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matières de l’Essai
« ESSAI HISTORIQUE & POLITIQUE SUR
Par
Jean-Baptiste Nothomb
CHAPITRE V - Négociations de
Zonhoven, relatives aux communications de la forteresse de Maestricht et à la
navigation de la Meuse. Convention de Zonhoven, du 18 novembre 1833
(page 73) Les négociations générales, dont nous venons de rendre compte, avaient été reprises sous la médiation des cinq cours constituées en conférence, comme signataires et garantes du traité du 15 novembre; une négociation spéciale avait été presque en même temps ouverte sous la médiation des gouvernements français et britannique, comme signataires et garants de la convention du 21 mai ; elle se prolongea au delà de la réunion de la, Conférence et eut pour résultat la convention militaire de Zonhoven, du 18 novembre 1833.
Voici quelle a été l'origine de cette négociation accessoire.
L'article 4 de la convention du 21 mai est ainsi conçu :
« Immédiatement
après l'échange des ratifications de la présente convention, la navigation de
(page 74) « Les communications entre la forteresse de Maestricht et la frontière du Brabant septentrional, et entre ladite forteresse et l'Allemagne, seront libres et sans entraves. »
On voit que cet article se compose de deux parties connexes.
Le § 1er, relatif à la
navigation de
Le § 2, relatif aux communications de la forteresse de Maestricht, se borne à poser le principe de la liberté de ces communications, mais sans déterminer de mode d'exécution.
Le gouvernement hollandais demanda que des commissaires fussent nommés pour régler par une convention spéciale l'exécution du § 2.
En accédant à la
nomination de commissaires, le gouvernement belge demanda que l'application du
tarif de Mayence à
Si cette application avait été faite de plein droit, comme elle aurait dû l'être, la demande du gouvernement belge eût été sans objet ; mais cette disposition continuait à être éludée.
Le gouvernement belge
admit donc pour point de départ qu'il y avait connexion entre la navigation de
Les commissaires
délégués de
Le prince de Talleyrand et lord Palmerston communiquèrent cette note aux plénipotentiaires belges, MM. Goblet et Van de Weyer, sous la date du 30 juillet, et ceux-ci justifièrent la conduite de leur gouvernement dans deux notes, l'une du 1er août, l'autre du 3 septembre. Dans cette deuxième note, ils établissaient en ces termes la corrélation entre les deux objets énoncés dans l'article 4 de la convention du 21 mai :
« Une connexion, entière
et incontestable, existe entre les deux paragraphes de cet article. Le
gouvernement belge la regarde comme le principe fondamental de la convention à
conclure : le gouvernement néerlandais, au contraire, la méconnaît, et, sans
vouloir aborder la discussion du fond de l'article, il se renferme obstinément
dans le § 2 qui a stipulé ces obligations à remplir par
« Cette divergence de vues qui divise les deux gouvernements au point de départ, mais qui place l'avantage d'un droit et de la logique du côté du cabinet de Bruxelles, a amené, dans le courant du mois dernier, une première interruption des négociations ouvertes à Zonhoven. La même cause vient de produire encore le même effet ; et l'on doit s'étonner de ce que les commissaires néerlandais se soient trouvés, lors de la reprise de cos négociations, aussi peu munis qu'auparavant des (page 76) moyens nécessaires pour traiter la question sur son véritable terrain, bien qu'ils aient eu tout le temps de demander et de recevoir des instructions moins restreintes.
« Cet étonnement est d'autant plus légitime, que le cabinet de La Haye avait dû obtenir dans l'intervalle, par l'intermédiaire de ses plénipotentiaires à Londres, connaissance des explications que ses plaintes avaient provoquées de la part des soussignés, explications qui ne laissaient aucun doute sur le désir du gouvernement de S. M.le roi des Belges d'en venir à un prompt arrangement, basé sur les justes prétentions des deux parties intéressées.
« Si, dans cette occasion, le gouvernement néerlandais avait été animé du même désir, nul doute qu'on ne fût déjà tombé d'accord, à la satisfaction des deux pays, sur l'exécution de l'article 4 de la convention du 21 mai ; nul doute que cette cause d'irritation mutuelle n'eût cessé d'exister aujourd'hui, et qu'ainsi les intentions bienveillantes qui ont dirigé les cours de Paris et de Londres, en concluant l'acte dont il s'agit, ne fussent complètement remplies.
« La manière dont les
pourparlers de Zonhoven, repris le 16 août dernier, ont été rompus peu de jours
après par les commissaires néerlandais, ne prouve que trop que leur
gouvernement ne paraît pas disposé à exécuter régulièrement, en ce qui le
concerne, l'article 4 de la convention du 21 mai. En effet, après l'échange
d'un grand nombre de notes qui constatent que les parties n'étaient pas loin de
s'entendre sur la question des communications militaires, les commissaires
(page 77) néerlandais remirent, le 23août, un office renfermant une déclaration
portant que: « Si l'introduction d'une clause relative à la navigation de
« Au point où cette négociation en était venue, les commissaires belges étaient loin de s'attendre à ce qu'elle fût rompue par une déclaration dont les termes absolus ne laissaient aucun espoir et n'offraient aucun moyen de rapprochement sur la.question principale. »
Dans une note du 14
septembre, les plénipotentiaires hollandais cherchèrent à établir que les
commissaires belges avaient primitivement adopté la base des négociations, et
que seulement par la suite ils avaient invoqué une prétendue corrélation entre
la navigation de
« La base des pourparlers
qui ont eu lieu à Zonhoven, y est-il dit, se trouve explicitement indiquée dans
la lettre de créance des commissaires belges. Cette lettre met en évidence que
la convention à conclure a été désirée par les autorités militaires belges
elles-mêmes et qu'elle devait se borner exclusivement à régler tout ce qui est
relatif aux communications à établir entre la place de Maestricht et le Brabant
septentrional, sur la rive gauche de
« Bien que la négociation fût seulement reprise le 16 août, le gouvernement des Pays-Bas, privé du seul avantage stipulé dans la convention du'21 mai à la charge des Belges, n'en laissa pas moins jouir ceux-ci de tout ce qui avait été stipulé en leur faveur.
« A la nouvelle
réunion des commissaires, il se trouva que ceux de
En outre, lesdits commissaires produisirent une (page 79) prétention entièrement nouvelle, en demandant la signature de l'article suivant, tout à fait étranger à la convention militaire qu'il s'agissait de conclure. « Quant à la navigation de la basse Meuse, depuis Mook jusqu'à la mer, au Rhin, et à l'application des dispositions relatives au Rhin, stipulées dans la convention de Mayence du 31 mars 1831, il sera incessamment nommé des commissaires pour régler de concert l’emplacement des bureaux de péage, et le montant de ce droit. » ».
« Dès lors, les commissaires néerlandais, ne pouvant s'écarter des instructions qui leur avaient été données, d'après la base même du concert proposé de la part des Belges, n'eurent d'autre parti à adopter que celui de se retirer.»
Le cabinet de La Haye
alla plus loin; il se hasarda à soutenir, dans la même note, que la convention
du 21 mai n'avait pas entendu rendre libre la navigation de
« Dans la supposition
que l'on eût en vue moins de naviguer de
« En faudra-t-il
davantage pour constater la bonne foi du cabinet de La Haye, lorsqu'il se
persuada que, dans l'état provisoire des choses, la stipulation d'ouvrir
« Aussi
n'existe-t-il aucune plainte qu'on eût écarté un seul bâtiment belge qui aurait
voulu se prévaloir, à l'embouchure de
« Toujours habitué à
exécuter ponctuellement ses engagements, le gouvernement néerlandais poussa ses
scrupules au point que le département des finances, tout en doutant que la
chose fût possible, donna l'ordre de ne pas écarter, au dernier bureau sur
Arrivée à ce point, la négociation soulevait les questions suivantes :
'-1°
2° Faut-il borner
l'ouverture de
3° Existe-t-il une
corrélation entre les deux paragraphes de l'article 4 de la convention du 21
mai; et une convention nouvelle est-elle nécessaire pour régler l'application
du tarif de Mayence à
Les plénipotentiaires de
France et de
« 1° Pour ce qui
concerne le choix de la route, les soussignés doivent faire remarquer que les
arrangements territoriaux, stipulés par les vingt-quatre articles et par le
traité du 15 novembre 1831, assurent au Roi grand-duc une continuité de
territoire entre les anciennes provinces hollandaises et la forteresse de
Maestricht; et que la principale raison pour assigner au Roi grand-duc les
districts du Limbourg sur la rive droite de
« Lorsque les gouvernements
français et anglais invitèrent, dans l'automne de l'année dernière, les
gouvernements des Pays-Bas et de
« Si cette évacuation
réciproque avait été effectuée, les communications de la forteresse de
Maestricht auraient été libres ipso facto, parce que les troupes et les
autorités néerlandaises auraient occupé tous les districts du Limbourg qui ont
été assignés au Roi grand-duc sur la rive droite de
« Il paraît donc
aux soussignés que le gouvernement des Pays-Bas ne peut pas s'attendre à jouir
d'une ligne plus avantageuse de communications militaires, entre Maestricht et
les provinces hollandaises, que celle dont il jouirait maintenant, si le traité
du 10 novembre avait eu sa pleine exécution ; et leur opinion, bien fondée ce
semble, est que la stipulation de l'article 4, de la convention du 21 mai,
relative aux communications militaires de Maestricht, n'oblige pas le
gouvernement belge à assigner pour ces communications aucune autre route que
celle qui existe sur la rive droite de
« Quant au nombre de troupes qui devraient être autorisées à marcher en un seul corps, on devrait certainement prendre en considération les moyens qui existent sur les lieux pour loger et faire subsister ces troupes, pendant qu'elles sont en marche; et les soussignés croient que les égards dus aux intérêts et aux convenances des habitants du pays au travers duquel elles doivent passer exigent que les troupes en corps, qui seront dans le cas de suivre cette route, ne soient pas plus nombreuses qu'il n'est nécessaire, pour leur propre sécurité, contre toute insulte et surprise; et il ne paraît pas aux soussignés que le nombre proposé de 500 hommes puisse être considéré comme ne remplissant pas ces conditions. Si cependant l'organisation du service militaire néerlandais rendait désirable de faire (page 84) une légère addition au nombre de 500, les soussignés sont persuadés que le gouvernement belge ne refuserait pas de se rendre à l'évidence d'une pareille considération.
« 2° Pour ce qui se
rapporte à l'autre question en litige et qui concerne la navigation de
« Les soussignés ne peuvent pas admettre l'interprétation que les plénipotentiaires néerlandais ont essayé de donner à l'article 4 de la convention du 21 mai 1833, et par suite de laquelle l'effet de cet article serait d'accorder simplement aux barques venant de Liége la permission de passer sous le pont de Maestricht.
« Cet article ne
peut pas recevoir d'interprétation dans un sens aussi limité, aussi étroit: il
est général et exige que la navigation de
« Dans tous les cas, les soussignés sont prêts à reconnaître qu’il n'y a rien dans la convention du 21 mai qui oblige le gouvernement néerlandais à permettre aux sujets belges d'entrer sur son territoire et d'y introduire des marchandises belges. .
« Les Belges ont, par cette convention, le droit de naviguer en remontant et en descendant tout le cours (page 85) de la .Meuse, mais ils n'ont certainement aucun droit de débarquer dans les limites du territoire néerlandais, à moins que le gouvernement des Pays-Bas ne les autorise à le faire.
« 3° L'accord des
commissaires des deux côtés est évidemment aussi nécessaire pour établir le
mode d'application à
« Du reste, l'argument en lui-même ne paraît pas, aux soussignés, bien fondé en raison; car, lorsque deux parties contractantes s'engagent à l'exécution d'un acte quelconque, elles s'obligent naturellement en même temps à prendre toutes les mesures nécessaires pour arriver au but qu’elles se proposent; et si tous les arrangements de détail qu'elles peuvent être dans le cas d'adopter pour accomplir ce but devaient être exprimés dans les conventions par lesquelles elles se sont engagées, il en résulterait que ces instruments, au lieu d'être rédigés avec une précision toujours désirable, ne (page 86) formeraient plus qu'une réunion confuse de stipulations sujettes il discussion. »
Il est à remarquer que,
dans cette note, tout en déclarant que
Les plénipotentiaires
hollandais répondirent à cette note par la note du 10 octobre. Les
plénipotentiaires de France et de
Le plan adopté par le ministère belge était donc pleinement approuvé par les cabinets français et anglais; nous allons voir le cabinet de Bruxelles en dévier de lui-même. Cette déviation progressive est constatée par trois procès-verbaux du conseil, du 29 octobre, du 1e et du 17 novembre, publiés sur la demande des Chambres.
Dans sa séance du 29
octobre, le conseil enjoignit au ministère de la guerre de défendre, le cas
échéant, par la force le passage à travers le Limbourg, déclarant que le gouvernement
persistait dans sa résolution « d'exiger, avant d'accorder les libres
communications militaires entre Maestricht et le Brabant septentrional, la
cessation du droit provincial perçu sur
Ce n'était pas là
persister dans la première résolution, qui consistait à demander que
l'application du tarif de Mayence à
Dans sa séance du 1er novembre, le conseil abandonna au département de la guerre la partie purement militaire de la négociation, abandon difficile à justifier d'après la rigueur des principes qui supposent une responsabilité collective.
Le 17 novembre, 1e conseil prit connaissance:
1° D'une lettre du 10 novembre, par laquelle le commandant supérieur de Maestricht déclarait que, par suite d'ordres venus de La Haye, le droit provincial cessait d'être perçu ; que les heures de la traversée étaient réglées de manière à satisfaire aux besoins du commerce ; qu'il serait permis à un certain nombre de passagers non militaires de se trouver à bord dans la traversée par la forteresse;
2° D'un procès-verbal de l'association des bateliers de Liége, constatant que la déclaration précédente avait reçu son exécution;
3° D'un projet de
convention purement militaire dans son dispositif, mais reconnaissant dans son
préambule la connexion entre la navigation de
Le conseil, regardant les conditions dont l'accomplissement préalable avait été exigé comme remplies, et le choix de la route comme une affaire purement militaire, autorisa le ministre de la guerre à faire signer la convention par ses commissaires; ce qui eut lieu le lendemain 18 novembre, au château de Zonhoven.
La plupart des notes que
nous avons analysées avaient été successivement publiées par les journaux ; le
ministère belge ayant abandonné en apparence ses antécédents, malgré l'appui
qu'il avait obtenu à Londres, se présentait devant les Chambres dans une
position assez embarrassante. La discussion du budget des recettes pour 1834
offrait naturellement l'occasion d'examiner le dernier acte, diplomatique ;
appréciant les avantages matériels de l'arrangement de Zonhoven qui permettait
de désarmer à l'entrée de l'hiver,
(page 89) La convention de
Zonhoven doit être considérée comme le complément de la convention du 21 mai;
c'est aussi le premier acte intervenu entre
[1] Voyez le discours prononcé par M.
Nothomb le 7 décembre 1833, p. 100 du Recueil des discours.
Les
mesures coercitives dont le général Goblet a été le promoteur ont porté à la
cause de la maison d'Orange un coup dont elle ne s'est point relevée; les
négociations reprises à la suite de la convention du 21 mai 1833 ayant été
indéfiniment ajournées le 24 août de la même année, la question extérieure
devenait secondaire et il a pu regarder sa tâche comme terminée. Sa démission a
été acceptée le 27 décembre 1838 et il s'est mis en mesure de prendre
possession du poste d'envoyé extraordinaire et, ministre plénipotentiaire à
Berlin, poste pour lequel, l'année précédente, il avait été désigné par le roi
des Belges Léopold Ier et agréé par une lettre du roi de Prusse Frédéric-Guillaume
III, en date du 5 juillet 1832. Ce qui à La Haye avait, en outre, vivement
irrité, c'est la note belge du 28 septembre 1833, dont le général Goblet était
un des signataires, sur les causes de l'ajournement des négociations ; le
contre-coup se fit sentir à Berlin sans qu'on puisse dire même aujourd'hui par
quelles influences personnelles. La réception du général, contre toute attente
et malgré l'agréation royale du 5 juillet 1832, fut subordonnée par le ministre
des affaires étrangères, M. Ancillon, à une démarche à faire à La Haye par la
légation de Prusse pour provoquer sa radiation du cadre de l'armée des
Pays-Bas, où son nom figurait indûment malgré le congé donné à tous les
officiers belges à Anvers par le prince d'Orange, radiation dont on se disait
certain; ce n'était qu'une formalité. Le général ne crut pas de sa dignité de
soldat et de citoyen de se prêter à cette démarche, et il aima mieux sacrifier
sa carrière diplomatique en Allemagne. Il est à remarquer qu'il était et qu'i!
est resté sans fortune. Léopold 1er le chargea en 1837 d'une mission de
confiance à Lisbonne. Le prince d'Orange, devenu roi sous le nom de Guillaume
II, le fit rayer de son propre mouvement en 1841, mais il était trop tard. La
non-réception du général Goblet à Berlin, qu'il quitta le 6 mai
Affaires
étrangères : M. de Muelenaere et, depuis le 13 janvier
Intérieur :
M. de Theux;
Justice :
M, Ernst;
Finances,
M. d'Huart;
Guerre,
le général Evain et, depuis le 19 août 1836, le général Willmar;
Travaux
publics : à partir du 13 janvier
C'est
sous ce 3e ministère que le pays s'est rassis et qu'à l'abri de convention du
2' mai il s'est développé. L'adhésion donnée le 14 mars 1838 par le roi
Guillaume aux vingt-quatre articles du 14 octobre 1831 est venue surprendre le
gouvernement en lui imposant la terrible tâche de conclure sur ces bases la
paix avec