(Moniteur belge n°161, du 23 novembre 1831)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est ouverte à une heure.
M. Jacques fait l’appel nominal.
Le même lit le procès-verbal. Il est adopté.
M. Lebègue analyse quelques pétitions, qui sont renvoyées à la commission.
L’ordre du jour est le vote sur l’ensemble de la loi des crédits à accorder au ministre de l’intérieur.
M. Lebègue relit le projet.
On procède ensuite à l’appel nominal.
La loi est adoptée à l’unanimité de 72 voix. Trois membres, MM. Seron, Bourgeois et Dellafaille, se sont abstenus, parce qu’ils n’avaient pas été présents à la discussion.
M. le président. - La suite de l’ordre du jour appelle les questions que M. Gendebien a annoncé l’intention de faire à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Gendebien. - M. le ministre n’étant pas présent, je demande qu’on remette ces questions à mercredi prochain.
M. le président. - M. de Muelenaere ne pourrait-il pas les entendre aujourd’hui ? Quelqu’un de MM. les ministres présents voudra-t-il nous dire s’il y a un obstacle qui empêche M. de Muelenaere de répondre aujourd’hui ?
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - Je ne vois aucun obstacle, M. le président.
M. le président. - Alors nous allons envoyer auprès de M. le ministre des affaires étrangères.
- La séance est suspendue pour un instant. Bientôt M. de Muelenaere est introduit dans la salle.
M. Gendebien. - Comme je n’ai pas conservé copie des quatre questions que j’ai remises à M. de Muelenaere, je le prie de vouloir bien en donner lecture à la chambre.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere) s’exprime ainsi. - L’honorable M. Gendebien m’a fait l’honneur de m’adresser une série de questions ainsi conçues :
« M. Gendebien prie M. le ministre des affaires étrangères de communiquer à la chambre, dans la séance de lundi 21 novembre :
« 1° Les deux notes remises par l’envoyé belge à la conférence, tendantes à obtenir des modifications aux 24 articles.
« 2° Les demandes et prétentions ou modifications adressées à la conférence par le roi de Hollande, et au sujet desquelles une réponse a été faite par la conférence dans les termes identiques employés à l’égard du ministre belge.
« 3° Des explications sur le sens dans lequel on doit entendre la ratification et l’échange à faire dans le terme de deux mois.
« 4° Quelles seraient les conséquences d’un refus de ratification de la part des cinq puissances, ou de quelques-unes d’elles ? »
Bien que ces questions, ajoute M. le ministre, me soient parvenues d’une manière irrégulière, je crois devoir y répondre. Je pense toutefois que l’honorable député, pour se conformer aux usages parlementaires, aurait dû déposer ses questions sur le bureau, et que le président aurait dû me les transmettre après avoir consulté l’assemblée.
Dans le rapport que j’ai eu l’honneur de vous faire dans la dernière séance, j’ai dit que notre plénipotentiaire a remis à la conférence deux notes tendantes à obtenir des modifications aux 24 articles, tant par rapport aux dettes, qu’à la navigation des rivières et des fleuves, et aux avantages commerciaux. Je crois que, la Hollande n’ayant pas encore adopté, il serait très dangereux de publier ces notes en ce moment ; leur effet pourrait être de faire naître, sur certains points, des doutes à notre préjudice, et la Hollande, avant d’accepter, prendrait acte de nos propres doutes pour s’en prévaloir peut-être dans l’exécution. Il ne m’est pas permis d’en dire davantage aujourd’hui. Vous apprécierez facilement les motifs de la réserve que me prescrivent des circonstances qui, nous pouvons l’espérer, cesseront prochainement.
Nous ignorons quelles sont les modifications que le gouvernement hollandais a demandées ; ce que vous savez comme nous, c’est que, d’après les pièces récemment communiquées aux états généraux par le ministre des affaires étrangères de Hollande, les plénipotentiaires hollandais, invoquant le protocole d’Aix-la-Chapelle du 15 novembre 1818, ont demandé à être admis à discuter dans le sein de la conférence les 24 articles. La note est du 7 novembre, et vous avez pu la lire dans les journaux.
Quant à la ratification, je ne puis que répéter ce que j’ai dit en terminant mon rapport. Les ambassadeurs et ministres qui ont conclu et signé le traité le 15 novembre étaient munis de pleins pouvoirs, qui ont été échangés et trouvés en due forme ; la ratification n’est plus qu’une simple formalité diplomatique, aussi bien que l’échange même des ratifications.
Il est, d’ailleurs, une remarque que tout le monde a pu faire, c’est que, si un désaveu était possible, il serait hors de toutes les probabilités. Depuis le 15 octobre, jour où les 24 articles ont été arrêtés, jusqu’au 15 novembre où ils ont été convertis en un traité avec les cinq puissances, il s’est écoulé un mois entier ; chacune des cours respectives a eu, comme l’Europe entière, connaissance des 24 articles primitifs, et si l’une d’elles avait pu ou voulu désavouer son plénipotentiaire, c’est avant le 15 novembre que le désaveu aurait été donné dans l’ordre actuel des choses. Depuis le 15 octobre, il s’est écoulé un temps suffisant pour que chaque membre de la conférence pût connaître les intentions de sa cour à l’égard des 24 articles, et l’acte du 15 novembre est en lui-même la ratification la plus formelle, la plus éclatante.
M. Gendebien. - Je me bornerai à répondre au reproche d’irrégularité que m’a fait M. le ministre sur la manière dont je lui ai présenté mes questions, que je n’ai fait que suivre la marche qu’il m’avait indiquée ; car c’est à sa demande que je lui ai adressé directement ces questions…
M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Je n’ai pas entendu faire un reproche à M. Gendebien de la marche qu’il a suivie ; j’ai seulement fait observer qu’elle aurait dû être faire dans une forme plus parlementaire.
M. Gendebien. - J’apprécie les motifs qui font garder le silence à M. le ministre des affaires étrangères, relativement aux deux notes remises par l’envoyé belge à la conférence, et je reviendrai sur cette question quand le temps sera plus opportun.
Je ne demanderai pas non plus de plus grands détails sur les modifications demandées par la Hollande.
Quant aux troisième et quatrième questions sur la ratification du traité, j’avoue qu’il me reste un doute, et ce doute résulte pour moi de ce que, depuis le 15 octobre jusqu’au 15 novembre, il ne s’est pas écoulé assez de temps pour qu’on pût en référer aux divers cabinets. Ce qui confirme ce doute et cette inquiétude, c’est que dans les 24 articles on a fixé un délai de deux mois pour la ratification. Si ce délai était nécessaire, celui d’un mois ne me paraît pas avoir été suffisant pour que l’opération ait été faite définitivement et de manière qu’il n’y ait plus rien à craindre pour nous. Du reste, j’attendrai que tout le temps nécessaire soit écoulé pour renouveler ces questions. Il est bien entendu que je les avait faites sans aucunement approuver les 24 articles de la conférence.
M. de Foere propose de nommer une commission pour aller féliciter le Roi de sa reconnaissance par les cinq cours.
M. Gendebien. - Le Roi est l’élu du peuple, et il n’avait pas besoin de la reconnaissance de personne ; il n’y a donc pas lieu à nommer une commission pour le féliciter sur un fait dès longtemps accompli pour nous : d’ailleurs, le traité n’est pas encore ratifié, et les félicitations pourraient bien être prématurées. Au reste, chaque député a la faculté d’aller individuellement le complimenter.
M. Lebeau. - Je ferai observer que, dès hier, un grand nombre de députés ont été admis devant le Roi. Ainsi, le but de notre honorable collègue est déjà rempli.
Noms des représentants absents sans congé à la séance du 21 novembre 1831 : MM. Angillis, Boucqueau de Villeraie, Coghen, Cols, Dams, Ch. de Brouckere, de Robaulx, Desmanet de Biesme, Dewitte, Domis, Dubus, Dumont, Gelders, Osy, Pirmez, Polfvliet, Poschet, Rogier, Tiecken de Terhove et Van Meenen.
La séance est levée à une heure et demie.