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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 30 décembre 1834

(Moniteur belge n°365, du 31 décembre 1834, Moniteur belge n°1, du 1er janvier 1835 et Moniteur belge n°2, du 2 janvier 1835)

(Moniteur belge n°365, du 31 décembre 1834)

(Présidence de M. Raikem.)

La séance est ouverte à midi un quart.

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. H. Dellafaille procède à l’appel nominal.

M. Brixhe donne lecture du procès-verbal de la séance précédente, qui est adopté. Il fait ensuite connaître l’objet des pétitions suivantes.

Pièces adressées à la chambre

« Un grand nombre d’habitants de Calloo réclament une indemnité pour les dégâts causés par les Hollandais dans cette commune. »

« Le sieur Bruot, habitant des cantons de Jodoigne et de Wavre, demande que le siège de l’administration civile et du tribunal de première instance de l’arrondissement soit transféré à Wavre. »


Il est donné lecture d’un message du sénat annonçant l’adoption du projet de loi autorisant un transfert au budget du département de l’intérieur pour les exercices 1833 et 1834.

Il est donné lecture d’un autre message du sénat annonçant l’adoption du projet de loi contenant le budget des voies et moyens pour l’exercice de 1835.

Formation d'une délégation auprès du roi, pour la nouvelle année

M. Verdussen. - Je vois par le Moniteur qu’à l’occasion du 1er janvier, S. M. recevra après-demain à 2 heures. Je désire que la chambre des représentants réponde à cette espèce d’appel. Je propose qu’une députation de dix membres aille avec le président présenter au Roi les félicitations de la chambre.

M. Dumortier. - Je demande que l’on fasse ce que l’on a fait l’an dernier. Je ferai remarquer que peut-être il sera difficile de réunir dix membres de la chambre, au moment où chacun de nous sent le désir de se rendre dans le sein de sa famille. Je pense qu’il faut comme l’an dernier laisser agir les députés qui sont dans la capitale.

M. F. de Mérode. - L’an dernier, la chambre n’était pas réunie à l’époque du nouvel an ; cette année, au contraire, elle se trouve réunie. Il sera donc facile de trouver, sinon 10 membres, au moins 7 membres qui se chargeront de représenter la chambre. (Oui ! oui !)

M. Eloy de Burdinne. - L’honorable comte F. de Mérode a présenté l’observation que je voulais faire. L’an dernier, la chambre était séparée, et néanmoins nous avons eu l’honneur de nous présenter chez S. M. au nombre de 12 ou 13 ; cette année la chambre est réunie ; il n’est donc pas douteux que l’on trouvera aisément, pour former une députation, les 10 membres demandés par l’honorable M. Verdussen. Je voterai pour l’adoption de sa proposition.

M. Dumortier. - Si l’an dernier les membres de la chambre qui se trouvaient à Bruxelles se sont présentés chez le Roi, je ne m’oppose pas à ce qu’il en soit de même cette année. Mais je demande qu’il n’y ait pas de députation tirée par le sort ; car ce serait forcer des membres qui tomberaient au sort à devoir dire qu’ils ne se trouveront pas à Bruxelles ; ce qui vraiment ne serait pas convenable.

- Plusieurs membres. - C’est juste.

M. F. de Mérode. - Il me semble que, pour ne gêner aucun des membres qui ont besoin de s’absenter, il suffirait de décider que les membres présents à Bruxelles s’entendront entre eux pour se réunir et aller ensemble chez S. M. avec notre président, et s’il est absent, avec un président d’âge choisi parmi eux.

M. Raikem. - Comme la chambre paraît se proposer de s’ajourner à quelques jours, je me proposais aussi de retourner chez moi, tellement que je ne pensais pas être à Bruxelles pour le nouvel an. Cependant si la chambre décide qu’une députation de 10 membres avec le président se rendra chez S. M. à l’occasion du nouvel an, je me ferai un devoir de rester à Bruxelles, quoique chacun sente que j’aie le désir de retourner chez moi pendant l’ajournement de la chambre.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Il paraît que les membres qui restent à Bruxelles ont le désir de se rendre après-demain au palais ; il me semble donc qu’on pourrait se borner à prier M. le président de prendre les mesures nécessaires pour que les membres de la chambre présents à Bruxelles s’acquittent de ce qu’ils considèrent comme un devoir, et qu’ils se présentent chez le Roi ; ils désigneraient le plus âge d’entre eux pour offrir leurs hommages à S. M.

M. Dumortier. - Je ne puis passer sous silence les expressions de M. le ministre des affaires étrangères, savoir que « les membres de la chambre s’acquitteraient de ce qu’ils considèrent comme un devoir. » Je regrette d’entendre de telles paroles sortir de la bouche d’un ministre.

Personne assurément ne respecte plus que moi la royauté constitutionnelle ; mais dans un pays où tous les pouvoirs constitutionnels sont égaux d’après la constitution, ces pouvoirs n’ont d’autres devoirs l’un envers l’autre que ceux tracés par la loi. Que les membres de la chambre présents à Bruxelles se rendent chez le Roi, très bien ; mais veuillez considérer que notre président est indisposé, qu’il n’est resté à Bruxelles aujourd’hui que par dévouement pour la chambre, et que véritablement il serait mal de le forcer à rester encore, pour présider une députation de la chambre.

Il faut, messieurs, laisser chacun faire comme il voudra. Si les membres présents à Bruxelles se réunissent pour aller faire une visite à S. M., je le répète, je les approuve. Mais il ne faut pas dire que la chambre des représentants soit forcée d’y aller, que ce soit un devoir pour elle.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Je ne comprends pas cette discussion. Ne suis-je pas d’accord avec l’honorable M. Dumortier ! car qu’ai-je proposé ? Que la chambre s’en remît à M. le président sur les mesures à prendre pour que les membres présents à Bruxelles se rendent ensemble chez S. M.

M. Gendebien. - Il n’y a, messieurs, que deux manières d’aller chez le Roi à l’occasion du 1er janvier : ou que chacun des membres qu le désireront y aillent individuellement, ou qu’il y ait une députation de la chambre désignée par le sort ; mais si vous ne décidez pas qu’il y aura une députation de la chambre, si elle n’est pas tirée au sort, ce ne sera pas au nom de la chambre que les membres présents à Bruxelles se présenteront au Roi, ils iront individuellement, chacun agira suivant ses vues d’intérêt ou de courtoisie ; ils accompliront un devoir, s’ils croient que c’en est un pour eux ; ils pourront aller en masse chez le Roi ; mais, je le répète, ils ne pourront pas y aller au nom de la chambre.

M. F. de Mérode. - Suivant ce système, les membres de la chambre iraient isolément chez le Roi et seraient reçus comme de simples particuliers, au lieu d’être reçus à leur rang, comme cela serait convenable.

Je persiste à penser que les membres présents à Bruxelles doivent être chargés de représenter l’assemblée et doivent se présenter ensemble chez S. M. Ils seront reçus alors comme il convient que soient reçus des membres de la chambre des représentants. Je crois que cette manière de faire sera bien plus convenable que si les représentants allaient chez le Roi comme de simples particuliers.

M. de Nef. - Toute la chambre est, j’en suis persuadé, très bien disposée à se rendre chez S. M. ; je prie donc M. le président de vouloir bien tirer au sort la députation.

M. Desmanet de Biesme. - Ce qu’il y aurait de mieux, serait, ce me semble, de faire comme l’année dernière ; les membres présents à Bruxelles se réuniraient et choisiraient l’un eux qu’ils chargeraient d’offrir leurs félicitations au Roi, non pas au nom de la chambre, mais au nom des membres présents à Bruxelles ; ce serait là la chose la plus simple.

- Plusieurs membres. - Aux voix !

M. le président. - Je vais mettre la question aux voix ; je mettrai d’abord aux voix la question de savoir si la chambre passe à l’ordre du jour.

M. Dumortier. - Je crois que la question ainsi posée ne serait pas bien comprise. Je crois qu’il vaudrait mieux mettre d’abord aux voix la proposition de M. Desmanet de Biesme tendant à ce que l’on fasse cette année comme l’année dernière.

M. Gendebien. - Je ne pense pas que l’on puisse mettre aux voix la proposition de M. Desmanet de Biesme.

M. Desmanet de Biesme. - Je n’ai pas fait de proposition.

M. Gendebien. - D’abord parce qu’il n’a pas fait de proposition, ensuite parce que sa proposition, s’il en avait fait une, serait insolite ; la chambre ne peut pas décider que la chambre fera comme l’an dernier, puisque l’an dernier la chambre n’a rien fait, et que les membres présents à Bruxelles ont été individuellement chez le Roi et non pas au nom de la chambre qu’ils n’avaient pas mission de représenter.

Ce qu’il convient de faire, c’est de mettre aux voix la proposition de M. Verdussen : si elle est rejetée, on pourra faire comme l’année dernière ; si elle est adoptée, une députation de dix membres, ayant à sa tête le président ou un vice-président ira présenter au Roi les hommages de la chambre, si la majorité décide que cela est bien convenable ; pour moi, je n’y attache pas la moindre importance. Je demande que cette proposition soit mise aux voix pour en finir au plus vite.

M. Verdussen. - Je demande que la chambre aille aux voix sur ma proposition. Comme l’a dit l’honorable M. Gendebien, si elle n’est pas adoptée, chacun, suivant qu’il le voudra, ira ou n’ira pas chez S. M. Si elle est adoptée, la chambre aura décidé qu’une députation de 10 membres se présentera après-demain à 2 heures chez S. M. au nom de la chambre. Remarquez, messieurs, que je ne demande pas que la députation soit présidée par le président de la chambre ; elle sera présidée par un vice-président ou par un président d’âge, puisque, comme vous savez, le président d’âge ne meurt jamais. (On rit.)

M. Rogier. - Il me semble que, d’après la déclaration de l’honorable président de la chambre, rien ne peut empêcher de décider qu’une députation se présentera à S. M. au nom de la chambre, puisque M. le président est disposé dans ce cas à retarder son départ : la proposition de présenter au Roi les hommages de la chambre à l’occasion du nouvel an, ainsi que cela pratique dans plusieurs circonstances, n’a rien d’insolite ; si cela ne s’est pas fait l’année dernière, cela s’est fait l’année précédente. Une députation de la chambre a été saluer le Roi avec les autres corps constitués : la cour de cassation, la cour des comptes, la haute cour militaire, la cour d’appel.

Quant à moi, j’appuie la proposition de l’honorable M. Verdussen qu’a déjà appuyée mon ami M. de Nef.

M. Dumortier. - Je ne puis laisser sans réponse ce que vient de dire l’honorable préopinant, que l’on doit présenter les hommages de la chambre au Roi, que c’est un devoir. La chambre doit savoir ce qu’elle se doit à elle-même, comme ce qu’elle doit au chef de l’Etat. La chambre ne doit foi et hommage à personne.

Personne, messieurs, ne respecte plus que moi la royauté constitutionnelle en Belgique ; mais il n’y a aucune similitude entre la royauté établie dans un pays voisin et la royauté qui existe en Belgique. En France, il est écrit dans la charte : « Le roi est le chef suprême de l’Etat. » En Belgique, il est écrit dans la constitution : « Tous les pouvoirs émanent de la nation. » Or, la nation est représentée par les chambres. Je ne comprends donc pas que, lorsque de la nation émanent tous les pouvoirs, la chambre des représentants aille offrir des hommages au Roi et que ce soit un devoir.

On cite l’exemple de la cour de cassation, des cours d’appel et des comptes ; mais ces cours sont d’un ordre tout différent, tandis que la chambre des représentants est un pouvoir égal au pouvoir exécutif. Je respecte le pouvoir royal ; mais nous ne devons pas admettre qu’il soit au-dessus du pouvoir de la chambre des représentants. (Réclamations.) Je dois donc relever cette manière de s’expliquer des ministres auxquels je réponds.

M. Desmanet de Biesme. - C’est avec regret que j’entends parler de constitution à propos d’une simple question de convenances. Quant à moi, je proteste contre ce qu’a dit l’honorable M. Dumortier ; car ce qu’il a dit ne me paraît pas juste. Je crois qu’en parlant de la constitution, il a voulu faire oublier le coup de pied qu’il voulait lui donner dans la séance d’hier. (On rit.)

Quant à moi, je pense qu’une députation de la chambre n’est pas nécessaire, et que simplement les membres présents à Bruxelles pourraient convenir de se réunir pour présenter au Roi, à l’occasion du nouvel an, les souhaits qu’on offre d’ordinaire à cette époque. Après cela, on fera ce qu’on voudra ; cela m’est, je vous assure, fort indifférent.

M. Dumortier. - Je trouve fort étrange que l’honorable préopinant recherche le vote que j’ai émis dans la séance d’hier ; il n’en a pas le droit, ni lui ni aucun autre membre ; il n’en a pas le droit, car le règlement le lui interdit formellement.

Dans la séance d’hier, comme toujours, j’ai voté selon ma conscience ; j’ai exposé les motifs qui me faisaient croire que l’inconstitutionnalité signalée n’existait pas, et on n’y a pas répondu.

Le préopinant n’est pas le censeur de la chambre ; il n’a pas le droit de censurer mon vote ; il n’a pas le droit de dire que j’ai voulu donner un coup de pied à la constitution. Personne n’a le droit de le dire, alors que je défends ici les droits et les pouvoirs de la chambre, tels qu’ils sont établis par la constitution.

Quant au vote que j’ai émis dans la séance d’hier, le préopinant n’a pas, je le répète, le droit de le rechercher ; il n’est pas le censeur de la chambre. Si je devais rechercher les siens, je pourrais y trouver beaucoup à redire.

M. de Brouckere. - Je déclare que j’adopterai la proposition de M. Verdussen par les motifs que M. Dumortier a fait valoir contre cette proposition.

M. Gendebien. - Je le répète : la seule chose à faire est de voter sur la proposition de M. Verdussen, pour décider si la chambre enverra oui ou non une députation au Roi à l’occasion du nouvel an.

Quant à moi mon avis est qu’il n’y a nulle obligation d’envoyer une députation au Roi. Je voterai dans ce sens quand le moment sera venu.

M. Raikem. - Je demande à dire quelques mots sur les observations présentées par M. Dumortier.

Je crois que, quand il s’agit d’une chose d’usage, de compliments du nouvel an, il ne peut pas être question de la constitution. Je pense que c’est une espèce de déférence ; on peut qualifier cette démarche comme l’on voudra ; mais il est évident qu’il ne s’agit que d’une chose d’usage.

J’ai déclaré le premier que j’étais disposé à me conformer à la décision de la chambre si elle déclarait qu’il y a lieu à nommer une députation. Si cela s’était fait chaque année, je serais le premier disposé à rester à Bruxelles ; mais comme l’année dernière il n’y a pas eu de députation de la chambre, peut-être pourrait-on faire de même cette année.

Au reste, je crois devoir écarter toute espèce de question de pouvoirs et je ne vois ici que ce qui est dans les convenances.

M. Dumortier. - S’il ne s’agit que de convenances...

- Plusieurs membres. - La clôture !

M. Raikem. - Comme j’ai répondu à M. Dumortier ; je prie la chambre de le laisser me répliquer.

- Plusieurs membres. - La clôture ! la clôture !

M. Rogier. - Plus de 10 membres demandent la clôture ; elle doit être mise aux voix.

M. Dumortier. - S’il ne s’agit que d’une question de convenances, je ne m’oppose pas à la proposition de M. Verdussen, je suis le premier à l’appuyer. Je ne me suis seulement opposé que d’après les expressions ministérielles qui présentaient cette démarche comme un devoir.

- Plusieurs membres. - La clôture ! la clôture !

- La clôture est mise aux voix et prononcée.


La proposition de M. Verdussen est mise aux voix et adoptée ; en conséquence la chambre décide qu’une députation de onze membres, y compris l’un d’eux pour la présider, se rendra après-demain chez le Roi à l’occasion du nouvel an.

Voici les noms des membres désignés par le sort : MM. Helias d’Huddeghem, Rogier, Liedts Meeus, Rouppe, Duvivier, Smits, Vandenhove, Gendebien, A. Dellafaille et Watlet.

Projet de loi organisant la garde civique

Discussion des articles

M. le président. - La chambre reprend la discussion des articles du projet de loi sur la garde civique.

Titre II. Dispositions communes pour toute la garde civique

Article 14 (nouveau)

(Moniteur belge n°1, du 1er janvier 1835) M. le président. - La discussion est ouverte sur l’amendement présenté par M. le ministre de l’intérieur à l’article 13 ; il est ainsi conçu :

« Nul ne pourra être élu officier s’il ne possède l’une des conditions suivantes :

« 1° Avoir servi dans l’armée comme officier ou sous-officier ;

« 2° Payer, par soi-même ou par ses père et mère, des contributions au moins égales à celles exigées pour être électeur pour la formation du conseil de régence dans la commune à laquelle la garde civique appartient ;

« 3° Etre porté d’office sur la liste des éligibles, par le commandant du corps. »

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - La proposition que j’ai l’honneur de faire n’est pas un paragraphe additionnel à l’article 13. J’ai annoncé hier que c’était un article principal qui s’appliquait à toute la garde civique. Je demande que cet article soit le 14ème.

M. Gendebien. - Messieurs, il me semble que l’article nouveau proposé par M. le ministre de l’intérieur ne doit pas remplacer l’article 14. L’un est relatif aux conditions d’éligibilité, l’autre aux causes de remplacement des officiers.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - L’honorable préopinant est dans l’erreur. Je n’ai pas dit que cet article remplacerait l’article 14, mais j’ai dit que c’était un article nouveau qui précéderait l’article 14.

M. Gendebien. - Je ne pense pas, messieurs, que vous puissiez admettre l’article 10. Il est inconstitutionnel et irrationnel.

J’en admets néanmoins, à la rigueur, la première condition : avoir servi honorablement comme officier ou sous-officier dans l’armée. Cela peut être une garantie de capacité, et ce ne sont que des garanties de capacité que nous pouvons admettre parce qu’elles ressortent de la nature des choses.

Si vous allez au-delà, vous dépassez ce qu’il est en votre pouvoir de faire. Je ne puis admettre le deuxième paragraphe et à plus forte raison le troisième. Par le second paragraphe vous introduisez dans la garde civique une véritable aristocratie, et vous ne le pouvez pas. Quant au troisième, il renferme plus que de l’aristocratie, il est arbitraire d’une manière exorbitante, puisqu’il dépend du chef de corps d’étendre ou de restreindre la liste d’éligibilité des officiers. Est-ce là rendre hommage à la constitution ? Quant à moi, je suis forcé de dire qu’on ne sait comment s’y prendre pour y porter atteinte. Je répète donc que le deuxième et le troisième paragraphe sont inconstitutionnels et irrationnels, et que conséquemment je proteste contre leur adoption, et que j’admettrais tout au plus le premier, parce qu’au moins il présente quelque ombre de raison, parce qu’en stipulant qu’il faut avoir servi honorablement dans l’armée comme officier ou sous-officier, cela suppose quelques connaissances, cela donne quelques garanties.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Messieurs, je pense qu’hier tout le monde était d’accord sur la possibilité d’admettre les conditions d’éligibilité. L’honorable préopinant a raisonné comme si le projet voulait que les trois conditions d’éligibilité dont il est parlé, fussent réunies ; ce n’est pas cela.

Aux observations qu’il a faites sur le paragraphe 2, je répondrai que dans tout le système électoral on suit ces bases. Il faut ou admettre tout le monde au vote ou admettre des conditions d’éligibilité. Ici nous sommes obligés d’établir ces conditions d’éligibilité, car depuis plusieurs années on a réclamé, on a exigé des garanties pour le choix des officiers. Celles-ci sont, je crois, suffisantes.

Quant au n°3, j’ai voulu laisser au commandant de corps une latitude de plus d’étendre le cercle d’élection. Ce n’est pas un inconvénient, car plus il y aura d’éligibilité, plus les gardes auront de latitude pour leur choix. Quant au n°2, cependant, je crois possible de présenter une rédaction plus précise. Je prendrai pour base le cens que nous avons adopté dans la loi communale. Je ferai remarquer que cela introduit une plus grande latitude encore. Le cens dans les villes est aujourd’hui plus élevé qu’il ne l’est dans la loi communale, et il y aura cet avantage que le cens sera déterminé dans la loi même.

M. le président. - Voici l’amendement de M. le ministre de l’intérieur, n°2 :

« Payer par soi-même, ou par son père ou par sa mère, la quotité de contribution ci-après déterminée, suivant la population de la commune à laquelle la garde civique appartient :

« Dans les communes au-dessous de 2,000 habitants : 20.

« De 2,000 à 5,000 : 30.

« De 5000 à 10,000 : 40.

« De 10,000 à 15,000 : 50.

« De 15,000 à 20,000 : 60.

« De 20,000 à 25,000 : 70.

« De 25,000 à 30,000 : 80.

« De 30,000 à 35,000 : 90

« De 35,000 à 40,000 : 100

« De 40,000 à 60,000 : 110.

« De 60,000 et au-dessus : 120. »

M. Rogier. - Messieurs, c’est pour appuyer l’amendement de M. le ministre de l’intérieur que je prends la parole, et pour ajouter quelques mots d’explication qui n’ont pas être donnés hier et qui pourront trouver leur place aujourd’hui.

Hier, j’ai regretté que la nomination sur présentation de 4 candidats par le chef de corps ne pût avoir lieu alors que la garde civique était en activité de service. Je suis encore de cette opinion. Je pense que lorsque la garde civique est en activité, elle est assimilée à l’armée de ligne, et dans ce cas j’aurais voulu que la nomination des officiers eût lieu sur présentation des chefs de corps. Je n’aurais pas voulu que cette exception s’étendît à tout le premier ban de la garde civique alors qu’il est en état de disponibilité, ou simplement mobilisé, ce qui signifie, dans les termes de la législation actuelle, en disponibilité.

Je dois d’autant plus insister sur les explications que je donne en ce moment, que, dans le projet de loi que j’avais présenté l’année dernière, j’avais demandé que la nomination d’officiers eût lieu suivant le mode proposé, quand le premier ban était mis en activité de service. Je pense qu’il est à craindre que, malgré le vote de la chambre, les chefs de corps mis en activité n’en reviennent forcément à ce qui a été déjà fait par quelques-uns d’entre eux qui ont nommé directement certains officiers.

M. Dumortier, rapporteur. - Je ne m’oppose pas à ce que ce paragraphe soit adopté ; mais, d’après une sortie fort singulière qui a eu lieu tout à l’heure, je dois dire que l’article dont il est question est copié sur le projet qu’avait présenté l’honorable M. Rogier. Quant à l’article 13 rejeté hier, je dois dire qu’il avait été admis à l’unanimité dans la commission et on n'avait pas cru en conséquence qu’il pût être taxé d’inconstitutionnel.

J’appuie très volontiers les conditions d’éligibilité, je ne les regarde pas comme inconstitutionnelles ; mais je me demande comment ceux qui ont traité l’article 13 d’inconstitutionnel peuvent admettre les conditions d’éligibilité ? C’est toujours restreindre l’éligibilité d’un côté.

M. Gendebien. - Quant à moi je ne mériterai pas le reproche de l’honorable M. Dumortier, attendu que j’ai déjà demandé et que je demande encore le rejet de l’article parce qu’il est entaché d’inconstitutionnalité, à l’exception du premier paragraphe qui ressort de la nature des choses ; et je n’y vois pas d’inconvénient, car je conçois très bien que des soldats se disent : Il nous commande parce qu’il en sait plus que nous, parce qu’il a fait ses preuves ; mais je ne comprends pas qu’on veuille leur faire dire : Il nous commande parce qu’il est plus riche que nous. Est-ce que le courage est ordinairement en proportion de la richesse ? Mais c’est tout le contraire, plus vous arrivez aux classes aisées et moins vous trouvez de dispositions à braver les dangers.

La fortune n’a jamais rien signifié pour le courage, et bien peu de chose pour l’indépendance et l’esprit politique. Ce sont les moins riches qui, lors de la révolution, ont fait le coup de fusil, ce soit eux qui ont chassé les Hollandais ; les riches sont venus quand il y a eu quelque chose à glaner pour la gloire et quelques lucratives fonctions à ajouter à leurs revenus.

Aussi je le dis pour la dernière fois, le paragraphe 2 est inconstitutionnel, irrationnel au plus haut point. Quant au troisième, je ne sais comment vous pouvez accorder à un chef un pouvoir aussi excessif, aussi arbitraire ; je le dis encore, ce paragraphe détruit l’éligibilité dans sa base. Au surplus je suis trop fatigué pour prolonger seul une discussion stérile dans ses résultats. La chambre fera ce qu’elle voudra, il me suffit de protester contre l’amendement du ministre ; j’aurai au moins la consolation d’avoir rempli mon devoir.


- Le premier paragraphe est mis aux voix et adopté.

Le deuxième paragraphe est également adopté.


M. de Brouckere. - Je ne sais pas ce que veut dire : « payer par ses père et mère, » ainsi qu’il est mis dans le troisième paragraphe.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - C’est une locution très reçue ; on dit : « payer par autrui. »

- Le troisième paragraphe est adopté.

M. Dumortier, rapporteur. - Je demande une légère modification : ce serait de mettre : « payer par son père ou par sa mère, » au lieu de : « par ses père et mère, » parce qu’il peut y avoir des veuves.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - C’est entendu.


M. le président. - Je vais mettre aux voix l’article entier avec la modification proposée par M. Dumortier.

- L’article est adopté dans sa totalité.

M. Gendebien. - Je demande que l’on fasse mention de mon vote négatif au procès-verbal.

Article 12

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Comme conséquence de l’article que vous venez de voter, je dois présenter ici l’article 12 ainsi conçu : « La députation permanente du conseil provincial annulera les élections des officiers et sous-officiers qui ne possèdent pas les conditions d’éligibilité fixées ci- dessus. »

M. de Brouckere. - Je demande si l’article relatif à la profession libérale est mis de côté.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Oui.

- L’article 12 est mis aux voix et adopté.

Article 14

M. le président. - Nous allons passer à l’article 14 du projet de la commission. Il y a un amendement de M. Desmaisières ; il est ainsi conçu :

« Il sera nommé pour chaque corps une commission d’examen qui sera composée d’un officier de chaque grade et qui, sous la présidence du chef du corps, prononcera le remplacement des officiers qui, trois mois après leur élection, ne connaîtront pas les deux premières écoles, et les sous-officiers qui ne connaîtront pas l’école du soldat.

« Les membres de la commission seront élus par les titulaires de leurs grades respectifs pour le terme de 5 ans. »

M. Desmaisières. - Ainsi que vous l’a très bien dit hier M. le ministre des affaires étrangères, bien que la commission dont j’ai l’honneur de faire partie, ait travaillé dimanche depuis dix heures du matin jusqu’à six heures du soir sans désemparer, elle n’a pu arriver, en raison du temps qui lui était donné, qu’à un travail imparfait et incomplet. Plusieurs dispositions vicieuses du projet ont dû nécessairement échapper à ses investigations, et dans le nombre il faut compter celles contenues dans l’article 14.

Les observations faites hier par l’honorable M. Gendebien m’ont paru tellement justes que j’ai cru devoir en faire de suite les motifs de la présentation d’un amendement que j’ai rédigés à la hâte, séance tenante, mais qui cependant a reçu l’approbation de l’honorable membre et de plusieurs autres auxquels je l’ai communiqué. Toutefois, je suis loin de le croire parfait et je me rallierai volontiers aux améliorations qui seront proposées.

Tous ceux qui ont quelques notions de l’art militaire sont d’accord aujourd’hui pour admettre en principe qu’une armée de ligne doit être organisée en quelque sorte despotiquement, si l’on veut en tirer un bon parti pour la guerre. Messieurs, l’officier de la ligne cependant ne peut être destitué sans jugement, pour quelque cause que ce soit. Comment donc pourrait-on vouloir soumettre au bon plaisir du seul commandant la destitution de l’officier ou du sous-officier de la garde civique que ses concitoyens eux-mêmes ont jugé digne de les commander, alors surtout que la constitution, à tort ou à raison, c’est ce que je n’ai pas à examiner ici, a défini l’institution de la garde civique d’après les principes les plus libéraux, je dirai même les plus démocratiques.

Je crois en avoir dit assez, messieurs, pour appuyer mon amendement, qui vous paraîtra d’ailleurs, sans doute, présenter toutes les garanties désirables, tant en ce qui concerne le bien du service qu’en ce qui concerne les officiers et sous-officiers eux-mêmes.

M. d'Hoffschmidt. - D’après l’amendement de M. Desmaisières, non seulement les officiers, mais les sergents, les caporaux, les soldats seraient chargés de juger les capacités d’un capitaine ou d’un major. Cela me paraît au moins étrange. Je ne crois pas que les juges pris parmi les grades inférieurs puissent être compétents. Je demande que la proposition de l’honorable préopinant s’arrête au grade de sous-lieutenant.

M. Desmaisières. L’honorable M. d’Hoffschmidt a dit que la commission d’examen ne devrait pas se composer de militaires au-dessous du grade de sous-lieutenant.

Mais, messieurs, les conseils de discipline sont aussi composés de gardes civiques de tous les grades, et la voix d’un simple garde emporte quelquefois la condamnation à l’emprisonnement d’un officier supérieur, et sa destitution, en cas de récidive.

Je ne vois de différence entre un conseil de discipline et une commission que dans le mode de nomination. Le conseil de discipline est nommé par le sort et condamne pour contraventions aux règles du service, et la commission d’examen aura à prononcer sur le fait d’incapacité des officiers et sous-officiers qui l’auront nommée.

Il faut ici avoir la bonne foi de reconnaître que si un officier ou sous-officier, trois mois après son élection, n’est pas en état de subir honorablement l’examen prescrit par la loi, c’est qu’il ne l’aura pas voulu, et il n’aura pas le droit de se plaindre.

M. d'Hoffschmidt. - L’honorable préopinant a combattu mes observations en disant que dans les conseils de discipline on admettait bien les soldats, et que, par conséquent, ils pouvaient faire partie de la commission d’examen qu’il propose. Mais, messieurs, je ferai observer que les cas ne sont pas identiques.

Je conçois qu’un soldat, un sergent fasse partie du conseil de discipline ; car il ne s’agit là que de reconnaître un fait, d’appliquer la loi et non d’apprécier des capacités, ce qui est bien différent. Je suppose qu’un capitaine se présente devant une commission d’examen composée d’un caporal, d’un sergent : si peu qu’il en sache il les embarrassera facilement.

Je persiste à croire qu’il vaudrait mieux ne composer la commission que d’officiers de chaque grade, et qu’il y aurait à descendre au-dessous du sous-lieutenant.

M. Dumortier, rapporteur. - Lorsqu’hier l’honorable M. Gendebien a présenté ses observations sur l’article qui nous occupe en ce moment, j’avoue qu’elles m’ont frappé ; j’ai compris qu’on ne pouvait pas laisser à l’arbitraire d’un chef de corps de prononcer la déchéance d’officiers ou sous-officiers sous ses ordres pour fait d’incapacité. L’honorable M. Desmaisières a rendu un véritable service en présentant son amendement, c’est une amélioration à la loi.

Cependant je pense qu’il va un peu trop loin, en proposant de constituer la commission d’examen comme un conseil de discipline. Car, il y a une grande différence. Le conseil de discipline n’a qu’à apprécier un fait appréciable par tous les citoyens, tandis que la commission d’examen doit juger des connaissances des officiers. Or, comment voulez-vous qu’un caporal, qu’un fourrier, qu’un sergent-major qui par leurs grades ne doivent pas avoir les connaissances exigées pour un capitaine, puissent décider s’il a ou n’a pas ces connaissances ? Ils ne peuvent donc pas être juges d’une question qu’ils ne doivent pas connaître. Il faut nécessairement restreindre l’amendement. Je propose de dire : « composée d’un officier de chaque grade. »

M. d'Hoffschmidt. - C’est mon amendement.

M. Desmaisières. - L’inconvénient que vous trouvez à la présence d’un sous-officier se présentera pour le sous-lieutenant quand il s’agira d’apprécier la capacité d’un officier supérieur. Cependant je me rallierai volontiers à l’amendement de M. d’Hoffschmidt.

M. Gendebien. - Je ferai observer à M. d’Hoffschmidt que les soldats et caporaux ne sont pas considérés comme des gradés, et que quand on dit : « des titulaires de tous les grades, » on n’entend que les officiers et sous-officiers. Voyez si vous voulez exclure le sous-officier. L’honorable auteur de la proposition, en l’appelant à faire partie de la commission, avait eu pour but de donner plus de garantie à chacun de ceux qui pouvaient être appelés devant elle, en la composant d’un homme de chaque grade.

Quant à l’observation que les conseils de discipline ne font qu’appliquer la loi, elle est inexacte ; car ils prononcent à la fois et sur le fait et sur l’application de la loi ; et ces conseils de discipline, dans la composition desquels entre le simple soldat, prononcent non seulement des exclusions, mais aussi des peines plus ou moins sévères ; et jusqu’ici cependant on n’a pas trouvé d’inconvénient qu’un simple soldat fût appelé à prononcer une peine contre un officier. Il peut donc à plus forte raison faire partie d’une commission d’examen.

Car, je le répète, un conseil de discipline est appelé à prononcer et sur le fait et sur le droit, à la différence des cours d’assises où le fait est apprécié par le jury et le droit par la cour ; encore, dans certains cas, la cour est-elle appelée à se prononcer sur le fait. Vous voyez que les conseils de discipline ont une double question à examiner, tandis qu’une commission d’examen n’a à prononcer que sur une question de capacité, bien moins compliquée que les questions de fait et de droit qui peuvent s’agiter devant les conseils de discipline.

La raison donnée par M. d’Hoffschmidt disparaît donc. S’il en a une autre, je le prierai de nous la faire connaître ; je l’entendrai avec plaisir, et me rendrai sans peine à une bonne raison.

Je persiste à croire qu’il est nécessaire et juste que tous les grades soient représentés dans la commission, c’est une garantie pour tous les citoyens. Le sous-officier tient autant à ses abus que le colonel à ses grosses épaulettes.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je pense que la raison donnée par l’honorable M. d’Hoffschmidt est très fondée. Il y a une grande différence entre appeler un soldat à juger de la capacité d’un officier, capacité qu’il ne peut apprécier, et l’appeler à examiner un fait, et à voir si ce fait est le même que celui dont la loi parle.

M. F. de Mérode. - M. Desmaisières s’est rallié à la proposition de M. d’Hoffschmidt ; il me semble qu’il n’y avait plus lieu à revenir à la proposition primitive, personne ne l’ayant reprise.

M. d'Hoffschmidt. - On vient de dire que la commission d’examen étant, comme le conseil de discipline, appelée à juger des officiers et caporaux, il est bon qu’il y ait dans son sein un sergent. Mais, messieurs, un sous-officier n’est pas censé avoir les connaissances nécessaires pour juger un officier, tandis qu’un officier est toujours censé capable de juger de la capacité d’un sous-officier. Il n’est donc pas nécessaire qu’il y ait un sous-officier dans la commission.

On a trouvé aussi que ce que j’avais dit du conseil de discipline n’était pas fondé. M. le ministre de la justice vient de répondre sur ce point. J’avais dit qu’il n’y avait aucune similitude entre le conseil de discipline et la commission que propose d’instituer l’honorable M. Desmaisières, et que par conséquent, je ne croyais pas qu’on dût mettre des sous-officiers dans la commission, qu’il y en avait dans le conseil de discipline.

Pour juger si un officier a les connaissances nécessaires, il faut les posséder soi-même. Comment voulez vous qu’un sous-officier qui souvent dans une commune est un bon cultivateur, qui jamais ne s’est occupé de stratégie, aille prononcer sur la capacité d’un capitaine ou d’un major ? Ce serait là, je ne crains pas de le dire, une absurdité.

M. Gendebien. - On ne dit que des absurdités dans cette chambre. (Exclamations.) On le croirait, à entendre M. d’Hoffschmidt…

- Plusieurs voix. - A l’ordre ! à l’ordre !

M. Gendebien. - Si on le dit, je n’en suis pas coupable.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Vous insultez la chambre.

M. d'Hoffschmidt. - Ce n’est pas à vous que mes paroles s’adressaient. (Agitation.)

M. Liedts. - Je ne prends pas souvent la parole dans cette assemblée, mais je ne souffrirai pas qu’on dise qu’on n’y entend que des absurdités.

M. Gendebien. - Vous ne m’avez pas compris ; vous n’avez pas laissé achever...

M. Liedts. - Ce sont vos paroles.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Vous avez insulté la chambre.

M. Gendebien. - Il n’appartient pas au ministre des finances d’usurper les fonctions du président, encore moins d’interpréter mes paroles ; je proteste contre cette usurpation ; je proteste contre son accusation.

M. le président. - Le ministre des finances est aussi député, et quand il provoque un rappel au règlement, c’est en sa qualité de membre de la chambre qu’il le fait.

M. Gendebien. - Demandez mon rappel à l’ordre si vous voulez, mais vous ne m’avez pas compris. Vous ne m’avez pas laissé le temps d’achever ma phrase, car je disais qu’à entendre M. d’Hoffschmidt on pourrait croire qu’on ne dit que des absurdités dans cette chambre, et que cependant pour mon compte je ne me croyais pas coupable de ce fait.

On a prétendu que le sous-officier était inhabile à juger la capacité de l’officier. Mais quand le sous-officier et même le simple garde est appelé à juger si un officier ou un sous-officier a manqué au service, ne faut-il pas qu’il connaisse ce service pour savoir si l’officier ou le sous-officier y a manqué ? Quand il a apprécié le fait, il doit encore y appliquer une peine. Vous voyez donc que le ministre ne m’a pas répondu. Car le soldat, pour prononcer sur un manque au service, doit connaître ce service. Ne me parlez donc plus du défaut de capacité.

Maintenant, je le répète, retranchez si vous voulez le sous-officier, mais je dis qu’il n’y a pas de raison pour opérer ce retranchement. Car remarquez que c’est par élection que la commission sera composée. Les électeurs auront soin de n’y envoyer que les hommes les plus capables. Il n’est d’ailleurs pas rare de rencontrer dans la garde civique, comme dans les corps réguliers, des sous-officiers qui en savent tout autant et quelquefois plus que beaucoup d’officiers. Beaucoup de sous-officiers, dans l’espoir d’obtenir de l’avancement travaillent plus que ceux qui sont dans les grades élevés. Ne venez donc plus m’opposer la présomption d’incapacité. Je dirai au contraire qu’on trouvera des garanties de capacité chez les sous-officiers autant qu’ailleurs.

J’ai voulu seulement me justifier de l’accusation d’absurdité que m’avait adressée M. d’Hoffschmidt.

M. d'Hoffschmidt. - Que M. Gendebien dise ou non que je me suis servi trop légèrement du mot absurdité, je maintiens cette expression que je n’ai appliquée qu’à tout argument qui tendrait à démontrer que les sous-officiers sont capables d’être juges des connaissances théoriques des officiers supérieurs, car c’est là une véritable absurdité. Mais cet honorable membre a dit que l’on n’entendait que des absurdités dans cette chambre, et ce sont là des expressions pour lesquelles M. le président aurait dû le rappeler à l’ordre. M. Gendebien ne se permet que trop souvent de semblables sorties, et il est de la dignité de la chambre de ne plus le souffrir plus longtemps. S’il continue de s’arroger le droit de dire des choses injurieuses pour cette assemblée, je m’engage à demander chaque fois qu’il soit rappelé à l’ordre, si M. le président ne le fait pas.

M. Gendebien. - Faites, faites, mon Dieu ; rappelez-moi à l’ordre tant que vous voudrez, cela m’est absolument égal ; ce sera pour moi une mention honorable ; mais je décline votre censure personnelle et m’en soucie peu.

M. le président. - Il y a dans les observations de M. d’Hoffschmidt quelque chose qui m’est personnel. Je dois y répondre.

Je crois qu’autant qu’il est en moi je maintiens l’ordre dans l’assemblée. Quand un orateur dit une parole qui paraît blessé les convenances parlementaires, il est de mon devoir d’entendre toute sa phrase avant d’énoncer mon opinion, car souvent le mot qui suit modifie celui qui précède. C’est ce qui m’a paru avoir lieu dans cette circonstance.

M. F. de Mérode. - Je demande la parole. (Aux voix ! aux voix !)

M. Gendebien. - Laissez parler M. de Mérode ; il veut demander mon rappel à l’ordre, et je le désire.

M. F. de Mérode. - Pas du tout, c’est le contraire ; je veux dire que les explications données par l’honorable M. Gendebien doivent satisfaire la chambre.

M. Gendebien. - Je ne donne pas des explications ; tant pis pour ceux qui ne m’ont pas compris.

M. le président. - La disposition serait ainsi conçue :

« Il sera nommé dans chaque corps une commission d’examen qui sera composée d’un officier de tout grade et qui, sous la présidence du chef du corps, prononcera le remplacement des officiers qui, trois mois après leur élection, ne connaîtront pas les deux premières écoles, et des sous-officiers qui ne connaîtront pas l’école du soldat.

« Les membres de la commission seront élus par les militaires de leur grade respectif, pour le terme de cinq ans. »

- Cette disposition est mise aux voix et adoptée. Elle remplacera l’article 14.

Article 16

M. le président. - L’article 15 a été voté hier. Nous passons à l’article 16 qui est ainsi conçu :

« Art. 16. Les devoirs des gardes, des caporaux, des sous-officiers et des officiers, à l’égard de leurs chefs, sont les mêmes que dans l’armée sans que, sous aucun prétexte, les compagnies d’artillerie, de cavalerie, de chasseurs ou pompiers volontaires, ou autres compagnies de garde civique, sous quelque dénomination que ce soit, puissent se soustraire aux ordres des chefs de la garde. »

M. de Puydt. - Je demande la suppression de toute la partie de l’article qui est en lettres italique.

La disposition dont je propose la suppression est inutile ou dangereuse.

Pour les compagnies de cavalerie et d’artillerie qui sont autorisées par les articles 30 et 33 de la loi du 31 décembre 1830, elle est inutile puisque ces compagnies font partie du corps ; elles sont donc soumises aux mêmes obligations.

Pour les compagnies dont l’existence n’est pas légale, il y aurait danger à maintenir cette disposition, parce que ce serait implicitement autoriser la formation de ces compagnies et multiplier les bigarrures dans les légions de garde civique suivant les coutumes des villes : ainsi, par exemple, les francs-archers de Bruges, les arquebusiers de Mons et même la société du pape de Rome, à Poperingue, ne tarderaient pas à vouloir se constituer comme compagnes d’élite dans leurs légions de garde civique.

M. Dumortier, rapporteur. - La proposition de l’honorable préopinant est fondée sur une erreur. Il suppose qu’il existe dans la législation actuelle des dispositions suffisantes pour établir la subordination hiérarchique de ces corps. Mais cela n’existe pas. Toutes les personnes qui ont eu occasion de voir de près ce qui se passe dans la garde civique, doivent être convaincues des difficultés qu’on rencontre pour maintenir la bonne harmonie et la discipline dans les corps de ce genre. A chaque instant ils sont en état de résistance envers le commandant en chef de la garde civique. C’est pour mettre fin à cet abus que l’amendement dont il s’agit a été introduit dans la loi.

Cet amendement est d’autant plus nécessaire que, d’après le texte de l’article, les devoirs des gardes, des sous-officiers et officiers à l’égard de leurs chefs, sont les mêmes que dans l’armée. Or, dans l’armée, l’artillerie n’est tenue à aucune espèce d’obéissance envers l’infanterie, il en est de même de la cavalerie à l’infanterie ; les régiments de ces différentes armes dans une garnison ont leurs rapports directs avec le commandant de place. Si on n’adoptait pas l’amendement de la commission, on fortifierait l’esprit d’indépendance des armes des compagnies spéciales. C’est dans l’intérêt de la subordination, du bon ordre et de la discipline que l’amendement a été introduit, afin d’établir d’une manière bien précise à qui le commandement appartient.

Si on trouve l’énumération inutile, on peut la retrancher ; mais il est indispensable de maintenir que, sous aucun prétexte, les compagnies spéciales ne peuvent se soustraire aux ordres du chef de la garde.

M. Gendebien. - De deux choses l’une, ou ces diverses compagnies appartiennent à la garde civique ou elles n’en font pas partie. Si elles en font partie, il est inutile de dire qu’elles sont subordonnées au chef, cela est de droit ; si elles n’en font pas partie, vous ne pouvez pas les y incorporer sans leur consentement ; la garde civique cesserait d’être homogène si vous y incorporiez des citoyens étrangers à ce service.

Je ne sais pas ce que viennent faire ici les pompiers volontaires, à moins qu’on n’ait l’intention de renouveler la farce jouée sur la place Vendôme par les ordres du maréchal Lobau, farce qui a valu au commandant de la garde nationale de Paris force ridicules et caricatures, et le titre-pompeux de tricanule. Vous tombez dans le ridicule.

J’appuie la suppression du paragraphe.

M. Dumortier, rapporteur. - Ce que j’ai dit de la nécessité de maintenir l’amendement ne peut être contesté. Si vous le supprimez, vous détruisez toute discipline dans la garde nationale.

M. Rogier. - Je crois qu’en retranchant l’énumération, la disposition peut être adoptée telle qu’elle est rédigée.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je proposerai un léger changement de rédaction qui consisterait à diviser la disposition en deux paragraphes et à rédiger le deuxième de la manière suivante :

« Les compagnies spéciales sont sous les ordres du chef de la garde. »

La loi du 31 décembre 1830 et celle du 18 janvier 1831 ont autorisé la formation de ces compagnies spéciales. Et comme souvent il s’est élevé des doutes sur la subordination de ces compagnies, il est bon de les lever.

M. F. de Mérode. - Je ne vois pas pourquoi l’on modifierait l’article. Il exprime ce qu’il veut dire d’une manière catégorique. Il vaut mieux le laisser tel qu’il est, il est plus positif et donnera moins lieu à une interprétation contraire.

M. Dumortier, rapporteur. - L’observation de l’honorable préopinant est très juste. L’article, tel qu’il a été rédigé par la commission, impose aux différentes armes qui y sont spécifiées des obligations auxquelles elles ne pourront se soustraire.

M. de Puydt. - Si l’on persiste à désigner dans l’article les corps qui font partie de la garde civique, je demande que l’on ne fasse pas mention des compagnies de chasseurs et des compagnies de pompiers. La loi sur la garde civique ne reconnaît que l’artillerie et la cavalerie. Si vous admettez d’autres corps, vous ouvrirez la porte à la création d’une foule de compagnies sous diverses dénominations.

M. Dumortier, rapporteur. - Les compagnies citées dans l’article existent en fait. Il suffit, pour s’en assurer, d’assister à une parade de la garde civique. Je ne vois pas pourquoi l’on conteste l’exactitude d’un fait que personne ne peut révoquer en doute.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - L’énumération détaillée dans l’article en discussion est conforme aux articles 30, 31 et 33 de la loi de décembre 1830 sur la garde civique, et à l’article premier de la loi du 18 janvier 1831. Il n’y a que les compagnies de pompiers volontaires qui ne soient pas mentionnées dans cette loi.

- La suppression du deuxième paragraphe de l’article 16, proposée par M. de Puydt, est mise aux voix. Elle n’est pas adoptée.

M. de Brouckere. - Je me borne à demander que l’on supprime dans l’article les compagnies de pompiers, dont il n’est pas parlé dans la loi générale.

M. F. de Mérode. - Je connais en France des communes où il y a des compagnies de pompiers dans la garde nationale. Ces compagnies sont très utiles. Elles font un service à part, et se tiennent prêtes à se porter sur les lieux où il éclate des incendies.

M. Gendebien. - Les compagnies de pompiers ne font pas partie de la garde civique. Mais elles agissent conjointement avec elle.

M. F. de Mérode. - Je maintiens qu’il y en Belgique comme en France des compagnies volontaires de pompiers faisant parte de la garde civique. Je ne vois pas pourquoi l’on se refuse à faire figurer leur nom dans l’énumération de l’article 16. Ces compagnies volontaires sont organisées spécialement. Si elles ne concourent pas au service ordinaire de la garde civique, c’est qu’elles font de leur côté un service particulier.

M. de Brouckere. - Les compagnies de pompiers à Bruxelles, Gand et dans d’autres villes du royaume, sont des compagnies soldées par la commune. Je ne sais pas s’il y a des exemples de compagnies de pompiers faisant partie de la garde civique. J’admets que cela est, puisque M. de Mérode me l’affirme. Mais je ne crois pas qu’il faille en faire mention dans la loi que nous discutons, attendu que la loi générale ne les a pas désignées spécialement. L’article 35 de la loi générale ne fait mention des corps de pompiers et de sapeurs payés par la commune, que pour les soumettre à la disposition des chefs de la garde civique, lorsque ceux-ci les requerront. Voilà la seule disposition où il soit parlé de pompiers.

M. Rogier. - La discussion est inutile, puisque personne ne demande le maintien de l’énumération de l’article 16.

M. Dumortier, rapporteur. - On coupera court à toute espèce d’inconvénients, en retranchant l’énumération. Je certifierai, en passant, à l’honorable M. de Brouckere qu’il y a en Belgique des compagnies volontaires de pompiers, qui par leur âge, leur position, leurs capacités, font partie de la garde civique.

M. Gendebien. - Nous sommes tous d’accord.

M. de Brouckere. - On a dit que la loi sur la garde civique ne faisait pas mention des compagnies de chasseurs. Je ferai observer qu’il en est parlé à l’article premier de la loi sur l’organisation du premier ban de la garde civique. Il est ainsi conçu :

« Le ministre de la guerre pourra autoriser dans la garde civique, sur la demande individuelle des gardes, la formation de compagnies de chasseurs et de tirailleurs attachés au premier ban, et faisant concurremment le service avec lui. »

C’est en vertu de cette disposition que la compagnie de volontaires, dits de Chasteler, fait partie du premier ban de la garde civique de Bruxelles.

- L’amendement de M. Dumortier, qui consiste à supprimer ces mots « les compagnies d’artillerie, de cavalerie, de chasseurs ou pompiers volontaires ou autres compagnies de garde civique, » et à les remplacer par ceux-ci : « les compagnies de la garde civique, » est mis aux voix et adopté.

L’ensemble de l’article 16 est mis aux voix et adopté.

Article 17

M. le président. - La discussion est ouverte sur l’article 17, ainsi conçu :

« Art. 17. Tout garde qui manquera à un service légalement commandé, sera puni, suivant les circonstances, de l’une des peines mentionnées dans l’un des quatre premiers numéros de l’article 17 de la loi du 22 juin 1831, sans préjudice des dispositions relatives aux autres infractions et à la récidive.

« Lorsque le conseil de discipline prononcera une peine pécuniaire, il sera toujours tenu de condamner le prévenu subsidiairement, et par le même jugement, pour le cas de non-paiement ou d’insolvabilité, à l’emprisonnement mentionné dans le n°4 du même article. »

M. Gendebien. - Je demande que l’on substitue dans le premier paragraphe le mot ordonné à celui de commandé. C’est pour éviter une équivoque à laquelle on pourrait avoir recours en prétendant que le commandement a été irrégulièrement fait ; c’est à l’ordre que l’on se soumet et non aux termes du commandement.

- L’amendement de M. Gendebien est mis aux voix et adopté.

L’article 17 est mis aux voix et adopté.


M. Gendebien. - Je croyais que la discussion n’avait été ouverte que sur le premier paragraphe, et j’avais des observations à présenter sur le deuxième. Elles portent sur le mot d’insolvabilité que j’y trouve employé. Il me semble qu’il est si dur de mettre en prison, précisément pour insolvabilité reconnue, un pauvre diable à cause du non-paiement d’une amende si légère pour un homme riche.

Il y a là à la fois inégalité, inhumanité dans la disposition et dureté révoltante dans l’expression ; cela est peu digne de la législature. D’ailleurs cette expression d’insolvabilité est en contradiction avec l’article 15. Puisque vous avez refusé à l’article 15 de payer une indemnité aux gardes civiques qui feraient un service de garnison dans une ville, par la raison, disiez-vous, qu’ils sont censés n’avoir pas besoin de la solde du soldat ceux qui avaient pu s’équiper à leurs frais : pour être conséquents avec vous-mêmes, vous ne pouvez pas supposer l’insolvabilité. Je demande que l’on supprime ce mot. Celui de non-paiement est déjà une assez étrange anomalie.

M. Rogier. - Je demande à M. le président si l’article 17 a été voté.

M. le président. - L’assemblée vient de l’adopter.

M. Gendebien. - Qu’il passe avec tant d’autres, soit ; je tiens seulement à ce qu’on sache que je m’y suis opposé.

M. A. Dellafaille. - La loi du 22 juin établit comme peine l’amende ou l’emprisonnement. Il faut bien, si l’amende ne se paie pas, que l’on tombe dans l’autre supposition de la pénalité.

M. Gendebien. - Que la chambre passe outre, j’y reviendrai au second vote.

M. le président. - Je ferai observer à M. Gendebien que l’on ne soumet à un second vote que les articles sur lesquels il a été proposé et adopté des amendements. Il n’y en a pas eu au deuxième paragraphe de l’article 17. Il ne sera donc pas soumis à un second vote.

M. Gendebien. - Laissez-moi la faculté d’établir la nécessité d’un second vote, quand j’en serai là.

M. le président. - J’ai voulu seulement rappeler à M. Gendebien ce que prescrit le règlement à l’égard du second vote.

M. Gendebien. - Je vous remercie, M. le président ; je sais que votre intention était bonne ; mais je ne m’en réserve pas moins la faculté de prouver la nécessité d’un second vote quand il en sera temps.

M. Dumortier, rapporteur. - Si la chambre est d’accord sur ce point, je ne verrai pas d’inconvénient à ce que l’on retranche le mot insolvabilité.

M. Gendebien. - Exécutons le règlement ; j’en fais moi-même la demande.

Article 18

(Moniteur belge n°2, du 2 janvier 1835) M. le président. - La discussion est ouverte sur l’article 18, ainsi conçu :

« Art. 18. Le conseil de discipline pourra siéger au nombre de 5 membres : il sera présidé par le juge de paix qui siège en matière de simple police.

« Les juges manquants seront néanmoins poursuivis conformément à la loi, à la requête de l’officier rapporteur. »

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - L’article 18 tel qu’il est rédigé me paraît présenter quelques difficultés d’exécution. Aux termes de la loi existante, les conseils de discipline ne peuvent juger qu’au nombre de 7 membres. Si l’article était adopté, il s’en suivrait que les conseils seraient en réalité composés de 8 membres qui pourraient se trouver réduits à 7, 6, 5 ; c’est-à-dire qu’ils seraient tantôt en nombre pair et tantôt en nombre impair. J’ai cherché à remédier à cet inconvénient par la rédaction de l’amendement suivant que j’ai l’honneur de présenter à la chambre.

« Le conseil de discipline sera présidé par le juge de paix.

« S’il y a plusieurs juges de paix, il est présidé par celui qui siège en matière de simple police.

« Le conseil ne pourra siéger qu’au nombre de 5 ou de 7 membres.

« Quand les membres du conseil sont présents en nombre pair, l’un d’eux s’abstiendra de siéger suivant un tour de rôle en commençant par le moins âgé.

« Les juges manquants, etc. »

M. Gendebien. - Je ne sache pas qu’il y ait des juges de paix spéciaux pour siéger en matière de simple police. Les juges de paix siègent tous au civil et en matière de simple police. Seulement il y a des jours différents pour siéger commue juge civil ou comme juge de simple police. Mais il n’y a pas de juge de paix spécialement chargé de la simple police.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Je vous demande pardon, cela se fait à tour de rôle.

M. Gendebien. - C’est ainsi que je l’entends ; mais à lire la rédaction de la section centrale, adoptée par M. le ministre de l’intérieur, il semblerait qu’il y ait des juges de paix siégeant spécialement en matière de simple police. Quand le conseil de discipline sera institué, naturellement il se mettra en rapport avec celui des juges de paix qui à son tour de rôle siège en matière de simple police. Encore faut-il l’exprimer clairement dans l’article.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - La rédaction que j’ai proposée appartient à la commission.

L’article 142 du code d’instruction criminelle a établi un tour de rôle qui s’applique à tous les juges de paix pour juger en matière de simple police. Je ne tiens pas à ce que la rédaction de la commission soit maintenue. On pourrait dire : « Celui qui de droit, d’après la loi, siége, etc. »

M. Gendebien. - Je suis d’accord avec M. le ministre de l’intérieur sur le fond, mais non pas sur le texte. De l’article tel qu’il est rédigé on pourrait tirer la conséquence qu’il y a des juges de paix qui siègent spécialement en matière de simple police, tandis que tous siégent également au civil et en simple police. La loi veut que le conseil de discipline ne soit présidé que par le juge de paix qui, dans le moment, siégera en simple police. Mais il faut qu’elle l’explique clairement.

M. de Brouckere. - La rédaction présentée par M. le ministre de l’intérieur est vicieuse, l’honorable M. Gendebien l’a démontré. Mais je n’adopte pas la rédaction qu’il propose. Car il en résulterait que le conseil de discipline serait préside, non pas par le juge de paix qui siège en matière de simple police, mais par le juge de paix du canton où la contravention aurait été commise. Il y aurait une rédaction plus simple. Elle consisterait à dire que le conseil de discipline sera présidé « par le juge de paix faisant le service au tribunal de police. »

Ce sont les propres termes employés par le code d’instruction criminelle. (Adhésion.)

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je me rallie au changement de rédaction.

- Le sous-amendement de M. de Brouckere est mis aux voix et adopté.

- L’article 18 amendé par le ministre de l’intérieur est mis aux voix et adopté.

Article 19

M. le président. - La discussion est ouverte sur l’article 19, ainsi conçu :

« Le prévenu qui succombera devant le conseil de discipline sera condamné aux frais, et les dépens seront liquidés par le jugement. »

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Ces mots « et les dépens » sont de trop. J’en propose le retranchement.

M. Dumortier, rapporteur. - L’observation de M. le ministre est juste. L’on pourrait dire : « Aux frais qui seront liquidés par le jugement.»

M. Gendebien. - Je propose également de modifier ces mots : « Le prévenu qui succombera devant le conseil de discipline. » Ne dirait-on pas qu’il s’agit d’un prévenu, qui meurt ou tombe en défaillance devant le conseil de discipline.

- L’article amendé par MM. le ministre des affaires étrangères et Gendebien est mis aux voix et adopté.

Article 20

M. le président. - La discussion est ouverte sur l’article 20, ainsi conçu :

« Les jugements seront exécutés à la requête de l’officier rapporteur.

« Le recouvrement des frais s’opérera comme en matière de simple police, sans que le condamné puisse, dans aucun cas, être détenu plus de cinq jours. »

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je désire ajouter à cet article les paragraphes suivants :

« Les jugements rendus contradictoirement sont exécutoires sans avoir été signifiés.

« L’appel contre les jugements contradictoires devra être intenté dans les 10 jours de la prononciation. »

L’amendement que je propose est relatif aux article 174 et 204 du code d’instruction criminelle. Il a pour but d’éviter au condamné les frais de signification qui sont considérables, et qui sont inutiles du moment que le jugement est contradictoire.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - L’amendement proposé par M. le ministre de l'intérieur introduit dans la loi sur la garde civique une amélioration importante, qu’il serait désirable de voir admise à l’égard de tous les jugements des tribunaux de simple police.

La première amélioration apportée aux dispositions de l’article 174 du code criminelle provoque nécessairement une deuxième modification. Du moment que le jugement contradictoire n’est pas signifié, il faut déterminer le point de départ du délai pour se pourvoir contre le jugement. Il a fallu recourir pour cette fixation à l’article 203 du code d’instruction criminelle qui concerne les jugements correctionnels.

Les prévenus, lorsqu’un jugement contradictoire est prononcé, étant présents, la chambre conçoit qu’il est inutile de faire la signification du jugement.

M. Verrue-Lafrancq. - Je ferai observer qu’il n’y a pas d’appel contre les jugements rendus par les conseils de discipline, mais seulement recours en cassation.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Il suffit de substituer le mot recours à celui d’appel.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je proposerai de modifier le deuxième paragraphe de l’amendement de M. le ministre de l’intérieur en ce sens : « Le délai de pourvoi commencera à courir à partir de la prononciation du jugement. »

M. Rogier. - D’après la loi actuelle, ce délai n’est que de trois jours.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - D’après la législation existante, le recours ne commençait à courir qu’à dater de la signification ; aujourd’hui, il commencera à courir à partir de la prononciation du jugement contradictoire.

M. Gendebien. - Dans le premier cas, il y avait toujours un intervalle entre la prononciation du jugement et sa signification ; aujourd’hui, qu’il n’y en aura plus, le délai de recours fixé à trois jours est trop court. Je demande qu’il soit donné dix jours au condamné pour se pourvoir en cassation, afin qu’il ait le temps de se consulter et de préparer sa défense.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je trouve cette observation très juste.

M. de Brouckere. - Il faut mettre « le délai de recours » et non simplement « le recours. »

M. Rogier. - Il me semble que la disposition actuelle pourrait servir de base à la rédaction de l’amendement de M. le ministre. L’article 90 de la loi du 31 décembre 1830 porte :

« Le pourvoi doit, à peine de nullité, être formé dans les trois jours francs de la prononciation. »

Il suffisait de substituer le terme de 8 jours francs à celui de 3.

M. le président. - Toutes ces modifications de rédaction sont prise en considération par le bureau qui propose au deuxième vote une rédaction définitive.

- L’amendement de M. le ministre de l’intérieur mis aux voix est adopté.

L’ensemble de l’article 20 est mis aux voix et adopté.

« Art. 20. Les jugements seront exécutés à la requête de l’officier rapporteur.

« Le recouvrement des frais s’opère comme en matière de simple police, sans que le condamné puisse, dans aucun cas, être détenu plus de cinq jours. »

M. de Brouckere. - Je crois qu’il y a lieu à changer la rédaction du deuxième paragraphe de cet article et à dire, au lieu de : « Le recouvrement des frais s’opérera comme en matière de police, etc. » : « Les poursuites pour le recouvrement des frais, etc. » En effet la détention de cinq jours est une manière de poursuivre le recouvrement des frais et non pas un mode de poursuites.

- Le changement de rédaction proposé par M. de Brouckere est mis aux voix et adopté ; l’article 20 ainsi amendé est adopté.

Article 21

« Art. 21. L’administration communale mettra à la disposition du conseil d’administration du corps cantonal dont la commune fait partie, par anticipation et par trimestre, le quart des sommes allouées pour couvrir les dépenses.

« En cas de refus ou de retard de versement, la députation permanente du conseil provincial ordonnera que le versement soit effectué immédiatement ; cette décision tiendra lieu de mandat et le receveur de la commune sera obligé d’en acquitter le montant.

« Dans le cas où une commune serait en retard de fournir l’uniforme aux gardes qu’elle doit habiller conformément à la loi, la députation provinciale pourra autoriser le conseil d’administration de la garde à le faire confectionner et en ordonner le paiement de la manière prévue dans le paragraphe précédent. »

- Cet article est mis aux voix et adopté.

Article 10

M. le président. - La chambre a maintenant à statuer sur la proposition de M. de Man d’Attenrode, s’appliquant à l’article 10, et qui a été développée par son auteur dans la séance d’hier ; elle est ainsi conçue :

« Il sera passé inspection des armes tous les trois mois ; si, après un premier avertissement, elles étaient trouvées en état de malpropreté et de délabrement, elles seront retirées aux gardes et rétablies à leurs frais par les soins des chefs des compagnies. »

M. Dumortier, rapporteur. - Il me semble qu’il y a dans cette proposition quelque chose qui n’est pas très clair ; elle porte qu’il sera passé des inspections d’armes tous les 3 mois. Je désirerais savoir si ce nombre d’inspections aura lieu en sus des deux inspections prescrites par la loi du 31 décembre 1830 ; cela ferait 6 inspections par an. Je croirais qu’il y aurait de l’inconvénient à augmenter autant sans nécessité le nombre des inspections des armes. Il y a déjà 2 réunions obligatoires ; tout ce qu’on pourrait ce serait d’en prescrire deux de plus. Il y en aurait alors 4 par année.

Ensuite je vois à la fin de la disposition proposée que les armes seront retirées aux gardes ; alors ils n’auraient donc plus d’armes. Je ne pense pas que telle soit l’intention de l’honorable M. de Man d’Attenrode.

M. de Man d’Attenrode. - En disant qu’il sera passé des inspections des armes tous les trois mois, je demande seulement qu’il y ait 4 inspections par an ; c’est-à-dire que ma proposition comprend les 2 inspections déjà prescrites par la loi du 31 décembre 1830.

Quant aux armes, elles sont, il est vrai, retirées aux gardes, mais c’est seulement pour qu’elles soient remises en état ; quand elles ont été rétablies, elles leur sont aussitôt rendues.

M. Dumortier, rapporteur. - Malgré l’explication de l’honorable préopinant, il est évident que si les termes de l’amendement ne sont pas changés, il y aura quatre inspections en sus de celles prescrites par la loi du 31 décembre, c’est-à-dire qu’il y aura nécessairement 6 inspections par an, quoique l’auteur de la proposition ne le veuille pas. Ensuite, il y aurait encore un autre inconvénient à stipuler qu’il y aura des inspections tous les trois mois ; et le voici : c’est qu’il devra alors y avoir des inspections même en hiver ; or vous savez que les inspections ne se font pas l’hiver parce qu’il serait difficile dans cette saison de réunir la garde civique, mais qu’elle se fait seulement pendant l’été.

Je pense que la proposition en discussion ne doit pas être adoptée, et qu’il faut s’en tenir au nombre d’inscriptions prescrit par la loi du 21 décembre ; mais si la chambre devait l’adopter, je crois qu’au lieu de dire : « Il sera passé des inspections tous les trois mois, etc., » il faudrait dire : « Il sera passé des inspections deux fois par an, etc. »

M. F. de Mérode. - S’il y a déjà deux inspections des armes prescrites par la loi du 31 décembre 1830, ce n’est pas un motif pour que la proposition en discussion qui porte qu’il y aura une inspection tous les 3 mois élève à 6 le nombre de ces inspections. Il est facile en effet de combiner les inspections établies par la loi avec celles proposées par l’honorable M. de Man, et de dire qu’il y aura 4 inspections par an.

Je ne puis pas admettre l’assertion de l’honorable M. Dumortier, qu’on ne peut pas pendant l’hiver réunir la garde civique pour les inspections. Je ne vois pas pourquoi on ne réunirait pas la garde civique aussi bien pendant l’hiver que pendant l’été.

- Un membre. - C’est que, pendant l’hiver, il fait froid. (On rit.)

M. F. de Mérode. - Il fait froid ; ce n’est vraiment pas une raison. Il me semble que la loi peut très bien porter qu’il y aura 4 inspections par an.

M. Verrue-Lafrancq. - Je propose de remplacer l’amendement de M. de Man d’Attenrode par celui-ci :

« Au lieu des 2 inspections de gardes civiques prescrites par l’article 41 de la loi du 31 décembre 1830, il y aura des inspections des armes tous les 3 mois. »

M. de Man d’Attenrode. -Je me rallie à l’amendement de M. Verrue-Lefrancq.

M. Rogier. - Je pense que l’honorable M. de Man n’a pas entendu cet amendement.

M. de Man d’Attenrode. - Je me suis rallié parce que je supposais que M. Verrue-Lefrancq conservait le deuxième paragraphe de mon amendement.

M. Verrue-Lafrancq. - J’ai supprimé le deuxième paragraphe de l’amendement de M. de Man, parce que je le crois plus dangereux qu’utile ; en effet l’entretien des armes est prévu par la loi du 31 décembre 1830 ; l’article 37 porte que les gardes civiques sont responsables de leurs armes, et qu’ils doivent les tenir en bon état.

M. de Man d’Attenrode. - Alors je ne me rallie pas à l’amendement de M. Verrue-Lefrancq.

M. Dumortier, rapporteur. - Je crois qu’il est indispensable d’écarter tous les amendements, et qu’il faut laisser à la loi générale, à la loi d’organisation définitive, le soin de régler ces objets de service ; provisoirement la loi de 1830 suffira sous ce rapport, comme elle a suffi jusqu’à présent. (Appuyé.)


- Les amendements de M. de Man d’Attenrode et de M. Verrue-Lefrancq sont successivement mis aux voix ; ils ne sont pas adoptés.


M. le président. - Voici l’amendement de M. Verrue-Lefrancq : « Le gouverneur de la province fixera le montant de l’indemnité à accorder aux adjudants, tambours-majors, tambours-maîtres, et si cela est indispensable, aux quartiers maîtres et officiers de santé, en proportion avec la force des légions et bataillons. »

M. Rogier. - Je ferai observer que l’amendement de M. Verrue-Lefrancq a pour but de substituer le gouverneur de la province à la députation des états. Je ne sais si, dans la province de l’honorable député, on a trouvé des difficultés dans le mode qui investit la députation des états des opérations qui concernent les gardes cantonales mais ce que je sais, c’est que dans la province d’Anvers toutes les difficultés ont disparu, et je ne crois pas d’ailleurs qu’on les fait cesser par la substitution que demande M. Verrue-Lefrancq.

M. Verrue-Lafrancq. - Je n’ai nullement voulu attribuer au gouverneur de la province ce qui appartient à la députation des états, et si on veut que ce soit elle qui conserve cette prérogative, j’y consens.

- L’amendement de M. Verrue-Lefrancq est mis aux voix et rejeté.

Article 22

M. Nothomb. - J’ai déposé un sous-amendement à l’article 22 du projet ministériel, que je fais mien en supposant qu’il soit retiré. Je propose de mettre : « Le Roi peut, pour des motifs graves, dissoudre, etc. ; » le reste comme dans le projet.

Je pense que le droit de licenciement de la garde civique appartient incontestablement au pouvoir exécutif. C’est à mes yeux une garantie nécessaire pour le maintien du bon ordre. Je crois qu’en admettant le changement que je propose, toutes les frayeurs qu’a causées l’article du gouvernement, disparaîtront sans difficulté et tout naturellement. Le droit de licenciement, je le répète, me paraît incontestablement appartenir au Roi.

Jusqu’à présent la nécessité de ce licenciement ne s’est pas fait sentir, mais je crois que si par hasard il arrivait que quelque mauvais esprit se glissât dans la garde civique, on comprendrait la nécessité que le pouvoir exécutif pût dissoudre cette garde afin de la rétablir sur des bases meilleures.

Je persiste donc à croire qu’au moyen de mon sous-amendement, toutes les difficultés se trouveront levées.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Cette disposition me paraît incontestable en principe. Cependant, par le désir que j’éprouvais à avoir la loi le plus tôt possible j’avais consenti à retirer cette proposition, bien décidé à la reproduire lors de la loi générale sur la garde civique.

En ce moment je ne désirais qu’une loi d’urgence.

M. Dumortier, rapporteur. - J’avais demandé la parole pour combattre la disposition, mais si l’ajournement est adopté, je renonce à la prendre.

M. de Brouckere. - Je ferai une proposition pour appuyer l’ajournement de la disposition du ministre, article 22. Quel a été le but de cette loi que nous allons voter ? De présenter les changements que l’organisation antérieure de la garde civique réclamait comme indispensables. Eh bien, je demande s’il a été démontré, dans tout ce qui a été dit, que le licenciement doive être accordé au gouvernement. En aucune manière selon moi. Je demande donc l’ajournement.

M. Rogier. - Si, en effet, l’article dont la commission a demandé le retranchement doit entraîner dans de trop longues discussions, je voterai pour l’ajournement s’il ne préjuge rien. Dans ce cas, pour ma part, je dois déclarer que si j’adopte le projet de loi, je n’entends pas du tout approuver implicitement le rejet de la disposition qui se trouve à la fin. Je la regarde comme très utile, et je pense que lorsque la discussion du projet de loi générale arrivera, nous parviendrons à modifier l’opinion des orateurs qui se sont élevés contre elle. Il me semble que c’était au moment où l’on veut remettre la garde civique sur de meilleures bases, qu’il serait opportun d’accorder un droit de dissoudre les compagnies en mauvais état…

- Plusieurs membres. - Vous parlez sur le fond. Aux voix ! aux voix !

M. le président. - Je vais mettre aux voix la question d’ajournement, et cela ne préjuge rien.

- L’ajournement est adopté, et la disposition est renvoyée à la discussion du projet de loi générale sur de la garde civique.

Second vote des articles

M. Eloy de Burdinne. - Il paraît que la chambre persiste à se donner une vacance. Je demande qu’on vote aujourd’hui la loi et que l’urgence en soit déclarée.

- La proposition de M. Eloy de Burdinne est mise aux voix. L’urgence est adoptée.

La chambre confirme par son vote les amendements introduits dans les articles 10, 11 et 12.


M. le président. - « Art. 13. Aussi longtemps que le premier ban est en activité de service, les officiers, sous-officiers et caporaux ne sont point soumis à réélection.

« Il sera présenté par le commandant du corps, pour chaque grade vacant, quatre candidats ; parmi lesquels le titulaire devra être élu.»

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je demande que l’on restitue le texte primitif de l’article 13, c’est-à-dire que l’on substitue aux mots « est en activité de service » ceux « est mobilisé. »

- L’amendement de M. le ministre de l’intérieur est adopté. l’article 13 ainsi amendé est adopté. La chambre confirme par son vote l’amendement.


M. le président. - « Art. 14. Il sera nommé pour chaque corps une commission qui sera chargée de prononcer le remplacement des officiers qui, trois mois après leur élection, ne connaîtront pas les deux premières écoles, et les sous-officiers qui ne connaîtront pas l’école du soldat. »

M. Dumortier, rapporteur. - Il est indispensable d’ajouter ici un sous-amendement et de dire : « Lorsque le premier ban est en activité, le commandant de la garde civique a le même droit. »

- Ce sous-amendement est mis aux voix et adopté.

L’article 14 ainsi amendé est définitivement adopté.


- La chambre confirme par son vote les amendements introduits dans l’art. 15 devenu art. 17.

L’article 16 devenu article 18 est définitivement adopté.

M. Gendebien. - Je voulais demander la parole pour proposer le retranchement d’un mot ; mais qu’importe. Votre loi, dans mon opinion, est entachée de trop de vices d’inconstitutionnalité pour m’arrêter à si peu de chose. C’est la cinquième loi que vous faites sur la garde civique ; vous serez appelés à en faire une sixième qui ne sera pas meilleure que les autres.


- Les amendements apportes aux articles 18 et 19 sont définitivement adoptés.


L’article 20 est adopté dans les termes suivants :

« Les jugements rendus contradictoirement seront exécutoires sans avoir été signifiés. Le délai pour se pourvoir en cassation contre les jugements contradictoires sera de dix jours francs à compter du jour de la prononciation du jugement, à peine de déchéance.

« Après avoir prononcé le jugement, le président avertira le prévenu de la faculté qui lui est accordée de se pourvoir en cassation et du terme dans lequel l’exercice de cette faculté est circonscrit. »

Vote sur l'ensemble

M. le président. - S’il n’y a pas d’opposition, il va être procédé à l’appel nominal.

M. Smits. - Il doit être entendu que toutes les dispositions des lois antérieures qui ne sont pas contraires à celles de la loi que vous allez voter, sont maintenues. Ne serait-il pas convenable de l’exprimer dans la loi ?

M. le président. - Il est de droit que les dispositions des lois antérieures qui ne sont pas contraires à la présente loi, subsistent.

M. Rogier. - Il y a quatre ou cinq lois sur la garde nationale ; il me semble que pour fixer l’opinion de ceux qui sont appelés à exécuter ou à faire exécuter la législation sur la garde civique, on devrait formuler l’observation de M. Smits et l’introduire dans la loi. J’en fais la proposition.

M. de Brouckere. - C’est complètement inutile. Il est de principe général qu’une loi n’abroge une loi antérieure qu’autant qu’elle lui est contraire ; en second lieu, la loi que nous allons voter n’est pas une nouvelle loi, mais seulement une loi introduisant quelques modifications à la loi générale actuellement en vigueur.

Ainsi, une loi n’abroge une loi antérieure qu’autant qu’elle lui est contraire, et si on prend quelquefois le soin de mettre cette déclaration dans la loi nouvelle, c’est pour éviter toute espèce d’ambiguïté ; encore ne le fait on que quand il s’agit de remplacer une loi générale par une autre loi générale ; mais on ne le fait jamais que quand il ne s’agit que de modifier quelques dispositions d’une loi générale qui resté en vigueur.

La disposition est donc, comme je le disais, complètement inutile.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Tout le monde est d’accord sur l’inutilité de la disposition. Les lois antérieures ne sont abrogées qu’en ce qu’elles ont de contraire à la présente loi.

M. Smits. - Je n’avais pas fait de proposition, j’ai voulu seulement constater ce qui vient d’être établi par les déclarations qui ont été faites.

On procède à l’appel nominal sur l’ensemble de la loi.

En voici le résultat ;

55 membres ont pris part au vote.

6 se sont abstenus.

50 ont répondu oui.

5 ont répondu non.

En conséquence le projet de loi est adopté. Il sera transmis au sénat.

Ont répondu oui : MM. Verrue, Brixhe, Cols, Cornet de Grez, de Behr, H. Dellafaille, de Longrée, de Man d’Attenrode, de Meer de Moorsel, F. de Mérode, W. de Mérode, de Muelenaere, de Nef, de Roo, Dechamps, de Sécus, Desmet, de Stembier, de Terbecq, de Theux, Dewitte, d’Hane, d’Hoffschmidt, d’Huart, Donny, Dumortier, Eloy de Burdinne, Ernst, Hélias d’Huddeghem, Hye-Hoys, Milcamps, Nothomb, Pirson, Polfvliet, A. Rodenbach, C. Rodenbach, Rogier, Schaetzen, Simons, Smits, Thienpont Ullens, Vandenhove, Vanderbelen, Vanderheyden, Verdussen, H. Vilain XIIII, C. Vuylsteke, Watlet et Raikem.

Ont répondu non : MM. de Brouckere, Desmanet de Biesme, Dumont, Gendebien et Liedts.

M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités, aux termes du règlement, à énoncer les motifs de leur abstention.

M. A. Dellafaille. - Je n’ai pas voulu voter contre la loi parce que tout le monde reconnaît que la garde civique est dans un état fâcheux de désorganisation. Quoique j’aie eu l’honneur de faire partie de la commission chargée de la rédaction du projet que vous venez d’adopter, je n’ai pas pu cependant donner ma voix à une loi qui impose à la commune des charges dont je ne puis apprécier la portée, vu la promptitude avec laquelle la discussion a été bâclée. Tels sont les motifs de mon abstention.

M. de Puydt. - La loi que vous venez de voter contient des dispositions que j’approuve. Mais elle me semble incomplète dans son ensemble et a le tort, à mes yeux, de retarder indéfiniment la loi définitive d’organisation de la garde civique. Ne voulant cependant la repousser par mon vote négatif, j’ai dû m’abstenir.

M. Desmaisières. - Ayant concouru à la rédaction de la loi sur la garde civique, j’ai pu apprécier, comme membre de la commission, jusqu’à quel point il était nécessaire de modifier certaines dispositions de la loi générale sur la garde civique. Sous ce rapport j’aurais vivement désiré pouvoir donner un vote approbatif au projet. Mais comme les modifications qui ont été introduites imposent des charges nouvelles aux citoyens, comme la constitutionnalité de plusieurs de ces modifications a été contestée par plusieurs membres de cette assemblée, n’ayant pas eu le temps nécessaire pour vérifier jusqu’à quel point ces objections étaient fondées, je n’ai pas voulu émettre un vote approbatif ou improbatif, d’autant plus que je ne croyais pas qu’il y eût péril en la demeure pour adopter une loi faite avec tant de précipitation.

M. Duvivier. - Si, comme je me plais à le reconnaître, la loi contient des améliorations qui auraient pu me décider à lui accorder mon vote approbatif, les débats auxquels elle a donné lieu n’ont pas entièrement dissipé mes doutes sur les inconstitutionnalités que certaines dispositions renferment : dans cette position, j’ai cru qu’il était de mon devoir de m’abstenir.

M. Jadot. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs que MM. Duvivier et Desmaisières.

M. Meeus. - Je me suis abstenu parce que, n’ayant pris que fort peu de part à la discussion, je n’ai pu me former une opinion qui motivât mon vote.

Projet de loi portant le budget du ministère de la justice de l'exercice 1835

Rapport de la section centrale

M. Liedts, rapporteur. - J’ai l’honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale sur le budget du département de la justice.

- L’impression du rapport est ordonnée.

Projet de loi portant le budget du ministère de l'intérieur de l'exercice 1835

Rapport de la section centrale

M. H. Dellafaille, rapporteur. - J’ai l’honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale sur le budget du département de l’intérieur. Je préviens la chambre que ce rapport ne pourra être livré à l’impression que dans deux ou trois jours.

- L’impression du rapport est ordonnée.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je demande que l’on fixe la discussion du budget de mon département après celle du budget du ministère de l’intérieur.

- La proposition de M. le ministre de la justice est accueillie.

Pièces adressées à la chambre

M. le président. - Le bureau du sénat porte à la connaissance de la chambre des représentants que cette assemblée a adopté successivement dans ses dernières séances les projets de loi relatifs à la prorogation des pouvoirs de la commission des monnaies, à un transfert au budget du ministère de l’intérieur pour l’exercice 1833, à un transfert au budget du ministère de la justice pour le même exercice, à une augmentation pour le Moniteur Belge pendant l’exercice 1834.

- Pris pour notification.

Formation d'une délégation auprès du roi, pour la nouvelle année

M. Helias d’Huddeghem. - Des affaires rendant mon départ de Bruxelles indispensable pour demain, je déclare à l’assemblée que je regrette de ne pouvoir faire partie de la députation chargée de complimenter S. M. à l’occasion du jour de l’an. Je prie la chambre de vouloir bien me désigner un remplaçant.

M. le président. - Il va être procédé au remplacement de M. Helias d’Huddeghem par la voie du sort.

- Le tirage au sort désigne M. Dumortier. (Hilarité général.)

M. Dumortier. - J’ai déjà déclaré ne pouvoir accepter cette mission, dans la nécessité où je suis de partir ce soir.

- Le second tirage désigne M. de Roo.

M. de Roo. - Je ne puis accepter par les mêmes motifs que M. Dumortier.

M. Dewitte. - Pour mettre un terme à des refus semblables, je resterai et déclare consentir à faire partie de la députation.

- En conséquence M. Dewitte, précédemment désigné par le sort, complétera le nombre des membres de la députation.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Il nous reste à fixer l’ordre du jour de la prochaine séance.

M. Dumortier. - Je demande que la chambre décide auparavant l’époque de cette séance.

- Plusieurs membres. - Dans 15 jours.

M. Dumortier. - Je propose de fixer cette séance au 12 janvier, c’est-à-dire lundi en huit.

M. Eloy de Burdinne. - Il me paraît que le congé que l’on demande est singulièrement prolongé. Quand on jette les yeux sur les travaux que nous avons à terminer pendant la présente session, on en est vraiment épouvanté (hilarité) : vous conviendrez que si, en présence de lois urgentes, nous nous donnons de longs congés, le pays n’aura ni loi communale, ni loi provinciale.

M. Rogier. - Cela est certain.

M. Eloy de Burdinne. - Remarquez en outre que si vous retardez le vote des budgets, vous devrez nécessairement accorder au gouvernement des crédits provisoires...

M. Nothomb. - Et c’est un détestable système.

M. Eloy de Burdinne. - Veuillez observer en outre que nous devrons voter une loi pour fixer le mode de remplacement de la moitié des membres de la législature, qui aura lieu au mois de mai prochain. (Aux voix ! au voix !) Je crains de déplaire à l’assemblée ; comme je tiens à être dans ses bonnes grâces, si elle désire que je me taise, je me tairai. (Hilarité.)

M. F. de Mérode. - Les raisons données par l’honorable préopinant sont bonnes. La chambre a trop de travaux à terminer pour se donner un congé de quinze jours. Huit jours lui suffiront. J’en fais la proposition.

M. Gendebien. - Vous êtes bien libres, messieurs, de prendre les congés qui vous conviennent. Mais vous me permettrez de vous rappeler qu’il y a au fond de ces congés une question de délicatesse qu’il ne faut pas perdre de vue.

La plupart des membres de cette chambre reçoivent un traitement mensuel de deux cents florins, à titre d’indemnité de séjour dans la capitale. Je ne sais pas s’il est convenable de se donner ainsi des congés et de percevoir une indemnité alors que l’on ne remplit pas la condition à laquelle on subordonne le paiement.

Ce n’est pas que je m’élève contre le taux de l’indemnité de deux cents florins que vous recevez ; mais je trouve qu’il est convenable que dans l’enceinte où retentissent si souvent des paroles toutes d’économie, alors que nous venons de voter des centimes additionnels à titre de subvention de guerre, alors que, s’il faut en croire le ministère, nous sommes menacés d’une invasion de la part de la Hollande, il me semble convenable d’agiter la question de savoir si votre traitement ou indemnité, n’importe, courra pendant le temps que vous serez absents de Bruxelles. Je vous prie de vous souvenir que vous ne recevez d’indemnité qu’à raison de votre séjour à Bruxelles.

Je demande donc formellement si l’indemnité sera allouée aux membres de cette assemblée pendant l’absence de la chambre.

M. Meeus. - Je crois d’abord que l’on ne peut rien charger relativement à l’indemnité, puisque c’est la constitution elle-même qui l’a fixée. Mais, à raison même des réflexions que vient de faire l’honorable député de Mons, la chambre se doit à elle-même de ne pas prendre un congé trop long. Il me semble que ce délai pourrait être de huit jours seulement. Réunissons-nous le 8 janvier. Ce terme conviendra à tout le monde. Car s’il est trop court pour les membres qui habitent les villes les plus éloignées de la capitale, il reviendra d’autres membres actuellement absents qui les remplaceront.

M. Gendebien. - Je ne propose pas de changement à la loi, en ce qui regarde l’indemnité allouée aux membres de cette chambre. Elle subsistera dans toute la force quant au paiement de cette indemnité. Mais je demande si ce n’est pas aller contre le vœu de cette loi que de percevoir une indemnité de séjour pendant tout un mois, lorsque l’on n’aura siégé peut-être que 8 jours.

Si la loi avait dit : Il sera alloué à chaque membre de la législature une indemnité annuelle de séjour de 3,000 florins, et que vous n’eussiez siégé que pendant 15 jours de toute une année, auriez-vous le courage de percevoir l’intégralité de l’indemnité de 3,000 florins ? Non, messieurs, il faut que vous soyez indemnisés au marc le franc, d’après le temps que vous demeurez loin de vos foyers. Si le mois n’est pas achevé, vous n’avez le droit de recevoir une indemnité que pour le temps de votre séjour dans la capitale.

La question se réduit à ceci : Si l’on alloue deux cents florins d’indemnité par mois, combien doit-on allouer pour 15 jours de séjour ? Vous voyez que la réponse est facile. Je puis pertinemment résoudre cette question ; car, depuis que je suis député, je n’ai jamais reçu un sou d’indemnité précisément parce que je ne fais pas de séjour hors de mes foyers.

M. F. de Mérode. - Les raisons alléguées par l’honorable M. Gendebien pour engager la chambre à ne pas s’ajourner à une époque trop éloignée, sont d’autant plus justes que la constitution ne se sert pas du mot de traitement, mais bien de celui d’indemnité. Or, pour que l’on soit indemnisé de quelque chose, il faut qu’il y ait matière à indemnité. Je demande que les observations de M. Gendebien soient prises en considération.

M. Nothomb. - Que M. Gendebien formule sa proposition.

M. Gendebien. - Je n’ai pas de proposition à formuler.

M. Nothomb. - Si M. Gendebien en avait présenté une, j’aurais demandé la question préalable ; non pas que je l’eusse désapprouvée, mais parce qu’elle aurait dérogé à une disposition de la constitution.

M. Gendebien. - Je ne propose pas de dérogation à la loi dans la question que je pose. J’entends l’honorable M. Nothomb me dire que ma proposition aurait dû passer par les sections. Est-ce que je pouvais prévoir que vous quitteriez vos travaux législatifs pour prendre des vacances, alors qu’il n’y a pas 6 semaines que vous êtes réunis ? Ce n’est pas la fixation du nombre de jours dont se composera le congé qui est en discussion ; la véritable question au fond de tout cela, c’est une question d’argent ; c’est une question de délicatesse qui doit tout au moins faire abréger le temps de votre absence.

M. Dumortier. - Faites une proposition.

M. Gendebien. - Je demande formellement que l’on déduise l’indemnité mensuelle de chaque membre les jours de congé que la chambre prendra.

M. Dumortier. - Je crois, en ma qualité de questeur de la chambre, devoir prendre la parole en cette circonstance, quoique je le fasse, je vous l’avoue, avec répugnance.

L’honorable M. Gendebien fait la proposition que, pendant l’ajournement de la chambre, l’indemnité, consacrée par la constitution, ne soit pas payée aux membres qui la perçoivent. Que l’indemnité soit juste, qu’elle soit suffisante ; ce n’est pas à nous à examiner ces questions. Je déclare que, pour ma part, si j’avais été membre du congrès, j’aurais voté contre toute espèce d’indemnité. Mais la constitution a consacré une disposition à cet égard. Nous ne pouvons la modifier sans y déroger.

L’article 52 de la constitution porte :

« Chaque membre de la chambre des représentants jouit d’une indemnité mensuelle de deux cents florins pendant toute la durée de la session. »

Si donc le Roi ajournait la chambre, vous auriez le droit, sans déroger à la constitution, de toucher une indemnité mensuelle.

S’il se trouve des membres qui trouvent plus délicat de ne pas toucher leur indemnité, qu’ils le fassent ; ils auront raison ; d’honorables membres l’ont déjà fait. Mais si d’honorables membres considèrent que, tout en s’absentant 8 jours, ils auront à supporter les frais de quartier de logement, de déplacement, et si par ces motifs ils croient devoir toucher leur indemnités, ils auront également raison.

Je trouve qu’il n’est pas très délicat de la part de M. Gendebien, qui par sa position, comme résidant à Bruxelles, n’a pas droit à toucher l’indemnité, de venir faire une proposition relativement aux personnes qui touchent cette indemnité. Je regrette d’être obligé de faire cette observation.

M. Gendebien. - On m’adresse le reproche d’indélicatesse...

M. Dumortier. - Je ne vous fais pas de reproche d’indélicatesse.

M. Gendebien. - Je vous prie de ne pas m’interrompre ;. quand vous aurez obtenu le droit de me répondre, vous me répondrez.

On m’accuse d’indélicatesse, alors que je propose d’épargner les deniers du peuple ; on fonde cette indélicatesse sur ce que, résidant à Bruxelles, je ne touche pas d’indemnité ; je pourrais, messieurs, la toucher comme tant d’autres ; je n’aurais pour cela qu’à porter mon domicile…

- Un membre. - A la porte de Schaerbeek.

M. Gendebien. - Oui, à la porte de Schaerbeek (soit dit sans vouloir lancer une épigramme à la chambre ; car ce n’est pas moi qui l’ai dit le premier) ; non à la porte de Schaerbeek, mais à ma maison de campagne que j’ai conservée jusqu’en 1832, mais que j’ai vendue parce que je ne me suis pas, comme tant d’autres, enrichi à la révolution ; je pourrais enfin porter mon domicile partout où bon me semblerait ; je ne ferais que ce que tant d’autres font, alors même qu’ils n’ont pas les mêmes motifs qui pourraient m’y autoriser.

Quoi que l’on en dise, messieurs, j’ai toujours montré respect à la loi ; je l’exécute, je la respecte même à mes dépens, et jamais je n’aurai recours à des subtilités pour me soustraire à une charge ou pour me procurer un bénéfice que je crois illégal. Je crois avoir répondu au reproche d’indélicatesse qui m’a été adressé. Je ne pouvais mieux le faire qu’en démontrant que j’ai été, pour ce qui me concerne, extrêmement délicat dans la circonstance que l’on a citée. Je demande pardon à la chambre et au pays de parler de moi ; c’est M. Dumortier qui m’y a contraint.

Maintenant, pour vous prouver que je n’ai pas en vue de vous priver de vos indemnités, je retire ma proposition ; d’autant plus que les intérêts de la nation ne souffriront pas beaucoup de votre absence si elle ne se prolonge pas plus de huit jours après le 1er janvier. Mais si elle se prolongeait au-delà, dût M. Dumortier trouver qu’il y a là de l’indélicatesse, je renouvellerais ma proposition.

M. Dumortier. - Je n’ai voulu rien dire de désobligeant à l’honorable préopinant ; seulement, comme il a dit que jamais il n’avait touché son indemnité, j’ai cru devoir expliquer que, résidant à Bruxelles, il n’avait pas droit à l’indemnité. Mais nous qui n’habitons pas Bruxelles, nous avons des frais que n’ont pas les députés domiciliés à Bruxelles.

Si j’avais eu l’honneur de siéger au congrès, j’aurais voté contre l’indemnité ; mais l’indemnité a été admise par la constitution. On propose de l’écarter ; j’ai cru que, comme questeur, comme obligé par mes fonctions de mandater l’indemnité des membres de la chambre, je devais m’opposer à cette proposition ; il me semble qu’elle est d’autant plus insolite que la constitution ne s’explique pas sur les absences que la chambre peut faire.

- La proposition de fixer la prochaine séance au 15 janvier est mise aux voix ; elle n’est pas adoptée ; celles de fixer la prochaine séance au 13 janvier et au 12 janvier sont successivement mises aux voix et rejetées.

La proposition de fixer la prochaine séance au 8 janvier est mise aux voix et adoptée.

La séance est levée à 4 heures 1/2.