(Moniteur belge n°114, du 7 octobre 1831)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est ouverte à une heure et demie.
Après la lecture et l’adoption du procès-verbal, M. le ministre des affaires étrangères demande la parole pour faire une communication à l’assemblée. (Vif mouvement d’intérêt, profond silence.)
M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Messieurs, l’honorable M. Gendebien m’ayant interpelé, dans la séance d’hier, sur la question de savoir si les hostilités seraient reprises le 10 octobre, il me fut impossible de répondre catégoriquement à cette question. Toutefois, je crois pouvoir dire qu’il était probable que la reprise des hostilités n’aurait pas lieu. Les motifs qui me faisaient considérer comme probable la prolongation de l’armistice étaient que j’avais été informé précédemment que la conférence de Londres ne croyait pas possible d’avoir aplani toutes les difficultés existantes entre nous et la Hollande pour le 10 octobre, ni par conséquent de nous présenter avant cette époque un traité définitif de paix. Je savais aussi que l’intention de la conférence était de ne pas permettre que les hostilités fussent reprises par aucune des parties belligérantes avant qu’un traité ne fût proposé par elle, qui pût obtenir l’assentiment des deux intéressés.
Depuis que cette interpellation m’a été faite, et hier à neuf heures du soir, j’ai reçu de sir Robert Adair une communication officieuse que je crois de mon devoir de communiquer à la chambre. Sir R. Adair a reçu de sir Ch. Bagot, ambassadeur d’Angleterre à La Haye, une lettre par laquelle il lui annonce que le 3 de ce mois, après un conseil des ministre présidé par le roi lui-même, celui-ci a consenti à une prolongation de l’armistice pour 15 jours ; ainsi, est-il dit dans cette lettre, l’armistice ne cessera que le 25 du mois d’octobre.
Je dois cependant déclarer à la chambre que le gouvernement n’a pas reçu de communication officielle à cet égard, et on en devine aisément la raison. Si, comme le dit sir Ch. Bagot, il est vrai que cette décision n’ait été prise que le 3 de ce mois, le gouvernement n’ayant aucune communication directe avec le gouvernement hollandais, il ne peut recevoir la nouvelle officielle que par l’intermédiaire de la conférence de Londres. Elle nous arrivera probablement avant 2 ou 3 jours.
Je crois cependant que la lettre reçue par sir Adair peut être regardée comme une pièce officielle, et que l’on peut regarder dès à présent l’armistice comme prolongé jusqu’au 25 du mois d’octobre. (Marques générales de satisfaction.)
M. le président. - L’ordre du jour est la suite de la discussion du règlement.
Les articles 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83, 8, 85, 86, 87, 88 et 89 sont adoptés sans changements notables en ces termes (note du webmaster : sous réserve des numéros d’articles (voir séance du 1er octobre 1831) :
« Art. 78. Deux représentants, ou un plus grand nombre, si la chambre le juge convenable, remplissent les fonctions de questeurs. »
« Art. 79. Ils sont nommés par bulletin de liste et de la même manière que le bureau, pour le terme de deux ans. »
« Art. 80. Les questeurs sont chargés de toutes les mesures relatives au matériel, au cérémonial et aux dépenses de la chambre. »
« Art. 81. Ils se concertent avec les personnes désignées à cet effet par le sénat, pour les mesures qui concernent l'entretien du palais et pour toutes celles qui intéressent en commun les deux chambres.
« (alinéa repris dans le Moniteur mais non dans la rédaction officielle du règlement : « Les membres de cette commission sont nommés par la chambre en assemblée générale ou en sections, au commencement de chaque session. »)
« Art. 82. Une commission de six membres, présidée par le premier vice-président, est chargée de l'examen de la comptabilité des fonds de la chambre. «
Les membres de cette commission sont nommés par la chambre en assemblée générale ou en sections, au commencement de chaque session.
« Art. 83. La commission vérifie et apure tous les comptes, même les comptes antérieurs non réglés ; elle fait un récolement général du mobilier appartenant à la chambre. La commission, sur la proposition des questeurs, détermine le budget de la chambre et le soumet à son approbation. »
« Art. 84. Le budget de la chambre contient chaque année une allocation de fonds pour la bibliothèque.
« Les questeurs achètent sur ce fonds, au fur et à mesure des besoins de la chambre, les livres et documents qui peuvent être les plus utiles à ses travaux. »
« Art. 85. Aucun livre ne peut être emporté de la bibliothèque que sur un reçu. Chaque membre ne pourra conserver chez lui un livre que pendant deux fois 24 heures. »
« Art. 86. Un catalogue des ouvrages qui composent la bibliothèque est mis à la disposition de la chambre. «
« Art. 87. La chambre, si les besoins du service viennent à l'exiger, pourra nommer un employé chargé spécialement des fonctions de bibliothécaire. Il sera nommé de la même manière et pour le même laps de temps que le greffier. »
« Art. 88. La constitution, le règlement de la chambre, les dispositions concernant les relations des chambres entre elles et avec le roi, et la loi électorale, sont distribués à tous les membres de la chambre, à l'ouverture de chaque session. »
« Art. 89. Les huissiers, messagers et en général tous autres employés nécessaires au service de la chambre, sont nommés et révoqués à la majorité absolue, par le président, les vice-présidents, les secrétaires et les questeurs. »
« Art. 90. Nul représentant ne peut s'absenter sans un congé de la chambre.
« Il est tenu note sur un registre particulier de tous les congés accordés. »
La discussion est suspendue pour la présentation d’un projet de loi relatif au transport des bois sur le territoire ennemi.
M. le ministre de la justice (M. Raikem) donne lecture à la chambre de l’exposé des motifs et des trois articles du projet ainsi conçus :
« Art. premier. Les bois de construction et autres ne pourront être transportés sur le territoire occupé par l’ennemi.
« Ceux qui ont cette destination seront saisis et mis en séquestre. »
« Art. 2. Il sera procédé à la saisie et à la mise en séquestre, comme en matière de contraventions sur les droits d’entrée et de sortie et des accises. »
« Art. 3. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. »
M. le ministre de la justice (M. Raikem) prie la chambre de discuter ce projet séance tenante.
- Un membre. - Je demande la remise à demain, pour avoir le temps de l’examiner.
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - Je déclare que je retire le projet, s’il est remis à demain.
Après une légère discussion, et sur l’observation de M. Gendebien, la chambre décide qu’une commission examinera sur-le-champ le projet et en fera le rapport séance tenante.
Voici le nom des membres désignés pour composer cette commission : MM. Destouvelles, Gendebien, C. Rodenbach, de Theux, Brabant, Serruys.
La commission se retire pour délibérer, et la chambre, sur l’observation de M. le président, décide qu’elle continuera pendant ce temps la discussion du règlement.
Voici la rédaction des derniers articles du règlement.
« Art. 91. La police de la chambre lui appartient. Elle est exercée en son nom par le président, qui donne à la garde de service les ordres nécessaires. »
« Art. 92. Nul étranger ne peut, sous aucun prétexte, s'introduire dans l'enceinte où siègent les membres de la chambre. »
« Art. 93. (Le Moniteur ne contient pas ce bout de phrase du règlement officiel « Pendant tout le cours de la séance, », et commence cet article comme suit :) « Les personnes placées dans les tribunes se tiennent assises, découvertes et en silence.
« Toute personne qui trouble l'ordre est sur-le-champ exclue des tribunes. Elle est traduite sans délai, s'il y a lieu, devant l'autorité compétente. Cet article est imprimé et affiché à chaque porte des tribunes. »
M. Verdussen propose un amendement tiré de l’article 39 de la constitution, ainsi conçu : « Les élections et les présentations de candidats se font au scrutin secret. »
Cet amendement sera intercalé à la suite de l’article 6 du règlement. (Note du webmaster : il deviendra l'article 48 du règlement adopté.)
La commission rentre après un quart d’heure de délibération.
M. Brabant, rapporteur. - Messieurs, la commission a été unanimement d’avis d’adopter le projet de loi tel qu’il est présenté, à l’exception d’un membre qui a demandé qu’on y ajoutât : « à l’exception des bois de chauffage. »
- L’article premier est mis en discussion.
M. Destouvelles propose de mettre dans la loi : « à l’exception des bois de chauffage, à la dimension d’un mètre et au-dessous.
L’honorable membre dit que, sans cette restriction, la chambre plongera la malheureuse ville de Maestricht dans de nouveau malheurs, en la privant de bois pendant l’hiver.
M. Leclercq propose de retrancher les mots « et autres, » et de les remplacer par un paragraphe qui excepterait de la mesure les bois dont le gouverneur de Maestricht aura permis le transit, cette condition étant mutuelle.
M. Destouvelles. - Messieurs, on n’a pu obtenir le transit. On s’est même adressé pour cela au grand-maître d’artillerie d’Angleterre, qui a répondu qu’on ne pouvait forcer le commandant militaire à laisser passer, et qu’ainsi le voulait la loi de la guerre.
M. H. de Brouckere dit qu’une grande population va se trouver réduite à la plus affreuse misère par la loi, et il demande que le ministre revienne sur des mesures qui lui paraissent non seulement désastreuses mais inhumaines.
M. Gendebien appuie l’amendement de M. Leclercq, et combat celui de M. Destouvelles.
Je regrette, dit en terminant l’orateur, qu’on nous ait présente une loi sur cet objet, quand le commandant de la ville de Liége aurait pu atteindre le même but avec dix hommes seulement ; mais je connais le commandant de Liége ; c’est un homme sans caractère, qui sera cause qu’on nous occupera de pareilles minuties.
- Une assez longue discussions s’élève sur la question de savoir quelles sont les communications établies avec Maestricht par les traités.
M. H. Vilain XIIII, M. Nothomb et M. d’Elhoungne sont entendus dans leurs observations.
M. Devaux. - Messieurs, je serai court, car je désire abréger la discussion.
Il me semble que l’amendement de M. Leclercq n’apporte aucune garantie ; il parle de la condition mutuelle de transit. Mais, quand la place sera approvisionnée de bois, le gouverneur refusera le passage. Je ne vois pas l’avantage de cet amendement.
Je propose de mettre « pourront être saisis, » au lieu de « seront saisis. »
M. H. de Brouckere revient sur les communications avec Maestricht.
M. A. Rodenbach. - Messieurs, je demande la clôture de la discussion, car depuis une heure nous faisons de la diplomatie à propos de bûches. (On rit.)
- Les amendements de MM. Destouvelles et Leclercq sont rejetés.
M. Devaux propose de rédiger ainsi l’article :
« Les bois de construction et autres ne pourront être transportés sur le territoire occupé sans une autorisation du gouvernement.
« Ceux qui ont cette destination, sans être munis de cette autorisation, pourront être saisis et mis en séquestre. »
- Cette rédaction est adoptée.
M. de Theux propose d’ajouter à l’article 2 : « sans néanmoins que ces bois soient sujets à confiscation, si ce n’est après le délai de huitaine, à partir du jour de la promulgation de la loi. »
M. Fallon propose de sous-amender ce paragraphe en y ajoutant : « et en cas de fraude. »
- Ces deux propositions sont adoptées. L’article ainsi amendé est ensuite adopté.
L’article 3 est également adopté sans changement.
On fait l’appel nominal ; sur 64 votants, 62 se prononcent pour, 2 contre : ces deux membres sont MM. Destouvelles et d’Elhoungne.
La loi est adoptée.
On fait ensuite l’appel nominal pour le règlement. Il est adopté.
46 membres votent pour, 11 contre.
M. H. Vilain XIIII prévient la chambre, par une lettre remise à M. le président, qu’il donne sa démission de questeur, et il demande qu’on procède demain à l’élection d’un autre questeur ainsi qu’à la nomination du greffier de la chambre.
M. Destouvelles demande que le greffier ne soit nommé que dans 5 jours.
- La chambre se range à cet avis.
M. Rogier demande un congé, qui est accordé.
La séance est levée à quatre heures un quart.