétail pouvait gagner la frontière de Prusse. La question est très importante dans ses conséquences. Si la Hollande se crée un moyen de transit par Maestricht, il sera nécessaire d’étendre le rayon aux frontières où l’on percevra le droit tel que la loi vient de l’établir.

Puisque j’ai la parole, je prierai M. le ministre des finances de me donner une explication catégorique sur ce que l’on entend par le rayon stratégique de Maestricht.

J’ai entendu l’honorable M. Pollénus discuter la question de savoir s’il était de 1,000 ou de 1,500 toises. Il est convenable que nous sachions à quoi nous en tenir sur l’étendue du rayon pour que les habitants des environs de Maestricht sachent s’ils se trouvent ou non sous le coup de la loi que nous allons voter.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je n’avais pas bien compris la question faite par l’honorable M. Dubus. Je vais tâcher d’y répondre clairement.

L’honorable M. Dubus se dit : Le transit vers la ville de Maestricht est libre de la Hollande par la Meuse. C’est par cette voie que la garnison reçoit ses approvisionnements. Le transit est également libre de la ville de Maestricht en Prusse par la route militaire. Au moyen de ces deux routes, le bétail arrivera par la Hollande à Maestricht, et de là sera transité vers la Prusse par Vaals. De cette manière, la fraude pourra s’opérer en faisant rentrer par la frontière de la province de Liége le bétail ainsi transité.

Comme je l’ai déjà dit, le transit est libre en effet par les deux voies désignées, mais seulement pour le service de la garnison de Maestricht, de sorte que je ne conçois pas trop comment, par une spéculation frauduleuse dont une garnison ne saurait se rendre coupable, l’autorité milliaire pourrait faire transiter le bétail hollandais par le Limbourg, pour le faire rentrer ensuite en Belgique par la province de Liége. Il est évident que si la garnison faisait venir du bétail hollandais et le transitait ensuite vers la Prusse, ce ne pourrait être que par circonstance extraordinaire, dans le cas où les approvisionnements de la garnison seraient trop considérables, ou dans un tout autre cas qui ne se présenterait probablement qu’une fois. Si un pareil manège se représentait plusieurs fois, il est évident que ce ne serait plus le transit comme l’a entendu la convention de Zonhoven.

L’on ne peut toutefois se dissimuler que tout ceci peut amener de graves difficultés. Mais la malheureuse position de Maestricht est telle ; nous ne pouvons empêcher que les choses ainsi. Il faut nous soumettre aux nécessités de cette position.

De ce que, pour un cas spécial, la garnison de Maestricht pourrait exporter du bétail qui serait venu pour sa consommation, on ne peut inférer que les abus du transit deviendraient fréquents. Si cette réexportation se renouvelait souvent, la douane serait dans son droit en empêchant un tel transit. On pourrait le considérer comme un transit de l’espèce de celui prohibé par l’article 8 de la loi en discussion.

L’honorable M. Gendebien m’a adressé une autre question. Il demande que l’on explique catégoriquement ce que c’est que le rayon de Maestricht. D’après le traité du 15 novembre, ce rayon s’étend jusqu’à 1,200 toises du glacis extérieur de la forteresse. En vertu d’une convention militaire postérieurement passée entre le chef d’état-major général de l’armée belge et le général Dibbets, le rayon primitif a été porté à 300 toises plus loin, c’est-à-dire à 1,500 toises, à l’effet d’éviter les conflits qui se renouvelaient entre les douaniers belges et les détachements hollandais. Vous vous rappelez que très souvent à cette époque l’on a signalé ces conflits dans cette enceinte.

Nous considérons donc le rayon stratégique comme ayant une profondeur de quinze cents toises à partir du glacis de Maestricht. Le territoire réservé de la douane est de 5,500 mètres à partir de ce rayon de 1,500 toises. Voilà comment nous entendons le rayon réservé autour de Maestricht.

M. Gendebien. - M. le ministre des finances vient de dire que le transit était permis à travers la route militaire, mais seulement pour l’approvisionnement de la place de Maestricht. Il a ajouté qu’il n’était pas supposable que la garnison de cette ville se prêtât à la fraude du bétail.

Mais, messieurs, il est évident que, sous prétexte d’approvisionner Maestricht, on fera transiter du bétail hollandais pour le faire entrer par la Prusse. Que nos honorables collègues se rappellent la discussion qui à eu lieu dans cette enceinte à l’occasion du traité de Zonhoven. Je vous disais que le traité était sans force, puisqu’il n’empêchait pas les Hollandais d’introduire dans la place de Maestricht autant d’hommes et de marchandises qu’ils le voudraient.

A cette époque on n’écouta pas mes prédictions. Elles se sont réalisées. Aujourd’hui vous êtes obligés de souffrir ce que vous n’avez pas voulu éviter il y a trois ans. Des difficultés se présenteront, dit M. le ministre. Mais s’il passait par la route militaire une quantité trop considérable de bétail, on verrait bien qu’elle n’est pas destinée à l’alimentation de Maestricht.

Mais de quelle manière résoudra-t-on ces difficultés ? Je ne vois que les baïonnettes, et je ne pense pas que vous ayez recours aux baïonnettes pour réprimer la fraude. Il me semble que vous ferez mieux, et la prudence le conseille, de suivre mon avis, c’est de considérer dès ce moment la route militaire comme ouverte au transit, et de prendre des mesures de précaution en conséquence, jusqu’à ce que nous ayons cessé d’éprouver les craintes qui ont fait adopter à la chambre la convention de Zonhoven.

Quant à l’étendue du rayon, je me demande pourquoi le gouvernement qui s’est cru obligé, comme il l’était en effet, de nous soumettre le traité de Zonhoven, a cru pouvoir, sans nous consulter, déroger aux clauses de ce traité. Le nouveau rayon de 1,500 toises existe de fait. Mais en droit il n’est que de 1,200 toises. Cette extension de 300 toises a été illégalement faite.

Je prie M. le ministre des finances de vouloir bien peser mes réflexions et de se convaincre de l’impossibilité qu’il y aura d’établir une distinction entre le bétail destiné à l’approvisionnement de la garnison de Maestricht et le bétail transité vers la Prusse pour rester dans notre pays.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je regrette de prendre aussi souvent la parole dans une discussion qui s’est déjà trop prolongée. Mais je crois que les explications que je vais donner contribueront à éclairer la discussion.

Le territoire réservé de Maestricht a été porté à 1,500 toises pour mettre fin aux conflits fâcheux dont il était le théâtre. Mais je dois faire connaître que les habitants du rayon de Maestricht, considérés comme Belges, paient les impôts et jouissent de tous les avantages attachés à la qualité de Belge. Les difficultés principales que la douane rencontre dans son service autour de Maestricht proviennent de la sollicitude du gouvernement pour les habitants du rayon stratégique.

En effet, si on les considérait comme étrangers, la fraude des céréales cesserait dès ce moment. On ne vendrait plus aucune espèce de céréales arrivées en transit à Maestricht. La douane dirait aux habitants qui voudraient introduire des grains hors du rayon : Vous êtes étrangers. Payez les droits auxquels sont soumises les céréales étrangères. C’est parce qu’on traite les habitants du rayon avec toute la sollicitude possible que tant de difficultés s’élèvent dans le service de la douane.

Vous voyez, d’après les observations mêmes de l’honorable M. Gendebien, qu’il est nécessaire d’appliquer aux environs de Maestricht toutes les mesures possibles contre la facilité de la fraude, et que, loin d’excepter le rayon de Maestricht des mesures répressives que nous demandons pour la frontière de la Hollande, il faudrait plutôt appliquer à ce rayon une législation particulière que réclament les obstacles que nous avons à vaincre dans cette partie du royaume pour la répression de la fraude.

Je l’ai dit dans la séance d’hier, la Meuse offre une communication très facile entre la Hollande et Maestricht. Si l’on ne donne pas au gouvernement les moyens de répression qu’il demande, ce fleuve sera la voie par laquelle la fraude du bétail s’effectuera sans obstacle. Il y a donc une raison toute spéciale pour étendre au rayon de Maestricht les mesures répressives que nous avons proposées.

A la vérité, l’honorable M. Simons, dans son amendement, avait laissé au gouvernement la faculté de comprendre le rayon de Maestricht dans la législation douanière que nous demandons, dès qu’il le jugerait nécessaire.

Convaincu que je suis que cette nécessité se fera bientôt sentir, je demande que la loi elle-même mette d’une manière positive le rayon stratégique dans la même position vis-à-vis de la douane que les frontières du Nord. Alors même que la nécessité de mesures répressives serait constatée, si c’est au gouvernement à les établir, il serait en butte à des sollicitations de toute espèce qui tendraient à le détourner de sa résolution.

Nous préférons que ce soit la législature elle-même qui stipule que les mesures répressives seront étendues au rayon dont il s’agit.

Nous ne réclamons pas le pouvoir facultatif que l’on veut nous donner ; nous demandons que la législature décide d’une manière explicite que le rayon autour de Maestricht sera compris dans la nouvelle législation douanière, dont nous discutons l’adoption.

M. Pollénus. - Je n’aurais pas pris la parole si un autre membre avait fait des observations sur l’amendement de M. Pirson. Mais personne n’a encore dit un mot sur cet amendement ; et pour réfuter les considérations qu’il a fait valoir, je m’empresse de m’emparer d’une observation faite par M. le ministre des finances.

Le ministre des finances repousse l’amendement de M. Pirson parce qu’il n’aime pas, dit-il, qu’on donne de la latitude au gouvernement ; il préfère une prescription formelle dans la loi afin d’être à l’abri des sollicitations dont on ne manquerait pas de l’accabler. Eh bien, ce qui est vrai pour le rayon autour de Maestricht sera plus vrai encore pour les frontières des pays qui nous avoisinent. Si le ministre craint les sollicitations des habitants du rayon autour de Maestricht, ne doit-il pas craindre davantage les notes diplomatiques des gouvernements voisins ? Et je crois qu’en matière douanière, il faut que le gouvernement ait une règle tracée ; il ne faut pas, quand la législature a été appelée à examiner la question d’utilité de l’application d’un tarif sur telle ou telle frontière, que la chambre se dépouille de son droit de poser des règles pour s’en rapporter au ministre.

Vous avez vu d’ailleurs que sur diverses questions importantes la question d’utilité a été résolue différemment par le gouvernement et les membres de la chambre.

J’ai entendu avec plaisir ce qu’a dit M. le ministre du changement apporté au rayon de Maestricht. Ceci est conforme jusqu’à certain point aux renseignements que j’avais eu l’honneur de soumettre précédemment à la chambre.

Mais ce n’est rien, dit-on, que d’étendre un rayon et de soumettre les habitants à un régime exceptionnel. Les droits du gouvernement ne sont pas compromis, la souveraineté est la même. Etrange idée ! La souveraineté ne réside-t-elle pas dans le droit de protection que vous devez aux citoyens, et quand une force armée étrangère a seule le droit de parcourir ce rayon et se charge de protéger les citoyens qui l’habitent, la souveraineté existe-t-elle encore ? Pour moi, je n’en vois plus l’ombre.

Quand on établit un régime exceptionnel, il faut que la loi soit claire ; je ne veux pas qu’un doute expose nos concitoyens à des procès qui, en matière fiscale, sont toujours vexatoires ou apparaissent comme tels. Ce qu’a dit au commencement de la séance le rapporteur de la section centrale, qu’il n’y avait pas moyen de comprendre ce qu’on entend par rayon autour de Maestricht, démontre la nécessité de changer à cet égard le texte de la loi.

Si l’autorité militaire peut étendre le rayon, comme déjà elle l’a fait, de l’aveu du ministre, en le portant de 1,200 à 1,500 toises, comme ce n’est qu’à partir du rayon stratégique qu’on commence à compter le rayon douanier, les habitants seront fort embarrassés pour savoir s’ils sont ou non dans ce rayon.

Je serai obligé de refuser mon vote au projet, parce qu’en matière fiscale, je ne puis consacrer une disposition soulevant des doutes, qui exposent mes concitoyens à de nombreuses vexations.

M. Schaetzen. - Je viens appuyer, messieurs, l’amendement présente par M. Simons ; il tend à ne pas rendre applicables à l’arrondissement de Maestricht les mesures proposées par le gouvernement pour empêcher l’introduction scandaleuse du bétail, et à suspendre l’exécution des mêmes mesures à l’égard du rayon militaire autour de Maestricht jusqu’à ce que le gouvernement ait reconnu la nécessité de l’application de ces mesures audit rayon.

Quant au premier point, les mesures proposées ne constituent dans l’arrondissement de Maestricht qu’une vexation d’autant plus odieuse qu’elle est complètement inutile ; il est reconnu qu’il n’entre point de bétail gras par la frontière de Prusse dans cet arrondissement ; cette frontière est beaucoup trop éloignée de la Hollande pour que le bétail gras de ce pays puisse de ce côté pénétrer en Belgique ; il faudrait pour cela qu’il fît un détour de plus de quarante lieues et qu’il transite par la Prusse : or, pour faire pareil voyage, il faudrait employer quinze jours, et alors il ne serait encore rendu qu’à la limite du royaume ; il faudrait en outre qu’il payât le droit de transit en Prusse, et tous ces faux frais absorberaient le bénéfice que pourrait présenter la fraude.

J’ai dit que les mesures proposées sont inutiles dans l’arrondissement dont je parle ; qu’elles seront un contresens elles empêcheront l’introduction en Prusse d’une quantité considérable de porcs que lui envoient, par cet arrondissement, la Hesbaye, une partie du Brabant et de la province de Namur ; tout le monde sait que les troupeaux de cette espèce de bétail qui, de ces différentes contrées, se rendent toutes les semaines au marché de Tongres, passent la Meuse dans les environs de Maestricht et sont introduits clandestinement en Prusse.

Si maintenant cette espèce de bétail ne peut plus circuler dans le territoire réservé qu’accompagné de documents et après qu’on aura rempli des formalités minutieuses et multipliées, l’introduction en Prusse sera impossible, et dans une loi éminemment protectrice de l’agriculture, on fera à cette branche si intéressante de la prospérité publique un tort notable et qui provoquera immédiatement les réclamations des cultivateurs.

Vous vous rappelez, messieurs, que le 28 juillet de l’année dernière, vous avez porté une loi qui exempte le bétail de tout droit à la sortie ; cette loi est fondée sur ce qu’il faut faciliter l'introduction de notre bétail dans les pays voisins ; et aujourd’hui, en ce qui concerne l’arrondissement de Maestricht, où les mesures dont il s’agit sont inutiles, on vous propose l’inverse, on veut vous faire faire un pas rétrograde ; on veut rendre l’exportation impossible.

Pour ce qui est du rayon militaire autour de Maestricht, je sais, messieurs, que la fraude s’y fait d’une manière vraiment déplorable pour notre industrie, et lorsque M. le ministre des finances nous présentera le projet de loi qu’il nous a promis et qui doit renforcer l’action de la douane, j’appuierai de toutes mes forces les dispositions qui seront propres à empêcher le mal qui nous vient de ce côté.

Mais, messieurs, cette fraude contre laquelle on se récrie avec raison ne porte point sur la matière de la loi en discussion ; il est au contraire démontré que tout le bétail qui est consommé à Maestricht, tant par la garnison que par les habitants, vient de la Belgique, et que sous ce rapport il y a bénéfice notable pour nos cultivateurs.

Si maintenant, à cause des formalités sans nombre que l’on propose, on rend difficile l’introduction du bétail à Maestricht, n’est-il pas à craindre que le gouvernement hollandais fera conduire à Maestricht, par la route qui lui est réservée dans le traité de Zonhoven, le bétail nécessaire à la consommation des habitants et de la garnison ? n’est-il pas même à craindre que l’on ne se bornera pas là, mais que l’on fera de Maestricht un entrepôt d’où l’on répandra en Belgique le bétail que l’on aura en surabondance, comme il est maintenant un entrepôt pour les céréales et le sel ?

Vous voyez donc qu’ici encore on se trompe en fait, et que ce qu’en l’absence de bons renseignements que M. le ministre des finances a pu vous proposer d’appliquer immédiatement la loi en discussion au rayon militaire de Maestricht.

Toutefois il est prudent de prévoir le cas où l’état actuel des choses viendrait à changer dans ce rayon, et ce cas est prévu dans la dernière partie de l’amendement de mon honorable ami ; il laisse au gouvernement la faculté d’appliquer au rayon militaire non seulement les mesures proposées pour le territoire réservé, mais encore toute autre mesure que l’administration croirait utile de prendre dans l’intérêt de notre agriculture ; avec une pareille latitude, et en considérant que le projet en discussion est l’ouvrage du gouvernement, qu’ainsi il tiendra fortement la main à son exécution, tout le monde doit avoir ses apaisements, et il n’y a plus le moindre inconvénient à adopter l’amendement qui vous est proposé.


M. le président. - Je vais mettre aux voix les amendements qui se rapportent à l’étendue de la frontière.

Ce sont ceux de MM. Pirson, Longrée, Simons et Zoude, et celui de la commission.

M. Zoude. - Je me rallie a l’amendement de l’honorable M. Pirson.


M. le président. - Je vais mettre d’abord aux voix l’amendement de M. Pirson, qui étend à toutes les frontières du royaume le tarif décrété par la chambre.

- Cet amendement est mis aux voix. Il n’est pas adopté.


M. le président. - Reste l’amendement de la commission, celui de M. Simons et celui de M. de Longrée. Auquel de ces amendements veut-on donner la priorité ?

Voici l’amendement de la commission :

« Art. 2. Par dérogation à la loi général du 26 août 1822, n°38, en ce qui concerne le territoire compris dans le rayon des douanes déterminé par la loi du 7 juin 1832, n°443, tout fermier ou habitant, propriétaire, détenteur ou possesseur de chevaux, poulains ou de bestiaux dénommés au tarif qui précède, dans l’étendue du rayon des douanes de la province du Limbourg, y compris le rayon autour de Maestricht, de la province d’Anvers, de celle de la Flandre orientale, de la partie septentrionale de la Flandre occidentale, de la province de Liége et enfin de la province du Luxembourg, jusqu’à Schengen, est tenu de déclarer, etc. »

Voici l’amendement de M. Simons :

« J’ai l’honneur de proposer la suppression de la particule de près les mots : « dans l’étendue des douanes, » et d’y substituer les mots suivants : « de l’arrondissement de Hasselt et de Ruremonde. »

« Je demande encore la suppression des mots : « y compris le rayon autour de Maestricht. »

M. de Longrée propose d’ajouter après le mot « Limbourg, » ceux-ci : « vers la Hollande. »


M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Il faut donner la priorité à l’amendement de la commission ; s’il est adopté, les autres tombent. (Appuyé ! appuyé !)

- L’amendement de la commission est mis aux voix.

Après deux épreuves douteuses, on procède au vote par appel nominal.

En voici le résultat :

64 membres prennent part au vote.

3 membres s’abstiennent.

33 membres répondent oui.

31 membres répondent non.

En conséquence l’amendement de la commission en ce qui concerne l’étendue des frontières est adopté.

Ont répondu oui : MM. Andries, Bekaert, Berger, Cols, de Meer de Moorsel, F. de Mérode de Muelenaere, de Nef. de Roo, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, Doignon, Dubus, Heptia, Hye-Hoys, Jadot, Jullien, Keppenne, Kervyn, Lejeune, Mast de Vries, Milcamps, Morel-Danheel, Pirson, Thienpont, Vandenbossche, Vanderbelen, Vergauwen, C. Vuylsteke, L. Vuylsteke, Wallaert et Zoude.

Ont répondu non : MM. Beerenbroeck, Bosquet, Corbisier, Cornet de Grez, de Behr, Dechamps, de Longrée, W. de Mérode, Demonceau, Dequesne, de Renesse, de Sécus, Desmanet de Biesme, Devaux, Fallon, Gendebien, Lardinois, Legrelle, Pirmez, Pollénus, Quirini, Raymaeckers, Schaetzen, Scheyven, Seron, Simons, Trentesaux, Ullens, Vandenhove, Verdussen et Raikem.

M. le président. - La parole est à M. le ministre des finances et à MM. Dubus et A. Rodenbach, pour exposer les motifs de leur abstention.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Dans tout le cours de la discussion vous avez pu remarquer, et je l’ai répété à plusieurs reprises, que mon opinion était que nous ne devions pas augmenter les droits sur le bétail à l’égard des introductions par la Prusse. L’honorable M. Berger a présenté hier des calculs desquels il résulterait qu’en adoptant la disposition pour la frontière prussienne, nous aurions uniformité de droit sur toutes nos frontières, sans augmenter les droits à l’égard de la Prusse : et en effet, l’honorable membre appuyé sur ses connaissances dans la matière ; et il vous a démontré que rarement les animaux les plus pesants, introduits par la Prusse, dépassaient le poids de 300 kilogrammes, attendu que presque toujours le bétail de Prusse nous venait maigre. Cependant je n’ai pas pu me prononcer sur la question, parce que je n’ai pas pu me convaincre que réellement nous n’augmentions pas les droits à l’égard de cette puissance ; et voila pourquoi je me suis abstenu.

M. Dubus, aîné. - Je me suis abstenu, parce que je n’ai pas assisté à la discussion qui a eu lieu hier, et parce que celle qui a eu lieu aujourd’hui ne m’a pas fourni des renseignements suffisants pour que je puisse avoir la certitude que la loi serait efficace, si on ne l’étendait pas autant que la commission avait proposé de l’étendre. D’un autre côté, je me suis souvenu que la chambre avait pris en considération que la loi ne s’appliquerait pas à la frontière prussienne ; et, au milieu de ces divergences d’opinion, je n’ai pu prendre de résolution.

M. A. Rodenbach. - Je me suis abstenu de voter par les motifs que vient d’exposer M. Dubus.


M. le président. - Il y a encore l’amendement de M. Simons.

M. Simons. - La commission a voulu comprendre dans la mesure le rayon autour de Maestricht ; alors mon amendement devient inutile.


M. le président. - Nous allons passer aux mesures d’exécution : MM. Pirson et Vandenbossche ont demandé la suppression des dernières lignes de l’article 2.

M. Jullien. - Messieurs, après huit ou dix grands jours de discussion, nous sommes enfin parvenus à voter l’article premier de la loi ; et encore cet article présente-il cette singularité qu’après avoir adopté en principe la perception du droit au poids, il a été résolu que l’agneau paierait un franc d’entrée, tandis que le veau ne paierait que cinquante centimes ! (On rit.) Quoi qu’il en soit, nous voici arrivés à quelque chose de positif ; et il ne s’agit plus de théories statistiques, d’idées spéculatives sur l’économie sociale.

Cependant je prierai la chambre, malgré la fatigue qu’elle doit éprouver d’une aussi longue discussion, de vouloir bien considérer que les moyens d’exécution touchent à de graves intérêts. Si on adoptait le luxe de fiscalité répandu dans ces moyens d’exécution on mettrait en interdit le tiers de la population du royaume ; car il a été démontré que les frontière du pays ayant deux lieues de profondeur équivalent à peu près au tiers de la population ; toutefois il faut examiner les moyens d’exécution que vous voulez confier au gouvernement pour que la loi soit efficace ; car si vous voulez que la loi soit exécutée, il est nécessaire de lui donner les moyens d’obtenir cette exécution.

Dans cet examen on devra avoir pour but de léser le moins possible les habitants. Par deux amendements on a demande la suppression du dernier paragraphe de l’article 2 ainsi conçu :

« Ainsi que l’endroit de la commune où il s’engage à représenter, lorsqu’il en sera requis par les agents de l’administration. Ceux de ces animaux qui ne seraient pas dans ses écuries ou dans ses étables. »

Je ne puis adopter cette suppression, par la raison que si l’on supprimait la dernière partie de l’article 2, il serait impossible au gouvernement de faire dresser les inventaires qui sont prescrits pour reconnaître le bétail.

Je prie la chambre de faire attention que d’après cet article 2 il s’agit pour les habitants du rayon, ainsi que pour les cultivateurs, de déterminer les obligations relatives à la déclaration qu’ils doivent faire de la quantité de bétail qu’ils entretiennent ou qu’ils nourrissent ; une fois cette obligation déterminée, il est naturel que le gouvernement songe aux moyens de faire l’inventaire des bestiaux déclarés ; il faut donc bien que celui qui a fait la déclaration indique au gouvernement l’endroit où l’inventaire se fera et où l’on prendra le signalement des bestiaux ; car, si vous supprimez la dernière partie de l’article, et que cependant vous ordonniez qu’il sera fait un inventaire avec signalement, je vous demande si vous n’obligez pas, par suite de la suppression, le cultivateur à conduire tous ses bestiaux au bureau du fisc ?

Il faut donc que cette partie de l’article soit examinée ; mais je proposerai un sous-amendement sur lequel j’appelle l’attention du ministre des finances. Je crois qu’il est facile d’accorder ce que je demanderai dans l’intérêt des cultivateurs avec ce qui est utile à l’administration.

Il est dit dans l’article 2 : « ainsi que l’endroit de la commune où il s’engage à représenter les bestiaux... » Ceux qui sont les auteurs de cette rédaction ont pensé peut-être que les cultivateurs avaient toujours dans la commune de leur résidence leurs pâturages ; mais cela n’est pas toujours exact. Dans la Flandre occidentale, par exemple, tel cultivateur qui fait un grand nombre d’élèves n’a pas ses pâturages près de son habitation ; il ne les a pas même dans la commune où il habite ; il est obligé le plus souvent de louer des pâturages à une lieue et quelquefois jusqu’à deux lieues de sa commune.

On envoie les bestiaux dans ces pâturages pendant toute la saison des herbes, et on les envoie quelquefois chez les distillateurs ; eh bien, si vous obligez ces cultivateurs d’amener leur bétail dans tel endroit de leur commune, vous leur imposerez une tâche considérable, vous leur imposerez une peine des plus rudes, car il leur serait extraordinairement pénible et coûteux de faire faire deux lieues au bétail à chaque réclamation d’un employé.

En supprimant le mot « la commune » et en indiquant l’endroit où l’inventaire pourra se faire, voilà tout ce qui suffit à l’administration.

C’est dans le lieu des pâturages que l’inventaire doit se faire, et que l’employé doit se rendre. Vous savez qu’il y a des espèces d’animaux faciles à conduire ; mais il n’y a rien de plus rétif, de plus capricieux que le jeune bétail. Si vous imposez l’obligation de le conduire et de le reconduire à deux lieues, vous ferez éprouver une perte considérable au cultivateur ; c’est comme si vous établissiez un impôt sur lui, car vous savez que sa fortune est dans son temps, est dans son travail.

Je demande que l’on supprime seulement le mot « la commune, » et qu’on lise : « ainsi que l’endroit où il s’engage à représenter, lorsqu’il en sera requis par les agents de l’administration, ceux de ces animaux qui ne seraient pas dans ses écuries ou dans ses étables. »

M. Pirson. - Je ne sais pas les motifs pour lesquels l’honorable M. Vandenbossche demande la suppression de la dernière partie de l’article 2. Je l’ai demandée, parce que cette partie de l’article est inutile, et que les articles 3 et 4 y suppléent complètement.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - La dernière partie de l’article est nécessaire, ainsi que l’a déjà démontré M. Jullien, parce qu’elle n’est pas destinée à l’usage que lui assigne l’honorable M. Pirson.

Effectivement, lorsqu’il s’agit de dresser l’inventaire, le bétail doit être présenté par le propriétaire ; il faut réunir tout le bétail pour en prendre le signalement et en faire le recensement. Une fois le recensement opéré, tout n’est cependant pas fini ; les employés, lorsqu’ils soupçonnent qu’il peut y avoir fraude, doivent se rendre chez le propriétaire, et vérifier s’il peut représenter tous les bestiaux inventoriés.

Il faut bien laisser à l’administration le droit de se faire indiquer le lieu où s’effectuera cette vérification ; sans cela l’assujetti pourrait designer 25 endroits de la frontière où il prétendrait que son bétail est disséminé. Pendant que les employés iraient d’un endroit à un autre, on pourrait aisément les subtiliser et éluder leur opération. Il ne suffit donc pas que le bétail soit déclaré, il faut encore qu’il soit réuni sur un seul point, afin qu’il en soit dressé inventaire. L’administration d’ailleurs doit être mise en mesure de vérifier si l’inventaire est exact, ce qui nécessite la désignation d’un lieu déterminé pour cette opération.

Les observations de l’honorable M. Jullien me paraissent fondées. Cependant je crois que la rédaction de l’article ne peut donner lieu à aucun inconvénient si l’on ajoute les mots : « dans la commune, » après ceux-ci : « le nombre de bestiaux mentionnés au tarif de l’article précédent, qu’il entretient ou nourrit. »

Comme l’a dit très judicieusement l’honorable M. Jullien, le bétail n’est pas toujours nourri dans la commune où demeure son propriétaire ; il est nourri une partie de l’année dans des localités souvent éloignées de cette commune, et il y passe toute la saison des pâturages ; il y aurait donc de grands inconvénients pour le propriétaire à ce qu’il fût obligé de réunir son bétail chaque fois que l’inventaire devrait être vérifié. D’un autre côté, il ne faut pas lui laisser la faculté de déclarer dans une commune du bétail qui serait dans des pâturages à dix lieues de là ; car comment voulez-vous que les employés qui ne peuvent sortir de la partie du rayon qui leur est assignée aillent vérifier l’exactitude de la déclaration ?

D’après l’amendement que je propose, le propriétaire déclarera son bétail dans la commune où celui-ci se trouvera réellement ; ainsi l’exactitude des inventaires pourra toujours être constatée. En déclarant ses bestiaux dans la commune où ils sont en pâturage, il ne sera plus obligé de les réunir pour la vérification de l’inventaire ; il aura la faculté de les déclarer dans 2 ou 3 communes.

M. Jullien trouvera sans doute que mon amendement n’est pas contraire à son opinion. Pour moi, je le préférerais au sien parce que, d’après ce qu’il propose, le propriétaire pourrait indiquer des endroits éloignés où le bétail serait soi-disant en pâturage.

Ainsi l’amendement que je propose consiste simplement à ajouter les mots : « dans la commune, » après ceux : « le nombre de bestiaux mentionnés au tarif de précédent, qu’il entretient et qu’il nourrit. »

M. Vandenbossche. - J’ai demandé la suppression de la fin de l’article, parce qu’une fois l’inventaire fait, il n’y a aucun intérêt qui doive porter à vérifier si le bétail est ou non chez le propriétaire. C’est une disposition incommode pour le propriétaire, et qui n’est nullement profitable pour prévenir la fraude.

M. Jullien. - Messieurs, je n’ai pas été compris par l’honorable M. Pirson ; et s’il en est de même de la part d’autres membres, il est impossible qu’ils votent sur mon amendement, avec connaissance de cause.

Voici ce qui se passe : Le gouvernement demande l’autorisation pour les employés d’exercer, quand ils le jugeront convenable, les étables et les dépendances des exploitations, pour vérifier si le bétail inventorié s’y trouve. Eh bien, dans la Flandre occidentale, le cultivateur ne nourrit pas ses bestiaux dans sa commune, il les envoie dans des pâturages situés à une lieue, 2 lieues de son exploitation, quelquefois davantage.

Dans cette position, j’ai fait observer quel grand inconvénient il y aurait à ce que les cultivateurs, chaque fois qu’ils seraient requis de représenter leur bétail, fussent obligés de faire deux lieues pour aller chercher leur bétail dans les pâturages, afin que les employés le vérifient et le reconnaissent. Ce serait une corvée pénible pour les cultivateurs : pourvu qu’on ait de cela la moindre idée, on doit en être convaincu.

J’avais donc proposé d’obliger seulement le cultivateur à déclarer en quels lieux se trouvait dispersé son bétail. Dans ce cas, c’était l’employé et non le cultivateur qui devait se déplacer. Car il faut bien se pénétrer de cette vérité que les contribuables ne sont pas faits pour les agents du fisc, mais les agents du fisc pour les contribuables.

Le vœu de mon amendement était d’éviter aux cultivateurs de trop fréquents déplacements.

M. le ministre des finances en a senti la justice. Car il propose que la déclaration se fasse dans chaque commune où le cultivateur possédera un pâturage. Si M. le ministre croit que l’ordre du travail des employés exige ce mode de déclaration, je ne m’y opposerai pas. Mais je ferai remarquer que si le cultivateur, après avoir fait sa déclaration dans deux communes différentes, croit avoir besoin de faire rentrer dans son étable une partie du bétail qui se trouve au-dehors, il peut résulter des inconvénients de la nécessité de faire de nouvelles déclarations.

M. le ministre des finances me fait remarquer qu’au moyen de l’acquit à caution ou d’une déclaration dans la commune d’où il fera revenir son bétail, il pourra le faire rentrer chez lui.

Si ce mode de déclaration peut être organisé dans les moyens d’exécution de manière à ne pas être une obligation trop pesante pour le cultivateur, je consens à me rallier à la proposition de M. le ministre. Il faudra toujours que l’on trouve dans cette disposition des moyens tels que le cultivateur ne soit pas vexé par l’exercice des employés.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je veux démontrer en deux mots à la chambre que le seul inconvénient que craigne l’honorable M. Jullien, ne se présentera pas.

Le propriétaire qui a du bétail dans deux communes, fera deux déclarations. Comme d’après l’article, le bétail pourra circuler d’une commune dans une autre au moyen d’un extrait pourvu qu’il soit marqué, il suffira de ce moyen pour que le déclarant puisse ramener son bétail chez lui, chaque fois qu’il le jugera nécessaire.

L’extrait d’inventaire apportera une légère modification à la consistance de l’inventaire. C’en sera une nouvelle page. Vous verrez, quand nous discuterons l’article 3, qu’il y aura 3 moyens de justifier l’existence du bétail.

Je dois rendre ici hommage à l’idée de l’honorable M. Andries. Les mesures d’exécution mentionnées à l’article 3 se trouveront, comme vous le verrez, singulièrement simplifiées par les moyens qu’il a indiqués pour faciliter la circulation des bestiaux dans le rayon.

M. Pirson. - Par suite des explications qui viennent d’être données, je déclare me rallier au changement proposé par M. le ministre des finances.

M. Jullien et M. Vandenbossche retirent leurs amendements et déclarent se rallier à celui de M. le ministre des finances.


M. C. Vuylsteke. - Il me semble que c’est le moment de discuter l’amendement que j’ai présenté à l’article 2.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - L’amendement de l’honorable M. Vuylsteke consiste à restreindre à 5,000 mètres la profondeur du rayon dans lequel seront applicables les mesures de répression que nous vous demandons d’adopter.

Peu de mots suffiront pour combattre cet amendement. Il y a dans la chambre deux opinions sur l’étendue du rayon de la douane. Les uns trouvent le rayon actuel suffisant pourvu que le personnel de la douane soit nombreux et compacté. L’autre opinion qui a beaucoup de partisans, que le rayon actuel de la douane est trop restreint, et qu’il devrait être porté, comme avant la loi de 1832, jusqu’à 4 lieues de la frontière. L’amendement de l’honorable M. Vuylsteke ne peut être adopté, puisque dans toutes les opinions qui se sont manifestées dans cette chambre, il n’y en a pas une qui ait trouvé que le territoire réservé de la douane soit trop étendu.

L’honorable auteur de l’amendement s’est appuyé sur la loi française qui règle la matière. Il a dit que le rayon de surveillance de la douane française, en ce qui concerne le bétail, était restreint à 2,500 mètres.

Si l’on veut consulter la loi française, on verra qu’elle prescrit de nombreuses formalités, et qu’elle n’admet point les moyens plus faciles de justification que nous établissons en faveur des habitants du territoire réservé.

En France les bestiaux ne peuvent circuler dans le rayon de la douane qu’accompagnés d’un acquit à caution, dont la durée expire au coucher du soleil. Le propriétaire qui veut mener son bétail dans les pâturages du territoire réservé, doit prendre un acquit à caution au bureau de la ligne et le reproduire au retour au même bureau.

L’honorable M. Vuylsteke ne peut donc étayer son amendement de l’exemple de la loi française, puisqu’il le présente dégagé de toutes les mesures rigoureuses qu’elle consacre. Il est d’autres considérations à faire valoir contre cet amendement. Les limites de la douane, en France, s’étendent jusqu’à 5 lieues dans l’intérieur des terres. Il est même des routes où son action s’exerce beaucoup plus loin. Les choses ne sont pas de même chez nous.

Il n’y a donc aucune raison pour diminuer dans notre pays, pour le cas spécial qui nous occupe, le rayon déjà si restreint de notre douane.

- L’amendement de M. Vuylsteke est mis aux voix. Il n’est pas adopté.


L’ensemble de l’article 2 est mis aux voix et adopté.

La séance est levée à 4 heures et demie.