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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 13 décembre 1831

(Moniteur belge n°183, du 15 décembre 1831)

(Présidence de M. de Gerlache.)

La séance est ouverte à midi et demi.

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Dellafaille fait l’appel nominal. Le même lit la rectification faite au procès-verbal de la séance de samedi dernier par M. H. de Brouckere et le procès-verbal de la séance d’hier. La rectification et le procès-verbal sont adoptés.

Pièces adressées à la chambre

M. Liedts analyse quelques pétitions, qui sont renvoyées à la commission.


M. Rogier informe la chambre qu’il est forcé de s’absenter pour plusieurs jours.

Projet de loi tendant à prolonger la mobilisation de la garde civique

Dépôt

Projet de loi relatif aux conseils de milice

Dépôt

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux) monte à la tribune et présente deux projets de loi, l’un tendant à prolonger l’effet de la loi sur la mobilisation de la garde civique, et l’autre sur les conseils provinciaux.

- Ces projets seront imprimés et distribués ; nous les ferons connaître.

Rapport sur une pétition

M. Jonet fait ensuite le rapport de la pétition de la régence de Mons en ces termes. - Messieurs, la régence de Mons a présenté une pétition à la chambre, au sujet d’une difficulté élevée entre elle et l’administration financière. Voici le fait :

La loi du 21 octobre dernier porte, article premier : « Il sera levé un emprunt pour subvenir aux besoins de l’Etat, composé :

« 1° D’une somme égale à la contribution foncière de l’exercice courant ;

« 2° De 80 p. c. du principal de la contribution personnelle de chaque commune, pour l’exercice de 1831. »

D’après l’article 6 de la même loi, le 80 p. c. levé sur la contribution personnelle doit être réparti entre la moitié des contribuables les plus imposés au rôle.

Cette loi n’exempte de l’emprunt nulle autres personnes que la moitié des contribuables les moins imposés.

Cependant un arrêté royal du même jour, 21 octobre, tout en ordonnant aux receveurs des contributions de confectionner les rôles, dit, article 4, que « les contribuables décédés avant la promulgation de la loi précitée ne seront pas porter aux rôles, mais qu’ils feront partie de la moitié non imposable. »

En exécution de cet arrêté, le receveur de la ville de Mons s’est adressé à la régence de la même ville pour avoir une liste des personnes décédées depuis le 1er janvier 1831 jusqu’au 21 octobre.

La régence a refusé de donner cette liste, et a soutenu que l’article 4 de l’arrêté précité ne pouvait être que l’effet d’une erreur. Elle a soutenu, en outre, que son exécution mènerait à une injustice évidente, puisque dans la ville de Mons elle dispenserait de l’emprunt les veuves et les héritiers de quelques personnes opulentes, décédées dans cette commune depuis le 1er janvier dernier.

Nonobstant ces observations, les rôles furent dressés « par ordre supérieur, » conformément à l’arrêté. La régence, en dénonçant ce fait à la chambre, demande que le corps législatif interprète la loi précitée.

La commission des pétitions pense que la loi du 21 octobre n’étant pas douteuse, il n’y a pas lieu de l’interpréter. Elle pense encore que l’arrêté royal n’a pas pu changer ni modifier la loi, puisque les articles 29 et 67 de la constitution, en permettant au gouvernement de faire des arrêtés et des règlements pour l’exécution des lois, lui défend par cela même d’en faire de contraires aux lois.

En conséquence, elle propose le renvoi de la pétition au ministre des finances ; elle croit que ce renvoi suffira pour que justice soit rendue à un chacun.

M. Gendebien. - Je demande la parole pour appuyer les conclusions de la commission. Mais je pense qu’il y aurait lieu de demander à M. le ministre des finances qu’il voulût nous donner des explications sur cette pétition le jour qu’il lui plaira de fixer.

- La chambre ordonne le renvoi au ministre des finances, avec invitation de présenter sur la pétition son rapport et ses observations dans le plus bref délai.

M. le ministre des finances (M. Coghen) déclare qu’il donnera ces explications aussitôt qu’il aura pris connaissance de l’objet de la pétition.

Projet de loi, amendé par le sénat, tendant à lever la prohibition à l'exportation des armes de guerre

Discussion générale

La suite de l’ordre du jour est la délibération de la loi relative à la sortie des armes, amendée par le sénat.

M. H. de Brouckere demande la parole. Il fait l’historique de ce qui s’est passé relativement au projet, lors de la discussion à la chambre des représentants et au sénat. Il lit la fin du rapport de la commission du sénat, et termine ainsi :

Evidemment, messieurs, le sénat n’a fait qu’un jeu de mots, et de plus un jeu de mots malheureux. En outre, vous aviez pensé que, par le projet, l’arrêté prohibitif était aboli, tandis que, d’après la décision de l’autre chambre, il n’est que suspendu. Voilà où le sénat nous a conduits, en voulant être, comme il l’a dit lui-même, scrupuleux ; je dis, moi, trop scrupuleux. Cependant, pour ne pas renvoyer encore le projet au sénat, je consens à l’adopter tel qu’il est.

M. Gendebien. - Messieurs, l’article 33 de notre règlement porte que les sections ne pourront discuter un projet que trois jours après sa présentation. Or, j’ai pas même ouï dire jusqu’à présent que les sections eussent été convoquées ; mais en le supposant, il ne s’est pas encore écoulé trois jours. Je crois que c’est le cas plus que jamais de suivre le règlement ; car il ne faut pas nous le dissimuler, il s’agit rien moins que d’un conflit entre les deux chambres. Il faut éviter que le sénat s’obstine dans sa décision, et il aurait peut-être le droit de s’obstiner si nous ne prenions pas la peine de la méditer dans les formes. Je demande donc que les sections s’occupent d’examiner le projet de loi, et qu’on fixe un jour comme d’ordinaire pour la discussion.

- Une très longue discussion s’engage sur la question de savoir si le projet sera renvoyé à l’examen des sections, ou si la discussion aura lieu immédiatement en raison de l’urgence, qui est déclarée par la chambre sur la proposition de M. Lebeau et de M. le ministre des finances (M. Coghen).

Parlent pour la discussion immédiate M. H. de Brouckere, M. Barthélemy, M. Dewitte, M. de Foere, et pour le renvoi aux sections, M. Gendebien, M. Dumortier, M. Fallon et M. Jullien.

M. de Robaulx appuie le renvoi en sections sur le motif : 1° qu’on pourrait reprendre l’amendement de M. Destouvelles tendant à n’accorder au Roi la faculté de rétablir de son chef la prohibition qu’en l’absence des chambres ; 2° qu’il y a une haute question de constitutionnalité soulevée par M. Fleussu à examiner ; 3° et enfin qu’il faut exécuter le règlement.

Il y a encore, ajoute l’orateur, un autre motif, c’est que l’amendement du sénat me paraît bien mériter la peine qu’on l’examine avec maturité ; car enfin si on déclare qu’on ne l’admet que pour ne pas le renvoyer encore, comme l’a dit M. H. de Brouckere, c’est déconsidérer un des grands corps de l’Etat. J'ai voté contre l’institution du sénat ; mais, aujourd’hui qu’il existe, je pense qu’il faut respecter sa dignité comme la nôtre même. Quel que soit l’amendement qu’il ait fait à la loi, il mérite d’être sérieusement médité par nous.

M. H. de Brouckere. - Je ne pense pas que M. de Robaulx ait vu, dans aucune de mes parole, l’intention de déconsidérer un des grands corps de l’Etat. Je déclare que je respecte le sénat comme je respecte la chambre des représentants ; mais j'ai le droit de critiquer une de ses décisions, quand je la trouve mauvaise. Je ferai remarquer que le sénat a agi de même à notre égard, puisqu’il a trouvé notre rédaction inconstitutionnelle. Il m’est bien permis, je pense, de dire que la sienne est mauvaise et que la nôtre est meilleure.

M. de Robaulx. - M. de Brouckere a demandé par quelles paroles il aurait pu déconsidérer le sénat. Je lui rappellerai qu’il a dit que le sénat n’avait fait qu’un jeu de mots.

M. H. de Brouckere. - Eh bien ! oui, j’ai pu dire que la décision du sénat n’était qu’un jeu de mots, comme le sénat avait dit que la nôtre était inconstitutionnelle.

M. Poschet. - Je demande la clôture de la discussion, parce que, sous le prétexte de la renvoyer à demain, nous y arriverions, je crois, en discutant. (Rire général.)

M. Dumortier. - Je demande que la question soit posée en ces termes : « La section centrale fera-elle ou ne fera-t-elle pas de rapport ? »

M. le président. - Je mets aux voix la question de savoir si la chambre entend renvoyer le projet en sections, pour qu’il soit fait un rapport et que la discussion ait lieu immédiatement.

- L’affirmative est décidée à une assez forte majorité.

Projet de budget de la chambre de l'exercice 1832

Rapport de la section centrale

M. Leclercq, rapporteur de la section centrale, présente un rapport sur le budget de la chambre des représentants pour l’année 1832. Il conclut à l’adoption du projet présenté par MM. les questeurs, et approuvé par la commission de comptabilité, en émettant le vœu que les impressions de la chambre soient mises en adjudication, et qu’on désigne un imprimeur lithographe pour exécuter celles qui seraient susceptibles de l’être par la lithographie. La section centrale propose aussi de réduire à 700 fl., au lieu de 800, le traitement du premier huissier ; à 600 fl. au lieu de 650, celui du deuxième, et à 500 fl. au lieu de 550, celui du troisième huissier.

- L’assemblée décide que la discussion s’ouvrira immédiatement.

Discussion des articles

Tous les articles sont adoptés sans discussion en ces termes.

Articles 1 à 12

Art. 1er. 80 membres ont droit à l’indemnité de 200 florins par mois, ce qui fait 16,000 florins par mois ; donc, pour 8 mois, 128,000 florins.

Comme il est impossible aux soussignés de prévoir pendant combien de temps la chambre sera assemblée, ils portent ici l’indemnité pour 8 mois.

Art. 2. Traitement du greffier : fl. 1,500.

Art. 3. Traitement de l’archiviste : fl. 1,000

Art. 4. Traitement du copiste : fl. 500.

Art. 5. Traitement du premier huissier, tel qu’il a été fixé par le bureau, fl. 700.

Art. 6. Traitement du deuxième huissier, tel qu’il a été fixé par le bureau, fl. 600.

Art. 7. Traitement du troisième huissier, tel qu’il a été fixé par le bureau, fl. 500.

Art. 8. Traitement des quatre messages, chacun à 200 fl., fl. 800.

Art. 9. Traitement de la concierge, fl. 500.

Art. 10. Crédit ouvert aux questeurs pour frais de balayage, fr. 1,051 20 c.

Art. 11. Idem pour le boutefeu, fl. 275.

Art. 12. Idem pour achat de livres et documents utiles aux travaux de la chambre : fl. 2,000.

Article 13

Art. 13. Pour impressions, papiers, plumes, encre, et autres fournitures de bureau, feu, lumière et autres dépenses imprévues : fl. 21,000.

M. Legrelle demande que le bureau mette les impressions en adjudication.

M. Bourgeois. - Vous trouverez peut-être fort élevée la somme de 21,000 fl. pour frais d’impression ; mais nous avions entendu comprendre dans ce chiffre les dépenses éventuelles que pourrait occasionner la commission d’enquête. Dans tous les cas, ceci n’est qu’un crédit ouvert, et les sommes qui ne seront pas dépensées resteront toujours.

M. de Robaulx. - J’insiste pour qu’on mette les impressions en adjudication, parce que j’ai vu l’énorme dépense qu’elle ont occasionné du temps du congrès. Pendant longtemps on a payé 1,200 fl. d’impressions par mois. Quand il a été question d’adjudication, les imprimeurs sont eux-mêmes venus offrir un rabais considérable, et je suis certain qu’aujourd’hui elles coûtent un tiers de moins qu’elles ne coûtaient alors.

M. le président. - Le bureau aura égard aux observations qui ont été faites, et aux désirs exprimés par la commission, tant à l’égard de l’adjudication, qu’à l’égard du lithographe. Votera-t-on la résolution par appel nominal ? (Oui ! oui ! Non ! non !)

M. de Robaulx. - Pour que la cour des comptes délivre des mandats, il faut une loi.

M. Barthélemy. - C’est inutile, car le projet fera partie du budget des finances. (C’est juste ! c’est juste !)

Projet de loi autorisant le gouvernement à négocier un emprunt de 48 millions de florins

Mise à l'ordre du jour

La chambre décide sans discussion, et sur la proposition de M. le président, qu’il y a urgence de s’occuper du projet de loi relatif à l’emprunt ; il y aura demain, pour cet objet, réunion en sections à dix heures, et à midi en séance publique.

La séance est levée à trois heures.