(Moniteur belge n°35, du 4 février 1834)
(Présidence de M. Raikem)
M. de Renesse fait l’appel nominal à midi et demi.
M. H. Dellafaille donne lecture du procès-verbal de la séance d’avant-hier, qui est adopté sans réclamation.
M. de Renesse fait connaître l’objet d’une pièce adressée à la chambre ; cette pièce est renvoyée à la commission des pétitions.
M. le président. - La chambre en est restée au chapitre III intitulé : « Administration des contributions directes, douanes et accises, garantie et poids et mesures. »
M. le président. - « Art. 1er. Traitements des employés du service sédentaire autres que les receveurs : fr. 174,190. »
La section centrale a proposé une nouvelle division par suite de laquelle cet article s’élèverait à 787,440 fr. M. le ministre des finances a adhéré à cette proposition.
- L’article premier est mis aux voix et adopté avec le chiffre de 787,440 fr.
La nouvelle division introduite dans l’article premier impliquant la suppression de l’article 2, il n’est pas mis aux voix. La chambre passe à l’article 3 devenu ainsi l’article 2.
« Art. 2. Traitements des employés du service actif : fr. 4,144,300. »
M. Lardinois. - Chaque fois qu’il est ici question de douanes, on ne manque jamais d’entendre proclamer qu’un changement de tarif est urgent et indispensable. Quant à moi, messieurs, je pense que des modifications sont nécessaires parce que la révolution a altéré nos rapports commerciaux pour quelques-unes de nos industries ; mais je n’admets par l’urgence d’un changement immédiat de notre système de douanes.
En matière de finances, un bon système de douanes est peut-être le problème le plus difficile à résoudre. Dans une pareille question tous les intérêts matériels se heurtent et se combattent : celui du commerce est un obstacle à celui de l’industrie manufacturière, qui à son tour s’oppose aux faveurs que réclame l’agriculture. Cependant, il faut parvenir à concilier ces divers intérêts ou, pour mieux dire, il faut qu’une loi de douanes rencontre l’intérêt du plus grand nombre, car il est impossible de satisfaire complètement aux besoins et aux prétentions de toutes les industries ; d’ailleurs vous ne pouvez protéger l’une contre la concurrence sans nuire à l’autre.
Dans tous les pays on a pu remarqué que les industriels les plus exclusifs se trouvent parmi les manufacturiers ; ceci se conçoit facilement, parce que, pour élever une manufacture, on a besoin de grands capitaux ; qu’il faut sans cesse perfectionner sa fabrication, et que les bénéfices que l’on retire de ses produits ne sont pas en rapport avec toutes les chances auxquelles on est exposé. Cependant, depuis quelques années, les fabricants éclairés ont une tendance plus libérale ; ils ne demandent plus qu’on repousse les produits étrangers ; ils désirent au contraire que le gouvernement cherche à nous ménager des échanges, parce qu’ils connaissent tout le prix des débouchés extérieurs.
Aussi longtemps que la question politique ne sera pas terminée, nous ne pouvons pas nous occuper de la création d’un nouveau système de douanes. La prudence nous le défend ; car nous ne pourrions pas dire pour le moment à quels principes nous devons nous arrêter pour entrer en relations de commerce avec telle ou telle nation. Je ne partage pas l’avis de ceux qui critiquent amèrement le système qui nous régit ; je pense qu’il y aurait de la témérité à y porter la hache. Si nous vivions sous une loi moins libérale, nous serions fort embarrassés pour les traités de commerce que nous désirons conclure.
Cette vérité apparaît évidente, lorsqu’on jette les yeux sur ce qui se passe en France. Ne voyez-vous pas qu’elle est tellement enlacée par ses lois prohibitives et restrictives que ses mouvements sont gênés à l’intérieur et paralysés à l’extérieur ; que, lorsqu’il s’agit de modifier un article de son tarif, mille voix intéressées s’élèvent pour arrêter les tentatives du gouvernement en faveur des consommateurs ? Ceci me conduit à vous dire que je ne me fais pas illusion sur la possibilité d’un traité de commerce avec la France, à moins que la politique ne nous force à consentir à des conditions qui seraient le sacrifice de nos intérêts matériels. Je dois vous répéter, messieurs, qu’une autre voie nous est ouverte pour lier des rapports commerciaux. Le gouvernement prussien a compris ses propres intérêts et ceux des Etats secondaires de l’Allemagne. Une grande ligne commerciale s’organise depuis longtemps ; elle prend tous les jours plus d’étendue et de consistance, et je suis sûr qu’en entrant dans cette association, notre commerce et notre industrie ne pourraient qu’y gagner.
Plusieurs projets de loi vous sont soumis pour modifier certains articles du tarif des douanes.
M. d’Hoffschmidt. - J’en présenterai un aussi, prochainement.
M. Lardinois. - Je ne doute pas que ces projets de loi ne donnent lieu à de longues et vives discussions dans cette enceinte. Je pense qu’ils sont pour la plupart prématurés et quelques-uns même inadmissibles, surtout ceux qui tendent à faire hausser le prix des denrées de première nécessité. Nous agirions peut-être prudemment en ajournant la discussion de toutes ces lois partielles, jusqu’à ce que le temps fût venu de discuter un projet de loi complet. En attendant, je me rallie à ceux qui demandent que notre ligne de douanes soit mieux gardée, et je voterai toutes les sommes que ce service exigera.
M. A. Rodenbach. - Messieurs, si nous faisions partie du royaume des Pays-Bas, l’honorable préopinant aurait parfaitement raison ; mais après notre révolution, il est vraiment impossible que nous conservions le tarif néerlandais. Je le prouvé par un exemple : lorsque la Belgique était incorporée à la Hollande, les toiles étrangères n’étaient frappées que d’un droit de 2 ou 3 p. c., et ce dans l’intérêt des toiles de Hollande, dans l’intérêt des négociants hollandais, qui faisaient le commerce des toiles avec l’Allemagne, avec les Grandes-Indes.
Mais ce taux de 2 ou 3 p. c. est ridicule ; c’est d’un droit beaucoup plus élevé, d’un droit de 10 p. c. qu’il faudrait parler.
D’un autre côté, il y a des droits qu’il faudrait supprimer ou réduire. Ainsi le droit imposé à la sortie des bestiaux dont j’ai déjà eu l’occasion de parler, porte un grand préjudice à notre industrie et a soulevé des plaintes dans la Flandre occidentale et dans un grand nombre de provinces. Je pense donc avec M. le ministre de l’intérieur qu’il faut changer le tarif des douanes. Il faut le changer en ce qui concerne les sucres. Comme vous l’a dit un honorable député d’Anvers, le droit auquel ils sont imposés est ruineux pour nos raffineries. Parlera-t-on encore de remettre ces changements à 2 ou 3 ans ? Mais ces retards ruinent le commerce et l’industrie.
(Erratum au Moniteur belge n°36, du 5 février 1834 :) Il faudrait d’abord hausser l’ensemble du tarif ; nous pourrions alors dire à la France, à l’Angleterre : « Faites un pas, nous en ferons deux. » Nous pourrions ainsi le baisser graduellement. Mais notre tarif restant tel qu’il est, la France et l’Angleterre se refuseront à la demande que nous pourrons leur faire de changer le leur et nous répondront : « Aucun changement n’est nécessaire ; votre tarif est très bas, nous en sommes très contents. »
Je ne terminerai pas sans me plaindre encore de notre mauvais système de douanes. Il n’y a pas de pays où la fraude soit plus facile. J’ai déjà fait à ce sujet à M. le ministre des finances des observations auxquelles il n’a pas pu répondre. Je finis en engageant le gouvernement à s’occuper de nos intérêts matériels. Il en est plus que temps.
M. Desmet. - Messieurs, nous ne devons plus revenir sur les modifications qui sont à faire à notre tarif actuel des douanes, car nous sommes d’accord avec le gouvernement que nous pouvons les faire partiellement et quand les circonstances en exigeront.
Mais je suis fâché que M. le ministre de l’intérieur ne soit pas ici, parce que je désirerais savoir de lui si nous pouvons espérer que la commission nommée pour ouvrir des négociations, afin de conclure un traité de commerce avec la France, va bientôt remplir sa mission ; car vous savez, messieurs, combien il est dans l’intérêt de notre pays comme dans celui de la France même que les anciennes relations de commerce renaissent entre ces deux nations, qui regretteraient longtemps leur séparation et ces relations libres de commerce si considérables et si avantageuses à l’une et à l’autre, et qui devraient aujourd’hui, depuis l’existence d’une confédération allemande, se renouer plus intimement.
Puissent donc les deux gouvernements, éclairés sur les véritables intérêts des deux peuples, rétablir ces liaisons si utiles, sur le même pied de liberté et de réciprocité en franchise de tous droits, comme elles ont existé lors de la réunion !
Je voudrais sur un autre point attirer encore l’attention du gouvernement.
Au lieu de faire tout ce que nous pouvons pour lasser la Hollande et forcer son gouvernement à entrer dans des voies de paix et de conciliation, il me semble qu’au contraire nous faisons tout ce qui est possible pour l’encourager à persister sans sa position hostile.
Avec une complaisance difficile à expliquer, nous recevons de la Hollande, et même sous pavillon hollandais, non seulement toute espèce d’articles coloniaux, mais encore toute espèce d’articles agricoles, qu’elle veut bien nous livrer, n’importe si c’est un bénéfice ou un préjudice pour notre propre agriculture. Ce ne sont pas seulement les sucres et les cafés qui nous arrivent de Hollande en quantité, et qui par une bizarrerie inconcevable sont moins imposés à l’entrée que ceux venant directement dans nos ports par nos propres navires ou par ceux de nations amies ; mais ce sont encore les fromages, le bétail même, les grains, les pommes de terre, les joncs, etc., etc., qui s’introduisent chez nous en abondance et sans difficulté. Nous savons tous quelle importance la Hollande attache à pouvoir débiter ses fromages, et combien se trouverait gênée son agriculture si on mettait un obstacle sérieux à les laisser entrer en Belgique.
Je ne sais si vous êtes informés de la grande quantité de bétail gras que les Hollandais envoient sur vos marchés : vous ne devez pas aller loin pour vous en assurer, c’est surtout celui de Bruxelles qui en est encombré. L’importance de l’exportation du bétail est encore plus grande pour la Hollande que ne l’est celle de ses fromages, et si on arrêtait ce commerce, vous porteriez un coup fatal au gouvernement de Guillaume, vous le feriez bientôt plier et les Hollandais le forceraient de se désister de ses sottes prétentions, pour obtenir une conciliation et des relations libres de commerce avec la Belgique.
J’engage beaucoup le gouvernement à vouloir attacher un instant son attention sur ces observations ; je crois que, par ces moyens, on réussira plutôt que par ceux de la diplomatie, et que dans ce moment surtout on en aurait un bon résultat, car on voit bien que l’entêtement et l’intérêt dynastique de Guillaume commencent à lasser les Hollandais.
M. l’administrateur des douanes, commissaire du Roi. - Messieurs, dans la dernière séance, l’honorable député A. Rodenbach, en interpellant le ministre des finances sur la fraude en soieries et étoffes manufacturées, qui se pratique par nos frontières vers la France en quantités énormes, en conclut que nos moyens de répression sont inefficaces pour la repousser, et il en propose quelques-uns qui seraient propres à atteindre ce but.
En premier lieu, il signale celui indiqué par l’honorable député Vilain XIIII dans la séance du 29 janvier, l’emploi de détachements militaires sur le rayon frontière ;
En deuxième lieu, la coopération des habitants des communes placées dans le rayon de la douane.
Enfin, l’extension du rayon frontière au territoire réservé.
J’ai l’honneur d’observer, quant à la coopération de la troupe pour le renforcement du service de la surveillance des douanes, que ce moyen a été mis en usage par le précédent gouvernement à diverses époques. D’abord, en 1818 et 1819, on employa des détachements de cavalerie légère sur les frontières vers la France, pour renforcer le service à cheval de la douane, à l’époque où la fraude s’opérait en bandes à cheval, particulièrement dans la province du Hainaut ; on y joignit même la gendarmerie stationnée alors en assez grand nombre de ce côte.
Une nouvelle organisation de l’espèce se fit ensuite en 1826. On plaça sur toute la ligne vers la France, depuis la côte du mer jusqu’à la Moselle, des détachements d’infanterie.
Cet essai, qui a été maintenu pendant plusieurs années, n’a nullement répondu aux résultats qu’on en espérait.
La fraude n’en a été ni plus ni moins active, et l’assurance est restée au taux modique de 4 à 4 1/2 p.c.
Depuis, la fraude à cheval dans le Hainaut a cessé par l’achèvement du canal d’Antoing à Mons, qui lui barrait le passage, et par la difficulté de pénétrer ailleurs dans le pays, par suite des localités montueuses ou coupées du terrain.
Quant à l’appui donné par la troupe au service de la douane, diverses circonstances inhérentes à ce genre de service auxiliaire ont amené ces résultats.
Bien que les détachements de militaires aient été disséminés parmi les brigades des douanes et dirigés par elles dans leur surveillance, il a fallu, pour maintenir parmi les soldats une espèce de discipline et pourvoir à leur nourriture, les réunir par pelotons ou chambrées. Ces localités, où se trouvait réuni un personnel nombreux, étaient parfaitement connues des fraudeurs et soigneusement évitées.
Le soldat, n’ayant ni la connaissance du terrain ni du genre de service de la douane, où il faut employer plus souvent la ruse que la force, rendait bien peu de service, pendant la nuit surtout, qui, comme l’on sait, est la période principale d’activité de la fraude.
Faute donc de bien connaître les accidents du terrain, ils n’osaient s’aventurer à la poursuite des fraudeurs, lorsqu’ils passaient à leur portée.
J’ai été plusieurs fois à même de constater ce fait lorsque je dirigeais personnellement des services de nuit sur les frontières : d’ailleurs les communes où ces détachements étalent stationnés ne cessaient de réclamer tant contre ce surcroît de charge qu’à cause de la démoralisation qu’elle provoquait ; les chefs de corps se plaignaient du relâchement dans la discipline et de la détérioration dans l’équipement du soldat. Le service de la surveillance de la douane n’en retirant que peu d’avantages, ces motifs firent enfin révoquer cette mesure qui coûta beaucoup d’argent par l’augmentation de solde et indemnité de logement que l’on avait dû donner aux officiers et soldats.
Quant à la coopération des habitants des communes du rayon, ce moyen serait non seulement moins efficace, mais en outre très dangereux.
Sur les frontières la fraude est un moyen d’existence pour une partie de la population ; les habitants des communes qui s’en occupent ont leurs parents et amis qui leur prêtent aide et assistance contre l’action de la douane ; cela se voit tous les jours, et nos nombreux procès-verbaux en font foi.
Si l’on accordait la moindre coopération aux habitants des communes frontières dans le service de la surveillance ou dans une délégation quelconque en douane, ce serait anéantir tout moyen de répression de la fraude.
L’extension du rayon n’est également pas nécessaire pour renforcer le service ; deux lieues suffisent pour suivre la fraude lorsque le service est bien exécuté.
La grande étendue de nos frontières occasionnerait, par l’extension du rayon, ne fût-elle que d’une lieue, une agglomération d’une infinité de communes ou la police des douanes devrait s’exercer, et occasionnerait une gêne inutile aux habitants.
Cette mesure ferais bien certainement élever de nombreuses réclamations.
Il n’y a, messieurs, que deux moyens, non pour empêcher entièrement la fraude, ce qui est impossible, mais pour la rendre assez difficile pour que la prime d’assurance fasse élever le prix des objets importés en fraude, de manière à diminuer l’avantage que l’exemption de tout droit leur donnerait tant sur ceux qui les ont acquittés que sur les produits de notre propre industrie C’est, en un mot, un droit prélevé sur la fraude.
Le premier moyen que j’indique est de mettre notre force de répression en rapport avec notre tarif, c’est-à-dire, que si vous maintenez des droits élevés, il faut un personnel de douane nombreux, une loi sévère et répressive.
Si le tarif est modéré, un personnel moins nombreux peut suffire, et la loi de douane peut être moins rigoureuse et plus libérale.
Notre position, messieurs, n’est pas encore fixée sous ces rapports ; car si nous avons peu d’objets prohibés, il en existe encore plusieurs soumis à des droits élevés, tels que :
Les manufactures de coton, fl. 85 les 100 kil.
Dito imprimé, fl. 100 les 100 kil.
De laine, fl. 54 les 100 kil.
Mélangées, fl. 90 les 100 kil.
Soies, fl. 40 les 100 kil.
Filoselle, fl. 20 les 100 kil.
Thé, fl. 34 les 100 kil.
Dito cargaisons rompues, fl. 51 les 100 kil.
Epingles, fl. 30 les 100 kil.
Papier, 15 p. c.
A meubler, 10 p. c.
Draps et casimirs, bonneterie, 10 p. c.
Dito de France, 20 p. c.
Bougies, fl. 40 les 100 kil.
Fil de coton, fl. 40 les 100 kil.
Dito teint, fl. 50 les 100 kil.
Vous sentez que, dans cet état de choses, il est difficile d’établir une organisation de la douane telle qu’elle puisse atteindre le but de son institution, surtout que l’on a toujours dû suivre la voie de l’économie dans la dépense.
Le second moyen est de mieux rétribuer les employés subalternes, et celui-là est indispensable. L’omission de cette mesure fait que chez nos voisins du midi, malgré l’excellente direction du service, un personnel très nombreux, un rayon de quatre lieues, la faculté de saisir partout et en tout lieu les objet prohibés et ceux non revêtus des marques de nationalité, etc., la fraude s’y opère d’une manière effrayante. Si ce que je dis ici n’avait de la publicité, j’entrerais dans quelques détails.
Il me suffira de dire que, dans le courant de l’année, il y a été importé en fraude sur la frontière d’un seul département, pour un seul objet prohibé, pour une valeur de plus de 7 millions de francs !
D’ailleurs, n’a-t-on pas signalé à la tribune française l’abus scandaleux qu’il a été fait des primes d’exportation ?
Dix inspecteurs ont été envoyés extraordinairement sur les frontières ; pendant leur séjour qui a été bientôt connu, le mouvement de la fraude s’est arrêté, mais il a bientôt repris son cours.
Ceci démontre qu’en tout pays, lorsque les prohibitions sont trop multipliées, et les droits trop élevés, il devient impossible d’empêcher la fraude, ce genre d’opérations présentant de trop grands bénéfices. En attendant qu’il soit pris des mesures ou des relations de commerce avec nos voisins, en ce qui concerne les tarifs réciproques, je me suis occupé, d’après les ordres du ministre des finances, d’une organisation de brigades ambulantes pour renforcer notre service. Ce travail sera incessamment soumis par le conseil à M. le ministre.
M. Jullien. - Je suis du nombre de ceux qui pensent qu’on ne doit rien précipiter dans les réformes à apporter au tarif des douanes ; mais, de ce qu’on ne peut toucher au tarif qu’avec beaucoup de prudence et de circonspection, il ne s’ensuit pas qu’on ne doive pas le toucher du tout. Pour moi, je considère comme un véritable non-sens un droit imposé à la sortie des bestiaux. Comment ! lorsque la France offre un débouché à cette branche d’industrie agricole qui a une certaine importance dans le pays, au lieu de la favoriser de telle sorte qu’elle puisse en profiter, vous venez l’entraver par des mesures fiscales ! Je ne comprends pas un tel système. On peut sans inconvénient, ce me semble, aborder la question de ce changement comme aussi celle de savoir s’il ne conviendrait pas de frapper d’un droit plus fort à l’entrée les toiles étrangères. Enfin, il faudrait examiner s’il n’y a pas quelques parties du tarif qui devraient subir des modifications et des changements dans l’intérêt de l’industrie.
Venant au service des douanes qui fait particulièrement l’objet du chapitre du budget en discussion, je rappellerai à la chambre qu’il se composait précédemment de deux rayons de douanes, qu’on proposa de le changer en prétendant qu’un seul rayon étant plus compacte, plus serré, produirait de meilleurs résultats, et que la chambre cédant à ces motifs adopta cette nouvelle organisation. Je pensais qu’elle aurait un effet tout contraire à celui qu’on s’en promettait. Je ne m’étais pas trompé ; car on vous annonce qu’on propose bientôt de changer l’ordre des choses actuel. Je m’attends même à ce que l’on propose de rétablir les deux rayons de douanes qui existaient par le passé, l’on veut avoir une garantie contre la fraude.
Quant à la proposition qui a été faite par l’honorable M. Rodenbach, d’organiser des espèces de brigades de douaniers volontaires, que l’on prendrait parmi les habitants des communes frontières, je suis de l’avis de M. le commissaire du Roi, et je crois qu’organiser ces douaniers volontaires, ce serait organiser la fraude sur une plus large échelle. Nous savons tous que les habitants des communes frontières vivent en grande partie de la fraude. Si vous preniez parmi eux des douaniers volontaires, ils profiteraient de leur nouvelle qualité pour faire la fraude, soit pour eux-mêmes, soit pour le compte de ceux qui les dirigeraient. Cette organisation serait donc plus mauvaise que celle actuellement existante.
On ne peut plus parler de l’emploi de détachements militaires pour protéger le service des douanes ; car on sait l’essai malheureux que nous en avons fait. Outre le peu de résultat que nous en avons obtenu, nous avons vu qu’on ne pouvait employer les troupes de ligne à ce service. Ainsi, ce qu’il faut faire c’est de renforcer notre douane, c’est d’établir deux rayons au lieu d’un, c’est d’augmenter le personnel. La position géographique de notre pays, dont la frontière est presque partout d’un accès si facile, nous y oblige, et ne permet pas de laisser un personnel si peu nombreux, d’après la manière dont le service se fait maintenant.
Je vois figurer à l’article 3, 4,144,300 fr., pour traitements des employés du service actif. Je suis informé que cette somme n’est pas reçue intégralement par ces employés. J’ai à ce sujet à signaler à la chambre un abus sur lequel elle désirera sans doute recevoir des renseignements de la part de M. le ministre des finances. Lorsque nous votons les fonds pour le traitement des employés des douanes, nous croyons que chaque employé prélève lui-même sur son traitement la dépense de son uniforme. Il n’en est pas ainsi. Au lieu de cela, ils subissent une retenue sur leur traitement pour leur habillement, qui leur est expédié d’un magasin créé à cet effet à l’administration centrale.
Il résulte de l’institution de ce magasin général que l’on confectionne à Bruxelles l’habillement des douaniers de royaume, de tout le royaume. C’est à Verviers que se font tous les achats d’étoffes. Ainsi les étoffes viennent d’abord de Verviers à Bruxelles, et de Bruxelles elles vont toutes confectionnées dans les résidences des divers douaniers. Ce qui occasionne des frais de transport qui ne laissent pas que d’être coûteux.
Il y a plus : ces habillements sont très souvent mal confectionnés, et l’employé qui les reçoit ne peut faire parvenir ses plaintes à l’administration. Si, au contraire, on avait laissé à chaque direction de province le soin de fournir l’habillement des employés, qu’un employé se trouvât mécontent de la manière dont il était confectionné ou de la qualité de l’étoffe, qu’il ait trouvé enfin qu’il ne valait pas la somme qu’on le lui faisait payer par une retenue sur son traitement, il portait alors sa plainte à son chef immédiat, qui la transmettait au directeur de la province.
Si celle-ci n’y faisait par droit de suite, l’inspecteur lui faisait rendre justice, et veillait constamment à ce que le directeur ne fît pas de mauvaises fournitures, des bénéfices sur le traitement de pauvres employés. Mais comment voulez-vous qu’un employé soit accueilli dans ses réclamations de la part des hauts fonctionnaires de l’administration centrale, qui dirigent le magasin central d’habillement ? Il aura beau s’adresser à ses différents chefs, il faudra bien que sa plainte aboutisse à l’administration centrale qui assurément ne se reformera pas elle-même. Sa plainte sera donc étouffée.
Un autre inconvénient que présente ce magasin central, c’est d’avoir enlevé aux diverses provinces où résident les douaniers l’avantage qu’elles trouvaient dans l’achat des étoffes pour leur habillement, et dans les frais de confectionnement. Lorsqu’il en était ainsi, les employés des douanes devaient recevoir leur habillement bien plus vite, puisque le lieu d’où il leur était expédié était beaucoup plus proche.
Je me défie des magasins centraux d’habillements ; il y en avait un pour l’armée qui a donné lieu à des plaintes. Je crois qu’en cette circonstance aussi il y a abus ; j’appelle sur ce point l’attention de M. le ministre des finances. Ces observations sont le résultat d’un rapport qui m’a été fait, et que j’aurai lieu de croire exact tant que M. le ministre ne nous aura pas donné d’explications.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Je suis en mesure de donner les explications demandées ; mais je vois que l’honorable commissaire du Roi se dispose à le faire : je me réserverai donc d’appuyer ce qu’il pourra dire à la chambre, s’il omettait les faits qui sont à ma connaissance.
M. l’administrateur des douanes, commissaire du Roi. - Je répondrai à l’honorable préopinant que le système des adjudications, pour l’achat de grandes masses d’objets, a toujours présenté l’avantage du bon marché. L’administration a d’ailleurs toujours accueilli les plaintes très rares qui lui sont parvenues sur la manière dont les habillements étaient confectionnés ou sur la qualité des étoffes. De plus, tous les employés des douanes s’accordent à reconnaître que jamais ils n’ont été habillés à si bon marché.
L’habillement et l’équipement dans les provinces présentaient de grands inconvénients. L’uniforme n’était pas observé : on ajoutait dans une province, on retranchait dans une autre ; et comme très souvent on change les employés, qu'on les envoie d’une province dans l’autre, l’habillement présentait partout beaucoup de disparate. L’administration surveille d’ailleurs, avec le plus grand soin, le bureau chargé de la direction du magasin central.
M. A. Rodenbach. - Lorsque j’ai appuyé la proposition de notre honorable collègue M. H. Vilain XIII de mettre des troupes sur la frontière pour empêcher la fraude manifeste qui s’y fait, c’est que j’ai pensé que pour cela tous les moyens étaient bons ; c’est dans le même but que j’ai parlé d’organiser des douaniers volontaires. Il faut bien que nous cherchions à indiquer quelque moyen d’arrêter la fraude, lorsque, de son côté, le gouvernement ne fait rien pour l’empêcher.
M. le commissaire du Roi a parlé de l’utilité des brigades de douanes ; pourquoi donc ne les a-t-il pas organisées ? Messieurs, la fraude se fait sur des quantités considérables de marchandises, et c’est par millions qu’elle porte préjudice à l’Etat. Il ne s’agit pas de bagatelles. Il faudrait changer les employés de résidence ; autrement, ils peuvent contracter des habitudes avec les fraudeurs ou leurs associés. Il faudrait aussi que le gouvernement fît examiner les marchandises dans les entrepôts. (Erratum au Moniteur belge n°36, du 5 février 1834 :) Il est à ma connaissance qu’à Anvers on a introduit de la laine pour du coton ; la différence dont on a fraudé le trésor est assez forte, puisque les cotons sont frappés d’un droit de 85 florins par cent kilogrammes et les laines d’un droit de 34 florins.
La concussion est aujourd’hui à l’ordre du jour. C’est dans le grandiose que se fait la fraude. C’est un métier déshonorant que celui de fraudeur ; le gouvernement encourage, pour ainsi dire, cette filouterie par son mauvais système de douanes, et démoralise ainsi le pays.
Il en est de la législation des douanes comme du projet de loi sur les patentes, de celui sur les contributions, qu’on nous avait promis et qui n’arrivent pas ; on promet toujours d’améliorer le système des douanes, on le répète à toutes les sessions et on ne fait aucun changement. Il serait cependant bien à désirer qu’on s’occupât d’une branche de l’administration, si importante pour le commerce, l’industrie et le revenu public.
M. Eloy de Burdinne. - Lorsque nous nous occuperons de la révision d’une partie de notre tarif (discussion que l’honorable M. Lardinois repousse beaucoup trop loin), je lui répondrai ce que je croirai nécessaire, et j’expliquerai les intentions que j’ai eues dans ma proposition sur les céréales. Je ne veux pas faire enchérir les blés, mais je veux éviter qu’ils tombent trop bas.
M. Pirson. - Je vois, messieurs, dans cette discussion deux opinions bien distinctes ; l’une, qui n’est soutenue que par un membre, l’honorable M. Lardinois, et qui consiste à ajourner toute discussion sur le tarif des douanes ; l’autre, que je partage avec un grand nombre d’entre nous, et qui tend à la révision immédiate et séparée des diverses parties du tarif, sur la réforme desquelles nous sommes tous d’accord. Je crois que ce travail est nécessaire pour donner quelque prépondérance à notre industrie. Je pense aussi que nous ne pouvons laisser exister des droits qui, par leur élévation, doivent engager à la fraude.
Ce qu’a dit M. le commissaire du Roi m’a paru très sensé ; et il a, ce me semble, très bien répondu à ceux qui avaient proposé de faire protéger par des troupes de ligne le service de la douane ou d’organiser des douaniers volontaires pris parmi les habitants des communes frontières. Il a fort bien établi que ce serait démoraliser l’armée et les habitants des frontières. Plus d’un exemple nous a prouvé que les militaires ne pouvaient être employés à ce service. Ainsi Napoléon, tout grand, tout puissant qu’il était, n’y pu réussir. On se rappelle qu’un maréchal qui avait sa confiance la perdit, parce qu’ayant été destiné à empêcher la fraude, il s’en était fallu de beaucoup qu’il remplît son mandat.
Je ne suis pas partisan de deux lignes de douaniers ; lorsqu’il en est ainsi, la première ligne se repose sur la deuxième, la deuxième sur la première, et personne ne fait son devoir. C’est en masse qu’il faut marcher contre les fraudeurs.
M. Lardinois. - Je serai toujours charmé d’entendre les observations de M. Eloy de Burdinne, je sais qu’en fait d’agriculture ses connaissances sont étendues ; cependant je serais curieux de voir comment il fera comprendre qu’il est de l’intérêt général de frapper la classe la plus nombreuse de la société en faisant élever le prix des céréales.
Je ne me suis pas sans doute fait comprendre tout à l’heure par l’honorable M. Rodenbach. J’ai dit que la révolution avait nécessairement déplacé les relations et les besoins de plusieurs industries, et que je croyais que des modifications étaient nécessaires à notre tarif de douanes, mais je me suis élevé contre la manie de vouloir réviser tout notre système par des lois partielles qui n’auraient aucune corrélation : ce serait vouloir faire un habit d’arlequin.
L’honorable M. Rodenbach trouve la loi qui nous régit trop libérale ; je ne suis pas de son avis ; c’est du reste la question fondamentale qui devra être résolue.
Il donne comme exemple ce qui se passe avec les toiles et les sucres. Il est possible que le droit sur les toiles ne soit pas assez élevé, cette question sera décidée incessamment. Quant à la fraude qui s’exerce sur les sucres, cela résulte du droit énorme qui pèse sur cette denrée, droit qui est un grand appât pour les fraudeurs. Je déduis aussi de ce fait la condamnation du système illibéral.
On vous fait encore observer que la France se contentera de notre tarif actuel, tandis que, s’il était plus élevé, nous aurions une marche pour lui faire des concessions. Si le tarif avait été plus élevé, il se serait créé, messieurs, des industries factices ou réelles, dont vous auriez dû respecter les intérêts, ce qui vous eût mis dans une position bien plus défavorable pour traiter. Avec le tarif actuel, nous sommes mieux à même de diriger nos négociations avec les puissances étrangères, et s’il est nécessaire que nous augmentions ou diminuions certains articles de notre tarif, nous le feront selon que nos intérêts nous le commanderont.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - J’aurai peu de chose à dire sur l’objet qui se trouve en discussion et qui est en quelque sorte étranger à l’ordre du jour. Je partage d’ailleurs entièrement l’opinion émise par MM. Jullien et Lardinois : je pense que ce n’est qu’avec beaucoup de circonspection et de prudence qu’il peut être apporté des changements au tarif des douanes.
Si j’ai bien saisi le sens des observations reproduites par l’honorable M. A. Rodenbach, il a dit que lorsque la Belgique était réunie à la Hollande, les toiles étrangères n’avaient été frappées d’un droit très bas à l’entrée que pour favoriser le haut commerce hollandais et l’exportation dans les Grandes-Indes. Il est vrai que l’exportation aux Indes était considérable, mais les droits n’y faisaient rien car il y avait des entrepôts à Amsterdam, et les droits n’atteignaient les toiles entreposées que lorsqu’elles étaient livrées à la consommation.
M. Jullien vous a présenté quelques observations sur le mode d’habillement des employés des douanes ; j’ai très peu de chose à ajouter à ce qui lui a été répondu par l’honorable commissaire du Roi. Je me bornerai à affirmer que cet objet est traité avec le plus grand soin par les employés supérieurs formant un conseil qui surveille le magasin général d’habillement. Ils en sentent l’importance et s’appliquent à ce que l’habillement soit d’une bonne qualité et soit confectionné avec le plus de soin et le plus d’économie possible.
M. A. Rodenbach a demandé pourquoi il n’existait pas de brigades pour surveiller les lignes.
Mais elles existent en grand nombre déjà. La question n’est donc pas de les créer, mais de savoir si on doit en augmenter le nombre. Cette question fait l’objet d’un rapport qui sera présenté incessamment au ministre.
Ce qui explique les fraudes dont on se plaint, c’est la nature même de notre frontière, de ce qu’elle est en quelque sorte imperceptible : on passe d’un pays dans un autre sans qu’on s’en aperçoive pour ainsi dire ; il n’y a en effet que des bornes qui indiquent où finit un Etat et où un autre commence. Si nous avions des frontières à pic qui présentent une défense naturelle, la fraude serait plus difficile et nous ne serions pas obligés d’avoir un personnel si nombreux dans le service actif de nos douanes. Il y a des pays qui sont favorisés par la nature de leurs frontières, mais assurément ce n’est pas le nôtre.
J’ajouterai que la fraude n’est pas aussi facile qu’on le dit et qu’elle ne se fait pas toujours impunément ; je pourrais citer un grand nombre de saisies et de répressions fréquentes de la fraude. Tout récemment encore, sur la ligne de la Flandre occidentale une fraude considérable a été découverte et réprimée.
M. Eloy de Burdinne. - M. Lardinois ne m’a pas compris. S’il veut connaître les motifs qui me font désirer un prix modéré pour les céréales dans l’intérêt du consommateur et dans l’intérêt général, je le prie de lire ma proposition sur les céréales. J’ajournerai mes observations sur le tarif des douanes, me réservant d’appuyer de tout mon pouvoir la proposition que doit vous faire M. d’Hoffschmidt pour en modifier une partie.
- L’article 2 est mis aux voix et adopté avec le chiffre de fr. 4,144,300.
« Art. 3. Traitement des employés de la garantie : fr. 42,170 »
- Adopté.
« Art. 4. Traitement des avocats de l’administration : fr. 35,670 »
- Adopté.
« Art. 5. Remises proportionnelles des receveurs et percepteurs : fr. 1,645,700 »
- Adopté.
« Art. 6. Traitements des vérificateurs des poids et mesures : fr. 56,000. »
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Les vérificateurs ont deux espèces de traitements : un traitement fixe et un traitement proportionnel ; par ce motif, je propose, au lieu de traitements des vérificateurs, de dire : « Traitements et remises des vérificateurs. »
M. d’Huart. - Quoique je sache que la répartition des crédits appartienne à M. le ministre des finances, je crois cependant qu’il est de notre droit, de notre devoir même, de faire sur cette répartition des observations lorsqu’elle présente une injustice flagrante. Je vois que ce crédit de 56,000 fr. est réparti entre 26 employés des poids et mesures. Ce qui porte à 2,154 francs la moyenne des appointements annuels de chaque employé.
Dans ma province, il y a deux vérificateurs, l’un aux appointement de 900 florins, l’autre aux appointements de 600 florins. C’est, comme vous voyez, beaucoup au-dessous de la moyenne que j’ai indiquée. Mais l’injustice la plus forte, c’est que le vérificateur qui a 900 florins n’a que le sixième de la province dans son ressort, et que celui à 600 florins est chargé des cinq autres sixièmes. Il lui est impossible de vivre avec cette somme, il a adressé ses réclamations à l’administration, mais elles n’ont pas été accueillies. Il a une besogne considérable, une correspondance avec un grand nombre de fonctionnaires ; il a à faire chaque année des tournées qui peuvent être de 200 lieues et que couvre à peine la somme de 339 florins qui lui est allouée pour frais de tournée. Je vous laisse à juger, messieurs, si tout cela est juste. C’est évidemment une erreur de l’administration. C’est dans l’intérêt de la justice que j’appelle sur ce sujet l’attention de M. le ministre.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Je reconnais que s’il en est ainsi que le déclare l’honorable préopinant, les plaintes du vérificateur dont il est question sont fondées. Je vérifierai le fait et j’y apporterai remède.
M. d’Huart. - Je suis sûr de l’exactitude du renseignement que j’ai donné à la chambre.
- L’article 6 est adopté dans les termes proposés par M. le ministre et avec le chiffre de 56,000 fr.
« Art. 7. Frais de bureau : fr. 158,070. »
La section centrale propose de borner le chiffre de cet article à fr. 153,550. - Diminution sur le chiffre du gouvernement, fr. 4,520.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - cet article, auquel étaient joints dans le dernier budget le matériel et les indemnités, s’élevait pour ces trois objets réunis à la somme de fr. 486,410. Il en fut déduit 60,000 fr. sur les indemnités ; et il ne s’éleva plus qu’à 426,410 fr. La section centrale, dans sa séance du 21 octobre dernier qui fût insérée au Moniteur, proposa de réduire cette somme à celle de 375,650 fr. On fit observer que nos frais de procédure s’élevaient à 20,000 fr., et la section centrale proposa en définitive la somme de 395,650. Réduction proposée, 30,760 fr. La proposition intermédiaire qui fut faite par l’honorable M. Coghen d’allouer 400,000 fr. et de limiter ainsi la réduction à 26,310 fr., fut accueillie.
La réduction proposée par la commission, messieurs, n’est pas admissible. Veuillez-vous-en assurer par l’examen de l’état comparatif qui vous a été distribué, qui vous indiquera ce que comprend cet article.
Je pourrais seulement faire remise de 10,000 fr., montant du loyer des bureaux de la garantie, qui doivent être à la charge des communes. Il s’est même élevé à ce sujet un conflit entre le ministère des finances et plusieurs administrations locales qui veulent se débarrasser du loyer du bureau de la garantie, lequel est à leur charge, soit que le bureau soit au sein ou en dehors de la maison commune.
Anvers, Liége et Mons réclament en ce moment dans des termes fort peu obligeants. A Mons, il y a force majeure et les employés de la garantie sont sur le point d’être mis à la porte du local qu’ils occupent. La régence de Liége n’est pas dans des termes beaucoup plus doux avec nous, et la ville d’Anvers n’est pas non plus disposée à nous laisser le local que nous y occupons. Cependant une mesure avantageuse à la commune d’Anvers vient d’être prise par le gouvernement et aurait dû la déterminer à le traiter avec quelques égards. Tous les bureaux des douanes viennent d’y être réunis dans un même local.
Si les dépenses que cet établissement a occasionnés sont dans l’intérêt du service, elles ont également profité au commerce d’Anvers.
Je suis prêt à retirer 10,000 fr., ce qui réduirait d’autant les diminutions beaucoup trop fortes proposées par la section centrale.
M. Dumortier, rapporteur. - M. le ministre a confondu deux articles de son budget. Quant à celui dont il s’agit, la section centrale ne propose pas de réduction, mais elle refuse d’accorder une augmentation, et la différence entre le chiffre demandé par le ministre et celui qu’elle vous propose d’allouer n’est que de 6,020 fr.
Maintenant je dirai quelques mots sur le discours de M. le ministre, particulièrement en ce qui touche l’emploi fait l’an dernier du crédit voté par la chambre.
J’ai été fort étonné, dis-je, qu’on se fût permis de distribuer un semblable tableau, lorsqu’il fourmille d’erreurs et d’inexactitudes.
J’ai déjà plusieurs fois signalé à la chambre qu’on nous remettait des documents inexacts et erronés, et par conséquent fallacieux. Je regrette d’avoir constamment à reproduire les mêmes plaintes à cet égard. On ne gagne rien cependant à tromper sur des faits. Il faut que le ministre se pénètre bien que le meilleur moyen d’obtenir de la chambre les crédits qu’il croit devoir demander, est de fournir des documents exacts, concordant avec les faits qui peuvent être connus de chacun de nous, et ne pas s’exposer à être à chaque instant dans la chambre convaincu d’inexactitude et d’erreur ; mais tant qu’il se présentera avec des documents faux et propres à tromper la religion de la chambre, il en résultera pour lui honte et défaut de confiance de la part de l’assemblée. Je désire que ce soit la dernière fois que je me trouve obligé de m’élever contre une semblable conduite.
Je vais démontrer combien est erroné le document qui vous a été distribué.
Dans ce tableau on met en regard les crédits alloués pour 1833, et ceux demandés pour 1834. Si M. le ministre nous avait dit que c’était l’emploi qu’il avait fait des crédits votés globalement par la chambre, je n’aurais pas d’observations à faire. Mais il nous dit ; Voilà les chiffres votés l’an dernier, et ces chiffres ne sont pas exacts.
Car on établit que la chambre a voté 77,820 fr. pour les frais alloués aux directeurs ; 48,180 francs pour les frais de bureau ; 1,720 fr. pour la vérification de la comptabilité, et 27,420 francs pour la confection des rôles.
Je vous prie de remarquer que mes observations peuvent toutes être vérifiées le Moniteur à la main. La chambre, pour le budget de l’année dernière, a admis le chiffre proposé par la section centrale. Il s’élevait à 375 mille francs, On a ajouté 20 mille francs pour les frais de procédure, sur la proposition de M. de Brouckere, et 4,350 fr. pour le pesage du sel et les frais du bureau de garantie, sur la considération que cette dépense était effectuée.
Ceci se trouve détaillé dans le rapport de la section centrale, page 15. Si vous recourez au rapport des finances de l’année dernière, page 26, vous y trouverez ces éléments tels que je les indique.
Le tableau publié porte pour frais de bureau des directeurs 77,820 fr. Le gouvernement n’avait demandé que 76,100 francs, première erreur. il est vrai que le gouvernement avait demandé pour vérification de comptabilité 1,720 francs ; mais la section centrale n’a alloué que mille francs, et comme la chambre a adopté le chiffre proposé par la section centrale il en résulte une différence de 720 francs.
Je pourrais démontrer que les frais de bureau des directeurs ont éprouvé chaque année des augmentations, mais je me bornerai quant à présent à relever les inexactitudes du tableau.
Pour les frais de tournée des vérificateurs des poids et mesures, sur la proposition de la section centrale de l’année dernière, la chambre a alloué 15,000 francs, et le tableau trompe encore la chambre sur ce point car il porte 16,000 francs.
M. Eloy de Burdinne. - C’est distraction !
M. Dumortier, rapporteur. - C’est que ces distractions se renouvellent souvent.
Pour indemnité de route aux employés déplacés sans avancement pour le service, on dit que la chambre a voté 10,500 fr. La section centrale n’a proposé et la chambre n’a voté que 10,000 francs. Encore, une erreur dans laquelle on voulait induire la chambre.
J’arrive au matériel : Matériel et main-d’œuvre des impressions : Pour cette dépense, d’après le tableau, la chambre aurait voté 24 mille francs pour le budget principal, et 6,243 fr. pour le budget supplémentaire, c’est-à-dire 30,243 fr. Le gouvernement avait effectivement demandé cette somme, mais la section centrale a proposé et la chambre a adopté sur le budget principal une diminution de 6 mille francs, ce qui le réduisait à 18 mille francs ; et elle a accordé pour le budget supplémentaire la somme demandée.
On prétend ensuite que pour loyer, entretien, réparation, chauffage et éclairage des locaux et embarcations et ameublement des 13 bureaux de la garantie, la chambre a voté 35 mille francs. Le ministre lui-même n’avait demandé que 30 mille fr. ; la chambre ne lui en a pas alloué davantage.
Pour le matériel des poids et mesures, d’après le tableau, la chambre aurait voté 11,800 fr., et cependant elle n’a accordé que 5,800 fr. ; différence 6 mille francs.
Je vous ai signalé dans ce tableau huit ou neuf erreurs. Il est déplorable de voir qu’on cherche, par de semblables moyens, à induire la chambre en erreur. J’ai dû m’élever contre une pareille conduite, et il est du devoir de M. le ministre des finances de réprimander fortement les employés de son ministère qui sont permis de faire remettre à la chambre un tableau mensonger. Toutes les fois que je verrai qu’on voudra tromper ainsi la religion de la chambre, je signalerai les faits à mon corps défendant. J’y prendrai d’autant plus de soin que c’est à chaque instant que ces choses se renouvellent.
Savez-vous pourquoi on a voulu masquer la manière dont les faits s’étaient passés ? le voici : le ministre avait demandé une somme de 60 mille francs pour indemnités des employés dont les leges avaient été supprimés. Cette somme a paru à votre section centrale trop forte, et elle a proposé de la réduire à 22,320 fr. ainsi que vous le verrez dans le rapport de la section centrale.
Mais dans la discussion le ministre est venu réclamer la somme de 60 mille francs, et sur sa réclamation vous l’avez accordée sans défalquer celle de 22,320 fr. comprise dans un autre article sur la proposition de la section centrale. Cette somme aurait dû évidemment rester sans objet. Mais le ministre a trouvé commode d’en profiter. Si encore il était venu vous dire : Mes crédits n’ont pas suffi pour les besoins du service, j’ai dû employer cette somme, on aurait pu comprendre cette conduite : mais quand on vient, se fondant sur une erreur, après l’avoir appliquée à des augmentations de dépenses, dire que l’augmentation des divers chiffres a été votée par vous, c’est évidemment vouloir induire la chambre en erreur.
Je suis fâché, je le répète, d’être obligé de signaler de pareils faits ; mais ma conscience m’en faisait un devoir.
J’en viens maintenant à l’article en discussion.
Nous avons remarqué qu’il y avait, au lieu de réductions, diverses augmentations. Ce sont ces augmentations seulement que nous avons cru devoir écarter, parce que nous ne les avons trouvées justifiées par rien. Quand on demande une augmentation quelconque, on doit la justifier ; mais au budget des finances, pour toute justification, on se borne à mettre un chiffre plus élevé : on croit sans doute que cela se justifie de soi-même. Nous ne voulons pas admettre d’augmentation, si minime qu’elle soit, sans que la nécessité en soit clairement démontrée. Je dirai, au reste, que les frais de bureau sont déjà exorbitants et dépassent tous les besoins. J’ai entre les mains un document duquel il résulte que, par suite de la création des directeurs, les dépenses des frais de bureau dépassent le double de ce qu’elles étaient lorsque les directions étaient jointes aux administrations des gouvernements dans les provinces.
Ces frais devraient être les mêmes, soit qu’il y ait des directeurs, soit que le service soit fait par des gouverneurs. Cependant, le trésor public paie plus du double de ce qu’il payait autrefois. Ainsi rien ne justifie ces augmentations qu’on nous demande chaque année, parce que les directeurs trouvent qu’ils n’ont jamais assez de frais de bureau. Je crains fort que les allocations pour frais de bureau ne leur soient données comme une espèce d’augmentation de traitement. Si je suis bien informé, il y a des directeurs dont les frais de bureau s’élèvent au triple de ce qu’ils étaient autrefois, qui sont censés avoir cinq ou six commis et qui de notoriété n’en ont que deux. Si on demande une somme qui ne doit pas recevoir d’emploi, il faut la supprimer, et si elle doit avoir un emploi fallacieux, c’est un abus plus grand encore, et qu’il importe de faire cesser.
Il n’y a donc pas de motif d’augmenter la dépense dont il s’agit. Le chiffre que la section centrale vous propose de maintenir est celui de l’an dernier, qui est plus élevé que le chiffre des années précédentes. La différence entre le chiffre demandé par le ministre et celui proposé par la section centrale n’est que de 6,000 francs : ainsi vous pouvez adopter ce dernier sans craindre d’entraver le service.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Ce serait une étrange tentative de vouloir induire la chambre en erreur, que de mettre sous ses yeux un tableau aussi détaillé que celui qui vous a été distribué. Chacun de vous aurait pu rapprocher de ce tableau les documents qui sont en sa possession, et constater toutes les inexactitudes qu’il aurait pu présenter. Cette simple explication suffira pour éloigner toute idée de tentative de tromper la chambre. Je ne parlerai pas des mots plus ou moins désobligeants dont s’est servi l’honorable rapporteur ; je crois que les erreurs qu’il a signalées proviennent d’un seul fait qui peut s’expliquer de la manière la plus honorable et pour la section centrale et pour le gouvernement. Malheureusement je n’ai pas sous les yeux les documents. Je pense que l’honorable rapporteur est parti de son travail, tandis que, pour établir mon tableau, je suis parti de mon budget de 1833 tel qu’il a été présenté.
Vous vous rappelez, messieurs, qu’on n’a pas voté sur les numéros du développement, mais sur une somme globale réduite de 26 mille francs. La chambre avait à prononcer entre la proposition du gouvernement qui était de 486 mille francs, dont faisaient partie les 60 mille francs des leges, et le chiffre de la section centrale qui était beaucoup moindre. M. Coghen proposa une réduction de 26 mille francs, qui, d’après les explications données par M. d’Huart, fut appliquée à l’article : Matériel et dépenses diverses. C’est ce chiffre global ainsi réduit qui fut adopté par la chambre. En partant de ce point pour établir les comparaisons entre les crédits des deux années, les inexactitudes signalées par l’honorable rapporteur disparaîtront. S’il s’en trouvait encore quelques-unes, je prie la chambre de croire qu’on ne peut pas les attribuer à l’intention très peu obligeante que nous a prêtée l’honorable rapporteur.
Quant à la proposition de la section centrale, si elle était adoptée par la chambre, je craindrais que les fonds ne manquassent pour le service du matériel et des dépenses diverses. Au reste, dans le cas du crédit, j’en serai quitte pour venir demander un supplément de crédit, sauf à en venir justifier les motifs. Je m’en rapporte à ce que fera la chambre, pour ne pas prolonger une discussion où ii ne s’est déjà mêlé que trop d’aigreur.
M. Dumortier, rapporteur. - Je n’ai pas eu la pensée d’attribuer à M. le ministre de tromper la chambre. Je reconnais sa loyauté, je suis convaincu qu’il n’est pas coupable des faits que j’ai signalés ; mais quand on a des employés qui commettent des erreurs semblables, on doit les réprimander sévèrement. Car, messieurs, les erreurs sont manifestes, et quand il dit : Je suis parti de mon budget, et non du travail de la section centrale, cela ne détruit en rien ce que j’ai dit. J’ai prouvé qu’on portait dans le tableau des sommes plus fortes que celles demandée pour 1833. Où le ministre pouvait-il trouver des sommes plus élevées que celles qu’il a demandées ? Puisqu’on n’a pas voté sur les développements, on n’a pas pu augmenter les chiffres qu’il y avait portés. Cependant le tableau porte un crédit de 17 mille francs alloué pour les poids et mesures, et le ministre n’avait demandé que 16 mille francs ; pour indemnités de route aux employés déplacés sans avancement pour le service ; on porte 10,500 francs, tandis que le ministre n’avait demandé que 10 mille francs, et ainsi du reste.
On ne doit donc pas venir dire des choses contraires à ce qui s’est passé dans cette enceinte. Jetez les yeux sur le rapport, et vous verrez que ce que j’ai avancé est exact, que les employés ont cherché à induire la chambre en erreur. Car il résulte qu’au lieu d’une économie de 13,696 francs sur l’article dont il s’agit, comme le prétend le ministre, il y a une augmentation de 90 mille francs.
Je ne puis assez répéter que des employés qui se conduisent de cette manière devraient être chassés du ministère.
Quant à ce qu’a dit M. le ministre, que si la réduction proposée par la section centrale était adoptée, le service du matériel et des dépenses diverses en souffrirait, cette observation trouvera sa place à l’article suivant. Il ne s’agit ici que des dépenses pour frais de bureau et indemnités ; dépenses sur lesquelles la section centrale propose une réduction de 6,020 francs pour maintenir les chiffres de l’an dernier. La section centrale ne vous propose pas de réduction en réalité, mais s’oppose à toute augmentation. La chambre peut donc, sans craindre d’entraver le service, voter la somme de 257 mille francs, ce que prépose d’allouer la section centrale.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Je puis assurer que les directeurs ont toute la peine possible de couvrir leurs frais de bureau, au moyen de la répartition de la somme allouée pour cette dépense. La correspondance que j’ai au ministère, et les quittances qui sont produites à l’appui, démontrent que les frais excèdent quelquefois les allocations. Cependant on est resté dans les mêmes termes que l’an dernier. La chambre peut être convaincue que ce crédit n’est en aucune manière détourné de sa destination.
M. le président. - Je vais mettre l’article aux voix.
« Art. 7. Frais de bureau et de tournée : fr. 158,070. »
La section centrale propose de réduire le chiffre à 153,550.
Le chiffre du ministère est rejeté. Celui de la section centrale est adopté.
« Art. 8. Indemnités : fr. 105,400. »
La section centrale propose de réduire ce chiffre à 103,900 fr.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - J’ai développé les besoins de ce service ; si on refuse l’allocation que je demande, je tâcherai de faire sans, mais je crains que le service n’en souffre.
- Le chiffre demande par M. le ministre est rejeté. Celui proposé par la section centrale est adopté.
« Art. 9. Matériel, non compris les dépenses imprévues : fr. 149,900. »
La section centrale propose de réduire cette allocation à 126,000 fr.
M. A. Rodenbach. - On nous demande pour le matériel des poids et mesures une augmentation de 6,800 fr. Si M. le ministre peut me faire connaître les améliorations qu’il a introduites dans ce service depuis que j’ai signalé les abus qui m’avaient été dénoncés, je voterai volontiers cette somme. Entre autres, je lui ai signalé l’absence d’étalons prototypes au bureau de vérification, et je lui ai fait observer qu’il en résultait une différence de cinq à onze grains dans le kilogramme de diverses localités. Je lui demanderai s’il y a maintenant uniformité dans les poids et mesures de capacité.
Je lui demanderai pourquoi, dans certains arrondissements, on admet au contrôle des poids qu’on refuse dans d’autres. C’est un abus très grave. Je suis peiné de devoir y revenir, mais si ma réclamation reste sans résultat, dussé-je revenir vingt fois à la charge, je parviendrai à faire cesser cet abus.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Messieurs, dans la séance où l’honorable M. Rodenbach signala les différences existant entre les poids et mesures des diverses localités, l’honorable M. Dumortier a fait connaître à quelles causes sont dues ces différences. C’est que nous n’avons plus les types originaux qui sont en ce moment à Amsterdam. Il conviendrait de les remplacer et d’envoyer à Paris des commissaires pour en lever de nouveaux.
Je ne prévois pas qu’avant cela il y ait moyen de faire cesser les abus signalés par l’honorable M. Rodenbach. Il conviendra sans doute de présenter à la chambre un projet de loi ayant pour but d’autoriser le gouvernement à faire lever à Paris de nouveaux étalons prototypes pour remplacer ceux qui ont été déposés à l’institut d’Amsterdam.
M. Dumortier, rapporteur. - Je viens appuyer ce que vient de dire M. le ministre des finances ; je pense comme lui qu’une loi est nécessaire pour régler comment ces étalons seront confectionnés. Il s’agit ici d’une affaire scientifique ; c’est ainsi que la convention l’a jugé quand elle a fait confectionner les étalons qui sont à l’institut de France. Je désire que lorsque le ministre enverra des commissaires, il les prenne parmi les personnes qui se sont occupées de semblables opérations, je veux parler des mathématiciens, et qu’il les charge de se mettre en rapport avec l’académie de France : c’est le seul moyen d’avoir une garantie scientifique. Nous n’en auriez aucune si vous vous borniez à envoyer de simples employés.
J’ajouterai que, d’après des observations qui ont été faites, il est présumable que, même à l’institut de France, l’unité n’est pas certaine. Cela provient de l’état d’imperfection des balances à l’époque où l’institut procéda à l’opération. Il faut remarquer que, pour la fixation du poids, l’opération est complexe ; car il faut rapporter à une particule métallique le poids d’un centimètre cube d’eau distillée.
Cette opération devra être entièrement recommencée. Pour assister à cette opération, il sera nécessaire d’envoyer des hommes dont les travaux scientifiques soient une garantie pour le pays.
J’observerai qu’on pourrait ajouter quelques dispositions à la proposition de M. Seron. Vous reconnaîtrez sans doute qu’il y a urgence de faire cesser l’état de choses signalé par M. Rodenbach.
M. d’Huart. - D’après la loi du 19 frimaire, les communes fournissent les bureaux de garantie. C’est d’après ce motif que M. le ministre a consenti à une réduction de 10 mille francs. Mais il est un point sur lequel la section centrale a cru devoir appeler votre attention.
Les bureaux de douane, à Anvers, ont été réunis dans un vaste local, à la demande de la chambre du commerce. Le changement a donné lieu à un surcroît de dépense assez considérable. Il s’agit de savoir si cette dépense doit être supportée par l’Etat ou par la ville d’Anvers, qui en retire les plus grands avantages.
Il me semble, et il a semble à la section centrale, que si c’était dans l’intérêt de la ville d’Anvers que ce changement avait été fait, c’était elle qui devait en supporter les frais.
M. Smits. - J’aurai l’honneur de fournir au préopinant les éclaircissements qu’il demande. Tous ceux qui savent ce que c’est qu’un port de commerce maritime n’ignorent pas que c’est aux abords de ses canaux, bassins et entrepôts, que se concentrent tous les mouvements commerciaux, sur lesquels l’œil du fisc est constamment ouvert. A Anvers, les bassins sont situés à l’extrémité nord de la ville, tandis que les principaux bureaux de recette et de direction se trouvaient, du côté sud, à une demi-lieue de distance. Il est donc clair que, pour avoir une surveillance plus active sur le point principal des opérations commerciales, il fallait réunir les employés le plus près possible de ce point. Il résultait de l’éloignement des bureaux que l’employé inférieur est souvent sans guide et que ceux qui veulent enfreindre la loi, y parviennent plus facilement.
On a objecté que le commerce retirait des avantages de l’établissement que le ministre avait créé pour la douane. Sans doute, le commerce trouve un avantage, car cela lui évite des courses et beaucoup de désagréments. Mais il me semble qu’il peut bien obtenir quelque chose en compensation des hauts droits qu’il paie au trésor. Quand le trésor fixe une taxe quelconque, c’est à lui à prendre des mesures pour en assurer le recouvrement sans gêner le commerce.
Qu’on fasse supporter cette dépense par la ville, dit-on ; mais la ville y consentira-t-elle, parce qu’on aura inséré une disposition au budget ?
D’après l’article 110 de la constitution, aucune imposition communale ne peut être établie que du consentement du conseil communal. Vous conviendrez qu’on ne pourrait pas considérer comme une loi une injonction insérée au budget, et la régence pourrait fort bien refuser de s’y soumettre.
Quoi qu’il en soit, la création d’un bureau central n’a pas eu lieu dans l’intérêt du commerce, mais du fisc. Je pense que la chambre ne fera aucune difficulté d’accorder l’allocation demandée par le ministre.
M. d’Hoffschmidt. - Si l’administration de la ville peut se refuser à supporter la dépense, je demanderas à M. le ministre des finances s’il ne pourrait pas résilier le bail. Il est constant que c’est à la demande de la ville que ce bureau a été établi ; voici la lettre adressée au ministre par laquelle la chambre de commerce demande l’établissement de ce bureau. (L’honorable membre, après avoir donné lecture de cette lettre, continue :)
Par conséquent, c’est à la demande de cette chambre de commerce que l’administration a loué la maison dont il s’agit. Avant cela, les employés étaient disséminés ; l’administration se trouvait bien des divers locaux qu’elle occupait, et la dépense s’élevait à peine au quart de ce qu’elle est aujourd’hui. Le service se faisait tout aussi bien. C’est pour satisfaire les négociants, pour leur éviter des courses, qu’on a concentré à grands frais l’administration.
Je le répète, que si la ville se refuse à payer le surcroît de dépense, le ministre doit résilier le bail s’il y a une clause qui le permette : il serait étonnant que l’administration ne se fût pas réservée cette faculté.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Depuis très longtemps la réunion des bureaux, telle qu’elle vient d’être effectuée dans un vaste bâtiment, était sollicitée de tout le monde, par le commerce et par l’administration, qui a trouvé la centralisation du service extrêmement avantageuse pour la surveillance qu’elle doit exercer sur les quais et bassins de la ville d’Anvers.
J’ai administré le service de douane de cette ville pendant douze ans. Je savais à quoi m’en tenir à l’égard de cette centralisation.
Si sous mon administration on avait trouve un local convenable, la centralisation du service aurait eu lieu. Mais, quelque zèle qu’on y mît, on ne trouva pas de local. Les constructions nombreuses faites récemment permirent de réunir la plupart des bureaux dans un local assez vaste pour les recevoir, mais ce local présentait des inconvénients en ce qu’il était au-delà des écluses, et que, quand ces écluses travaillaient, la communication était coupée entre les bureaux et les employés en surveillance.
Il était urgent d’obvier à cet inconvénient. Depuis longtemps j’étais convaincu que l’intérêt du commerce, qu’on ne doit pas négliger, et en même temps celui du service de la douane, exigeaient qu’on concentrât dans un même local et les bureaux, et le corps de garde des employés, et tout ce qui a trait au matériel, poids et mesures, pour les maintenir dans un état de conservation, ce qu’on ne pouvait pas assurer auparavant, car il aurait fallu les transporter à de grandes distances ; et dans l’impossibilité de le faire, on les laissait sur les lieux exposés aux intempéries des saisons. Il en résultait des dégradations auxquelles il fallait remédier à chaque instant, ce qui occasionnait d’assez fortes dépenses.
D’un autre côté la surveillance de l’administration sur les bassins et les quais de l’Escaut est devenue plus facile et plus efficace par suite de la présence de tous les moyens de la douane sur le point le plus important.
Quoique la dépense soit beaucoup plus forte, les avantages que le service et le commerce y trouvent me font croire que l’administration a bien fait de concentrer les bureaux de douane dans un seul établissement.
M. Coghen. - J’avais demandé la parole ; mais d’après ce qui vient d’être dit, j’y renonce.
M. Smits. - J’avais démontré que l’établissement dont il s’agit était tout à fait dans l’intérêt de l’administration des douanes et dans l’intérêt du trésor. On a cru, parce qu’une lettre avait été écrite à ce sujet par la chambre de commerce d’Anvers, que c’était elle qui avait eu en quelque sorte l’initiative de cette mesure. Cette idée existait déjà sous le gouvernement précédent, et elle aurait été mise à exécution sans les événements politique qui sont survenus. La chambre de commerce s’est souvenue du projet du précédent gouvernement, et elle a adressé au ministre la lettre dont on vous a donné lecture.
Mais, après tout, qu’est-ce que c’est que la chambre de commerce ? C’est un corps moral représenta l’universalité des patentables, des négociants.
Nous n’avons en Belgique que deux ports maritimes, Anvers et Ostende, dont le commerce ne profite pas exclusivement à ces deux villes. La Belgique entière profite de l’activité de ces deux ports, et par conséquent la Belgique entière profite de toutes les facilités, de tous les avantages qu’on y accordera au commerce.
Pour prouver combien est injuste la proposition de mettre à la charge de la ville d’Anvers la dépense dont il s’agit, je ferai une hypothèse : si dans les villes de Tournai, Liége ou Verviers, le gouvernement avait le projet d’établir des écoles de commerce et d’industrie, et que les régences de ces villes appuyassent ce projet, diriez-vous à ces villes : Puisque vous avez appuyé l’établissement de ces écoles, vous en supporterez la dépense. Car d’ailleurs votre industrie y gagnera, vous aurez des ouvriers plus capables ! Evidemment non. Ce système, comme vous voyez, tombe dans l’absurde, et ne peut être dicté que par un esprit de localité que nous devons tous repousser.
Quand il s’est agi de la loi que j’appellerai la loi Teichmann, qui avait pour objet des dépenses considérables à faire dans le port d’Ostende, sommes-nous venus dire : Cette dépense a pour but de favoriser le commerce de la ville d’Ostende, c’est à elle à la supporter ? Nous ne l’avons pas fait parce qu’une telle conduite eût été injuste et partiale. Je pense d’après ces explications qu’il faut accorder l’allocation demandée par le ministre, puisque le commerce en général doit profiter de la dépense.
M. d’Hoffschmidt. - Le ministre des finances s’est efforcé de prouver que la dépense n’était pas tout à fait locale, parce que l’Etat en retirait quelque fruit ; mais pourquoi l’administration a-t-elle attendu que la localité fît des réclamations pour établir les douanes dans un même bâtiment ? car c’est sur la demande de la chambre de commerce de la ville d’Anvers que la dépense de 12.000 fr. a été consentie par le ministre : d’après ces faits, la section centrale a cru que les avantages étant pour la localité, cette localité devait participer à une partie des frais. L’honorable M. Smits a dit que ce n’était pas le commerce d’Anvers qui profitait de cette mesure, que c’était le commerce général de la Belgique : cette assertion serait fondée si le courtage était diminué à Anvers ; s’il n’en est pas ainsi, je conclurai encore à ce que cette ville soit appelée au partage de la dépense.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Le courtage est proportionnel à la valeur des objets et n’augmente pas selon la longueur des courses que les courtiers ont à faire. On est dans l’erreur quand on croit que c’est une idée nouvelle qui a déterminé à mettre tous les employés dans uns même bâtiment, Entré à Anvers en 1816, directeur des douanes, j’en suis sorti en 1828, et toujours j’ai eu la pensée de rechercher un local convenable pour y établir tous les bureaux des douanes. Par suite de la prospérité de la ville d’Anvers, de nombreuses constructions ont été effectuées et l’on a été assez heureux de trouver un bâtiment où l’on pouvait réunir ce qui n’aurait jamais dû être séparé et dans l’intérêt du mouvement commercial et dans l’intérêt du service des douanes.
M. d’Huart. - Il faudrait savoir si M. le ministre des finances peut résilier le bail. Le contrat élève la dépense à une somme annuelle de 18,000 fr. ; s’il ne peut être résilié, il faut que la ville d’Anvers supporte une partie de cette dépense.
M. Jullien. - La proposition de faire contribuer la ville d’Anvers a quelque chose d’étroit et de mesquin, qui contraste avec les idées généreuses qui animent ordinairement les préopinants. La dépense est insérée et caractérisée dans le budget, et je ne vois pas pourquoi la ville d’Anvers en supporterait une partie ; l’administration a agi, dit-on, dans l’intérêt du commerce ; elle n’a fait que son devoir ; les administrations sont faites pour le commerce, et non le commerce pour les administrations. Il n’y aurait ni raison, ni justice à faire supporter à la ville d’Anvers une portion du loyer des bâtiments dont il s’agit.
M. Verdussen. - La mesure prise par l’administration est d’une telle importance que des expéditions ont eu lieu pour Anvers, par cela seul qu’on a été instruit en Angleterre qu’il n’y aurait plus retard dans les chargement et les déchargements. La dispersion des divers bureaux de la douane était très préjudiciable aux expéditionnaires.
M. d’Huart. - Il n’y a rien de mesquin et de ridicule à faire des économies, car c’est là notre principale mission. De ce que la somme demandée est inscrite au budget et portée au compte de l’administration, il ne s’ensuit pas que nous devions l’accorder, il faut voir avant tout s’il y a justice à ce que l’Etat supporte cette charge : nous ne votons pas tous les chiffres des budgets ; nous votons quand il y a justice à le faire, et ici il y a justice à ce que la ville d’Anvers supporte une partie du loyer. Au reste, M. Dumortier peut vous donner des détails plus amples sur les motifs qui ont déterminé la section centrale à proposer l’économie que nous appuyons.
M. Dumortier, rapporteur. - L’administration ne profitera pas du loyer de 12,000 fr., car elle dépensera 12,000 fr. de plus ; voilà tout. Les agents de la douane n’en profiteront pas eux-mêmes, puisqu’ils seront obligés de se déplacer maintenant ; auparavant ils tenaient leurs bureaux dans leurs domiciles. L’avantage est tout entier pour les commerçants d’Anvers, qui n’auront plus qu’une course à faire, au lieu qu’autrefois ils en faisaient plusieurs. Le commerce en général n’en tirera aucun avantage : c’est une mesure tout au profit d’une localité ; donc la localité doit intervenir dans une partie de cette dépense. Cette ville d’Anvers, qui refuse de payer une portion du loyer des bâtiments de la douane, refuse en même temps, et contre les lois, de donner un local pour établir le bureau de garantie. Elle repousse ce qui serait utile à l’administration et à l’Etat, et elle insiste vivement pour obtenir ce qui ne peut profiter qu’à elle seule. La justice veut qu’il en soit autrement, et c’est cette considération qui a mu la section centrale.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Si l’on veut que l’administration ne paie pas tout le loyer du local qu’occupe le bureau, ce ne sera pas à la ville côtière d’Anvers à supporter une partie de ce loyer ; ce serait au commerce seul de cette cité à entrer dans les dépenses. Le loyer, d’ailleurs, n’est pas de 12,000 fr. ; il est de 10,000 fr. La mesure prise procurera des avantages considérables ; ces avantages sont sentis dans tous les pays : à Bordeaux, à Marseille et dans tous les ports de France, on a réuni depuis longtemps tous les bureaux des douanes dans un seul local.
M. Jullien. - En disant que tout l’avantage est pour le commerce d’Anvers, on énonce une erreur ; la plus grande partie du commerce de la Belgique se fait par Anvers, et les avantages que peut retirer le commerce d’Anvers tournent au profit du commerce général ; ainsi le principe de justice distributive qu’on a invoqué n’est point violé par la demande du ministre. L’administration d’ailleurs ne fera pas une dépense de 10,000 francs en pure perte ; car, de la réunion des diverses parties de l’administration, il en résultera des recettes plus fortes. Je ne crois pas qu’on puisse refuser l’allocation demandée. Je ne sais pas au reste comment on pourrait résilier le bail et forcer la ville d’Anvers à entrer dans une partie de la dépense.
M. Coghen. - Par la réunion de tous les bureaux de la douane, près du centre du mouvement commercial, la surveillance est plus facile, la répression de la fraude plus sûre ; le commerce loyal ne peut que s’applaudir de la mesure prise, et le trésor pourra retirer au décuple le prix du loyer.
M. Dumortier, rapporteur. - La somme de 10,000 fr. n’est pas comprise dans la réduction proposée par la section centrale. C’est une remarque qu’il ne faut pas perdre de vue.
M. de Brouckere. - Mais je voudrais savoir comment on pourrait forcer la ville d’Anvers à se charger d’une partie de la dépense.
M. Dumortier, rapporteur. - La majorité de la section centrale a cru que M. le ministre pouvait demander ou la résiliation du bail, ou que la ville d’Anvers se chargeât d’une partie de la dépense.
La section centrale a remarqué que le chiffre de l’article en discussion (matériel) est plus élevé que celui de l’année dernière de la somme de 39,000 fr. ; en en défalquant 10,000, on trouve qu’il demande encore 29,000 francs de plus que l’année dernière. Dans ce chiffre de 29,000 francs, est comprise une somme de 10,000 francs pour le local du bureau de la garantie ; mais, d’après la loi ce n’est pas à l’Etat à payer ce local, c’est à la commune où le bureau est établi.
Les autres augmentations ne nous ont pas paru justifiées ; cependant nous avons consenti à augmenter la dépense de 3,000 afin de ne pas gêner l’administration. Les dépenses imprévues de l’article sont renvoyées à un article final du budget. En résumé nous accordons 17,000 fr. de plus que l’année dernière ; c’est-à-dire 10,000 francs pour le bâtiment des douanes et 5,000 francs d’augmentation pour les autres dépenses ?
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - J’adopte le chiffre de la section centrale ; s’il ne suffit pas, je demanderai un supplément de crédit.
- Le chiffre de 117,000 francs de la section centrale est mis aux voix et adopté. Il formera l’article 9 du chapitre III (matériel non compris les dépenses imprévues).
M. le président. - La section centrale a proposé une autre division de ce chapitre, et M. le ministre adopte cette division.
« Art. 1er. Traitements des employés de l’enregistrement : fr. 361,930. »
La section centrale propose 342,945 francs. L’économie est donc de 18,985 fr.
M. Fallon. - L’arrête du 28 octobre dernier a principalement dirigé mon vote sur l’article 2 du budget ; il le dirigera encore sur l’article qui est en discussion.
En ce qui regarde l’administration centrale du ministère, cet arrêté a été l’objet de vives attaques. Il a été clairement démontré que, bien loin de rétablir l’ordre et l’unité d’action dans ce ministère, il n’avait fait que compliquer les rouages, et que si cet arrêté restait debout, il serait un nouvel obstacle aux améliorations et aux économies que la chambre réclame depuis trois ans, et qui, chaque année, donne lieu à des discussions interminables.
M. le ministre des finances, dont les bonnes intentions ne sont jamais révoquées en doute et auxquelles je me plais à rendre hommage, a senti tout ce que sa position avait de pénible et d’embarrassant, et il a pris le parti le plus sage, suivant moi, celui d’en référer à un conseil de cabinet.
Je prends la parole, messieurs, parce que je désire que ce conseil ne s’occupe pas seulement du ménage intérieur du département des finances, mais pour qu’il soumette également à ses méditations d’autres innovations que l’arrêté du 18 octobre a introduites dans l’administration de l’enregistrement et des domaines en province.
Je vais en conséquence appeler son attention sur des dispositions de cet arrêté qui, dans l’administration provinciale, me paraissent désavantageuses aux intérêts du trésor, répugnante au droit indivis qui appartient à chaque province, grande ou petite, d’être dirigée par cette branche d’administration comme en toute autre par des administrateurs également éclairés et expérimentés, et qui me semble du reste aller en sens inverse du but que cet arrêté a annoncé vouloir atteindre.
Les considérants de cet arrêté nous apprennent que son but est d’introduire des améliorations dans l’administration de l’enregistrement et des domaines ; d’offrir aux employés des motifs de zèle et d’émulation ; de procurer des réductions dans les dépenses ; de tenir au courant les vérifications et de fortifier les garanties de contrôle.
J’accepte volontiers tous ces avantages, mais l’arrêté nous les procure-t-il ? C’est ce que je vais examiner.
Je remarque d’abord qu’en appliquant le système des traitements fixes, non seulement à l’administration centrale, mais en outre à l’administration dans les provinces, M. le ministre a fort mal compris les intentions de la chambre dans la discussion de son budget de 1833.
Pour assurer au trésor tous les produits de l’impôt en matière d’enregistrement, il faut nécessairement d’autres moyens que ceux qui sont employés dans les autres branches de l’administration financière de l’Etats.
Ici, le produit de l’impôt dépend des capacités et de l’intelligence des employés. C’est un contrat qu’il faut se donner le soin d’étudier pour ne pas se tromper sur la nature de la convention qu’il renferme, et pour saisir les effets de cette convention à travers des stipulations qui ne sont employées souvent que pour en marquer l’étendue. Ce sont des documents qu’il faut recueillir, afin de requérir à propos les expertises dans le cas où il y a réticence d’une partie du prix d’aliénation ; Ce sont des recherches et des diligences qu’il faut faire pour atteindre les mutations clandestines et les fraudes à l’impôt.
Il faut donc exciter l’attention et le zèle des employés chargés d’établir, de contrôler, et de diriger les perceptions, et le système des remises proportionnelles est tout naturellement le moyen d’excitation.
On conçoit en effet que si les employés chargé des recettes et du contrôle n’étaient plus intéressés à assurer toutes les ressources de l’impôt, ils ne tarderaient pas à se relâcher de tout zèle, de tout soin et de toutes démarches dans la recherche des fraudes. Le résultat de cette mesure serait indubitablement une réduction considérable dans le produit du droit proportionnel.
Mais, à côté du système des remises proportionnelles, il faut des garanties contre les exactions, il faut protéger les contribuables contre toute perception exagérée ; il faut empêcher qu’ils soient exposés à dépenser en frais de procès souvent plus que le montant du droit injustement exigé.
Cette garantie ne pouvait se trouver ailleurs que dans le désintéressement des employés de l’administration centrale. C’est elle qui doit connaître des réclamations qui lui viennent des provinces. C’est elle qui doit décider s’il doit être donné suite aux contraintes, C’est elle qui doit ordonner les restitutions. C’est elle enfin qui juge administrativement les contestations avant de les livrer aux tribunaux ; et là on ne connaît pas de juge qui soit pécuniairement intéressé à l’affaire sur laquelle il doit délibérer. Le système des remises proportionnelles ne convenait donc pas à l’administration centrale, et, pour elle, nous avons bien fait de le proscrire.
Tel est le principe dont l’application avait été réclamée dans le budget de 1833.
Suivant le système hollandais, les employés de l’administration centrale étaient rétribué au moyen de remises proportionnelles, et l’on se rappelle les vexations qui en ont été la suite.
Suivant le système français, leurs appointements sont fixes, et les décisions de l’administration centrale impriment le respect et n’excitent pas de réclamations, parce qu’elles sont désintéressées.
Aussi, messieurs, recourez au rapport de la section centrale sur le budget de 1833, et vous verrez que ce n’est que pour ce qui concerne l’administration centrale qu’on a insisté pour le rétablissement du système des traitements fixes. Système qui va maintenant recevoir son exécution.
M. le ministre a trouvé bon d’aller plus loin, il a appliqué ce système aux employés de l’administration dans les province ; et, suivant moi, c’est un abus.
Comment en effet peut-on espérer que les opérations des receveurs, que les erreurs de perception, seront plus convenablement contrôlées, vérifiées, et inspectées ? comment peut-on espérer que les affaires contentieuses arriveront mieux instruites à l’administration centrale, si l’on ne stimule plus le zèle, les soins et les recherches des employés dans les provinces par un accroissement de traitements sur les produits ? Voici ce qui arrivera infailliblement avec le système des traitements fixes, appliqué à l’administration dans les provinces : un relâchement ne tardera pas à se faire sentir, les employés se mettront à l’aise, et ne feront tout juste que ce qu’il faudra strictement faire ; ils se garderont bien d’entamer leurs traitements par des frais de déplacement ou de recherches, et les mutations clandestines, et les conventions simulées, et les véritables valeurs proportionnelles échapperont à l’impôt.
Maintenez au contraire le système d’un minimum de traitement avec accroissement d’une remise sur le produit de chaque direction à répartir proportionnellement entre les employés de chaque province et sans que cela puisse excéder un maximum déterminé, et en les associant ainsi aux soins et aux diligences des receveurs, vous aurez la garantie que rien n’échappera à l’impôt.
On m’objectera peut-être qu’il y aura plus de fiscalité. Sans doute, si l’on veut dire que les intérêts du trésor seront plus sévèrement soignés. Mais dès lors qu’aucune poursuite ne peut être faite en province sans une décision de l’administration centrale ; mais dès lors que l’administration centrale qui ordonne ou empêche les poursuites n’y est plus pécuniairement intéressée, il me semble que nous avons une garantie suffisante contre toute vexation.
Il est une autre disposition qui ne me paraît pas moins abusive dans l’arrêté du 18 octobre, parce qu’elle va en sens inverse des motifs de zèle et d’émulation qui lui servent de base.
Cet abus consiste dans la division des directions en diverses classes ou plutôt en différents grades. Car il ne faut pas s’y tromper, si le dispositif de l’arrêté ne parle que de classes, les considérants disent en toutes lettres qu’il ne s’agit pas seulement d’établir une répartition plus équitable des traitements, mais en outre une distribution plus régulière des grades.
Il ne s’agit donc pas seulement d’un classement de traitements, mais de distinctions honorifiques, mais de supériorité de mérite relatif, mais de catégories en fait de capacités.
C’est ainsi que les trois premiers grades d’honneurs, de primes et de capacités sont réservés aux provinces de Brabant, de Flandre orientale et de Liège ; que les trois grades inférieurs sont destinés aux provinces d’Anvers, de la Flandre occidentale et du Hainaut, et que les trois derniers grades sont attribués aux provinces de Limbourg, de Luxembourg et de Namur.
Que le traitement d’un directeur soit moindre dans telle province que dans telle autre, à raison qu’il y a plus ou moins de travail à diriger et de produits à faire rentrer, cela peut se concevoir. Mais, ce que l’on ne comprend pas, c’est que pour administrer convenablement une province plus petite, il faille moins d’expérience et de capacités que pour diriger une province d’une plus grande étendue.
Les questions de principe et d’application que souleva la loi sur l’enregistrement ne sont pas de solution plus facile dans une petite province que dans une province plus populeuse. Ici les difficultés peuvent être plus fréquentes mais il ne faut pas moins d’expérience et d’habileté pour les résoudre d’un côté comme de l’autre.
Le trésor est intéressé à ce que les directeurs, dans les petites communes comme dans les grandes provinces, soient d’égales capacités. L’action de la loi ne doit pas être moins éclairée ni moins bien dirigée dans un lieu que dans l’autre, et, de leur côté, les provinces ont aussi un droit égal à la garantie que donne aux contribuables l’homme capable et expérimenté.
Si donc cette innovation, ce classement graduel conçu par M. le ministre doit être entendu dans ce sens que, pour arriver à l’une des directions du Brabant, de la Flandre orientale ou de Liége, il faudra commencer par faire d’abord un noviciat dans l’une des provinces du Limbourg, du Luxembourg ou de Namur, et avoir fait ensuite des campagnes dans l’une des provinces d’Anvers, de la Flandre occidentale ou du Hainaut : ce classement est d’un arbitraire qui répugne. Le ministre n’a pas le droit d’établir par arrêté et à perpétuité semblables privilèges et distinctions entre les provinces, d’établir entre elles un ordre de préférence et de supériorité, et d’en condamner trois à n’être jamais administrées que par des débutants.
Il y a plus, c’est que, sous le rapport même de la répartition des traitements ; le classement n’est pas moins arbitraire et injuste.
La seule base équitable de répartition des traitements du directeur de l’enregistrement, c’est sans doute de les proportionner au travail dont chacun se trouve chargé et aux produits des directions.
Or, pour apprécier la justesse des calculs de l’auteur de l’arrêté dans son système de répartition, j’ai demandé et j’ai obtenu à la cour des comptes l’état du produit des diverses directions pendant les années 183l et 1832, sur le timbre, l’enregistrement, les droits de greffe, les hypothèques, les successions, les passeports, les domaines nationaux, les forêts, les contrats de rentes, les barrières, enfin sur tous les revenus confiés à cette administration.
Voici, dans l’ordre des produits cumulés pour ces deux années le chiffre qui appartient à chaque province :
1. Le Hainaut a rapporté 5,502,178 fl. 49.
2 Le Brabant, 4,853,704 fl. 04
3. La Flandre orientale, 3,176,179 fl. 09.
4. La province de Liége, 2,621,493 fl. 37.
5. La Flandre occidentale, 2,310,407 fl. 73.
6. La province de Namur, 2,287,224 fl. 50
7 La province d’Anvers, 1,742,639 fl. 47.
8. Le Luxembourg, 1,480,787 fl. 14
9. et le Limbourg, 1,059,817 fl. 75.
Ainsi, en prenant pour base de répartition des traitements le produit de chaque direction, c’est le Hainaut qui devait éminemment figurer en première ligne avec les provinces du Brabant et de la Flandre orientale. Cependant on le fait descendre au deuxième rang et on met à sa place la province de Liége, qui a produit 3 millions de moins ; le directeur de Liége est ainsi préféré au directeur de Mons, sans que l’on sache le pourquoi.
Dira-t-on que c’est à raison que le directeur de Liége se trouve placé dans un chef-lieu de cour d’appel ? Mais ce ne serait pas là une raison, ce serait tout au plus un prétexte. Le directeur de l’enregistrement n’a aucune relation avec la cour d’appel ; ce n’est pas lui qui est chargé de l’instruction des instances de cette cour, ce sont des avocats spéciaux. Sous tout autre rapport, son travail comme directeur n’en est ni plus ni moins augmenté, et ce qui prouve que la cour d’appel ne fait guère de chose au produit, c’est que la direction de Mons a produit cinq millions de plus que la province de Liége sur 183l et 1832. Du reste, pour être conséquent, il fallait faire une quatrième classe ; il fallait placer tout au moins le directeur de Bruxelles en rang et en grade de beaucoup supérieur à celui de Liége ; car, celui de Bruxelles n’est pas seulement à côté d’une cour d’appel, il est encore à côté de la cour de cassation et des grands corps de l’Etat.
Le chiffre place la province d’Anvers en 7ème ligne, et cependant on la place au second rang avec la province de Hainaut. Cette faveur, qui ne peut pas s’expliquer davantage, est aussi une préférence sur la province de Namur qui doit cependant aller avant celle d’Anvers.
Aussi voyez, messieurs, comment a été calculé le rapport entre ces deux provinces, celles d’Anvers et de Namur.
Le produit de 1831 et 1832 de la province de Namur excède d’un million de francs le produit de la province d’Anvers pour ces deux années, et cependant celle qui a produit moins est classée dans un rang supérieur à celle qui a produit plus.
Au lieu du produit, est-ce le travail que l’on veut prendre pour objet de comparaison ?… le résultat du rapprochement est encore à l’avantage de la province disgraciée.
La direction de Namur se compose de trois administrations, l’enregistrement, les domaines et les forêts.
En ce qui concerne l’enregistrement, il y a évidemment plus de détail dans la province de Namur que dans celle d’Anvers.
L’administration des domaines exige un travail considérable à la direction de Namur, outre des soins extraordinaires, à cause des ventes des domaines ; ces ventes se sont élevées dans la province de Namur à 22 millions de francs, dont la moitié reste à recouvrer.
A Anvers l’administration des domaines n’exige que peu ou point de surveillance.
La province de Namur est une des provinces les plus boisées. L’administration s’y exerce sur 43 mille bonniers de bois communaux et sur 3,700 bonniers de bois domaniaux. Les détails de cette administration, pour laquelle seule le directeur de l’enregistrement a 191 employés à surveiller, sont incalculables, et la direction d’Anvers n’a rien de cela.
Voulez-vous savoir maintenant, messieurs, ce que c’est que ce fonctionnaire sur qui retombe l’injustice faite à la province de Namur ? Quel est ce directeur que l’on place en grade inférieur au directeur d’Anvers ?
J’ignore les services, le mérite et les capacités du directeur d’Anvers, et je veux bien croire qu’il ne laisse rien à désirer. Mais je connais parfaitement les qualités de celui de Namur, et vous allez juger, messieurs, si ce n’est pas une injustice que de l’avoir fait descendre d’un grade pour lui rogner son traitement de 1,000 francs, et pour le lui rogner sans aucun bénéfice pour le trésor, comme nous le verrons à l’instant.
Le directeur de Namur a passé par tous les grades de l’administration ; il a accompli 33 années de services, dont 17 en qualité d’inspecteur. Sans vouloir contester le mérite d’aucun autre directeur, je ne pense pas qu’il en existe de plus capable et de plus conciliant, ni surtout qui jouisse à un plus haut degré de l’estime, de la considération et de la confiance des contribuables.
Eh bien, c’est ce fonctionnaire, qui a évidemment droit à être placé au premier rang des directeurs et qui est chargé d’un travail assidu de 12 heures par jour, que l’on fait descendre au dernier rang à la fin de sa carrière.
Encore n’a-t-on pas même usé à son égard de la mesure que l’on a prise à l’égard des inspecteurs et des vérificateurs qui conservent leurs grades et leurs traitements, jusqu’à ce que par vacances ils puissent être ramenés aux grades qui leur appartenaient.
Il ne faut innover au régime financier que pour faire mieux que ce qui existe. Or, je vous le demande, messieurs, est-ce bien servir les intérêts du trésor, est-ce bien satisfaire aux intérêts généraux de l’Etat, que de diviser les provinces en catégories, que d’établir en principe que chacune d’elles sera administrée par un directeur plus ou moins capable, plus ou moins expérimenté, plus ou moins gradué, suivant qu’elle occupera un rang plus ou moins élevé dans le classement, sans égard au produit ni au travail de chaque direction ? et n’et-ce pas une dérision que de dire que l’on encourage le zèle et l’émulation des directeurs, alors qu’on fait descendre au dernier rang ceux qui par ancienneté de services, par leur expérience et leurs capacités, ont droit de figurer au premier ?
Prenons garde, messieurs, si, pour une branche aussi importante de l’administration de l’Etat, le droit qui appartient à chaque province d’être administrée par des fonctionnaires d’égales capacités, également expérimentés et gradués : si ce droit qui me paraît incontestable ne nous touche pas, nous poserons une règle qui trouvera plus d’une fois son application, et surtout dans le cas où la besogne du fonctionnaire est plus directement en relation avec la population et l’étendue de la province.
Je pourrais multiplier les exemples. Je me bornerai à vous parler des gouverneurs.
Vous le savez, messieurs, pour fixer les traitements des gouverneurs on n’a pas pensé qu’il convenait de les proportionner à l’étendue et à la population de chaque province. On les a tous rangés sur la même ligne, ils ont tous le même traitement.
Cependant, pour être conséquent avec le principe posé dans l’arrêté du 18 octobre, il faudrait aussi diviser les provinces par catégories et graduer les gouverneurs en gouvernements de 1ère, de 2ème et de 3ème classe.
Je ne pense pas que M. le ministre de l’intérieur ait fait ni ait pensé à faire un arrêté du 18 octobre pour son administration dans les provinces. Je ne crois pas non plus que, dans la discussion prochaine du budget de l’intérieur, on argumentera de cet arrêté pour proposer l’application de la mesure aux gouverneurs des provinces.
Si semblable proposition était faite, je la repousserai de toutes mes forces.
Vous vous attendez sans doute, messieurs, que l’arrêté du 18 octobre se recommande tout au moins par quelque mesure d’économie.
Il faut cependant vous détromper encore sur ce point.
La nouvelle organisation dans les provinces nous coûte 10,745 francs d’augmentation au budget, de manière que tandis que le service dans les provinces marchait régulièrement avec le système des traitements proportionnels et qu’aucune plainte ne s’était fait entendre, on nous demande 10,745 francs de plus pour bouleverser, sans utilité et sans nécessité, ce qui existe, et pour mettre à la place le système dont je viens de signaler les principaux vices.
Mais, dit-on, cette nouvelle organisation est basée sur celle de France.
A coup sûr, ce ne serait pas là justifier l’innovation si l’on ne prouvait pas en même temps que le système français est préférable aux intérêts du trésor. Car sans doute, nous n’admettrons pas qu’il faille s’humilier en présence d’une institution française, alors que, pour changer celle de notre pays, on se bornerait à nous dire … : C’est ainsi que cela se pratique en France.
C’est le régime français, c’est l’ordonnance du 1er février 1821, que vous avez copiée pour ainsi dire mot pour mot, pour organiser votre nouvelle administration centrale ; et quoique ce soit bien là une imitation toute française, la chambre a suffisamment fait entendre qu’elle ne veut pas d’un état-major aussi considérable.
Pour ce qui concerne l’administration dans les provinces, on n’a pas copié ; aussi le régime français ne renferme pas les vices que j’ai signalés.
S’il eût été question en France de convertir le système des remises et traitements fixes, c’est le produit de chaque direction en rapport avec le travail qu’elle nécessite, qu’on eût pris pour base de proportion, et non un classement arbitraire des départements, suivant leur plus ou moins grande étendue, suivant le chiffre plus ou moins élevé de leur population, ou suivant toute autre distinction de faveur ou de pur caprice.
Voyez, messieurs, la bizarrerie des innovations introduites par l’arrêté du 18 octobre, et combien est malheureux l’auteur de cette conception.
Pour l’administration centrale, il copie la France, et toute la chambre repousse cette nouvelle organisation.
Pour l’administration dans les provinces, il veut quelque chose de mieux que ce qui existe en France et il fait encore quelque chose de plus mauvais. Il fait plus que cela, il donne un désaveu formel à ce que M. le ministre des finances avait proclamé comme vérité incontestable au budget de 1832.
Voici en termes la note qui s’y trouve placée, pour ce qui regarde l’administration de l’enregistrement et des domaines dans les provinces.
« De tout temps l’on a senti la nécessité de ne pas donner aux employés de l’administration de l’enregistrement et des domaines des traitements fixes, mais bien une remise sur les produits, pour que cette administration, étant composée presque en totalité de produits casuels faciles à éluder ou à frauder, le moindre relâchement dans les préposés lui porter un coup de mort. »
Comme vous voyez, messieurs, M. le ministre s’est trompé en 1832 ; sinon l’arrêté du 18 octobre est précisément le coup de mort de cette administration.
Sous ces diverses considérations, et convaincu, comme je le suis, que le système précédent, contre lequel la chambre n’a jamais réclamé en ce qui regarde l’administration dans les provinces, est évidemment plus avantageux au trésor que le système de l’arrêté du 18 octobre ; convaincu également que le système précédent serait même amélioré sans accroissement de dépenses, si en conservant un minimum des traitements on les complétait au moyen d’une modique remise proportionnelle sur le produit de chaque direction, je n’admettrai d’autre chiffre au budget que celui qui a été alloué au budget de 1833, et je voterai pour la proposition de la section centrale.
- La suite de la discussion est renvoyée à demain. La séance est levée à 4 heures et un quart.