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« ESSAI HISTORIQUE & POLITIQUE SUR LA RÉVOLUTION BELGE »

     

 Par Jean-Baptiste Nothomb

 

 

CHAPITRE XI – Les dix-huit articles

 

(page 182) Nous avons vu que la Conférence avait admis l'indépendance de la Belgique le 20 décembre 1830, et qu'elle en avait fixé les conditions le 20 et le 27 janvier 1831. Si, avant que cette dernière décision fût intervenue, la Belgique, prenant acte du principe de l'indépendance, avait pu résoudre la question dynastique en faisant un choix compatible avec la politique européenne, il est permis de supposer qu'elle aurait obtenu des conditions avantageuses de la Conférence, alors libre de tout engagement, et de la Hollande, alors sans moyen de défense. Considérée de ce point de vue, l'élection que le Congrès venait de faire était tardive; depuis le 18 février, les bases de séparation formaient un contrat synallagmatique entre les cinq cours et le roi Guillaume; revenue de la frayeur des journées de septembre, la Hollande avait eu le temps d'organiser une armée et ne pouvait se montrer disposée à délier la Conférence de ses engagements.

C'était donc immédiatement après la déclaration de l'indépendance belge et avant que les conditions en eussent été déterminées, qu'il aurait fallu choisir un roi; car autre chose est d'influer sur une décision à prendre, autre chose de faire modifier une décision déjà prise.

(page 183) Élu au commencement de janvier 1831, le prince Léopold eût puissamment influé sur un acte futur; élu au commencement de juin, il ne pouvait plus exercer son influence que sur l'interprétation d'un acte déjà existant.

Les conditions de l'indépendance belge étaient aussi les conditions auxquelles un prince pouvait régner en Belgique de l'aveu des puissances; une acceptation pure et simple de la couronne n'était plus possible. Une pareille acceptation eût été un acte d'hostilité envers l'Europe. Le roi choisi par les Belges pouvait-il faire sienne la protestation contre la Conférence? Non, sans doute: il se fût perdu sans sauver la Belgique; sa mission était de réconcilier la révolution avec l'Europe, et non de la condamner à périr avec lui. .

Pour rester, ou plutôt pour rentrer dans le système pacifique, il fallait donc préalablement conclure un arrangement nouveau: et cet arrangement ne pouvait consister qu'en des modifications aux actes du 20 et du 27 janvier. Par sa seule influence la Belgique ne pouvait espérer d'obtenir ces modifications: elle ne s'était pas montrée assez prudente, assez impartiale pour inspirer de la confiance; elle n'était pas assez forte pour répandre une peur durable; elle devait sa force moins à elle-même qu'au principe révolutionnaire, dont l'empire ne pouvait être éternel: il était facile de prévoir que, par le cours naturel des choses, par cette loi d'action et de réaction qui régit le monde, ce principe arriverait à son période de décroissance; le mouvement de recul se faisait même déjà sentir. La révolution de juillet avait ébranlé tous les peuples, en (page 184) évoquant à ses côtés trois autres révolutions, en Pologne, en Italie, en Belgique. La révolution italique venait de périr sans avoir combattu; la révolution polonaise, qui s'était jetée entre nous et la Russie, combattait encore; c'était une question de nationalité, de suprématie entre deux peuples, et, à la longue, le nombre devait l'emporter; au défaut de la diplomatie, une guerre générale eût seule pu sauver l'héroïque Pologne; mais le premier effet de cette grande lutte eût été de détruire l'indépendance belge, en précipitant la France hors de ses limites de 1815. Ce qu'il fallait tenter, c'était de constituer la Belgique avant que l'action révolutionnaire fût énervée, avant que l'Europe fût rentrée dans son repos, avant la mort de la Pologne; c'était au milieu de la tempête qu'il nous fallait entrer dans le port; la tempête passée, on nous eût repoussés du rivage.

L'élection immédiate du prince Léopold nous assurait donc, quoique tardivement, une haute influence auprès des puissances; elle réhabilitait notre cause compromise aux yeux des cabinets par la protestation du 1er février et le choix du 3 du même mois: l'indépendance belge devenait enfin une possibilité. Si le système des négociations préalables avait prévalu, la Belgique, n'ayant donné aucun gage à l'Europe, se fût de nouveau épuisée en de vaines tentatives: nous étions arrivés aux premiers jours de juin; le provisoire se serait prolongé entre les offres d'arrangement et les menaces de guerre; à la fin de septembre, Varsovie, en tombant, eût donné le signal d'une restauration en Belgique ou du partage.

(page 185) Il était survenu dans les dispositions de la Conférence et du Congrès quelques changements qui pouvaient servir de transition vers un nouvel arrangement.

Tout en persistant dans ses résolutions du 20 et du 27 janvier, la Conférence avait, par son protocole du 21 mai, n°24, admis la possibilité de la cession du grand-duché de Luxembourg; ce protocole, fruit des efforts. de lord Ponsonby, s' exprimait en ces termes:

« Considérant qu'il résulte des renseignements donnés par lord Ponsonby :

« 1° Que l'adhésion du Congrès belge aux bases de séparation de la Belgique avec la Hollande serait essentiellement facilitée, si les cinq cours consentaient à appuyer la Belgique dans son désir d'obtenir, à titre onéreux, l'acquisition du grand-duché de Luxembourg;

« 2° Que le choix d'un souverain étant devenu indispensable pour arriver à des arrangements définitifs, le meilleur moyen d'atteindre le but proposé serait d'aplanir les difficultés qui entraveraient l'acceptation de la souveraineté de la Belgique par le prince Léopold de Saxe-Cobourg, dans le cas, où, comme tout autorise à le croire, cette souveraineté lui serait offerte[1] ;

« Les plénipotentiaires sont convenus d'inviter lord (page 186) Ponsonby à retourner à Bruxelles et de l'autoriser à y déclarer:

« 1° Que les cinq puissances ne sauraient tarder plus longtemps à demander au gouvernement belge son adhésion aux bases destinées à établir la séparation de la Belgique d'avec la Hollande, bases auxquelles S. M. le roi des Pays-Bas a déjà adhéré;

« 2° Qu'ayant égard au vœu énoncé par le gouvernement belge de faire, à titre onéreux, l'acquisition du grand-duché de Luxembourg, les cinq puissances promettent d'entamer avec le roi des Pays-Bas une négociation dont le but sera d'assurer, s'il est possible, à la Belgique, moyennant de justes compensations, la possession de ce pays qui conserverait ses rapports actuels avec la Confédération germanique;

« 3° Qu'aussitôt après avoir obtenu l'adhésion du gouvernement belge aux bases de séparation, les cinq puissances porteraient à la connaissance de la Confédération germanique cette adhésion, ainsi que les engagements pris de leur part d'ouvrir une négociation à l'effet d'assurer à la Belgique, s'il est possible, moyennant de justes compensations, la possession du grand-duché de Luxembourg; les cinq puissances inviteraient en même temps la Confédération germanique à suspendre, pendant le cours de cette négociation, la mise à exécution des mesures arrêtées pour l'occupation militaire du grand-duché[2] »

(page 187) Tout en maintenant sa protestation du 1er février, le Congrès belge avait, par son décret du 2 juin, autorisé le ministère à terminer les contestations territoriales au moyen de sacrifices pécuniaires.

Le protocole de la Conférence de Londres du 21 mai, de même que le décret du Congrès belge du 2 juin, était insuffisant; mais ces deux actes préparaient les esprits à une transaction: c'était le seul avantage qu'il fallait y chercher.

Le ministère avait, depuis longtemps, conçu un plan de négociation. Ce plan avait été communiqué au prince Léopold. L'exécution en fut confiée à MM. Devaux et Nothomb, nommés commissaires près de la Conférence de Londres, par un arrêté du 4 juin. .

. Le même jour, le Congrès avait nommé une députation chargée de porter au prince Léopold le décret d'élection; cette députation se composait de MM. de Gerlache, président, comte F. de Mérode, Van de Weyer, abbé de Foere, comte d'Arschot, H. Vilain XlIII, baron Osy, Destouvelles, comte Duval de Beaulieu et Thorn.

(page 188) Les deux missions étaient distinctes: les membres de la députation étaient les agents du Congrès, les deux commissaires ceux du ministre des affaires étrangères, M. Lebeau. La tâche de la députation se bornait à offrir la couronne au prince élu et à recevoir sa réponse; la tâche des commissaires était d'obtenir de la Conférence un arrangement acceptable par la Belgique.

MM. Devaux et Nothomb arrivèrent à Londres le 7 juin; dès le lendemain, il purent exposer verbalement au prince Léopold le système de négociation qui avait déjà fait l'objet d'un mémoire.

L'origine des dix-huit articles étant ignorée et le sens en ayant été souvent méconnu, nous croyons devoir entrer dans quelques détails sur la négociation particulière qui a amené cet acte mémorable[3].

Exposons d'abord le plan conçu avant l'élection.

(page 189) Appelée à fixer les conditions de la séparation des deux pays, la Conférence avait procédé d'après ce principe de droit, qu'au jour de la dissolution d'une communauté, chaque partie reprend ce qu'elle a mis en commun.

Ce principe posé en droit, il ne restait plus qu'à rechercher, en fait, quelle était la situation respective des deux parties immédiatement avant leur union.

L'histoire était là pour répondre à cette question. En décembre 1813, la Hollande s'était reconstituée à titre, non de peuple nouveau, mais de peuple ancien, et en revendiquant son ancien territoire; de 1790 à 1813, il avait était porté atteinte à cette nationalité par la conquête; on n'eut aucun égard à cette époque intermédiaire, et l'on remonta jusqu'aux jours de l'indépendance hollandaise, en admettant que la Hollande avait fait en 1813 sa restauration nationale.

La Conférence trouva donc la Hollande reconstituée d'après ses anciens droits, avant son union avec la Belgique; celle-ci n'avait pas d'ancienne nationalité parfaite à produire. L'assimiler aux Pays-Bas autrichiens, c'eût été la priver de la principauté de Liége, du duché de Bouillon, de Philippeville, de Marienbourg et des territoires de ces deux villes.

Et ici, il faut bien l'avouer aujourd'hui, la révolution belge échappa à. un grand danger: on peut soutenir que, sans violer aucun principe de droit public, la diplomatie aurait pu considérer, d'un côté, la Hollande comme représentant l'ancienne Hollande, de l'autre, la Belgique comme représentant les Pays-Bas autrichiens, et regarder les pays en dehors de ces deux délimitations comme (page 190) des acquisitions communes à partager entre les deux peuples ainsi reconstitués.

. La Conférence n'alla pas jusque-là: elle déclara que la Hollande reprendrait son territoire de 1790 et rien de plus, attribuant à la Belgique nouvelle le reste du royaume-uni des Pays-Bas.

C'était là le principe fondamental du protocole du :20 janvier, qui portait:

« Art. 1er. Les limites de la Hollande comprendront tous les territoires, places, villes et lieux qui appartenaient à la ci-devant république des provinces-unies des Pays-Bas en 1790.

Art. 2. La Belgique sera formée de tout le reste des territoires qui avaient reçu la dénomination de royaume des Pays-Bas dans les traités de l'année 1815… »

On ne pouvait s'attendre à voir modifier ces deux dispositions qui formaient en quelque sorte la substance de l'acte; mais il fallait les féconder par des développements nouveaux; et ici s'offraient des conséquences et des ressources inattendues.

La Conférence avait ajouté à l'article 2, que nous venons de citer, la clause suivante: « sauf le grand-duché de Luxembourg.. qui possédé à un titre différent par les princes de la maison de Nassau, fait et continuera à faire partie de la Confédération germanique. » La question belge-luxembourgeoise et la question belge-hollandaise étaient ainsi résolues dans le même acte; confusion qu'il importait de faire cesser.

Ce premier point a été exposé dans la note suivante:

« Le protocole du 21 mai, n° 24, avait le double but: 1° de faciliter l'adhésion des Belges au protocole du (page 191) 20 janvier 1831; 2° de faciliter l'acceptation de S. A. R. le prince Léopold.

« La rédaction de ce protocole, loin d'atteindre ce but et de diminuer les difficultés, les a, au contraire, augmentées et compliquées davantage.

« En effet, en n'énonçant pas expressément que, dans la négociation pour le Luxembourg, il ne s'agira pour la Belgique que d'une indemnité pécuniaire, en se servant, au contraire, du mot équivoque de compensation, on fait croire aux deux parties que la Conférence a en vue un échange de territoire, c'est à dire l'échange du Luxembourg contre une grande partie du Limbourg.

« De là, pour la Belgique, situation pire que sous le protocole du 20 janvier et confusion des questions du Limbourg et du Luxembourg: questions bien distinctes, de nature et de caractère tout différents, dont la solution peut devenir facile si on les isole l'une de l'autre, mais qui, confondues, sont insolubles.

« Le protocole du 21 mai, s'il faut l'entendre dans le sens d'un échange territorial, est un acte plus onéreux que le protocole du 20 janvier 1831. En effet, d'après le protocole du 20 janvier, la Hollande ne peut réclamer dans le Limbourg que la moitié de Maestricht, 53 villages épars dans la province et la petite ville de Venloo . D'après le protocole du 21 mai, elle réclamerait, à titre d'échange contre le Luxembourg, la majeure partie du Limbourg, enlèverait à la Belgique tout commerce de transit avec l'Allemagne et s.'assurerait ainsi un monopole au préjudice non seulement de la Belgique, mais de l'Angleterre, de l'Allemagne et surtout des provinces rhénanes.

« Les difficultés, loin d'être aplanies comme le voulait (page 192) la Conférence, sont donc plus grandes qu'avant le protocole du 21 mai. Quel est aujourd'hui le moyen de les diminuer?

« C'est que la Conférence donne du protocole du 21 mai une explication ou interprétation dans l'un ou l'autre des deux sens suivants:

« 1° Qu'elle déclare que par le mot compensations on a entendu des indemnités pécuniaires. Ou bien, 2° qu'elle déclare que la question luxembourgeoise, étant en dehors de la question belge-hollandaise, restera aussi en dehors des protocoles.

« A ce sujet, il faut bien remarquer combien sont différentes de nature la question belge-hollandaise et la question belge-luxembourgeoise.

« Les parties, dans la première question, sont la Belgique et la Hollande; dans la seconde, ce n'est ni la Hollande ni le roi de Hollande, mais, d'une part, l'ancien grand-duc, la maison de Nassau, la Confédération germanique et, d'autre part, la Belgique. Ce n'est pas là un litige entre la Belgique et la Hollande, car la Hollande. n'y est pour rien. La question du Luxembourg est donc d'une tout autre nature que la question belge-hollandaise. Elle peut en être entièrement séparée; logiquement même, elle le doit.

« Quel a été le but des cinq puissances à l'égard de la Belgique et de la Hollande? Reconnaissant la nécessité d'une séparation complète entre les deux nations, les cinq puissances ont voulu poser les bases de séparation entre l'une et l'autre. Elles ont déterminé d'après quel principe serait tracée la ligne qui devait désormais séparer le territoire de la Hollande de celui de la (page 193), Belgique, c'est à dire la limite du nord de la Belgique et du sud de la Hollande. Or, la question du Luxembourg, qu'elle soit décidée dans un sens ou dans un autre, ne change rien à cette limite. Encore une fois, ce n'est point une question de limite entre la Belgique et la Hollande, ce n'est point une question qui concerne les bases de séparation entre les deux nations, car la nation hollandaise n'est pour rien dans la question du Luxembourg: c'est une possession contestée entre la Belgique et le grand-duc, qui ne concerne pas plus la question belge-hollandaise que ne le ferait une possession contestée entre la Belgique et la Prusse, ou entre la Belgique et la France ou toute autre puissance étrangère.

« Les puissances n'ayant voulu que poser les bases de séparation entre les deux peuples, il est juste et logique de se borner à la limite du nord de la Belgique, qui seule concerne les deux peuples, et de laisser la contestation du Luxembourg se décider ultérieurement entre les parties qu'elle concerne, c'est à dire le futur roi des Belges et l'ancien grand-duc.

« Que la question du Luxembourg soit donc distraite de la question belge-hollandaise comme étant d'une nature différente; que, par ce moyen, la question de la limite à tracer entre les territoires belge et hollandais soit dégagée de toute autre et puisse être discutée isolément par les deux parties; que la décision de la question du Luxembourg soit ainsi différée jusqu'après l'avènement du futur roi des Belges;

« Que le status quo soit maintenu dans le Luxembourg durant le litige;

(page 194) « Que le maintien du status quo ne soit pas un obstacle à la reconnaissance immédiate du roi des Belges. .

« Une pareille disposition serait de nature à faire disparaître les plus grandes difficultés de la question belge, qui, se trouvant réduite à la contestation relative à la limite du nord, serait susceptible d'une solution prompte et satisfaisante. »

La question luxembourgeoise étant considérée comme distincte de la question belge-hollandaise proprement dite, celle-ci ne portait plus que sur deux objets: la rive gauche de l'Escaut et le Limbourg.

Occupons-nous d'abord de la rive gauche de l'Escaut.

La Belgique réclamait ce territoire pour trois motifs:

1 ° Comme garantie de l'écoulement des eaux des Flandres ;

2° Comme garantie de l'usage du canal de Terneuzen;

3° Comme garantie de la navigation de l'Escaut.

Les bases de séparation du 27 janvier avaient refusé à la Belgique la possession de la rive gauche de l'Escaut, en gardant le silence sur les deux premières garanties et en s'exprimant d'une manière générale sur la troisième.

Le premier démembrement des Flandres date du traité de Munster de 1648; la convention particulière de 1664 n'a eu pour objet que quelques rectifications partielles, et cet état de choses a été reconnu par le traité de Fontainebleau de 1785, le dernier traité conclu par les souverains des Pays-Bas autrichiens avec la Hollande indépendante.

La France ayant conquis la rive gauche de l'Escaut sur la Hollande, en a obtenu la cession par le traité de La Haye du 16 mai 1795; cette cession a été annulée (page 195) par le traité de Paris du 30 mai 1814, la France s'étant désistée de toutes ses conquêtes pour rentrer dans les limites du 1er janvier 1792.

Au profit de qui la cession de 1795 avait-elle été révoquée en 1814?

Évidemment au profit de la Hollande, qui s'était reconstituée dès le mois de décembre 1813.

.La Belgique de 1830 pouvait-elle se prévaloir de la cession de 1795?

Évidemment non, car

1° Originairement, cette cession avait été faite à la France;

2° De 1795 à 1814-, la rive gauche de l'Escaut avait été administrativement réunie à des départements français; mais cette réunion administrative n'était d'aucune valeur en droit public.

Voilà pour le droit; en fait, la rive gauche de l'Escaut était restée immobile; ses habitants ne s'étaient pas associés à la révolution.

Sans doute, la nature des choses, les convenances réciproques exigent le retour de la rive gauche de l'Escaut aux Flandres démembrées depuis 1648; mais pouvait-on faire de cette mesure réparatrice, de cette acquisition, de cette conquête, la condition sine qua non de l'indépendance belge?

L'homme politique remplissait la tâche du moment en s'efforçant d'atteindre indirectement le triple but attaché à la possession de ce territoire. Ainsi, en ajournant cette question, il devait stipuler expressément les trois garanties que nous avons énumérées.

Ajoutons qu'en ceci il n'y a pas eu de surprise; l'un (page 196) des commissaires avait, comme membre du Congrès, publiquement manifesté son opinion sur la question de la rive gauche de l'Escaut[4].

Cette question étant ainsi indirectement résolue, restait la question du Limbourg seule.

Une étude approfondie des bases de séparation avait fait découvrir dans cet acte des conséquences qui, on peut le supposer, avaient échappé à ceux-là mêmes qui en étaient les auteurs; la Conférence avait posé au profit de la Hollande le principe du postliminii de 1790; la Hollande l'avait accepté. Que la Conférence en posant ce principe, que la Hollande en l'acceptant, n'en aient pas vu toute la portée, n'importe. Le texte était là; il existait indépendamment. du sens qu'on avait pu y attacher, il était devenu la loi des parties.

On avait cru qu'en 1790 la république de Hollande avait possédé en entier le territoire désigné. sous la dénomination moderne de provinces septentrionales; c'était une erreur historique: la Hollande avait, en 1830, réclamé les provinces septentrionales et, de plus, les possessions qu'elle avait eues dans le Limbourg en 1799; or, il se trouvait que le principe qui lui rendait ces dernières possessions lui en enlevait d'autres au cœur même des provinces septentrionales. Cette importante découverte a fait l'objet du mémoire dont nous avons parlé et que nous transcrivons en partie.

« Le protocole du 20 janvier assigne à la Hollande le status quo de 1790.

(page 197) Tout ce qui est en dehors de ce status quo reste à la :Belgique.

« La condition de la Hollande n'est pas la même que celle de la Belgique: la Hollande, en revendiquant tel ou tel territoire, est tenue de prouver qu'elle le possédait en 1790; la Belgique, en revendiquant tel ou tel territoire, n'est pas tenue de prouver qu'elle le possédait en 1790, elle est tenue de prouver que la Hollande ne le possédait point à cette époque.

« A la Belgique incombe une preuve toute négative, à la Hollande une preuve affirmative.

« La question se réduit donc à savoir quel était l'état de possession de la république des Provinces-Unies en 1790.

« Les termes mêmes dans lesquels la question est posée annoncent que tous les traités qui peuvent être intervenus depuis 1790 sont considérés comme non avenus.

« En 1790, la république des Provinces-Unies possédait la ville de Venloo et 53 villages compris dans le territoire de la province actuelle du Limbourg, et partageait avec le prince-évêque de Liége la souveraineté de la ville de Maestricht. Mais à cette époque la république n'avait pas la souveraineté entière de Berg-op-Zoom, ni aucune des possessions qui ont été cédées à la république batave par le traité du 15 janvier 1800 et qui sont actuellement comprises dans le territoire des provinces septentrionales.

« En vain dira-t-on avec les journaux hollandais que cette cession ayant été faite à titre onéreux (art. 5 du traité), le traité doit subsister.

(page 198) « Le protocole du 20 janvier anéantit le traité du 15 janvier 1800, au détriment de la Hollande, comme il anéantit le traité du 16 mai 1795 au détriment de la Belgique.

« Ces faits historiques étant établis, l'article 4 du protocole du 20 janvier nous offre des ressources inattendues.

« Cet article porte: « Comme il résulterait des bases posées dans les. articles 1 et 2 que la Hollande et la Belgique posséderaient des enclaves sur leurs territoires respectifs, il sera effectué, par les soins des cinq cours, tels échanges et arrangements entre les deux pays qui leur assureraient l'avantage réciproque d'une entière contiguïté de possession et d'une libre communication entre les villes et fleuves compris dans leurs frontières.

« De fausses notions historiques ont fait croire qu'il ne s'agissait dans cet article que des enclaves du Limbourg; d'après ce qui précède, il y a des enclaves dans le Brabant septentrional et dans d'autres provinces du Nord.

« Ce mémoire était appuyé de nombreuses pièces justificatives. Nous nous bornerons à en extraire la liste des enclaves belges. et celle des enclaves hollandaises.

ENCLAVES HOLLANDAISES.

Maestricht.

« La part de souveraineté exercée dans cette ville, (page 199) en 1790, par la Hollande concurremment avec le prince de Liége[5].

Venloo.

« Cette ville,qui a signé l'union d'Utrecht en 1579, appartenait en entier à la Hollande en 1790.

Villages de la généralité[6].

« Les villages connus sous cette dénomination et qui, en 1790, appartenaient à la Hollande, étaient au nombre de 53; ils étaient disséminés dans la province: 13 étaient situés sur la rive gauche, 40 sur la rive droite de la Meuse.

ENCLAVES BELGES[7]

Maestricht.

« La part de souveraineté exercée dans cette ville, en 1790, par le prince de Liége concurremment avec les États-Généraux de Hollande.

Berg-op-Zoom.

« La part de souveraineté exercée, en 1790, dans le marquisat et la ville de ce nom, par l'électeur palatin.

(page 200)


Huyssen, Malbourg et Sevenaar.

« Huyssen et Sevenaar, deux petites villes, avec le village de Malbourg et leur territoire, sont comprises dans la province actuelle de la Gueldre.

« En 1790, ces possessions faisaient partie du duché de Clèves, qui appartenait au roi de Prusse.

« Elles ont été cédées à la république batave par le traité du 15 janvier 1800 et celui du 14 novembre 1802; au royaume des Pays-Bas, par l'article 56 du traité de Vienne.

« Ces enclaves auraient assuré à la Belgique le cours du Rhin sur plus de deux lieues d'étendue.

Oeffelt.

« Le village d'Œffelt, situé dans le Brabant septentrional, sur la Meuse, appartenait, en 1790, au roi de Prusse, comme duc de Clèves, et a été cédé à la république batave par le traité du 15 janvier 1800.

Boxmeer.

« Ce village du Brabant septentrional appartenait en toute souveraineté, en 1790, au comte Sheerenberg, et a été cédé à la république batave par le traité de 1800.

Ravenstein.

« La seigneurie de Ravenstein comprenait, outre cette ville, quatorze villages, et appartenait en 1790, (page 201) en toute souveraineté, à l'électeur palatin; c'est ce que les États-Généraux de Hollande avaient reconnu après une longue contestation.

« La souveraineté de cette seigneurie a été cédée à la république batave par le traité de 1800.

Meghen.

« Le comté de Meghen renfermait en 1790, outre la petite ville de ce nom, les trois villages de Haren, Macheren et Tuffelen, et était un fief de la cour féodale de Brabant, à Bruxelles; il était entièrement indépendant des États-Généraux. Il a été cédé à la république batave par le traité de 1800 et est compris dans le Brabant septentrional.

Gemert.

« Gemert était une commanderie et une seigneurie souveraine appartenant à l'ordre teutonique; le grand maître de cet ordre a eu, au sujet de cette souveraineté, de grandes contestations avec les États-Généraux; ceux-ci se désistèrent de leurs prétentions en 1662. Le village de Haandel dépendait de Gemert.

« Cette possession, comprise dans le Brabant septentrional, a été cédée à la république batave par le traité de 1800.

Hilvarenbeck.

« Hilvarenbeck, grand bourg à deux lieues de Bois-le-Duc, et dont dépendaient trois villages, Dissen, Riel (page 202) et Westenbeers, appartenait pour moitié, en 1790, à la maison de Korte.

« Toutes ces possessions ont été cédées à la Hollande par le traité de 1800. »

C'étaient .là des résultats bien bizarres, mais incontestables.

Le maintien de ces enclaves convenait aussi peu à la Hollande qu'à la Belgique; et il était nécessaire de rétablir, à l'aide d'un échange, l'unité et la contiguïté territoriale.

Bien que les rédacteurs des protocoles du 20 et du 27 janvier ne se fussent pas nettement rendu compte de toutes les conséquences du principe qui leur servait de point de départ, ils avaient prévu un échange d'enclaves, en déclarant qu'il s'effectuerait par les soins des cinq puissances; on pouvait se défier de la Conférence, surprise elle-même de la portée de ses actes, et juger préférable de remettre l'échange à la volonté des parties.

Le lecteur nous pardonnera d'être entré dans ces détails historiques; le système des enclaves n'était ni une chimère, ni une déception; il reposait sur un texte formel et sur des faits certains.

 

La question territoriale pouvait donc se résumer dans les points suivants:

1° Reconnaître en faveur de la Hollande l'état de possession de 1790;

2° Séparer la question luxembourgeoise de la question belge-hollandaise, proprement dite, en stipulant la possession provisoire du grand-duché en faveur de la Belgique;

(page 203) 3° Abandonner la question de la rive gauche de l'Escaut, en obtenant toutes les garanties attachées à cette possession;

4° Chercher dans l'échange des enclaves les moyens de conserver la totalité ou la presque totalité du Limbourg, en faisant déclarer en termes exprès que cet échange serait facultatif et que la Hollande n'aurait sur Maestricht d'autres droits que ceux qu'elle exerçait en 1790.

Nous passons à l'exposé des autres modifications qu'il était possible d'introduire dans les bases de séparation.

Nous avons déjà parlé des dispositions relatives. à l'écoulement des eaux des Flandres, au canal de Terneuzen et à l'Escaut. Les traités de Vienne ont créé un droit public nouveau, en proclamant la liberté des rivières et des fleuves; quelques parties de ces traités étaient restées incomplètes. Il fallait placer la Belgique dans le droit commun et saisir cette occasion pour résoudre une des plus graves questions agitées depuis 1815, celle de la navigation des eaux intermédiaires entre l'Escaut et le Rhin.

La Conférence, dans les bases de séparation, avait proposé de confondre toutes les dettes, sans acception d'origine, et de mettre 16/31 à la charge de la Belgique; à cette proposition il fallait substituer le principe du partage des dettes d'après leur origine.

Enfin, la Conférence, en déclarant la Belgique neutre, n'avait pas cru nécessaire d'ajouter que cette neutralité ne portait aucune atteinte à la souveraineté intérieure ni au droit de légitime défense: addition qu'on pouvait réclamer pour dissiper quelques inquiétudes.

(page 204) Tel était le plan de la nouvelle négociation; on conçoit que la moindre indiscrétion pouvait être fatale.

La négociation avait déjà fait de notables progrès lorsque les commissaires se décidèrent à prendre l'avis des membres de la députation, restés jusque-là étrangers à leurs travaux; une communication toute confidentielle leur fut faite le 17 juin. Jamais secret n'a été plus religieusement gardé et, dans la longue et orageuse discussion des dix-huit articles, pas un mot n'est venu trahir les deux négociateurs[8].

Enfin, le 19 juin, le projet présentait la rédaction suivante :

« Art. 1er. Des bases de séparation du :27 janvier 1831, maintenu.

«  Art. 2. La Belgique sera formée de tout le reste des territoires qui avaient reçu la dénomination du royaume des Pays-Bas dans les traités de l'année 1815.

«  Il est entendu que, dans toute souveraineté indivise en 1790 et, notamment, dans la ville de Maestricht, la Belgique aura droit à la part qui, à cette époque, n'appartenait pas à la république des Provinces-Unies.

«  La question du Luxembourg, ne concernant point les limites de la Hollande, donnera lieu à des négociations ultérieures, et le status quo actuel sera maintenu (page 205) dans le Luxembourg, jusqu'à conclusion des négociations.

« Art. 3. Des bases de séparation. »

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« Les cinq grandes puissances interposeront leurs bons offices pour que la Belgique participe librement à la navigation du Rhin par les eaux intérieures.

« La Belgique conservera le libre usage des canaux de Gand à Terneuzen et du Zuid-Willems-vaart, construits pendant l'existence du royaume des Pays-Bas.

« L'écoulement des eaux des Flandres sera réglé de manière à prévenir toute inondation.

« Art. 4. Comme il résulterait, néanmoins, des bases posées dans les articles 1er et 2, que la Hollande et la Belgique posséderaient des enclaves sur leurs territoires respectifs, il sera fait à l'amiable, entre la Hollande et la Belgique, des échanges qui pourraient être jugés d'une convenance réciproque.

« L'évacuation de la citadelle d'Anvers et des forts belges, sur l'une et l'autre rive de l'Escaut, aura lieu indépendamment des arrangements relatifs à ces échanges.

« L'article 3, relatif à la liberté de la navigation des rivières et des fleuves, recevra immédiatement son exécution.

« Art. 5. § 1er de l'article 5 des bases, maintenu; § :2 du même article, biffé.

« Art. 6. Des bases, maintenu: en ajoutant: sans pouvoir toutefois s'immiscer dans les affaires intérieures.

« Art. 7. Des bases, maintenu, en ajoutant: sans (page 206) perdre toutefois le droit de se défendre contre des agressions étrangères.

« Art. 8. Des bases, maintenu.

« Art. 9. Le partage des dettes aura lieu de manière à faire retomber sur chacun des deux pays la totalité des dettes qui lui appartenaient avant la réunion, et à diviser dans une juste proportion celles qui ont été contractées en commun.

«  Art. 10. Des commissaires liquidateurs, nommés de part et d'autre, se réuniront immédiatement à Maestricht : le premier objet de leur réunion sera d'examiner de quelle manière la Belgique pourra, même avant la liquidation définitive, contribuer provisoirement au paiement d'une part dans les intérêts.

«  Art 11. Les cinq grandes puissances ne s'immisceront, autrement que par bons offices, dans aucune autre affaire qui pourrait intéresser la Hollande et la Belgique. »

 

Ce projet fut successivement amendé dans quelques parties et augmenté de plusieurs articles; le 25 juin, la rédaction définitive en fut arrêtée à Marlboroughouse; le 26, l'acte fut signé au Foreign-Office[9]l.

Le prince Léopold reçut solennellement la députation (page 207) belge le 27, à neuf heures du soir, et accepta la couronne en ces termes: « J'accepte l'offre que vous me faites, bien entendu que ce sera au Congrès des représentants de la nation à adopter les mesures qui seules peuvent constituer le nouvel État, et par là lui assurer la reconnaissance des États européens. » Son Altesse Royale s’exprimait d'une manière plus précise sur le sens de son acceptation, dans une lettre à M. le régent, qui fut rendue publique: « Aussitôt que le Congrès aura adopté les articles que la Conférence de Londres lui propose, je considérerai les difficultés comme levées pour moi et je pourrai me rendre immédiatement en Belgique. »

C'est sous ce point de vue qu'il faut considérer la résolution que le Congrès était appelé à prendre. (page 208) Adoptera-t-on les dix-huit articles? telle était la forme apparente de la question qui, en réalité, devait se poser ainsi: L'élection du prince Léopold sera-t-elle maintenue ou révoquée?

La réponse du prince Léopold et les dix-huit articles furent communiqués au Congrès le 29 juin; la discussion publique s'ouvrit le 1 er juillet[10] et se prolongea jusqu'au 9, au milieu de circonstances qui, probablement, ne se reproduiront pour aucun des hommes de la génération contemporaine; ce n'est pas dans un résumé qu'on pourrait donner une idée de ces assauts de la tribune qui, se répétant pendant neuf jours, semblent presque au dessus des forces humaines; ces temps sont déjà loin de nous, et il n'est guère resté qu'un souvenir dans les esprits, c'est celui de l'impression extraordinaire produite par le discours de M. Lebeau[11] 2.

L'opposition usa toutes ses forces dans les premières séances, et elle était parvenue à ébranler l'assemblée:

à la fin de la séance du 2, M. Van de Weyer offrit un point d'arrêt à quelques esprits indécis, en proposant un amendement ainsi conçu: « Le Congrès, en adoptant (page 209) les propositions de la Conférence, entend bien charger le gouvernement d'exiger ces deux points: 1 ° que les enclaves en Hollande, reconnues appartenir à la Belgique par l'article 2 des préliminaires, seront reçues comme équivalents de Venloo et de la part des droits de la Hollande sur Maestricht, et que, pendant l'arrangement,. aucun de ces territoires ne sera rendu; et 2° que le status quo du Luxembourg, sous la garantie des puissances, sera maintenu jusqu'à la conclusion des négociations sur l'indemnité. »

Si la minorité s'était habilement ralliée à cette proposition, la majorité se serait divisée; l'amendement aurait pu être adopté par une fraction de la majorité réunie à l'opposition, et, par cette tactique, toutes les combinaisons politiques auraient échoué contre un écueil imprévu. Heureusement, la minorité se renferma dans le système négatif le plus absolu; au moment du vote, M. Van de Weyer put retirer son amendement sans réclamation, et les dix-huit articles furent adoptés par 126 voix contre 70[12].



[1] C'est le premier acte de la Conférence où se trouve le nom du prince Léopold.

Le cabinet de La Have était à cette époque tellement convaincu que l'adhésion donnée aux bases de séparation équivalait à une abdication de souveraineté sur la Belgique, qu'il ne protesta point contre l'espèce d'appel fait au prince Léopold par la Conférence de Londres. (Voyez le Précis des négociations du comte de Nesselrode, du 27 février 1832, Papers relative to the affairs or Belgium, B. 2e part., n° 80.) (Note de la 3" édition.)

[2] De retour à Bruxelles, lord Ponsonby s'abstint de communiquer au gouvernement belge le texte du protocole n° 24, du 21 mai, et il se borna à écrire à M. Lebeau la fameuse lettre qui fut lue au Congrès dans la séance du 28.

Les plénipotentiaires hollandais, par deux notes du 6 juin, protestèrent contre la partie de la lettre de lord Ponsonby, relalive à la cession gratuite du Luxembourg, et insistèrent sur la mise à exécution des bases de séparation. Le même jour; la Conférence rappela lord Ponsonby et transmit des explications aux plénipotentiaires hollandais.

Le général Belliard reçut également l'ordre de son gouvernement de quitter Bruxelles. (Protocole n° 25, du 6 juin 1831.) (Note de la 3e édition.) Le général Belliard revint à Bruxelles; lord Ponsonby reçut une autre destination et fut remplacé par sir Robert Adair.

M. White donne d'intéressants détails sur le voyage de lord Ponsonby à Londres et sur les motifs qui ont engagé ce diplomate à écrire la lettre du 28 mai, lettre qui déplut à Bruxelles comme défavorable et qui fut désavouée à Londres comme trop favorable à la Belgique. Révolution belge, III, 87. (Note de la 4e édition.)

 

[3] L'auteur de l'ouvrage: La Belgique et la révolution de juillet, p. 238, M. de Bécourt, annonce qu'il suivra ce récit; toutefois, p. 241, note, il présume que les réclamations des commissaires belges ont été écartées, à l'exception de celle qui concernait la moitié de Maestricht, et il suppose, p. 244, que les mêmes commissaires acceptèrent la décision des premiers protocoles qui déniaient le Luxembourg à la Belgique.

Il y a là une double erreur.

Il est vrai que les dix-huit articles se bornent à attribuer à la Belgique dans Maestricht la part qui, en 1790, n'appartenait pas à la Hollande; mais ils reproduisent le principe général suivant lequel la Hollande ne devait reprendre que ce qu’elle possédait en 1790; la disposition concernant Maestricht est une conséquence de ce principe, conséquence. qui a paru si exorbitante, que les commissaires belges crurent prudent de la faire énoncer d'une manière expresse.

Loin d'accepter la décision des premiers protocoles, quant au Luxembourg, les commissaires obtinrent de la Conférence qu'il serait ouvert une nouvelle négociation durant laquelle la Belgique resterait en possession de tout ce qu'elle occupait dans le grand-duché. (Note de la 4e édition.)

[4] M. Nothomb, séance du 28 mai 1831 (p. 27, Recueil des discours).

[5] Voyez l'excellente brochure de M. POLAIN : De la souveraineté indivise des évêques de Liége et des États-Généraux de Hollande sur Maestricht. Liége, juillet 1831.

[6] Voyez la Description géographique et historique du Brabant hollandais et de la Flandre hollandaise. Bruxelles, 1788.

 

[7] Nous renvoyons à la géographie ancienne, citée dans la note précédente, et aux anciennes cartes.

 

[8] On trouve des détails complets et même intimes sur la négociation dans la notice biographique de M. Lebeau par TH. JUSTE, 1863, p. 43, et dans celle de M. Nothomb, par le même, 1874, p. 23.

Nous signalons particulièrement la note, p. 65, de celle-ci, où le système des enclaves est défendu contre M. Thonissen, qui en a contesté le fondement, p. 175, l, de son ouvrage: La Belgique sous le règne de Léopold Ier. (Note de la 4e édition.)

[9] Les commissaires, à leur arrivée à Londres, le 7 juin, avaient été informés de la résolution prise la veille par la Conférence, résolution qui semblait faire naître de nouveaux obstacles. (Voyez la note, p. 186.) Dans l'intervalle qui s'est écoulé depuis la résolution prise le 6 juin (protocole n° 25) jusqu'à la rédaction des dix-huit articles du 26 juin (protocole n° 26), il n'est intervenu aucun acte de la part de la Conférence. Les plénipotentiaires hollandais, restés en dehors de la négociation ouverte avec le prince Léopold et les deux commissaires belges, adressèrent, sous la daté du 22 juin, une note à la Conférence pour réclamer la mise à exécution des bases de séparation. (Papers relative to the affairs of Belgium, B.1re part., n° 17.) La Conférence, ayant rédigé les dix-huit articles, chargea le baron de Wessenberg de les porter à La Haye.

Dès le 8 juillet, le baron de Wessenberg rendit compte à la Conférence des objections qui lui étaient faites, objections puisées principalement dans l'interprétation donnée à Bruxelles des dix-huit articles. La Conférence, sous la date du 12 juillet, transmit quelques explications au baron de Wessenberg, déclarant, entre autres, qu'elle n'était nullement liée par l'interprétation donnée ailleurs des dix-huit articles, qu'elle n'avait entendu ni confirmer ni invalider les droits acquis à titre onéreux par la Hollande postérieurement à l'année 1790. (Annexe E du protocole n° 28, du 25 juillet 1831.) Le même jour, 12 juillet, la Conférence avait reçu la notification officielle de l'adhésion pure et simple du Congrès belge aux dix-huit articles. (Protocole n° 27, du 12 juillet 1831.)

Par sa dépêche du 17 juillet, le baron de Wessenberg transmit à la Conférence le refus définitif du cabinet de La Haye.

La Conférence se réunit le 25, et décida que, nonobstant ce refus, il serait ouvert une négociation pour arriver à un traité. (Protocole n° 28, du 25 juillet 1831, et Annexes.) (Note de la 3° édition.)

[10] La discussion publique fut précédée d'un comité secret le 1er juin, où M. Nothomb révéla le projet de partage, révélation qui ne trouva aucune créance. Il n'osait dire qu'il avait reçu les confidences du prince Léopold et de lord Palmerston. Il y est revenu dans la discussion des vingt-quatre articles (p. 43 du Recueil des discours, 26 octobre 1831). M. Thonissen (p. 212, 1) regarde ces craintes comme exagérées, l'idée n'ayant jamais pris de caractère sérieux. Elle aurait pris ce caractère si le rejet des dix-huit articles avait empêché l'avénement du Roi, si le rejet des vingt-quatre articles avait amené son abdication. La monographie de Palmerston, par Bulwer, doit avoir détrompé les plus incrédules. (Note de la 4e édition.)

[11] M. Nothomb, à qui sa mission à Londres donnait une nouvelle autorité, parla dans la séance du 4 juillet 1831, p. 23, du Recueil des discours.

 

[12] Cette note (non reprise dans la version numérisée) reprend l’appel nominal (Note de la troisième édition).